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DIVULGATION ENVIRONNEMENTALE ET PERFORMANCE

FINANCIÈRE DES GRANDES ENTREPRISES FRANÇAISE


Ikram Radhouane, Mehdi Nekhili, Haithem Nagati, Gilles Paché

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2017/5 N° 287-288 | pages 89 à 98


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ISSN 1160-7742
ISBN 9782916490557
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2017-5-page-89.htm
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Pour citer cet article :


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Ikram Radhouane et al., « Divulgation environnementale et performance financière
des grandes entreprises française », La Revue des Sciences de Gestion 2017/5 (N°
287-288), p. 89-98.
DOI 10.3917/rsg.287.0089
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La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 287-288 – Étude de cas en finance 89

Études de cas multiculturelles


Divulgation environnementale
et performance financière des grandes
entreprises française
par Ikram Radhouane, Mehdi Nekhili, Haithem Nagati et Gilles Paché

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Ikram RADHOUANE Mehdi NEKHILI


CRET-LOG, Aix-Marseille Université GAINS-ARGUMANS, Université du Maine
France France

Haithem NAGATI Gilles PACHÉ


LARA, ICD International Business School CRET-LOG, Aix-Marseille Université
France France

septembre-décembre 2017
Dossier III
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90 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 287-288 – Étude de cas en finance

A
Études de cas multiculturelles

u cours des dernières années, le champ de la respon- sur leur engagement environnemental auprès des actionnaires.
sabilité des entreprises s’est élargi en intégrant à la Ceux-ci se distinguent des autres parties prenantes non seule-
fois des dimensions environnementales et sociales, ment en leur qualité de premiers destinataires des informations
dépassant l’aspect économique de leur activité pour obtenir des environnementales publiées par les entreprises dans leur
profits pour les actionnaires. Sous la pression exercée par les rapport annuel ou de développement durable (C. De Villiers et
organismes non gouvernementaux, par la législation et par les C. Van Staden, 2011), mais aussi par le fait qu’ils supportent
consommateurs, les entreprises ont dû s’adapter à cet élargis- à eux seuls les coûts de toute politique de divulgation. L’étude
sement de leur responsabilité en déployant des pratiques de conduite se focalise sur la divulgation volontaire d’informations
responsabilité environnementale et divulguant des informations environnementales par les firmes qui opèrent dans des secteurs
présentant leurs actions en faveur de la protection de l’environ- dit « polluants ». Le degré de sensibilité environnementale du
nement (D. Philippe et R. Durand, 2009). Il en résulte que les secteur d’activité est un facteur qui conditionne les bénéfices
entreprises communiquent de plus en plus sur le sujet auprès que les entreprises peuvent espérer tirer et les coûts qu’elles
de leurs parties prenantes par le biais de leur rapport annuel vont supporter d’une politique de divulgation environnementale.

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ou leur rapport de développement durable : la question de la L’article est structuré comme suit. La première partie porte
communication environnementale est devenue au fil du temps sur l’intérêt des entreprises à divulguer volontairement des
un enjeu stratégique majeur. L’ampleur des bénéfices que peut informations environnementales dans leurs rapports annuels
espérer tirer l’entreprise de ses pratiques environnementales du point de vue des actionnaires. La deuxième partie présente
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est sans doute étroitement liée à la manière dont les parties la méthodologie de la recherche. Enfin, une troisième partie
prenantes prennent conscience du déploiement des activités est consacrée à la présentation des résultats obtenus auprès
environnementales (actionnaires, investisseurs, consommateurs, d’un échantillon d’entreprises cotées du SBF120 sur la période
clients, employés, autorités publiques, fournisseurs, etc.). 2001-2010. Nos résultats montrent que si les informations
La relation entre la communication d’informations environne- environnementales diffusées par les entreprises peuvent être
mentales et la performance financière des entreprises est une favorablement accueillies par le marché de capitaux, il n’en
question fondamentale pour les Sciences de Gestion, ayant est pas ainsi pour les entreprises ayant une forte empreinte
suscité le vif intérêt aussi bien de chercheurs que de praticiens. écologique.
Elle a donné lieu à de nombreuses publications académiques et
empiriques qui aboutissent cependant à des résultats relative-
ment mitigés (D. Cormier et M. Magnan, 2007 ; J.-F. Ory et J.-L. 1. Divulgation environnementale
Petitjean, 2014 ; Y. Qiu et al., 2016). D’une manière générale, et performance financière
communiquer aux parties prenantes leur engagement environne-
mental n’est pas un exercice aisé pour les entreprises. En effet, Les actionnaires, les clients, les fournisseurs, les salariés, la
la divulgation environnementale a été critiquée par les parties société civile et les associations de protection de l’environnement
prenantes pour son caractère sélectif, positif et « instrumental » sont autant de parties prenantes qui ont des attentes précises
(R. Hahn et M. Kühnen, 2013), dont la finalité est uniquement envers le comportement environnemental des entreprises,
la recherche d’une légitimité pour assurer leur survie (A. Dohou- autant que sur leur succès et leur prospérité (A. Mullenbach-
Renaud, 2009). Servayre, 2007). Elles exigent plus ou moins explicitement
La plupart des informations divulguées résultent d’une démarche que les entreprises aient des comportements plus engagés au
volontariste qui dépend de la latitude des dirigeants. Les parties regard de l’environnement. Face à ces pressions, les entreprises
prenantes s’interrogent ainsi sur la crédibilité perçue des infor- ont pris conscience qu’il était non seulement nécessaire de
mations environnementales publiées volontairement par les déployer des pratiques de protection de l’environnement, mais
entreprises : ces informations reflètent-elles réellement une aussi de divulguer des informations relatives à leur engagement
amélioration de leur performance environnementale, ou n’est-ce environnemental. Les informations environnementales publiées
qu’un moyen (astucieux) de communication destiné à manipuler par les entreprises contiennent des données quantitatives et
positivement la perception qu’ont des parties prenantes de qualitatives qui permettent de rendre compte aux différentes
leur engagement environnemental ? En même temps, ne pas parties prenantes de leur performance pour ce qui a trait à
communiquer peut avoir des conséquences préjudiciables pour l’environnement et qui offrent une vision plus large sur leurs
l’entreprise en suscitant la suspicion de la part desdites parties stratégies environnementales (D. Cormier et M. Magnan, 1996).
prenantes (S. Du et J. Vieira, 2012). Les enjeux sont encore plus
manifestes pour les entreprises qui exercent dans des secteurs
dits « polluants » comme la chimie, le pétrole et la métallurgie, 1.1. Une approche en termes de coûts/
où elles sont exposées à des fortes pressions réglementaires. bénéfices
L’objectif de l’article est d’analyser la réaction des investisseurs
à la communication d’informations environnementales. Il explore La divulgation environnementale est pertinente pour les
les avantages potentiels pour les entreprises de communiquer actionnaires dans la mesure où elle véhicule des informations

