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Piles électriques

Piles au lithium
par Christian SARRAZIN
Spécialiste des sources d’énergie électrochimique
Ancien Chef de la division chimie électrochimie à la Délégation générale pour l’armement
/ Direction des recherches études et techniques (DGA/DRET)

1. Présentation générale............................................................................. D 3 322 - 2


2. Piles lithium-dioxyde de soufre ........................................................... — 3
3. Piles lithium-chlorure de thionyle ....................................................... — 5
4. Piles lithium-dioxyde de manganèse .................................................. — 8
5. Piles lithium-oxyde de cuivre ............................................................... — 9
6. Piles lithium-fluorure de carbone........................................................ — 10
7. Piles lithium-disulfure de fer ................................................................ — 12
8. Autres piles au lithium ........................................................................... — 13
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. D 3 325

e lithium, qui a le potentiel le plus négatif et la plus forte capacité massique


L des matériaux d’anode solides, est apparu comme le métal permettant
d’atteindre les plus hautes énergies massiques dans les piles, lorsqu’il est asso-
cié à une cathode de potentiel élevé.
Le nombre des différentes piles au lithium est important, car les recherches de
cathodes adaptées à l’obtention de bonnes performances a conduit à examiner
beaucoup de matériaux. Cette variété des matériaux de cathodes s’explique par
la possibilité d’étudier des combinaisons de plusieurs éléments : oxydes ou sul-
fures de métaux de transition, halogénures, oxyhalogénures, carbones, certains
composés organiques, etc. Ces piles, qui ont une cathode soit solide (Li/CuO, Li/
MnO2, Li/CFx, etc.), soit liquide (Li/SOCl2, Li/SO2, etc.), et peuvent comporter un
électrolyte solide dans certains cas, n’ont pas toutes abouti à des fabrications
industrielles importantes.
L’utilisation de ces piles est sans cesse croissant, notamment dans les applica-
tions portables ou portatives, pour lesquelles la compacité de la source d’éner-
gie est un point crucial.
Seules les piles qui ont fait l’objet de fabrications industrielles significatives
seront examinées en détail dans ce texte.
L’étude complète du sujet comprend les articles :
— D 3 320 – Piles électriques. Présentation générale ;
— D 3 321 – Piles électriques. Piles au zinc ;
— D 3 322 – Piles électriques. Piles au lithium (le présent article) ;
— D 3 323 – Piles électriques. Piles activables ;
— Doc. D 3 325 – Piles électriques. Pour en savoir plus.

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PILES ÉLECTRIQUES ____________________________________________________________________________________________________________________

1. Présentation générale L’inconvénient majeur des piles au lithium apparaît lors de leur
fabrication. La réactivité du lithium vis-à-vis de l’eau, de l’oxygène
en présence d’eau, de l’azote en présence d’eau est telle qu’il est
nécessaire de les fabriquer dans des conditions adaptées afin
d’obtenir les performances voulues. Notamment, leur fabrication en
1.1 Généralités salle sèche est une quasi-obligation, ce qui conduit à des investisse-
ments très supérieurs à ceux effectués pour les piles classiques. La
réduction de leur coût de fabrication ne pourra donc être effective
Dans les travaux menés pour améliorer les sources d’énergie
que si ces mêmes fabrications atteignent des volumes suffisants
électrochimiques, les chercheurs et les ingénieurs ont étudié la plu-
pour amortir les investissements supérieurs liés à la mise en œuvre
part des éléments et compositions des éléments disponibles [11]. La
de ces nouveaux systèmes.
recherche d’énergies massiques et/ou volumiques importantes est
directement liée à l’étude et la sélection des matériaux actifs d’élec-
trode, par le choix de ceux qui permettent de fortes capacités mas-
siques aussi bien qu’un potentiel le plus bas possible pour les maté- 1.2 Réaction de décharge de l’électrode
riaux d’anode et le plus haut possible pour les matériaux de
cathode. de lithium
Sur le plan idéal, il faudrait prendre le lithium qui a le potentiel le
plus négatif et la plus forte capacité massique des matériaux Dans tous les systèmes comportant une anode de lithium, la réac-
d’anode solides d’une part et le fluor qui a le potentiel le plus élevé tion de décharge est :
et la capacité massique des matériaux de cathode la plus importante
(+ 2,87 V/ENH et 1 410,65 Ah/kg). S’il était possible de faire fonction- Li → Li+ + e− (1)
ner une telle pile, l’élément aurait une tension de 5,91 V environ,
alors que l’énergie massique théorique serait alors de 6 106 Wh/kg. Cette réaction correspond à l’oxydation du lithium métallique en
L’énergie massique pratique pourrait atteindre 1 500 Wh/kg à ions lithium, qui passent en solution dans l’électrolyte et sont trans-
2 000 Wh/kg. Malheureusement, l’utilisation (ainsi que la manipula- portés vers la cathode dans laquelle la combinaison matériau de
tion) du fluor est difficile et dangereuse, et relève de technologies cathode-ions lithium et électrons (ayant traversé le circuit extérieur
sophistiquées, alors qu’au plan électrochimique les fluorures sont dans lequel leur énergie a été utilisée) donne des produits de réac-
généralement bloquants du fait de la formation de couches très iso- tion.
lantes, ionique et électronique.
La recherche de capacités massiques importantes pour les maté-
riaux d’anode a donc tout naturellement conduit les scientifiques à 1.3 Différents couples de piles fabriquées
sélectionner le lithium, matériau solide à la température ambiante
(température de fusion : 180,5 ˚C). Ce métal alcalin est le plus élec-
tropositif et a, de ce fait, un potentiel d’électrode parmi les plus La variété des piles au lithium est grande ; les différents couples
négatifs. électrochimiques primaires qui ont été ou sont encore fabriqués
À température ambiante, les principales caractéristiques du sont les suivants :
lithium sont : — Li/CFx ;
— potentiel d’électrode (calculé sur la base d’une enthalpie libre — Li/SO2 ;
de − 293 750 J/mol à 25 ˚C [5]) ..................................... − 3,045 V/ENH ; — Li/SOCl2 et Li/SO2Cl2 ;
— capacité massique .............................................. 3 861,67 Ah/kg ; — Li/Ag2CrO4 et Li/AgCl ;
— capacité volumique ......................................... 2 062,13 Ah/dm3 ; — Li/CuO, Li/CuS et Li/Cu4O(PO4)2 ;
— masse volumique .................................................... 0,534 g/cm3 ; — Li/MnO2 ;
— capacité thermique massique .................. 3,57 J/g (0,852 cal/g) ; — Li/FeS2 et Li/FeS ;
— résistivité à 20 ˚C ..................................................... 9,35 µΩ · cm. — Li/V2O5 ;
Le potentiel très négatif du lithium lui conférant une réactivité éle- — Li/I2.
vée, il a été nécessaire d’étudier des électrolytes capables de sup- D’autres ont simplement fait l’objet de travaux de base :
porter ces potentiels très bas sans présenter de réaction de
réduction notable, au moins cinétiquement. Les travaux sur les élec- — Li-BrF3 ;
trolytes utilisables avec le lithium ont ainsi commencés au début — Li-Bi2Pb2O5 et Li-Bi2O5 ;
des années 1960, alors que les premières piles au lithium étaient — Li-CrOx ;
commercialisées au début des années 1970, tout d’abord dans cer- — Li-H2O et Li-H2O2 ;
taines applications militaires, puis civiles ensuite.
— Li-PbI2 et Li-PbS.
Depuis le début des travaux, les progrès ont été très importants.
Des piles de plusieurs dizaines de milliampères-heures (piles bou- La classification des piles au lithium peut être faite selon la nature
ton pour les montres et calculatrices par exemple) à la dizaine de des matériaux de cathode, en distinguant, par exemple, les piles à
milliers d’ampères-heures (source d’énergie de secours dans certai- cathode solide des piles à cathode liquide (ou soluble) ; il existe éga-
nes applications militaires) ont été réalisées et utilisées. lement des piles à électrolyte solide telles que les piles lithium-iode
utilisées dans les stimulateurs cardiaques (Li-I2), ainsi que d’autres
Les avantages des piles au lithium sont d’avoir une énergie mas- versions comportant une cathode de composé au plomb (PbI2, PbS
sique bien plus élevée que les piles classiques à anode de zinc, mais [8]).
aussi d’avoir un potentiel d’élément généralement plus élevé
(réduction du nombre d’élément dans les packs pour les tensions
élevées), une plage de température de fonctionnement qui peut être
plus grande (les piles lithium-chlorure de thionyle peuvent fonction- 1.4 Piles à cathode liquide
ner jusqu’à − 40 ˚C) et une aptitude au stockage bien meilleure (très
faible autodécharge ; pour les piles lithium-oxyde de cuivre, la perte
de capacité réellement mesurée est de l’ordre du pour-cent sur une Le fonctionnement vient de la particularité du lithium (très réactif)
période de dix ans). à se recouvrir d’une couche de passivation par réaction directe avec

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la cathode liquide, lors du remplissage de la pile avec la solution teur électrochimique, de tension en circuit ouvert proche de 3 V,
électrolytique comportant donc le matériau de cathode. La mise en était déjà cité dès le milieu des années 1960 [13] ; elles permettaient
contact direct de l’anode et de la cathode dans une pile doit en prin- des courants importants et conduisaient donc à des piles de forte
cipe conduire à une autodécharge complète de celle-ci. Cependant, puissance massique : la très bonne conductivité des milieux dioxyde
dans le cas présent, la formation d’une fine couche de passivation de soufre – acétonitrile – sels alcalins (de l’ordre de 5 · 10−2 S/cm à
conductrice ionique non conductrice électronique permet, d’une 20 ˚C avec LiBr), même à 0 ˚C, fait que ces piles autorisent des fonc-
part, d’arrêter l’autodécharge et, d’autre part, d’effectuer la décharge tionnements à basse température tout en fournissant de bonnes
de la pile lors d’une utilisation du fait de sa conductivité ionique. La performances (perte de capacité de 25 % à 50 % selon le format et la
cathode liquide sert par ailleurs de solvant de l’électrolyte, qui est structure interne de la pile, à − 30 ˚C par rapport à la température de
généralement du tétrachloroaluminate de lithium LiAlCl4 dans le cas 20 ˚C) [14]. Si la puissance massique de ces piles dans une concep-
de la pile au chlorure de thionyle (Li-SOCl2) ou du bromure de tion classique est de l’ordre de la centaine de watts par kilogramme,
lithium LiBr dans le cas de la pile lithium-dioxyde de soufre (Li-SO2). des piles de forte puissance massique (460 W/kg) ont en effet pu être
réalisées [15] ; leur énergie massique est alors réduite à une cen-
taine de wattheures par kilogramme.

