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@ LECTURES CLE Bm POU MUS | Le Comte de Monte-Cristo ALEXANDRE OUNAS +. Quand Edmond Dantas arrive au port de Marseille, tout lui sourit : il va étre nomié capitaine du navire Le Pharaon et il est aimé de la belle Mereédes, Malheureusement, un horrible complot mettra fin a ce bel avenir. Aprés plusieurs années passées dans la prison du chateau d'lf, Dant?s renaitra sous les traits du comte de Monte-Cristo pour accomplir sa terrible vengeance. a ‘ize également disponible en eassete NIVEAU 1 400 A 700 MOTS NIVEAU 2 : 700 A 1200 MOTS NIVEAU 3: 1200 81700 MOTS: [NIVEAU 4 : PLUS DE 1700 MOTE CLE NERA 9 "azo9 S.E.P. InsrTuTO. POLITENHISD ENERO OE LENQU!S EXTRENJERAS ‘UNIDAD SANTO TOMAS 0169 2, Que fait Dantés pour pouvoir aider son compa- ‘gnon dinfortune & creuser ? 3. Comment Pubbé Faria occupe-Lil ses journées aut chateau dit? 4, Quel est le secret de abe Faria? 5. Comment Dantes parvient-il & s’échapper du cha- teau dif? ‘Troisiéme partie 1. Of et dans quelles circonstances Ye comte de ‘Monte-Cristo a-til rencontré Ie fils de Mercédes ? 2, Pour quelle raison Monte-Cristo va-til voir Danglars? 8. Pourquoi Albert de Morcer? veut-il se battre avec Beauchamp’? “4. Qui ést Haydéd"et pourquoi témoigne-t-elle contre le corte de Moret! ? 5. Quest-ce que fait Danglars quand i comprend quil est perdu? 6... Comment Dantés se venge+t-il de Danglars ? 7, Pourquoi Danté’s pardonne-til & Danglars ? Ce epee se seeeeeee ee eee eae eee ‘Baion “BAW Mostrations : Ana Santos ‘Couverture: Richard MetiowtSYGMA [N° de projet 10102862 -(¥)- 166 = COSBA 80) - anver 2009 trmprimé en France par imprtmerie France Quotey -46001 Cahors IN éhrmpression: 263, eer eae a QUESTIONS POUR a Premidre partie 1. Quiest-il arrivé au capitaine Leclére pendant le voyage du Pharaon ? Pourquoi Dantés s'est-il arrété & ile d’Ebe ? 8, Pourquoi Dantes refuse-t-il Galler diner chez ‘M. Morrel ? 4. Quiest-ce que Dantés va faire pendant le congé ‘que lui accorde M, Morrel ? 5. Qui M. Morrel veut-il nommer capitaine du Pharaon? 6, Bst-ce que tout le monde ost d'accord avec ce choix 2 7, Pour quelle raison Fornand veutil se débarrasser de Dantas ? 8. Qu’est-ce que Danglars lui propose de faire ‘Pour obtenir ce quill désire ? Deuxiéme partie 1. En prison, quel événement redonne a Dantas Ven vie de manger alors qu'il se laissait mourir de faim ? ‘Mouillage : action de mettre un bateau @ Yeau ou de Pattacher dans le port. ‘Mouillé : quand Je bateau est attaché, on dit quill est mouillé Navire ; grand bateau construit pour transporter des hommes et des marchandises. P@cheur : personne dont le métier est de prendre des poisons. Pilote : marin antorisé & aider Je capitaine pendant la conduite du batesu. Port: abri au hord de la mer pour recevoir les bateaux. Prendre la mer : naviguer. ‘Second: personne qui aide le capitaine. ‘Trois-mats: bateau possédant trois mats (poteaux) ot sont accrochées les voiles, YVigie : personne chargée de surveiller la mer depuis un endroit élevé pour annoncer Parrivée des bateaux... -62- a a a a aaa YOCABULAIRE La mer et Ja navigation Armateur : personne qui posséde des navires pour le commerce. Barque : petit bateau qu'on fait avancer avec des ramnes, Bateau : construction qui permet de circuler sur Teau, Bord : désigne chaque coté du navire ou méme Ten- semble. Cable : grosse corde tressée pour reterir le bateau au port. Capitaine : chef d'un bateau. Commandant ; officier qui cormmande un navire. (Ie, officier responsable du port.) ‘Bquipage : ensemble des marins d'un navire, le : morceau de terre totalement entouré d'eau. ‘Maneeuvre : mouvement du navire dirigé par le cap- taine, ‘Manceuvrer : effectuer les mangsuvres sur le bateau. ‘Marin : personne qui navigue dans le bateau. ‘Merlan : poisson & la chair légere et fine ~61- — Crest bien, dit Haydée, d'une voix déchirante, tes ondres seront exécutés, Mu es le maitre, Je suis ton esclave, tu as le droit de ne rien voir Le comte frissonne en enterdant parler Haydée, ‘Son coeur bat plus vite, Ses yeux rencontrent ceux de Ja jeune file et-ne peuvent en supporter l'éclat, = Que veux-tu dire, Haydée ? Serais-tu heureuse de ne pas me quitter. ~ Je suls jeune, répond-elle doucement, faime la vie que tu m’as donnée, et je regretterai de mourir, = Cela veut dire que si je te quitte, Haydée = Je mourrai, monsieur, oui ! = Mais tu m'aimes done ? Le comte sent sa poltrine s'élarair et son coeur se ilater ; il ouvre ses bras, Haydée s'y jette en poussant, un eri, = Oh! oui, je Caime ! dit-elle, je Caime comme on aime son pere, son frére, son mari ! Je t'aime comme on aime la vie, car tu es pour inoi le plus beau, le meilleur et le plus grand des étres humains | = Alors, partons ensemble, Haycée, et soyons enfin heureux. Ce mot de toi me fait oublier des années de malheur, Grace & toi, je puis enfin étre heureux. [La haine a dispara du coeur Edmond Dantes et a lissé la place & amour et & la tendvesse, ‘Main dans Ia main, Haydée et Monte-Cristo quit- tent la grotte merveilleuse et se ditigent vers le bateau ‘qui les emmenera loin de toute souffrance et leur fera connaitre le bonheur absolu, ~60- ~ Je suis celui que vous avez vendu, livré, déshono- 76 :Je suis celui sur lequel vous avez marché pour faire fortune ; je suls celui que vous avez fait mourir de faim et de tristesse et qui vous pardonne parce qu'il a besoin luj-méme d’étre pardonné. Je suis Edmond Dantes ! Danglars ne pousse qu'un cri et tombe & genows. ~Relevez-vous, dit le comte, vous avez la vie sauve ; areille chance mest pas arrivée & votre complice. Gardez le million qui reste, Une main ineonnue remettra ‘aux hospices les cing autres que vous avez volés, Le comte part. Le Iendemain, les bandits bandent les yeux de Danglars, le font monter dans une voiture et Yaban- donnent sur la route. Test prés dune rivitre. Ila tres soif et se penche pour bolte, Il eapergoit alors que ses cheveux sont devenus complétement blanes. one Monte-Oristo est retouné dans son palais de Ile de Monte. Cristo ot attend Hayaée, = Ma fille, tof dit-, demain tu seras libre et tu reprendras ta place dans le monde. Je te rends tes, richesses et le nom de ton pere. Haydée palit et dune voix pleine de larmes elle demande ~ Ainsi, mon seigneur, tu me quities ? ~ Haydée ! Haydée ! tu es jeune, tu es belle ; oublie jusqu’a mon nom et sols heureuse. 