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GUIDE PRATIQUE DE LA

COMMUNICATION BIENVEILLANTE
Pour parler juste et non juste parler!

Genevieve Beaulieu et Jean-François Lévesque


Cégep de Victoriaville

Un projet rendu possible grâce à la participation financière de


Table des matières
Introduction .........................................................................................................................................................................................3
Notes préliminaires : le contexte de la communication ......................................................................................................................5
Faire preuve d’objectivité ...................................................................................................................................................................8
Exercices : Faire preuve d’objectivité ................................................................................................ 10
Oser la gratitude! ..............................................................................................................................................................................12
Exercices : Oser la gratitude ............................................................................................................... 14
Quand et comment écouter? ............................................................................................................................................................16
Exercice : Quand et comment écouter? ............................................................................................ 18
S’affirmer avec bienveillance ............................................................................................................................................................20
Exercices : S’affirmer avec bienveillance .......................................................................................... 23
La Communication NonViolente .......................................................................................................................................................26
Exprimer ses sentiments ..................................................................................................................................................................27
Exercices : Exprimer ses sentiments ................................................................................................. 29
Exprimer ses besoins .......................................................................................................................................................................31
Exercices : Exprimer ses besoins ....................................................................................................... 33
Formuler une demande ....................................................................................................................................................................35
Exercices : Formuler une demande ................................................................................................... 37
Communiquer en situations complexes ...........................................................................................................................................40
Entamer une conversation courageuse avec bienveillance .............................................................................................................41
Exercices : Conversations courageuses............................................................................................ 44
Négocier avec l’autre ........................................................................................................................................................................46
Exercices : Négocier avec l’autre ....................................................................................................... 48
La résistance aux changements .......................................................................................................................................................50
Exercices : La résistance aux changements .................................................................................... 52
Conclusion ........................................................................................................................................................................................54
Médiagraphie....................................................................................................................................................................................55
Annexe 1 : ........................................................................................................................................................................................56
L’écoute active .................................................................................................................................................................................56
Annexe 2 : ........................................................................................................................................................................................59
Sentiments, besoins et processus de la CNV ..................................................................................................................................59

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Introduction
Dès l’enfance, on apprend qu’il vaut mieux résoudre nos différends par la parole plutôt que par l’action.
L’enfant, par nature impulsif, intègre parfois avec difficulté cette notion, mais il finira par la comprendre
et l’appliquer de mieux en mieux. On pourrait être porté à croire qu’au moment où l’enfant frappe à la
porte de l’âge adulte, l’expérience acquise lui permet de devenir expert de la communication orale.
Pourtant, bon nombre d’adultes se demandent comment ils devraient annoncer une mauvaise nouvelle,
comment aborder un voisin qui fait jouer sa musique trop fort, comment nommer un inconfort à des
collègues?
La parole est un véhicule puissant, mais force est de constater qu’elle ne vient pas avec un manuel de
l’utilisateur. C’est un peu comme si on nous avait offert une voiture de course avant même de nous
apprendre à conduire. Dans le feu de l’action, les émotions incitent à faire gronder le moteur, à employer
un clignotant beaucoup trop longtemps à l’avance ou à appuyer sur le frein lorsque la route devient
glissante. La complexité de la communication orale réside en partie dans son caractère instantané. Bien
entendu, on peut revendiquer le droit à l’imperfection et à la maladresse. Par contre, on peut sans doute
parfaire nos stratégies pour aborder l’autre et faire de cette spontanéité un levier pour corriger les erreurs
d’interprétation possibles. En d’autres mots, il vaut mieux prendre le temps de se préparer, ce qui
permettra de parler juste, plutôt que de juste parler.
Attention, ce n’est pas qu’une affaire de mécanique, de froides stratégies techniques. Au préalable, il faut
la volonté sincère d’interagir positivement avec l’autre, le souci de son confort et du vôtre. Bref, la
bienveillance est au cœur de notre efficience, c’est ce qui donne un sens à nos efforts.
Ce guide pratique est appuyé sur diverses approches et théories en psychologie des interactions et de la
communication. On y retrouve notamment des notions tirées de la psychologie positive, de la
communication NonViolente et de la gestion des ressources humaines. Les outils proposés permettent de
développer la justesse de votre expression orale dans divers contextes. Ces capsules théoriques et
pratiques sont présentées dans un ordre logique, allant des thèmes de base à ceux plus complexes (niveau
1 : la base de la communication, niveau 2 : la communication NonViolente, niveau 3 : communiquer en
situation complexe). Cependant, rien ne vous empêche d’accéder directement à celles qui répondent le
plus à vos besoins. Vous remarquerez que les capsules et exercices, bien que souvent présentés dans un
contexte éducationnel (relation professeur(e)/élève) sont facilement adaptables à toute situation de
relation interpersonnelle (ex. : milieu de travail, relation intimes et amicales). Suivez votre rythme, allez-y
selon vos humeurs… la bienveillance commence avec soi-même!

Geneviève et Jean-François

Professeurs en psychologie
Cégep de Victoriaville

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NIVEAU 1 : La base de la communication bienveillante

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Notes préliminaires : le contexte de la communication
Avant d’entamer une interaction verbale avec quelqu’un, il vaut mieux attendre que le contexte y soit
propice. Ainsi, la première étape est de se demander s’il s’agit du bon moment pour entamer une
discussion. Nous vous proposons quelques balises pour répondre à cette question.

Ce qui devrait m’inciter à attendre encore un peu…


 Je suis encore sous le coup de l’émotion.
Attention, il vaut mieux laisser retomber un peu la poussière, surtout si on est en colère. Autrement,
la discussion risque de ne pas être productive.
 L’autre personne semble très préoccupée ou elle m’indique clairement qu’elle n’est pas prête à
discuter avec moi.
Il faut être deux pour danser. Si on déballe notre sac et que l’autre personne n’était pas disposée à
nous parler, cela risque de nous rebondir au visage tôt ou tard. Elle pourrait se montrer peu réceptive
ou répondre à certains reproches après un temps de réflexion. Cela relancera une discussion qu’on
croyait terminée et on reviendra pratiquement à la case départ.
 J’ai de la difficulté à prioriser ce qui est le plus important.
On doit prendre un certain temps pour réfléchir à notre message. Cela implique d’ailleurs que si l’autre
nous demande une réaction immédiate, il nous appartient de lui demander un temps de réflexion au
besoin. Si nos idées sont confuses, l’autre peinera à nous comprendre. De plus, il vaut mieux aborder
un sujet à la fois. Si on arrive avec une liste de récriminations, il y a de fortes chances que l’autre
personne se sente attaquée et qu’elle ne réagisse pas comme dans notre scénario idéal!
 On n’a que quelques minutes pour discuter.
Il faut concevoir que l’autre voudra réagir à notre message. Il est donc préférable de choisir un moment
où le temps n’est un enjeu ni pour vous ni pour l’autre.
 On est dans un lieu public ou encore d’autres personnes pourraient entendre ou se mêler de notre
conversation.
Il est très important de penser à préserver l’estime de soi de l’autre en ne l’exposant pas à des critiques
en public. Ce qui doit être réglé entre nous ne concerne pas les autres. Discuter dans un lieu discret
évitera de faire émerger d’autres préoccupations nuisibles ou des sentiments négatifs
supplémentaires qui découleraient par exemple d’une impression d’avoir été piégé ou du souci de voir
ses réactions épiées par les autres.

Bref, avant d’aborder l’autre, il sera important qu’on s’assure que…


✓ On est dans un état émotionnel favorable à la discussion.
✓ L’autre est dans un état émotionnel favorable à la discussion.
✓ On a planifié notre message.
✓ On a du temps pour discuter.
✓ On a accès à un endroit discret pour discuter.

PSST! Il est plutôt normal de vivre un certain stress qui fait qu’on doute de la qualité de notre message ou
de la façon dont il sera perçu par notre interlocuteur(trice). On ne doit pas hésiter à l’écrire avant de le
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partager. Cela nous permettra de mieux choisir nos mots et de réfléchir à l’effet que devrait avoir notre
message.

Les obstacles à la communication


Voici quelques obstacles à la communication proposés par Thomas Gordon (2002). Certains sont peut-être
surprenants, mais il faut comprendre qu’être de bonne foi ne suffit pas toujours. Ainsi, il est possible de
nuire à la communication en voulant bien faire.
Réactions spontanée inefficaces
Lorsque l’autre exprime son idée, il faut éviter de se placer en position de supériorité par rapport à lui ou
elle. Ses problèmes ne sont pas les nôtres, alors on doit se contenter de comprendre son point. Le tableau
ci-dessous reprend des réactions qu’il est possible d’avoir et le message que cela envoie, subtilement ou
non, à l’autre personne.

Ce que l’on peut avoir tendance à faire Le message que cela envoie
1. Ordonner, commander, diriger.
2. Menacer, mettre en garde, avertir.
3. Sermonner, culpabiliser, moraliser.
« Tu es trop stupide, je vais t’expliquer. »
4. Conseiller, suggérer, donner des solutions.
5. Argumenter, persuader par la logique, faire la leçon.
6. Complimenter ou louanger sans raison, approuver.
7. Juger, blâmer, critiquer.
8. Insulter, ridiculiser, humilier.
9. Interpréter, psychanalyser, diagnostiquer. « Quelque chose ne tourne pas rond chez toi. »
10. Rassurer, consoler, sympathiser.
11. Interroger, questionner, enquêter.
12. Esquiver, distraire, dévier. « Cette conversation me rend mal à l’aise. »
(Gordon, 2002)

Non-verbal et paralangage
Il est important de considérer que les obstacles mentionnés
dans le tableau ci-dessus peuvent se manifester dans le Paralangage : « Indice vocal qui
paralangage et le non-verbal du locuteur ou de la locutrice. accompagne le langage parlé » Gamble
D’ailleurs, en cas de contradiction entre les mots prononcés et Gamble, 2016, p. 134.
et le ton utilisé, le second sera généralement l’indicateur
privilégié pour interpréter le réel sens du message. Par exemple, si quelqu’un dit « Je suis très heureux de
ma situation », mais avec une hésitation marquée dans la voix, on risque de douter de sa sincérité.
Le message qu’on tente de véhiculer sera plus puissant s’il paraît authentique. Néanmoins, certains
facteurs comme le stress1 ou la fatigue peuvent embrouiller le signal envoyé et perçu. Au fil des capsules
qui vous sont proposées dans ce document, plusieurs techniques vous seront présentées pour mieux vous
exprimer. Peu importe la stratégie employée, portez une attention particulière à votre posture, votre ton
de voix, votre débit et tous les autres indices extérieurs pouvant interférer avec la compréhension du
message que vous tentez d’émettre.

1
Le stress est un facteur d’influence important dans la qualité de la communication orale. Puisque la gestion du stress
est une thématique complexe à part entière, elle ne sera pas traitée ici. Pour en savoir davantage, il est conseillé de
se référer au Centre d’études sur le stress humain (CESH) à cette adresse : https://www.stresshumain.ca/ 6
On ne communique pas qu’avec les mots…

Pour aller plus loin…


DEVITO, Joseph A, CHASSÉ, Gilles et Vezeau, Carole. La communication interpersonnelle : Maude, Olivier, Adam et les
autres, Montréal, ERPI, 2019, 290 p.
GAMBLE, Teri Kwal et GAMBLE, Michael. Communiquer et interagir, Montréal, Chenelière éducation, 2016, 322p.
GORDON, Thomas, Relations efficaces, Montréal, Le Jour, 2002, 129 p.

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Faire preuve d’objectivité
« Parler juste et non juste parler »

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


 Prendre conscience des effets de la subjectivité dans un message.
 Formuler un message objectif.

Pas facile d’utiliser un message objectif…

Pour être précis et clair, il faut s’en tenir aux faits observables, donc objectifs. Ainsi, la discussion peut
porter sur ce qui est important : la résolution du différend. Si uniquement des faits sont rapportés, ils ne
peuvent être contredits. Pourtant, il est fréquent d’associer un jugement à l’observation qu’on veut faire.
Cela peut prendre différentes formes comme exagérer, culpabiliser ou prêter une intention à l’autre. La
formulation utilisée et le choix des mots (ex. : toujours, jamais, etc.) ont un impact majeur sur l’objectivité
du message.

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Voici deux exemples issus de la même situation :
 « Cette section de ton travail est bâclée. »
✓ « Je remarque que dans cette section de ton travail, les réponses ne font pas plus d’une ou
deux lignes alors que des réponses d’environ 10 lignes était demandées. »

Même si on croit fermement avoir raison d’interpréter la situation de cette manière (par exemple, le travail
nous semble vraiment bâclé), dès que l’autre personne est en désaccord avec nous, la discussion dévie
vers ce nouveau point de discorde : « Non, j’ai passé beaucoup de temps à rédiger cette section! » Dans
ce cas-ci, le but du (de la) professeur(e) était de parler de la qualité du travail, mais son manque
d’objectivité a finalement fait dévier la discussion sur le temps passé sur le travail.
Consultez la liste suivante et analysez vos messages (verbaux et non-verbaux).

Message qui dénote un jugement


Critère Message objectif (✓)
(subjectif) ()
Je nomme les faits, rien que les faits. Tu es toujours en retard Je constate que, pour nos deux derniers
rendez-vous, tu es arrivé 15 minutes
après l’heure prévue.