1.5 Piles à cathode solide Les premiers brevets décrivant ce type de pile sont américains et
datent de 1969 et 1971 [9].
La cathode de cette pile est composée d’un collecteur métallique
Leur fonctionnement est plus classique en ce sens qu’il comporte sur lequel est empâté un mélange de poudre de carbone et de liant
un solvant d’électrolyte de type organique, ou mélange de solvants afin de former une structure poreuse carbonée pouvant accueillir les
organiques (carbonate de propylène, carbonate d’éthylène, dimé- produits de la réaction de décharge. Dans la pile Li/SO2, le dioxyde
thoxyéthane, gamma-butyrolactone, etc.) dans lequel est dissous un de soufre est réduit en dithionite de lithium, peu soluble dans le
sel de lithium : LiBF4, LiAsF6, LiPF6, LiClO4, etc. milieu liquide utilisé, qui précipite dans la porosité de cette
électrode ; l’oxydation de l’anode de lithium métallique pendant la
décharge de la pile fournit les ions lithium qui forment le produit de
réaction cité.
1.6 Contraintes de sécurité
L’inconvénient majeur de ce type de pile est que leur décharge for-
cée jusqu’en surdécharge, lors d’une inversion par exemple (cas
La mise au point de piles, toujours plus performantes (plus pouvant se produire lorsque plusieurs piles sont en série), peut
d’énergie dans un volume et/ou une masse donnés) conduit inéluc- conduire à la formation de cyanures de lithium. Ce type de pile doit
tablement à prendre en compte les aspects concernant la sécurité de faire l’objet d’un stockage ou d’un recyclage spécifique.
l’utilisation de ces piles. La libération intempestive de toute l’énergie Le transport de ces piles a fait l’objet d’un contrôle très strict de la
contenue peut en effet conduire à des effets dangereux : éclate- part du département des Transports aux États-Unis.
ments, projections de produits chimiques éventuellement très
chauds et agressifs, voire à des explosions dont l’importance sera
d’autant plus grande que la pile aura un volume et/ou une masse
élevés (plus de matières réactives). 2.2 Constituants
Afin de limiter les risques éventuels, les fabricants de piles met-
tent en œuvre des dispositifs permettant de réduire certains
risques : opercule de dépressurisation (pour éviter l’éclatement La masse positive, qui ne comporte donc pas le produit cathodi-
notamment), conception de faible puissance et/ou ajout d’un fusible que, est constituée d’une pâte de carbone, généralement du Shawi-
réversible ou non (pour éviter les régimes trop élevés), diode (pour nagan black, lié à l’aide d’un matériau polymère (généralement du
éviter une recharge accidentelle), etc. PTFE (polytétrafluoroéthylène)). Ce carbone est choisi pour sa struc-
ture apte à accueillir les produits de réaction formés, essentielle-
Il est par conséquent absolument déconseillé d’ôter ces systèmes ment le dithionite de lithium ; sa porosité peut atteindre plus de
de sécurité et fortement recommandé de suivre les instructions du 75 %. Sa structure est réalisée de telle façon que le volume dispo-
fabricant quant aux conditions d’utilisation. nible pour les produits de réaction soit au moins égal à celui qui est
Cependant, tous les dispositifs mis en œuvre ne couvrent pas la nécessaire pour une réaction complète de la quantité de dioxyde de
totalité des cas dans lesquels des risques peuvent apparaître ; par soufre présent ou de la quantité de lithium métallique présent, sui-
exemple, les contraintes physiques extérieures : la mise au feu acci- vant la conception utilisée pour la pile. Les épaisseurs courantes de
dentelle ou l’incinération, l’écrasement, la perforation et l’ouverture, ces électrodes positives sont de l’ordre de la centaine de micron-
que ce soit dans des conditions accidentelles ou par action volon- mètres ou plus.
taire. La construction limitée par l’anode permet d’éviter, si la pile
passait en inversion, que du lithium métallique ne se dépose sur la
cathode et conduise à une mise en court-circuit de l’élément avec
les risques associés au plan de la sécurité ; cependant, la conception
2. Piles lithium-dioxyde limitée par la quantité de dioxyde de soufre est apparue la meilleure
aux plans de la sécurité d’utilisation et du coût [9] pendant un
de soufre temps, avant que l’on s’aperçoive que, dans certaines conditions de
décharge, ces piles pouvaient devenir dangereuses. Les fabricants
sont alors revenus à la conception équilibrée dans laquelle le
rapport molaire lithium sur dioxyde de soufre est égal à l’unité.
2.1 Généralités La matière active cathodique est constituée par le dioxyde de sou-
fre (SO2) qui, associé à l’acétonitrile, sert en même temps de solvant
Les piles lithium-dioxyde de soufre (Li/SO2) font partie des piles à de l’électrolyte.
cathode liquide ; le dioxyde de soufre est en effet liquide sous de fai- La masse active anodique est constituée d’un feuillard de lithium
bles pressions (quelques bars à la température ambiante) et est métallique d’environ 50 µm utilisé tel quel, ou plaqué sur un micro-
mélangé à de l’acétonitrile pour pouvoir dissoudre, en quantité suf- déployé métallique servant de collecteur électronique. La réaction
fisante, le bromure de lithium qui servira d’électrolyte. Ce généra- directe du lithium avec le SO2 lors du remplissage conduit à la

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formation d’une couche passive de dithionite de lithium qui Cette réaction conduit à la formation de dithionite de lithium qui
empêche toute progression de l’autodécharge de la pile ainsi réa- précipite dans la structure poreuse de la masse cathodique, en rem-
lisée [16]. Dans le cas des piles développées pour la fourniture de plissant petit à petit sa porosité.
puissances élevées, l’épaisseur du lithium est alors réduite à envi- Cette réaction globale est la résultante de deux réactions
ron 20 µm. électrochimiques :
Le milieu électrolytique utilise le dioxyde de soufre comme sol- — la réaction d’oxydation à l’anode, et passage en solution des
vant (qui est également le composé cathodique). Cependant, la ions lithium formés (réaction (1)) ;
mauvaise solubilité du bromure de lithium dans le dioxyde de sou- — la réaction électrochimique de réduction à la cathode [18] :
fre a conduit à l’ajout d’acétonitrile et parfois également de carbo-
nate de propylène (de 20 à 40 % en masse). L’ajout de ces cosolvants 2 SO 2 + 2 e – → S 2 O 42– (3)
assure qu’une concentration suffisante du sel soit atteinte (généra-
lement à partir de 1 M) ainsi qu’une conductivité ionique élevée ; la qui est suivie par une réaction de précipitation du dithionite de
variation de la conductivité ionique avec la température est lithium dans le poreux de carbone de l’électrode positive :
d’ailleurs relativement faible (baisse d’environ 30 % seulement
entre + 25 ˚C et − 25 ˚C). Du fait de l’utilisation de SO2 gazeux dans 2 Li + + S 2 O 42– → Li 2 S 2 O 4 (4)
les conditions normales de température et de pression, la pile doit
L’examen de ces deux réactions électrochimiques montre que la
être hermétique car la pression interne atteinte est de l’ordre de
pile ne consomme pas les ions de l’électrolyte ; il y a un simple
quelques bars à 25 ˚C. Ce type de pile n’est cependant pas utilisable
transfert d’ions lithium de l’anode vers la cathode où précipite le sel
aisément lorsque la température dépasse 60 ˚C, car la pression
de dithionite de lithium formé.
interne dépasse alors la dizaine de bars et un conteneur approprié
doit être utilisé pour assurer des conditions de sécurité acceptable
par l’utilisateur.
Le solvant de l’électrolyte (SO2) est consommé pendant la 2.4 Caractéristiques
décharge et l’optimisation des quantités des deux solvants, ainsi
que de la concentration en sel, doit être effectuée judicieusement
pour l’application envisagée. La tension des piles lithium-dioxyde de soufre, mesurée en circuit
ouvert, a une valeur entre 2,91 [9] et 3,1 V [8]. Nous pouvons
Le séparateur, comme dans la plupart des piles au lithium, est déduire de ces valeurs une variation d’enthalpie libre de − 561,54
constitué d’un film de polypropylène microporeux ou d’un non-tissé à − 598,2 kJ au moins, suivant la réaction que l’on considère.
de fibres de verre, lesquels allient solidité et résistance à la perfora- Les réactions que nous avons écrites (§ 2.3) permettent de calcu-
tion ainsi qu’une porosité suffisante pour accueillir l’électrolyte ler la capacité massique théorique correspondante. Nous avons
nécessaire au fonctionnement de la pile. reporté dans le tableau 1 cette capacité massique théorique, la ten-
Comme toutes les piles au lithium, les piles lithium-dioxyde de sion de couple calculée et l’énergie massique théorique déduite.
soufre comportent un opercule qui permet de satisfaire les contrain- (0)
tes de sécurité d’utilisation. Tout accroissement de pression due à
une montée intempestive en température liée, par exemple, à un
court-circuit, à un courant de décharge trop important ou à tout Tableau 1 – Caractéristiques des piles Li/SO2
autre événement de type mécanique ou électrique, conduit à une
ouverture et à une dépressurisation de la pile. Lors d’un tel événe- Capacité
Caractéristique Tension Énergie massique
ment, la dépressurisation conduit d’ailleurs à un départ de dioxyde massique
de soufre sous forme gazeuse et, par voie de conséquence, à un
refroidissement de la pile ; cependant, cette dépressurisation évite (Ah/kg) (V) (Wh/kg)
les phénomènes de type éclatement ou explosion, qui peuvent
détruire les appareillages environnants et éventuellement être à 377,5 2,91 1 098
Théorie
l’origine d’un départ de feu. 3,1 1 170
La pile est généralement assemblée en module cylindrique 2,91 vco (1) 180 à 310
(§ 3.25) et comporte des électrodes spiralées, ainsi qu’une traversée Pratique
verre-métal, technique permettant d’assurer la tenue dans le temps 2,9 à 2,6 Suivant les régimes
de ces piles. La traversée verre-métal peut comporter un petit tube de décharge utilisés
métallique central ([D 3 320], figure 6) qui permettra le remplissage (1) vco tension en circuit ouvert
en électrolyte ainsi que la fermeture définitive de la pile en l’absence
d’humidité (en salle sèche, par exemple). Le verre utilisé pour la
jonction verre-métal doit avoir une composition précisément ajus-
tée afin d’assurer sa fonction correctement sur la durée de vie de la Dans la pratique, en moyenne, l’énergie massique des piles
pile (corrosion réduite), de même que le coefficient de température lithium-dioxyde de soufre est d’environ 250 Wh/kg (valeurs
du verre utilisé doit être adapté à ceux des métaux de part et d’autre recueillies entre 180 à 310 Wh/kg suivant les constructions utilisées)
pour éviter les contraintes mécaniques pouvant conduire à des fui- pour 405 Wh/dm3 (valeurs recueillies entre 280 à 490 Wh/dm3 sui-
tes (Sandia National Laboratories [17]). vant les constructions utilisées), c’est-à-dire une masse volumique
moyenne pour ce type de pile de 1,6 g/cm3.
La particularité de ces piles est d’avoir une très bonne stabilité de
la tension, même à des courants de décharge élevés, ainsi qu’une
2.3 Réaction globale de décharge large gamme de courants de décharge possible (figure 1).
Leur autodécharge est faible du fait de la formation d’une couche
de passivation à la surface du lithium en stockage ; à + 20 ˚C cette
La réaction globale qui est généralement acceptée [15] pour la perte de capacité est de l’ordre de 1 % par an. Comme dans le cas de
décharge de cette pile peut s’écrire de la façon suivante : toutes les piles au lithium à cathode liquide, le film de passivation
cité peut conduire à un phénomène d’« effet retard » à l’établisse-
2 Li + 2 SO2 → Li2S2O4 (2) ment de la tension ; son épaisseur croît en effet avec la température