50 ee ESSE SSS Sea = Crest sans doute le projet du mattre. = Le maftre, qui est-il done ? = Je ne peux pas vous répondre, mais il viendira sQrement vous voir. = Mais gue veut-il ? Que je meure de faim, que je i sois ruiné ? — Je ne sais pas, monsieur. i I vit ainsi pendant douze jours et se rend compte ‘u'll a dépensé cing millions de francs. I devient alors A moitié fou et demande aux bandits de parler avec leur chef, = Vous souffrer ? ini demande I'un des hommes. ~ Oui, beaucoup, répond Danglars. — Cest bon, Je erols que notre chef voudra bien ‘yous parler = Vous vous repentez!, au moins, s’écrie soudain tune voix forte et solennelle qui fait se dresser les che- veux sur la téte de Danglars, = De quoi faut-l que je me repente ? balbutie Danglars. i Du mal que vous avez fait, dit la méme voix. i = Oui, oui, je me repens, dit Danglars. Et un homme apparatt devant Danglars. i —Le comte de Monte-cristo ! dit Danglars ple de I tetreur. 1 = Vous vous trompez, je ne suis pas le comte de | Monte-Cristo, ~ Mais qui @tes-vous done ? a 1. Se vepentr; peneerqwon a mal agi et désiter changer Parse, 58 Vous aver faim ? ~ Vous le saver bien, Je veux un morceau de pain sec, —Trés bien, monsieur, ce sera cent mille francs, ~ Comment, un pain cent mille francs, le méme prix qu'un poulet. Nous ne servons pas & la carte, mais & prix fixe. Quon mange peu, quion mange beaucoup, qu’on mange dix plats ou un seul, c'est toujours le méme chute, ~ Encore cette plaisanterie ! Mon cher ami, je vous déclare que c'est absurde, que cest stupide ! Dites tout de suite que vous voulez. que je meure de faim, ce sera plus vite fait = Mais non, monsieur, Cest vous qui voulez vous. suicider. Payez et mangez. ~ Avec quoi, animal, dit Danglars, = Vous aver six millions de francs, monsieur, vous pouvez donc vous nourrir, Danglars frissonne, il cormprend tout et a peur, I finit par payer le poulet. Le lendemain, il en redemande un autre qu’il mange avec avidite', Mais il meurt de soif et demande de Peau, ~ La bouteille vaut vingt-cing mille francs, répond le bandit ~ Tai impression que vous voulez me laisser sans le sou, dit Danglars. 1. Avec avi: avee un grand appédit ~sT- apparolire portant sur un plateau d'argent un ragni- fique poulet réti | On se croirait au café de Paris, murmure Danglars. = Voila, monsicur, dit le preraier bandit en prenant le plateau des mains du jeune homme. Vous me devez. cent mille francs. En entendant cela, Danglars ouvre des yeux énormes. — Ah, tres drOle, trée drole, murmure-til, eroyant & une plaisanterie: ~ Alors, nous sornmes d'ecord ~ Quoi! s'éerie Danglars, vous ne riez pas? — Nous ne rions jamais, monsicur. — Allons, allons, dit Danglars, tout cela est trés divertissant, mais cela sufflt. Donnez-moi ce poulet et je vous donne cent francs, — Ce nest pas possible, monsiewy, je rearette, dit le bandit, Bt il redone le plateau au jeune homme et hut fait signe de partir Danglars va de nouveau s'étendre sur son kt et reste ainsi quelques heures 1 finit par se lever et demande au bandit, qui est toujours prés de la cellule. = Voyons, monsieur, dites-moi ce que l'on veut de moi? ~ Mais, monsieur, dites plutot ce que vous voulez de nous... Donner, vos ordres et nous les exécuterons, = Je veux... dit Danglars, je veux manger. a a a a | Quand il se néveille, est seul. Hl entend au loin les voix des bandits mais personne ne vient le voir. I reste ainsi seul jusqu’a midi. ‘Alors un homme vient siinstaller & c6té de sa cel- tule et ouvre une casserole dot s’échappe une appé- tissante odeur Coignons frits. Lhomme se met & manger. Danglars se rappelle alors quiil nla pas mangé depuis la veille. Ia faim. Tse leve ot dit Thome —Dites done, 'ami, je crois qu'il est temps de m’ap- porter quelque chose & manger, non ? Uhomme appelle alors un autre gardien qui arrive aussitdt et Danglars lui pose la méme question. = Vous avez faim ? demande Yautre bandit en frangais, Oui, répond Danglars et méme assez faim. = Bt vous voulez sans doute manger ? — A Instant méme, si c'est possible, répond Danglars. — Rien de plus facile, dit le bandit, Jet, on a ce que Yon désire, en payant, bien entendu. = Naturellement ! s’éerle Danglars. = Alors, que désirez-vous ? Eh bien, un poulet, un poisson, nimporte quoi, pourvu que je mange. = Alors, un poulet, cela vous va? ‘Oui, un poulet. Diune voix forte, le bandit passe alors la comman- de de Danglars. Peu aprés, on voit un jeune homme = 38 vient de quitter Rome et Ia voiture roule tran- quillement dans la campagne. ‘Tout a coup, elle sarréte et Danglars entend des ‘hommes parler au conductenr.Ijette un coup d'ceil par 1a portidre pour voir ce qui se passe. Mais la voiture se remet aussitét en marche vers une autre cirer Danglazs voit un homme enveloppé d'un manteau qui galope & cOté de la portiére. Oa mermmenez-vous ? demande-t-l, ‘Mais homme ne lui répond pas. Danglats tourne la téte vers autre portiére et remarque un autre homme. I repense d Albert de Morcerf et & son aventure en. lati. Mon Dieu, se dit, je viens d'étre enlevé par des bandits, Que va-tl miarriver ? Bient6: la voiture s'arréte et on fait descendre le banquier. A la clarté de la lune, il sapergoit qu'il est & Yentrée dune grotte, On lui bande les yeux et on le fait marcher un long moment. Quand on Ini retire son bandeau, il se trouve devant une cellule od on le jette sans ménagement?. Puig on forme la porte & clé. Danglars est prisonnier. Il observe la cellule. Iln'y a qu'un lit Il s’étend sur le lit et se met & réfléchir. IL se dit que les bandits Ie libéreront dés quill aura payé a rangon’. Ila de quol payer... alors il se tranquillise et finit par s'endormir. J, Sans ménagement : brutalement. 