Les verbes que j’utilise sont clairs et Pierre traîne dans son travail. Pierre ne commence à réviser qu’à la
neutres. veille des examens.

Les adverbes et adjectifs que j’utilise Paul écrit très mal. Je n’arrive pas à déchiffrer l’écriture de
sont neutres et impartiaux. Paul.
Il a fait beau hier.
Il a fait soleil hier.

Je privilégie l’expression au « je » plutôt Si tu ne prends pas des repas équilibrés, Si tu ne prends pas des repas équilibrés,
qu’au « tu » (accusation). tu auras des problèmes de santé. je crains que tu n’aies des problèmes de
santé.

Mon message a une intention Tes retards se succèdent, il y aura Qu’est-ce qui explique tes retards des
bienveillante (pas de coincer l’autre) certainement des conséquences. dernières semaines ? Je tiens à te
rappeler que le règlement prévoit une
conséquence après 3 retards de plus de
15 minutes.

Mon message ne prête pas d’intention à Jacques ne veut jamais collaborer A chaque fois que j’ai demandé à
l’autre, il parle de moi Jacques sa collaboration, il a refusé.

Mon ton est neutre Enregistrer : « Tu as oublié de faire ton À l’oral, sans être las, le ton ne laisse pas
travail!? » avec un ton fâché. paraitre l’opinion.
Si le ton est neutre « Tu as oublié de
faire ton travail ». La personne a moins
de chance de se sentir attaquée.
*Inspiré et adapté de Rosenberg (2013)

Pour aller plus loin…


ROSENBERG, Marshall B. Les mots sont des fenêtres (ou des murs), St-Julien-en-Genevois, Jouvence, 2013, 240 p.

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Exercices : Faire preuve d’objectivité
Validation de compréhension
Pour chacun des énoncés ci-dessous, dites s’il se rapporte seulement à un fait (F) ou si vous percevez une
trace de jugement (J).
Énoncés F J
1. « Tu m’as demandé de prendre la parole devant le groupe. »
2. « Il y a beaucoup de pages à lire en devoir. »
Élève

3. « Je ne comprends pas ce qui est attendu, les consignes ne sont vraiment pas claires. »
4. « Je vois que la correction était plutôt sévère. »
5. « Je croyais que je comprenais, mais ton explication vient de me mélanger. »
6. « Je constate que depuis le début du cours, tu n’écoutes pas mes explications. »
7. « Marcel et Grégoire, vous avez discuté ensemble pendant la présentation de la séquence
Professeur(e)

vidéo. »
8. « Je ne comprends pas pourquoi vous ne voulez jamais prendre la parole en classe. »
9. « J’aime que tu fasses des blagues en classe, mais j’aime moins ça lorsque tu me coupes la
parole pendant mes explications. »
10. « Il est impossible pour moi de vous permettre de quitter le cours plus tôt. »

Voici des exercices supplémentaires :


http://www.communicationbienveillante.eu/test/quizzobservation/

Application
Formulez chacun des énoncés adéquatement, en vous basant sur des faits. Au besoin, inventez des détails
pour rendre le tout plus cohérent.

1. Élève qui dit : « Il y a beaucoup de pages à lire en devoir. »

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2. Élève qui dit : « Je n’ai pas compris ce qui est attendu, les consignes ne sont vraiment pas claires. »

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3. Élève qui dit : « Je vois que la correction était plutôt sévère. »

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4. Professeur(e) qui dit : « Je constate que depuis le début du cours, tu n’écoutes pas mes explications. »

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5. Professeur(e) qui dit : « Je ne comprends pas pourquoi vous ne voulez jamais prendre la parole en
classe. »

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6. Professeur(e) qui dit : « Il est impossible pour moi de vous permettre de quitter le cours plus tôt. »

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En supplément…

Bien que ce principe soit relativement simple, sans doute avez-vous constaté que ce n’est pas toujours évident de ne
nommer que des faits. À partir du moment où on a une implication émotionnelle dans la situation, cette objectivité
nécessaire devient encore plus ardue. Considérant que dans des situations d’échanges instantanés, la charge émotive peut
être élevée, on a davantage tendance à déformer la réalité. Par exemple, on peut manifester des biais cognitifs, notamment
le biais de confirmation. On se convainc alors soi-même qu’on a raison d’arriver à la conclusion x ou y en se basant sur
des indices qui ne sont pas nécessairement concrets et vérifiables. Il se peut également que notre manque de confiance
en nous nous incite à percevoir le comportement de l’autre comme une attaque envers nous. On appelle distorsions
cognitives les erreurs de la pensée qui incitent à voir les choses négativement. Pour approfondir ces sujets de manière
vulgarisée, vous pouvez cliquer sur les hyperliens ci-dessous.
Biais cognitifs : http://www.psychomedia.qc.ca/psychologie/biais-cognitifs
Distorsions cognitives : http://www.psychomedia.qc.ca/psychologie-cognitive/2013-03-14/distorsions-cognitives-liste-definitions

Réflexion
À quel point est-ce facile ou difficile pour vous d’appliquer les principes de non-jugement dans vos
interactions? Proposez une ou des hypothèses.
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Que retenez-vous de cette capsule?

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Oser la gratitude!
« Parler juste et non juste parler »

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


 Comprendre le lien entre la gratitude et la bienveillance dans ses relations
interpersonnelles.
 Comprendre la pertinence de faire preuve de gratitude au quotidien.

Il est fréquent que le comportement des autres ait un effet positif sur nous…
Depuis plusieurs années, les recherches dans le domaine des
neurosciences montrent que les personnes qui éprouvent Gratitude : « émotion positive
souvent de la gratitude manifestent, dans plusieurs contextes, interpersonnelle éprouvée dans les
plus de bien-être physique, mental et social (McCullough et al. situations où l’individu se perçoit comme
2001). étant bénéficiaire d’un bienfait
intentionnellement procuré par autrui »
(Shankland et André, 2017, p. 44)
Gratitude et bienveillance
Gratitude et bienveillance sont étroitement liées. Pour pratiquer la bienveillance, envers soi ou autrui, la
personne doit avoir l’habileté d’éprouver et de démontrer de la gratitude. Il ne s’agit pas ici de
« remercier » autrui pour tout et pour rien, mais bien de démontrer une reconnaissance sentie face à une
personne qui nous a fait sentir bien. Pour ce faire, on peut expliquer franchement en quoi le
comportement de l’autre a eu une incidence positive sur nous.

Chez les personnes qui pratiquent consciemment la bienveillance, il est remarqué que de meilleures
relations sociales s’instaurent. Ces relations deviennent donc plus respectueuses, agréables. Le climat
convivial qui en découle favorise même l’innovation (à titre d’exemple voir le point de vue de Juliette
Tournand, auteure de La bienveillance en action, 2018 2.

Mieux vaut tard que jamais!


Si vous réalisez que dans le feu de l’action vous avez omis de
manifester votre gratitude à autrui, pourquoi ne pas lui
écrire ou, encore mieux, la lui souligner de vive-voix la
prochaine fois que vous lui parlerez?

Erreurs à éviter…
- Remercier pour tout et pour rien : Nul n’apprécie le
manque de sincérité. Avant de faire preuve de gratitude,
ciblez ce qui vous a apporté du bien-être dans l’action de
l’autre. C’est cette spécificité qui permettra à l’autre de
déduire votre sincérité.
- Souligner uniquement de grands gestes ou actions : Il
n’est pas nécessaire que les actions soient grandioses
pour vous apporter du bien-être.

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TOURNAND, Juliette. « Se dépasser, mais dans quel sens? » Youtube, TEDxRennes, 2012, 18 minutes,
www.youtube.com/watch?time_continue=2&v=7G-a2A9faK4&feature=emb_logo (page consultée le 18 février 2020).
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- Manquer de cohérence ou de constance : La parcimonie et la sincérité sont à privilégier. L’expression
de la gratitude doit être un geste réfléchi et senti, pas un automatisme.

Vous le remarquerez …
Les démonstrations de gratitude, tant de la part du (de la) professeur(e) que de la part des élèves,
contribueront à améliorer l’ambiance dans le groupe. En effet, la gratitude peut contribuer à renforcer les
comportements positifs des interlocuteurs. Tou(te)s réaliseront donc que leur participation active est
importante au bien-être du groupe.

Par exemple :
✓ Souligner l’apport d’une question pertinente.
✓ Remercier pour un commentaire constructif.
✓ Remercier pour le partage d’une expérience personnelle qui appuie le contenu du cours.
✓ Etc.

Pour aller plus loin…


SHANKLAND, Rébecca, et Christophe ANDRÉ. « Gratitude et bien-être social : mécanismes explicatifs des effets de la
gratitude sur le bien-être individuel et collectif », Revue québécoise de psychologie, vol. 38, no. 2 (2017), p. 43–64.

TOURNAND, Juliette. La bienveillance en action, Paris, Interéditions, 2018, 344 p.

GOUVERNEMENT DU QUÉBEC. L’adulte comme modèle de bienveillance à l’école, 2019, 4 p.,


http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/education/adaptation-scolaire-services-
comp/Bienveillance-personnel-scolaire-fr.pdf (page consultée le 28 mars 2020).

McCullough, Michael E., Kilpatrick, Shelley D., Emmons, Robert A. et Larson, David B. « Is gratitude a moral Affect? »,
Psychological Bulletin, vol.27, no.2 (2001), p.249-266.

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Exercices : Oser la gratitude
Validation de compréhension
Repérer les phrases qui témoignent efficacement de gratitude.
1. Henriette dit merci à son élève pour la question qu’il vient de poser.
2. Tristan mentionne à Sylvio qu’il a apprécié son geste de compassion.
3. Greta demande de poser des actions pour la planète.
4. Germain propose à Simone de lui venir en aide.
5. Cette activité m’a fait plaisir; elle m’a fait réaliser que tu es là pour moi lorsque je me sens
seule.

Application
Maintenant que vous avez réfléchi à la gratitude dans votre quotidien, rappelez-vous au moins deux
moments récents de votre vie où vous auriez pu davantage en exprimer. Dites à quoi cela aurait pu
ressembler.
Par exemple : « J’ai beaucoup apprécié que tu m’aides à comprendre ce texte, Julie! Je me sentais
complètement dépassé face à cette lecture! » Cette affirmation vous permet, ainsi qu’à Julie, de mesurer
l’impact positif que son action a eu sur vous.

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Réflexion
Indiquez les expressions que vous utilisez le plus souvent pour exprimer votre gratitude à quelqu’un.
Pensez aussi aux expressions qui sont utilisées par autrui envers vous.

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Que retenez-vous de cette capsule?

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Défi
Pour les deux prochaines semaines, développez une communication orale empreinte de gratitude. Pour
ce faire, ciblez un défi à réaliser.
Choix 1 : Remerciez un élève qui pose une question pertinente.
Choix 2 : Complimentez votre groupe s’il participe bien à une des activités pédagogiques que vous avez
préparées.
Choix 3 : Terminez chacun de vos cours en remerciant le groupe pour sa présence ou participation.
Choix 4 : Demandez à l’un de vos groupes des commentaires sur les activités du cours et remerciez les
élèves de prendre du temps pour commenter de façon constructive.

Voici un espace de réflexion


Si vous n’avez pas réussi votre défi, quelles en sont les raisons, selon vous? Est-ce possible que ce soit lié
aux « Erreurs à éviter » suggérées dans la capsule « Osez la gratitude »? Pouvez-vous outrepasser ces
obstacles? Comment?

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Si vous avez réussi votre défi, quels effets cela a-t-il eu sur la qualité de vos relations?

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Quand et comment écouter?
« Parler juste et non juste parler »

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


 Prendre conscience de ses réflexes d’écoute et de leurs effets sur l’autre.
 Savoir comment manifester efficacement son ouverture à l’autre.
 Utiliser des stratégies simples qui favorisent l’ouverture de l’autre.

Quand l’autre a un problème…


Il arrive parfois que notre interlocuteur(trice) soit préoccupé(e). Qu’on soit ou non à la source de son
problème, il est bienveillant de tendre l’oreille et de lui offrir notre écoute. Pas besoin de trompettes, pas
besoin d’annoncer notre intention, juste d’être là. Voici quelques astuces, mais aussi quelques pièges à
éviter parce que bien communiquer c’est aussi savoir se taire au bon moment.

L’écoute attentive et non superficielle


Il est irréaliste de croire qu’on peut toujours maintenir notre attention à un haut niveau pour toutes les
informations que l’on reçoit, considérant qu’on est bombardés de messages à travers une multitude de
canaux de communication tout au long de notre journée. Une bonne écoute de l’autre consiste
précisément à en prendre conscience et à choisir volontairement de placer l’autre au centre de nos
préoccupations pour un moment.

Comment faire pour être VRAIMENT là? (écoute active efficace)


En supposant qu’une personne a besoin de se confier…
✓ Tout d’abord, on se tait! On regarde l’autre dans les yeux et on se place à une distance raisonnable :
ni trop près (intimidant et étouffant), ni trop loin (il faut une certaine proximité et une intimité).
✓ On accuse réception du message : verbalement ou non (se pencher vers l’autre, hocher la tête, etc.)
✓ On pose une question comme signal de notre ouverture et de notre temps à sa disposition : « Tu me
sembles triste, aimerais-tu en parler? »
✓ On reflète à l’autre notre compréhension : il n’est pas nécessaire d’ajouter des informations, on
reformule ses idées principales dans nos propres mots. Le fait de s’entendre à travers nous sera
réconfortant (c’est un signe précieux témoignant qu’on
l’écoute!), mais aussi étonnamment éclairant. Si on Écoute superficielle
n’est pas certain(e) de comprendre, on pose alors une
question ouverte pour aider l’autre à préciser sa pensée.