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nure dont de nombreuses variantes ont été imaginées et étudiées


[30] [31] [32], les principales étant, dans l’ordre : SOCl2 (chlorure de
3
Tension (V)

thionyle), SO2Cl2 (chlorure de sulfuryle), POCl3 (oxytrichlorure de


phosphore), BrCl3, BrF3, etc. Seuls les deux premiers couples ont fait
2,8 l’objet de réalisations pratiques nombreuses et seul le premier a
2 070 mA conduit à des productions industrielles importantes qui se poursui-
2,6 vent actuellement.
4 230 mA
Leur particularité est que le composé actif utilisé à la cathode est
2,4

6 mA
240 mA
720 mA

3,8 mA
un liquide qui joue en même temps le rôle de solvant de l’électro-

38 mA
lyte. Cette particularité conduit bien sûr, lors de la réalisation de la

0,76
2,2 pile, et plus précisément lors de l’introduction de la solution électro-
lytique, à un premier état de court-circuit interne puisque ce com-
2 posé actif se retrouve en contact direct avec la matière active de
l’anode : le lithium, très réducteur. Ce court-circuit n’est cependant
1,8 pas de longue durée puisque la réaction spontanée entre le lithium
0,1 1 10 100 1 000 10 000 et le chlorure de thionyle conduit à la formation d’une couche cons-
Temps de décharge (h) tituée principalement de chlorure de lithium, qui est suffisamment
isolante pour séparer alors le milieu liquide cathodique de l’anode,
empêchant une progression rapide de l’autodécharge résultant de
Figure 1 – Courbes de décharge d’une pile Li/SO2, d’après [14] ce court-circuit interne (perte de capacité de la pile).
Ce comportement a été découvert un peu par hasard vers la fin
des années 1960 [19] [20] [21] lorsque les scientifiques recherchaient
et le temps de stockage, créant une résistance interne d’autant plus des solvants utilisables pour la réalisation de systèmes à anode de
grande que l’épaisseur du film formé est importante. Ce retard peut lithium, qui soient réversibles. L’utilisation de ce composé a notam-
être éliminé en effectuant une prédécharge à fort courant qui, ment conduit à des durées de décharge bien supérieures à celles qui
comme dans le cas des piles lithium-chlorure de thionyle, rompt le étaient attendues avec les matériaux mis en œuvre dans la cathode,
film formé et permet alors une décharge dans des conditions nor- et leur intervention dans la réaction de décharge a été identifiée. De
males. nombreuses études de base avaient cependant déjà été faites con-
cernant le chlorure de thionyle en tant que produit chimique et ses
propriétés avaient été déterminées, notamment l’étude de la disso-
ciation ionique de sels mis en solution par les auteurs H. Spandau &
2.5 Formats E. Brunneck dans les années 1950 [19]. Au plan pratique, le chlorure
de thionyle est, entre − 105 ˚C et + 75 ˚C, un liquide transparent qui
peut présenter une teinte jaune lorsqu’il contient du chlore dissous.
Les piles lithium-dioxyde de soufre ne sont fabriquées qu’en for-
Il a une masse volumique de 1,655 g/cm3, une capacité massique de
mat cylindrique à électrodes spiralées, particulièrement dans les for-
451 Ah/kg et une capacité volumique de 746 Ah/dm3 (lors de la
mats courants : R6, R14, R20.
réduction de la totalité des atomes de chlore contenus) ; sa viscosité
Cette chimie a également été utilisée pour développer des piles à 25 ˚C est de 0,603 mPa · s (0,603 cP) [22]. La découverte de son rôle
amorçables ([D 3 320], § 5) chez certains fabricants comme dans la réaction de décharge a ouvert de nouvelles voies pour la
Honeywell Incorporated aux États-Unis et Tadiran en Israël. mise au point de piles aux performances étonnantes. La large plage
de l’état liquide du chlorure de thionyle permet en outre un fonction-
nement de cette pile jusqu’à de très basses températures, − 40 ˚C
2.6 Applications par exemple.

Les applications sont surtout militaires car les conditions de sécu-


rité d’utilisation sont assez sévères et apparaissent trop contrai- 3.2 Réactions aux électrodes, réaction
gnantes à l’utilisateur civil. Cependant, l’évolution des conditions globale de décharge
d’utilisation de toutes les piles et accumulateurs ces dernières
années font qu’un regain d’intérêt pour cette technologie peut se
justifier pour certaines applications dans lesquelles les conditions Les réactions électrochimiques qui se produisent dans cette pile
d’utilisations sont strictes. conduisent à une réaction entre le lithium métallique et le chlorure
Les applications militaires concernent les radiocommunications, de thionyle pour former du soufre, du dioxyde de soufre et du chlo-
les systèmes d’observation de nuit, les détecteurs, les équipements rure de lithium. L’électrode de lithium métallique comporte un col-
électroniques portables, les systèmes de surveillance, les bouées lecteur, qui peut être du nickel ou de l’acier inoxydable, sur lequel
actives et certains missiles. il est plaqué. Lors de la décharge, le lithium est oxydé progressive-
ment et les ions lithium formés passent en solution. À l’électrode
positive, constituée d’un collecteur comportant une composition
carbonée poreuse, les ions chlore issus de la réaction de réduction
3. Piles lithium-chlorure forment, avec les ions lithium de la solution, du chlorure de lithium
insoluble dans le chlorure de thionyle. Celui-ci se dépose dans la
de thionyle porosité de cette électrode, alors que le soufre et le dioxyde de sou-
fre formés sont solubles dans l’électrolyte.
Pour chaque réaction électrochimique se produisant à chaque
électrode, les caractéristiques théoriques correspondantes sont
3.1 Généralités calculées.
À l’anode se produit une oxydation du lithium selon la réaction (1)
Les piles lithium-chlorure de thionyle (Li/SOCl2) font partie de la soit, pour un atome-gramme, une capacité massique de 13 903 C/g
catégorie des piles à cathode liquide, celle-ci étant un oxyhalogé- de lithium (ou encore 3,862 Ah/g ou 2,062 Ah/cm3).