2. angom : et qe Yon exige pour Ibérer une personne 54 LOM OMOMHRHMRARARARRRARe Pe rine. Th va prendre les papiers que le comte fui tend rmaais se ravise'. — Au fait, dit, votre regu, clest de Vargent. = Oh | mon Dieu, oul! ot si vous éties & Rome, sur ‘mon recu, la maison Thomson et French vous paierait imunédiatement, Pardon, monsieur le comte, pardon ! ~ Je puls done gander cet argent? ~ Oui, dit Danglars en essuyant Ja sueur de son. front, gardez, gardez, ~ Parfait, dit Monte-Cristo, Eh bien, je vous quitte. Aprés son départ, Danglars reste un moment pensif, Pais il se live, va vider tous les tiroirs de sa caisse, prend son passeport et murmure = Vous pouvez toujours venir chercher Vargent des hospices, je ne vous attenclrai pas... demain, je seral loin, eee Quatre jours aprés, Danglars arrive & Rome. La, il se présente aussitOt chez les banquiers Thorson et; French et, grace au regu de Monte-Cristo, il est de nouveau riche, Puis il va se reposer dans un hotel. Cette nuit, it partira & Venise pour visiter la ville puis il ira en “Autriche ot il compte s'installer, A neuf heures du soir, comme prévu, une voiture vient le chercher et ll commence son voyage. 1, Se revisor: changer ais, = Un, deux, trois, quatre, cing, fait Monte- Cristo ! Lapressionnant. Et cette somme est payée comptant ? En effet. Vous en doutea ? ~ absolumuent pas, répond Monte-Gristo en pliant tes cing papiers ; dalleurs je vais en faire mot-mnéme Vexpérience. Mon crédit chez vous est de six millions, jen ai déja pris un, je peux done encore prendre cin rriftions. Je garde done ces papiers et voici un requ de six millions qui régularise notre compte. Je I'ai prépa- ré A Yavance, car il fant vous dire que Jai fort besoin argent aujourdh Et, d'une main, Monte-Cristo met les cing paplers dans sa poche, tandis que de Yautre fl tend au ban- quier le rogu suivant ‘« Regu de M. Je baron Danglars Ja somme de six rnillions, dont il se remboursera sur la maison ‘Thomson et French de Rome. » En entendant cela, Danglars devient livide. ~ Quoi! dit-il, quoi | onsieur le combe, vous pre riez cet argent ? Mais, pardon, pardon, c'est de Var gent que je dois aux hospices? et que Javais promis de payer demain, ~ Ah! dit Monte-Cristo, c'est différent, Je ne tiens pas particuligrement & ces cing billets, payez-mot en autres valeurs Danglars est trés péle. Ine sait plus que faire: entre Jes hospices et Monte-Cristo, i court vraiment & la 7 Hospices; abliscemenis qui accuellient des ores. -82- ae Apres ce seandale, Fernand se tire une balle dans la téte, Meroédés et Albert donnent leur fortune aux pauvres et quitvent a jamais Paris, pour essayer d’ou- Dlier le passé et de commencer ine nouvelle vie, Monte-Cristo va aussi bientdt quitter Paris. Une partie de sa vengeance s'est accomplie et il veut en finir et quitter la France. Quinze jours aprés ces événements, il se présente done chez Danglats. Ce dernier a récemment perc beaucoup d'argent et est au bord de la ruine, Ta, de sa fenétre, apercu la voiture du comte entrant dans la cour et il va Faccuellir. = Quand vous étes arrivé, dital a Monte-Cristo, Sétais en train de faire cing petits bons ; fen al deja signé deux ; me permetiez-vons de faire les trois antres. ly a.un instant de silence pendant Jequel Danglars termine son travall. = Des bons «Espagne, dit Monte-Cristo, des bons de Naples? — Non, dit Danglars, des bons au‘porteur sur la banque de Franee. Chacun de ves papiers vaut un mall lion. Tenez, monsieur Je comte, vous gui étes Permpe- reur de la finance, comme j'en suis le oi, avez-vous vu ‘beaucoup de papier de cette grandeur-la valoir chacun, un million ? Monte-Cristo prend dans sa main les cing papiers que lui présente Danglars et it: « Plaise a M. le régent de la banque de faire payer mon ordre, et sur les fonds déposés par moi, la sornune d'un milion, Bason DaNaLases » —61- TAIDAD SRBC 14 AS aimais, tu étals presque destinée & étre une reine ! Regarde bien cet homme, est lui qui ta faite esclave. Regarde bien sa main droite, colle qui porve une large cicatrice ; si tu oublisis son visage, tu le reconnattrais a cette main dans Jaquelle sont tombées une a une les pices d'or du marchand d’esclaves, ‘Tout est dit. Fernand finit par avouer. —50- mame nenenenaaaaneeht Une femme, enveloppée d'un grand voile qui l= ‘ache toute entire, entre bientOt dans la salle. Le pré- sident lui demande d’éearter son voile et Yon peut voir qu'l s'agit d'Haydée, la protégée du comte de Monte- Cristo. ~ Madame, pouvez-vous nous renseigner sur l'affal- rede Janina? = Je le puis, monsieur, car ces événements ont été tes importants pour moi, méme si a Vépoque je Niavais que quatre ans, Je mlappelle Haydée et je suis lafille d’Ali-Tebelin, pacha de Janina, et de Vasiliki, sa Femme. Voici