Voici un aperçu de diverses stratégies qui peuvent être


employées en écoute active. Gardons toutefois en tête
qu’au-delà de ces notions théoriques, il importe surtout de
manifester une volonté de laisser l’espace à l’autre pour
nous parler de l’objet de ses préoccupations.

16
Technique Description Quand l’employer ? Exemple(s)
Question simple et directe qui Pour valider que la personne a « Aimerais-tu qu’on parle? »
entraîne une réponse par besoin de parler.
« Tu veux aller où ? Je n’ai pas
Question fermée « oui » ou par « non » ou Pour préciser une information
compris… »
encore par quelques détails incomprise.
fonctionnels.
Au début de la discussion, pour « Qu’est-ce que tu veux dire
Question qui invite au laisser la personne décrire ce par là? »
développement d’une pensée. Il qu’elle vit.
« Comment vis-tu avec ça? »
Question ouverte est généralement difficile de Pour inciter la personne à
répondre brièvement à ces élaborer pour décrire, clarifier « De quelle manière est-ce que
questions. ou expliquer une situation ou cela t’affecte? »
ses pensées.
Indication de poursuivre son Quand la personne prend une Hochement de tête
Incitation à discours. Ce peut être fait de pause ou hésite, alors qu’elle ne
« Hum hum »
continuer manière verbale ou non semble pas avoir terminé
verbale. d’exprimer une idée. « Continue »
Répéter les mots de la Lorsque la personne vient de - J’ai beaucoup aimé sa
personne ou à peu près les dire quelque chose qui semble présence.
Reflet de niveau 1 :
mêmes mots, souvent un important. On lui renvoie ses - Tu as aimé sa présence.
Répétition
segment complet de la dernière mots à la manière d’un miroir
phrase. pour qu’elle y réfléchisse.
Lorsqu’il n’y a pas de sentiment - On gelait en plus cette
précis qui se dégage de la journée-là!
Reflet de niveau 2 : Répéter ce que dit la personne, situation, mais qu’on souhaite - Tu eu pas mal froid
Reformulation mais dans nos propres mots. permettre à la personne pendant votre sortie.
d’élaborer davantage.

Lorsqu’un sentiment est perçu. « Tu trouves ça encore difficile


Extraire les sentiments qui C’est la technique à privilégier, aujourd’hui. »
ressortent du discours de la elle permet à la personne de
Reflet de niveau 3 : « Tu n’aimes pas que ta mère
personne, autant sur les plans mieux se comprendre. Il faut
Reflet de sentiment se mêle de tes affaires. »
verbal que non verbal et les que la personne soit prête à
formuler dans nos mots. discuter cependant. « Ça te frustre qu’il te dise
ça. »

En supplément…

L’annexe 1 (p. 56) présente un exemple de l’évolution que peut prendre une discussion selon l’emploi efficace ou non des
techniques d’écoute. Dans la première séquence, que l’on appellera « typique », Beth offrira une occasion à Serge de
s’exprimer, sans utiliser de technique particulière. Lors de la seconde variante, Beth utilisera des techniques d’écoute active.

Lorsqu’on écoute l’autre, on peut être tenté de lui donner des solutions ou des réponses à ses
questionnements. À ce moment-là, on n’est plus dans l’écoute. Selon Thomas Gordon (2002), il faut éviter
de jouer le rôle du sauveur. On doit laisser toute la place à l’autre et mettre de côté nos jugements, nos
conseils et nos interprétations. Il sera plus efficace de donner confiance à l’autre quant à sa capacité à
comprendre sa situation et à trouver ses propres solutions adaptées à son contexte. Pour des exemples
de comportements verbaux à éviter, il est suggéré de retourner lire les notes préliminaires Le contexte de
la communication.

Pour aller plus loin…


GORDON, Thomas. Relations efficaces, Montréal, Le Jour, 2002, 129 p.
ADLER, R. B. et PROCTOR II, R. F. Communication et interactions, Montréal, Modulo, 2013, 408 p.

17
Exercice : Quand et comment écouter?
Validation de compréhension
L’écoute active implique de placer l’autre au centre de nos préoccupations et d’éviter toute trace de
jugement, de conseil ou d’opinion. Pour chacune des répliques, déterminez s’il s’agit véritablement d’un
reflet.
Une enseignante vous dit :
« Je le sais plus quoi faire honnêtement, mes élèves ne participent pas du tout en classe! »

☐ 1. « La participation de tes élèves n’est toujours pas à la hauteur de tes attentes. »


☐ 2. « As-tu essayé de les interpeler par leur nom? Pour moi ça fonctionne à tout coup! »
☐ 3. « Tu es découragée. »

☐4. « C’est sûr que ta matière n’aide pas. Il faut vraiment avoir le tour pour rendre ça
intéressant! »

☐ 5. « Les jeunes aujourd’hui ils sont de même, empêche-toi pas de dormir pour ça! »
☐ 6. « Ah! Si tu savais! Moi aussi, dans ma classe c’était la même chose hier. »

Application
Faites maintenant des reflets en évitant les jugements, les conseils et les opinions!
1. « J’oublie tout, ces temps-ci! Ça ne va pas très bien à la maison et j’ai de la difficulté à penser à autre chose. »

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2. « Je suis pas mal dépassé(e) par la session disons. Je vois la pile d’obligations qui s’allonge et je ne sais pas
comment je vais pouvoir y arriver. »

____________________________________________________________________________________
3. « J’ai l’impression que je me suis un peu trop laissé(e) emporter dans le cours. Je repense constamment à la
situation et je me dis que j’aurais dû garder mon calme. »

____________________________________________________________________________________
4. « On n’a pas reçu l’allocation pour notre projet. C’est vraiment plate, on avait littéralement mis nos trippes dans
notre proposition! »

____________________________________________________________________________________
5. « On dirait que peu importe ce que je fais, mon chum/ma blonde n’est jamais content(e). Il vient des bouts où
je me questionne pas mal sur notre relation. »

____________________________________________________________________________________

*À l’occasion, il est possible de recevoir des confidences plus intimes. Il appartient à chacun de déterminer
son degré d’aisance à faire parler la personne ou à la référer à la bonne ressource au besoin.

18
Réflexion
À quel point trouvez-vous difficile de ne pas donner votre avis aux autres lorsqu’ils manifestent leur
vulnérabilité? Qu’est-ce qui explique votre réponse selon vous?

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____________________________________________________________________________________
Êtes-vous en mesure de penser à des conseils ou des jugements que vous avez pu faire à d’autres
personnes et qui vous semblent aujourd’hui inappropriés? Le cas échéant, rapportez-en des exemples et
précisez pourquoi il s’agissait selon vous de mauvais conseils.

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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Avez-vous le souvenir d’avoir reçu de mauvais conseils ou des jugements par des amis bien intentionnés?
Le cas échéant, rapportez-en des exemples et précisez ils étaient maladroits.
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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Que retenez-vous de cette capsule?

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Défi
La prochaine fois que quelqu’un souhaite vous parler d’un sujet qui le tracasse, ne lui donnez pas votre
opinion. Si cette personne insiste pour l’obtenir, avouez-lui que vous n’êtes pas la meilleure personne pour
trancher la question, mais que vous êtes disposé(e) à écouter ses préoccupations. Vous devriez constater
que la personne est moins démunie qu’elle pouvait le laisser croire au départ et qu’elle possède en elle les
meilleures pistes de solution!

Voici un espace de réflexion


Si vous n’avez pas réussi votre défi, quelles en sont les raisons, selon vous? Identifiez un ou deux obstacles
et dites comment vous pourriez les outrepasser.

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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Si vous avez réussi votre défi, quels effets cela a-t-il eu sur la qualité de vos relations?

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19
S’affirmer avec bienveillance
« Parler juste et non juste parler »

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


 Prendre conscience de certains comportements nuisibles à une situation de
communication interpersonnelle.
 Dialoguer de manière constructive lorsqu’un élément de discorde survient avec une autre
personne.

Lors d’un désaccord avec quelqu’un


Les relations interpersonnelles sont propices à une multitude de malentendus et de frustrations. Lorsqu’on
est agacé par le comportement de quelqu’un, il peut être libérateur de lui en parler et, si l’autre nous
communique un malaise, il vaut mieux l’écouter. Cependant, il arrive aussi que cet inconfort soit vécu par
les deux parties. Voici quelques pistes pour des échanges plus harmonieux et constructifs.
Aborder l’autre avec ouverture
Si deux personnes sont en colère, leurs paroles peuvent dépasser leur pensée et les chances de succès de
la communication seront alors plutôt faibles. Il vaut donc mieux attendre le bon moment pour discuter
(voir les notes préliminaires : « Le contexte de la communication »), prendre son courage à deux mains et
confronter la personne avec bienveillance. Le but sera alors de réduire la température des émotions
mutuelles en alternant la prise de parole et l’écoute active (voir aussi la capsule « Quand et comment
écouter »).
Critères d’efficacité d’un message de confrontation
Avant d’aborder l’autre avec votre message de confrontation, préparez-vous. Vous devriez être en mesure
de répondre par l’affirmative pour chacun de ces quatre (4) critères :
✓ Le message a de grandes chances de produire un résultat positif.
✓ Le message est exprimé au « je » et évite toute attaque à l’estime de soi (elle doit être préservée
de part et d’autre).
✓ Le message a pour but de conserver la qualité de la relation ou de l’améliorer.
✓ Le message ouvre la porte à la découverte d’une solution.

La confrontation (pour aller plus loin, voir aussi la capsule « Exprimer ses besoins ») amène l’autre à
augmenter sa température émotionnelle (la personne se braque, se choque, est désemparée, etc.).
L’alternance entre la confrontation et l’écoute active permet de garder la conversation constructive. En
somme, l’autre peut s’exprimer et on reçoit avec empathie sa réaction à notre message. L’idée est de
poursuivre cette alternance des positions entre l’affirmation et l’écoute jusqu’à ce que tout le monde se
sente bien.

*Inspiré de Gordon (2002)

20
Quelques trucs pour faciliter le processus
Remplacer le « tu » par le « je »
C’est moins accusateur et ça a plus d’impact. Plutôt que de dire « Tes explications manquent de clarté »
un(e) élève pourrait vous dire « J’ai de la difficulté à comprendre la matière. » L’absence de jugement dans
la deuxième formulation suscite davantage l’ouverture et l’empathie, tout en préservant l’estime de
tou(te)s.

Être objectif (voir capsule, « L’objectivité du message »)


Éviter tout jugement, s’en tenir aux faits qui dérangent et non aux intentions suspectées chez l’autre. Par
exemple : « Ce que je fais n’est jamais suffisant pour toi! » pourrait être remplacé par « Je suis déçu(e) de
ne pas avoir reçu de commentaires sur mon travail ».

Nommer les effets concrets que la situation a sur vous


La situation peut créer sur vous des effets de divers ordres (ex. : en termes émotifs, de temps, d’argent,
etc.). Les nommer directement à l’interlocuteur(trice) permettra de sensibiliser cette personne à l’impact
que cette situation a sur vous. Cela est bienveillant pour tous.

Régler vos griefs un à la fois


Ramener d’anciennes situations sans lien avec la discorde actuelle pour appuyer vos propos n’est ni
bienveillant, ni productif3 : vous faites dévier la conversation du sujet qui vous préoccupe. Si malgré votre
bonne volonté, vous constatez que vous vous êtes éloigné(e)s du sujet, revenez-y vite!

Oui, mais… si l’autre n’est pas réceptif à mon besoin de parler?


Lorsqu’on démontre du respect en parlant avec objectivité, calme et bienveillance, il est attendu que
l’autre personne s’ouvre à son tour. Cependant, on ne peut pas forcer quelqu’un à dialoguer et brusquer
les choses risque plutôt de nuire à la relation. Un refus de parler peut être interprété comme un signe qu’il
faut attendre que la poussière retombe encore un peu (voir le préambule « Contextes de la
communication »).

3
Si des discordes ou incompréhensions passées vous agacent, choisissez le bon moment pour les aborder avec l’autre
(voir les notes préliminaires : « Le contexte de la communication »).
21
*Si le problème à aborder est d’une ampleur telle que vous Savoir s’affirmer!
craignez la réaction de l’autre, nous vous suggérons de
consulter la capsule « Entamer une conversation
courageuse avec bienveillance ».

Pour aller plus loin…


GORDON, Thomas. Relations efficaces, Montréal, Le Jour, 2002,
129 p.

22
Exercices : S’affirmer avec bienveillance
Validation de compréhension
Parmi les énoncés ci-dessous, lesquels sont des exemples d’affirmation empreinte de bienveillance?

