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22-068-A-05
Mots-clés : traumatisme face, examen physique, prise en charge, plaies et traumatismes, brûlure, fracture,
radiologie, tomodensitométrie.
nature traumatique touchant la partie antérieure de l’extrémité L’examen clinique d’un traumatisé facial débute sur les lieux mêmes
céphalique, limitée en haut par un plan passant par la base du crâne de l’accident, par une évaluation rapide des fonctions vitales : pouls,
(ligne passant par la suture nasofrontale, le rebord orbitaire pression artérielle, fréquence respiratoire et état de conscience, à la
supérieur, la suture frontomalaire et l’arcade zygomatique), et en recherche d’urgences aiguës asphyxiques et/ou hémorragiques,
bas par une ligne horizontale passant par l’os hyoïde (fig 1). susceptibles d’engager le pronostic vital à très court terme. Il permet
Ces lésions regroupent à la fois les atteintes des plans de couverture également d’effectuer un rapide bilan des différentes lésions, et, dans
cutanéomuqueux et musculoaponévrotiques, des éléments le cadre d’un polytraumatisme, de hiérarchiser les étapes de la prise
vasculonerveux, glandulaires, mais également les solutions de en charge thérapeutique du blessé.
continuité du squelette osseux de la face. En pratique, les limites D’un point de vue étiopathogénique, les mécanismes lésionnels
anatomiques imposées par l’usage (couvre-chef et cravate) ne sont impliqués sont variés.
plus de mises, car le traumatisme facial concerne non seulement la
Les troubles asphyxiques peuvent être liés à :
face, mais également les confins craniofaciaux et cervicofaciaux.
L’examen clinique d’un traumatisme facial isolé ou associé dans le – des causes locorégionales telles que les obstacles sur les voies
cadre d’un polytraumatisme constitue la première étape de la prise aériennes supérieures ou en amont. Il peut s’agir :
en charge diagnostique et thérapeutique, quels qu’en soient le – de corps étrangers de nature variable (sang mêlé de salive,
mécanisme et la violence. De cet examen clinique et des gestes caillots ou vomissements, fragments dentaires, appareils dentaires,
salvateurs en découlant peuvent dépendre, parfois le pronostic vital débris projectilaires ou vestimentaires), qui peuvent siéger dans
à court terme, toujours les choix thérapeutiques et l’évolution, ainsi le rhino- ou l’oropharynx, voire plus en aval ;
que le pronostic fonctionnel et esthétique à moyen et long termes.
– d’un hématome de la langue, du plancher buccal, du palais
Les progrès de l’imagerie moderne, et plus particulièrement ceux
mou, voire d’une dislocation de la pyramide nasale ou de lésions
apportés par la tomodensitométrie, représentent une aide
complexes pharyngo-laryngo-trachéales ;
diagnostique indéniable confrontée aux données de l’examen
clinique. – d’une chute de la langue en arrière dans les fractures
parasymphysaires bilatérales de la mandibule, par rupture des
attaches antérieures (éventualité extrêmement rare sauf en cas de
traumatisme balistique) ;
Patrick Duhamel : Assistant des Hôpitaux des Armées.
Olivier Giraud : Spécialiste des Hôpitaux des Armées, adjoint au chef de service. – d’un œdème des voies aériennes supérieures chez les brûlés de
Franck Denhez : Chirurgien dentiste des Armées, adjoint au chef de service. la face, souvent associé à une inhalation de suies et de vapeurs
Daniel Cantaloube : Professeur agrégé du Val-de-Grâce, chef de service.
Service de chirurgie plastique, maxillofaciale et stomatologie, hôpital d’instruction des Armées Percy,
toxiques qui altèrent les échanges gazeux respiratoires et
101, avenue Henri-Barbusse, BP 406, 92141 Clamart cedex, France. l’hématose (sueurs, dyspnée, cyanose) ;
Toute référence à cet article doit porter la mention : Duhamel P, Giraud O, Denhez F et Cantaloube D. Examen d’un traumatisé facial. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Stomatologie, 22-068-A-05, 2002, 24 p.