les preuves de mon identité, dit-elle en. donnant son acte de naissance au président, et voici Vacte de vente qui a été fait sur ma personne et celle de ma mére. Loflicier francais Fernand Mondego nous a en effet vendues comme esclaves @ un marchand arménien. Ma mere est morte de chagrin et moi, fal 66 rachetée & lage de onze ans ait marchand des claves par le comte de Monte-Cristo, gui m'a fait retrouver gout ala vic et m'a tedgnné ma liberté, Voici acte du rachat. s . En entendant tout cela, Je comte de Morcert devient d'une paleur extréme. Les preuves de son Infamle sont dans les mains du président ; tout est fini pour lui, Cependant, le président demande & Haydée - Madame, reconnaissez-vous M. de Morcerf comme étant la mérae personne que Fofficier Femand ‘Mondego ? = Sije le reconnais !s'éorie Haydée. Oh ! ma mere ! ‘Tu mlas dit : Wu étais Ubre, tu avais un pare que tu =49- rr ree eee vvé-un jour de Janina avec un énorme dossier su Taf: Foire et fait publier dans un journal le nom du traitre = Mlonsieut le comte de Moroerf, pair de France. » Le comate va étre jusé, “Le jour du jugement arrive. ‘uit heures précises du soi, le comte de Morcert fait son entrée dans la satle, I! semble colme. Gn hulssier entre et remet une lettre au président Nous aver la parole, monsieur de Morcerf, dit le président en ouvrant la lettre. Le comte veut montrer sa bonne fol. I! produit des pidees qui prouvont que Te vizir de Janina Vavatts jusau’a la derniere heure, honoré de sa confiance. } ajoute que sa confiance était tele quvau rnoment de spourir, i 1ui avait confié sa fernme et sa fille mais (que Vasiliki et sa fille Haydée avaient malheurense, rent disparu et qu'il ravait rien pu faire pour eles. Yous les connaissiez. ? demande le président. ~ Je tes avais vues une vingtaine de fois, au moins. Saver-vous ce qrrelles sont deventues ® vai entendu dire qu‘elles sont mortes de chagrin we erois que le moment est ven dentencire UN témoin dhune grande importance, dit Ie président, Je viens de recevoir une lettre, D'aprés elle, une person wre peut nous dire exactemnent ce qu s'est passé 2 Janina, Huissier, fates entrer le térnoin + “[Huaser personne qa pour méter taoenli et introduire 1 BiSteus Jans un aise, te administetion. -48- =o oe © & @ Beauchamp est devenu introuvable et Yon raconte quill est parti 8 V'étranger. Quinze jours plus tard, Albert est réveillé un matin par son valet de chambre qui lui annonce la visite de Beauchamp. Albert s‘habille rapidement et va au salon ot it trouve Beauchamp qui se proméne de long en large ; en Papercevant, Beauchamp sarréte, = Albert, dit Beauchamp, jarrive de Janina, = De Janina, vous ? = Oui, moi, Je voulals vérifier cette nouvelle que javais publiée dans le journal et m’excuser auprés de vous si tout avait ét6 une erreur ; mais hélas |... = Mais quoi? Le journal avait raison, mon arnt = Comment ! cet officier francais... Ce Fernand... c& traitre quia livré les chateaux de "homene au service duquel it état, = Pardonnez-moi de vous dire ce que je vous dis, mon ami : cet homme, c'est votre pere ! Tenez, ajoute- ‘sil en tirant un papier de sa poche, voici la preuve. Albert prend le papier : c'est une attestation de quatre habitants importants de Janina, constatant que le colonel Fernand Mondego, au service d’Ali- ‘Tebelin, a livré le chateau de Janina en échange Pune forte somme dargent. Albert tombe dans un fauteuil, = Bt que va-t- se passer, maintenant ? dit-il Je Tignore, mon am, ne perdez pas courage. Le scandale ne tarde pas & éclater. Un homume arri- aT 417 ui demande Monte-Cristo, = Que vous arrive: de veux me baltre. ~ Avec qui? = Avec Beauchamp. — Le journaliste ? Mais c'est un de vos meilleurs amis ? Vous avez sans doute une bonne raison ? = Oui, lisez ce texte paru dans son journal d'hier sole Albert tend & Monte-Cristo un journal oi il lit ces mots : «On nous écrit de Janina « Un fait jusqualors ignoré est parvenu a notre connaissance ; les chateaux qui défendaient la ville ont été liveés aux Turcs par un officier frangais dans Tequel Ali“Tebelin avait mis toute sa confiance, et qui stappelait Fernand. » —Eh bien ! demande Monte-Cristo, que voyez-vous ‘a-dedans qui vous choque ? — Le fait que mon pére servait Ali-Pacha et quill s‘appelle Fernand, et qu’on semble Faceuser. Personne ne sait que votve pere stappelle Fernand ct, de plus, on a oublié que Janina a été prise, cela s'est passé ly a longtemps. Calmez-vous, cela n'est pas bien grave et le mieux A faire est de ne pas donner dimpor- tance & cette histoire ‘Albert finit par accepter ce que dit Monte-Cristo et ine se bat pas avec Beauchamp. Trés vite, il reconnatt que Monte-Cristo lal a donné un bon conseil car le temps passe et personne ne semble avoir associé le rom de Femand avec celui de son pére. D'autre part, —46- a libre : tu peux quitter ton costume oriental, vivre & ta fantaisie, sortir et aller ot! bon te semble, Ali te servi- ra et sera A tes ordres, Je te demancle une seule chose, Je te prie. Dis. Garde Ie secret de ta naissance, ne dis pas un mot de ton passé : ne prononce en aueune occasion le nofn de ton illustre pére, ni celui de ta pauvre mere. ~ Jo te Vai dt, seigneur, je ne verral personne. — Beoute, Haydée, sors et apprends la vie de nos pays du Nord, comme tu I'as fait quand on était en Italie, Cela te servira toujours, que tu continues & vivre {e{ ou que tu retournes en Orient, La jeune fille léve sur Je comte ses grands yews hhumides de larmes et répond, = Ou que nous retournions en Orient, c'est bien cela, mon seigneur ? = Oui, ma file, dit Monte-Cristo ; tu sais bien que ce west