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Liberez Vos Points Forts ! - Antoine Carpentier
Liberez Vos Points Forts ! - Antoine Carpentier
Liberez Vos Points Forts ! - Antoine Carpentier
© Dunod, 2021
ISBN : 978-2-10-083015-2
Sommaire
Couverture
Page de Copyright
Introduction
Conclusion
■ « No pain, no gain ! »
Parmi ces croyances, je pointerais d’abord celles tournant autour de
la notion de souffrance, dont les origines remontent très loin dans le
temps.
En le chassant du jardin d’Éden, Dieu dit à Adam : « Tu
gagneras ton pain à la sueur de ton front. » (Genèse III, 19.).
Autrement dit, si tu veux vivre, tu travailleras. On comprend la
connotation négative du travail : le mot « travail » vient d’ailleurs –
cela est très largement connu – du latin tripalium, terme connoté
par la douleur et la souffrance. À l’origine, le tripalium était un
instrument de torture à trois pieux, utilisé par les romains pour
punir les esclaves rebelles. Le mot a été repris pour désigner un
appareil servant à immobiliser les chevaux rétifs qu’il faut ferrer ou
soigner.
Dieu dit également à Ève : « Tu enfanteras dans la
douleur. » Difficile de ne pas faire le lien avec les souffrances
inimaginables qu’ont endurées les femmes pendant des années.
Ajoutons qu’on n’hésitait pas, alors, à rappeler aux futures
mamans inquiètes, la valeur rédemptrice de leurs prochaines
inévitables souffrances ! Soulignons enfin la pugnacité
exceptionnelle qu’il a fallu à certains médecins et personnels
soignants pour que l’ensemble du corps médical (ou presque)
accepte enfin, après des siècles d’apologie de la souffrance, de
tout mettre en œuvre pour soulager les douleurs de
l’accouchement.
La société a évolué, fort heureusement, mais l’intérêt et la
valeur de la souffrance restent présents de façon sous-jacente.
« Pour réussir, il faut souffrir », entend-on encore très souvent, en
alternance avec sa version anglo-saxonne : No pain, no gain !
Un intéressant documentaire sur l’athlète jamaïquain Usain Bolt,
sur lequel je suis tombé par hasard en plein confinement, revenait
sur quelques-unes de ses courses les plus fabuleuses.
À l’occasion de sa victoire olympique au 100 m, lors des JO de
Pékin en 2008 – il bat à cette occasion le record du monde,
réalisant un temps de 9″69, le champion était interviewé par un
journaliste, juste après l’arrivée. Le premier commentaire du
journaliste en question est révélateur de l’empreinte culturelle qui
marque encore la notion de réussite : « ce n’est pas tant la vitesse
à laquelle vous avez parcouru cette distance qui m’a étonné mais
bien l’aisance avec laquelle vous avez accompli cet exploit », dit-il
à Bolt. Sous-entendu : il est quand même curieux de battre le
record du monde sans donner l’impression de se surpasser ni de
faire plus d’efforts que ça… à moins d’être dopé pourrait-on
ajouter avec un esprit retors !
« Ne vous fiez pas aux apparences, réplique immédiatement
l’athlète, vous ne pouvez pas vous imaginer les efforts que j’ai
faits et la souffrance que j’ai dû endurer ces deux dernières
années pour en arriver à ce niveau de la compétition. »
Il est évident qu’un exploit comme celui-ci est la conséquence
d’un entraînement hors du commun, fait d’efforts intenses et
répétés. L’essentiel se joue avant la course et c’est bien le prix à
payer pour trouver, le jour J, ce relâchement qui, dans le cas de
Bolt, laisse penser que la course est facile. Mais, dans l’esprit du
journaliste, on devine que la victoire aurait pu sembler plus belle –
et peut-être moins suspecte – si Bolt avait montré de plus grands
signes d’effort. Cette notion de No pain, no gain est si forte qu’elle
nous porte souvent à admirer davantage ceux qui font des efforts
– sans succès – que ceux qui obtiennent des résultats – sans
avoir eu l’air de beaucoup souffrir.
Le « héros » doit mériter son statut : idéalement, il aura dû lutter
contre ses handicaps de départ, il aura démontré une capacité à
endurer la souffrance. Il aura échoué, sera tombé, se sera relevé.
Peut-être aura-t-il réussi à la fin, mais en ayant gardé des
séquelles de ses efforts, à moins même, que le pauvre n’en soit
mort.
À l’inverse, il sera difficile d’être ainsi consacré pour celui ayant
eu l’arrogance de réussir sans (trop) souffrir, en tous cas sans
assez démontrer la probable dureté de ses efforts. S’il y a dans
son histoire, des conditions favorables, des atouts, des succès
rapides, peu d’erreurs, pas d’échec, il lui faudra accepter de
susciter d’étonnants sentiments de jalousie ou de suspicion plutôt
qu’un élan d’admiration. J’ai en mémoire les discussions que nous
avions eues dans une grande entreprise française au sujet
justement des effets de cette « culture du héros » sur la conduite
des projets.
Les responsables du département R&D de ce groupe
multinational avaient constaté qu’une partie des chefs de projet
avaient l’habitude de piloter leur projet de façon très
professionnelle selon les meilleurs principes et méthodes de
gestion de projet, ce qui assurait, dans la plupart des cas, une
création de valeur optimale – le projet aboutissant au résultat
attendu, dans le temps et le budget impartis. Le déroulement de
ces projets n’était naturellement pas exempt des difficultés, des
imprévus, des déconvenues inhérents à tous les projets, mais la
discipline de pilotage mise en place permettait au chef de projet et
à son équipe d’anticiper les dérives, d’éviter ou de maîtriser les
écarts et d’agir ou réagir sans délai. Tout portait à croire que ces
chefs de projet seraient les plus reconnus dans l’entreprise… On
pouvait aussi imaginer que leurs méthodes allaient être enviées et
copiées par tous les autres.
C’était sans compter sur le poids de la culture du « héros » !
Non seulement ces chefs de projet appliqués n’avaient pas
valeur de modèles, pas plus que leurs méthodes n’étaient imitées
dans tous les projets, mais pire : ceux qui faisaient figure de
« stars », au sein de cette entreprise, étaient plutôt des chefs de
projet « héroïques » qui, armés de courage, d’abnégation, de
persévérance, de résilience même, avaient livré de mémorables
batailles à l’occasion de projets au déroulement particulièrement
chaotique !
Plus il y avait de problèmes sur un projet, plus le chef de projet
pouvait démontrer l’étendue de son héroïsme : comment aurait-il
prouver sa valeur si, en mettant en œuvre toutes les bonnes
pratiques, il était parvenu à anticiper et éviter les problèmes ?
C’est ainsi que dans cette entreprise, les récits se
transmettaient des anciens aux nouveaux, à chaque occasion de
rassemblement. Un ingénieur confirmé vantait les mérites de tel
autre d’avoir mené à son terme un projet, qui à force de retards et
de compromis techniques, s’était révélé finalement être un gouffre
financier pour le groupe. Un vieux de la vieille se souvenait, une
larme à l’œil, de ces incroyables aventures vécues, au cours d’un
projet d’implantation d’usine dans un pays lointain, sous la
houlette d’un chef de projet, plus meneur de bande que pilote de
projet.
Les responsables de l’entreprise s’étaient ainsi rendu compte
que les moments de tension qui émaillaient les projets difficiles
avaient, avec le recul, bien plus soudé les équipes que les
paisibles réunions de pilotage qui ponctuaient les projets plus
sereins. Ils comprenaient enfin que cette culture du « héros »
pouvait induire un effet pervers et saper les efforts de formation et
de management visant à professionnaliser les pratiques de
conduite de projet.
Si réussir implique nécessairement de souffrir, alors le chemin
des points faibles est la voie royale ! Elle promet un niveau d’effort
considérable, une souffrance certaine, des erreurs et des échecs
probables : de quoi devenir un « héros » ! À l’inverse, le choix
d’une voie plus aisée, celle exploitant au mieux les forces
possédées, ne pourrait donc pas être la bonne : « Quand le travail
n’est pas assez dur, le progrès n’est jamais vraiment sûr ! »,
affirment certains.
Pire, derrière ce dicton apparemment inspiré par la recherche
d’efficacité, se cache une notion plus morale. Choisir le chemin de
la moindre résistance reviendrait à céder à la facilité, à fuir le
courageux combat consistant à affronter nos défauts. À celui qui
ose la confrontation est plutôt attribuée une image noble.
Envisager la voie la plus adaptée à ce qu’on est, et décider de
contourner la souffrance promise plutôt que de la supporter, passe
au contraire pour un aveu de lâcheté…
C’est pour ça que je suis fatigué
C’est pour ça que je voudrais crier :
Je ne suis pas un héros !
Daniel Balavoine, « Je ne suis pas un héros », album Un autre monde, 1980.
■ Plaisir coupable…
Le fabuleux destin du « héros » ne réserve à celui-ci que bien peu
de plaisirs !
Et s’il y en a, ce ne pourra être à l’évidence, que le plaisir-
récompense, celui qui se mérite, une fois le succès
(éventuellement) remporté. Encore devra-t-il être discret et
mesuré, au risque de devenir très vite coupable…
Nous avons sans doute tous en mémoire les images de ces
présidents de la République juste élus ayant fait l’erreur ou
commis la faute (entourez l’expression que vous jugerez la plus
adaptée) de fêter leur victoire électorale dans des restaurants trop
« bling-bling ». Après le Fouquet’s, après la Rotonde, où nous
emmènera le prochain ? Suivra-t-il la règle du « jamais deux sans
trois » ou plutôt l’idée que la 1ère bévue est une erreur, sa
reproduction une faute et la récidive une provocation
impardonnable ?
Notre futur.e président.e nous emmènera-t-il.elle à la crêperie
du coin, chez Flunch ou au McDo, ou devra-t-il.elle renoncer à
fêter sa victoire ? J’avoue attendre avec amusement la prochaine
soirée d’élection présidentielle… Dans cette conception du plaisir
comme récompense, apparait bien sûr la vieille image du paradis,
auquel nous pourrions accéder après une vie de souffrance.
Ainsi s’est établi une sorte de logique séquentielle : le chemin,
pavé d’efforts – lesquels seraient associés fatalement à la
souffrance – mènerait ensuite, si ces efforts étaient suffisants, au
résultat, synonyme de délivrance. La souffrance seule autoriserait
la réussite, et la réussite autoriserait le plaisir, récompense ultime.
C’est cette même boucle effort/récompense qui oriente
beaucoup des approches que nous avons de la motivation,
souvent décrite comme la recherche par l’individu d’une
récompense externe censée le satisfaire : salaire,
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reconnaissance, prime, etc…
Dans ce type d’approche, la « fin justifie les moyens » : l’effort
n’aurait pas d’autre intérêt que la récompense à laquelle il pourrait
donner droit. La motivation à réaliser l’action est dite
« extrinsèque », car liée à un élément externe, totalement dissocié
de l’action proprement dite.
Pour prendre un exemple, jouer sur cette logique de motivation,
reviendrait à enseigner les mathématiques à un enfant en lui
promettant qu’en fonction de la note qu’il obtiendra à son devoir, il
recevra le dernier jeu vidéo à la mode. Il y a fort à parier que les
mathématiques ne seront qu’un mal nécessaire, une souffrance
consentie en vue d’un espoir de récompense et de plaisir. On
mesure facilement les limites de cette logique : pas de motivation
réelle ni durable pour les maths, tentation de triche, ou tout au
moins recours au « bachotage » pour obtenir plus facilement la
récompense espérée, inflation des récompenses, etc…
L’autre logique, souvent sous-estimée, est celle de la motivation
« intrinsèque », dans laquelle l’activité est elle-même source de
plaisir. Réaliser l’action suffit à motiver, sans qu’il n’y ait besoin
d’attribuer une récompense en plus.
Dans l’exemple de l’enfant, il s’agirait de l’aider à trouver ce que
les mathématiques peuvent en tant que telles, lui apporter : peut-
être le plaisir du jeu, la découverte des nombreux usages que l’on
peut en faire, la satisfaction de résoudre des problèmes ou le fait
d’exercer ses talents… J’y reviendrai plus en détail dans le
chapitre consacré à la mise en œuvre de la logique des points
forts.
Face au poids de l’équation effort = souffrance, il a toujours
semblé « contre-culturel » de penser qu’il pouvait y avoir aussi du
plaisir dans le chemin, qu’effort et plaisir non seulement n’étaient
pas opposés, mais bien compatibles : en jouant sur ses forces, en
choisissant des plans qui valorisent nos talents, nous pouvons
allier action et motivation, prendre du plaisir à travailler et atteindre
des résultats plus grands que ceux construits dans la souffrance.
