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Les Chansonniers de Paris - Trad
Les Chansonniers de Paris - Trad
À partir des événements d’environ 18 mars 1871 et du moins jusqu’à la fin du 19 e siècle, la butte
symbole de l’insurrection contre l’ordre établi, en dépit ou peut être a cause des échecs de la
À l’invitation de Rodolphe Salis, le propriétaire du Chat Noir, « le poète Emile Goudeau, qui
avait créé en 1878 les Hydropathes, un groupe d’artistes et d’écrivains, a transféré en 1881, de
façon permanente, les cessions du groupe d’un café du Quartier latin, où il se réunissait, jusqu’au
nouvel cabaret du Chat Noir »1, instaurant ainsi le modèle dynamique des futurs cabarets
artistiques parisiens.
Tandis que l’on nomme souvent la fin du 19 e du qualificatif «fin de siècle» en raison de sa
philosophie, notamment décadente, « on qualifie la première décennie du 20e de «Belle Epoque»,
pour son sens d’optimisme et son enthousiasme volontaire »2. Ainsi, la plupart des «nouveaux»
réalité quotidienne, ce qui signifie qu’ils s’inspiraient surtout de lieux de vie nocturnes comme
les bars, les cabarets, les cafés-concerts, les salles de bal et les théâtres, tout comme des artistes
populaires qui s’y produisaient alors (parmi les plus célèbres on peut citer Aristide Bruant,
Yvette Guilbert et Loïe Fuller). La jeune génération fin de siècle « se passionna aussi pour des
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mediums jusque là négligés, comme la gravure, les affiches, les illustrations de presse »3.
Lautrec, par exemple, s’était mis à illustrer des livres et journaux satiriques populaires, à côté des
Les salles de bal parisiennes attiraient une clientèle très variée : le Moulin Rouge, comme
L’Elysée Montmartre plus ancien, s’adressaient a un public aisé et encourageait les attitudes les
plus décomplexées. « Au Moulin de la Galette, établissement fréquenté par les classes les plus
modestes et les moins éduquées, un couple devait payer 80 centimes par danse. Au Moulin
Rouge en revanche, chaque client, homme ou femme, devait payer deux ou trois francs pour
assister aux spectacles de danse, comme le chahut ou le cancan. »4 Ainsi, tandis que le Moulin de
la Galette représentait un sommet du Paris bohème, le Moulin Rouge, préféré par Lautrec, par
exemple, était l’ultime symbole de la décadence fin de siècle. En ce qui concerne le Chat Noir,
lors du déménagement de Salis pour son nouvel emplacement, cela a été repris par le
trouvait une pancarte jaune et noir qui poussait le passant à être «moderne»!
Une des figures emblématiques pour la période, ainsi que pour l’endroit et son esprit artistique et
philosophique, c’est Henri de Toulouse Lautrec. Grand viveur de la bohème, satiriste et client
fidèle des cabarets, il fit de son art l’expression pétillante de son époque. Dans les années 1890, il
a atteint la célébrité avec ses affiches pour le Moulin Rouge. En 1892, il réalisa une affiche
commandée par le directeur du Divan Japonais, « qui réunissait deux de ses modèles fétiches,
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Jane Avril, alors danseuse au Moulin Rouge, en femme du monde, dans le public, et Yvette
Il y a aussi une deuxième affiche de Guilbert, qui avait dit au peintre que seule la caricature
pouvait donner d’elle une image fidèle, un projet conçu en fusain, rehaussé de peinture à
l’essence, sur papier bulle, a présent conservé au musée d’Albi. Mais les plus nombreux de ses
affiches célèbres ont comme sujet Aristide Bruant. La première date de 1892 et a été réalisée
pour le cabaret Les Ambassadeurs; Bruant était déjà un auteur compositeur apprécié et avait son
propre cabaret, Au Mirliton. « Lautrec le connaissait depuis 8 ans, il avait illustré ses chansons,
accroché des tableaux dans son établissement et avait publié des dessins dans la revue
Mirliton »6. L’affiche commandée par le chansonnier a été un triomphe, malgré les doutes
intenses du directeur Ducare, qui la trouvait absolument hideuse. En 1893, Lautrec représente
dans une autre affiche Bruant dans son cabaret, en le figurant de trois quarts, avec son chapeau,
son écharpe et sa canne, sur scène. À la scène comme à la ville, le chansonnier campait son
On dit que le monde doit à la géniale inspiration d’Aristide Bruant de connaitre un grand nombre
de chansons dites «parisiennes», par la lettre et par l’esprit, qui témoigne de la période précédant
