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Module : Béton Armé ENIT

Classe: 2AGC Enseignant : K. Miled

Chapitre 5: Poteaux soumis à la compression centrée

I. Introduction
Un poteau est une poutre droite verticale. Le rôle principal des poteaux dans une
ossature en béton armé est la transmission des charges verticales (principalement les
actions dues à la pesanteur) aux fondations. Les poteaux peuvent participer aussi au
contreventement des bâtiments soumis à des forces horizontales (principalement les
actions du vent et des séismes). C’est le cas des poteaux constituant les montants des
portiques de contreventement.
Dans ce chapitre, nous nous intéressons au calcul ou à la vérification des poteaux
soumis uniquement à des charges verticales. Les poteaux soumis en plus à des forces
horizontales seront étudiés dans un prochain chapitre dédié à la flexion composée.
Les charges verticales transmises aux poteaux ne sont jamais parfaitement centrées à
cause des imperfections d’exécution. Par ailleurs, les poteaux de bâtiments courants
sont soumis à des moments de flexion qui lui sont transmis par les poutres qu’ils
supportent. Cependant, pour éviter d’avoir à faire le calcul en flexion composée, les
poteaux des constructions courantes sont calculés en négligeant les effets de solidarité
avec les poutres et en admettant par conséquent la discontinuité des éléments de
plancher au droit des poteaux. Ainsi, les Règles BAEL [1, 5] admettent de considérer
conventionnellement comme soumis à une compression centrée tout poteau qui, en
plus de l’effort normal de compression N, n’est sollicité que par des moments
conduisant à des petites excentricités (de l’ordre de grandeur de la moitié de la
dimension du noyau central), ce qui exclut, en particulier, le cas des poteaux
constituant les montants des portiques de contreventement. Par conséquent, ces
moments de flexion seront négligés dans le calcul du poteau (M = 0). En revanche, la
méthode de calcul forfaitaire des poteaux en compression centrée préconise de placer
des armatures longitudinales pour reprendre ces moments de flexion. En effet, ce n’est
que très exceptionnellement que l’on arme les poteaux pour augmenter leur résistance
à la compression, mieux vaut augmenter la section de béton car l’acier est beaucoup
plus coûteux que le béton.
Par ailleurs, les poteaux soumis à un effort normal de compression doivent, en
principe, être vérifiés vis-à-vis du flambement (vérification à l’état-limite de stabilité
de forme [1]). Toutefois, lorsque la qualité de l’exécution soit telle que l’imperfection
de rectitude soit au plus égale au maximum de (1cm ; l0/500) et lorsque l’élancement
mécanique λ du poteau est inférieur à 70, la méthode de calcul approchée exposée ci-
après évite en outre d’avoir à faire une vérification à l’état limite de stabilité de forme
et tient compte du l’effet du flambement de façon forfaitaire.

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II. Elancement mécanique
L’élancement mécanique λ est défini comme le rapport de la longueur de flambement
lf au rayon de giration i de la section droite du béton seul, évalué dans le plan de
flambement (généralement, le plan dans lequel le moment d’inertie de la section est le
plus faible) :
lf I min
λmax = avec i min =
imin B
La longueur de flambement lf est évaluée en fonction de la longueur libre du poteau l0
et de ses liaisons effectives ; l f = γl 0 où γ est un coefficient qui dépend du type de
liaison.

II.1. Evaluation de la longueur libre

La longueur libre l0 d’un poteau appartenant à un bâtiment à étages multiples est


comptée entre faces supérieures de deux planchers consécutifs ou de sa jonction avec
la fondation à la face supérieure du premier plancher.

II.2. Evaluation de la longueur de flambement

a) Cas du poteau isolé

Dans ce cas (cf. figure 1), cette longueur est prise égale à:
- 2l0 si le poteau est encastré à une extrémité et libre à l’autre.
- l 0 si le poteau est articulé aux deux extrémités ou encastré aux deux extrémités,
celles-ci étant libres de se déplacer l’une par rapport à l’autre suivant une direction
perpendiculaire à l’axe longitudinal du poteau et située dans le plan principal pour
lequel on étudie le flambement.
l0
- ≈ 0.7l 0 si le poteau est articulé à une extrémité et encastré à l’autre.
2
- 0.5l 0 si le poteau est encastré aux deux extrémités, celles-ci étant empêchées de se
déplacer l’une par rapport à l’autre suivant une direction perpendiculaire à l’axe
longitudinal du poteau et située dans le plan principal pour lequel on étudie le
flambement.