C’est le sens, selon moi, de l’expression « goût de l’effort »,
proche de l’oxymore à première lecture : si, dans la culture
dominante, le mot goût renvoie plutôt au plaisir, celui d’effort est
davantage connoté à la notion de souffrance. Sous cet angle, dire
qu’on a le goût de l’effort, c’est avouer un sérieux penchant
masochiste ! D’un autre point de vue, en considérant cette fois
qu’il existe bien des efforts que nous faisons avec plaisir – parce
qu’ils mettent par exemple en valeur nos forces et nous
permettent de nous sentir à l’aise dans l’action, nous pouvons
affirmer qu’il nous arrive bien de « goûter » (au sens d’apprécier)
certains efforts.
J’irais plus loin encore : ce ne sont pas tant les résultats qui
donnent du plaisir, que le plaisir qui donne les résultats.
Je ne crois pas, en effet, que l’effort-souffrance soit réellement
une condition de succès.
• Ce n’est pas parce que certains ont beaucoup souffert avant de
réussir, que cela démontre qu’il faut souffrir pour réussir !
• Ce n’est pas parce que certains ont connu des échecs avant
d’avoir du succès, que cela atteste que l’échec est un passage
obligé pour qui cherche le succès !
• Ce n’est pas parce que certains ont réussi sur leurs points
faibles, qu’il faut empêcher les autres de parier sur leurs points
forts !
■ Le mythe de la perfection
Le dernier pilier de notre culture est peut-être celui qui est le plus
profondément ancré dans notre inconscient collectif. C’est en tous
cas celui qui participe le plus efficacement à fonder et entretenir
l’idée dominante qu’il est indispensable de travailler ses points
faibles. Ce pilier est celui de l’idéal de perfection.
La croyance qu’il porte consiste à faire de la perfection, LA
condition essentielle de la réussite.
Dans la logique de cette croyance, chercher la perfection serait
donc un enjeu de premier plan pour chacun d’entre nous.
L’idée n’est bien sûr pas totalement saugrenue : celui qui
posséderait toutes les qualités possibles pourrait exceller en tout.
On trouve facilement, dans le prolongement de cette idée,
d’amusants exercices proposant de dresser le portrait robot du
mari ou de l’épouse rêvé∙e (au cas où vous ne l’auriez pas déjà
trouvé∙e (écriture inclusive, bien sûr !), du ou de la top-model
parfait.e ou encore du champion de tennis imbattable.
Ce dernier, par exemple, empruntera à Federer son sens du
timing (ce n’est pas un Suisse pour rien !), à Nadal ses qualités
mentales de guerrier (on le compare souvent à un taureau… la
différence avec la corrida, étant qu’à la fin, sur la terre battue, c’est
plus souvent le taureau qui gagne !), à Djokovic sa souplesse,
etc…
Le jeu du parfait composite est amusant, et comme souvent,
s’agissant de sport, il suscite d’interminables débats sur les
comparatifs de qualités des uns ou des autres : mais tout le
monde a compris que ce joueur-là n’existait pas et non pas parce
qu’il n’était pas encore né, mais parce que simplement aucun
individu ne pouvait réunir toutes les qualités et leurs contraires en
même temps !
Si cet exercice anodin ne prête pas à conséquence, il en existe
d’autres qui peuvent induire de fâcheuses dérives. C’est le cas, à
mon sens, des référentiels de compétence construits par
beaucoup d’entreprises, et visant à définir ce qu’on attend d’un
collaborateur dans telle ou telle fonction : référentiel de
compétence, référentiel de management, …
Ce n’est bien sûr pas le référentiel en lui-même qui pose
problème : définir les exigences à tel ou tel poste est
incontestablement utile. Ce qui est en cause, c’est plus l’usage qui
en est fait ensuite, dans lequel la mention « à l’idéal » semble
oubliée.
La limite de la recherche de perfection réside dans la traduction
pédagogique qu’on en fait, lorsqu’oubliant l’aspect idéaliste de la
notion, le « modèle » n’est plus utilisé que pour repérer les points
faibles à travailler. Le moindre écart est présenté comme une
« anormalité » à corriger. Pour l’individu ainsi évalué, le diagnostic
est sévère et parfois lourd de conséquences : doute,
découragement, inquiétude, démotivation…
« Insuffisant », « incompétent », « niveau faible », ou tout
simplement « niveau – – » indique la colonne dans laquelle sera
tracée la croix lors de l’entretien annuel d’évaluation, sur chaque
ligne se rapportant aux points faibles.
Sur les autres lignes, correspondant pourtant aux points forts, il
ne sera pas indiqué « qualité remarquable » ou « point fort »…
mais souvent « satisfaisant », « conforme », « + + » ou parfois
« supérieur aux attentes ».
Par un effet de glissement moral, le référentiel devient
finalement une « grille d’évaluation » portant, qu’on le veuille ou
non, un jugement beaucoup plus qu’une aide à la connaissance
de soi. Mais on touche ici à un autre débat : celui de la raison
d’être ce ces entretiens annuels. Ceux-ci sont petit à petit devenus
l’un des outils-clés du processus de gestion des ressources
humaines, dans sa version rationnelle et financière. Ils ont été
souvent détournés de leur vocation initiale, très alignée avec le
sujet des points forts : un moment privilégié dans la relation
managériale – déconnecté des contingences quotidiennes –
permettant au manager et au collaborateur, de rechercher
ensemble la meilleure voie de progrès et de succès.
Dans cette optique d’origine, ce qui prime ce n’est donc pas tant
l’analyse des écarts avec le référentiel que la connaissance par
l’individu des qualités sur lesquelles il peut s’appuyer pour
continuer de se développer. Cette injonction à chercher la
perfection, donc à combler les manques ou corriger les défauts,
semble méconnaître les fonctionnements de l’individu. Comme
nous l’avons souligné déjà, points forts et points faibles ne sont
que les deux faces d’une même pièce. Par définition donc, parce
que nous possédons tous un côté pile (nos préférences, nos
qualités, nos forces), nous avons tous également un côté face (les
qualités opposées, que par nature donc, nous n’avons pas, ou en
tous cas qui sont moins facilement activables par nous).
Construits sur le désir de perfection, les référentiels ne tiennent
pas compte de cette réalité : en se contentant de lister les
attendus, ils dressent une sorte de portrait-robot de l’être sans
défaut, sorte de mouton à 5 pattes9.
Peut-être s’inspirent-ils du célèbre poème de Rudyard Kipling if,
traduit en 1918 par André Maurois sous le titre Si : tu seras un
homme mon fils.
Erreur de diagnostic ?
Il est même tentant d’aller plus loin dans le raisonnement. Et si cette
injonction à travailler nos points faibles relevait d’une mauvaise
analyse de nos difficultés ? Si, finalement, le défaut n’était pas la
cause de tous nos problèmes ?
Trop superficielle, l’analyse que nous faisons des échecs ou des
difficultés rencontrées se contente souvent de mettre la lumière
sur nos points faibles.
• L’équipe sportive sera passée à côté de la victoire à cause de
ses lacunes défensives légendaires, diront les commentateurs.
• Le manager en difficulté, confronté à une multiplication de
dérives de comportement au sein de son équipe, paye le prix
de son manque de fermeté, conclura le DRH.
• L’étudiant, recalé à un concours, regrettera ses lacunes
persistantes dans cette matière qu’il n’a jamais aimée.
• « Manque de puissance au service », analysera le journaliste
après la défaite de ce tennisman pourtant prometteur. Sans un
travail assidu, pour renforcer son physique et affiner sa
technique, il ne parviendra pas à se hisser au meilleur niveau,
affirmera-t-il.
Le choix de l’efficience
Les points forts, rappelons-le, constituent bien des ressources
internes : ce sont des qualités (physiques, mentales…) ou des traits
de caractère que nous possédons et que nous activons de façon
spontanée et facile.
Dès lors que la situation dans laquelle nous nous trouvons ou le
plan d’action que nous choisissons nous permettent de mettre en
œuvre ces qualités, nous bénéficions d’un effet de levier : peu
d’énergie suffit à produire des résultats.
Efficacité prouvée !
À la recherche de l’excellence
Sans nécessairement chercher à trouver le Graal que représente cet
état de flow, aussi difficilement accessible que reproductible,
il convient bien de considérer les points forts non comme un acquis
mais bien comme un potentiel à développer.
Comme le disait déjà la Parabole des Talents, évoquée au
début du livre, il serait dommage de se contenter s’user de ses
forces et de ne pas faire fructifier les dons que l’on possède. Avoir
du talent n’est pas qu’une chance : c’est aussi un devoir, celui de
le travailler.
Trop souvent encore, en parallèle de l’injonction corrective, on
entend dire : « ce n’est pas la peine de travailler cet aspect, c’est
déjà un point fort ! »
Laisser un talent en jachère fait courir plusieurs risques. Bien
sûr, celui déjà cité, consistant à perdre la confiance en son
« modèle » de performance voire la conscience même de ses
forces. Mais aussi, le risque de perdre petit à petit en maîtrise : le
talent seul ne fait pas tout. Seul le travail permet de consolider la
pratique, d’ajouter de la technique au don.
Les politiques de formation continue, mises en œuvre dans les
entreprises, répondent plus souvent, comme nous l’avons déjà
souligné, à la logique corrective qu’à celle du développement des
points forts.
« Pourquoi envoyer un commercial dans un module sur l’écoute
puisqu’il possède naturellement ce don de bien écouter ? », peut
arguer le responsable formation.
Voici pourtant quelques bonnes raisons de le faire :
• La motivation d’abord : le vendeur en question viendra sans
doute avec envie pour participer à un module de formation qui
valorise ce qu’il est et ce qu’il sait faire (bien plus qu’assister à
une session qui le remet en cause et le met en difficulté…).
• La consolidation : en ajoutant de la technique à ce qu’il fait
certainement déjà naturellement, le vendeur en ressortira
conforté, plus confiant, plus solide, avec un sentiment renforcé
de compréhension de son « modèle » de performance. Il sera
d’ailleurs capable de transmettre plus facilement à ses
collègues une partie de son savoir-faire (impossible à
transmettre quand il ne se fonde que sur le talent « brut » et en
partie inconscient).
• L’amélioration : le commercial pourra très probablement trouver
dans la formation de nouvelles techniques, de nouvelles
pratiques rendant son écoute plus pointue, plus précise encore.
• L’application : on le sait bien, les participants, après une
formation lambda, ne mettent en pratique que très peu
d’éléments… Ce taux d’application est bien plus élevé quand
les stagiaires repartent avec des engagements alignés avec
leurs forces et l’envie souvent grande de les tester.
Miser sur ses points forts ne consiste donc pas à rester dans sa
zone de confort : il s’agit d’en repousser les limites, non pas en
basculant dans la logique corrective, mais en poussant plus loin le
développement de ses qualités naturelles. Car si l’espoir que l’on
peut nourrir en travaillant ses points faibles reste limité à la seule
acquisition d’un niveau de base, l’objectif que l’on peut se fixer en
cultivant ses forces est bien plus ambitieux : c’est un objectif
d’excellence.
La spirale de confiance, la motivation intrinsèque, l’efficacité
constatées par celui qui exploite ses talents dessinent en effet des
perspectives de progrès très profondes.
Déjà évoquée au début du premier chapitre de ce livre, la
théorie du psychologue d’origine suédoise, K. Anders Ericsson
évalue à 10 000 heures le temps nécessaire à l’atteinte d’un
niveau d’excellence dans une activité donnée.
10 000 heures équivalent à 10 ans de travail à raison de
20 heures par semaine ou 5 ans à temps plein. Selon Malcolm
Gladwell, qui a largement contribué à populariser ce « nombre
magique de la grandeur » (“magic number of greatness”), tous
ceux qui sont devenus maîtres dans leur discipline ont travaillé
plus que la moyenne, qu’ils soient magnats des affaires, artistes,
sportifs, génies de l’informatique, scientifiques de renom…
Chacune des personnalités qu’il étudie (de Bill Gates aux
Beatles) possède d’indéniables talents au départ, probablement
même supérieurs à la moyenne.
C’est bien d’ailleurs l’existence de ces pré-dispositions qui
permettent de déclencher et d’entretenir la motivation que requiert
l’effort de ces 10 000 heures de pratique : jamais, partant d’un
point faible, un individu pourrait endurer une telle charge de
travail.
À une époque où l’accès à l’informatique était encore réservé
aux spécialistes, Bill Gates, adolescent, avait trouvé différentes
façons de s’adonner à sa passion pour la programmation : en
proposant à des entreprises de tester leurs programmes, le futur
fondateur de Microsoft a commencé à cumuler des heures à se
perfectionner. Découvrant, à 15 ans, que les ordinateurs du centre
médical de l’université de Washington ne servaient pas la nuit
entre 3h et 6h, Bill Gates et ses amis continuaient à exercer leur
pratique, à l’heure où les autres adolescents du même âge
dormaient paisiblement. Ainsi, quand Bill Gates achevait ses
études à Harvard, il cumulait déjà 7 ans d’informatique à haute
dose, largement plus que les 10 000 heures de travail.