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À la cathode, la réaction globale est la suivante : En ce qui concerne les densités des matières actives, nous avons
pour le lithium et le chlorure de thionyle une masse volumique res-
2 SOCl2 + 4 e− → S + SO2 + 4 Cl− (5) pectivement de 0,534 g/cm3 et 1,655 g/cm3, ce qui conduit à une
énergie volumique théorique par rapport aux matières actives de
soit, pour une mole de chlorure de thionyle, une capacité massique
de 1 622 C/g (ou encore 0,451 Ah/g ou 0,746 Ah/cm3 de matières 7 157 kJ/dm3 (ou encore 1 988 Wh/dm3 selon les unités utilisées
actives). Des études de catalyse de cette réaction de réduction du dans le domaine des batteries).
chlorure de thionyle ont également été effectuées afin d’améliorer le
potentiel de décharge de la pile ; notamment, des composés de type
phtalocyanine métallés [23] ont été utilisées (Fe, Co, Mn) ainsi que
des ligands métallés fixés sur des supports carbonés. 3.5 Chimie du système
La réaction globale de décharge de la pile est obtenue en combi-
nant les deux réactions électrochimiques ce qui conduit à :
4 Li + 2 SOCl2 (liquide) → S + SO2 (gaz) + 4 LiCl (précipité) (6) Le chlorure de thionyle (SOCl2) présente la particularité d’avoir
des atomes de chlore très labiles et donc facilement réductibles ;
soit une capacité massique théorique globale pour la réaction de cela explique son potentiel de réduction élevé : 0,65 V/ENH, mais
décharge de 1 453 C/g (ou encore 0,404 Ah/g de matières actives ou cependant plus bas que celui du chlore à 1,36 V/ENH [8]. Lors de la
0,548 Ah/cm3 de matières actives), correspondant à la production de réaction de réduction, les atomes de chlore sont réduits en ions
quatre faradays. chlorures libérant le radical monoxyde de soufre ; celui-ci se dis-
■ Une variante de ce couple électrochimique a été étudiée, en rem- mute au sein de l’électrode poreuse, lieu de la réduction, et conduit
plaçant le chlorure de thionyle par le chlorure de sulfuryle. Le à la formation de soufre et de dioxyde de soufre dans le milieu.
fonctionnement et le comportement sont très semblables et la réac-
tion globale de décharge à la cathode s’écrit alors : Lors de la fabrication de la pile, dès l’entrée en contact du chlorure
de thionyle avec le lithium, il y a formation d’une couche de chlorure
SO2Cl2 + 2 e− → SO2 + 2 Cl− (7) de lithium qui passive le lithium. De nombreux scientifiques l’ont
étudiée et appelée interface d’électrolyte solide (SEI dans la littéra-
La simplicité de cette réaction suggère une réversibilité possible ture anglaise ; [17]).
de ce système qui a parfois été envisagée. Cependant, l’agressivité
des milieux mis en jeu conduit à la corrosion des matériaux utilisés L’inconvénient majeur que comporte ce système est souvent lié
comme collecteurs, godet et/ou connections. Une évolution dans le aux conditions de stockage et à la composition de la solution
domaine des matériaux pourrait redonner de l’intérêt aux travaux électrolytique ; si celles-ci ne sont en effet pas adaptées, la réaction
sur ce couple dans une version réversible. Le potentiel de cette réac- de formation de la couche de passivation progresse et conduit
tion est de 100 à 200 mV au-dessus de celle du chlorure de thionyle,
immanquablement à ce qui est appelé le Delay effect ou effet retard
soit une tension pour le couple Li/SO2Cl2 d’environ 3,75 V ou un
à l’établissement de la tension. La présence d’une couche de passi-
peu plus.
vation trop épaisse introduit une résistance série élevée qui, lors de
la mise en service de la pile conduit à un effondrement de la tension.
Cet effondrement est soit définitif et la pile est alors inutilisable si le
3.3 Potentiel courant débité est trop fort, ou bien, si la couche n’était pas suffi-
samment épaisse, elle se fissure sous les contraintes de la décharge
et la pile récupère progressivement ses caractéristiques de départ.
Le potentiel thermodynamique de cette pile peut être calculé en De nombreux travaux assez récents ont été réalisés pour maîtriser
utilisant la variation d’enthalpie libre due à la réaction globale de ce phénomène par l’ajout d’additifs dans la solution [41] ou par
décharge. L’enthalpie libre de formation du lithium à l’état métalli- modification de sa viscosité en réduisant par exemple sa concen-
que est nulle (état standard du matériau), de même pour le soufre ; tration [16], permettant de supprimer, ou plutôt de contrôler cette
par contre les enthalpies libres de formation à 25 ˚C du chlorure de passivation pour qu’elle ne soit pas irrémédiable ; d’autres men-
thionyle, du dioxyde de soufre (à l’état gazeux) et du chlorure de tionnent des voies physiques, chocs notamment.
lithium, sont respectivement de − 216,4 de − 300,15 et de − 384,4 kJ/
mol ; ces valeurs permettent de calculer une tension thermodynami- Parallèlement, la réactivité du lithium entame aussi la capacité
que de 3,64 V pour la pile. En utilisant en effet l’équation reliant les disponible lors de son utilisation, notamment lors d’un stockage
enthalpies libres au potentiel thermodynamique nous avons : prolongé. Cependant, comme toutes les piles au lithium, la perte de
∆Gr = − nFE = − 1 401 000 J capacité en cyclage est très modérée ; elle va de quelques pour-cent
à la dizaine de pour-cent sur une période de stockage d’une dizaine
Or, dans l’équation de la réaction de décharge n = 4 (nombre d’années à la température ambiante à plus de cinquante pour-cent à
d’électrons) et le faraday F = 96 484,5 C, ce qui conduit bien à une la tem-pérature de 80 ˚C (cf. site Internet de Wilson Greatbatch
tension thermodynamique de 3,64 V pour la cellule élémentaire. [Doc. D 3 325]).
Dans le cas du lithium-chlorure de sulfuryle, nous arrivons à une
variation d’énergie libre de ∆Gr = − 755 200 J, ce qui correspond à À la très grande réactivité du lithium, qui conduit à la formation de
une tension maximale de 3,91 V. cette couche de passivation protectrice, est associée la sensibilité à
l’eau du chlorure de thionyle utilisé comme matériau liquide
cathodique ; celui-ci réagit en effet avec elle pour former de l’acide
chlorhydrique et du dioxyde de soufre selon la réaction :
3.4 Énergie
SOCl2 + H2O → 2 HCl + SO2 (8)
Potentiellement, au niveau des matières actives uniquement,
nous pouvons calculer l’énergie massique théorique dont nous dis- La formation d’acide chlorhydrique a un effet néfaste et provoque
posons qui est de 5 273 kJ/kg (ou encore 1 470 Wh/kg en effectuant des réactions de corrosion des parties métalliques internes. D’autres
le produit de la capacité massique théorique en ampère-heure (cal- réactions parasites peuvent également avoir lieu, par exemple entre
culée § 3.2) par la tension du couple en volt). l’eau et l’anion tétrachloroaluminate du sel utilisé dans la pile.

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3.6 Cellule ou pile

Ce type de pile a été développé dans de nombreuses technolo-


gies. Les plus courantes sont les deux technologies de pile cylindri-
ques.

Les piles de structure dite bobine (figure 2 a) comportent en fait


deux électrodes concentriques épaisses, l’une de lithium générale-
ment placée au centre et la seconde d’une composition carbonée
poreuse à la périphérie, isolées par un séparateur en forme de
godet. Cette structure est généralement utilisée pour obtenir de for-
tes énergies massiques.

Les piles de structure dite spiralée (figure 2 b) comportent deux


électrodes planes rectangulaires fines dont la largeur devra loger
dans la hauteur du godet et dont la longueur est telle que, une fois
enroulées sur elles-mêmes, elles constituent un cylindre dont le dia-
mètre permet son introduction dans le godet prévu à cet effet. Cette
structure est généralement utilisée pour obtenir des puissances
continues plus importantes ; les collecteurs ont en effet une surface
développée bien supérieure dans ce cas et permettent de mieux a pile bobine b pile spiralée
drainer les charges au sein des matières actives (meilleure accessi-
bilité des sites réactifs). Lithium (anode)
Séparateur
À titre indicatif, le tableau 2 donne un exemple de caractéristi- Masse carbonée (cathode)
ques obtenues dans des conditions similaires pour les deux formats
cylindriques C et D (ou R14 et R20) de piles fabriquées par la SAFT.

(0) Figure 2 – Piles Li/SOCl2

Tableau 2 – Caractéristiques des piles Li/SOCl2


(0)

Énergie massique Énergie volumique


Type de pile Tableau 3 – Coefficients d’utilisation des piles Li/SOCl2
(Wh/kg) (Wh/dm3)

Format cylindrique Bobine Spiralée Bobine Spiralée Énergie Énergie


Caractéristiques massique volumique
– C (R14) ................... 530 345 950 710 (Wh/kg) (Wh/dm3)
– D (R20) ................... 675 475 1 105 870
Performances théoriques ............. 1 470 1 988
Autres géométries :
Performances pratiques ............... 350 à 700 700 à 1 100
– prismatique 600 1 100
grosse capacité Coefficient d’utilisation................. 0,25 à 0,5 0,35 à 0,55
[15] ............................
– amorçable [15] ...... 200 320
La détermination de ce coefficient d’utilisation permet d’évaluer
ce que l’on peut attendre de l’utilisation de ce type de générateur,
tout en ayant pu apprécier les avantages et les inconvénients posés
En comparant les deux technologies bobine et spiralée (premier par cette « chimie ». Nous voyons que les hautes densités d’énergie
tableau ci-dessus), nous remarquons une diminution d’environ 30 à sont obtenues pour des générateurs conçus pour fournir peu de
35 % de l’énergie massique lorsque l’on passe de la première à la puissance, alors que les densités d’énergie les plus faibles sont
seconde technologie, alors qu’elle est de 20 et 25 % dans le cas de obtenues lorsque les générateurs sont conçus pour délivrer de la
l’énergie volumique. Ces résultats sont dus à l’utilisation d’une sur- puissance.
face de collecteur plus importante dans le second cas, afin de pou-
voir fournir les puissances recherchées par l’utilisateur ; cette Les autres technologies qui ont été étudiées sont celles des piles
surface plus grande de collecteur oblige en effet à réduire la quan- amorçables, utilisées la plupart du temps dans des applications pro-
tité de matière active présente dans la pile pour un volume donné, fessionnelles ou militaires. Ce type de pile permet en effet de très
et conduisent par conséquent à une masse et un volume des parties longs temps de conservation (qui peuvent dépasser la dizaine
non actives supérieurs. d’années). Dans cette conception, l’électrolyte est localisé dans un
réservoir, en dehors de l’empilement d’électrodes du cœur de la pile
Si nous effectuons une comparaison des possibilités théoriques et n’est injecté entre les électrodes, par un déclenchement com-
de ce type de pile avec les performances atteintes au plan pratique, mandé, que lorsque l’utilisateur a besoin de l’énergie qui y est stoc-
nous pouvons dégager des coefficients d’utilisation qui caractérise- kée. Cette conception conduit de ce fait à une perte de densité
ront ce couple électrochimique. Ces coefficients sont repris dans le d’énergie (elle peut descendre vers 300 à 400 Wh/kg), mais permet
tableau 3 synthèse des valeurs théoriques calculées (§ 3.4) et des de répondre à des besoins particuliers : lanceurs spatiaux, engins,
valeurs pratiques obtenues dans des éléments portables. missiles, torpilles, etc.