☐ 1.« Mario, je trouve que tu me tapes sur les nerfs. »

☐ 2.« J’avais peu de temps aujourd’hui et ton retard a pour conséquence de me mettre une pression
supplémentaire pour atteindre mes objectifs. »

☐ 3.« Je suis irrité par le fait que tu m’as encore rabaissé devant tout le monde, comme tu le fais à
peu près toujours, d’ailleurs. »
☐ 4.« J’ai de la difficulté avec ton manque de respect à mon endroit depuis quelques jours. »

☐ 5.« Je ne comprends pas ce que tu attends de moi. C’est la deuxième fois cette semaine que tu me
fais cette remarque et j’ai de la difficulté à ne pas la percevoir comme une attaque. »

☐ 6.« J’aimerais beaucoup que pour une fois tu me laisses parler, que tu écoutes véritablement ce
que j’ai à te dire, car c’est important pour moi. »

Application
Voici quelques situations qui peuvent être considérées suffisamment dérangeantes pour qu’une
confrontation soit faite. Tentez de formuler un message qui aborde directement le problème en
demeurant malgré tout bienveillant pour l’autre et pour vous.

1. Jacqueline est votre collègue de bureau. Elle est un pilier de sa famille et il est fréquent qu’elle appelle
des proches quelques fois par jour (ses enfants, ses parents, ses frères et sœurs, etc.). Ses appels sont
d’une durée de 5 à 10 minutes, mais elle parle alors très fort et cela vous déconcentre. Avec le temps,
cette récurrence devient un irritant pour vous. Vous aviez évoqué cela subtilement en espérant que
Jacqueline comprenne, mais elle vous a donné l’impression de trouver votre commentaire inapproprié
et elle n’a rien changé de ses habitudes. Vous lui demandez si elle a quelques minutes pour discuter…

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23
2. Nala est l’une de vos élèves qui fait un retour aux études. De manière générale, son attitude est très
positive et elle intervient régulièrement en classe pour poser des questions pertinentes ou partager
des exemples personnels en lien avec les contenus de cours. Vous entretenez une très bonne relation
avec elle, mais plus la session avance, plus elle semble se sentir à l’aise de faire des blagues à de
mauvais moments ou des commentaires qui sortent du cadre du cours. Lors d’une séance de cours, il
vous est arrivé à deux reprises de la ramener poliment à l’ordre. Depuis ce temps, quelque chose
semble brisé entre vous et ses interventions sont maintenant plutôt teintées d’une attitude négative.
Vous lui demandez de passer vous voir, ce qu’elle accepte.

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Réflexion
Réfléchissez à des situations que vous avez vécues qui vous ont incité(e) à confronter une autre personne.
a) Quelle forme prennent habituellement ces confrontations?
a. Y a-t-il un(e) gagnant(e) et un(e) perdant(e)?
b. À quel point êtes-vous satisfait(e) de ces confrontations en général?

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b) Vous arrive-t-il d’éviter de confronter les autres parfois? Pourquoi, selon vous, et quels sont les effets
de ces évitements sur la qualité de vos relations et de vos échanges?

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c) Que retenez-vous de cette capsule?

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24
NIVEAU 2 : La communication NonViolente

25
La Communication NonViolente
Il arrive que l’on s’étonne de la réaction des autres; de leur sensibilité ou de leur susceptibilité. Pourtant,
l’inverse est aussi vrai : on ne reçoit pas toujours les messages de manière neutre et désengagée et ce que
l’on juge être une affirmation de soi forte et fondée sera parfois perçue par d’autres comme une réponse
disproportionnée.
Selon Marshall Rosenberg, lorsqu’on vit une insatisfaction envers quelqu’un, c’est nécessairement que son
comportement entrave un de nos besoins humains : respect, reconnaissance, appartenance, estime, etc.
Ces derniers étant fondamentaux, on a alors davantage tendance à répliquer de manière agressive. Notre
éducation nous apprend d’ailleurs que pour faire preuve d’agressivité, plusieurs options s’offrent à nous.
On peut la manifester dans nos actions, dans le choix de nos mots, dans notre ton de voix ou encore en
gardant le silence. De manière plus subtile, on emploiera également des formes de communication qui
souvent, sans même qu’on s’en rende compte, sont agressives : les jugements moralisateurs, les
comparaisons qui placent un individu au-dessus d’un autre, le refus d’assumer sa part de responsabilité,
le fait d’exiger plutôt que de demander, etc.
Néanmoins, peu importe sa forme, plusieurs éléments rendent l’agressivité contre-productive :
• L’agressivité engendre plus d’agressivité!
• Règle générale, le problème à l’origine de notre frustration reste entier.
• Avec de la chance, l’autre peut se soumettre à notre volonté, mais il risque de garder un goût amer
de cette interaction et la situation pourrait bien se dégrader avec le temps.
• La qualité de la relation avec l’autre s’en trouve affectée.
• Les interactions avec d’autres personnes peuvent aussi s’en trouver affectées.

Et si on voyait les choses sous un autre angle?


Pour certains, cela peut sembler fou a priori, mais plutôt que de traiter l’autre comme un opposant, on
peut le voir comme un(e) allié(e) à notre cause. Pour cela, il faudra d’abord admettre et assumer que notre
problème n’est pas le sien. Nous seul(e)s avons la responsabilité de nos besoins. Cependant, si on aide les
autres à mieux comprendre notre perspective, peut-être accepteront-ils de contribuer à notre bien-être.
Pour y arriver, Rosenberg propose d’utiliser la Communication NonViolente (CNV). Il s’agit d’une démarche
de quatre étapes qui permettent à la fois de s’ouvrir à l’autre et de stimuler son empathie. Il n’est pas
toujours souhaitable d’utiliser chacune des étapes lorsqu’on vit un inconfort, mais il est malgré tout
pertinent de s’en imprégner pour mieux réagir face à l’autre et parler plus juste.
1- Rapporter objectivement les faits qui entravent mon bien-être.
2- Nommer le sentiment que cette situation me fait ressentir.
3- Expliquer le besoin qui est à l’origine de mes sentiments.
4- Formuler une demande claire à l’autre.
*La première a été abordée précédemment et les trois autres sont expliquées dans cette section.

26
Exprimer ses sentiments
« Parler juste et non juste parler »
Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :
 Prendre conscience du ou des sentiments vécus lors d’une situation.
 Verbaliser les sentiments vécus.

La difficulté de nommer son sentiment

Il est plus difficile qu’il ne le semble d’éviter le piège de l’interprétation. Par exemple, on pourrait penser
qu’exprimer qu’on se sent insulté par le travail « bâclé » d’un collègue est une expression d’un sentiment.
Ce n’est toutefois pas le cas; on transmet ici plutôt une impression. Que ressent-on véritablement?

Nommer le véritable sentiment ressenti


Pour nommer un sentiment, il sera souvent plus efficace d’utiliser la formulation « Je suis… » plutôt que
« Je me sens… ». Bien que les deux puissent être adéquates, « je suis » implique que cela ne peut pas
vraiment être remis en question ou réfuté par l’autre. Par exemple, si une personne vous dit: « Je suis
27
irrité(e)/découragé(e)/angoissé(e)/… », il y a plus de chance que vous lui tendiez l’oreille. Cette
formulation suscite généralement l’empathie et la bienveillance, car elle plus authentique et objective.
À l’inverse, imaginez que quelqu’un vous dise : « Je me sens ridiculisé(e)/manipulé(e)/ écarté(e)/...». La
réaction typique à cette affirmation serait de se défendre en précisant que notre intention n’était pas de
ridiculiser, manipuler ou écarter l’autre : « Tu m’as mal compris… ». Ainsi, la discussion déviera sur cette
justification et non sur le réel sentiment vécu par l’autre.
Pour parfaire votre vocabulaire efficacement, il serait judicieux de consulter la liste à l’annexe 2 (p. 59).
Nommer un sentiment, c’est se rendre vulnérable
Certaines personnes croient que, pour gagner le respect de l’autre, il faut dégager de l’assurance et
apparaître « fort(e) ». Dans cette optique, il peut paraître contre-intuitif d’exprimer ses sentiments. Au
contraire, plusieurs études montrent la pertinence d’exprimer ses émotions (Brown, 2012) pour entretenir
des relations interpersonnelles enrichissantes et significatives. L’expression de cette vulnérabilité, bien
qu’inconfortable au début, permet notamment de prendre acte personnellement des sentiments que l’on
vit, ce qui est bienveillant pour nous-même. C’est aussi bienveillant pour les autres, car cette ouverture
leur permet d’être au fait des sentiments vécus et d’avoir la possibilité d’y réagir plus adéquatement.

Pour aller plus loin…


ROSENBERG, Marshall B. Les mots sont des fenêtres (ou des murs), St-Julien-en-Genevois, Jouvence, 2013, 240 p.

BROWN, Brené. Le Pouvoir de la vulnérabilité : dépasser l'anxiété, la peur et la honte pour oser être soi, Paris, Éditions
Trédaniel, 2012, 319 p.

28
Exercices : Exprimer ses sentiments
Validation de compréhension
Pour chacun des énoncés ci-dessous, dites si le sentiment est clairement nommé, oui (O) ou non (N).
Énoncés O N
1. « Tu m’as demandé de prendre la parole devant le groupe. Je suis anxieux(se) à cette idée. »
2. « Il y a 26 pages à lire en devoir, je me sens surchargé(e). »
3. « Je ne comprends pas ce que tu veux dire dans les consignes par « illustre ta jeunesse ». Je suis en
Élève

train de perdre mon temps. »


4. « Je vois que j’ai une note plus basse que je l’aurais cru pour ce travail et je suis insatisfait(e). »
5. « Je croyais que je comprenais, mais ton explication vient de me mélanger et c’est très irritant. »
6. « Depuis le début du cours, je t’ai vu(e) gribouiller dans ton cahier et regarder par la fenêtre davantage
que je ne t’ai vu(e) me regarder. Je trouve ça dommage pour toi. »
Enseignant.e

7. « Marcel et Grégoire, vous avez discuté ensemble pendant la présentation de la séquence vidéo. Je sens
que je ne pourrai pas tolérer cela encore longtemps. »
8. « Je ne vous vois pas participer à la hauteur de mes attentes. Je me sens découragé(e). »
9. « J’aime que tu fasses des blagues en classe, mais j’aime moins ça lorsque tu me coupes la parole
pendant mes explications. Je me sens alors bousculé(e). »
10. « Je pourrais vous permettre de quitter le cours plus tôt, mais je suis mal à l’aise avec cette idée. »

Application
Reprenez chacun des exemples puis reformulez-le adéquatement.
1. Élève qui dit : « Il y a 26 pages à lire en devoir, je me sens surchargé(e). »

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2. Élève qui dit : « Je ne comprends pas ce que tu veux dire dans les consignes par « illustre ta jeunesse ». Je suis
en train de perdre mon temps. »

____________________________________________________________________________________
3. Élève qui dit : « Je croyais que je comprenais, mais ton explication vient de me mélanger et c’est très irritant. »

____________________________________________________________________________________
4. Professeur(e) qui dit : « Depuis le début du cours, je t’ai vu(e) gribouiller dans ton cahier et regarder par la fenêtre
davantage que je ne t’ai vu(e) me regarder. Je trouve ça dommage pour toi. »

____________________________________________________________________________________
5. Professeur(e) qui dit : « Marcel et Grégoire, vous avez discuté ensemble pendant la présentation de la séquence
vidéo. Je sens que je ne pourrai pas tolérer cela encore longtemps. »

____________________________________________________________________________________
6. Professeur(e) qui dit : « J’aime que tu fasses des blagues en classe, mais j’aime moins ça lorsque tu me coupes
la parole pendant mes explications. Je me sens alors bousculé(e). »

____________________________________________________________________________________

29
Réflexion
À quel point avez-vous le réflexe de nommer vos sentiments pour expliquer qu’une situation vous
dérange? Pourquoi?
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Défi
Pour la prochaine semaine, repérez les sentiments que vous vivez (positifs ou négatifs) lors d’interactions
avec les autres. Exprimez à l’autre ces sentiments et observez sa réaction.
En lien avec le défi proposé, voici un espace de réflexion.
Si vous n’avez pas réussi votre défi, quelles en sont les raisons, selon vous? Identifiez un ou deux obstacles
et dites comment vous pourriez les outrepasser.

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Si vous avez réussi votre défi, quels effets cela a-t-il eu sur la qualité de vos relations?

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Que retenez-vous de cette capsule?

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30
Exprimer ses besoins
« Parler juste et non juste parler »
Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :
 Reconnaître les besoins à l’origine de ses sentiments.
 Nommer explicitement les besoins à l’origine de ses sentiments .

De quel besoin parle-t-on?

Plusieurs besoins sont évidents et attirent naturellement la sympathie des autres. On viendra sans hésiter
en aide à une personne qui se noie ou qui s’étouffe, tout comme on pourrait offrir le gîte à des voisins
dont la maison vient de brûler. Par contre, on ne peut s’attendre à ce que les autres prennent
constamment les devants pour répondre à nos besoins; bien souvent, ils risquent de ne même pas les
percevoir.