la Première Guerre mondiale. Avant le 19e siècle, il y avait des chanteurs des rues qui reprenaient
les airs traditionnels à boire et les chansons galantes, et qui créaient aussi des refrains nouveaux
sur les faits du moment et sur la vie quotidienne. Ce genre trivial de divertissement chanté,
retrouvaient, mais il n’y a aucune preuve que ceux-là chantaient Paris, et le thème ne surgit pas
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non plus dans les salons de l’Ancien Régime, ni dans ceux que l’on fréquentait pendant la
L’Eldorado, environ 1860. Les premières chansons consacrées à Paris apparaissent entre 1865 et
1910. Les quartiers de la ville, leur population, les scènes drôles ou dramatiques qui s’y
déroulent, avec tout l’imaginaire que porte ce théâtre de la rue, deviennent bientôt un sujet en
vogue, qui se propage aux cafés-concerts et cabarets, et à travers des petits formats, feuilles
volantes bon marché vendues notamment au coin des rues. En ce qui concerne la chanson
montmartroise spécifique, « elle est au sommet de l’expérimentation des genres, suspendue entre
l’innovation formelle et la continuité d’une tradition musicale qui part de l’opérette et plonge ses
racines dans l’exotisme et l’argot »7. Une nouvelle tendance s’y impose, qui apparente la
construction du personnage scénique à l’exigence renouvelée des affiches, et qui promue aussi le
chansonnier, différent du simple chanteur, par le fait qu’il écrit ses propre textes, qu’il interprète
sur une musique composée par lui-même, ou le plus souvent, sur une mélodie préexistent. Les
deux plus importants représentants du style de la chanson réaliste montmartroise sont Yvette
Bruant a commencé sa carrière par une période plutôt fantaisiste, dans la manière des cafés-
concerts de la Troisième République, dans laquelle ont été conçues «le Pantalon à Léon» et «la
Chaussée Clignancourt», mais il a trouvé son vrai style après avoir été introduit au Chat Noir, ou
il a commence de présenter des chansons sur la vie des gens des faubourgs, et de parler du centre
et des exclus. Un cycle de morceaux dédiés aux quartiers de Paris a été publié dans son premier
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recueil («A Batignolles» [«Quand a s'balladait, sous l'ciel bleu, Avec ses ch'veux couleur de
feu, On croyait voir une auréole, A Batignolles»], «A Montpernasse», «A Grenelle» [«J'en ai t'i'
A Grenelle. Fantassins, officiers, colons montaient à l'aussaut d'mes mam'lons, I' m'prenaient
pour eun' citadelle, A Grenelle.»] «A la Glacière» [«C'était l'pus beau, c'était l'pus gros, Comm'
qui dirait l'Emp'reur des dos, I' gouvernait à la barrière, A la Glacière. Son pèr', qu'est mort à
soixante ans, L'avait r'levée aussi dans l'temps; Sa mère avait été daufière, A la Glacière»], «A la
Roquette», «A Montmertre» [«Malgré que j'soye un roturier, Le dernier des fils d'un Poirier
D' la ru' Berthe, Depuis les temps les plus anciens, Nous habitons, moi-z-et les miens, A
Montmertre»]). Le nouveau genre devient célèbre très vite, et Bruant est salué comme un égale
par ses amis du monde des arts et des lettres. Ses chansons décrivent une ville mélangée, avec
des quartiers qui ont encore un aspect de villages, dans une langue souvent argotique, celle des
marginaux, avec des raccourcis stylistiques et poétiques incomparables, mais d’une grande
sensibilité, et remplie d’une compassion sincère pour les déshérités. «Elle avait sous sa toque de
martre, sur la butte Montmartre, un p’tit air innocent… On l’appelait Rose, elle était belle, a’
sentait bon la fleure nouvelle, rue Saint-Vincent» (« Rose blanche », 1885). « Il a composé un
tableau original des groupes qui vivaient de l’exploitation des femmes («Ronde des marmites»
[«La nuit tous les chats sont gris, Dansons la ronde! La nuit tous les chats sont gris, Dansons la
ronde! Faisons le tour de Paris, De Montmartre à Mont-Souris. Dansons la ronde des marmites
de Paris, Ohé ! Les souris ! Les rongeuses de monde ! Faisons sauter avec nous nos michets et
nos marlous. Dansons la ronde ! Paris est à nous ! Nous consolons les cocus, Dansons la
ronde!»]) et a restitué les ambiances pittoresques des bas-fonds de Paris, qui constituait alors une
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menace sociale («Chez les apaches» [«Ohé ! Les apaches, A nous les eustaches, Les lingues à
viroles, Les longes d’assassin, Pour le bidon des roussins, Et pour le ventre des cass’roles.