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3.7 Utilisations été établi que la structure gamma apparaît comme la structure la
plus active en milieu organique, mais les structures bêta et bêta-
gamma présentent également de l’intérêt par leurs capacités de
Les performances très élevées qu’il est possible d’obtenir avec décharge qui peuvent être supérieures pour des tensions de fin de
ces générateurs électrochimiques les rendent utiles dans de nom- décharge assez basses.
breuses applications très exigeantes, par exemple dans les applica- ● La matière active anodique est constituée par du lithium métal-
tions militaires, spatiales ou certaines applications professionnelles. lique sous la forme d’une feuille mince utilisée tel que, ou plaquée
Nous pouvons citer les applications suivantes pour lesquelles il sur un microdéployé métallique servant de collecteur électronique.
existe des piles lithium-chlorure de thionyle fabriquées à travers le Pour des productions significatives, l’assemblage des électrodes
monde : ainsi que leur mise en boîtier sont effectués en salle sèche afin d’évi-
— télécommunications par grand froid (fonctionnent jusqu’à ter une reprise d’eau, néfaste à un bon fonctionnement du système.
− 40 ˚C sans difficulté – cf. expédition polaire qui a été faite avec le Le milieu électrolytique est généralement une solution de per-
soutien de la SAFT il y a une quinzaine d’années) ; chlorate de lithium dans un mélange de solvants organiques
— lanceurs (dans les étages de propulsion) ; comme le carbonate de propylène avec le 1,2 diméthoxyéthane dont
— maintien mémoire CMOS (Complementary metal oxide la conductivité est un peu supérieure à 0,01 S/cm pour un mélange
semiconductor) ; 1:1 à la température ambiante. Cependant d’autres solvants peuvent
— instruments portables ou de contrôle. être utilisés comme la gamma-butyrolactone et le diméthylsul-
foxide, ou alors d’autres sels de lithium comme le tétrafluoroborate
de lithium LiBF4. Les solvants utilisés sont distillés sous vide afin
d’éliminer la plus grande partie de l’eau présente, alors que les sels
4. Piles lithium-dioxyde sont séchés sous vide à température élevée. La préparation des
électrolytes est effectuée soit en boîte à gants sous atmosphère con-
de manganèse trôlée, soit en salle sèche.
Le séparateur utilisé dans cette pile est un non-tissé de fibres de
polypropylène ou un film microporeux.
4.1 Généralités
4.3 Réaction globale de décharge
La pile lithium-dioxyde de manganèse (Li/MnO2) a été une des
premières piles au lithium à cathode solide à être utilisée commer-
cialement [8], dès 1976, du fait de ses caractéristiques intéressantes La réaction globale de décharge est une réaction à un seul élec-
en termes de performances, mais aussi de coût. L’oxyde de manga- tron par motif dioxyde de manganèse ; elle peut s’écrire :
nèse conduit à une pile dont la tension est de l’ordre de 3 V en circuit
ouvert, et cette tension élevée lui confère d’emblée une forte éner- Li + MnO2 → LiMnO2 (9)
gie massique, au moins le double de celle des piles alcalines.
Cette réaction, dans laquelle le métal de transition, le manganèse,
Très approximativement, à format de pile et tension équivalents
passe de l’état d’oxydation (IV) à l’état d’oxydation (III), conduit à la
(deux éléments en série pour les systèmes classiques salins et alca-
formation d’un oxyde de manganèse lithié.
lins), si les piles alcalines ont des temps de décharge environ double
de ceux obtenus avec des piles salines, les piles Li/MnO2 permettent Au plan électrochimique, cette réaction globale est la résultante
des temps de décharge au moins deux fois supérieurs à ceux des de deux réactions :
piles alcalines ; dans certaines conditions, cette supériorité peut — la réaction d’oxydation à l’anode avec passage en solution des
atteindre près de dix fois [4]. De plus, leur tension moyenne de ions lithium formés [réaction (1)] ;
décharge de l’ordre de 2,8 V est également supérieure à la tension
— la réaction électrochimique de réduction à la cathode. La réac-
moyenne de décharge des éléments conventionnels qui est de
tion d’insertion d’ions lithium dans la structure du matériau de
l’ordre de 2 x 1,2 V (deux éléments en série).
cathode s’écrit généralement :
Ce type de pile présente de bonnes caractéristiques de conserva-
tion en stockage et permet une large gamme de température d’utili- MnO2 + x e− + x Li+ → LixMnO2 (10)
sation. Il apparaît comme un remplaçant de la pile l’oxyde d’argent-
zinc, notamment dans les applications en photographie [4]. avec 0  x  1

4.2 Constituants 4.4 Caractéristiques

● La matière active cathodique est constituée par un mélange de La tension maximale des piles Li/MnO2, en circuit ouvert, peut se
dioxyde de manganèse, de noir d’acétylène et d’un polymère calculer également à l’aide de la variation d’enthalpie libre de la
comme le Téflon, l’ensemble étant comprimé pour former la réaction globale ; cependant, elle n’est pas bien identifiée. En
cathode. De nombreuses études [12] [26] [27] [28] [29] ont été réa- s’appuyant sur les valeurs mesurées de tension en circuit ouvert de
lisées afin d’identifier l’oxyde manganèse le plus actif en milieu 3,5 V [9], l’enthalpie libre de formation du composé d’intercalation
organique ; il a été notamment établi qu’un traitement thermique de du lithium dans la structure du dioxyde de manganèse aurait une
déshydratation à au moins 250 ˚C était nécessaire, si l’on voulait valeur inférieure ou égale à − 337,7 kJ, à la température ambiante.
obtenir un matériau de capacité massique élevée pour les utilisa- Les mesures effectuées sur les piles montrent que leur tension d’uti-
tions dans des piles au lithium [9]. Ce traitement thermique fait lisation est généralement de 2,7 à 2,9 V pour des régimes de
cependant décroître la tension de cellule en circuit ouvert ainsi que décharge moyens [9], et leur tension pratique en circuit ouvert un
la tension moyenne de décharge mais assure au matériau de peu au-dessus de 3 V. Dans le cas d’un dioxyde de manganèse traité
cathode une meilleure stabilité en stockage. La tension baisse thermiquement à 100 ˚C, une tension de 3,5 V a été mesurée à très
d’autant plus que la température de traitement utilisée est élevée, faible régime [28], avec cependant une réduction importante de la
mais cette variation n’est cependant que de 200 à 300 mV. Il a ainsi capacité disponible.

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Les réactions que nous avons écrites (§ 4.3) permettent de calcu- ces, le maintien mémoire (CMOS), les horloges électroniques, la
ler les énergies spécifiques théoriques. Nous avons reporté dans le télémétrie, les compteurs de chaleur, les alarmes électroniques,
tableau 4 les capacités massiques théoriques et les tensions de cou- mais aussi des applications industrielles et militaires. Dans les tech-
ple calculées, à partir des réactions et des valeurs de variation nologies permettant des puissances supérieures, les applications
d’enthalpie libre. Les énergies massiques théoriques déduites sont sont alors les lecteurs comportant des moteurs électriques, les
reportées dans la dernière colonne. flashes photo, les jouets et la petite électronique.
(0)

Tableau 4 – Caractéristiques des piles Li/MnO2


5. Piles lithium-oxyde
Caractéristique
Capacité
massique
Tension Énergie massique de cuivre
(V) (Wh/kg)
(Ah/kg)

Théorie 285,5 3,5 999


5.1 Généralités
2,9 vco (1) 135 à 330
Pratique 2,7 à 2,8 Suivant la conception
et les régimes de Inventée en France par Jean-Paul Gabano [30] et brevetée, la pile
décharge utilisés lithium-oxyde de cuivre (Li/CuO) fait partie des piles à cathode
solide ; l’oxyde de cuivre qui présente la particularité d’avoir une
(1) vco tension en circuit ouvert capacité volumique parmi les plus hautes avec 4 260 Ah/dm3 sem-
blait en effet bien adapté à la réalisation de piles à forte densité
d’énergie. Bien que sa tension en circuit ouvert soit de l’ordre de
Dans la pratique, en moyenne, l’énergie massique des piles Li/ 2,25 V, sa tension de fonctionnement n’est que d’environ 1,5 V, c’est-
MnO2 est d’environ 205 Wh/kg (valeurs recueillies entre 135 à à-dire qu’elle est de ce fait compatible avec les piles conventionnel-
330 Wh/kg suivant les constructions utilisées) pour 455 Wh/dm3 les. Cependant, l’avantage indéniable de cette pile se révèle lors
(valeurs recueillies entre 305 à 710 Wh/dm3 suivant les construc- d’une utilisation à de très faibles courants de décharge ; à ces faibles
tions utilisées), c’est-à-dire une masse volumique de 2,2 g/cm3 en régimes, l’utilisateur peut alors profiter de la forte capacité volumi-
moyenne. que du matériau cathodique.
La particularité de ces piles est d’avoir une très bonne aptitude à Cette technologie a donc tout particulièrement été étudiée et
la conservation de la charge ; leur autodécharge n’est en effet que développée en France, par la SAFT, qui est le principal fournisseur à
de l’ordre de quelques pour-cent par an [4]. Cependant, le fonction- travers le monde.
nement de cette pile en dessous de la température de − 20 ˚C con-
duit à une perte de capacité importante, mais de très faibles
courants permettent d’obtenir des capacités encore raisonnables
jusque vers − 50 ˚C. Cette pile serait cependant sensible à de très fai-
5.2 Constituants
bles courants de « recharge » accidentels ou non, qui provoque-
raient des dégâts importants sur ses caractéristiques.
La matière active cathodique est constituée par un mélange
d’oxyde de cuivre (CuO) avec du noir d’acétylène, l’ensemble étant
lié par un polymère tel que le Téflon.
4.5 Formats La matière active anodique est constituée par du lithium métalli-
que sous la forme d’une feuille mince utilisée tel que, ou plaquée sur
un microdéployé métallique servant de collecteur électronique.
Ces piles ont été fabriquées essentiellement dans des formats
Le milieu électrolytique est une solution d’un sel de lithium (le
bouton, cylindriques et prismatiques, pour des applications à faible
perchlorate de lithium) dans un solvant organique comme le dioxo-
ou moyenne puissance. Les capacités réalisées sont plutôt
lanne, le carbonate de propylène, ou un mélange de solvants orga-
modestes : de l’ordre de quelques centaines de milliampères-heures
niques comme le carbonate de propylène avec le tétrahydrofuranne.
jusqu’à la dizaine d’ampères-heures. La technologie utilisée pour les
Les conductivités obtenues dans les milieux utilisés ne sont pas très
éléments cylindriques est généralement de type bobine inversée,
élevées ; de l’ordre de 5 à 10 mS/cm à la température ambiante [9],
mais la technologie à électrodes spiralées est parfois utilisée.
mais permettent cependant une utilisation dans une gamme de tem-
Compte tenu de l’intérêt que peut présenter ce couple électrochimi-
pérature très large, avec un fonctionnement possible jusque vers
que, des prototypes de pile de plus de 100 Ah ont été réalisés dans
150 ˚C [31].
des formats prismatiques et testés pour des applications aux trans-
missions. Le séparateur utilisé est un non-tissé de fibre de verre ; le fonc-
tionnement possible à haute température ainsi que les contraintes
Bien que ces piles puissent être manipulées aisément au plan de
mécaniques importantes pouvant avoir lieu, empêchent l’utilisation
leur sécurité d’utilisation, il est fortement recommandé de ne pas
de séparateur à base de polymère.
tenter de les recharger ou de les incinérer. Certaines comportent
d’ailleurs les systèmes de sécurité (que l’on trouve dans la plupart
des piles au lithium) comme un opercule de dépressurisation, une
diode pour empêcher la recharge, un fusible réversible ou non, etc. 5.3 Réaction globale de décharge