Entre 1957 (date de la première rencontre entre Lennon et
McCartney) et 1964 (année de l’explosion de leur succès), les
Beatles se sont produits ensemble des centaines de fois, jouant
parfois des heures durant. Alors même qu’ils n’avaient toujours
pas sorti de disque, ils possédaient déjà un impressionnant niveau
de maîtrise de leur art.
La règle des 10 000 heures tente finalement de mesurer le
temps qu’il faut pour « modeler » le cerveau : une fois capable de
fonctionner de façon automatique (les « modèles » déjà évoqués
précédemment), le cerveau devient disponible pour d’autres
aptitudes. Parmi celles-ci, l’intuition, l’anticipation, la créativité
semblent jouer un rôle-clé pour permettre aux « génies »
d’accéder au firmament de leur art.
L’idée n’est évidemment pas d’aspirer systématiquement à
devenir une star du rock ou un patron emblématique ! Il s’agit juste
ici de souligner que les points forts constituent un potentiel
fantastique : grâce à la spirale de motivation et de confiance qu’ils
nourrissent, il est possible d’accéder à un niveau de maîtrise et de
performance inespéré.
Exceller dans un domaine, en s’appuyant sur ses points forts,
est évidemment très précieux. Par effet de halo, cela permet
parfois de compenser ou sur-compenser ses faiblesses : l’éclat
des succès obtenus masque les défauts !
Comme le prédisait Roger Federer à 17 ans : « J’ai un gros nez,
mais quand je serai numéro 1 mondial, les gens ne le verront
plus ! ».
Miser sur les points forts, ce n’est pas seulement se servir, c’est
aussi servir. Nos forces ne sont pas seulement un atout « pratique »,
elles portent en elles une dimension « éthique » : en les mettant au
service du monde extérieur, elles prennent tout leur sens et
contribuent à en nourrir celui de notre existence.
Allier performance et sens, c’est en quelque sorte le pari que fait
l’équipe d’Initiative Cœur, bien connue dans le monde de la voile. En
s’alignant au départ des plus prestigieuses courses autour du monde
(Vendée Globe, Route du Rhum, Transat Jacques Vabre, etc.),
l’Imoca9 Initiative Cœur, barré par la talentueuse navigatrice
Samantha Davies, promeut la cause de l’association Mécénat
Chirurgie Cardiaque10, tout en relevant un défi sportif et technique de
haut niveau. Profitant de l’exposition médiatique des aventures de la
skipper et grâce au soutien de ses partenaires (K-Line, VINCI
Energies…), le projet a permis à Mécénat Chirurgie Cardiaque de
financer 314 opérations d’enfants depuis 2012.
Pour des sportifs de haut niveau, comme Samantha Davies (ou
avant elle, Tanguy de Lamotte, skipper d’Initiatives Cœur entre 2012
et 2017), vivre de ses talents est en soi déjà un privilège. Pouvoir les
mettre au service d’un projet et d’une cause comme celle-ci donne
un sens bien plus grand encore à l’aventure.
L’être unique
Miser sur ses points forts, choisir résolument de développer ses
talents, revient finalement à affirmer ce qu’on a de singulier.
Depuis nos plus jeunes années, la logique corrective, l’un des
bras armés de la pression sociale, cherche plutôt à conformer,
en gommant les défauts – mais, on l’a compris, en atténuant par
conséquent aussi les forces. Ne pas être faible mais ne pas être trop
fort non plus. Noyer nos façons de faire trop personnelles dans un
océan de bonnes manières conventionnelles (je dénonce mais je
poétise !).
Et s’il faut briller, ce doit être davantage par le combien que par le
comment : réussir mieux que les autres, en faisant comme les
autres ! De cette conception du succès découlent, à mon sens,
rivalité malsaine, jalousie, frustrations… pour, en fin de compte, peu
de succès !
Copier les autres, vouloir « faire comme » ses idoles, voilà un des
réflexes conditionnés par la logique conformiste, que l’on retrouve
dans beaucoup d’univers, notamment chez les jeunes sportifs.
Imiter le swing de Tiger Woods, reproduire les gestes de Messi ou
mimer le coup droit de Nadal sont quelquefois les vaines obsessions
des athlètes en devenir.
L’entraîneur de natation Fabrice Pellerin confie avoir un temps cru
en la puissance de la reproduction, idée encore largement partagée
par certains de ses confrères tous sports confondus. Et, ajoute-t-il,
même « si le succès sportif n’est pas au rendez-vous, pas question
d’incriminer l’insuffisance de cette méthode imitative et causale,
mais plutôt celle des athlètes censés s’y soumettre. Ils n’auront pas
assez bien répété, pas assez studieusement exécuté. CDFD. »
Ainsi, raconte Fabrice Pellerin, au début de la décennie 2010,
l’une des priorités pour le prometteur Yannick Agnel, consistait à
copier le champion américain Ryan Lochte qui se distinguait alors
par une impressionnante « coulée » d’après-virage, extrêmement
rapide et longue d’une quinzaine de mètres – là où les autres
nageurs remontaient à la surface après seulement six ou sept
mètres en moyenne !
Après plusieurs mois de travail, raconte l’entraîneur, Yannick
Agnel a travaillé dur pour allonger sa « coulée » et tenter de copier
l’atout du « modèle » américain. Mais, même en parvenant à
« couler » jusqu’à huit mètres, le nageur reste encore loin du niveau
de son rival, comme en atteste cette décevante 5ème place en finale
des championnats du monde de Shangaï en 2011. La frustration est
d’autant plus grande, précise Fabrice Pellerin, qu’à l’entraînement,
Ryan Lochte ne parait pas investir beaucoup d’effort à travailler sa
« coulée » !
C’est de l’observation de ce paradoxe que le coach a tiré l’un des
enseignements qui a ensuite orienté sa pratique, et qu’il désigne
sous le terme d’impersonnation : « Lochte gagne car il possède un
joker né de son irréductible singularité. Les concurrents auront beau
tenter de le parodier : n’ayant ni le même physique, ni les mêmes
aptitudes, ils ne pourront jamais l’égaler […] Rien n’est plus efficace
que de cultiver notre singularité, notre intime façon de faire, la
qualité qui nous fait sortir du lot, ce style irremplaçable, ce petit
quelque chose qui nous différencie et, surtout, que les autres n’ont
pas. »
C’est ainsi que Fabrice Pellerin se mit ensuite à chercher la
« botte secrète » de ses nageurs et nageuses.
Pour Yannick Agnel, ce fut un geste, consistant à baisser la tête,
comme pour s’effacer sous l’eau, environ un mètre cinquante avant
d’aborder son virage, geste qui, après ses performances
exceptionnelles de 2012 et 2013 (2 médailles d’or aux JO de
Londres, deux autres aux Championnat du Monde de Barcelone
l’année suivante), fut copié et imité par une partie de ses
concurrents ! À noter que malgré sa « coulée » toujours au-dessus
du lot, Lochte ne put rivaliser lors de la finale du 200 m nage libre,
remportée cette fois par Yannick Agnel.
Pour Camille Muffat, la « botte secrète » eut d’abord l’apparence
d’un défaut : une sorte de roulis que, d’ordinaire, n’importe quel
entraîneur aurait cherché à gommer. En l’encourageant au contraire,
Pellerin y a décelé un atout permettant à la championne de trouver
un relâchement et une allonge finalement gages de performance.
« Pour performer, il faut plutôt faire croître et embellir ce qui
n’appartient qu’à nous », en conclut Fabrice Pellerin. Cultiver sa
singularité ouvre une voie de réussite. Mais c’est à mon sens, un
chemin qui mène bien plus loin encore. Le but ne se résume pas à
l’aspect compétition : « être le meilleur ». Il intègre aussi, et surtout,
la dimension réalisation de soi : « être pleinement soi », éprouver le
sentiment de pouvoir, au travers d’une activité, exprimer ce qu’on
est.
Voilà qui peut ouvrir une perspective plus large aux débats sur la
recherche de sens et renouveler le traditionnel exercice du projet,
qu’il s’agisse d’un projet personnel ou d’un projet d’entreprise.
Même si, dans le contexte inédit, inattendu et pour le moins
bousculé de cette année 2020, l’ambiance n’est pas à l’affirmation
de grandes ambitions, on continue de constater que nos projections
sur le futur restent teintées d’une logique de « conquête du
monde » : devenir no 1 sur le marché, ou gagner la médaille d’or,
accroître les parts de marché, ou gagner plus d’argent, etc… autant
d’exemples inspirés de la culture conformiste qui, outre la volonté de
copier, suscite l’esprit de compétition ou de comparaison.
Penser « conquête de soi », en cherchant à développer sa
singularité, c’est ouvrir un autre champ, hors de la rivalité avec les
autres, tourné vers l’exploration et l’affirmation de soi : l’enjeu n’est
pas de ravir ce que d’autres possèdent, bien plutôt d’ouvrir un
nouvel espace… au risque d’ailleurs qu’il finisse lui-même par attiser
la convoitise !
La méthode empirique
La façon la plus simple d’identifier ses talents consiste à se fier à
son expérience. L’analyse de ce que nous avons fait, réussi ou raté,
permet de comprendre, années après années, notre propre
« modèle de performance » – pour reprendre l’expression déjà
utilisée dans le chapitre 3.
Engager ce travail d’exploration suppose deux conditions.
La première condition est de ne pas arrêter l’analyse au « quoi »
– qui peut en revanche utilement servir de point d’entrée dans la
réflexion – mais bien de creuser jusqu’au « comment ». Un point
fort ne se définit pas par une action, une situation, une activité
dans laquelle je réussis bien. Un point fort est une qualité qui me
permet de réussir facilement dans l’action, la situation ou l’activité
ou grâce à laquelle j’ai pu développer la compétence
superficiellement visible.
La seconde condition est de résister aux tentations de l’analyse
version corrective, centrée sur ce qui a manqué. La recherche des
points forts implique de conduire la recherche sur un seul axe que
l’on pourrait résumer en une question :
Zone aveugle
Zone publique
Ce qui est Ce que les Autres voient
connu des Autres Ce qui est perçu par tout
de moi, que je ne vois
le monde
pas
S’il y a une grande cohérence entre les qualités citées par le ou les
tiers et celles que j’ai identifiées de mon côté, cela atteste d’une
zone publique très large : en l’occurrence, cela signifie que je suis
déjà probablement très centré sur mes points forts. Je joue souvent
sur ces qualités-clés et mon entourage me reconnait ces talents.
Quand les divergences de vue font apparaitre des qualités
perçues par mon entourage que je ne m’étais pas attribuées – en
tous cas pas comme un point fort – c’est qu’il y a une zone
aveugle, comme une sorte d’angle mort. Je ne suis pas conscient
de posséder une qualité que les autres, pourtant me
reconnaissent. Il s’agit d’une situation somme toute très logique :
un point fort étant une qualité que nous utilisons spontanément et
naturellement, nous pensons souvent qu’elle fait partie de la
nature humaine et que tout le monde, autour de nous, la possède
et sait la mettre en œuvre de la même manière. Une fois encore,
la culture corrective et le peu d’attention portée aux qualités,
encouragent cette tendance, exactement comme elles favorisent
la croyance inverse, consistant à penser que nous avons plus de
défauts ou que ceux-ci sont plus marqués que la moyenne !
Dans la zone cachée, s’inscrivent les qualités que je me
connais, mais que l’entourage consulté ne m’a pas attribuées.
Il peut s’agir notamment de traits de personnalité ou de talents
qui font effectivement partie intégrante de ce que je suis, mais qui
ont plutôt été pointés comme des défauts que comme des
qualités. Pour cette raison, j’ai pu prendre l’habitude de les cacher,
par exemple en ne les exprimant que dans certaines activités
privées.
C’est aussi le cas de certaines qualités que j’ai développées
dans certains domaines ou activités et qui, à première vue, ont pu
me sembler « décalées » ou « incongrues » dans d’autres
domaines. En pratique, dans certaines missions
d’accompagnement d’équipes de Direction, dans le but de
favoriser une meilleure cohésion et de faire travailler le collectif sur
l’alliance et la complémentarité des qualités, il m’arrive de
m’inspirer de cette grille.
J’ai ainsi le souvenir d’une réunion Codir3 particulièrement
impliquante, dans laquelle chaque directeur, à la demande du
directeur général, s’était livré à un petit exercice d’ouverture aux
autres, consistant à partager le rêve qui était le sien à
l’adolescence.