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Tiers latéral Tiers vertical Tiers latéral 1 Divisions de la face (d’après J Pons).
droit médian gauche
supérieur
Étage
moyen
Étage
inférieur
Étage
– des causes centrales par altération des fonctions neurologiques 2 Traction sur la langue à l’aide d’une
végétatives : troubles de la déglutition accompagnant des troubles broche de Kirschner transfixiante (d’après J
de conscience, perte du réflexe de toux, atteinte des centres Pons).
respiratoires du tronc cérébral… ;
– des causes périphériques : hémopneumothorax suffocant par
exemple.
En ce qui concerne les troubles hémorragiques, les traumatismes
faciaux isolés en sont peu générateurs, sauf les plaies du scalp et les
gros traumatismes balistiques par armes à feu, qui peuvent être à
l’origine de déperditions sanguines parfois importantes par
hémorragie extériorisée ou non, au niveau d’une plaie ou d’un des
orifices naturels. Les hémorragies peuvent être aussi internes ou
mixtes sous la forme d’hématomes.
Sans délai, des mesures d’urgence doivent être entreprises sur le trachéale). Elle consiste à effectuer une ponction inter-
terrain. Elles ont pour but d’assurer en priorité et de concert, la cricothyroïdienne à l’aide de Kits type « Quick trackt » ou « mini-
liberté des voies aériennes supérieures et l’hémostase. track », et doit être rapidement relayée par une trachéotomie.
La liberté des voies aériennes supérieures, air way des Anglo-Saxons, Dans des circonstances exceptionnelles :
est assurée par : – une traction sur la langue à l’aide d’une compresse ou d’une
broche de Kirschner fine transfixiant la joue en avant du masséter,
– l’installation du blessé, idéalement en position demi-assise devant
puis la langue et la joue opposée à la façon d’un « fakir », peut
un traumatisme facial isolé et en l’absence de lésions du rachis
également être utilisée, notamment dans le cadre des fractures
cervical ; ou, en cas de doute, et alors en toute sécurité : en décubitus
parasymphysaires bilatérales de mandibule. Il s’agit là d’un procédé
latéral (position latérale de sécurité) ;
astucieux et rapide, bien toléré, permettant de fixer temporairement
– la désobstruction de la cavité buccale au doigt, par aspiration et la langue dans une position anatomique autorisant la déglutition
en faisant tousser le patient ; (fig 2) [25] ;
– une canule de Mayo ou de Guedel, qui permet d’éviter la chute – en dernier recours, la manœuvre de Heimlich peut être utilisée,
de la langue en arrière ; face à un corps étranger enclavé dans les voies aériennes
– l’intubation par voie orotrachéale, réalisée après légère sédation supérieures. Cette manœuvre consiste à appliquer une brusque
et sous anesthésie locale. L’intubation nasotrachéale ne sera effectuée pression au creux épigastrique du patient, à direction
qu’après un bilan radiologique, afin d’éliminer une lésion de l’étage antéropostérieure et vers le haut, afin d’obtenir l’expulsion du corps
antérieur avec effraction de l’ethmoïde, compte tenu des risques étranger enclavé par hyperpression dans les voies aériennes.