4.6 Applications La réaction globale de décharge peut s’écrire :


2 Li + CuO → Li2O + Cu (11)

Elles sont nombreuses et concernent notamment des applications Elle conduit à la formation d’oxyde de lithium et de cuivre métal-
civiles comme dans les montres, les appareils photo, les calculatri- lique, qui assure une bonne conductivité électronique dans le

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mélange cathodique au fur et à mesure que la décharge progresse. La particularité de ces piles est d’avoir une très bonne aptitude à
Cependant, la réaction réelle est plus complexe [9], et change proba- la conservation de la charge. Des essais effectués à la SAFT ont per-
blement en fonction du régime de décharge utilisé, compte tenu du mis de montrer une rétention de charge extrêmement bonne après
nombre des réactions et des espèces possibles avec ce couple de un stockage réel à la température ambiante de plus de dix ans (perte
matériaux. de capacité inférieure à 5 %). Cependant, le fonctionnement de cette
Au plan électrochimique, cette réaction globale est la résultante pile en dessous de la température de − 20 ˚C conduit à une perte de
de deux réactions : capacité très importante pour de faibles courants, mais avec de très
faibles courants on obtient des capacités encore raisonnables jus-
— la réaction d’oxydation à l’anode avec passage en solution des que vers − 50 ˚C [32]. Par ailleurs, contrairement aux autres piles au
ions lithium formés [réaction (1)] ; lithium, la pile Li/CuO ne présente pas d’effet retard à l’établisse-
— la réaction électrochimique de réduction à la cathode, qui n’a ment de la tension lors de sa mise en décharge, même après des
pas été complètement identifiée. Lorsque la pile est assemblée au stockages prolongés à température élevée.
départ, sa tension en circuit ouvert est de l’ordre de 3,3 V ; cette ten-
sion décroît avec le temps jusque vers 2,4 V après environ un mois,
parfois moins. Les explications fondamentales concernant les rai-
sons de ces variations de potentiel n’ont pas encore été établies, 5.5 Formats
mais il semble bien que l’intervention de plusieurs des différentes
réactions possibles soit à l’origine de ces observations.
La possibilité d’une réaction d’insertion d’ions lithium dans la Ces piles ont été fabriquées essentiellement dans les formats bou-
structure du matériau de cathode a également été envisagée selon : ton et cylindriques pour des applications à faible ou moyenne puis-
sance, et jusqu’à des capacités de quelques ampères-heures. La
CuO + x e− + x Li+ → LixCuO (12) technologie utilisée pour les éléments cylindriques est générale-
Cette réaction pourrait alors être suivie de nouvelles réactions de ment de type bobine inversée ; l’anode est en effet montée en posi-
réduction du matériau formé, en cuivre et oxyde de lithium en une tion centrale alors que la cathode est périphérique, en contact avec
ou plusieurs étapes, suivant la température à laquelle est effectuée le godet d’acier. Dans les versions de ces piles devant fonctionner à
la décharge de la pile. D’autres possibilités de réaction ont égale- haute température, SAFT a développé une traversée verre-métal
ment été envisagées dans lesquelles des réactions chimiques sont pour remplacer le joint polypropylène généralement utilisé pour la
couplées à des réactions électrochimiques. Les explications fermeture.
détaillées figurent dans la référence [9]. Cependant, des éléments à électrodes spiralées ont également été
réalisés au niveau de prototypes pour des essais à fort régime de
décharge.
5.4 Caractéristiques
5.6 Applications
La tension maximale des piles Li/CuO, en circuit ouvert, peut se
calculer également à l’aide de la variation d’enthalpie libre de la
réaction globale ; cependant, elle n’est pas bien identifiée. Si l’on
Les applications, assez peu nombreuses, sont celles pour lesquel-
considère la réaction globale (12), la variation d’enthalpie libre est
les les températures de fonctionnement peuvent être élevées
de − 431,5 kJ, soit une tension thermodynamique de 2,24 V. Les
comme dans l’électronique utilisée dans les forages pétroliers, mais
mesures effectuées sur les piles montrent que leur tension d’utilisa-
aussi lorsque les courants demandés sont faibles : maintien
tion est d’environ 1,5 V seulement [32].
mémoire, horloges électroniques, télémétrie, compteurs de chaleur
Les réactions que nous avons écrites (§ 5.3) permettent de calcu- et certains instruments industriels et militaires.
ler les énergies spécifiques théoriques. Nous avons reporté dans le
tableau 5 les capacités massiques théoriques et les tensions de cou-
ple, calculées à partir des réactions et des valeurs de variation
d’enthalpie libre ci-dessus. Les énergies massiques théoriques
déduites sont reportées dans la dernière colonne. 6. Piles lithium-fluorure
Dans la pratique, en moyenne, l’énergie massique des piles Li/
CuO est d’environ 255 Wh/kg (valeurs recueillies entre 130 à
de carbone
370 Wh/kg suivant les constructions utilisées) pour 540 Wh/dm3
(valeurs recueillies entre 310 à 710 Wh/dm3 suivant les construc-
tions utilisées), c’est-à-dire une masse volumique en moyenne de 6.1 Généralités
2,1 g/cm3.
(0)

Tableau 5 – Caractéristiques des piles Li/CuO La pile lithium-fluorure de carbone [Li/(CFx)n] a été, également,
l’une des premières piles au lithium à cathode solide à être utilisée
Capacité Énergie commercialement [8], elle a notamment été étudiée et développée
Tension au Japon par Matsushita. Les piles atteignant des capacités de quel-
Caractéristique massique massique
(V) ques dizaines d’ampères-heures ont été réalisées, actuellement
(Ah/kg) (Wh/kg)
elles ne sont plus fabriquées qu’en modules de petites dimensions,
Théorie 573,7 2,24 1 285 de quelques ampères-heures au maximum.
2,24 vco (1) 130 à 370 La tension de l’élément en fonctionnement est de l’ordre de 2,5 à
2,8 V pour les faibles courants de décharge (inférieurs au milliam-
1,5 Suivant père), alors qu’elle peut baisser en dessous de 2,5 V pour des cou-
Pratique la conception et rants moyens (à partir d’une centaine de milliampères sur un
les régimes de
décharge utilisés élément à électrodes spiralées au format R14). L’intérêt de ce sys-
tème réside dans les hautes énergies, massique et volumique, qu’il
(1) vco tension en circuit ouvert est possible d’atteindre. Du fait des caractéristiques intrinsèques du

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matériau de cathode, ce système est donc plutôt destiné à des appli- Dans cette réaction l’ion lithium se combine avec l’ion fluor formé
cations dans lesquelles les courants débités sont moyens ou faibles. à la cathode pour constituer du fluorure de lithium insoluble qui
Beaucoup d’études de base ont été effectuées au Japon afin de reste dans la cathode. La réaction est complètement irréversible.
déterminer les caractéristiques physico-chimiques et électrochimi- Au plan électrochimique, cette réaction globale est la résultante
ques des polyfluorures de carbone, et d’identifier les mieux adaptés de deux réactions :
à une utilisation en milieu organique avec une anode de lithium. — la réaction d’oxydation à l’anode avec passage en solution des
ions lithium formés [réaction (1)] ;
— la réaction électrochimique de réduction à la cathode. C’est
L’écriture Li/CFx généralement adoptée recouvre en fait l’écri- une réaction d’intercalation d’ions lithium dans la structure du maté-
ture Li/(CFx)n dans laquelle la meilleure composition, en termes riau CFn, qui s’écrit généralement :
d’énergie massique, est celle dans laquelle x est égal à l’unité ;
cette composition correspond donc à un polymonofluorure de (CF)n + n e− + n Li+ → n C + n LiF (14)
carbone :
Des travaux sont actuellement effectués en France afin de modi-
Li/(CF)n fier la synthèse du monofluorure de carbone utilisable dans ces
dans laquelle n est un nombre entier de motifs CF. piles et d’en améliorer les caractéristiques. Ces nouveaux matériaux
permettraient un gain de tension de 0,4 à 0,6 V suivant les régimes
de décharge [33].

6.2 Constituants
6.4 Caractéristiques
La matière active cathodique est constituée par un polymonofluo-
rure de carbone, composé de couleur blanche, qui est obtenu par La tension maximale des piles Li/CFx, en circuit ouvert, peut être
réaction du fluor gazeux avec un carbone, dans diverses conditions calculée à l’aide de la variation d’enthalpie libre de la réaction
de température et de pression suivant le carbone utilisé pour le pré- globale ; cependant, comme les compositions des fluorures de car-
parer. Dans la formule du fluorure de carbone : bone peuvent varier, la tension de cellule en circuit ouvert atteint
2,82 à 3,30 V [9]. Si l’on considère la réaction globale (13), les mesu-
(CFx)n
res de tension en circuit ouvert permettent de déduire que la varia-
La valeur de l’indice x peut aller de 0,5 à 1. Cependant, la tension de tion d’enthalpie libre de la réaction est de − 272,1 à − 318,4 kJ ou
fonctionnement, même à faible régime, ne dépasse pas 3 V pour inférieure, par motif monofluorure de carbone. Les mesures effec-
des courants qui soient pratiquement utilisables. Du fait du carac- tuées sur les piles montrent que leur tension d’utilisation est géné-
tère isolant du composé cathodique, il est nécessaire d’ajouter du ralement de 2,7 à 2,9 V pour des régimes de décharge faibles, et leur
noir d’acétylène ou du graphite afin d’assurer une conductivité suf- tension pratique en circuit ouvert proche de 3 V.
fisante à la matière active, au moins en début de décharge, et lors- Les réactions que nous avons écrites (§ 6.3) permettent de calcu-
que l’on souhaite utiliser des courants de décharge importants. ler les énergies spécifiques théoriques. Nous avons reporté dans le
La particularité de cette cathode est que le polymonofluorure de tableau 6 les capacités massiques théoriques et les tensions de cou-
carbone se transforme petit à petit en carbone au fur et à mesure ple calculées à partir des réactions et des valeurs de variation
que la décharge progresse, rendant la masse active de l’électrode d’enthalpie libre ; les énergies massiques théoriques déduites sont
meilleure conductrice électronique ; cette caractéristique donne une reportées dans la dernière colonne.
(0)

bonne stabilité de la tension en même temps qu’un bon rendement


de décharge de la pile.
La matière active anodique est identique à celle des piles Li/MnO2 Tableau 6 – Caractéristiques des piles Li/(CFx)n
et exige les mêmes contraintes pour la mise en boîtier (§ 4.2).
Capacité
Le milieu électrolytique est généralement une solution de tétra- Tension Énergie massique
Caractéristique massique
fluoroborate de lithium dans de la gamma-butyrolactone (GBL). (V) (Wh/kg)
(Ah/kg)
Cependant d’autres solvants peuvent être utilisés comme le dimé-
thylsulfite (DMSI), le tétrahydrofuranne (THF), le carbonate de pro- 706,2 (x = 1) 2,82 1 990
pylène (CP) ou le diméthoxyéthane (DME), ou alors d’autres sels Théorie
comme l’hexafluoroarséniate de lithium LiAsF6 par exemple. Les 3,30 2 330
solvants utilisés sont distillés sous vide afin d’éliminer la plus 3,0 vco (1) 195
grande partie de l’eau présente, alors que les sels sont séchés sous
vide à température élevée. La préparation des électrolytes utilisés Pratique 2,7 à 2,8 Suivant la concep-
est effectuée soit en boîte à gants sous atmosphère contrôlée, soit tion et les régimes
en salle sèche. de décharge utilisés