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Études de cas multiculturelles


complémentaires à l’information comptable pour apprécier et par des tiers (concurrents, gouvernements, clients, ONG, etc.)
évaluer la performance attendue de l’entreprise. D. Dhaliwal et (C. Cormier et D. Magnan, 1999). Enfin, C. Cho et al. (2010)
al. (2012) expliquent que les informations environnementales soulignent que le langage optimiste souvent adopté par les
et sociales sont très utiles pour les acteurs financiers car les entreprises « polluantes » dans leur stratégie de divulgation
activités d’ordre social sont susceptibles d’affecter la valeur de environnementale peut masquer des mauvaises performances
l’entreprise au travers de plusieurs mécanismes : les ventes, la environnementales et susciter la suspicion et la méfiance de
pénétration sur de nouveaux marchés, les coûts et l’efficience la part des parties prenantes, y compris les actionnaires.
opérationnelle, etc. Les entreprises qui publient leur engagement Les arguments présentés quant à l’évaluation par les action-
environnemental peuvent en tirer un avantage concurrentiel, naires de la divulgation environnementale en termes de coûts /
en améliorant l’image de marque et leur réputation auprès des bénéfices nous conduisent à la formulation de deux hypothèses
parties prenantes et en attirant de nouveaux investisseurs alternatives :
qualifiés de « socialement responsables » (J.-F. Ory et J.-L. Hypothèse 1a : La divulgation d’informations environnementales
Petitjean, 2014). a un impact positif sur la performance financière des firmes.

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Par ailleurs, la divulgation d’informations environnementales Hypothèse 1b : La divulgation d’informations environnementales
permet de réduire l’asymétrie d’information pouvant exister a un impact négatif sur la performance financière des firmes.
entre les dirigeants et les parties prenantes de l’entreprise, et
corollairement le coût du financement de l’entreprise (F. Déjean
1.2. Le rôle modérateur du secteur
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et I. Martinez, 2009). De fait, la divulgation environnementale


est censée renseigner les actionnaires sur la capacité des d’activité
firmes à gérer les risques et les problèmes environnementaux
ainsi que leurs effets sur les profits futurs de l’entreprise (C. Le degré de sensibilité environnementale du secteur d’activité
De Villiers et al., 2011). En effet, les enjeux environnementaux est un facteur qui conditionne non seulement les bénéfices que
sont à l’origine de pressions d’une société civile susceptible de les entreprises peuvent espérer de leur divulgation environne-
ternir l’image de l’entreprise par des campagnes médiatiques et mentale, mais aussi les coûts qu’elles vont supporter d’une telle
des opérations de boycott organisées par différentes associa- divulgation. En effet, les entreprises œuvrant dans des secteurs
tions de défense de l’environnement, comme en témoigne le dits « sensibles » en termes d’impacts environnementaux font face
cas du Roundup de Monsanto. Dans ce dernier cas, un intense à une forte pression de la part du grand public et sont amenées
et coûteux travail de communication s’avère nécessaire pour à divulguer volontairement des informations environnementales
rétablir une image largement altérée auprès du grand public (A. pour asseoir la légitimité de leur activité et obtenir le soutien
Kanso et A. Gonzales, 2015). de leurs parties prenantes (S. Damak-Ayadi, 2006 ; F. Depoers,
La sensibilité croissante des acteurs financiers à la responsabilité 2010). Toutefois, la perception qu’ont les parties prenantes des
environnementale peut être également expliquée par l’adoption activités de l’entreprise influence négativement la crédibilité de
de lois et réglementations de plus en plus sévères entraînant son discours environnemental. En outre, le fait d’opérer dans un
de lourdes sanctions en cas de non-respect. Dès lors, il devient secteur « polluant » constitue l’une des premières observations
impératif de renseigner les actionnaires non seulement sur la effectuées par les parties prenantes sur une entreprise (W. Aerts
gestion environnementale des entreprises mais aussi sur les et C. Cormier, 2009). Par conséquent, ces dernières prennent en
conséquences financières d’une telle gestion. En effet, cette considération le secteur et son degré de pollution pour évaluer
catégorie de parties prenantes est principalement intéressée et apprécier l’engagement environnemental des entreprises.
par la rentabilité et le risque (J. Saghroun et J.-Y. Eglem, 2008 ; Étant donné que les parties prenantes ne peuvent pas vérifier
C. De Villiers et C. Van Staden, 2011). En effet, les entreprises les informations environnementales divulguées volontairement
dites « polluantes » sont soumises à un niveau élevé de pression par les entreprises, leur évaluation de la divulgation environne-
réglementaire, une forte exposition aux médias, ainsi qu’un mentale est davantage influencée par le comportement général
scepticisme de la part des parties prenantes à l’égard de leurs au niveau du secteur, plutôt que celui des entreprises elles-
discours sur l’environnement (W. Aerts et D. Cormier, 2009 ; mêmes (A. King et al., 2002). De même, le coût de la divulgation
A. Kanso et A. Gonzales, 2015). Ces pressions peuvent être environnementale pour ce type d’entreprises est plus élevé en
perçues par les actionnaires comme un coût supplémentaire raison de la forte pression des parties prenantes (S. Brammer
supporté par les entreprises « polluantes » et influenceraient ainsi et S. Pavelin, 2006). De surcroît, le retour sur investissement
négativement la performance financière (W. Aerts et al., 2008). est incertain dans la mesure où les entreprises appartenant aux
Outre les ressources nécessaires à la mise en œuvre d’un secteurs « polluants » font face à une méfiance importante de la
système de collecte de telles informations, la divulgation des part de leurs parties prenantes à l’égard de leur communication
informations environnementales peut engendrer des coûts environnementale (S. Du et J. Vieira, 2012).
indirects (politique, de réputation, et de « propriété ») (Y. Li et Hypothèse 2 : Pour les entreprises dites « polluantes », il y a une
al., 1997). En effet, certaines informations environnementales relation négative entre la divulgation d’informations environne-
divulguées par l’entreprise peuvent être utilisées à son détriment mentales et la performance financière.