jamais moi qui te quitterai. Ce n'est point Yarbre qui quitte la fleur, c'est Ja fleur qui quitte Varbre, = Je ne te quitteral jamais, seigneur, dit Haydée, car je suis sfire que je ne pourrai pes vivre sans tol eee Les mois passent ainsi Un matin, le vicomte de Moreerf, qui fréquente assiddiment le comte, vient le trouver. Il est trés pale et semble nerveux. ~45 Haydée. Quand il entre dans son appartement, il la trouve couchée sur des coussins, adoptant Ia pose naturelle des femmes Orient. — Haydée, dit, ma douce enfant, je viens te voir aujourd'hui pour te rappeler que maintenant nous sommes en France et que, par conséquent, tes libre de sortir A ton gré, de faire ce que tu veux. ~ Bt que veus-tu qe je fasse ? ~ Tu peux me quitter. = Te quitter |. et pourquoi te quitteraisje ? — Pour connate le monde. = Jenne veux voir personne. = Mais tu pourrais rencontrer un beau jeune home et ~ Je nai jamais trouvé c'hornmes plus beaux que toi, et je tal amas aimé que mon pate et toi “Pause enfant, dit Monte-Cristo, cest que tun'as, pas eu la possibilité de parler avee d'autres hommes que ton pare et moi. Eh bien ! aie besoin de parler & d'autres ? Mon pare mlappelait sa joie et toi, tu mappelles ton amour, nlest-ce pas sulfisant ? = Tute souviens de ton pére, Haydée ? La jeune fille sourt. = Ilest let Ia, dit-elle en mettant la main sur ses yeux et sur son coeur: = Br mei, ob suls-je ? demande en souriant Monte- Cristo ~ Toi, ditelle, t es partout = Maintenant, Haydée, lui dit, t sais que tu es deux autres lettres de la maison Thomason et French, Firai trouver un autre banquier: Danglars devient pale. = Je crois, dit-, quil n'est pas nécessaire d'aller trouver quelqu'un @autre et que nous pourrons nous entendre, ~ Parfait, Alors, fixons, si vous le voulez bien, une somme générale pour la premiére année, six millions par exemple. = Six millions, dit Danglars d'une petite vox, trés bien, monsieur. = Sil me faut plus, reprend Monte-Cristo, nous mettrons plus, nous verrons... Veuillez, pour commen ‘cer, me faire porter cing cent mulle francs demain. ‘= Largent sera chez vous demain @ dix heures, monsieur, répond Danglars. Voulez-vous de Lor, des billets de banque, ou de Targent ? Or et billets par moitié, sil vous platt. , Et le comte se lave et quitte la pitce, eee Le comte de Monte-Cristo sintroduit dans la haute société parisienne. Il se rend souvent au théatre en compagnie d'une belle jeune ferme. Cotte joune femme est greoque et se nome Haydée. Elle habite cchea le comte, son protecteur, dans un appartement {solé, composé d'un salon et de deux pigees et meub!é ala maniére orientale. Ce matin-la, le combe va rendre une visite a ~43- Danglars salue le comte de la téte et Tul fait signe de s'asseqir. ~ Monsicur le comte, dit, j'ai regu une lettre dela maison Thomson et French et, pour tout vous dire, i me semble que je r’en al pas bien compris le sens ; cest dlailleurs pourquol je suis passé chez vous ce ‘matin, pour vous demander quelques explications. Que voulez-vous savoir, monsieur ? Cette lettre ouvre 8 monsieur le comte de Monte- Cristo un créaitilimité sur ma maison, — Eh bien | monsieur le baron, que voyez-vous obscur la-dedans ? Rien, monsieur, seulement le mot itiraité.. ~ Que trouvez-vous d'étrange @ ce mot ? Je crois quil est parfaitement clair. En vous Gcoutant, mon- Sieur, fai comme Timpression que vous n’étes pas dis- ‘posé A satisfaire ma demande = Ine s'agit pas de cela, monsieur, dit Danglars. La seule chose gue Je désire c'est que vous fixiez yous-méme la sommune que vous comptez toucher chez mol. *_Mais, monsieur, dit Monte-Cristo, sijfai demandé ‘un crédit ilimité, c'est que je ne sais justement pas de quelies commes je vais avoir besoin. “= Oh, monsieur, dit Danglars, vous pouvez, deman- er un million, je n’nésiterai pas & vous satisfaie, = Un million ? répond Monte-Cristo, et que feraije un million ? Mais jai toujours un million dans mon portefeuille, Monsieur Danglars, si tout cela présente ‘un probleme pour vous,-ne vous inguiétes pas. Sai -42- = Nous aurons ce plaisir une autre fofs, au moins ? dernande la comtesse. ‘Monte-Cristo s'ineline sans répondre mais le geste peut passer pour un accord, Puis il quitte la famille Morcerf. Monte-Cristo habite une maison située sur les ‘Chanaps‘Biysées. Il est servi par plusieurs serviteurs et en patticulier, par le fid@le Ali, un home quill @ sauvé de la mort durant Yun de ses voyages. Le Jendetiain de son arrivée 4 Paris, 8 cing heures de Taprés-midi, le comte de Monte-Cristo demande & Ali de faire préparer sa voiture pour le conduire chez, Je banquier Danglars. ‘Danglars préside une réunion Jorsqu’on vient lui annoncer la visite du comte de Monte-Cristo. En entendant le nom du comte, il se lve, ~ Messieurs, ditll, pardonnez-moi si je vous quitte ainsi ; mais imaginez que la maison Thorson et French, de Rome, madresse un certain comte de Monte-Cristo, en Tul ouvrant chez moi un crédit lim 16, Ge doit étre une plaisanterie. Cependant, la curio site rn’a pique et, ce matin, je suis passé chez lui pour faire sa connaissance, mais il était sorti. Sa maison wax ‘Champs-filysées, qui est & lui, je me suis informé, ma, ‘paru fort convenable, J'ai hate de volr notre horamre. «Sur ce, Danglars quitte la piéce et passe dans le salon od attend son visiteur. =40- et i ~~ ww ww we wwe ww ww ww rw nous en sauvant notre fils des mains de bandits ita- liens. Mais, je vous on prie, asseyez-vous. AN | voici ma mére, s'écric le vicomnte. En effet, Monte-Cristo, en se retournant yivement, voit Mme de Morcerf a entrée du salon, immobile et pile, elle laisse, lorsque