septiques par brèche ostéoméningée, et d’aggravation lésionnelle ; L’hémostase peut être obtenue par plusieurs procédés :
– la trachéotomie, qui permet de court-circuiter l’oropharynx. Elle – une compression digitale ou instrumentale par pince
peut être réalisée par voie sus- ou transisthmique, avec une incision hémostatique, relayée par la mise en place d’un pansement ou
cutanée médiane verticale ou horizontale. Ses indications sont : les bourdonnet compressif, dans l’attente d’une ligature artérielle ou
corps étrangers enclavés ou un œdème important, l’intubation veineuse élective ;
impossible, les gros fracas de la face, et les lésions complexes – les hémorragies extériorisées par les fosses nasales sous la forme
pharyngo-laryngo-trachéales nécessitant une ventilation au long d’épistaxis, relèvent d’abord d’un tamponnement nasal antérieur par
cours, enfin la pathologie de masse avec surveillance difficile de mèches grasses ou hémostatiques, parfois associé à un
nombreux blessés ; tamponnement postérieur avec compresses packing. Une sonde
– la coniotomie, réservée aux extrêmes urgences, compte tenu de sa urinaire à ballonnet gonflable peut être utilisée dans un contexte
rapidité de mise en place mais aussi des séquelles possibles (sténose d’urgence (fig 3) ;
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4 Tamponnement buccal
et jugal par bourdonnets
compressifs en coupe fron-
tale.
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Interrogatoire
L’interrogatoire du patient, parfois difficile voire impossible selon
son état, doit être complété par les informations fournies par
l’entourage, la famille du blessé, les témoins et les premiers
intervenants de la chaîne des secours, notamment les données
7 Bilan lésionnel complet d’un traumatisé maxillofacial.
recueillies par les services d’urgence sur les fiches de transport et
d’évacuation (Service médical d’urgence régional [SMUR] ou L’examen, méthodique, est successivement local, régional puis
sapeurs-pompiers). général.
– L’heure du dernier repas et le délai écoulé sont utiles en cas ¶ Examen exobuccal
d’indication opératoire urgente, pour adapter l’anesthésie (estomac
vide ou plein), ou en cas d’associations lésionnelles. Inspection
– La notion de perte de connaissance initiale, complète ou non, et Elle se fait de face, de profil, en vue plongeante (l’examinateur se
sa durée est importante, ainsi que le délai de la reprise de conscience plaçant en arrière) et à jour frisant, étage par étage : tiers supérieur,
immédiat ou secondaire, c’est-à-dire la notion d’intervalle libre tiers moyen, tiers inférieur dans un plan horizontal, tiers médian et
faisant craindre un hématome intracrânien. tiers latéraux dans un plan vertical ; au repos et lors de la mimique.
– Les signes fonctionnels sont évalués avec : Elle permet de préciser :
– la douleur qui a une valeur d’orientation : siège, intensité, – l’état des téguments. On note les contusions, les ecchymoses ou
irradiation, facteurs aggravants ou non, évolution dans le temps ; hématomes en précisant leur siège, les plaies, de la simple plaie
punctiforme au scalp plus ou moins étendu, ou les morsures avec
– l’impotence fonctionnelle : vision, olfaction, audition,
leurs caractéristiques ;
phonation, mastication et/ou déglutition ;
– les déformations du massif facial et le point d’impact souvent
– la gêne à l’ouverture ou à la fermeture buccale ;
rapidement masqués par l’œdème, à type d’asymétrie, de déviation
– le déficit sensitif ou moteur. de l’axe médian, d’enfoncement, ou bien au contraire de saillie d’un
– Enfin, toute notion aidant à connaître l’état antérieur et pouvant fragment osseux sous la peau, orientant vers une fracture
être utile à la prise en charge diagnostique et thérapeutique sera sous-jacente ;
précisée, à savoir : les antécédents médicochirurgicaux, notamment – les écoulements de sang ou de liquide céphalorachidien (LCR) par
les antécédents traumatiques ou les dysmorphoses éventuelles, les orifices naturels ou par une plaie :
l’articulé dentaire préexistant, l’état buccodentaire, le port de
prothèses dentaires fixes ou non, la notion de chirurgie – otorragie, épistaxis, saignements extériorisés par la bouche ou
orthognatique et les tares associées éventuelles (diabète…). par une plaie.