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2. Méthodologie 2.1.1. Variable dépendante : performance financière


Études de cas multiculturelles

L’échantillon de notre étude est constitué d’entreprises françaises Dans le cadre de notre étude, la performance des entreprises a
cotées à l’indice SBF120 (Société des Bourses Françaises) sur été opérationnalisée par l’indicateur Q de Tobin. Cette mesure
la période de 2001 à 2010. Les institutions financières, les reflète mieux les attentes des actionnaires et intègre les perspec-
compagnies d’assurances ainsi que les sociétés immobilières tives de rentabilité anticipée des entreprises (H. Dixon-Fowler
ont été éliminées de notre échantillon initial en raison de la et al., 2013). Le Q de Tobin reflète aussi la réaction du marché
spécificité de leur activité et de la réglementation. L’échantillon aux décisions environnementales d’une entreprise (K.-H. Lee
final est composé de 91 entreprises couvrant une période de 10 et al., 2015). Ce ratio est calculé par le rapport entre la valeur
ans pour un total de 850 observations. Notre période d’analyse de l’entreprise (capitalisation boursière + valeur comptable des
débute en 2001, année de la mise en œuvre de la nouvelle la dettes financières) et la valeur comptable de l’actif total.
loi sur les Nouvelles Régulations Économiques (NRE). Cette loi
exige des sociétés cotées en bourse de publier des informations
2.1.2. Variable endogène : niveau de divulgation

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sur les conséquences environnementales et sociales de leurs
activités dans leurs rapports annuels. Notre période d’analyse environnementale
se termine en 2010, avant l’entrée en vigueur de la loi Grenelle II
de 2012. Cette loi oblige les sociétés cotées en bourse à rendre Pour tester l’impact de la divulgation environnementale sur la
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compte des conséquences sociales et environnementales de performance des entreprises, nous avons calculé un indice de
leur activité. Avant 2012, la divulgation d’informations environ- divulgation. Il est obtenu après une analyse du contenu des
nementales et sociales résulte donc d’une démarche volontaire informations environnementales publiées dans les rapports de
des entreprises (M. Chelli et al., 2016 ; M. Nekhili et al., 2017). développement durable pour chaque entreprise de notre échan-
tillon sur la période de 2001 à 2010. L’utilisation du rapport
de développement durable permet de mieux appréhender le
2.1. Mesure des variables caractère discrétionnaire de la divulgation environnementale (S.
Damak-Ayadi, 2006). En l’absence de ce rapport, nous avons
La mesure de variables, entendues comme caractéristique examiné le chapitre consacré au développement durable publié
d’un ensemble de valeurs auquel il est possible d’attribuer une par l’entreprise dans son rapport annuel.
mesure numérique, repose ici classiquement sur une variable Pour chaque entreprise de notre échantillon, un score de divul-
dépendante, sur une variable endogène et sur une variable gation environnementale a été conçu en rapport avec les 14
modératrice. Nous y ajouterons des variables de contrôle, dont items contenus dans le Tableau 1. Cette liste correspond aux
la mission classique est d’éviter tout biais dans l’estimation du informations exigées dans le cadre de la loi Grenelle II identifiant
paramètre d’intérêt. cinq catégories de diffusion d’informations environnementales :

Tableau 1. Les indicateurs de la divulgation environnementale

Thèmes Sous-thèmes
Politique générale L’organisation de la société pour prendre en compte les questions environnementales et, le cas échéant, les
en matière environ- démarches d’évaluation ou de certification en matière d’environnement
nementale Les actions de formation et d’information des salariés menées en matière de protection de l’environnement
Les moyens consacrés à la prévention des risques environnementaux et des pollutions
Le montant des provisions et garanties pour risques en matière d’environnement, sous réserve que cette information
ne soit pas de nature à causer un préjudice sérieux à la société dans un litige en cours
Pollution et gestion Les mesures de prévention, de réduction ou de réparation de rejets dans l’air, l’eau et le sol affectant gravement
des déchets l’environnement
Les mesures de prévention, de recyclage et d’élimination des déchets
La prise en compte des nuisances sonores et de toute autre forme de pollution spécifique à une activité
Utilisation durable La consommation d’eau et l’approvisionnement en eau en fonction des contraintes locales
des ressources La consommation de matières premières et les mesures prises pour améliorer l’efficacité de leur utilisation
La consommation d’énergie, les mesures prises pour améliorer l’efficacité énergétique et le recours aux énergies
renouvelables
L’utilisation des sols
Changement clima- Les rejets de gaz à effet de serre
tique L’adaptation aux conséquences du changement climatique
Biodiversité Les mesures prises pour développer la biodiversité