Lorsque l’autre ne remarque pas mon besoin


Qu’arrive-t-il lorsqu’un de nos besoins n’est pas pris en considération par l’autre? Pour répondre à cette
question, demandez-vous ce que vous penseriez d’une personne qui vous regarderait calmement vous
étouffer. Comment réagissez-vous lorsque vous recevez une rétroaction négative ou encore lorsque
quelqu’un d’impatient vous dépasse volontairement dans une interminable file d’attente?
Nos réactions ne sont pas universelles, mais nos besoins le sont. Ainsi, il sera pertinent de prendre
conscience du fait que les insatisfactions découlent nécessairement de la perception d’un besoin inassouvi
et des attentes que l’on a dans un contexte donné. Dans des circonstances telles que celles décrites plus
haut, il sera facile de rejeter le blâme sur autrui pour justifier notre désarroi. Pour Rosenberg, « les
jugements, critiques, diagnostics et interprétations portant sur les autres sont autant d’expressions
détournées de nos besoins » (p. 62). Ceci étant dit, ce type de comportements est problématique pour
plusieurs raisons :
• il manque de bienveillance;
• il risque d’aliéner l’autre à notre cause;
• il ne permet pas d’assumer la responsabilité de ses sentiments.

On a le choix entre être heureux et avoir raison (Rosenberg)


Si l’on souhaite apaiser notre sentiment négatif, il faut d’abord accepter qu’il provient de notre propre
manière de percevoir la situation. Cela ne signifie pas que les autres ne peuvent pas avoir de torts, mais
plutôt qu’on interprète leurs paroles et leurs gestes en fonction de notre propre bagage personnel
31
(valeurs, culture, éducation, etc.). Ce qui est important pour nous ne le sera pas forcément pour les
personnes que l’on rencontre. Faire ce constat permet de relativiser ce qu’on comprend d’un évènement
et on évitera plus aisément d’attribuer des intentions à notre interlocuteur(trice). On peut argumenter et
faire valoir le caractère immoral des faits et gestes de nos interlocuteurs, mais il sera plus efficace pour
notre propre bien-être de simplement aider l’autre à satisfaire notre besoin. Voici une situation concrète
qui illustre cela.

Situation Explication du besoin lié au sentiment Exemples de réactions possibles


Julie est en colère Pour Julie, l’intégrité est une valeur centrale et Critique
contre Marcel parce que cela l’incite à juger négativement le « Franchement Marcel! Tu n’as pas honte!? C’était
lors d’une réunion comportement de Marcel. Sa colère vient mon idée ça! »
d’équipe, celui-ci a peut-être aussi de son besoin de
repris une idée qu’elle reconnaissance. « Marcel, ce que tu as fait est inacceptable, c’était
lui avait déjà partagée. mon idée et non la tienne! »
Toutefois, est-ce possible que Marcel n’ait
même pas réalisé l’affront qu’il vient de Expression du besoin
commettre? Et, qu’il l’ait fait consciemment ou « À la réunion de ce matin, tu as présenté les idées
non, est-ce que cela changera le besoin de que je t’avais partagées sans me nommer. Je suis
Julie? en colère, parce que j’ai passé du temps à y
réfléchir et j’ai besoin de recevoir le crédit pour
mon travail. »
Lorsqu’on formule une critique, l’autre se sent nécessairement attaqué et sa réaction peut être de la culpabilité ou le rejet de
cette critique. En revanche, lorsqu’on exprime le besoin à l’origine de notre sentiment, l’autre reçoit une clé pour nous
aider à le satisfaire.

Relier ce qu’on ressent à notre besoin


Nommer le besoin qui est à l’origine de notre sentiment est sans doute l’action qui augmentera le plus les
probabilités qu’il soit satisfait. Pour aider à cibler avec justesse le besoin entravé dans une situation, voici
un tableau qui reprend plusieurs besoins communs à tous les humains.

Catégories Besoins
Physiologiques Respirer, boire, manger, dormir, exprimer sa sexualité, se protéger
Autonomie Liberté de choix quant à ses façons de faire, ses valeurs, ses projets, ses rêves
Intégrité Authenticité, équité, estime de soi, recherche de sens
Interdépendance Acceptation, amour, appartenance communautaire, appréciation, chaleur humaine,
compréhension, confiance, contribution, délicatesse, tact, empathie, honnêteté, sincérité,
considération, proximité, respect, sécurité, soutien, paix, harmonie, solidarité
Jeu Amusement, humour, ressourcement, défoulement
Accomplissement Créativité, réalisation, apprentissage, performance, reconnaissance
Autres Beauté, inspiration, ordre, spiritualité, croissance intérieure
Adapté à partir de Rosenberg (2013)

Il est tout à fait légitime d’avoir une crainte d’être jugé en exprimant ses besoins. On pourra alors se
rappeler de la puissance d’exprimer notre vulnérabilité, voir la capsule « Exprimer ses sentiments » dans
l’établissement de relations interpersonnelles bienveillantes.

Pour aller plus loin…


Une liste complémentaire des sentiments et besoins humains se trouve en annexe 2 (p. 59).

ROSENBERG, Marshall B. Les mots sont des fenêtres (ou des murs), St-Julien-en-Genevois, Jouvence, 2013, 240 p.

32
Exercices : Exprimer ses besoins
Validation de compréhension
Complétez maintenant chacun des énoncés en remplaçant le symbole « […] » par un besoin qui vous
semble correspondre au contexte qui est décrit. Le premier énoncé est donné en exemple.
*Remarquez qu’il est souvent pertinent de préciser le « pourquoi » du besoin et qu’à ce stade-ci, vous
pouvez partager vos impressions derrière le sentiment qui est nommé. Il ne s’agit pas de se justifier à
l’autre, mais plutôt de lui fournir une piste plus claire pour être compris(e).

Énoncés Besoin en cause


1. « Tu m’as demandé de prendre la parole devant le groupe. Je suis anxieux(se) à cette
me sentir en
idée, parce que j’ai besoin de […] et je vois le regard des autres comme une menace
sécurité/confiance
à mon égo. »
2. « Il y a 26 pages à lire en devoir. Je suis découragé(e), parce que j’ai besoin de […] et j’ai
bien l’impression qu’il me sera difficile de faire autre chose ce weekend. »
3. « Je ne comprends pas ce que tu veux dire dans les consignes par « illustre ta jeunesse ».
Élève

Je suis exaspéré(e) parce que je sais que ce travail est central dans le cours et j’ai
besoin de […] »
4. « Je vois que j’ai une note plus basse que je l’aurais cru pour ce travail et je suis
insatisfait(e) parce que je ne vois pas d’explications et j’ai besoin de […]. »
5. « Je croyais que je comprenais, mais ton explication vient de me mélanger. Je suis irrité(e)
parce que ça fait un certain temps que je stagne et j’ai besoin de […]. »
6. « Depuis le début du cours, je t’ai vu(e) gribouiller dans ton cahier et regarder par la fenêtre
davantage que je ne t’ai vu(e) me regarder. Je suis agacé(e) parce que j’essaye de
rendre le cours intéressant et j’ai besoin de […]. »
7. « Marcel et Grégoire, vous avez discuté ensemble pendant la présentation de la séquence
vidéo. Je suis contrarié(e), parce que cette capsule est importante pour la suite du
Enseignant.e

cours et j’ai besoin de […] »


8. « Je ne vous vois pas participer à la hauteur de mes attentes. Je me sens découragé(e),
parce que j’ai besoin […] pour atteindre mes objectifs pédagogiques. »
9. « J’aime que tu fasses des blagues en classe, mais j’aime moins ça lorsque tu me coupes
la parole pendant mes explications. Je suis alors impatient(e), parce que cela interfère
avec ce que je dis et j’ai besoin de […] »
10. « Je pourrais vous permettre de quitter le cours plus tôt, mais je suis mal à l’aise avec
cette idée, parce que d’autres personnes souhaiteraient peut-être faire comme vous
et j’ai besoin de […] »

33
Réflexion
Repensez à une situation que vous avez vécue antérieurement où il vous aurait été bénéfique de nommer
vos besoins. Ce peut être une situation qui avait ou non de grandes implications, à vous de décider. Au
besoin, écrivez les grandes lignes de cet événement pour vous replonger dans le contexte.
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Quels sont vos défis en ce qui a trait à l’expression orale de vos besoins dans des situations où l’on doit
agir rapidement.
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Que retenez-vous de cette capsule?


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34
Formuler une demande
« Parler juste et non juste parler »

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


 Verbaliser une demande avec bienveillance.

Une demande n’est pas une exigence


Tout d’abord, il convient de clarifier la distinction entre « demande » et « exigence ». Lorsque l’on formule
une exigence, on ne donne pas de choix à l’autre, on lui réclame de se soumettre à notre volonté. Dans un
contexte de classe, comme dans d’autres sphères sociales, il existe des règles importantes au bon
fonctionnement et des exigences peuvent être appropriées. Par exemple, les agressions physiques ou
encore les propos haineux ne sont pas tolérés. Toutefois, la situation ne justifie généralement pas un
niveau si soutenu d’obligation. Ainsi, la demande a pour but de faire une proposition, conforme à nos
besoins, sans contraindre l’autre. Référer à la capsule « Exprimer ses besoins ». On formule une demande
lorsqu’un de nos besoins est entravé et qu’on croit que l’autre peut nous aider à le satisfaire. Toutefois,
imposer une action à l’autre n’est ni efficace, ni bienveillant. Par exemple :
« Prends rendez-vous avec moi après le cours. »

Cette formulation se veut une demande alors qu’elle est plutôt une exigence. En effet, on impose à l’élève
de prendre rendez-vous plutôt que de lui en faire la demande, ce qui serait plus bienveillant. Dans des cas
comme celui-ci, deux réactions peuvent survenir :

- la soumission : « D’accord, j’arrive tout de suite! »


ou
- la révolte (une agression) : « Pas question! Je n’ai pas le temps! »
Peu importe la manière de formuler la demande, on doit se demander si la personne a le loisir d’y répondre
favorablement. Il faut donc accepter que nos besoins entrent parfois en conflit avec ceux des autres et
que certaines demandes ne recevront pas une réponse nous convenant. Néanmoins, cela n’empêche pas
de poursuivre le dialogue et de trouver un compromis avec bienveillance.

Une demande est assumée


Il peut arriver d’être maladroit(e) et de ne pas réaliser que l’on fait des demandes, ou encore de ne pas
complètement les assumer. Ce sera le cas si on les camoufle sous forme d’affirmations ou de questions. À
la longue, constatez par vous-même le côté harassant de demandes que l’on reçoit et qui ne sont pas
assumées.

Demande
Cachée dans une affirmation « J’aime beaucoup quand les gens sont respectueux... »
Cachée dans une question « Pourquoi parles-tu en même temps que les autres? »

Assumée « J’aimerais que vous restiez silencieux lorsque d’autres personnes prennent la
parole. »

Une demande est claire et positive


Plus l’objectif est clair pour nous, plus il le sera pour l’autre. Une erreur fréquente consiste à tenir pour
acquis que l’autre interprète correctement ce que l’on veut après lui avoir nommé ce que l’on ne veut pas.
35
Par exemple, demander à un élève d’arrêter de parler n’assure pas qu’il comprendra que vous voulez qu’il
fasse les exercices. Si vous voulez qu’il fasse les exercices, demandez-lui clairement. Pour ce faire, il faut
dire ce que l’on souhaite en employant un vocabulaire d’action positif. Dans le même ordre d’idées, il faut
éviter une formulation abstraite ou ambigüe.

Demande
À partir de ce qu’on ne veut pas « Je ne veux pas que tu me poses de questions sur mon passé. »
Abstraite ou ambigüe « Je veux que tu respectes ma vie privée. »
Précise « Je préfère ne pas aborder ce sujet avec toi. »

Et après?
Il est intéressant de demander à l’autre de faire un retour sur sa compréhension de notre demande ou
même, parfois, sur ce qu’il ou elle ressent par rapport à notre demande. Le but d’une demande est de
signifier à l’autre une manière de répondre à nos besoins. Il est normal qu’à l’occasion, nos besoins entrent
en conflit avec ceux des autres. Il faut le voir comme le début d’un dialogue et non comme un échec de la
communication. Si le refus de l’autre vous fait hausser le ton ou argumenter, peut-être aviez-vous alors
plutôt une exigence et non une demande?

Pour aller plus loin…


ROSENBERG, Marshall B. Les mots sont des fenêtres (ou des murs), St-Julien-en-Genevois, Jouvence, 2013,
240 p.

Une demande claire?

36
Exercices : Formuler une demande
Validation de compréhension
Pour chacun des énoncés exprimant un besoin, dites si la demande qui suit (en gras) respecte selon vous
les critères qui caractérisent une bonne demande (✓) :
✓ elle est bien une véritable demande et non une exigence;
✓ elle est assumée;
✓ elle est claire et précise.