Le séparateur utilisé est généralement un non-tissé de fibres (1) vco tension en circuit ouvert
polypropylène ; il est suffisant compte tenu de la très faible solubi-
lité de la cathode dans les milieux organiques utilisés.
Dans la pratique, en moyenne, l’énergie massique des piles
lithium-monofluorure de carbone est d’environ 195 Wh/kg (valeurs
recueillies entre 130 à 300 Wh/kg suivant les constructions utilisées)
6.3 Réaction globale de décharge pour 375 Wh/dm3 (valeurs recueillies entre 220 à 530 Wh/dm3 sui-
vant les constructions utilisées), c’est-à-dire une masse volumique
en moyenne de 1,9 g/cm3.
C’est une réaction à un électron par motif CF, qui peut donc
s’écrire : La particularité de ces piles est d’avoir une très bonne aptitude à
la conservation de la charge, comme la plupart des piles à cathodes
n Li + (CF)n → n C + n LiF (13) solides ; leur autodécharge est de moins de 1 % par an [8]. Leur

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fonctionnement en dessous de la température de − 20 ˚C peut être et alcalines, elles remplacent plus directement les piles de type
relativement bon en termes de stabilité de la tension de décharge si oxyde d’argent-zinc ou oxyde de mercure-zinc. Il faut cependant
l’on utilise une solution électrolytique comme le tétrafluoroborate noter que leur fonctionnement jusque vers 60 ˚C ne conduit à aucune
de lithium dans un mélange 1:1 de gamma-butyrolactone et de dégradation de leurs performances, en capacité notamment [8].
tétrahydrofuranne ; cependant cette tension de fonctionnement est Ces piles, qui ont notamment été fabriquées dans des formats
alors en dessous de 2 V [9]. Si l’on considère en effet une décharge « bouton », le sont maintenant en éléments cylindriques au format
jusqu’à une tension de coupure de 2 V, alors, en dessous de − 20 ˚C, R6 (ou AA) soit de structure bobine, soit de structure spiralée. Ce
la capacité restituée est quasiment nulle dès que les régimes de format d’élément permet d’envisager un développement des appli-
décharge sont moyens. cations de ce système à cathode solide. Les performances de ces
piles sont meilleures que celles des piles salines et alcalines à toutes
les températures ; cependant, l’utilisation d’un électrolyte organi-
6.5 Formats que leur confère une impédance qui reste supérieure (et donc
potentiellement une puissance spécifique inférieure) à celle des
piles classiques comme AgO-Zn et HgO-Zn, dont l’électrolyte alcalin
Les piles lithium-monofluorure de carbone ont été fabriquées en milieu aqueux est bien meilleur conducteur ionique.
essentiellement dans les formats bouton et cylindriques, pour des La construction de ces piles dans des formats de type bouton est
applications à faible ou moyenne puissance ainsi que pour des effectuée de la même façon que pour les autres systèmes électrochi-
capacités plutôt modestes : de quelques centaines de milliampères- miques. Le lecteur se reportera à l’article [D 3 320], paragraphe 5,
heures à quelques ampères-heures. La technologie utilisée pour les pour voir les structures utilisées : bouton et format R6 (ou AA).
éléments cylindriques est généralement de type bobine. Cependant,
des travaux sont effectués concernant l’utilisation de ce couple élec-
trochimique dans de grosses batteries (1 200 Ah) pour lesquelles,
les auteurs revendiquent une énergie massique de 600 Wh/kg et 7.2 Constituants
1 000 Wh/dm3 [35].
Bien que ces piles puissent être manipulées aisément au plan de
La matière active cathodique est constituée par du disulfure de fer
leur sécurité d’utilisation, il est fortement recommandé de ne pas
(pyrite). Comme dans beaucoup de cathodes solides, du noir d’acé-
tenter de les recharger ou de les incinérer, comme toutes les piles au
tylène ou du graphite est ajouté afin d’assurer une conductivité suf-
lithium. Certaines de ces piles comportent d’ailleurs les systèmes de
fisante à la matière active ; cependant, dans le cas particulier de la
sécurité que l’on trouve dans la plupart des piles au lithium : oper-
pyrite, sa faible conductivité intrinsèque rend cet ajout moins cri-
cule de dépressurisation, diode pour empêcher la recharge, fusible
tique qu’avec l’utilisation d’autres matériaux de cathode.
réversible ou non, etc.
La matière active anodique est identique à celle des piles Li/MnO2
et exige les mêmes contraintes pour la mise en boîtier (§ 4.2).
Le milieu électrolytique est généralement constitué d’une solu-
6.6 Applications tion d’un sel de lithium classiquement utilisé : perchlorate de
lithium, tetrafluoroborate de lithium ou trifluorométhylsulfonate de
lithium, dans un solvant ou mélange de solvants organiques comme
Elles sont moins nombreuses que pour les autres couples et ces
le carbonate de propylène (CP) ou le diméthoxyéthane (DME). Les
piles sont principalement fabriquées pour le marché japonais. Ce
solvants sont distillés sous vide afin d’éliminer les impuretés et l’eau
sont des applications essentiellement civiles comme dans les instru-
éventuellement présente, alors que les sels sont séchés sous vide à
ments de l’aéronautique, les montres, les calculatrices, le maintien
température élevée. La préparation des électrolytes est effectuée
mémoire, la microélectronique, les communications sous-marines,
soit en boîte à gants sous atmosphère contrôlée, soit en salle sèche.
l’exploration minière, le contrôle de sites isolés, les systèmes de
sécurité, certains appareils photo (appareil photo Kodak à disque) Le séparateur est un non-tissé de fibres polypropylène qui assure
et, parfois, le maintien mémoire dans la technologie CMOS-RAM. la séparation entre les deux électrodes pendant toute la durée de vie
de la pile, compte tenu de la très faible solubilité de la cathode dans
les milieux organiques utilisés.

7. Piles lithium-disulfure
de fer 7.3 Réaction globale de décharge

C’est une réaction à quatre électrons par mole de disulfure qui


peut donc s’écrire :
7.1 Généralités
4 Li + FeS2 → 2 Li2S + Fe (15)

De commercialisation relativement récente [8], la pile lithium- Cependant, cette réaction procéderait en deux étapes :
disulfure de fer (Li/FeS2) a notamment été étudiée et développée — la première aboutirait à la formation de monosulfure de fer :
aux États-Unis par la société Eveready Battery. Bien que le monosul-
fure de fer ait également été envisagé, le choix du disulfure de fer 2 Li + FeS2 → Li2S + FeS (16)
repose sur sa capacité massique bien supérieure (893,3 Ah/kg con-
tre 446,7 Ah/kg pour le monosulfure), ainsi que sur sa tension légè- — la seconde impliquerait le monosulfure de fer :
rement plus élevée que celle du monosulfure (proche de 1,7 V 2 Li + FeS → Li2S + Fe (17)
contre 1,5 V pour des régimes de décharge lents), qui lui assurent
ainsi de très bonnes caractéristiques potentielles. Ces piles ont Dans ces réactions, l’ion lithium se combine avec les atomes de
l’avantage d’avoir une tension de 1,4 à 1,6 V en fonction du régime soufre libérés, par le disulfure à la cathode pour constituer du sul-
de décharge, valeurs qui assurent une compatibilité avec les appli- fure de lithium insoluble qui reste dans la cathode et du fer à l’état
cations des piles salines et alcalines couramment utilisées (1,5 V). métallique. La réaction de décharge est par ailleurs complètement
Cependant, compte tenu des coûts plus élevés que les piles salines irréversible dans les conditions utilisées.

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De nombreuses études, effectuées pour établir le mécanisme


(0)