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politique générale en matière environnementale, pollution et Aerts et D. Cormier, 2009 ; F. Déjean et I. Martinez, 2009 ;
gestion des déchets, utilisation durable des ressources, change- S. Damak-Ayadi, 2006). Les secteurs d’activité « polluants »
ment climatique et protection de la biodiversité. Pour chaque sont identifiés comme suit : Chimie, Construction, Métallurgie,
item, nous avons utilisé une approche dichotomique selon que Minéraux, Pétrole & Gaz, Transports, Véhicules & Équipement.
l’information relative à cet item est clairement présentée et À cet effet, nous définissons une variable binaire qui prend la
discutée dans le rapport de développement durable ou non. valeur 1 si l’entreprise provient d’une industrie dite « polluante »
L’indice de divulgation pour chaque entreprise est alors calculé et 0 si elle provient d’une industrie dite « non-polluante ». Cette
comme le rapport entre le score total ainsi calculé et le score classification nous permet de construire un échantillon de 182
théorique de 14 items. observations d’entreprises exerçant dans des secteurs dits
« polluants » et de 677 observations d’entreprises exerçant dans
des secteurs dits « non-polluants ».
2.1.3. Variable modératrice : secteur « polluant »
Certains secteurs industriels se distinguent typiquement par
2.1.4. Variables de contrôle

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l’ampleur de la pollution résultant de leurs activités d’utilisation
ou d’extraction prédominante des ressources naturelles, de la Afin de corriger le biais d’endogénéité possible, un certain nombre
création de déchets ou de la fabrication de produits polluants de variables de contrôle représentant les caractéristiques de
(F. Gary et A. Romi, 2013). Dans le cadre de notre étude, pour l’entreprise ont été utilisées dans notre modèle. Sur la base
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identifier les secteurs d’activité qualifiés de « polluants », nous d’un examen approfondi de la littérature existante, nous avons
avons adopté la classification de plusieurs recherches (W. identifié certaines caractéristiques de l’entreprise qui pourraient

Tableau 2. Définition et mesure des variables


Variable Définition Mesure
Variable dépendante
TOBIN Q de Tobin Rapport entre la valeur de l’entreprise (capitalisation boursière + la valeur comptable des dettes
financières) et la valeur comptable de l’actif total
Variable endogène
DIV_ENV Divulgation environnemen- Indice de divulgation environnementale calculé par le rapport entre le score obtenu pour chaque
tale entreprise et le score total de 14 items
Variable modératrice
SEC_POL Secteur « polluant » Variable binaire prenant la valeur 1 si l’entreprise appartient à un secteur dit « polluant » (Chimie,
Construction, Métallurgie, Minéraux, Pétrole & Gaz, Transports, Véhicules & Équipement), 0 sinon
Variables relatives aux mécanismes de gouvernance
COM_RSE Comité RSE Variable binaire prenant la valeur 1 si l’entreprise dispose d’un comité RSE (dit aussi comité
d’éthique), et 0 sinon.
TAILLE_CA Taille du conseil d’adminis- Logarithme népérien du nombre d’administrateurs
tration
IND_CA Indépendance du conseil Proportion d’administrateurs indépendants dans le conseil d’administration
d’administration
DIL_CA Diligence du conseil Logarithme népérien du nombre de réunions du conseil d’administration
d’administration
FEM_CA Féminisation du conseil Proportion des femmes dans le conseil d’administration
d’administration
DUAL Dualité Variable binaire prenant la valeur 1 si le directeur général est en même temps président du
conseil d’administration, 0 sinon
LONG Longévité Nombre d’années passées par le directeur général
Variables relatives à la structure de propriété
FAM Propriété familiale Variable binaire prenant la valeur 1 si une famille détient au moins 10 % du capital, 0 sinon
INST Propriété institutionnelle Variable binaire prenant la valeur 1 si les investisseurs institutionnels détiennent au moins 10 %
du capital, 0 sinon
Autres variables de contrôle
DETTE Taux d’endettement Rapport entre les dettes financières et le total actif
INTERN Internationalisation La part des actifs détenus à l’étranger dans le total actif
BETA Bêta du titre Bêta de l’action indiquant la volatilité d’un actif par rapport au bêta du marché
R&D Intensité en recherche et Intensité en R&D mesurée par le rapport entre les dépenses en R&D et le chiffre d’affaires
développement
TAILLE Taille de l’entreprise Logarithme népérien du total actif

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avoir un impact sur la divulgation d’informations environnemen- TOBIN = β0 + β1 Lag TOBIN + β2 DIV_ENV + β3 COM_RSE + β4
tales et la performance des entreprises. Le Tableau 2 résume TAILLE_CA + β5 IND_CA + β6 FEM_CA + β7 DIL_CA + β8 DUAL + β9
les définitions et les mesures des différentes variables utilisées LONG + β10 FAM + β11 INST + β12 DETTE + β13 INTERN + β14 BETA
dans notre étude, en y intégrant trois catégories de variables + β15 R&D + β16 TAILLE + β17 ANNEE + ε,
de contrôle : Toutes les variables sont définies dans le Tableau 2, avec ξ
La première catégorie concerne les mécanismes de gouvernance comme terme d’erreur.
des entreprises. Il est reconnu dans la littérature que certains
mécanismes ont une influence positive sur le niveau de divul-
gation des informations environnementales et sont considérés 3. Résultats empiriques
comme un outil de contrôle pour s’assurer que les dirigeants
agissent non seulement pour les intérêts des actionnaires, mais
aussi des détenteurs d’intérêts plus larges (F. Depoers, 2010 ; 3.1. Analyse bivariée
R. Hahn et M. Kühnen, 2013).