Énoncés avec demande Critères ✓


1. « Tu m’as demandé de prendre la parole devant le groupe. Je suis anxieux(se) à Véritable demande
cette idée, parce que j’ai besoin de me sentir en confiance et je vois le regard des
autres comme une menace à mon égo. Je ne veux plus parler devant le Assumée
groupe. » Claire
2. « Il y a 26 pages à lire en devoir. Je suis découragé(e), parce que j’ai besoin de Véritable demande
penser à autre chose que mes études et j’ai bien l’impression qu’il me sera difficile
de faire autre chose ce weekend. Serais-tu d’accord pour m’indiquer quels Assumée
passages sont les plus importants pour le prochain cours? » Claire
3. « Je ne comprends pas ce que tu veux dire dans les consignes par « illustre ta Véritable demande
jeunesse ». Je suis exaspéré(e) parce que je sais que ce travail est central dans le
Élève

cours et j’ai besoin de réussir ce cours. Pourrais-tu me donner un exemple Assumée


concret de ce que je pourrais faire? » Claire
4. « Je vois que j’ai une note plus basse que je l’aurais cru pour ce travail et je suis Véritable demande
insatisfait(e) parce que je ne vois pas d’explications et j’ai besoin de comprendre
mes erreurs. La prochaine fois, penses-tu avoir le temps de mettre plus de Assumée
commentaires? » Claire
5. « Je croyais que je comprenais la matière, mais ton explication vient de me Véritable demande
mélanger. Je suis irrité(e) parce que ça fait un certain temps que je stagne et j’ai
besoin de sentir que j’avance dans ce qui est demandé. Est-ce que ce serait Assumée
possible de ne plus te contredire? » Claire
6. « Depuis le début du cours, je t’ai vu(e) gribouiller dans ton cahier et regarder par la Véritable demande
fenêtre davantage que je ne t’ai vu(e) me regarder. Je suis agacé(e) parce que
j’essaie de rendre le cours intéressant et j’ai besoin de sentir de la considération de Assumée
ta part. Pourrais-tu me dire si quelque chose te dérange avant que débute la
Claire
deuxième heure de cours? »
7. « Marcel et Grégoire, vous avez discuté ensemble pendant la présentation de la Véritable demande
séquence vidéo. Je suis contrarié(e), parce que cette capsule est importante pour
la suite du cours et j’ai besoin de sentir du respect pour ce qui est présenté en Assumée
classe. Ne reproduisez plus jamais ce comportement s’il vous plaît. » Claire
8. « Je ne vous vois pas participer à la hauteur de mes attentes. Je me sens Véritable demande
Professeur(e)

découragé(e), parce que j’ai besoin de votre collaboration pour atteindre mes
objectifs pédagogiques. Ne pensez-vous pas qu’il vous serait profitable de Assumée
vous investir davantage? » Claire
9. « J’aime que tu fasses des blagues en classe, mais j’aime moins ça lorsque tu me Véritable demande
coupes la parole pendant mes explications. Je suis alors impatient(e), parce que
cela interfère avec ce que je dis et j’ai besoin de maintenir un certain rythme dans Assumée
le cours. Serais-tu d’accord pour attendre que je te donne la parole avant de
Claire
faire une blague? »
10. Luc et Sylvie demandent à leur professeur(e) de quitter le cours plus tôt pour Véritable demande
terminer leur travail d’équipe. Le (la) professeur(e) répond : « Je pourrais vous
permettre de quitter le cours plus tôt, mais je suis mal à l’aise avec cette idée, Assumée
parce que d’autres personnes souhaiteraient peut-être faire comme vous et j’ai
besoin d’être équitable envers tout le monde. J’aimerais que vous trouviez une Claire
autre solution à votre problème. » 37
Application
Dès qu’on s’aperçoit qu’un critère est non respecté, c’est qu’il faudrait formuler autrement. Reprenez
chacun des exemples de l’exercice 1 qui ne correspondait pas à une demande bien formulée, puis proposez
votre propre formulation en respectant chacun des trois critères.
1. Élève qui dit : « Je ne veux plus parler devant le groupe »

____________________________________________________________________________________
2. Élève qui dit : « La prochaine fois, penses-tu avoir le temps de mettre plus de commentaires? »

____________________________________________________________________________________
3. Élève qui dit : « Est-ce que ce serait possible de ne plus te contredire? »

____________________________________________________________________________________
4. Professeur(e) qui dit : « Ne reproduisez plus jamais ce comportement s’il-vous-plaît. »

____________________________________________________________________________________
5. Professeur(e) qui dit : « Ne pensez-vous pas qu’il vous serait profitable de vous investir davantage? »

____________________________________________________________________________________

Réflexion
1. Tentez de retrouver au moins une demande récente que vous avez pu faire à des proches et rapportez-la au
meilleur de vos souvenirs. Cette demande peut avoir été faites à des parents, enfants, amis, collègues, etc.

____________________________________________________________________________________
2. Maintenant, analysez-la et demandez-vous…
a) Si elle répond naturellement aux trois critères mentionnés (véritable, assumée et claire).
b) Si votre demande ne respectait pas un ou des critères reformulez-la.

____________________________________________________________________________________
3. Réfléchissez à votre façon de formuler des demandes dans votre quotidien.
a) Quels sont vos défis en lien avec les trois critères mentionnés (véritable, assumée et claire)?
b) Comment expliquez- vous ces défis? Est-ce en raison du type de personne à qui vous faites la demande
(par exemple : « J’ai plus tendance à exiger auprès de cette personne plutôt qu’auprès d’une autre »), en
fonction du contexte de la discussion, etc.?

____________________________________________________________________________________
4. Quels sont les contextes où vous croyez légitime d’utiliser des exigences plutôt que des demandes? Dressez une
liste et confrontez votre opinion à celle d’une autre personne qui a pris connaissance de cette capsule.

____________________________________________________________________________________
5. Que retenez-vous de cette capsule?

_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________
38
NIVEAU 3 : Communiquer en situations complexes

39
Communiquer en situations complexes
Dans les capsules précédentes, vous avez appris des stratégies de base en communication bienveillante et
vous avez été sensibilisé(e) à la Communication NonViolente (CNV). Cependant, certaines situations
spécifiques nécessitent une approche particulière. Pensez à un moment où vous avez dû recadrer une
personne sur son comportement ou encore quand il vous a fallu négocier quelque chose d’important pour
vous (ex. : salaire, vacances, etc.). Il est aussi possible que vous ayez été confronté(e) à de la résistance
lorsque vous avez proposé une nouvelle idée.

Ces contextes où il est nécessaire de s’affirmer, mais où l’enjeu est de taille (ex. : conditions de travail,
conflit d’équipe, menace à l’égo, etc.), créent souvent de l’inconfort. Puisqu’ils sont délicats et que leur
incidence est grande, il est primordial d’agir avec douceur et fermeté, tout en n’omettant pas ce qui est
important pour nous. Il faut donc rester bienveillant envers l’autre autant qu’envers nous.

Les pages qui suivent présentent des notions théoriques, des trucs pratiques et des outils de planification
pour entreprendre de telles interventions. En appliquant ces principes et stratégies, il vous sera possible
de diminuer l’inconfort vécu tout en envoyant un message clair, précis, qui vous fera gagner en efficacité.

40
Entamer une conversation courageuse avec bienveillance
« Parler juste et non juste parler »
Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :
 Comprendre la pertinence d’entamer une conversation courageuse.
 Intégrer et mettre en application les principes d’une conversation courageuse.

Quand confronter demande une plus grande dose de courage


L’affirmation de soi implique de confronter l’autre lorsque quelque chose nous dérange. Il arrive que, pour
certaines situations, la charge émotive soit très lourde ou que les conséquences possibles à la discussion
soient très menaçantes (ex. : perte du lien émotif, agressivité, détresse de l’interlocuteur(trice)). Les sujets
abordés sont si importants que la complexité de la situation est décuplée. La conversation courageuse
implique de soulever les problèmes qu’on voit directement et d’en gérer les conséquences. On parvient
alors à dépasser un inconfort certain pour soi et/ou pour l’autre pour aborder un problème.

Pourquoi oser en parler?


Quand on évite une discussion par peur de représailles, on manque bienveillance envers nous-même.
L’autre pourrait même penser qu’on est d’accord avec ce qui se passe d’où le fameux adage « Qui ne dit
mot consent »! Aussi, cela pourrait être considéré comme un manque de bienveillance pour
l’interlocuteur(trice). En effet, cette personne pourrait bénéficier d’un commentaire constructif.
Par respect, pour soi et pour l’autre
En abordant un sujet difficile avec l’autre, on lui démontre de la considération. En effet, on lui signifie
qu’on a à cœur notre relation pour oser aborder un sujet inconfortable.
Par souci d’efficacité!
Les non-dits sont souvent à l’origine de nombreux conflits. En abordant le sujet problématique avant que
la situation ne dégénère, on évite la gestion d’un conflit probablement encore plus inconfortable.
Pour confronter le problème « à la source »!
Entamer une conversation courageuse est certes désagréable, mais cela permet de clarifier les situations
problématiques sans intermédiaire et en tout respect.

D’abord, établir notre but


La première étape pour une conversation courage est d’établir notre intention. Quelle est la visée de notre
intervention? Le tableau ci-dessous donne des exemples de buts qu’on pourrait chercher à atteindre à
l’aide d’une conversation courageuse. Bien entendu, d’autres situations sont possibles.
Résoudre un problème
Vous vivez une situation conflictuelle ou un désaccord avec quelqu’un et souhaitez qu’il se résorbe.
Réorienter une action
Vous êtes témoin ou informé(e) d’une action qui n’est pas conforme à vos valeurs, à un plan d’action ou à une procédure établie
et vous souhaitez rectifier la situation.
Établir la confiance
Vous entreprenez une nouvelle relation ou souhaitez rétablir la confiance qui s’est perdue.
Découvrir des possibilités ou planifier des changements
Face à un problème, vous désirez envisager de nouvelles avenues de résolution alors que votre groupe vous semble très rigide.
Récapituler
Vous avez déjà eu plusieurs discussions avec la même personne et souhaitez faire des constats difficiles.
Motiver
Vous réalisez qu’une petite dose de motivation pourrait aider la personne à contribuer à la résolution du problème. Pour atteindre
ce but, vos encouragements doivent absolument être sincères alors qu’il vous est difficile d’exprimer vos émotions.
41
*Si vous constatez que vous avez plusieurs buts, il serait préférable de n’en cibler qu’un seul à la fois pour
éviter la confusion.
**Attention d’être honnête envers soi-même ! Veut-on changer la personne? Décider à sa place? Si tel est
le cas, il est très probable qu’on manque de bienveillance au moment d’entamer la conversation.***

Comment s’y prendre : les grandes étapes


Avant : rendre l’inconfort sécuritaire
Pour que tout le monde se sente bien, la discussion doit se dérouler dans un environnement calme et isolé
des distractions. On doit vérifier notre disponibilité (physique et psychologique) et celle de l’autre.
Entamée dans un contexte d’indisponibilité, cette discussion pourrait rapidement se transformer en conflit
(voir le préambule). Le contexte de cette discussion devrait permettre d’établir un climat de confiance et
de démontrer clairement à l’autre notre ouverture à son point de vue.
Il est bienveillant de proposer une façon de fonctionner qui permet d’alterner la prise de parole sans
interruption. Par exemple :
« J’ai quelque chose qui me tient à cœur et que je veux aborder avec toi. J’aimerais te présenter mon point
de vue au complet et après je te laisserai toute la place pour y réagir. ».
Il est primordial que les deux parties s’entendent sur la proposition, quitte à faire un compromis.
Pendant : quoi dire ?
Nommez directement, sans détour, ce qui vous préoccupe et qui, selon vous, pose problème. Cette façon
de faire vous permettra d’éviter de créer du stress inutile pour vous et votre interlocuteur(trice). Le
tableau ci-dessous présente un contre-exemple et un exemple de conversation courageuse.
SITUATION
Un(e) professeur(e) veut valider son impression qu’une élève est venue en classe en état de consommation. Il (elle) souhaite
en discuter avec l’élève.
Contre-exemple Exemple
L’enseignant écrit un message à l’élève : Bonjour Sophie, as-tu 2 Le (la) professeur(e) écrit un message à l’élève : Bonjour
minutes, dans les prochains jours, j’ai quelque chose à te Sophie, j’aimerais prendre rendez-vous avec toi aujourd’hui
dire! Merci! ou demain, pour discuter de ton comportement lors du
cours de ce matin. J’ai des préoccupations à te partager.
Lors de la rencontre : Merci !
Professeur(e) :« Sophie, que penses-tu de ton comportement en
classe dans les derniers jours? » Lors de la rencontre :
Sophie : « Je sais que j’aurais pu faire mieux » Professeur(e) : « En classe, j’ai constaté que tu avais les
Professeur(e) : « Quel est le problème, selon toi ?... » yeux rouges et que tes mains tremblaient. J’interprète ces
indices comme un signal de consommation de drogue.
Cette situation m’inquiète parce que j’ai à cœur ta réussite
et ta sécurité. Es-tu à l’aise d’en discuter avec moi ou un(e)
intervenant(e) du Cégep ?»
Dans le contre-exemple, le (la) professeur(e) aborde par MIO, de façon très décontractée l’éventualité d’une rencontre, ne
laissant pas paraitre l’ampleur de ses préoccupations. De plus, lors de la rencontre, comme il (elle) tourne autour du pot, il (elle)
laisse toute la place à l’élève pour se faire des scénarios. Cela peut contribuer à augmenter la confusion ou le stress chez
Sophie qui n’apprend pas rapidement le sujet de la discussion.
Dans l’exemple le (la) professeur(e) présente clairement le fait qu’il (elle) a des préoccupations pour Sophie. Certes, Sophie
sera probablement inquiète à la lecture de ce message. Cependant, elle peut se préparer à la rencontre en réfléchissant à son
comportement durant le cours. C’est plus bienveillant, car elle sait de quoi il sera question et connait le fait que son (sa)
professeur(e) veut lui partager ses préoccupations.
*Il est à noter que les principes de la CNV s’appliquent ici : éviter les jugements, s’en tenir aux faits, faire
part de nos émotions à l’autre (voir l’introduction à la CNV). Tout au long de la discussion, il sera
bienveillant de manifester du soutien à l’autre.