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Figure 1. Définition de la longueur de flambement pour différentes conditions
de liaison du poteau [4].

b) Cas des poteaux de bâtiments courants à étages

Dans les bâtiments à étages (cf. figure 2) dont le contreventement est assuré par un
système de pans verticaux rigides (avec triangulations, voiles en béton armé ou
maçonnerie de résistance suffisante [3]) et où la continuité des poteaux est également
assurée aux différents étages, la longueur de flambement d’un poteau est prise égale à :
- 0.7l 0 si le poteau est à ses extrémités soit encastré dans un massif de fondation, soit
assemblé à des poutres de plancher ayant au moins la même raideur (ou bien la même
inertie) que lui dans le sens considéré et le traversant de part en part.
- l 0 dans tous les autres cas.

Figure 2. Valeurs des longueurs de flambement des poteaux d’un bâtiment à étages
[4].

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Remarques
Les encastrements rencontrés en pratique étant rarement parfaits, les longueurs de
flambement effectives sont plus grandes que les longueurs théoriques indiquées ci-
avant. Il convient de noter à ce sujet que, dans les circonstances les plus courantes, la
liaison des poteaux à leur fondation est plus proche d’une articulation que d’un
encastrement. Ainsi, la longueur de flambement d’un poteau doit être estimée
prudemment, en évitant de faire des hypothèses trop optimistes en ce qui concerne la
rigidité des éléments auxquels il est lié.
Le tableau ci-dessous donne les valeurs du moment quadratique minimal Imin, de la
section B, du rayon de giration imin, ainsi que les valeurs du rapport de la longueur de
flambement lf sur la plus petite dimension de la section a (dimension caractéristique de
la section) pour les trois formes de section classiques et pour un élancement λ
inférieur à 50.

lf
Tableau 1. Valeurs du rapport ( ) pour les trois formes de section classiques et
a
pour un élancement λ inférieur à 50 [4].

III. Méthode forfaitaire de vérification des poteaux en


compression centrée
Le calcul des poteaux en compression centrée est toujours conduit à l’état-limite
ultime de résistance. La vérification de la sécurité consiste à s’assurer que l’on a :
N u ≤ N u lim ,
où Nu est l’effort normal de calcul agissant et Nulim est l’effort normal résistant, dit
aussi la force portante du poteau.

III.1. Evaluation de l’effort normal de calcul agissant

L’effort normal de calcul agissant à l’état limite ultime est calculé généralement en
considérant la combinaison fondamentale d’actions:

N u = 1,35 Gmax + Gmin + γ Q1Q1 + ∑1,3ψ 0 i Qi


i >1

Dans les cas les plus courants, cette combinaison d’actions est réduite à :
N u = 1.35G + 1.5Q

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où G et Q représentent respectivement les charges permanentes défavorables (poids
propre des planchers) et les charges d’exploitation évaluées au niveau considéré.
Cependant, d’autres combinaisons doivent être envisagées, notamment lorsque des
porte-à-faux importants sont susceptibles de provoquer des efforts de soulèvement
dans certains poteaux.

Remarques

1- Dans les bâtiments à étages, il faut effectuer une descente de charge sur les poteaux
pour évaluer les actions de pesanteur permanentes et variables.
2- Dans les bâtiments comportant des travées solidaires supportées par deux files de
poteaux de rive et une ou plusieurs files de poteaux intermédiaires (cf. figure 3), les
charges verticales évaluées dans l’hypothèse de la discontinuité doivent, à défaut
de calculs plus précis, être majorées forfaitairement de [5]:
• 15 % pour des poteaux centraux dans les bâtiments à deux travées.
• 10 % pour les poteaux intermédiaires voisins des poteaux de rive dans le cas des
bâtiments comportant au moins trois travées.

Figure 3. Effort normal à prendre en compte dans les poteaux supportant une
poutre continue [4].

3- Pour tenir compte de la non-simultanéité de chargement de tous les niveaux d’un


bâtiment en exploitation, le maître d’ouvrage peut autoriser une dégression des charges
variables [5].

