You are on page 1of 4
philosophie Corps, autonomie et responsabilité de la personne [La question ’A qui appartient mon corps ?” peut paraitre surprenante a: premiere vue § Pourtant, 2 Frora Basrant Ersegqante chercheuse ce phosophie, co-esponsabie ‘ou master Ehique du son etrecherche wert Toulouse 2 sean ous, département e phiosopie, S alge Artario Machado, ‘31056 Todouse codex, France Adresse ena flora bastiai@univtse2 tt asin), Le corps dans les soins elle permet de mettre en évidence la complexité a et de rencontre e eles autres et SO ue recéle le fait de la corporeit, lieu d'existence (Mots clés ~ corporéite ; corps ; éthique ; objet ; responsabilité ; sujet Body, autonomy and responsibility of the individual. The question Who does my body belong to?’ may at first seem strange. However, it highlights the complexity concealed by the very fact of corporeity, the place of existence and encounter between others and oneself (©2017 Cheyer Mosson SAS reserved Keywords ~ body; corporeity; ethics; object; responsiblity; subject A= ‘un corps se pose généralement comme une évidence, tant notre place dans le monde se fonde sur lui, Nous n’existons pas sans corps et dés lors que nous sommes la, dans lemonde, c'est parce que, par notre corps, une place nous est ouverte dans celui-ci, Notre rela- tion a l'espace et au temps, notre perception et notre visibilité s'ouvrent avec les capacités de ce corps et ses particularités. Et pourtant, dans cette proximité avec notre corps, s‘introduit un grand nombre de conflits, de difficultés et d’in- compréhensions. Par notre corps, nous sommes reconnus des autres et nous cherchons a nous reconnaitre nous ne. Le corps est en méme psl'endroit d’une identification, done d’une recherche d’adhésion, mais c’est toujours a la limite d’un mouvement de rejet, car il imaginé ais il n’apparait pas pr visible, Non seulement il n’est pas toujours, de fait, adéquat a ce que nous voudrions, mais ila aussi des réponses, desagissements, qui toublent cette quéte d’adhésion. Ettous les interstices qui nous séparent d'une correspondance entre notre volonté, nosattentes, nos désirs etl'effectivité de notre corporéité, ne font que nous rappeler qu'il n’existe pas de parfaite adéquation possible entre le monde et nousaméme, car notre corps se situe la frontiére entre eux, 1 Mon corps est mol. Je ne I’habite pas comme un véhicule dont je serais le pilote. Je suis mon corps, pourtant mon corps n'est pas seulement ‘moi. En méme temps qu'il est moi, ise distingue d'une identité parfaite avec moi, parce quill se te tattendu, (©2017 Beever Masson SAS. Tous cris rsers btovicetcnyioaone son 201712002 constitue comme l'intermédiaire entre l'intério- rité et ’extériorité, Le corps est, selon Ja formule du philosophe Viadimir Jankélévitch, » Zorgane obstacle de lame » (1) :c’esti-dire qu'il se pose comme limite dont le sens esta la fois 'empé » chement de se fondre dans le monde et la pos sibilité d’@tre en relation avec lui — done séparé de lui. te l'intérieur vers: Vextérieur mais aussi, l'inverse, il est la maniére par laquelle lextéric touche intérieuremen identité 4 nous Notre corps repré nous concerne et Nous Mestnous,ilfonde notre méme, mais sur une limite, Sa tre le dehors et le dedans, le al ct'intime, le visible etle privé. Entremélés, ces deux versants de la relation ne peuyentse résoudre dans une dissociation claire : le corps, et sa peau, sont donnés comme le moyen par lequel la présence personnelle peut advenir et s'expr 1 Ce corps que chacun semble “avoir”, nous appartient-il véritablement ? F'n effet, il nes'agit pas d'un simple outil d’interface, d’un vecteun mais il dévoile la multiplicité des voies d’expres sion de notre existence. Ses différentes dimen sions peuvent, dans certaines circonstances, nous dépasser et dépasser le corps luiméme. En elie les humains n’existent pas dans une sphere uniquement individuelle et orchestrée par des Tapporss intersubjectifs ~ d’individu a individ mais ilss'inscrivent dans |e corps social, voire dans Tespéce humaine. Tous ces aspects, ajoutantdes ‘couches de sens sur le corps, font se rencomtet différentes strates dans un lieu pourtant texture est mix! SOINS - n°822 - Scanned with CamScanner Le corps, OBJET OU SUJET ? Laquestion “A qui appai ntmon corps?” peut sembler surprenante. Pourtant, lorsque nous nous questionnons sur notre corps, deux voi peuvent apparaitre spontanément une voie phy. siologique et plastique, et une voie existentielle corps danssidimension biologique, celui que Von peut un autre cété, notre corps tel que nous le vivons, intimement, dans notre quotidien, tel que nous le voyons et "ima ginons, Pourl'exprimerencore autrement, nous différencions facilement le corpscomme un objet descriptible par lascience ete corpsen tant qu'il est mon corps subject E Ainsi, le corps biologique et celul exis tiel peuvent apparaitre se dist ciant. Nous pouvons c iguant, se disso que lorsqui dicale, nous ne nous jssons pas comme nous pourrions le fai regardons une imagerie m ‘dons pas a une image de ce qui se passe dans notre ccorpsct, la plupartdu temps, cette partie de nous-méme a la science ou médecine. Et finalement, lorsqu’une maladies tout se passe comme si notre corps, danssa dimension biologique, agissaitindépendamment. de nous. Comme s'il devenait un étranger dans lequel nous serions “coincés”. Que se passe-til pourles personnes quis’évanouissent la vue du sang, alors que celui-ci est un élément constitutif etconstant de notre corporéité ? Nous pouvons yvoir 'aveu que, dans notre maniére habituelle d'appréhenderles corps, nous oublions ce qu’ sontet ce qui les constitue, avec la méme naiveté que les enfants qui ne croient pas que le jambon Nientducochon ou que les poissons, avantd’étre panés, n'ont pas toujours été cubiques. | Partant d'un tel clivage, comment penser la corporéité lorsque la maladie intervient? Pensons au corps modifié par une pathologie, par exemple la personne qui a eu un cancer et {quisoulffre d'un lympheedéme, avec un syndrome de gros bras”, et qui dit: « Jene reconnais pas mon conps. » Dans ce type de changement corporel fort et soudain, se trouve l'impensable horizon de la mort, la soutfirance, mais il semblerait que Puisse aussi se trouver Ia trahison d'une partie ‘de moi qui paraissait implicitement acquise car naturellement comprise et assimilée comme “moi”, Mon corps marqué par la maladie n'est plus le méme. Avec 'interyention d'un décalage de celui-ci par rapportace quej'en attendais (que avec des photos : évidemment, nous n’ac jousabandonnons la _SOINS - n° 822 - janvier/fevrier 2018 dossier Le corps dans les soins Le corps et sa peau, sont donnés comme le moyen par lequel lapresence personne peut advent ets exprimer. cela soit bon ou mawvais), c'est comme si je lui

You might also like