Les plaies du cuir chevelu doivent à ce titre faire l’objet d’une
– Les traitements en cours, en particulier la prise d’anticoagulants, attention particulière, compte tenu de leur caractère
les allergies éventuelles, et le statut vaccinal antitétanique, doivent particulièrement hémorragique. Elles imposent une hémostase
être connus. soigneuse, notamment avant l’évacuation du traumatisé
maxillofacial vers l’échelon hospitalier parfois éloigné ;
Examen clinique [6, 17, 18, 23, 26] – écoulement de salive par la bouche en cas d’incompétence
salivaire labiomentonnière par plaie ou par attitude antalgique
bouche entrouverte ;
Quels que soient l’aspect d’un traumatisé maxillofacial, spectaculaire
ou non, et sa provenance (patient adressé par le Service d’aide – otorrhée, rhinorrhée et/ou écoulement de liquide incolore par
médicale urgente [SAMU] ou venu de lui-même), l’examen clinique une plaie frontale sus-orbitaire : témoins d’une brèche
doit toujours être complet et stéréotypé, réalisé appareil par appareil, cérébroméningée.
à la recherche de lésions associées cranioencéphaliques, Concernant les plaies, on note le siège, la taille et la direction. En
rachidiennes, viscérales (thoracique, abdominale ou pelvienne) ou effet, certaines localisations ont valeur d’orientation : le nerf facial et
squelettiques (fig 7). ses branches de division pour les régions géniennes et parotidiennes,
Ainsi, l’examen clinique du traumatisé facial préalablement mis en à savoir les branches temporofaciale et cervicofaciale et leurs
confiance, est pratiqué au mieux dans une pièce chauffée sur un rameaux ; le canal de Sténon pour les plaies jugales, et les voies
patient stabilisé par les premières mesures de réanimation lacrymales pour les plaies du tiers interne des paupières et de la
d’urgence, vérifiées et complétées en fonction des constantes vitales. région canthale interne (fig 8). Il faut rappeler que toute plaie de la
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V2
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– siffler : muscle orbiculaire des lèvres ; – des zones d’hypoesthésie ou d’anesthésie dans les territoires
cutanés des branches de division du nerf trijumeau (V) (fig 12A) :
– sourire : muscles petit et grand zygomatiques. région labiomentonnière innervée par le nerf alvéolaire inférieur
On rappelle pour mémoire que le muscle releveur de la paupière (V3) (fig 12B), territoire sous-orbitaire et hémilèvre supérieure pour
supérieure est innervé par la IIIe paire crânienne, et les muscles le nerf infra-orbitaire (V2) (fig 12C) et région supra-sourcillière pour
masticateurs par le nerf trijumeau ou Ve paire crânienne. le nerf supra-orbitaire (V1) (fig 12D).
La paralysie faciale périphérique post-traumatique par atteinte du L’examen de la sensibilité et de la motricité faciales, hormis sa valeur
tronc du VII, en cas de plaie jugale ou parotidienne ou de fracture diagnostique, présente un intérêt médicolégal certain, notamment
du rocher, entraîne ainsi une disparition de la motricité de toute une en cas d’intervention chirurgicale.
hémiface avec : La palpation concerne successivement (fig 13) :
– effacement des rides et du sillon nasogénien ; – le front ;
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14 Examen exobuccal. Palpation bidigi-
tale du condyle lors des mouvements 16 Recherche d’une douleur provoquée à distance d’un point d’appui orientant vers
d’ouverture/fermeture buccale. une fracture à ce niveau.