III.2. Evaluation de l’effort normal résistant

On désigne par :
• B l’aire de la section droite du poteau ;
• A l’aire de la section totale des armatures.

Remarque
Pour l’évaluation de A, il faut noter que :
— toute barre longitudinale de diamètre Φl, non maintenue par des armatures
transversales espacées d’au plus 15 Φl, ne peut être prise en compte dans le calcul de
résistance.

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— si λ > 35, seules peuvent être prises en compte les armatures disposées de façon à
augmenter le plus efficacement possible la rigidité dans le plan de flambement, c’est-
à-dire (cf. figure 4) :
• aciers disposés dans les angles, s’il s’agit de poteaux carrés ou de poteaux
rectangulaires dont le rapport des côtés est compris entre 0,9 et 1,1 ;
• aciers disposés le long des grands côtés de la section, pour les autres poteaux
rectangulaires.
• Aciers disposés à une distance ne dépassant pas 0.15D de la périphérie du poteau
selon un seul côté.

Barres prises en compte dans le calcul de Nulim

Barres non prises en compte

Figure 4. Prise en compte des armatures des poteaux lorsque λ > 35 [1].

En compression centrée, la section du poteau est entièrement comprimée. Le


diagramme de déformation limite de la section correspond à la verticale du pivot C;
le béton et l’acier subissent uniformément un raccourcissement :
εbc = εsc = 2‰,
ce qui entraîne :
- pour le béton, une contrainte uniforme égale à fbu = 0,85 fc28 /θγb.
- pour l’acier, une contrainte égale à σsc(2‰) correspondant, sur le diagramme de
calcul de l’acier à l’ELUR, au raccourcissement de 2 ‰ :
f su f
σ sc ( 2 ‰ ) = { E s * 2 ‰ si f 2 ‰; f su si su ≤ 2 ‰ }
Es Es
Dans ces conditions, la valeur théorique de l’effort normal résistant serait :
N u lim,th = Bf bu + Aσ sc
En fait, les Règles BAEL [5] apportent à cette formule un certain nombre de
correctifs :

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1) elles pénalisent les poteaux de faible section, particulièrement sensibles aux
imperfections d’exécution et aux défauts de centrage de la charge, en introduisant à la
place de B une section de béton réduite Br obtenue en enlevant 1cm de béton sur toute
la périphérie de la section ;
2) elles tiennent compte du degré de maturité du béton à l’âge, généralement supérieur
à 90 jours, auquel le poteau aura à supporter la majeure partie des charges qui lui
seront appliquées et elles fixent ainsi la résistance du béton à (1.1 fc28). Elles adoptent,
en outre, θ = 1. Par conséquent fbu devient égale à (0,85 fc28 /0.9γb);
3) elles compensent le fait de négliger les effets du second ordre (flambement) en
majorant l’effort normal de calcul par un coefficient β fonction de l’élancement
mécanique λ, ce qui revient à minorer la valeur de l’effort normal résistant par (1/β);
4) elles admettent enfin que σsc(2 ‰) est égal à 0.85 fe /γs.

Ainsi, l’effort normal résistant d’un poteau est égal à :


0.85  Br f c 28 fe 
N u lim =  + A 
β (λ )  0.9θγ b γs ,
Les règles BAEL utilisent souvent à la place de β le coefficient de minoration
0.85
suivant : α (λ ) = β (λ ) , ainsi l’effort normal résistant d’un poteau s’exprime comme
suit :
B f f 
N u lim = α (λ )  r c 28 + A e 
 0.9θγ b γs 
L’expression de α(λ) est donnée dans le tableau suivant:

Tableau 2. Expression du coefficient α en fonction de λ [4].

La figure 5 donne l’évolution de α en fonction de λ. Etant donnée la forte décroissance


de α en fonction de λ, il convient de choisir une valeur de λ inférieure à 50 et, si
possible, proche de 35.

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Figure 5. Variation du coefficient α en fonction de λ [4].

Remarques
Si plus de la moitié des charges est appliquée avant l’âge de 90 jours, cas fréquent
dans les chantiers de bâtiments, la valeur de α est à diviser par 1.10.
Si la majeure partie des charges est appliquée à un âge j < 28 jours, la valeur de α est à
diviser par 1.20, et il faut introduire dans la formule précédente la valeur de fbu
calculée à partir de fcj au lieu de fc28.