réactionnel de décharge de cette pile [9], semblent montrer que, sui- Tableau 7 – Caractéristiques des piles Li/FeS2
vant les conditions de la décharge, pourrait intervenir une troisième
réaction qui mettrait en œuvre l’intercalation d’ions lithium dans la Capacité
structure du disulfure de fer, en même temps qu’il y aurait formation Tension Énergie massique
Caractéristique massique
de sulfure de lithium et de fer à l’état métallique. Cette réaction per- (V) (Wh/kg)
(Ah/kg)
mettrait d’expliquer la présence d’un seul plateau de décharge lors-
que, par exemple, la température est basse ou le régime de Réaction (15) :
décharge élevé, alors que, dans les autres conditions, les deux réac- Li/FeS2
tions consécutives auraient plutôt lieu, avec la présence de deux pla- – théorie 725,6 1,748 1 268 (décharge :
teaux de décharge. 2 réactions)
Au plan électrochimique, la réaction globale est donc principale- 120 (250 Wh/dm3)
ment la résultante de deux réactions :
— la réaction d’oxydation à l’anode avec passage en solution des – pratique 1,7 vco (1) Suivant la conception
et les régimes de
ions lithium formés [réaction (1)] ; décharge utilisés
— la réaction électrochimique globale de réduction du disulfure
de fer à la cathode : Réaction (16) :
Li/FeS2
FeS2 + 4 e− → Fe + 2 S2− (18) – théorie 400,4 1,836 735 (premier plateau
uniquement)
– pratique 1,7 vco (1)
7.4 Caractéristiques Réaction (17) :
Li/FeS
– théorie 526,6 1,66 874 (second plateau
La tension maximale des piles lithium-disulfure de fer, en circuit uniquement)
ouvert, peut se calculer à l’aide de la variation d’enthalpie libre de la
réaction globale [réaction (15)]. Dans ce cas, la variation d’enthalpie – pratique 1,5 vco (1)
libre est de − 674,5 kJ, représentant donc une tension de 1,748 V
(1) vco tension en circuit ouvert
([D 3 320], § 7).
Si nous considérons la première réaction de décharge, la
réaction (16), le calcul thermodynamique donne une variation
d’enthalpie libre de − 354,2 kJ qui représente une tension de 1,836 V 7.6 Applications
alors que la seconde réaction [réaction (17)] a une variation
d’enthalpie libre de − 320,3 kJ représentant une tension de 1,660 V.
En pratique, dans le cas de décharges lentes ou très lentes, les deux ■ Elles sont encore assez peu nombreuses, comparées à celles des
plateaux de tension sont observés, à des valeurs légèrement infé- autres couples au lithium ; cependant, ces piles sont préconisées
rieures à celles qui ont été calculées, c’est-à-dire environ, respective- lorsque l’on cherche une compatibilité en tension avec les piles cou-
ment 1,7 et 1,5 V. rantes (salines ou alcalines), mais avec des performances amé-
liorées en énergie et parfois en puissance délivrée (structure
Les réactions que nous avons écrites (§ 7.3) permettent de calculer
spiralée). Les applications actuelles concernent les instruments de
les énergies spécifiques théoriques. Nous avons reporté dans le
l’aéronautique, les montres, les calculatrices, le maintien mémoire,
tableau 7 les capacités massiques théoriques et les tensions de cou-
la micro-électronique, les communications sous-marines, l’explora-
ple calculées à partir des réactions et des valeurs de variation
tion minière, le contrôle de sites isolés, les systèmes de sécurité,
d’enthalpie libre. Les énergies massiques théoriques déduites sont
certains appareils photo (appareil photo Kodak à disque) et parfois
reportées dans la dernière colonne.
pour le maintien mémoire dans la technologie CMOS-RAM.
Dans la pratique, l’énergie massique des piles lithium-disulfure de
fer fabriquées par Eveready est d’environ 200 Wh/kg (valeurs
recueillies entre 145 à 260 Wh/kg suivant les régimes de décharge
utilisés) pour environ 390 Wh/dm3 (valeurs recueillies entre 280 à
500 Wh/dm3 suivant les régimes de décharge utilisés), c’est-à-dire
8. Autres piles au lithium
une masse volumique en moyenne de 1,95 g/cm3.
La particularité de ces piles est d’avoir une très bonne aptitude à Les paragraphes précédents ont présenté les piles à anode de
la conservation de la charge, comme la plupart des piles au lithium lithium qui ont été étudiées, développées, et qui sont actuellement
à cathodes solides ; leur autodécharge n’est que de 1 à 2 % par an fabriquées à travers le monde en quantités significatives. Cepen-
[8]. Le fonctionnement de cette pile en dessous de la température de dant, beaucoup d’autres couples à anode de lithium ont été étudiés,
0 ˚C se dégrade fortement ; dans ce cas, son choix est donc à éviter. développés et même fabriqués, même s’ils ne le sont plus actuelle-
ment ou le sont encore en très faible quantité pour certains.

7.5 Formats
8.1 Piles lithium-chromate d’argent
Ces piles ont été essentiellement fabriquées dans les formats
« bouton » et cylindriques, pour des applications à faible ou Ce couple a été développé pour les stimulateurs cardiaques ; il a
moyenne puissance ainsi que pour des capacités plutôt modestes notamment été étudié et fabriqué par la SAFT en France [12]. La fai-
allant de quelques centaines de milliampères-heures à quelques ble solubilité des chromates dans les électrolytes organiques ainsi
ampères-heures. La technologie utilisée pour les éléments cylindri- que l’absence de formation de complexes solubles dans ces milieux
ques est généralement de type bobine. rend possible le stockage de ces piles ainsi que leur utilisation sur de

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longues durées, sans perte mesurable de leurs performances élec- lithium ; il permettait notamment de viser les applications « Grand
triques. L’électrolyte est constitué de perchlorate de lithium dissous Public » du fait d’une tension d’utilisation quasiment compatible
dans du carbonate de propylène à une concentration molaire. avec les piles classiques (salines essentiellement à l’époque).
La décharge de telles piles conduit à une courbe commençant Des prototypes de pile au format R20 (ou D) ont été produits et
avec un potentiel initial d’environ 3,2 V à faible régime et compor- testés. Cependant, cette technologie n’a jamais été utilisée pour des
tant plusieurs plateaux de tension au cours de la décharge ; ces dif- productions de grande importance [38].
férents plateaux correspondent aux divers stades de la réduction du
matériau de cathode (2,70 V ; 2,45 V ; 2,05 V). Le mécanisme de
décharge a été étudié de façon détaillée et s’est révélé relativement
complexe, car il dépend principalement du régime avec lequel est 8.4 Piles lithium-pentoxyde de vanadium
effectuée la décharge [36] : lente, rapide.
Le schéma réactionnel global lors de la décharge peut s’écrire : Ce couple électrochimique présente principalement deux pla-
2 Li + Ag2CrO4 → 2 Ag + Li2CrO4 (19) teaux de décharge, à 3,4-3,2 V et 2,4 V. Si sa tension en décharge est
en moyenne assez élevée, sa capacité massique reste insuffisante et
Ces piles ont été fabriquées dans des formats « bouton », de capa- les travaux concernant ce couple ont été orientés vers la mise au
cité variable en fonction de l’autonomie souhaitée par l’utilisateur. point de piles amorçables puis vers celle d’un accumulateur à anode
de lithium, abandonné depuis. Par ailleurs, le V2O5 étant un oxydant
Dans une évolution de cette technologie, le remplacement de
fort, le collecteur électronique utilisé devait être au moins de type
chromate d’argent par le chromate mixte de bismuth et d’argent a
acier inoxydable et la présence de chlorure devait être réduite à des
été envisagé. Si la tension de décharge de cette nouvelle pile est très
taux très faibles [39].
similaire à celle obtenue dans la précédente, la particularité de ce
nouveau matériau de cathode est qu’il permet un meilleur fonction- Des prototypes de pile au format double R20 (DD) ont permis
nement à plus haute température (décharges effectuées à 70 ˚C d’évaluer les performances accessibles avec cette pile. Des énergies
alors équivalentes à celles effectuées à 37 ˚C) et la pile ne comporte massiques de 210 à 250 Wh/kg ont été obtenues pour une densité
plus que deux plateaux de tension lors de sa décharge : 3,1 et 2,3 V. moyenne de pile de 2,5 à 2,7 kg/dm3, soit des énergies volumiques
Le gap plus important entre le premier et le second plateau permet dans la gamme de 550 à 650 Wh/dm3.
également une meilleure détection de la proximité de fin de La réaction de décharge s’écrit :
décharge de la pile, avertissant de la nécessité de la remplacer.
(0)
x Li + V2O5 → LixV2O5 (20)
Nous savons maintenant que la réaction de décharge procède par
Tableau 8 – Caractéristiques des piles Li/Ag2CrO4 une intercalation des ions lithium dans la structure de l’oxyde de
vanadium. Le premier plateau correspond à l’intercalation d’une
Capacité Énergie mole d’ions lithium par mole de pentoxyde de vanadium (3,4 à
Tension
Caractéristique massique massique 3,2 V) alors que l’intercalation d’une seconde mole d’ions lithium a
(V)
(Ah/kg) (Wh/kg) lieu au potentiel de 2,4 V environ [40].
Théorie 155,06 3,35 496,2 Malgré les caractéristiques intéressantes obtenues, l’étude
d’autres matériaux mieux adaptés a fait chuter l’intérêt pour celui-ci
3,25 vco (1) Environ 300 et n’a donc pas conduit à des réalisations industrielles d’importance
3,0 (masse dans le domaine des piles activées.
Pratique volumique
du bouton 2,9
à 3,2 g/cm3)
(1) vco tension en circuit ouvert
8.5 Piles lithium-iode

Cette pile a un fonctionnement de type générateur à électrolyte


solide. La réaction de décharge conduit, en effet, à la formation
8.2 Piles lithium-oxyde de plomb d’une couche d’iodure de lithium solide (conductrice ionique) entre
les deux électrodes, couche dont l’épaisseur croît avec la décharge.
Compte tenu de la conductivité plus faible en milieu solide, le géné-
Ce couple électrochimique a fait l’objet de travaux prenant en rateur est surtout réservé à des applications pour lesquelles les cou-
compte les différents oxydes de plomb [37] ; cependant, ces études rants de base sont assez faibles, mais il autorise cependant des
n’ont pas donné lieu à d’importants développements. Les raisons en pulses de courant plus importants (application aux stimulateurs car-
sont la tension qui est basse : 1,3 à 1,5 V et la capacité massique diaques).
modeste du fait de l’utilisation des oxydes de plomb PbO2 ou Pb2O3. L’anode est constituée de lithium métallique sur lequel est pla-
D’autres travaux concernant des cathodes des systèmes binaires quée la cathode composée d’un mélange d’iode et de poly (2-vinyl-
d’oxydes Bi2O3 – PbO, d’une part, et Bi2O3 – CuO, d’autre part, ont pyridine). La mise en contact des deux électrodes conduit à la
également été effectués, mais n’ont pas conduit à un développe- formation d’une couche d’iodure de lithium, conductrice ionique,
ment des piles correspondantes. qui assurera le fonctionnement ultérieur de la pile et dont l’épais-
seur croîtra avec la capacité déchargée [42].
La réaction de décharge globale est :
8.3 Piles lithium-sulfure de cuivre 2 Li + I2 → 2Li I
La variation d’enthalpie libre de cette réaction est de – 270,3 kJ/mol
La décharge de ces piles montre la présence de deux plateaux de et correspond à un potentiel thermodynamique de 2,80 V.
tension, le premier à 2,0 V et le second à 1,5 V dont la capacité est à L’utilisation de cette pile a beaucoup décru depuis le début des
peu près équivalente. Bien que ce ne soit pas un système de puis- années 1990 avec la mise au point de nouvelles piles au lithium pour
sance, ni même d’énergie, ce couple présentait des avantages au les stimulateurs cardiaques : lithium – oxyde mixte de vanadium et
début des travaux engagés pour la mise au point de piles à anode de d’argent ainsi que lithium – CFx.

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