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La deuxième catégorie des variables de contrôle retenues est la Tableau 3. Statistiques descriptives des variables
structure de propriété. Il ressort de la littérature que la nature
Moyenne Médiane Ecart-type Minimum Maximum
de l’actionnariat est susceptible d’influencer la performance des
TOBIN 1,165 0,898 0,876 0,255 5,226
entreprises et leur propension à s’engager dans des initiatives
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DIV_ENV 37,65 % 35,71 % 28,16 % 0 92,86 %


environnementales (W. Aerts et al., 2008). Dans notre étude,
SEC_POL 21,21 % 0 40,90 % 0 1
nous avons retenu la présence des investisseurs institutionnels
COM_RSE 24,94 0 43,29 0 1
et de l’actionnariat familial. Les investisseurs institutionnels
TAILLE_CA 11,577 12 4 3 24
sont considérés comme des actionnaires qui exercent le plus
(nombre
de contrôle sur les activités managériales en exigeant un niveau d’administra-
plus important de divulgation sur les conséquences environne- teurs)
mentales de l’activité de l’entreprise (K.-H. Lee et al., 2015). IND_CA 41,90 % 42,86 % 23,65 % 0 94,12 %
Pour l’actionnariat familial, il est reconnu dans la littérature que DIL_CA 7,169 7 3,583 0 30
les entreprises familiales sont plus performantes sur le plan de (nombre de
réunions)
la responsabilité sociale que les firmes non familiales, mais ont
FEM_CA 8,09 % 6,67 % 8,93 % 0 42,86 %
tendance à divulguer moins d’informations environnementales
(M. Nekhili et al., 2017). DUAL 53,89 % 1 49,88 % 0 1
La troisième catégorie de variables de contrôle concerne certaines LONG 8,718 7 6,863 0 42
(nombre
caractéristiques des entreprises qui sont couramment utilisées d’années)
dans des études antérieures : la taille, le taux d’endettement, FAM 26,49 % 21,36 % 26,33 % 0 99,37 %
le degré d’internationalisation (INTERN), le niveau de risque INST 15,09 % 5 % 22,31 % 0 91 %
(BETA) et l’intensité R&D. Dette 25,78 % 24,94 % 13,95 % 0,42 % 60,07 %
INTERN 38,78 % 37,97 % 29,41 % 0 97,36 %

2.2. Modèle BETA


R&D
0,887
1,91 %
0,901
0
0,282
4,47 %
0,063
0
1,815
24,17 %
TAILLE (en 16 456 5 197 28 774 4 240 559
Pour analyser la relation existante entre la divulgation d’informa- millions
tions environnementales et la performance des entreprises, nous d’euros)
avons utilisé la Méthode des Moments Généralisés (GMM) en
panel dynamique développée par R. Blundell et S. Bond (2000). Le Tableau 3 présente les principales statistiques descriptives
La présente technique économétrique d’estimation permet de des variables utilisées dans notre étude. En ce qui concerne
détecter les variations entre les entreprises ainsi que la variation la mesure de performance, les entreprises de l’échantillon ont
dans le temps de la divulgation d’informations environnemen- un Q de Tobin de 1,165. Concernant les informations environ-
tales. Cette méthode d’estimation permet également de corriger nementales publiées, nous avons un score moyen de 37,65 %.
le biais d’endogénéité des variables explicatives. Ce biais se Nos résultats indiquent une grande disparité dans les pratiques
justifie par le fait que certaines caractéristiques des entreprises de divulgation environnementale avec un écart-type important
telles que les ressources des entreprises, les mécanismes de de 28,16 %. La taille du conseil (TAILLE_CA) est d’environ 11
gouvernance et la structure de propriété influencent simultané- administrateurs, avec un minimum de trois membres et un
ment le niveau de divulgation environnementale et leur perfor- maximum de 24 membres. La proportion moyenne d’adminis-
mance financière. Plus précisément, nous avons effectué une trateurs indépendants (IND_CA) est d’environ 42 % et le nombre
estimation du modèle suivant : de réunions du conseil (DIL_CA) est supérieur à sept par an.

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Études de cas multiculturelles


Le pourcentage des directeurs généraux qui sont également prési- Pour ce qui relève des mécanismes de gouvernance, les
dents du conseil d’administration (DUAL) est d’environ 54 % des entreprises « polluantes » et « non-polluantes » présentent des
cas. En moyenne, l’actionnariat familial (FAM) et les investisseurs différences significatives en termes des caractéristiques du
institutionnels (INST) ont en moyenne respectivement 26 % et conseil d’administration. Les entreprises « polluantes » ont
15 % du capital. Le degré d’internationalisation (INTERN) et le tendance à avoir plus de comités RSE (34,97 %) que les entre-
taux d’endettement (DETTE) représentent en moyenne un peu prises « non-polluantes » (23,24 %). De même, il ressort que le
plus de 38 % et environ 25 % de l’actif total, respectivement. Le pourcentage d’administrateurs indépendants (IND_CA) est plus
niveau de risque mesuré par bêta moyen de notre échantillon élevé dans les entreprises « polluantes » que dans les entre-
(BETA) est inférieur à 1 (0,887). Les résultats présentés dans le prises « non-polluantes » (respectivement 47,30 % et 40,43 %).
Tableau 3 montrent une intensité moyenne de R&D de 1,91 %. Cependant, les entreprises dites « polluantes » ont un conseil
Enfin, le total actif (TAILLE) varie de 4 à 240 559 millions d’euros, d’administration (TAILLE_CA) de plus grande taille que celui
avec une moyenne de 16 456 millions d’euros. des entreprises « polluantes ». Le conseil d’administration des
Le Tableau 3 présente les tests de différence de moyenne entreprises « polluantes » est moins actif que celui des entre-