III.3. Armatures longitudinales


Détermination de la section d’acier A

L’effort normal agissant de calcul Nu et la section B du poteau étant connus. On


cherche la section A des armatures longitudinales comprimées. Celle-ci est tirée de
l’inégalité (Nu ≤ Nulim), c’est-à-dire, avec les unités m2, MN, MPa, on obtient :
γ s  N u Br f bu 
A(cm 2 ) ≥  −  × 10 4
f e  α 0.765 

La section ainsi trouvée doit satisfaire à la double condition : Amin ≤ A ≤ Amax ,


Amin(cm2)=Max (4cm2 /m de périmètre de la section du poteau B(cm2), (0.2*B)/100)
 4u 0.2 B 
d’où : Amin (cm 2 ) = Max ; ,
 100 100 
où u désigne la longueur en cm du périmètre de la section droite du poteau.
5B
Enfin, Amax est donnée par : Amax (cm 2 ) =
100

Remarques
1) la condition A≤Amax est à vérifier uniquement en zone courante du poteau, c-à-d en
dehors des zones de recouvrement des barres, car dans ces zones, il est permis d’avoir
A>Amax.

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2) Si on trouve que A>Amax en zone courante du poteau, l’équarrissage du poteau est à
revoir.

Espacement et dispositions constructives

L’espacement c entre deux armatures longitudinales est au plus égal à, comme indiqué
sur la figure suivante :

Figure 6. Espacement maximal des armatures longitudinales d’un poteau [4].

Enfin, la longueur de recouvrement est au moins égale à lr = 0.6ls, où ls est la longueur


Φl fe
de scellement droit donnée par [7]: l s = avec τ su est la contrainte d’adhérence
4τ su
(acier/béton) ultime, supposée constante et égale à: τ su = 0.6Ψs 2 f t 28 , où ψs est le
coefficient de scellement égal à 1.5 pour les barres HA et f t 28 est la résistance en
traction du béton à 28 jours qui s’exprime généralement en fonction de f c 28 comme
suit :
f t 28 = 0.6 + 0.06 * f c 28 si fc28 ≤ 60MPa ( f c 28 étant exprimée en MPa).
f t 28 = 2.4 + 0.03 * f c 28 si fc28 > 60 MPa

III.4. Armatures transversales

Il faut ceinturer les armatures longitudinales de diamètre Φl par des aciers


transversaux (cadres ou épingles) de diamètre Φt, égal au moins au tiers de Φl
(Φt ≥ Φl/3). Ces armatures transversales qui doivent être espacées au plus de
min (15Φl, 40cm, (a +10cm si A >Amin)) permettent de [6]:
- éviter la rupture prématurée du poteau par flambement local des aciers
longitudinaux qui engendre l’expulsion du béton de couverture;
- limiter la fissuration longitudinale du béton fortement comprimé ;
- constituer des armatures d’effort tranchant lorsque le poteau est fléchi.

Enfin, il faut placer au moins 3 nappes d’armatures transversales dans les zones de
recouvrement.

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Références bibliographiques

[1] Perchat, J. Béton armé. Règles BAEL : Pièces soumises à des sollicitations
normales. Techniques de l’Ingénieur, traité Construction, C 2 306, pp. 26-31.
[2] Perchat, J. Béton armé. Règles BAEL : Ossatures et éléments courants. Techniques
de l’Ingénieur, traité Construction, C 2 314, pp. 28-30.
[3] Perchat, J. Béton armé. Règles BAEL : Etablissement des projets. Techniques de
l’Ingénieur, traité Construction, C 2 312, pp. 3-4.
[4] Gagliardini, O. Cours de béton armé. IUP Génie Civil et Infrastructures, UJF-
Grenoble I, édition 2004-2005.
[5] Perchat, J., Roux, J. Pratiques du B.A.E.L. 91. Cours avec exercices corrigés,
éditions Eyrolles.
[6] Fauchart, J. Initiation au calcul des structures : béton et acier. Cours de l’Ecole
Nationale des Ponts et Chaussées, éditions Eyrolles, 1977.
[7] Perchat, J. Béton armé. Règles BAEL : Pièces soumises à des sollicitations
tangeantes. Sollicitations d’adhérence. Techniques de l’Ingénieur, traité Construction,
C 2 308, pp. 15-17.

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