Monte-Gristo ge retourne de son c6té, tomber sa main qui tent la polgnée de Ta porte, ‘Monte-Cristo salue profordément la comtesse aul sineline & son tour. ~ Bh, mon Dieu, madame, demande Je comte, ‘quiavez-vous done ? Bst-ce la chaleur de ce salon qui ‘vous fait mal ? = Soufrez-vous, ma mere ? s'éerie le vicomte en s'langant au-devant de Mereédés. Ele les remercie tous les deux avee un sourire. Non, dit-elle, mais j'ai éprowvé quelque émotion ‘en voyant pour la premitre fois celui qui, sans hésiter, a sauvé la vie de mon fils, Monsieur, je vous prie de croire en mon éternelie reconnaissance pour eet acte merveilleus. Le conte sineline encore, mais plus profondéinent que la premiére fois. I est plus pale encore que Mercédes. = Monsieur, dit Meroédés au comnte, nous ferez- vous Timmense joie de passer le reste de Ia journée avec nous ? Merci, madame, et vous mne voyer. bien reconnals- sant de votre offre, mais je viens juste d'rriver & Paris cet jai encore beaucoup & faire pour mon installation. —39- fans, Blle a fait faire ee portrait pour mon pére mais, ‘chose bizarre, mon pere s'est mis en coléve quand ilTa vu et ma mere me [a offert. Mais il est temps de vous présenter & mes parents qui ont hate de vous connaitre pour vous reiercier de ce que vous avez fait pour mo} en Italie, is quittent alors fappartement d’Albert et se ren dent chez le comte de Morcert. Dans le salon, o0 un serviteur les fait entror, ily a aussi un portrait : clest celui d'un homme de trente- cing & trente-huit ans, vétu d'un uniforme d'officier- igonéral, portant toutes sortes de décorations. Le conite de Morcerf, qui a fait les guerres de Gréce et Espagne, est maintenant pair de France’. Monte- Gristo est occupé A observer ce portrait lorsqu'une porte latérale s‘ouvre et quill se trouve en face du corte de Morcerf lui-méme. Crest un horame de quarante-cing ans, vét comme un bourgeois et qui porte a la boutonniére® différents rubans qui rappellent les décorations quill a regues. = Mon pete, dit Albert, ai "honneur de vous pré- senter M, le comte de Monte-Gristo, ce généreux ami que jai eu le bonheur de rencontrer dans les circonstances difficites que vous connaissez, = Monslour, vous tes le bienvenu parmi nous, dit le comte de Morcerf en saluant Monte-Cristo, Je vous remercie de tout eceur de ce que vous avez fait pour 1. Pair de France : membre dela Haute Assemblée léglintive 2. Boutonnier «petite ouverare Gite faite un vétement pour y passer un bouton. 38 B soUR D2 SON ARRIVEE A Pants, Ie comte de l Monte-Cristo est invité & déjeuner chez ‘Albert de Morcerf, Ie fils de Mercédés, quill a ‘conn: au cours d'un voyage en Italie et u'll a sauvé des mains de bandits. “Aprés le repas, Albert fait visiter son appartement a Monte-Gristo, Celui-ci admire le salon, plein objets art, Pétotfes' et de tapis d'Orient. Du salon, on passe dans la chambre & coucher, une pidce & la fois éégan~ te et au gott sévere, LA, un seul portrait resplendit dans un cadre dor, Ce portrait attiré Je regard du conte, car il fait trols pas rapides dans la chambre et slarréte tout & coup devant Iu Cost celui dune jeune femme de vingt-cing & vingt-six ans, d'une grande beauté, qui porte le cost me des ferames de pécheurs catalans. “Monte-Cristo, trés pale, conteaple en silence cette peinture. Puls, d'une voix calme, i dit & Albert = Vous avez la une belle fiancée, vieomte. — Oh! vous faites erreur, répond Albert. Il s'agit de ‘ma more, Elle s'est fait peindre ainsi il y a cing ou six Sp aRSpRE tee oHRaEEEE CSS eegeeee eS 1. tote: das _3T- LL E_—LLULULULUhUhUC™” t. Tis vivent & Paris of Morcerf, et qu'elle a un fils, Albert ‘it aussi Danglars. Grace & sa nouvelle fo de Monte-Cristo en une énormément, se fait appel puis va sinstaller & Paris po geance, xtune, il transforme la grotte demeure luxueuse, voyase jer le comte de Monte-Cristo var y accomplir sa ver- See en a Oe OO | | = Oa sulsje done ? se demande Edmond. ‘Ace moment, il entend déposer prés de Jui un objet lourd et il sent une corde entourer ses pieds. — Bh bien, le neeud est-il fait ? demande lun des hommes. ~ Tres bien fait, dit Yautre, erois-anoi. ~ Alors, en route, Ils reprerinent la civigre et marchent un roment Edmond entend le bruit de la mer contre les rochers, Soudain, les horames s'arrétent. Nous y voila, dit 'un deux. Allons-y. Une, deux et trois! En inéme temps, Edmond se sent laneé dans un vide énorme et traverse air comme un oiseau blessé. Puis il tombe, tombe et entre comme une flzche dans une eau glacée. vient d’étre laneé dans la mer au fond de laquel- Je Ventraine un boulet de dix-huit kilos. ‘La aner est le cimetiére du chateau dt eee Dantds parvient ainel & se sauver de Vhorrible chateau aif ‘Apres plusieurs péripéties, il trouve eniin la grotte Ge ile de Monte-Cristo et la fortune des Spada. Tse renseigne sur son passé. I apprend que son pére est mort et découvre Je nom des hommes aut Yont trahi, I apprend également que Meroédés est matige avec Fernand, qui est maintenant comte de BES EEE EEE EEE Ee Ee ee ee eee Cae ~— ‘Mais, & ces mots, Bdmond reste immobile, les yeux. fixes, Il vient d'avoir une Idée. Il hésite puis se penche vers le sae ott est le corps de son ami, louse, retire le ccadavre du sac, le transporte chez lui ; puis ille couvre de sa couverture, embrasse une derniére fois son front, ‘glacé, lui tourne la téte vers le mur pour que le gedlicr pense quill est en train de dormir puis J revient dans autre cellule. La, il se glisse dans le sac, se place dans Ia situation ott était le cadavre et referme Youverture, TLdoit se calmer maintenant et attendre qu'on