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entre les entreprises opérant dans des secteurs « polluants » et prises « non-polluantes », comme en témoigne le nombre de
« non-polluants ». Notre étude montre que le niveau de divulgation réunions annuelles (DIL_CA). En moyenne, les entreprises dites
d’informations environnementales est plus élevé pour les cinq « non-polluantes » ont tendance à avoir plus de femmes membres
secteurs dit « polluants » : Chimie, Construction, Métallurgie, du conseil d’administration (FEM_CA) que les entreprises dites
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Minéraux, Pétrole & Gaz, Transports, Véhicules & Équipement. « polluantes » (8,62 % et 6,17 %, respectivement). Les entreprises
Le résultat est cohérent avec plusieurs études antérieures (S. dites « polluantes » ont également des directeurs généraux qui
Brammer et S. Pavelin, 2006 ; S. Damak-Ayadi, 2006), révélant occupent le plus souvent le poste de présidents des conseils
que les entreprises dites « polluantes » divulguent davantage d’administration (65,38 % contre 50,15 % pour les entreprises
d’informations environnementales. Les données du Tableau 3 « non-polluantes »).
montrent également que les entreprises qui n’opèrent pas à des En ce qui concerne la structure de la propriété, nos résultats
secteurs « polluants » ont une meilleure performance financière, montrent que les familles détiennent moins de capital (FAM)
mesurée par le Q de Tobin, que les entreprises « polluantes » dans les entreprises dites « polluantes » (12,09 %) que dans
(1,241 et 0,848, respectivement). Ce résultat est conforme à la les entreprises « non-polluantes ». À l’inverse, les investisseurs
conclusion de K.-H. Lee et al. (2015) selon laquelle le fait d’opérer institutionnels (INST) détiennent plus de capital dans les entre-
dans un secteur « polluant » détruit la valeur de l’entreprise. prises « polluantes » que dans les entreprises « non-polluantes »
Tableau 4. Test de différence de moyenne (12,58 %). Pour les autres variables de contrôle, nous avons
observé des différences statistiques significatives concernant
Secteur Secteur « non Test de le taux d’endettement, le niveau de risque mesuré par le bêta,
Variables
« polluant » polluant » Student l’intensité de R&D et la taille de l’entreprise. Dans notre échan-
DIV_ENV 52,93 % 34,33 % 8,228*** tillon, les entreprises dites « polluantes » sont plus endettées,
TOBIN 0,848 1,241 5,133*** dépensent moins en R&D et présentent un risque systémique
COM_RSE 34,97 % 23,24 % 2,948*** (BETA) moins élevé que les entreprises « non-polluantes ». Enfin,
TAILLE_CA (nombre d’admi- 13,554 11,037 7,469*** a il n’existe pas de différences significatives entre les entreprises
nistrateurs)
« polluantes » et les entreprises « non-polluantes » en termes de
IND_CA 47,30 % 40,43 % 3,499***
degré d’internationalisation (INTERN).
DIL_CA (nombre de 6,802 7,270 1,067 a

réunions)
FEM_CA
DUAL
6,17 %
65,38 %
8,62 %
50,15 %
3,305***
3,682***
3.2. Analyse multivariée
LONG (nombre d’années) 10,381 8,267 2,552** a
Avant d’effectuer les analyses multivariées, nous avons examiné
FAM 12,09 % 30,42 % 8,680***
les corrélations entre les variables indépendantes pour détecter
INST 20,07 % 13,73 % 3,418***
la colinéarité. L’examen de la matrice des corrélations indique
Dette 28,24 % 25,13 % 2,660***
qu’il n’y a pas de colinéarités existantes entre les variables expli-
INTERN 37,04 % 39,25 % 0,901
catives de notre modèle. Les résultats du Tableau 5 soulignent
BETA 0,844 0,901 2,468**
un impact positif et significatif (0,870 ; z = 13,81) de la divul-
R&D 0,35 % 2,33 % 5,343***
gation d’informations environnementales sur la performance
TAILLE (en milliards d’euros) 37,042 11,003 8,972*** a
des entreprises, mesurée par le Q de Tobin. En effet, les infor-
Nombre d’observations 182 677
mations environnementales divulguées volontairement par les
**, *** Statistiquement significatif à 5 % et à 1 %, respectivement.
entreprises sont susceptibles d’améliorer la valeur de l’entre-
a
Les tests sont réalisés sur les valeurs logarithmiques. Les prise. Les résultats semblent indiquer que, du point de vue des
variables sont comme définies dans le Tableau 1. actionnaires, les avantages de la divulgation environnementale