« Je dois vous faire une confidence, avait lancé le directeur
général : quand j’avais 15 ans, je ne rêvais pas de devenir DG
d’une entreprise agro-alimentaire… Je voulais être explorateur,
découvrir des territoires inconnus, vivre l’aventure, repousser les
frontières, etc… Et finalement, ajouta-t-il, je crois que ce qui me
plait dans mon job aujourd’hui, ce sont ces mêmes dimensions.
Ce dont je prends conscience, c’est que cette envie-là, je ne l’ai
finalement jamais plus développée que ça dans ma mission. »
« Et vous, c’était quoi votre rêve ? » avait alors enchaîné le DG
en s’adressant aux autres membres du Codir.
Parmi les réponses, celle du DRH m’avait marqué : « moi, à
15 ans, je rêvais d’être clown : je voulais faire rire les gens,
apporter du bonheur et voir de la joie dans leurs yeux !… et
finalement, dans ma carrière, j’ai fait des plans sociaux, des
négociations syndicales, des accords d’entreprise, que des trucs
pas drôles. »
De fait, bien que souvent souriant et toujours poli, l’homme
n’avait rien d’un clown, ni d’un clown blanc encore moins d’un
Auguste. D’ailleurs, autour de la table, ses collègues du Codir
n’avaient pas pu s’empêcher de sourire du décalage entre l’image
renvoyée par le professionnel et ce rêve intime qu’il venait de leur
livrer.
D’ailleurs, avait ajouté le DRH, « vous ne le savez pas – et peu
de gens en dehors de ma famille le savent – j’ai longtemps
consacré une partie de mon temps libre à faire des spectacles. Je
mets mon costume de clown, je fais mon numéro et je fais rire des
gens qui ne se doutent pas une seule seconde que j’orchestre par
ailleurs un plan de licenciements ! »
Il y eut, ce jour-là, un déclic intéressant dans cette équipe de
Direction. Au-delà des vertus relationnelles de tels échanges qui
ont immanquablement contribué à rapprocher les individus les uns
des autres, chacun a compris qu’il avait des qualités, cachées ou
publiques, développées ou endormies et qu’il pouvait
certainement trouver à les exprimer au sein de l’équipe, tant pour
son épanouissement personnel que pour la réussite collective.
Le DRH, au quotidien, découvrit qu’il pouvait, dans certaines
situations, investir bien davantage les qualités humaines qu’il
n’osait le faire avant, de peur de perdre en autorité. Certes, il lui
fallait garder une certaine distance dans les moments de
négociation par exemple. Mais il comprit aussi qu’il gagnait
beaucoup, en plaisir et en influence, à jouer sur ses points forts
quand il s’agissait d’interagir avec les autres le reste du temps.
Pour l’anecdote, sur l’idée d’un de ses camarades du Codir,
il accepta, quelques semaines plus tard, d’assurer une partie du
spectacle de Noël que l’entreprise, traditionnellement, offrait aux
enfants des salariés. Personne, ce soir-là, ne le reconnut. C’est en
venant saluer son public, à la fin du spectacle, une fois retiré son
chapeau, son nez rouge et sa perruque, que les salariés eurent la
surprise de découvrir que le clown qui les avait fait rire, était le
DRH… ou l’inverse !
Enfin, pour finir de compléter cette matrice de Johari, si même
avec l’aide de tiers, je ne parvenais pas à identifier clairement des
points forts, qu’il y avait donc une très large zone mystère, cela
pourrait révéler le très fort impact de la culture corrective dans
laquelle j’ai probablement baigné. Dans ce cas d’ailleurs, il est
frappant de constater que n’apparaitraient dans cette matrice de
Johari que les défauts et les points faibles : ceux que je cherche à
cacher, ce que je reconnais (trop) volontiers et sans doute ceux
que les Autres n’osent pas ajouter (tellement ils craignent
d’épuiser le peu de confiance qu’il me reste !).
En prenant un peu plus de recul encore, l’échange avec les
tiers, au-delà même de ce seul sujet des points forts, a le mérite
d’aider à agrandir la zone publique, soit en m’amenant à dévoiler
ce que je cachais (ouverture de soi), soit en prenant en compte ce
que perçoivent les autres (demander du feedback sur soi).
S’affirme à nouveau ici la recherche d’un plus grand
« alignement », entre ce qu’on est et ce que l’on vit (ce que l’on
fait, ce pour quoi on est reconnu, etc…).
La méthode empirique a le mérite donc d’obliger à
l’introspection et, comme nous venons de le voir, la vertu
également de nous amener à chercher le regard des autres.
L’intérêt, pour qui s’engage sur cette route, n’est pas seulement
d’arriver à destination et d’avoir donc identifié ses qualités-clés : il
est aussi de profiter de ce qu’il peut découvrir en chemin, bien au-
delà de ses seuls points forts.
Néanmoins la crainte de l’errance, le temps passé ou l’envie
d’être rassuré par un modèle éprouvé peuvent motiver à choisir
d’autres moyens d’apprendre à mieux connaître ses forces.
Tests en stock !
Sur le marché des tests de personnalité, l’offre est abondante.
Différents modèles se côtoient, et certains se complètent, offrant
chacun la possibilité de se découvrir sous un angle différent.
■ Avant de choisir
La plupart des modèles peuvent aider à identifier ses forces – et par
la même occasion, ses faiblesses.
Là est l’un des points-clés à valider pour qui est tenté de passer
l’un de ces tests :
Quelle est la philosophie qui le sous-tend ? Est-ce la
traditionnelle logique corrective qui en donnera une lecture
« points faibles à améliorer » ? Est-ce bien l’approche « points
forts » qui visera à faire ressortir les qualités à utiliser et à
renforcer ?
Et, surtout, au-delà du choix du test lui-même, quelle est
l’intention du consultant qui débriefera les résultats ?
Rappelons-le ici, l’intérêt de ces tests, aussi bien construits
soient-ils, n’est pas seulement dans la lecture d’un rapport, mais
dans l’échange auquel invite l’analyse des conclusions. Comme je
l’ai déjà souligné, nous avons tous en nous les différents traits de
caractère ou les différentes aptitudes : même si nous nous
contentons parfois, en parlant de soi ou de quelqu’un d’autre, de
le résumer en « tout ou rien », la réalité est bien plus nuancée.
Il arrive ainsi souvent que les résultats à tel ou tel test ne
fassent pas ressortir de très forte aspérité, l’individu testé
semblant avoir « un peu » de toutes les qualités : symptôme de
celui qui n’a pas, jusque-là, résolument choisi de s’appuyer sur
ses points forts ou capacité « caméléon » de celui qui, avec les
années, à appris, à utiliser ses qualités en fonction des situations
qu’il rencontre. Le seul moyen d’aider l’individu à mieux se
connaître est de le questionner : dans quelles situations se
comporte-t-il de cette façon ? Pourquoi ? Qu’est-ce qui peut
l’amener à se comporter différemment dans d’autres situations ?
Etc…
À la logique psychométrique des questionnaires de
personnalité, doit venir s’ajouter l’éclairage empirique : les chiffres
et les conclusions des tests ne délivrant pas de vérité absolue, ne
sont que des « prises », comme celles qui permettent à l’alpiniste
de progresser dans son ascension.
Dans beaucoup de modèles, les résultats positionnent la
personne testée sur des axes correspondant aux différentes
qualités. Par exemple, en fonction des réponses à un certain
nombre de questions, le modèle évalue le niveau
d’introversion/d’extraversion.
Sur cet axe, il n’est pas rare de voir des résultats équilibrés,
sans que l’un de ces penchants ne semble plus développé que
l’autre. En l’état, de tels résultats n’apportent qu’assez peu
d’enseignements, si ce n’est qu’il serait tentant d’en déduire
qu’aucun de ces deux traits de personnalité ne constitue un point
fort !
L’enquête à mener sur les bases de ce résultat doit permettre
d’en savoir plus, et par exemple, de découvrir qu’il y a bien,
derrière la capacité à activer également les deux qualités, une
préférence.
Ainsi l’individu peut expliquer qu’il lui arrive souvent d’utiliser
son aptitude extravertie : dans de multiples
situations, professionnelles ou privées, il sait aller vers les autres,
engager la conversation et nouer des relations. Il le fait sans
difficulté dès qu’il se trouve dans une situation publique.
Mais peut-être, ajouterait-il que lorsqu’il en a le choix, il aime
aussi prendre du temps pour lui, être au calme pour réfléchir,
rester seul. Il préciserait sans doute que ces moments sont
importants pour lui parce qu’ils l’aident à se retrouver et à se
ressourcer. Il dirait probablement qu’il a besoin de se préserver
suffisamment de temps de ce genre, notamment quand il a par
ailleurs un planning de sorties chargé.
À l’évidence, dans cette illustration, on comprend être plutôt en
présence d’une personne naturellement introvertie, qui puise son
énergie plutôt en elle-même. La relation aux autres ne lui pose
pas pour autant de difficulté : elle sait le faire, elle a appris à le
faire, mais cela lui coûte en énergie un peu plus que ça ne lui en
apporte (Apport < Effort pour faire le lien avec le mécanisme
évoqué précédemment).
■ Les tests de personnalité génériques
Dans la catégorie « générique » peuvent être rangés tous les outils
de découverte et de connaissance de sa personnalité qui ne sont
pas spécifiquement liés à la notion de points forts.
Utilisés par les recruteurs, ou dans le cadre de processus
d’évaluation dans les entreprises, ils cherchent à décrire les
différents aspects de la personnalité, aussi bien les qualités que
les « défauts ». Ainsi ils peuvent tout aussi bien alimenter la
logique des points forts que participer à appuyer encore un peu
plus la culture corrective. C’est malheureusement sans doute dans
cette dernière voie qu’ils mènent le plus souvent.
Toutefois, s’ils viennent aider la cause des points forts, les
différents modèles existants, plus ou moins complexes, s’avèrent
très utiles.
Parmi les plus connus et les plus utilisés, citons le MBTI (Myers
Briggs Type Indicator), créé au début des années 1960 par Isabel
Briggs Myers et sa mère, Katherine Cook Briggs. Ce modèle,
dérivé des travaux du psychiatre suisse Carl Gustav Jung sur les
« types psychologiques »4, permet de déterminer le type
psychologique d’une personne (parmi 16 types de personnalité
possibles) en fonction de ses préférences de fonctionnement :
Extraversion/Introversion, Intuition/Sensation, Pensée/Sentiment
et Jugement/Perception.
Ce modèle MBTI, et plus largement les recherches de Jung, ont
inspiré une longue liste de déclinaisons.
Un autre psychologue, contemporain de Carl Gustav Jung,
mérite d’être également cité : il s’agit de William Moulton Marston,
à l’initiative d’un autre modèle fréquemment utilisé, le DISC, mais
également créateur du personnage de Wonder Woman, première
super-héros féminine de l’histoire des Comics. Le lien entre test
de personnalité et super-héroïne peut sembler a priori difficile à
établir, et pourtant…
Au début des années 1940, quelques dix ans après la parution
de ses travaux sur le DISC5, Marston constate la force du
sentiment d’infériorité empêchant filles et femmes de l’époque de
s’affirmer, de prendre confiance en elles et de s’épanouir : « Les
grandes qualités des femmes ont été méprisées à cause de leur
faiblesse »6, explique-t-il alors.
En créant un personnage féminin à l’égal d’un Superman ou de
tout autre super-héros masculin, Marston espérait alors
promouvoir l’idée que les femmes pouvaient prétendre aux
mêmes qualités que les hommes, accéder aux mêmes métiers,
briller dans les mêmes sports ou les mêmes activités. Déjà il
s’agissait d’inverser la spirale : croire en ses forces et les cultiver,
plutôt que de rester attaché à ses défauts !
Revenons au DISC, que l’on connait souvent au travers de sa
déclinaison la plus répandue, la roue Success InsightTM à 4
couleurs (rouge, jaune, vert et bleu). Cette roue associe ces 4
couleurs aux types d’énergie de la théorie du DISC, qui seraient à
l’origine des comportements de l’individu : Dominance (D),
Influence (I), Stabilité (en anglais Submission, S), et Conformité
(C).
Outre le MBTI et le DISC, il est fréquent également de croiser,
notamment dans les entreprises, l’approche Process Com
(Process Communication Model selon le terme d’origine), fruit des
travaux du psychologue Taibi Kahler, inspirés eux-mêmes par
l’Analyse Transactionnelle conçue par Eric Berne. Connu pour
avoir été utilisé dans les années 1970 par la NASA, dans le cadre
du recrutement des équipages d’astronautes, le modèle Process
Com, centré sur les enjeux de communication inter-personnelle,
détermine six types de personnalité : Travaillomane, Persévérant,
Rebelle, Promoteur, Empathique et Rêveur.