Tant pis pour vous messieurs de la raclette, Tant pis pour vous messieurs les collégiens, Faut pas
chercher les garçons d’la Villette, Car leurs couteaux sont pas faits pour les chiens, Quand les
flicards veul'nt nous ceinturer d'rifle, Nous fabriquer, nous conduire à la tour, Marron su'l'tas, ces
jours-là ya d'la r'biffe, On leur-z-y met son 22 dans l'tambour»]) »8. Bruant établit en chansons un
tableau vraisemblable, quoique incomplet, du Paris fin de siècle, et son style vériste le distingue
radicalement du style populaire des chansons larmoyantes, comme en écrit par exemple
Ferdinand Louis Bénech. Toutefois, l’élément primordial chez lui reste l’unité des trois
composantes: texte, musique et mise en scène du personnage lui-même, dans une conception
globale du spectacle.
Parmi les diverses catégories d’artistes de cabaret on peut citer, à côté du chansonnier réaliste
contestataire incarné par Bruant, la diseuse personnifiée par Guilbert. Suivant la leçon de Bruant,
elle aussi pratique « la recherche du naturel en chanson, révolutionnant la façon d’interpréter et
affirme sur sa chanson «Je suis pocharde» que c’était une de ces mélodies qui font qu’on regarde
l’interprète, plutôt qu’on l’écoute, et qu’elle l’avait écrite en «scenario actif» bien plus qu’en
«couplets» poétiques10. «Je suis pocharde/ J’dis des bêtises,/ Je suis grise/ Mais ca me regarde/
Qu’est c’ que vous voulez que j’vous dise?/ J’suis pocharde!». Au Chat Noir elle a interprété
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également des chansons de Leon Xanrof, qui décrivaient des histoires sordides, et où la
Les physiologies parisiennes étaient également à l’œuvre dans son répertoire graveleux, ainsi
«Les Trottins» deviennent les protagonistes d’une autre chanson. Souvent à la frontière entre
amours licites et prostitution, «L'amour! Oh là là ! c'qu'on s'en fiche/ Du moment qu'y n' rapporte
rien!/ C'que nous voulons, c'est dev'nir riche/ Et peu nous importe l’moyen/
Tout se transformant sur la terre, le trottin devient un beau jour/ Fleur de lit pour célibataire,/ ou
entonné sa chanson comique de nurse anglaise, à qui l’on confie des messieurs riches, malades et
très amoureux de leur «bonne». "Elle avait des textes corrosifs, qu’elle chantait avec une ironie
froidement violente, et qu’elle jouait aussi de la bouche, de la tête et de ses bras enveloppés de
longs gants noirs"12. Sa chanson «les Vierges» a été interdite par la censure, et sauvée seulement
du jour où elle a accepté de ne plus prononcer les mots méchants dans le texte [«Pâles comme
des cierges en leur aspect, On les regarde avec respect, Les vierges, "Ça porte bonheur", disent
les pince-bec, Oui, c'est peut-être pour jouer avec? Les vierges. Admirable loi d'exception, Bel
exemple pour une nation, Les vierges. Car pour changer d' situation, On révise la Constitution,
Aïe donc! Des vierges! Vous, messieurs, qui religieusement respectez l'état charmant des
vierges, Sachez qu'il en est cependant qui restent jusqu'à cinquante ans, Méchants! Des
vierges»], et de les tousser, ce qui aggravait en effet la grivoiserie, et qui l’a mené vers la gloire,
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Habas, 2010, pag. 63
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au point d’être nommée «la Sarah Bernhardt des fortifs», après être déjà devenue «la diseuse
nationale»…
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