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peuvent dépasser les coûts directs ou indirects d’une telle la performance financière mesurée par le Q de Tobin. Pour le
divulgation. Ils nous conduisent ainsi à accepter l’Hypothèse reste des variables de contrôle, nous constatons que le taux
H1a et à rejeter l’Hypothèse H1b. d’endettement (DETTE) est négativement associé au Q de Tobin.
Tableau 5. Régression de la performance financière sur le niveau de divulgation L’intensité de R&D et le niveau de risque systématique (BETA)
environnementale sont positivement liés à la performance financière des entre-
prises (Q de Tobin). Enfin, nous observons une relation négative
TOBIN et significative entre la taille de l’entreprise et le Q de Tobin.
Variables
Coefficient Test z
Tableau 6. Régression de la performance sur le niveau élevé de divulgation
Lag TOBIN 0,639*** 117,79
environnementale et l’appartenance à un secteur « polluant »
DIV_ENV 0,870*** 13,81
SEC_POL 0,172*** 2,93 Modèle 1 Modèle 2
Variables
COM_RSE –0,101*** –3,35 Coefficient Test z Coefficient Test z
TAILLE_CA –0,116*** –2,64 Lag TOBIN 0,638*** 137,80 0,666*** 47,28

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IND_CA –0,114** –2,03 HDIV_ENV 0,305*** 12,84 0,394*** 5,03
DIL_CA –0,032 –1,30 SEC_POL 0,159*** 4,93 0,901*** 5,06
FEM_CA 0,045 0,37 HDIV_ENV*SEC_POL –1,054*** –4,96
DUAL –0,117*** –4,67 COM_RSE –0,029 –1,38 0,026 0,77
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LONG –0,002 –0,11 TAILLE_CA –0,096*** –2,73 –0,049 –0,87


FAM 0,170** 2,43 IND_CA –0,146*** –3,68 0,059 0,84
INST –0,151*** –2,79 DIL_CA –0,026 –1,30 0,004 0,12
DETTE –0,587*** –6,37 FEM_CA 0,133 1,09 0,322 1,29
INTERN –0,004 –0,10 DUAL –0,095*** –4,18 –0,014 –0,32
BETA 0,165*** 4,51 LONG 0,007 0,48 –0,002 –0,07
R&D 0,292* 1,66 FAM 0,172*** 2,78 0,224*** 2,66
TAILLE –0,065*** –6,32 INST –0,058 –1,10 –0,152 –1,62
Constante 1,523*** 18,76 DETTE –0,529*** –7,25 –0,443*** –2,97
ANNEE Oui INTERN 0,006 0,20 0,054 1,09
Nombre d’observations 735 BETA 0,148*** 5,40 0,186*** 3,69
Wald Chi-deux (Prob > Chi-deux) 20325,38 (p = 0,000) R&D 0,600*** 3,38 0,254 0,71
Test d’Arellano-Bond AR(1) (z, Prob > z) –2,67 (p = 0,004) TAILLE –0,052*** –5,93 –0,036** –2,08
Test d’Arellano-Bond AR(2) (z, Prob > z) 1,61 (p = 0,107) Constante 1,329*** 17,38 0,608*** 2,75
Test de Sargan (Chi-deux, Prob 525,91 (p = 0,000) ANNEE Oui Oui
> Chi-deux)
Nombre d’observa- 735 735
Test de Hansen (Chi-deux, Prob 73,80 (p = 0,188) tions
> Chi-deux)
Wald Chi-deux (Prob 95053,58 (p 40000,27 (p
*, **, *** Statistiquement significatif à 10 %, 5 % et à 1 %, respec- > Chi-deux) = 0,000) = 0,000)
tivement.
Test d’Arellano-Bond –2,68 (p = 0,002) –2,64 (p = 0,003)
Les variables sont comme définies dans le Tableau 1.
AR(1) (z, Prob > z)
Concernant les variables de contrôle, le Tableau 5 indique que Test d’Arellano-Bond 1,62 (p = 0,105) 1,64 (p = 0,101)
AR(2) (z, Prob > z)
le comité RSE (COM_RSE) est relié négativement au Q de Tobin,
Test de Sargan 526,58 (p = 0,000) 518,56 (p = 0,000)
ce qui implique que ce comité n’est pas d’une grande utilité aux (Chi-deux, Prob
yeux des actionnaires. Nos résultats indiquent également que la > Chi-deux)
taille du conseil d’administration (TAILLE_CA) et son degré d’indé- Test de Hansen 74,25 (p = 0,119) 51,67 (p = 0,230)
pendance (IND_CA) sont négativement reliés à la performance (Chi-deux, Prob
financière de l’entreprise mesurée par le Q de Tobin. Il existe un > Chi-deux)
lien positif et significatif entre les réunions du conseil d’admi- Joint test : HDIV_ENV + HDIV_ENV*SEC_ –0,660*** –3,35
POL
nistration (DIL_CA) et la performance de l’entreprise mesurée
*, **, *** Statistiquement significatif à 10 %, 5 % et à 1 %, respec-
par Q de Tobin. La dualité des fonctions de directeur général
tivement.
et de président du conseil d’administration (DUAL) a un impact Les variables sont comme définies dans le Tableau 1.
significatif et positif sur le Q de Tobin. En ce qui concerne la
structure de la propriété, les résultats montrent que l’actionnariat Pour toute entreprise dite « polluante », le principal défi à relever
familial (FAM) a un effet positif et significatif sur la performance afin de réussir son processus de divulgation environnementale
financière mesurée par le Q de Tobin. Cependant, la présence est le suivant : elle doit à la fois partager des informations
d’investisseurs institutionnels (INST) est négativement liée à environnementales tout en réduisant le coût de la divulgation