Plus récemment, à partir des années 1980, puis dans la
décennie suivante, les travaux de Lewis Goldberg, repris et
complétés par Costa et McCrae, ont donné naissance au modèle
des Big Five, visant à décrire la personnalité au travers de 5 traits
dominants, repris par l’acronyme OCEAN (le modèle est d’ailleurs
également connu sous ce terme) : Ouverture, Conscienciosité,
Extraversion, Agréabilité (Amabilité), Neuroticisme (ou
Névrosisme).
Citons aussi Hexaco (version enrichie d’OCEAN),
l’Ennéagramme, ou encore les Sosie et autres Papi, passages
souvent obligés des processus de recrutement.
À chacun de chercher l’approche dans laquelle il se reconnait le
mieux : les démos, les exemples, les explications abondent sur la
Toile. Y compris des versions gratuites de certains des tests qui
peuvent avoir le mérite d’illustrer le modèle. Mais, une fois le choix
fait, mieux vaut s’en remettre à l’expertise et l’expérience d’un tiers
habilité pour pousser plus loin l’exploration : je le répète, tout
l’intérêt de ces différents modèles n’est pas dans la lecture d’un
rapport chiffré, mais bien dans l’échange, l’interprétation et l’usage
que l’on peut en faire.
Construire sa stratégie
Et si, malgré tout, je n’avais pas trouvé ma voie ? Et si, comme
la plupart d’entre nous peut-être, j’avais choisi des terrains non
pas en fonction de ce critère des points forts, mais pour d’autres
raisons ou tout simplement par l’enchaînement des
circonstances ?
La tentation pourrait être de changer de voie, cédant à
l’attirance superficielle et trompeuse du projet alternatif.
Je quitte mon poste de cadre dans une grande entreprise pour
ouvrir un restaurant, parce que oui, j’en suis sûr, il n’y a qu’un pas
entre faire un bon petit plat pour mes amis une fois par semaine et
en faire son métier !
Je me lance dans la chanson parce que j’adore pousser la voix
sous la douche quand la maison est vide. Je me suis inscrit au
casting de « The Voice », c’est tellement plus motivant que d’avoir
la tête dans les bouquins à la fac !
J’aime beaucoup aider les autres. D’ailleurs, mes amis me le
disent : « tu devrais être coach, ça t’irait bien ! ». C’est décidé, je
négocie une rupture conventionnelle et je me mets auto-
entrepreneur pour développer mon activité de « coach de vie ».
Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant
existé serait purement fortuite… Échecs et déceptions, en marge
desquels on trouvera bien quelques exceptions.
À condition, une fois de plus, d’avoir pris le temps d’identifier
ses forces, il existe une bien meilleure alternative que celle de la
rupture et du changement de vie : rester sur le même terrain mais
en adaptant la stratégie.
Comme je le soulignais dans le premier chapitre du livre, il est
courant de croire qu’il n’y a, dans une activité donnée, qu’une
seule façon de faire, et pour réussir donc, qu’une seule
combinaison possible de qualités. Toute personne dépourvue de
ces qualités serait fatalement condamnée à échouer, raison pour
laquelle il lui faudrait absolument combler ses manques et
travailler ses points faibles. L’issue est pourtant connue : malgré
de lourds efforts, au prix d’un doute envahissant et d’un plaisir
chaque jour décroissant, les progrès restent décevants. Peut-être
tout simplement n’est-elle pas faite pour ça !
Avant d’envisager le changement de voie, explorons un peu
mieux le terrain actuel. Qu’il y ait, dans chaque activité, des
modèles de réussite dominants, c’est évident. Que ces modèles
favorisent la réussite des individus doués des aptitudes sur
lesquelles ces modèles sont bâtis, est indéniable. Pour autant,
cela ne démontre pas qu’il est impossible de tracer d’autres
chemins, en mettant en œuvre d’autres types de qualités.
« Pour moi, c’est une révélation ! », reconnait ce dirigeant
d’entreprise, en faisant le bilan de cette drôle d’année 2020.
L’aveu a le mérite d’être honnête mais il n’en est pas moins a
posteriori inquiétant. Il est en tous cas révélateur d’une part de
notre culture managériale, bousculée depuis mars 2020 par la
crise sanitaire de la Covid-19.
En imposant le télétravail généralisé partout où le métier le
permet, les confinements successifs ont permis de fait à bon
nombre de collaborateurs d’accéder à un niveau d’autonomie
inespéré, démontrant à ce patron, comme à bien d‘autres
managers sans doute, les bénéfices d’un management moins
directif.
Dans cette entreprise en tous cas, non seulement une grande
majorité des salariés ont rempli leurs missions avec succès, mais
en plus avec engagement et une productivité améliorés. Cette
autonomie, expliquent les personnes que nous avons rencontrées,
nous offre enfin la possibilité de faire à notre manière, de
reprendre un peu la main sur notre travail, d’y mettre de nous-
mêmes, donc de retrouver une part de sens et de créativité.
Cette entreprise n’avait pourtant pas, avant la crise, de
problèmes particuliers sur ce sujet : le patron, et la culture
managériale qu’il avait inspirée, n’était pas plus dure, plus
contrôlante, plus directive qu’ailleurs. Mais, sans mauvaise
intention ni même conscience de ce qu’ils faisaient, le DG et son
encadrement investissaient néanmoins un rôle de prescription du
travail, distribuant les missions mais se mêlant aussi de la façon
de les jouer.
En janvier 2020, une enquête Ifop réalisée pour le media en
ligne Philonomist15, portant sur le bonheur et le sens au travail,
semblait confirmer la frustration des salariés : 46 % des employés
interrogés à l’époque se disaient infantilisés par leur hiérarchie.
Dans une autre étude, menée par Audencia en 201716, 74 % des
personnes interrogées regrettaient que leurs supérieurs
hiérarchiques « ne leur imposent leurs points de vue ».
Ces mois de télétravail imposés auront peut-être eu le mérite de
changer un peu la donne, révélant qu’à laisser chacun jouer selon
ses qualités, on pouvait allier contribution aux résultats collectifs et
motivation individuelle. Tout l’enjeu est de savoir si ces nouvelles
pratiques managériales « libératrices » pourront perdurer dans les
mois à venir ! Rêvons que les dirigeants s’inspirent de ce
qu’affirmait déjà Théodore Roosevelt (26ème président des États-
Unis entre 1901 et 1909, à ne pas confondre avec Franklin
D. Roosevelt, le 32ème président de 1933 à 1945, malgré leur
patronyme et leurs ancêtres communs) au tout début du
e
XX siècle : « Le meilleur manager est celui qui sait trouver les
talents pour faire les choses, et qui sait aussi réfréner son envie
de s’en mêler pendant qu’ils les font. »
■ La méthode égyptienne
(si Toutânkhamon avait connu les points forts)
Comment, dans l’activité que l’on pratique, donc sans changer
de terrain, construire une stratégie qui valorise le mieux possible
les qualités que l’on possède ? Comment, pour reprendre
l’expression déjà utilisée précédemment créer son propre
« modèle de performance » ?
Voici des éléments de méthode pour y parvenir, illustrés d’un
schéma en forme de pyramide et de quelques exemples simples.
Au commencement est donc cette pyramide à trois étages, qui
correspondent aux 3 étapes principales de la réflexion.
Pour autant, les rochers n’ont pas disparu : ils sont juste
masqués par le niveau de la mer.
Ce que rappelle ce schéma, c’est que la réussite, dans une
activité, ou plus généralement dans tout ce que nous
entreprenons, ne se donne pas aux gens sans défauts : elle s’offre
à ceux qui ont réussi à développer leurs forces.
Les biographies des grands du monde présent ou de l’Histoire
sont à ce propos souvent éclairantes. Rares sont, parmi les
artistes, sportifs, dirigeants politiques, chefs d’entreprise les plus
reconnus, les personnalités sans relief. S’en dégagent
généralement d’immenses qualités – à l’origine de leur œuvre de
quelque nature soit elle – compensant et masquant de gros
défauts.
Ainsi Steve Jobs est connu bien entendu comme un inventeur
créatif et un entrepreneur visionnaire. Mais ceux qui l’ont approché
l’ont aussi souvent décrit comme un patron caractériel, capable
par exemple dans ses accès de colère, d’humilier ses équipes en
public.
■ L’apprentissage différencié
Le principe de cette différenciation21 consiste à créer et proposer,
dans le cadre d’un travail d’apprentissage sur une situation donnée,
des exercices, des plans d’action, des entraînements les plus variés
possibles, sollicitant différentes aptitudes.
Loin de la logique traditionnelle qui, pour réaliser un quoi tend à
n’enseigner qu’un seul comment, il s’agit ici de permettre à
l’individu d’explorer plusieurs manières de faire, en proposant des
comment variés. Au travers de ces expérimentations différentes,
l’idée est de s’intéresser aux résultats, mais surtout aux ressentis
de la personne, pour l’aider bien sûr à cerner plus précisément les
aptitudes, les préférences, les qualités qui sont les siennes.
Ce principe explique pourquoi un bon expert de l’activité en
question n’est pas forcément le meilleur pédagogue. S’il n’a pas
en tête cette logique de diversité, s’il n’est pas conscient qu’il
existe plusieurs comment pour réussir un quoi, il peut s’obstiner
parfois à vouloir enseigner seulement sa façon de faire.
Aider quelqu’un à préparer une prise de parole devant un large
auditoire, quand il n’en a pas l’habitude, peut utilement faire
intervenir ce principe de différenciation.
Plutôt que de chercher à faire entrer cette personne dans le
moule imposé, pourquoi ne pas profiter d’un temps de préparation
pour lui permettre d’expérimenter différentes possibilités : parler
avec notes ou sans notes, sur la base d’une simple trame ou en
répétant un discours écrit et appris mot à mot, avec des supports
à l’écran ou sans, derrière un pupitre ou au milieu de la scène, en
tenant un micro ou en s’équipant d’un micro-casque, etc.
Bien sûr, quoiqu’il arrive, il y aura des basiques à respecter :
articuler, balayer le public du regard, se tenir droit les pieds bien
ancrés dans le sol, etc.
Mais, face à un exercice inhabituel et stressant comme celui-ci,
adapter tout ce qui peut l’être, et expérimenter ces différentes
options, aide l’orateur d’un jour à trouver ce qui lui convient le
mieux, quitte à faire des choix de mise en scène originaux.
■ Le principe d’intention
Depuis de nombreuses années, j’ai la chance de pouvoir passer
certains de mes week-ends en famille au Touquet-Paris-Plage.
Chacun de ces séjours est l’occasion d’un détour par le prestigieux
club de tennis de la ville. Sur le court, j’y retrouve toujours avec
plaisir Patrice Kuchna et son père Stan, lequel à l’approche de ses
80 ans continue d’enseigner le tennis avec passion ! Au-delà de ses
états de service plus qu’honorables – ex-125ème joueur mondial en
simple, un huitième de finale à Roland-Garros en 1987, après avoir
éliminé Andre Agassi au deuxième tour – Patrice est le professeur
de tennis attitré d’Emmanuel Macron qui, lui non plus, ne manque
jamais de passer au tennis-club lors de ses rares moments de
repos. Bref…
Face à Patrice Kuchna, aucun répit. Mieux vaut être « jeune et
vigoureux », comme il le dit ! Droite, gauche, devant, derrière, il
faut enchaîner les coups en rythme, tenir la cadence, défendre,
attaquer, volleyer, smasher…
Il arrive heureusement (pour mon cœur) que The Human
Machine – selon le surnom que lui vaut son autre activité de
testeur pour un fabricant de cordages – s’arrête. Jamais par
fatigue, cette notion lui est étrangère ! Non la machine s’arrête soit
faute de balles bien sûr, soit pour débriefer un coup raté.
L’échange prend alors assez rarement la forme d’un conseil
technique, il s’engage plutôt par la question préférée de Patrice :
« quelle était ton intention ? »
Il faut avouer que, dans bien des cas, je n’ai pas la réponse.
Parce qu’effectivement, il s’agit d’un coup joué sans aucune autre
intention que de renvoyer la balle. En visant nulle part, j’ai toutes
les chances que cette balle atterrisse ailleurs !
Au tennis – mais c’est évidemment vrai dans n’importe quel
autre domaine – avoir une intention ne consiste pas seulement à
viser un point, mais à savoir ce que l’on veut provoquer pour son
adversaire : lui imposer un déplacement lointain ou le prendre à
contre-pied, le forcer à courir sur le côté, à avancer ou au
contraire à reculer, à jouer un coup difficile au-dessus de l’épaule
ou plutôt une balle basse et rasante, etc.
Évidemment, tout l’enjeu, tactiquement, est d’avoir, selon la
situation de jeu du moment, l’intention la plus juste. Mais au-delà
de ces considérations tactiques, on s’aperçoit que le seul fait
d’avoir une intention est déjà déterminant. C’est cette intention qui
oriente la réalisation du geste, amenant le cerveau à ajuster et
coordonner l’ensemble des paramètres pour produire le coup
adéquat.