42
Tout au long de la conversation, on doit rester ouvert à l’autre et concentré(e) sur l’ici et maintenant. Pour
manifester de l’ouverture, on peut utiliser des questions ouvertes (voir capsule « Quand et comment
écouter ») et courtes. Il faut éviter de dicter à l’autre ce qu’il (elle) devrait faire ou penser. De plus, comme
la situation est probablement inconfortable, il est important de respecter son propre rythme et celui de
l’autre. Les silences peuvent lui permettre de réfléchir. Il faudra prendre le temps de gérer son propre
inconfort aussi bien que celui de l’autre.
À la fin : comment conclure?
On doit conclure en reformulant les grands constats de la discussion. Il est possible que tout ne soit pas
réglé en une rencontre, les sujets les plus difficiles prennent souvent du temps. Au besoin, on doit prendre
des ententes pour poursuivre le processus.
Ingrédients de base = respect + confiance

« Oui mais l’autre ne veut pas m’écouter! »


Si la personne est sur la défensive et ne veut pas aborder le sujet ou prendre le temps qu’il faut pour en
discuter, revoyez les faits qui vous inquiètent, questionnez-vous sur vos propres attitudes et intentions,
communiquez-lui les constats de votre réflexion de façon objective et claire.

Pour aller plus loin…


COLLINS, Maureen. Straight talk, conversation at work that get results, Cape Town, Penguin House South Africa,
2010, 127 p.

INSTITUT DE LEADERSHIP EN ÉDUCATION. Évaluation du rendement des directions d’école et des directions adjointes :
conversations courageuses, Imprimeur de la reine pour l’Ontario, 2010, 4 p.

REYNOLDS, Marcia. The discomfort zone, San Francisco, Berret-Koehler Publishers, 2014, 176 p.

TOURNAND, Juliette. La bienveillance en action, Paris, Interéditions, 2018, 344 p.

Trouver son courage…

43
Exercices : Conversations courageuses
Application et réflexion
Entamer une conversation courageuse demande le respect de trois principes généraux :
✓ contexte sécuritaire;
✓ aller droit au but;
✓ démontrer de l’ouverture.

À quel point est-ce facile ou difficile pour vous d’appliquer ces principes à vos relations interpersonnelles?
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Proposez une ou des hypothèses explicatives de vos constats.
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Réflexion
Que retenez-vous de cette capsule?
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44
Utilisez cette grille pour planifier une conversation courageuse.
a) Déterminez le contexte et le sujet de la conversation courageuse à tenir.

Sujet
Interlocuteur
(trice)
Moment
propice

b) Déterminez le but parmi les suivants :

But (✓)
Résoudre un problème
Vous vivez une situation conflictuelle ou un désaccord avec quelqu’un et souhaitez qu’il se résorbe.
Réorienter une action
Vous êtes témoin ou informé(e) d’une action qui n’est pas conforme à vos valeurs, à un plan d’action ou une procédure
établie et vous souhaitez rectifier la situation.
Établir la confiance
Vous entreprenez une nouvelle relation ou souhaitez rétablir la confiance qui s’est perdue.
Découvrir des possibilités ou planifier des changements
Face à un problème, vous désirez envisager de nouvelles avenues de résolution alors que votre groupe vous semble
très rigide.
Récapituler
Vous avez déjà eu plusieurs discussions avec la même personne et souhaitez faire des constats difficiles.
Motiver
Vous réalisez qu’une petite dose de motivation pourrait aider la personne à contribuer à la résolution du problème. Pour
atteindre ce but, vos encouragements doivent absolument être sincères alors qu’il vous est difficile d’exprimer vos
émotions.

c) Plan de ma discussion :

Choisissez le bon
moment et le bon
contexte de discussion
Nommez l’intention de
la rencontre à votre
interlocuteur(trice)
Proposez une façon de
fonctionner

Nommez le problème

Concluez (en
rétrospective)

En rétrospective de votre discussion, identifiez les points forts et les défis qu’il vous reste à travailler.
Réfléchissez aux mots utilisés, au ton employé ou à tout autre aspect qui, selon-vous a influencé
(positivement ou négativement) le cours de la discussion.
Forces Défis

45
Négocier avec l’autre
« Parler juste et non juste parler »
Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :
 Intégrer et mettre en application les principes d’une négociation raisonnée.

Nous le faisons toutes et tous!


Pour plusieurs personnes, la simple idée de devoir négocier est rebutante. Toutefois, comme l’affirment
les auteurs de la technique de la négociation raisonnée (Fisher et Ury, 1981), qu’on aime l’idée ou non, on
négocie constamment. On ne le fait pas nécessairement pour gagner contre l’autre. On le fait pour
répondre à des besoins légitimes comme l’obtention de services, d’accommodements, de biens, etc.
Supposons la situation suivante :
Un groupe d’employé(e)s faisant la promotion du développement durable propose d’intégrer des poubelles à compost
dans toutes les pièces communes du bâtiment principal d’une entreprise. La propriétaire de l’entreprise refuse
catégoriquement en avançant que cela demanderait trop de gestion, que les coûts d’installation et d’entretien seraient
trop élevés et que les odeurs pourraient indisposer. Devant ce refus, le groupe d’employé(e)s décide d’entamer une
négociation pour que le projet puisse répondre aux attentes mutuelles.

Tout d’abord, séparer les gens du problème


Il sera constructif de considérer l’autre comme un partenaire en vue de régler un problème et de ne pas
l’accuser de la situation. Dans l’exemple décrit plus haut, le problème de la propriétaire est l’ampleur des
implications financières et sanitaires et non les membres du comité. Pour les membres du comité, le
problème n’est pas la propriétaire, mais l’absence d’endroits pour déposer les déchets organiques. Pour
une meilleure compréhension de ce qui importe pour l’un et l’autre et une recherche efficace de solutions,
il conviendra que chacun exprime ses perceptions et ses sentiments.
Garder le point de mire sur les intérêts et non sur les positions
Pour résoudre le problème à l’aide de la négociation raisonnée, il convient de réconcilier les intérêts de
chacun, c’est-à-dire ce qui leur importe dans la situation. Au fond, qu’est-ce qui explique la position (ce
que demande chacune des parties)? Quels sont les besoins, les peurs, les souhaits qui la motivent? Il faut
savoir écouter l’autre et reconnaître que ses intérêts sont légitimes. En revenant à l’exemple, les intérêts
de la propriétaire sont probablement de garder un contrôle des dépenses et de maintenir l’harmonie au
sein de l’équipe, prévoyant que certains pourraient critiquer l’apparition de poubelles à compost. Pour le
comité d’employé(e)s, il s’agit probablement d’être en concordance avec leurs valeurs et de susciter un
changement dans les habitudes de leurs collègues pour les rendre plus écologiques.
Inventer des options pour un gain mutuel
Une négociation n’est pas forcément un jeu à somme nulle impliquant un(e) gagnant(e) et un(e)
perdant(e). Il faut user de créativité pour énumérer une foule de solutions qui ne seront évaluées que par
la suite. Chaque partie peut faire cela avant une rencontre, mais il peut être intéressant de le faire
ensemble lorsque le contexte y est propice.
Se baser sur des critères objectifs
Enfin, il faut se demander sur la base de quels critères il serait raisonnable d’évaluer les différentes
propositions. Il est suggéré que ces derniers soient guidés par des principes communément admis tels que
l’équité, l’efficacité ou la science.

46
Pas à tout prix…
Il faut toutefois se montrer réaliste et considérer que l’entente n’est pas toujours possible. Ainsi, avant
même d’entamer une démarche de négociation, il est fortement suggéré d’avoir un plan B en tête.
Connaître les autres options permettra plus de sérénité. Parfois, rechercher une entente à tout prix donne
un résultat moins profitable que si nous avions fait le choix d’une autre solution. D’ailleurs, si aucune
proposition ne semble satisfaisante pour les deux parties, rien n’empêche de maintenir le statu quo.
Il sera également bienveillant envers tout le monde de considérer l’efficacité du processus et de passer
sur la question un temps proportionnel à l’ampleur du problème soulevé. De plus, le processus devrait
améliorer ou du moins ne pas détériorer la relation entre les individus. Cela implique souvent de chercher
à ce que tout le monde puisse « sauver la face ».
Exemple de négociation raisonnée en lien avec la situation décrite plus haut

Propriétaire Employés

Positions : Placer des


demandes Refus poublelles à
initiales catégorique composte dans tous
Poubelles à
les lieux communs
compost

Travailler pour une


Contrôle sur les dépenses entreprise en concordance
Intérêts et maintien de l'harmonie avec leurs valeurs et
susciter un changement
chez leurs collègues

Pour aller plus loin…


FISHER, Roger, et URY, William L. Getting to YES, Negotiating agreement without giving in, New York, Penguin Books,
1981, 200 p.

On négocie toujours…

47
Exercices : Négocier avec l’autre
Application
Dans la capsule, il est question d’une situation opposant un groupe d’employés avec leur patronne. Le
tableau ci-dessous reprend les positions initiales ainsi que les intérêts des deux parties.
Propriétaire Employés
Refus catégorique de changer la situation. Placer des poubelles à compost dans tous les lieux
Position initiale
communs.
• Contrôle sur les dépenses • Travailler pour une entreprise en
• Harmonie au sein de l’équipe concordance avec leurs valeurs
Intérêts • Susciter un changement de comportement
chez leurs collègues.

a) Trouvez des solutions qui pourraient être envisagées selon vous.

____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
b) Sur la base de quels critères objectifs devriez-vous évaluer les différentes solutions?

____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________

c) Sélectionner la solution que vous considérez la meilleure et justifiez en quoi elle répond aux intérêts
mutuels (de l’autre et de vous-même).

____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________

Réflexion
1. Prenez conscience de la présence de la négociation dans votre quotidien.
a) Quelles situations vous ont mené à devoir négocier récemment (même si le tout s’est réglé
rapidement)?

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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
b) Êtes-vous parvenu à trouver la satisfaction de chacun et chacune en général? Qu’est-ce qui
explique votre réponse?

____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________

48
2. Reprenez l’une des situations énumérées à la question précédente et…
a) Indiquez la position de chacun ainsi que les intérêts que vous aviez et ceux que vous avez perçus
chez l’autre.

Moi L’autre
Position initiale

Intérêts

b) Indiquez quelle solution vous aviez alors envisagée.

_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________
c) Si elle ne répondait pas déjà aux intérêts mutuels, trouvez plusieurs stratégies qui auraient été
plus efficaces selon vous.
*Notez que le défi ici est de faire preuve de créativité et de trouver plusieurs solutions. Sur la
base de la théorie de la négociation raisonnée, s’arrêter de chercher après quelques solutions
potentielles est une erreur fréquente, car on se prive peut-être d’une meilleure option.

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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
d) Sur la base de quels critères objectifs devriez-vous évaluer les différentes solutions ?

____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
e) Sélectionner la solution que vous considérez la meilleure en justifiant en quoi elle répond aux
intérêts mutuels (de l’autre et de vous-même).

_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________
3. Que retenez-vous de cette capsule?
_________________________________________________________________
_________________________________________________________________

49
La résistance aux changements
Parler juste et non juste parler !

Cette capsule permettra au lecteur et à la lectrice de :


- Réfléchir à sa propre résistance aux changements.
- Intégrer et mettre en application des stratégies pour diminuer la résistance aux changements.

La résistance, mais encore…


Vous arrive-t-il de vous heurter à de la résistance des autres lorsque vous proposez des changements ?
Que ressentez-vous à ce moment ? Comment réagissez-vous ? Il serait simpliste d’attribuer la résistance
uniquement à l’individu ou au groupe qui refuse de procéder au changement, les causes de la résistance
aux changements sont multiples, et peuvent être classées en six catégories (CÉTO, 2004) :

• individuelles (qui proviennent de l’individu lui-même);


• collectives ou culturelles (un groupe présente des intérêts ou valeurs particuliers);
• politiques (un groupe ou des personnes présentent des idéaux politiques en opposition aux
changements proposés);
• liées à la mise en œuvre du changement (des embûches techniques dans la mise en place du
changement);
• liées au système organisationnel (des facteurs organisationnels comme le système hiérarchique
freinent le changement);
• liées à la nature du changement (des aspects spécifiques au changement proposés sont cause de
discorde).

Plusieurs réactions possibles


Voici un continuum des comportements de soutien/opposition à une initiative de changement (Collerette,
Schneider et Lauzier, 2012).

Pôle du soutien au Zone d’ambivalence Pôle de l’opposition au


changement changement

Enthousiasme Hésitation Résignation Refus

Partisans actifs Partisans réservés Opposants réservés Opposants actifs

Tel que présenté dans ce continuum, les personnes peu enclines à mettre en place un changement
peuvent être hésitantes, s’y résigner ou s’y opposer vigoureusement. L’opposition peut donc se faire de
façon passive (lenteur à réagir, déni, indifférence, etc.) ou active (désobéissance flagrante, critiques,
plaintes, etc.). Qu’elles soient actives ou passives, elles créent un climat de tension et sont souvent
nuisibles aux relations interpersonnelles.