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et le scepticisme de ses parties prenantes. Notre Hypothèse incidence sur la perception que peuvent avoir les investisseurs sur
2 stipule que ce défi est encore plus difficile à relever pour les les informations environnementales transmises et de nombreux
entreprises dites « polluantes ». Nous testons cette hypothèse défis sont de fait à relever par les entreprises « polluantes » dans
par la technique du test joint. Nous commençons par extraire leur stratégie de communication environnementale.
une variable binaire (HDIV_ENV) prenant la valeur 1 si le niveau
de divulgation environnementale est supérieur à la médiane
obtenue pour le total de l’échantillon (35,71 %), et la valeur 0 Bibliographie
sinon. Ensuite, nous mesurons l’effet marginal d’un niveau élevé
de divulgation sur la performance financière des entreprises dites Aerts, W., & Cormier, D. (2009), « Media legitimacy and corporate
« polluantes » en testant l’effet de la somme des coefficients environmental communication », Accounting, Organizations &
(HDIV_ENV + HDIV_ENV*SEC_POL) sur le Q de Tobin. Society, Vol. 34, n° 1, pp. 1-27.
Aerts, W., Cormier, D., & Magnan, M. (2008), « Corporate environ-
Dans le Modèle 1 du Tableau 6, nous montrons comment un mental disclosure, financial markets and the media : an inter-

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niveau élevé de divulgation et l’appartenance à un secteur dit national perspective », Ecological Economics, Vol. 64, n° 3, pp.
« polluant » (HDIV_ENV*SEC_POL) interagissent sur la performance 643-659.
financière. Nous réalisons par la suite le test de l’effet de joint Blundell, R., & Bond, S. (2000), « GMM estimation with persistent
de « HDIV_ENV » et de « HDIV_ENV*SEC_POL ». Les résultats panel data : an application to production functions », Econometric
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du Modèle 2 dans le Tableau 6 indiquent un effet joint négatif Review, Vol. 19, n° 3, pp. 321-340.
(–0,660) et significatif (z = 3,35) sur le Q de Tobin. Conformément Brammer, S., & Pavelin, S. (2006). « Voluntary environmental
à notre Hypothèse H2, un niveau élevé de divulgation environ- disclosures by large UK companies », Journal of Business Finance
nementale est destructeur de valeur pour les entreprises dites & Accounting, Vol. 33, n° 7-8, pp. 1168-1188.
« polluantes ». Chelli, M., Durocher, S., & Fortin, A. (2016), « Normativity in
environmental reporting : a comparison of three regimes »,
Journal of Business Ethics, pp. 1-27.
Conclusion Cho, C., Roberts, R., & Patten, D. (2010), « The language of US
corporate environmental disclosure », Accounting, Organizations
L’objectif de l’article était de mieux comprendre les avantages en & Society, Vol. 35, n° 4, pp. 431-443.
termes de performance financière que les entreprises peuvent Cormier, D., & Magnan, M. (1996), « L’attitude des investisseurs
tirer en communiquant sur leur engagement environnemental. La boursiers face au bilan environnemental de l’entreprise : une
nécessité de réduire désormais l’impact néfaste des activités étude canadienne », Comptabilité Contrôle Audit, Vol. 2, n° 2,
de l’entreprise sur l’environnement est devenu un enjeu majeur pp. 25-49.
pour une entreprise qui se veut socialement responsable. Face Cormier, D., & Magnan, M. (2007), « The revisited contribution
aux pressions exercées par les différents groupes de parties of environmental reporting to investors’ valuation of a firm’s
prenantes (associations de protection de l’environnement, inves- earnings : an international perspective », Ecological Economics,
tisseurs, gouvernement, clients, etc.), les entreprises se sont Vol. 62, n° 3-4, pp. 613-626.
très vite saisies de l’intérêt que représente la communication Damak-Ayadi, S. (2006), « Analyse des facteurs explicatifs de
sur leur engagement environnemental. Toutefois, le lien entre la la publication des rapports sociétaux en France », Comptabilité
communication environnementale et la performance financière Contrôle Audit, Vol. 12, n° 2, pp. 93-116.
des entreprises est loin de faire l’unanimité. Outre le fait qu’ils Déjean, F., & Martinez, I. (2009), « Communication environnemen-
sont les premiers destinataires des informations environnemen- tale des entreprises du SBF120 : déterminants et conséquences
tales publiées dans les rapports annuels ou de développement sur le coût du capital-actions », Comptabilité Contrôle Audit, Vol.
durable, les actionnaires se distinguent particulièrement des 15, n° 1, pp. 55-77.
autres parties prenantes par le fait qu’ils supportent à eux seuls Depoers, F. (2010), « Gouvernance et qualité de l’information
les coûts de toute politique de divulgation. Leur évaluation des sur les gaz à effet de serre publiée par les sociétés cotées »,
informations ainsi divulguées se fait dans une optique d’analyse Comptabilité Contrôle Audit, Vol. 16, n° 3, pp. 127-151.
coûts/bénéfices. De Villiers, C., & Van Staden, C. (2011), « Where firms choose
Étudiant le cas spécifique des grandes entreprises françaises to disclose voluntary environmental information », Journal of
du SBF 120 entre 2001 et 2010, nos résultats indiquent que les Accounting & Public Policy, Vol. 30, n° 6, pp. 504-525.
informations environnementales sont dans l’ensemble favora- Dhaliwal, D., Radhakrishnan, S., Tsang, A., & Yang, Y. (2012),
blement accueillies par le marché de capitaux. A contrario, les « Nonfinancial disclosure and analyst forecast accuracy : inter-
informations divulguées par les entreprises appartenant aux national evidence on corporate social responsibility disclosure »,
secteurs dits « polluants » ont un impact négatif et significatif sur The Accounting Review, Vol. 87, n° 3, pp. 723-759.
la performance des entreprises mesurée par le Q de Tobin. Le Dixon-Fowler, H., Slater, D., Johnson, J., Ellstrand, A., & Romi,
secteur d’activité où opèrent les entreprises n’est donc pas sans A. (2013), « Beyond does it pay to be green ? A meta-analysis of

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