Cette notion d’intention est une des clés de la méthode Nadal.
Toni Nadal, l’oncle et coach de Rafael, a souvent expliqué
l’importance de ne pas se contenter des classiques exercices de
répétition au panier. Taper des centaines de balles qui arrivent au
même endroit, à la même vitesse, avec le même effet, sans avoir
d’autre objectif que de bien réaliser le mouvement, peut permettre
certes d’ancrer une gestuelle dans le cerveau. Mais dans la réalité
du jeu, rares seront les balles correspondant exactement à celles
proposées dans l’exercice. Et risqué serait de les renvoyer sans
intention tactique : il faudrait alors compter sur la capacité du
cerveau à trouver les solutions d’adaptation nécessaires, en plein
match, sans qu’il ait été entraîné à ça !
Toni Nadal l’assure : si l’une des forces de Rafael est de ne
jamais renoncer à chercher des solutions par lui-même, c’est qu’il
a été depuis toujours entraîné selon ce principe d’intention. À
l’entraînement, les consignes étaient de nature intentionnelle : des
balles arrivant indifféremment, sur le revers ou le coup droit,
longues ou courtes, liftées ou chopées, que Rafa devait envoyer
selon l’intention indiquée. Au joueur, selon ses aptitudes, de
laisser son cerveau construire les ajustements gestuels pour
réussir les coups en question.
Vu différemment, cela revient à dire : ce n’est pas moi, coach,
qui peut te dire quel geste tu dois faire. C’est à toi, joueur, de le
trouver, à partir des intentions que tu as ou de celles que je te
donne.
Ce principe d’intention complète celui de différenciation de
l’apprentissage. Si ce dernier permet de guider l’apprenant dès la
découverte de l’activité, la logique d’intention prend tout son sens
à partir d’un niveau de maîtrise minimum des bases techniques.
À nouveau, au travers de ce principe, on retrouve les niveaux
de la pyramide. En fonction de mes points forts (niveau
stratégique), quelles sont les intentions les plus appropriées
(niveau tactique), et comment trouver la bonne
gestuelle/technique pour servir efficacement et facilement
chacune de ces intentions (niveau basique) ?
Si l’on reprend l’exercice de prise de parole en public, dans
l’objectif d’aider un orateur un peu plus expérimenté, il serait par
intéressant de travailler selon cette approche par intentions.
Que veut-il générer comme réaction chez ceux qui l’écoutent ?
Les faire rire, les surprendre, les faire réfléchir, bousculer leurs
croyances ? Et s’il voulait les surprendre, comment s’y prendrait-il
concrètement ?
Charge à nous ensuite de tester et d’ajuster pour s’assurer que
ce comment fonctionne et, le cas échéant, trouver une meilleure
intention.
■ Le bon moment
Du fait de son caractère cartésien, précis, rigoureux, exhaustif,
l’entretien de débriefing, pour utiliser l’anglicisme consacré, suppose
que les acteurs concernés, le principal intéressé et son
accompagnant, soient dans les meilleures dispositions possibles :
ouverts à un échange rationnel et dépassionné, sans perturbation
émotionnelle, ayant pu prendre du recul sur les faits et avoir peut-
être même chacun initié leur propre analyse de la situation…
C’est la raison pour laquelle, le débriefing se joue plutôt
« à froid », le lendemain par exemple de l’entretien de valorisation
réalisé lui « à chaud » juste après l’action.
C’est pourquoi aussi il est toujours préférable que ces temps de
débriefing soient annoncés à l’avance et planifiés. Même si
certaines situations critiques peuvent obliger à déclencher un
débriefing de la veille pour le lendemain, l’idéal reste de convenir
d’entretiens séquentiels. L’avantage de ces rendez-vous, fixés à
l’avance selon une fréquence adaptée au sujet, est de
systématiser la prise de recul et de bien montrer qu’elle ne dépend
pas des résultats de l’action mais bien d’un souci de progrès
permanent. Le risque sinon est de tomber dans nos travers
correctifs habituels : ne débriefer que les échecs ou les situations
difficiles… et oublier d’analyser les succès. Nous aurions alors
plus de mal à rester orientés dans l’axe points forts et finirions
sans doute par ne plus voir que les défauts de la personne. Du
point de vue du principal intéressé, on comprend aussi qu’un
débriefing imprévu, qui plus est « à chaud », aura toutes les
chances d’être vécu comme un reproche : on sait dans ce cas que
les premiers réflexes de la personne exposée à un tel débriefing,
quand bien même le contenu de l’analyse est juste, sont ceux de
la justification, de la défense, de l’excuse bien plus que ceux
recherchés de l’analyse ou de la remise en question. Lorsque le
débriefing est prévu, qu’il revêt un caractère systématique – sans
lien avec le résultat de l’action – et qu’il se tient « à froid », il
encourage une posture de responsabilité : possibilité de se
préparer, de prendre du recul, de dépasser les premières
émotions (négatives sans doute en cas d’échec, ou positives et
excessives peut-être en cas de succès : euphorie…), etc.
■ L’art du questionnement
Bien des débriefings se résument à une analyse (plus ou moins)
brillante du coach qui, de son œil extérieur et forcément bien avisé,
explique ce qu’il s’est passé, ce qui a été bien fait, ce qui pourrait
l’être différemment ou ce qui pourrait être amélioré.
Mais ce n’est pas d’avoir raison tout seul qui importe dans cet
exercice. C’est d’amener son interlocuteur à se rendre compte par
lui-même, de ce qui l’a fait échouer ou au contraire réussir.
Ce qui prime, en posture de débriefing, c’est la pertinence des
questions posées. S’il est intéressant d’avoir une analyse juste de
la situation, ce n’est pas tant pour la délivrer telle quelle, dans une
attitude de sachant qui éblouit de son intelligence (et de sa
supériorité !), que pour identifier les bonnes questions à poser à
son interlocuteur. Ces questions peuvent être des questions
d’analyse – ce qui suppose déjà une capacité de recul suffisante
de l’individu – mais il peut aussi s’agir plus basiquement de
questions descriptives, visant à lui faire décrire tel ou tel aspect de
la situation vécue :
• Qu’a-t-il ressenti à tel moment ?
• Que s’est-il dit dans l’instant où ?
• Qu’est-ce qui l’a poussé à faire ceci ou cela ?
• Quelles réactions cela a-t-il généré de la part des
protagonistes ?
• Comment a-t-il interprété ces réactions ?
• Etc.
■ L’acceptation de la différence
Si l’expertise n’est pas toujours bonne conseillère en matière
d’accompagnement dans la logique des points forts, c’est parce
qu’elle peut conduire à croire qu’il n’existe qu’une seule façon de
réussir : celle qui m’a fait devenir expert !
Le risque est alors de concevoir le débriefing comme l’analyse
des écarts entre ce que l’individu a fait et la méthode que je tiens
comme LA seule possible.
Une fois de plus, dans ce type de posture, les situations d’échec
feront immanquablement apparaître des points faibles vite
qualifiés de rédhibitoires.
C’est ce qu’il peut arriver, à l’école, à ces enfants dits précoces,
appelés Enfants à Haut Potentiel (EHP) dans les référentiels de
l’Éducation Nationale.
Du fait de leurs facilités à apprendre et mémoriser, certains
s’ennuient rapidement : semblant « décrocher » du reste de leurs
camarades, ils chahutent ou se réfugient dans leurs pensées.
Pour les enseignants, ces comportements peuvent parfois
apparaître comme un déficit de l’attention avec hyperactivité, pour
un manque d’éducation, pour de la nonchalance ou encore de
l’insolence.
Pour d’autres de ces élèves, la précocité peut expliquer une
hétérogénéité dans les apprentissages. À côté de leurs aptitudes
naturelles supérieures à la moyenne dans certains domaines
(langage, abstraction, raisonnement), ils peuvent se trouver en
échec dans d’autres disciplines comme l’écriture : celle-ci est
illisible, irrégulière et il arrive que ces élèves aient beaucoup de
mal à investir l’écrit, un peu comme si le stylo n’arrivait pas à
suivre le rythme de leur pensée ! Là encore, ces enfants, en dépit
de leurs prédispositions, peuvent être vus comme des élèves en
difficulté.
L’Éducation Nationale connait évidemment parfaitement bien le
sujet et a mis en place différentes expériences et actions pour
aider les enseignants – et plus largement toutes les parties
prenantes – à mieux prendre en charge ces élèves, à l’instar de ce
Vademecum « Scolariser un élève à haut potentiel »24 qui
rappelle l’enjeu :
« Les caractéristiques des enfants et adolescents à haut
potentiel montrent une grande diversité de profils. Ainsi, un élève
pourra notamment avoir un haut potentiel intellectuel ou créatif.
Les besoins spécifiques des élèves à haut potentiel et leurs
différences doivent être pris en considération pour qu’ils
s’épanouissent et développent pleinement leurs potentialités. »
Réaliser de bons débriefings suppose d’intégrer la notion de
diversité des talents : chacun réussit par une voie qui lui est
propre. L’objectif de l’accompagnement, et en l’occurrence du
débriefing, est donc bien d’aider l’individu à trouver cette voie,
celle qui assure le meilleur alignement entre ce qu’il est et ce qu’il
fait.
Là encore, procéder par questionnement plutôt que livrer sa
propre analyse de la situation, est le plus sûr moyen d’incarner
cette croyance dans la différence. Il ne s’agit pas de réussir à
confirmer sa vérité, mais plutôt d’aider l’autre à découvrir la
sienne.
La confusion objectif/moyens
Nos raisonnements, parfois un peu rapides, nous amènent souvent
à confondre objectif et moyens, en croyant que le but visé indique
nécessairement le moyen à mettre en œuvre, comme si le seul
chemin possible était toujours la ligne droite.
En l’occurrence, dans ce débat entre points forts et points
faibles, on peut croire qu’il faut, pour devenir meilleur, s’attaquer à
ces défauts qui nous empêchent de l’être.
Comme dans beaucoup de situations, la meilleure stratégie
n’est bien entendu pas la plus évidente ni la plus directe !
Négocier, motiver, communiquer, vendre sont autant d’activités
qui peuvent facilement illustrer cette logique.
Si l’on veut par exemple rassurer une personne inquiète, nous
savons bien qu’il faudra trouver mieux que le naïf et direct
« Rassure-toi », finalement plus inquiétant qu’autre chose !
Comme je l’évoquais précédemment dans la partie consacrée
au débriefing des échecs, l’approche « perfectologique » doit
primer la « défectologique » : ce qui compte est de comprendre ce
qui permet à un individu de prendre confiance, bien plus que de
chercher à lutter frontalement contre son sentiment d’inquiétude.
Ce que j’ai voulu partager dans ce livre, c’est bien ce que nous
apprennent les observations, les recherches, les études sur les
gens qui réussissent. Leur stratégie suit la même ligne et met en
exergue les mêmes facteurs-clés de succès : maximiser ses
ressources personnelles pour alimenter confiance, motivation et
progrès.
Effet collatéral
Partir de ses qualités revient donc à ne pas commencer par
s’attaquer à la correction des défauts.
Mais, en réalité, comme je l’ai indiqué en déclinant la pyramide
du modèle de performance, la stratégie des points forts ne peut
totalement les ignorer : privilégier résolument nos préférences
tactiques (principe des 20/80) n’évite jamais de devoir se
confronter aux situations-limites qui nous confrontent à nos
manques ou nos faiblesses. On sait que dans ces cas-là, la
motivation et la confiance accumulées au travers des actions
préférentielles s’avèreront précieuses pour soutenir les efforts
nécessaires. Ceux-ci devront être les plus basiques possibles
(mise en œuvre de gestes simples, facilement jouables, plutôt que
recherche d’acquisition de qualités que par définition nous n’avons
pas).
Il y a bien peu de chances que ces situations-limites deviennent
des points d’appui ou des zones d’aisance. Ce n’est d’ailleurs pas
le but : l’enjeu, rappelons-le, est d’assurer, quand nous y sommes
confrontés, le minimum syndical.
Il arrive pourtant qu’en empruntant cette voie, nous puissions
finalement aller plus loin que ce socle de base.
En acceptant de se livrer à l’entraînement basique que suppose
l’ancrage des bons réflexes, nous pouvons trouver une efficacité
dans l’action à laquelle nous ne nous attendions pas, loin des a
priori peu à peu consolidés par tous ces messages reçus sur nos
prétendues faiblesses : nous pensions que nous n’étions pas faits
pour ça – et de fait, nous n’avons pas les aptitudes naturelles
adéquates – mais nous découvrons qu’avec un peu de méthode et
de travail, nous pouvons quand même réussir honorablement.