A. Fracture de l’angle mandibulaire.
B. Fracture de la symphyse mandibulaire.
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C
DROITE 55 54 53 52 51 61 62 63 64 65 GAUCHE
85 84 83 82 81 71 72 73 74 75
48 47 46 45 44 43 42 41 31 32 33 34 35 36 37 38
BAS
gauche limitée voire impossible en cas de fracture, en particulier de corporel subi et l’indemnisation de la victime. La prise de
siège temporomandibulaire ; photographies pré- et postopératoires avec plusieurs incidences et si
– l’amplitude de l’ouverture buccale limitée en cas de fracture ou possible toujours les mêmes : de face, de profil, en vue plongeante,
de contusion des muscles masticateurs ; de trois-quarts et bouche ouverte, complète habilement l’examen
clinique, et fournit des données de référence utiles pour la prise en
– l’état des muqueuses : la présence d’ecchymoses, d’hématomes, charge ultérieure. Il en est de même de la confection de modèles
de plaies muqueuses ou de morsures avec saignement muqueux ou d’étude des arcades dentaires en plâtre ou moulages réalisés chaque
non ; fois que nécessaire.
– l’état dentaire : nombre de dents (fig 19), prothèses, appareillages,
hygiène buccodentaire, parodontopathie associée.
EXAMEN RÉGIONAL
La palpation endobuccale complète l’examen. Elle retrouve une
douleur exquise localisée en regard d’un foyer de fracture, ainsi
¶ Examen ophtalmologique [1, 12, 14]
qu’un déplacement avec articulé déformé en cas de fractures
alvéolodentaires. La mobilité du foyer de fracture est également Un examen de base doit pouvoir être réalisé par tout praticien
notée avec : susceptible de prendre en charge un traumatisé facial. Il doit
– recherche d’une disjonction craniofaciale, avec mobilité anormale permettre de suspecter une plaie ou une contusion grave, relevant
du maxillaire supérieur dans le sens transversal, vertical et/ou alors d’une consultation spécialisée voire d’un geste en urgence. En
antéropostérieur. Le front restant immobilisé par la paume d’une effet, selon les séries, entre 4 et 50 % des traumatisés faciaux
main, le pouce et l’index de part et d’autre de la racine du nez, présentent des lésions oculaires de gravité variable [12]. L’examen
l’examinateur recherche une mobilité antéropostérieure, verticale ou clinique bilatéral et symétrique doit être méthodique, et effectué plan
transversale des structures osseuses de l’étage moyen de la base du par plan, avec successivement le cadre orbitaire, les paupières et
crâne, en maintenant l’arcade dentaire supérieure entre pouce et l’appareil lacrymal, l’oculomotricité et le globe oculaire.
index (fig 20) ;
– recherche d’une fracture de la mandibule, en tenant chaque Cadre orbitaire
hémimandibule entre pouce et index, et en leur imposant des La palpation douce permet de rechercher des points douloureux
mouvements prudents en sens inverse dans le plan vertical (fig 21). électifs et des déformations avec marches d’escalier en regard des
L’intégrité, la mobilité, ainsi que la vitalité de chaque dent, doivent foyers de fracture. Ceux-ci siègent le plus souvent au niveau des
être systématiquement recherchées et notées lors du certificat sutures frontozygomatiques, zygomaticomaxillaires et fronto-
médical initial, notamment pour faciliter la réparation du dommage malaires.
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• Bilan anatomique
L’examen statique permet de rechercher un déplacement du globe
oculaire vertical, latéral ou antéropostérieur, avec exophtalmie,
énophtalmie, ou perte de parallélisme des globes oculaires. Ainsi,
les fractures avec communication orbitosinusienne peuvent
s’accompagner d’un emphysème orbitaire avec augmentation de
l’exophtalmie lors du mouchage.
L’examen dynamique permet d’étudier la motricité du globe oculaire.
La motricité oculaire intrinsèque est mise en évidence par l’étude
du réflexe photomoteur direct et consensuel.
La motricité oculaire extrinsèque est pour sa part assurée par six
a muscles oculomoteurs : les muscles obliques supérieur et inférieur,
b ( +- 33mm) les muscles droits supérieur, inférieur, médial et latéral, innervés par
les trois nerfs crâniens oculomoteurs.
Les muscles oblique inférieur, droits supérieur, médial et inférieur
sont innervés par la IIIe paire crânienne ou nerf moteur oculaire
commun.