vien- ne le chercher. Voila ce quil compte faire Quand on aura déposé dans une tombe du cime- ‘re et couvert de terre, comme tout se passe la nuit, pourra s'ouvrir un passage a travers la terre molle et senfulr La nuit tombe. Il entend des pas. On vient chercher le cadavre, Deux hommes entrent dans la pitce, s'approchent dua lit et saisissent le sac par ses deux extrémités. = As-tu fait ton nomd ? demande fun des deux hommes. = Non, je le ferai la-bas, répond autre, = Pourquoi ce nceud ? se demande Dantas, ‘On place le prétendu cadavre sur une eiviére'. Les porteurs sortent et montent un escalier. Tout & coup, Edmond sent l'air frais de la mer. ls sont entin sortis, Les hommes font une vingtaine de pas et déposent la cividre sur le sol 4. Civtre: apparel sur lequs on transporte les malas, ~33 ~ Ce trésor existe, mon enfant. Si je meurs et que ‘yous parvenez & vous eauver, il vous appartient totale- ment. = Mais, demande Dantés, ce trésor n'est done a personne, =Mais non, rassurez-vous, dit Tabbé Faria, la famil- Je est complétement éteinte’ Dantes croit réver, — Nous nous échapperons ensemble et nous irons chereher ce trésor, dit-il a Faria. Labbé tend le bras au jeune homme qui se jette & son cou en pleurant. ‘Mais quelques semaines aprés, T'abbé @ une nou- velle erise et meurt. Les gedliers le mettent dans un sac de toile gros- siére et le laissent, étendu sur son lit jusqu'au moment de Fenterrer, Des quills sortent, Edmond se précipite dans 1a chambre de son ami pour le veiller Test désespéré. Hest de nouveau seul. Lidée de se tuer s'empare de lui mais il lutte aussit6t contre elle. = Mourir ! ch ! non, s'écrie-t-l. Ce n'est pas la peine avoir tant véeu, dlavoir tant soulfert pour mourir main- tenant ! Non, je veux vivre, je veux reconquérir ce bon- hheur qu'on ma enlevé | et je veux savoir qui mma fait fenfermer et le punis. Mais comment faire pour sortir diet? Je ne sortral de cette prison que comme Faria. 1. Fane qu seat éteinge = familo dont il ne reste plns aucun membre ~82- a a aa ar ar RRR ARARKRAaAAAAAAHAAME Lorsque Dantes rentre le Jendemain matin dans la chambre de son compagnon de captivité, il trouve Faria assis, Ie visage calme. I tient dans sa main gauche, la seule quil peut maintenant utiliser, un morceau de papier roulé ‘comme un parchemin. Tloontre sans rien dire le papier @ Dantés. = Quiest cela ? demande celui-cl ~ Ce papier, mon ami, dit Faria, c'est mon trésor. Sil marrive quelque chose et si vous sortez un jour de cette prison, il est & vous. = Votre trésor ? demande Dantes. — Oui. Beoutez-moi attentivement. Et Tabbé raconte quill a #1é le secrétaire d'un homme important nommé Spada, Celui-ci était le neveu du cardinal Spada que le pape avait emprison- né pour s‘eraparer de ses biens. Mais sa fortune, qui était immense, navait jamais été retrouvée, Quand il fest mort, son neveu avait hérité du seul bien qui lui restait : un bréviaire’ Ala mort de Spada, Yabbé avait hérité du bréviai- re. Un jour, le livre s'était échappé de ses mains et, dans la couverture ablinge, Faria avait découvert un plan, Ce plan indiquait Yendroit oft le cardinal Spada avait caché son trésor pour le sauver des mains du pape. Ilse trouvait apparemment. dans une grottet de a petite He de Monte-Cristo, 2. Bevin: vre de pibras. 2: Grote: grand trou creusé naturellement dans une oche, ~30- ee ee Oe ‘Edmond lui donne alors les dix gouttes de liqueur rouge et attend. Une heure passe sans aucun résultat. Dantes ne quitte pas son ami un seul instant. Enfin le visage de Parla reprend des couleurs et un faible soupir s’échap- pe de sa bouche. I fait un mouvement, — Sauvé ! sauvé | s'écrie Dantes. ‘Mais il entend tes pas du geblier dans le corridor et, il court vite dans sa cellule. Pou apres, sa porte s‘ouvre et, comme @habitude, Je geblier trouve Dantis assis sur son lit. ‘A peine a-t-il le dos toumé, a peine le bruit de ses. pas s'est-l perdu dans le corridor que Dantés, fou d'in- quiétude, retourne dans la chambre de V'abbé pour voir comment il va. Ila repris connaissance mais i] est toujours sans force sur son it, = Courage, vos forces reviendront, dit Dantes. Llabbé secoue la téte. = Non, non, dit-il, La dernidre fots, la crise a duré une demi-heure. Quand je me suis réveillé, j'ai pu me relever ; aujourd'hui, Je ne puis bouger ni ma jambe ni mon bras droit, La prochaine crise sera la derniére : je mowrral sur le coup. = Non, non, ne dites pas cela, dit Dantas, tout ira bien, vous verre, je ne vous abandonnerai pas. = Je le sais, mon ami, dit Yabbé, mais je sais aussi que j'ai raison. Allez vous reposer. Demain, aprés la visite du geéller, venz me voir, jai quelque chose important & vous dire. 29- * Tous les jours, les deux amis travaillent tres dur. Dantas apprend vite et parle bientdt assez bien Tespa- ‘gnol, Panglais ot allemand. II prend gott & Vétude, Au bout dun an, c’est un autre homme. Deux autres années se passent de ja sorte, Faria ne parle plus de fuir et Dantes, dans son malheur, est presque heureux grace & Tabbé ‘Un matin, quand Redmond entre dans la chambre de son ami, il apergott Yabbé au milieu de la piéce, ‘pale, la sueur au front et les mains crispées’ ~ Oh! mon Dieu ! 'écrie-teil, quiy art-l ? Qu'aven- vous ? = Vite, vite ! dit Yabbé, écoutez-mol. ~~ Mais qu'y a-t-il done ? ~ Je suis tres malade et fai souvent des crises, dit Vabbé. A ce mal, il n'y a qu'un remede, je vais vous le dire : levez le pied de mon lit et prenez le petit flacon de cristal qui est caché dedans ; si je perds connais- sance, desserrez-moi les dents avec un couteau et faites couler dans ma bouche huit 2 dix gouttes de cette liqueur, alors je serai peul-étre sauvé, A moi 12 moi | s"écrie Pabbé, je me... je me... La crise et si subite et si violente que le malheu- veux prisonnier ne peut finir sa phrase. Bille dilate? ses yeux et tord sa bouche. Paria tombe, se raidit et evient livide’ Seagadadstsetnaasasisteetsaasas puauuiaaasasisresessaaaas 1. Bins elope: mains fororvent fermées. 