Comme le suggèrent les travaux du psychologue Maurice
Reuchlin27, sur les processus vicariants, face à la même situation,
chaque individu met en œuvre des modes de fonctionnement
différents. En fonction de ses aptitudes naturelles, de ce qui lui est
le plus spontané, le plus facile, le plus accessible, il consolidera
des conduites préférentielles.
En reprenant ce terme de vicariance28, Reuchlin a montré qu’un
individu était néanmoins capable d’adapter son mode de
fonctionnement en fonction des situations : le coût cognitif est plus
important (effort, temps, anticipation d’une plus grande probabilité
d’échec) et l’efficacité moindre.
Par exemple un individu qui a des difficultés de rappel direct
d’un nom, d’une date, etc. tend à développer des activités de
recherche dans lesquelles il passe en revue une série de
souvenirs qu’il sait être associés à celui qu’il cherche, puis, si
celui-ci se présente, il le reconnaît comme correct.
À côté de l’idée habituelle qui peut laisser penser que de la
présence d’une aptitude découle ensuite le bon savoir-faire – et
qui nourrit donc la croyance qu’il faut développer les qualités que
nous n’avons pas pour réussir à faire ce qu’on ne sait pas faire –
se pose une autre logique : celle-ci part du basique pour aller au
stratégique. C’est en forçant le geste, en le répétant, en créant les
réflexes que l’on finit par, en quelque sorte, forger l’aptitude
manquante ou seulement à en apprivoiser le manque.
Nombreuses sont ainsi les personnalités publiques ayant révélé
la timidité, pour certains presque maladives, malgré laquelle ils ont
pourtant réussi à maîtriser l’exercice de prise de parole en public.
C’est le cas notamment de l’avocat et académicien Jean-Denis
Bredin qui raconte :
« Plaider fut toujours pour moi un exercice difficile. Ce juge qui
m’écoute, est-ce que je ne l’ennuie pas ? J’ai toute ma vie envié
ceux qui ne connaissent pas cette angoisse. Dans ma génération,
dans la société où je vivais, tout était fait pour que l’enfant
devienne timide. « Tais-toi ou dis quelque chose de meilleur que le
silence », me répétait-on. Parler était audacieux, il fallait travailler.
À la faculté, j’ai eu d’admirables professeurs, donc je suis devenu
professeur de droit […] La timidité s’efface, mais on ne s’habitue
pas. Elle a aussi bien des avantages. Le timide ne cesse de
parfaire son argumentation, sa réfutation, tandis que l’extraverti
est tenté de faire confiance à son talent. »29
Réaliser que nous sommes capables finalement d’apprivoiser
ces situations-limites, crée une satisfaction d’autant plus forte que
la conscience du défaut est grande. Le fait qu’il nous ait été autant
reproché, le fait d’avoir tant rêvé de posséder cette qualité
manquante, décuple la fierté de ces petits succès, et peut susciter
une motivation forte à pousser plus loin l’exploration, comme s’il y
avait une revanche à prendre.
Mais, même dans ce cas, la mécanique reste la même : elle
consiste à trouver le point fort, la qualité d’appui, le moteur qui
fournit l’énergie, la confiance, la motivation et qui permet d’aborder
ces situations-limites, certes techniquement maîtrisées mais
toujours stressantes.
« J’y vais mais j’ai peur », disait Nathalie, le personnage joué
par Josiane Balasko dans les Bronzés font du ski. C’est un peu le
ressenti que l’on peut avoir quand, malgré des années de
pratique, on continue à redouter certaines situations nous mettant
face à nos manques.
C’est, en substance, ce que me confiait, il y a quelque temps un
grand patron, souvent appelé à s’exprimer en public. Il confessait
ressentir, à chaque fois, un trac immense, le corps qui tremble
comme une feuille, le cœur qui bat, les mains moites, l’envie
de fuir… Pourtant, concentré sur la technique, il savait donner le
change : la voix parfaitement assurée, le débit maîtrisé, le rythme
bien en place. Mais il ajoutait que la condition, pour réussir cet
exercice à contre-emploi, était d’avoir travaillé le contenu du
discours avec une attention particulière, jusqu’à sentir une vraie
force de conviction dans chacune des idées développées.
Si la stratégie des points forts invite donc d’abord à une
conquête de soi, ou peut-être faudrait-il dire à une reconquête des
qualités ombrées par la mise en lumière des points faibles, elle
vise bien in fine à agrandir le terrain de jeu. En partant de ce que
nous sommes, elle dispose ensuite à l’exploration de nouveaux
territoires plus éloignés : ceux que nos défauts nous rendent
difficilement accessibles.
Affronter nos points faibles, tenter de maîtriser les situations
dans lesquels ceux-ci nous limitent, n’est pas la première bataille
à mener : c’est la dernière conquête d’une campagne menée
d’abord en s’appuyant sur nos forces.
Conclusion
« Ne vous demandez pas de quoi le monde a besoin.
Cherchez ce qui vous fait vibrer et faites-le.
Parce que ce dont le monde a besoin, c’est de personnes qui vibrent
avec la vie. »
Howard Thurman
Exemple 1
Loyal
Solidaire
Rassurant
Protecteur
Patient
Attentif
Convivial
Intuitif
Charmeur
Optimiste
Leader
Convaincant
Combatif
Téméraire
Assuré
Prudent
Audacieux
Novateur
Synthétique
Sens du détail
Persévérant
Logique
Méthodique
Structuré
Serein
Empathique
Calme
Diplomate
Prévisible
Maîtrisé
Exemple 2
Ce référentiel reprend la classification de VIA Institute on Character. L’auto-évaluation est accessible gratuitement sur le site viacharacter.org.
Note
Vertus Forces de caractère
(0 à 5)
5 Perspective
6 Courage et vaillance
11 Gentillesse et générosité
12 Intelligence sociale
16 Pardon
17 Modestie et humilité
Tempérance
18 Précaution, prudence et discrétion
21 Gratitude
23 Humour et enjouement
Effeuillez l’artichaut
Répondez aux questions suivantes, en vous aidant si besoin de la bourse des qualités, et commencez à
cerner vos points forts essentiels :
1. Dans le contexte professionnel, quels sont les domaines/missions dans lesquels vous vous sentez
le plus à l’aise ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
...................................................................................................
• Que ressentez-vous quand vous œuvrez dans ces domaines-là ?
..................................................................................................................................................................
....................................................................................................................
• Quelles sont les qualités que l’on vous reconnait ?
..................................................................................................................................................................
....................................................................................................................
• Sur quelles forces vous appuyez-vous pour faire bien votre travail ?
..................................................................................................................................................................
....................................................................................................................
2. Hors contexte professionnel, quelles activités aimez-vous le plus pratiquer ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
...................................................................................................
• Que vous apportent-elles lorsque vous les pratiquez ?
..................................................................................................................................................................
.................................................
• Quelles sont les ressources personnelles auxquelles ces activités font appel ?
..................................................................................................................................................................
....................................................................................................................
3. En prenant du recul, et à partir des réponses apportées aux questions précédentes, essayez de
trouver des points communs dans les qualités que vous utilisez dans vos activités professionnelles et
personnelles :
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
...................................................................................................
Souvenirs d’éléphanteau
Installez-vous confortablement, fermez les yeux et faites appel à votre mémoire. Prenez conscience des
pieux qui ont empêché l’éléphanteau d’avancer.
1. Quels défauts vous reprochait-on d’avoir quand vous étiez enfant ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
.......................................
2. Pouvez-vous vous rappeler les mots qu’employaient vos parents, enseignants ou autres, à ce
propos ?
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......................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
.......................................
3. Ces messages ont-ils influencé...
• Votre personnalité ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
............
• Votre confiance en vous ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
............
• Vos choix d’étude ou vos orientations professionnelles ou de vie ?
..................................................................................................................................................................
..................................................................................................................................
4. En quoi ces messages continuent-ils de vous influencer ?
..................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................
...................................................................................................
Tiers privilégiés
Prenez quelques instants pour penser aux personnes qui, dans votre parcours personnel ou
professionnel, vous ont le plus marqué. Prenez conscience des qualités qu’ils vous ont aidé à révéler ou
à travailler.
Vos tiers
Qui sont-ils ? Quelles qualités ont-ils souvent valoris
privilégiés
TP « primaires »
Influence +++
........................................................................................ ........................................................................
(parents
« nourriciers » ........................................................................................ ........................................................................
présents durant
l’enfance)
TP
« secondaires »
Influence ++
TP « tertiaires »
Influence + ....................................................................................... ........................................................................
........................................................................................ ........................................................................
(conjoint, enfants)
TP
« quaternaires »
Influence faible ........................................................................................ ........................................................................
(croisés pendant ........................................................................................ ........................................................................
une phase de vie :
amis, collègues,...)
À noter :
Certaines personnes peuvent être pour vous des tiers privilégiés : ils comptent pour vous au point
que vous cherchez à obtenir le plus de reconnaissance possible de leur part.
• Il se peut que ceux-ci vous la donnent, sous une forme positive : la valorisation des qualités
indiquée dans la dernière colonne. Ces messages positifs auront pour effet d’ancrer ces
qualités en vous et de renforcer votre niveau de confiance en vous.
• Il se peut aussi que ceux-ci vous accordent de l’attention, mais de façon négative, en passant
plus de temps à vous reprocher vos erreurs, vos échecs, vos limites ou vos points faibles,
générant alors plus de doute et de peur que de confiance (syndrome de l’éléphant).
• Il se peut enfin que ces tiers privilégiés ignorent votre besoin de reconnaissance et ne vous
accordent que peu d’attention, créant là aussi un sentiment d’abandon et d’angoisse
compensé le cas échéant par une motivation « revancharde » forte (obtenir leur attention à
tout prix).
Au-delà des différentes lignes, il est intéressant de repérer également la cohérence entre les qualités
valorisées par les TP (qualités fortement ancrées) ou au contraire, les éventuelles discordances
(qualités contradictoires, valorisées par l’un mais pas par l’autre, qui tendent à forger une personnalité
équilibrée, cherchant à investir le plus de qualités possibles pour « mériter » le regard de tous ses TP).
NB. : il va de soi que ces quelques lignes ne suffisent à rendre compte de la complexité des
mécanismes liés à nos liens avec ces tiers privilégiés, et encore moins de ceux qui régissent la
constitution d’une personnalité. Ils sont donnés ici à titre de repères indicatifs et doivent donner lieu à un
travail plus approfondi que ne l’est ce simple tableau.
Dérive
Trait de personnalité Situations
« toumeuche »
Affectueux Etouffant
Aidant Envahissant
Audacieux Irresponsable
Autonome Incontrôlable
Calme Apathique
Chaleureux Familier
Lucide Anxieux
Confiant Crédule
Courageux Inconscient
Créatif Désorganisé
Curieux Indiscret
Déterminé Borné
Discret Absent
Discipliné Ennuyeux
Drôle Désinvolte
Energique Epuisant
Engagé Dispersé
Enthousiaste Illuminé
Fier Prétentieux
Franc Agressif
Gentil Faible
Généreux Gênant
Humble Effacé
Impertinent Méchant
Indépendant Indifférent
Minutieux Perfectionniste
Optimiste Naïf
Patient Attentiste
Persévérant Têtu
Poli Obséquieux
Prudent Angoissé
Original Marginal
Sérieux Froid
Spontané Inconsistant
Sensible Impressionnable
Vigilant Anxieux
Je me trouve nul. le ◆ ■ ● ▲
●
Indiquez ici le nombre de…
■
■ Grille d’analyse
Vous avez une majorité de ◆
Vous êtes manifestement dans une période de forme. Votre excellent niveau d’énergie vous permet de
voir la vie du bon côté. En dynamique de progrès et de projet, vous tracez votre route, sans prêter trop
d’attention à ce (ou à ceux) qui pourraient vous freiner.
Pour autant, confiants en vous, mais sans rien à prouver, vous entretenez des rapports sains avec
les autres, en étant très attentifs à eux d’une part et très ouverts à l’aide qu’ils peuvent vous apporter
et à la coopération en général.
Lucide, détendu, curieux, vous abordez le quotidien avec calme et recul, en profitant de chaque
occasion de plaisir qui se présente. Toujours proactif, vous allez au-devant des choses et des gens,
évitant ainsi de subir les événements.
L’environnement vous le rend : on loue vos qualités, on apprécie votre compagnie et votre
enthousiasme, on remarque vos succès, etc. et chaque jour vient alimenter la spirale de succès.
Vous avez une majorité de ●
Disposant d’un niveau d’énergie juste suffisant pour vos besoins d’interaction du quotidien, il vous arrive
de ressentir certains jours un peu de stress et de fatigue. Sensible à l’environnement, vous préférez
l’habitude, l’équilibre, la maîtrise et tentez d’éviter les situations impliquant changement, remise en
cause, prise de risque.