50
Dépasser la résistance
Comment faire si on a l’impression qu’une personne ou un groupe refuse systématiquement ce qui est
proposé? Pour plus de bienveillance, au cours de la discussion, …
- Allez à la source de la résistance. Les motifs évoqués sont souvent légitimes. Pour ce faire, l’écoute et
l’empathie sont primordiales (voir la capsule « Quand et comment écouter »).
- Expliquez les motifs du changement proposé.
- Offrez de la formation et l’information permettant aux personnes de mieux comprendre les motifs du
changement. Le tout est de permettre aux individus de comprendre en quoi le changement leur sera
plus bénéfique que le statu quo.
- Impliquer l’autre dans les changements proposés (si c’est possible) (voir la capsule « Négocier avec
l’autre »).

*** Attention de prioriser la collaboration! Les demandes qui prennent la forme d’exigences, en plus de
manquer de bienveillance de façon flagrante, risquent d’avoir l’effet inverse de celui désiré, soit de créer
encore plus de résistance (voir la capsule « Formuler une demande »).

Pour aller plus loin…

CENTRE D’ÉTUDES EN TRANSFORMATION DES ORGANISATIONS (HEC Montréal). La résistance au changement :


synthèse et critique des écrits, Cahier no 4-10, 2004, 17 p.

COLLERETTE, Pierre, SCHNEIDER, Robert, et LAUZIER, Martin. Le pilotage du changement, Québec, Presses de
l’université du Québec, 2012, 293 p.

SOPARNO, Richard. Les effets des stratégies de changement organisationnel sur la résistance des individus,
Recherches en Sciences de Gestion-Management Sciences-Ciencias de Gestión no 97, 2013, p. 23-43.

Réfractaire aux changements…

51
Exercices : La résistance aux changements

Réflexion
Pensez à un changement auquel vous vous êtes initialement opposé(e). Décrivez-le brièvement.
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Identifiez votre place dans le continuum en fonction de votre réaction initiale à ce changement (cochez
dans le tableau ci-dessous).
Partisan actif Partisan réservé Opposant réservé Opposant actif

Selon vous, qu’est-ce qui a créé cette résistance de votre part? Cochez le ou les motif(s) qui vous
apparaissent le(s) plus lié(s) à votre situation.
Motifs Cochez (✓)
Les motifs évoqués vous paraissaient illégitimes.
Vous ne vous êtes pas senti écouté(e) ou compris(e) dans vos préoccupations
Vous manquiez d’information ou de formation face au changement proposé
Vous avez eu l’impression que le changement vous était imposé
Autre :

Comment la situation s’est-elle conclue? Avez-vous adhéré au changement? Si votre niveau d’adhésion a
évolué, comment l’expliquez-vous?
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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Que retenez-vous de cette capsule?

_____________________________________________________________________________
_____________________________________________________________________________

52
Utilisez cette grille pour planifier un changement que vous voulez proposer.

Quel est le changement? Décrivez-le en termes objectifs.


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____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
Quels sont les motifs de ce changement? Décrivez-les en termes objectifs.
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____________________________________________________________________________________

Moyens envisagés réalistes et pertinents pour prévenir la résistance


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____________________________________________________________________________________
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53
Conclusion
Sans doute avez-vous constaté qu’il est plus difficile qu’il n’y parait de parler juste et non de juste parler.
Sans être magiques, les approches, stratégies et outils présentés constituent un pas dans la bonne
direction. Néanmoins, il faudra une bonne dose d’introspection et beaucoup de pratique afin de les
maitriser. À vous maintenant de placer la bienveillance au cœur de vos interactions quotidiennes!

Bonne communication!

Geneviève et Jean-François

54
Médiagraphie
ADLER, R. B. et PROCTOR II, R. F., Communication et interactions, Montréal, Modulo, 2013, 408 p.
ASSOCIATION SUISSE DES FORMATEURS EN CNV, « Le processus de la CNV », Communication NonViolente
en Suisse Romande, https://www.cnvsuisse.ch/ressources/documentation/ (page consultée le 24 janvier
2020).
BROWN, Brené, Le Pouvoir de la vulnérabilité : dépasser l'anxiété, la peur et la honte pour oser être soi,
Paris, Éditions Trédaniel, 2012, 319 p.
CENTRE D’ÉTUDES EN TRANSFORMATION DES ORGANISATIONS (HEC Montréal), La résistance au
changement : synthèse et critique des écrits, Cahier no 4-10, 2004, 17 p.
COLLERETTE, Pierre, SCHNEIDER, Robert, et LAUZIER, Martin, Le pilotage du changement, Québec, Presses
de l’université du Québec, 2012, 293 p.
COLLINS, Maureen, Straight talk, conversation at work that get resuslts, Cape Town, Penguin House South
Africa, 2010, 127 p.
DEVITO, Joseph A, CHASSÉ, Gilles et Vezeau, Carole, La communication interpersonnelle : Maude, Olivier,
Adam et les autres, ERPI, Montréal, 2019, 290 p.
FISHER, Roger, et URY, William L., Getting to YES, Negociating agreement whitout givin in, New York,
Penguin Books,1981, 200 p.
GAMBLE, Teri Kwal et GAMBLE, Michael, Communiquer et interagir, Chenelière éducation, Montréal, 2016,
322p.
GORDON, Thomas, Relations efficaces, Montréal, Le Jour, 2002, 129 p.
GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, L’adulte comme modèle de bienveillance à l’école, 2019, 4 p.,
http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/education/adaptation-scolaire-
services-comp/Bienveillance-personnel-scolaire-fr.pdf (page consultée le 28 mars 2020).
INSTITUT DE LEADERSHIP EN ÉDUCATION, Évaluation du rendement des directions d’école et des directions
adjointes : conversations courageuses, Imprimeur de la reine pour l’Ontario, 2010, 4 p.
McCullough, Michael E., Kilpatrick, Shelley D., Emmons, Robert A. et Larson, David B., « Is gratitude a moral
Affect? », Psychological Bulletin, vol.27, no.2 (2001), p.249-266.2001
REYNOLDS, Marcia, The discomfort zone, San Francisco, Berret-Koehler Publishers, 2014, 176 p.
ROSENBERG, Marshall B., Les mots sont des fenêtres (ou des murs), St-Julien-en-Genevois, Jouvence,
2013, 240 p.
SHANKLAND, Rébecca, et Christophe ANDRÉ, « Gratitude et bien-être social : mécanismes explicatifs des
effets de la gratitude sur le bien-être individuel et collectif », Revue québécoise de psychologie, vol. 38, no.
2 (2017), p. 43–64.
SOPARNO, Richard, Les effets des stratégies de changement organisationnel sur la résistance des individus,
Recherches en Sciences de Gestion-Management Sciences-Ciencias de Gestión no 97, 2013, p. 23-43.
TOURNAND, Juliette, La bienveillance en action, Paris, Interéditions, 2018, 344 p.

55
Annexe 1 :

L’écoute active

56
L’écoute active
Il peut être difficile d’avoir précisément en tête des exemples de comportements verbaux qui sont à
adopter ou à éviter lorsque l’on souhaite faire de l’écoute active. Comme c’est le cas pour beaucoup de
choses, c’est avant tout en pratiquant que l’on devient plus efficace.
Afin de mieux visualiser comment s’opère l’écoute active, mais aussi pour en saisir la portée, voici deux
versions de la même situation entre deux étudiants. Dans la première, que l’on appellera « typique », Beth
offrira une occasion à Serge de s’exprimer, sans utiliser de technique particulière. Lors de la seconde
variante, Beth utilisera des techniques d’écoute active.

Mise en contexte : Serge semble un peu déprimé. Il est assis seul dans son coin à la cafétéria, son livre de mathématiques
ouvert devant lui. Beth le voit en allant se chercher quelque chose à manger et constate que son ami a besoin de parler,
alors elle se met en mode écoute.

*Notez que la discussion est rédigée avec certaines erreurs langagières afin de reproduire plus fidèlement la réalité du français oral au
quotidien.

_Version 1 : écoute typique_


Beth 1 : Salut Serge! Ça a pas l’air d’aller… Serge : Je suis un peu perdu dans le moment… tu
Serge : Bof, non. Ça va pas. ferais quoi à ma place?
Beth 2 : C’est quoi le problème? Ton cours de maths? Beth 6 : Sérieux, si ça va pas, il faut que t’ailles voir ton
API. Tu changerais pour aller en quoi?
Serge : Bah… oui pis non.
Serge : C’est un peu ça le problème, je le sais pas!
Beth 3 : C’est ton prof? Les travaux? Le monde de ta
classe? Beth 7 : Je te verrais éducation spécialisée! T’aime full
ça les enfants en plus!
Serge : C’est pas ça… (semble hésitant)
Serge : Peut-être…
Beth 4 : C’est quoi dans ce cas-là?!
Beth 8 : Bon, je vais y aller! Moi non plus j’ai pas fini
Serge : Je pense que je suis peut-être juste pas dans
mes maths! Bonne réflexion!
le bon programme.
Beth 5 : Pour vrai? Tu veux pas me laisser tomber!?

Matière à réflexion
Cette scène aurait-elle pu réalistement se produire? On voit que Beth veut aider Serge, mais l’aide-t-elle
vraiment? Selon vous, quels sont les bons coups et quelles sont les maladresses de Beth dans cette
discussion? Le tableau ci-dessous en donne un aperçu.
✓ Elle remarque que Serge ne va pas bien.
Bons coups de
✓ Elle prend un peu de temps pour écouter Serge.
Beth ✓ 5 Elle dédramatise avec l’humour… mais comme Serge n’était pas d’humeur, c’était plus périlleux.
 2 Tout juste après une bonne question ouverte qui aurait permis à Serge d’expliquer ce qui ne va pas,
elle fait une supposition en parlant du cours de maths. Cela fait inutilement dévier du sujet.
 3 Elle bombarde Serge de questions! Une seule question ouverte aurait permis d’aller droit au but.
 4 Lorsque Serge hésite, elle manque une belle occasion de lui laisser le temps de réfléchir à sa
Maladresses réponse.
de Beth  6 Elle cherche des solutions pour Serge et lui dit quoi faire. Il doit trouver ses propres solutions.
 7 Elle ne semble pas très empathique quant aux implications liées à un changement de programme.
On pourrait se demander si elle ne veut pas se débarrasser du sujet pour faire autre chose.
 8 Elle ne prend pas le temps nécessaire… Si elle manque de temps, elle pourrait suggérer de reporter
la discussion à plus tard. 57
_Version 2 : écoute active_
Beth : Salut Serge! Ça a pas l’air d’aller… Serge : C’t’un peu ça. Parce que tsé si on me disait
Serge : Bof, non. Ça va pas. que ça allait durer quelques semaines, je me
Beth : Qu’est-ce qui va pas? Tu veux m’en parler? dirais que c’est peut-être pas si pire, mais je
pourrais pas endurer ça pendant deux ans
Serge : Ben, je pense que je ne suis pas dans le bon
c’est sûr!
programme.
Beth : T’aimerais ça que quelqu’un puisse te rassurer
Beth : Qu’est-ce qui te fait croire ça?
sur les attentes du programme.
Serge : En fait je le sais pas, peut-être que je suis à
Serge : Ben ouais, si c’était possible, ça serait le fun!
ma place aussi…
Mais je vois vraiment pas qui pourrait faire ça.
Beth : [fait simplement un signe de la tête, laisse Tsé les profs c’est sûr que pour eux c’est pas
Serge retrouver ses mots] compliqué ce qu’ils demandent, faque je
Serge : Je manque de motivation ces temps-ci. Sur pense pas qu’ils sont très objectifs.
papier, les cours m’intéressent, mais Beth : Tu vois vraiment pas qui d’autre pourrait
les travaux, les devoirs… ils sont plates! Ça t’éclairer sur ça.
me tente jamais.
Serge : Ben… ouin! Surement que mon API pourrait
Beth : Parce que t’as pas le goût de faire tes devoirs, le savoir… ou peut-être un élève de deuxième
tu te dis que t’es peut-être pas à ta place. année… (air songeur) Je pourrais
Serge : Ouin. En même temps je le vois bien que mes probablement en avoir une idée dans le fond!
amis, ils ont pas plus le goût de faire leurs Beth : Aller voir ton API, tu penses que ça serait une
devoirs, mais je le sais pas si ils sont bonne idée.
découragés autant que moi! Parce que tsé, les
Serge : Ouais, possible… je vais y penser. Là faut que
travaux pis tout, c’est plus tough que je l’aurais
j’aille à mon cours !
pensé aussi!
Beth : Ouais moi aussi, à bientôt!
Beth : Si je comprends bien, tu te demandes si c’est
normal de te sentir comme ça.

Matière à réflexion
Cette scène aurait-elle pu réalistement se produire? On voit que Beth veut aider Serge, mais l’aide-t-elle
vraiment? Lui donne-t-elle des conseils, comme lui demande Serge?
L’écoute active permet d’accompagner la personne dans sa recherche de solutions. Ce n’est qu’en lui
donnant toute la place que Beth a pu véritablement aider son ami Serge. C’est lui qui est le mieux placé
pour savoir ce qui est préférable pour lui dans le moment.
➔ Bien entendu, si la personne vit une situation particulière qui dépasse vos compétences il sera pertinent de la
référer à des ressources d’aide professionnelle appropriées.

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Annexe 2 :

Sentiments, besoins et processus de la CNV


(source : https://www.cnvsuisse.ch/wp-content/uploads/2016/06/Codex-2.pdf )

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