2 Diiter: fare devenir plas rand, B.Lvide: tts ple. a il AM lA Ol — Vous vous faites du papier, des plumes et de Tenere !s'écrie Dantas, — Oui Dantés regarde cet homme avec admiration. — Bi comment faites-vous ? ~ Je fais les phumes avec le cartilage’ des tétes de merlans* que Yon nous sert quelquefois et de lencre avec Ia sule d'une cheminée quil y a dans mon cachot fet qui a été bouchée, Je la fais dissoudre dans un peu de vin qu’on me donne tous les dimanches et jobtiens ainsi une encre excellente, ~ Et quand pourraije voir tout cela ? demande Dantes, ~ Quand vous voudrez, répond Faria, ~ Oh ! tout de suite | s’écrie le jeune homune, ~ Suivez-moi done ! dit Yabbé Bul rentre dans le corridor souterrain ov il dispa- raft, Dantes le suit, A partir de ce jour, une grande amitié naft entre les deux hommes. Dantés découvre que le savoir de Tab- ‘bé Faria est illimité : i parle plusieurs langues, connait, les mathématiques, ete Dantas, ébloui, [ui demande un jour de lui apprendre tout ce quil sat. Le soir méme, les deux prisonniers élaborent un plan d'éducation quils commencent & exécuter le Jendemain 4. Canlage: issu résistant et astque qu reeouite le squelete de ccenains poisons, 2. Sule: matiae noire déposée para fumée -26- _—— nous avons douze heures de liberté. = Je peux donc agi ? = Oh ! oui, oui, Ainstant méme, je vous en supple, Aussitét, la portion de terre sur laquelle Dantts appuie ses mains semble céder ; il se rejette en arrid- re tandis que de la terre et des pierres se précipitent dans un trou qui vient de s'ouvrir au-dessous de l'ou- verture que lui-méme a faite ; alors, au fond de ce tron sombre, il voit apparaitre une téte, des épaules cet enfin un homume tout entier qui entre bientét dans la cellule, Dantas prend dans ses bras ce nouvel ami. C'est un homme de petite taille, maigre et au visage marqué par la soufirance. ~ Maintenant, voulez-vous me dire qui vous étes ? demande Dantés. Lhomne sour tristement. = Je snis Pabbé Faria, dit-il = Vous vouliez.done vous échapper. Avez-vous tou Jours intention de le faire ? ~ Non, je vois la fuite impossible, Labbé Faria va s'asgeoir sur le lit, Edmond reste debout. ~ Est-ce que vous travailliez A votre fuite depuis Iongtemps ? = Depuis plusieurs mois, mais je falsais aussi autres choses, répond Faria, J’éerivais ou jétudials. = On vous donne done du papier, des plumes et de Yenere | s'éerie Dantes. = Non, dit Yabbé, mais je men fats. ~~ ~ Sur quoi donne votre chambre ? ~ Sur un corridor. = Btle corridor ? ~ Aboutit a Ja cour. = Hélas | murmure la voix ~ Oh! mon Dieu! qu‘y a-t-il done ? demande Dantas. = Ilya que je me suis trorapé et que j'ai pris le mur ‘que vous ereusez pour celui de la citadelle ! Dans ce eas, vous arriviez & la mer? = Cest ce que je voulais, = Bt si vous aviee réussi ! Je me jetais & Yeau et je gagnais Ala nage une des, ‘les qui se trouvent prés du chateau d'lf, Mais, mainte~ nant, tout est perdu, ~ Tout? = Oui. Ne travaillez plus et attendez de mes nou- velles. = Qui étes-vous ? Dites-moi qui vous étes ? ~de suis... je suis... le n° 27. —Ne me laissez. pas seul, 'ai besoin de parler avec quelau'un, je veux étre votre ami, je vous en prie, ne mabandonnez pas. ~ Cest bien, dit le prisonnier, demain je vous dirai quelque chose. Le lendemain, aprés la visite du matin, Dantés entend soudain la voix de son compagnon. = Votre gedlier est-il parti ? ~ Oui, répond Dantes, il ne reviendra que ce soir ; 1. Corrior cowol, passage 24 seers cen ae a = role. I peut alors Tutiliser pour creuser plus facilement.. ‘Au bout de quatre jours de travail, la commencé & retirer des pierres derriére son lit, Un jour quil creuse avee énergie en disant tout ‘haut son espoir de pouvoir atteindre son compagnon de malheur, une voix qui semble venir de dessous terre demande : ~ Mais qui parle ainsi ? ‘Bamond sent ses cheveux se dresser sur sa téte, et il recule sur les genoux. ~ Ah ! murmure-t-l, fentends parler un homme. Je vous en prie, s'écrie-til, vous qui avez parlé, parlez encore ; qui étes-vous ? ~ Qui ¢tes-vous vous.méme ? demande la voix. Un malheureux prisonnier, répond Dantes. = Depuis combien de temps étes-vous ict ? —Depuis ie 28 février 1815. = De quoi vous accuse-t-on ? ~ D’avoir conspiré pour favoriser Je ‘retour de YEmpereur. = Comment { pour le retour de !Empereur LEmpereur n'est donc plus sur le trone ? —Non, iia abdique' et a été envoye sur Iile d'Blbe. ‘Mals vous-mnéme, depuis combien de temps étes-vous ici? ~ Depuis 1811, Ne crousoz plus et dites-mot a quelle hauteur se trouve le trou que vous aver fait. — Auras de terre, caché derriére mon lit. 1. Abaiquer : abandonner le pouvoir. = 23- plus fort et plus rapproché. Edmond sintéresse & ce bruit qui lui tient compagnie ; tout & coup, le gedlier entre, pose sur la table le repas du prisonnier et se retire, Libre alors, Edmond se remet & écouter avee joie. Le bruit devient si distinct que, maintenant, Je Jeune homme lentend sans efforts, ~ Plus de doute, se dit-il & lut-méme, puisque ce bruit continue, cela veut dire qu'un prisonnier tra- vaille a sa fuite, Oh {si étais prés de lui, comme je lai- derais | 1 toume alors la téte vers la coupe chaude que le

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