Encouragé par les autres, quand vous avez la possibilité de mettre en œuvre vos qualités, vous
êtes capable de fournir un travail conséquent mais vous supportez mal la critique et craignez d’être
pris en défaut, ce qui peut parfois vous amener à vous justifier plutôt qu’à chercher le progrès.
Souvent méfiant à l’égard du monde extérieur, il peut vous arriver de vous fermer, au risque de ne
pas recevoir en retour les signes de reconnaissance que vous espérez.
Efforcez-vous de rester acteurs pour éviter de subir. Soyez notamment attentif à cultiver vos forces,
en trouvant les moyens de vous engager sans retenue sur les terrains qui vous sont favorables.
Vous avez une majorité de ■
Plus en doute qu’en confiance, vous semblez être en déficit d’énergie : vous vous sentez souvent
stressé, menacé, parfois comme agressé par le monde qui vous entoure.
Il peut vous arriver de rêver de fuir, de changer de vie par exemple. Mais, rattrapé par la réalité,
vous luttez avec courage contre votre environnement et contre tous ces problèmes qui semblent se
multiplier.
Cela vous prend d’ailleurs beaucoup d’énergie, au risque de vous amener dans une spirale
négative. Irritable, râleur, souvent en opposition, vous pouvez contribuer à générer des relations
difficiles autour de vous, vous attirant reproches, alimentant des polémiques voire des conflits eux
aussi coûteux en énergie. Dans cet état, vous avez tendance à rejeter la responsabilité de ce qui
survient sur les autres, vous posant parfois en position de victime.
Pour éviter de vous épuiser, et inverser la spirale, essayez de vous recentrer sur vos points forts :
ceux-ci vous permettront de montrer au monde vos capacités et de retrouver un peu de confiance.
Appliquez-vous à recréer des situations qui vous sont favorables et à en tirer plaisir et fierté. Certains
des problèmes contre lesquels vous vous battez peuvent attendre : demandez-vous si leur
suppression vous apporterait vraiment le bonheur, ou celui-ci n’est pas plutôt à chercher dans des
projets qui vous tiennent à cœur.
Vous avez une majorité de ▲
Vos batteries sont manifestement déchargées. À court d’énergie et empli de doutes, vous appréhendez
chaque jour avec un sentiment d’angoisse persistant et envahissant.
Il vous est difficile d’ailleurs de tenir le coup, ce qui vous oblige parfois à renoncer ou abandonner
certaines actions, volontairement ou involontairement – quand le corps notamment vous lâche –
ce qui n’est pas de nature à vous redonner confiance, bien au contraire.
Ne vous sentant pas à la hauteur, obnubilé par vos soi-disant défauts, vous avez tendance à vous
replier sur vous-même, fuyant les échanges et le regard des autres : vous craignez d’entendre leurs
critiques sans toutefois les croire s’ils vous valorisaient !
C’est pourtant eux qui pourraient vous aider. Renouez le contact, acceptez de leur parler et de les
écouter, prenez la main qu’ils vous tendront. Retrouvez le fil de vos envies, de vos passions, de vos
qualités et demandez-leur de vous aider à le tirer. Vos richesses n’ont pas disparu : elles sont
seulement enfouies et ne demandent qu’à s’exprimer.
Partie 2
Dans cette seconde partie, une fois évalué votre niveau d’énergie du moment, je vous propose de faire
le point sur ce qui peut expliquer votre forme ou méforme.
En regardant les 2 ou 3 semaines écoulées, évaluez le temps passé chaque jour sur chaque
activité à l’aide de ce cercle.
Exemple
Une fois réalisée une semaine-type, à l’aide de ce schéma, faites la somme du temps passé :
• sur des activités qui vous apportent plus d’énergie qu’elles ne vous en demandent (Apport > Effort) : activités que
vous maîtrisez, dans lesquelles vous êtes en succès, reconnu, valorisé, qui mettent en valeurs vos qualités… ;
• sur des activités qui vous coûtent plus qu’elles ne vous rapportent (Apport < Effort) : activités souvent liées à vos
points faibles, dans lesquelles vous êtes souvent en difficulté, qui ne vous apportent pas de plaisir…
Si les premières vous occupent la plus grande partie de votre temps, vous êtes probablement en
spirale positive. Voyez comment préserver cet équilibre, par exemple en veillant à passer le plus de
temps possible sur les activités motivantes.
Dans le cas inverse :
1. Travaillez à augmenter le temps consacré aux activités motivantes, chaque jour ou peut-être
chaque semaine et « sanctuarisez » ces moments dans votre agenda.
2. Impliquez-vous davantage dans ces activités pour les rendre plus motivantes encore.
3. Pensez à d’autres activités motivantes que vous auriez peut-être sacrifiées et qui pourraient
réintégrer votre planning (le sport, une passion artistique, etc.).
4. Étudiez les possibilités de diminuer le temps passé sur les activités coûteuses : déléguer,
arrêter, reporter, les aborder autrement (en utilisant mieux vos qualités), etc.
5. Partagez vos nouveaux engagements de planning pour faire en sorte de mieux les respecter.
Notes
1. Linley P. A., Joseph S., Harrington S. et Wood A. M., « Positive psychology: Past, present and
future », Journal of Positive Psychology, 2006.
2. Dweck C. S., Changer d’état d’esprit : Une nouvelle psychologie de la réussite, traduit de l’anglais par
J.-B. Dayez, Mardaga, 2010.
3. Plusieurs programmes conçus pour amener les étudiants d’un état d’esprit fixe à un état d’esprit de
croissance ont été déployés, notamment en Afrique du Sud ou en Californie, impliquant des milliers
d’étudiants mais également leurs enseignants, démontrant l’impact de la mentalité positive sur les
progrès et la réussite scolaire.
4. Aspinwall L.G. et Staudinger U.M., Une psychologie des forces humaines : quelques enjeux centraux
d’un domaine émergent, 2003.
5. Christian Lemoine était consultant en management, conférencier spécialiste de la motivation et
fondateur du CRECI (Centre de Recherches et d’Etudes sur le Comportement Individuel), cabinet au
sein duquel j’ai travaillé quelques années.
6. Ça s’est fait comme ça, Gérard Depardieu, avec la collaboration de Lionel Duroy, XO éditions, 2014.
7. Ce terme a, semble-t-il, été inventé par Christian Lemoine, fondateur du CRECI et créateur du
Management Motivationnel®.
8. Jean-Laurent Cochet fait partie des victimes de la Covid-19. Il s’est éteint le 7 avril 2020, dans sa
86ème année.
9. Extrait d’une interview donnée au journal La Croix, paru le 21 mars 2020
10. Extrait d’un entretien donné par Boris Cyrulnik au e-mag NousVousIls, l’e-mag de l’éducation,
juin 2015.
11. Voir par exemple le livre de Vincent Rémy, Un prof a changé ma vie, Vuibert, 2014, dans lequel
l’auteur demande à diverses personnalités d’évoquer l’influence de certains enseignants sur leur
parcours.
12. Pietschnig J., Penke L., Wicherts J. M., Zeiler M., & Voracek M., « Meta-analysis of associations
between human brain volume and intelligence differences: How strong are they and what do they
mean? », Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 2015.
13. Voir à ce propos l’article de Franck Ranus, « Les surdoués ont-ils un cerveau qualitativement
différent ? », A.N.A.E., 2018.
14. Malcolm Gladwell, Outliers, The Story of Success, Editions Little, Brown and Company 2008.
15. Extrait de la revue Spirale 2012/3 (no 63), « Le chemins de l’apprentissage », éditions ERES.
16. Voir ici.
17. Évangile selon Matthieu, chapitre 25, versets 14 à 30.
18. Sir Thomas Fowell Buxton (1786-1845) fut député du Parlement britannique, resté célèbre pour son
engagement en faveur de l’abolition de l’esclavage au Royaume-Uni.
19. Auteur de Successful Aging: A Neuroscientist Explores the Power and Potential of Our Lives,
Dutton/Penguin Random House, 2020.
Notes
1. Ken Robinson, anobli par la Reine d’Angleterre en 2003, est notamment connue pour sa conférence
TED « L’école tue la créativité » (Monterey, 2006), la plus vue et la plus partagée de l’histoire ! Il est
aussi l’auteur de plusieurs ouvrages dont Changez l’école ! (Play Bac, 2017) et Trouver son élément
(Play Bac, 2015).
2. Je conseille à ceux qui ne connaîtrait pas la définition d’origine du mot « bougre » de se précipiter
vers un dictionnaire…
3. Voir à ce propos les développements sur la pédagogie différenciée, page 183.
4. Jacques Lecomte est l’un des principaux experts francophones de la psychologie positive. Docteur en
psychologie, il a été chargé de cours à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense (sciences de
l’éducation) et à la faculté des sciences sociales de l’Institut catholique de Paris.
5. Martin E.P. Seligman est chercheur en psychologie et professeur à l’Université de Pennsylvanie. Lors
de son passage à la présidence de l’American Psychological Association, en 1998, il lance le
mouvement de la « psychologie positive », assisté de ses collaborateurs, tels Mihaly Csikszentmihalyi,
Ed Diener, Kathleen Hall Jamieson, Christopher Peterson et George Vaillant.
Pour en savoir plus sur l’œuvre de Seligman : Conférence
www.ted.com/talks/martin_seligman_the_new_era_of_positive_psychology
Seligman M., La force de l’optimisme, InterEditions, 2008. Seligman M., La fabrique du bonheur,
InterEditions, 2011.
Pour un exposé documenté et rigoureux sur la psychologie positive : Shankland R., La psychologie
positive, 2e éd, coll. « Psycho Sup », Dunod, 2014.
6. Si ce terme a été popularisé par Seligman et son équipe, son invention semble revenir à Maslow qui
l’a utilisé le premier, en 1954, dans le dernier chapitre de son livre Motivation and Personality.
7. Voir notamment Happycratie, d’Edgar Cabanas et Eva Illouz, Premier Parallèle, 2018 ; Le syndrome
du bien-être de Carl Cederström et André Spicer, L’Echappée, 2016 ; ou Développement (im)personnel
de Julia de Funès, l’Observatoire, 2019.
8. Sur ce thème de la motivation, je vous recommande la lecture du livre de Daniel H. Pink, La vérité sur
ce qui nous motive, Leduc, 2011.
9. J’ai développé cette notion dans mon précédent livre : Le manager presque parfait… et qui ne
cherche surtout pas à le devenir ! Dunod, 2016.
10. Tom Rath est un chercheur et auteur américain, né en 1975. Au sein de la société Gallup, il a
notamment développé des études et des outils sur l’efficacité personnelle, en particulier basés sur
l’utilisation des points forts. On lui doit plusieurs best-sellers dont Strength Finder 2.0, publié en français
chez Pearson France sous le titre Découvrez vos points forts, 2019.
11. Version reprise par Valérie Jacquemin-Ngom et Nicolas Dugay dans leur ouvrage Cultivez vos points
forts, Jouvence éditions, 2018.
12. Pour en savoir plus, je vous recommande de vous référer à l’ouvrage très complet de Bertrand
Théraulaz : Approche action-types – Le corps révèle nos forces ! Amphora, 2020.
13. Dans le cadre de nos missions de conseil et de formation en management, au sein d’Animae, nous
faisons régulièrement appel aux compétences de l’équipe d’Axel Conseil, composée d’experts Action
Types®. Leur aide est précieuse, par exemple pour identifier les forces individuelles au sein d’un CODIR
et favoriser une meilleure communication et une meilleure coopération.
14. « Carbohydrate sensing in the human mouth: effects on exercise performance and brain activity »
J. Physiol, 2009.
15. « Mental fatigue impairs physical performance in humans », Journal of Applied Physiology, 2009,
vol. 106.
16. « Sundial : Theoretical Relationships Between Psychological Type, Talent, And Disease »,
Ph.d. Bryden, Barbara E. – (Anglais), éditions CPAT – Center for Applications of Psychological Types –
2004.
17. Pellerin F., Accédez au sommet. Le chemin est en vous, Michel Lafon, 2013.
18. Vous trouverez un développement plus complet sur cette notion de doute/confiance dans les
annexes proposées à la fin du livre.
19. Voir la partie consacrée aux « Tiers Privilégiés » dans le chapitre 1.
20. Ancona D., Malone W. T., Orlikowski J. W., Senge M. P., Ode au Leader Imparfait, HBR France,
2020.
Notes
1. Cultivez vos forces : l’éducation positive au quotidien, J-C. Lattès, 2019.
2. « Franck Cammas, marin de haute précision », Le Monde, 9 mars 2012.
3. Étude Gallup « State of the Global Workplace » 2017, chiffres Europe de l’Ouest.