22 Mesure de la distance intercanthale (b). À l’état normal, le rapport a/b est supé- Le muscle oblique supérieur, qui porte le regard en bas et en dehors,
rieur ou égal à 2.
est innervé par la IV e paire crânienne : nerf trochléaire ou
pathétique.
Paupières et appareil lacrymal Le muscle droit latéral, qui porte le regard en dehors, est innervé
par la VIe paire crânienne : nerf abducens ou moteur oculaire
On note l’orientation, les dimensions, la position et la symétrie des
externe.
fentes palpébrales à la recherche d’une dystopie canthale,
notamment d’un épicanthus par déformation du canthus interne ou Le nerf facial est pour sa part responsable du clignement, par
d’un ptosis. La distance intercanthale doit être précisée. contraction de l’orbiculaire des paupières. L’étude de la motricité
extrinsèque s’effectue œil par œil puis en vision binoculaire, en
Un élargissement de la distance intercanthale, en moyenne de demandant au patient de suivre le doigt de l’examinateur ou la
33 mm, ou un rapport distance interpupillaire et distance pointe d’un stylo dans les neuf positions du regard (fig 23). On
intercanthale inférieur à 2, évoque fortement un télécanthus post- recherche une limitation de mobilité, le plus souvent verticale dans
traumatique (fig 22). Ce télécanthus post-traumatique est souvent le regard vers le haut ou vers le bas, ou une déviation des globes
associé à un traumatisme sévère, avec notamment les fractures du oculaires. Les paralysies oculomotrices se traduisent ainsi par une
complexe naso-ethmoïdo-maxillo-fronto-orbitaire (CNEMFO). Il diplopie, le patient ayant la sensation désagréable de voir double
donne un aspect de fente palpébrale raccourcie avec pseudoptosis. un objet fixé unique. Le test de Hess Lancaster (test aux verres rouge
Les dystopies canthales correspondent à une anomalie de et vert) permet de préciser l’œil et les muscles atteints par le déficit,
positionnement du canthus interne ou externe, secondaire à une son degré de gravité, et de suivre l’évolution sur un graphique. Le
section ou à une désinsertion des tendons palpébraux médial et test de duction forcée permet de mettre en évidence une limitation
latéral ou à une fracture déplacée du cadre orbitaire. Le ptosis post- de mobilité du globe oculaire par incarcération musculaire. Il est
traumatique entraîne une asymétrie palpébrale supérieure par lésion réalisé sous anesthésie locale ou mieux sous anesthésie générale, à
du muscle releveur de la paupière supérieure ou de son aponévrose l’aide d’une pince avec griffes, en exerçant une traction sur
(rupture, désinsertion, plaie horizontale de la paupière supérieure l’insertion du muscle droit inférieur dans le cul-de-sac conjonctival
ou incarcération dans une fracture du toit de l’orbite). inférieur. Le test doit être impérativement bilatéral et comparatif
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– la rhinoscopie antérieure, réalisée à l’aide d’un spéculum et d’un – le réflexe oculocéphalique vertical, qui n’est bien entendu
miroir de Clar après évacuation douce des caillots, croûtes et corps recherché qu’après avoir éliminé une lésion du rachis cervical. Il se
étrangers par mouchage, compresses et utilisation d’un caractérise par une déviation conjuguée des yeux du côté opposé au
vasoconstricteur d’action locale (Xylocaïnet naphazolinée à 5 %). mouvement lors des mouvements rapides de flexion-extension de la
Elle permet la mise en évidence d’un écoulement : épistaxis, tête ;
rhinorrhée, d’un hématome septal, d’une déviation de la cloison – le réflexe oculocéphalique horizontal, avec déviation conjuguée
nasale, voire d’une effraction muqueuse par un fragment osseux en des yeux du côté opposé au mouvement, lors de la rotation de la
cas de fracture ouverte, avec son risque septique propre ; tête à 45° d’un côté puis de l’autre ;
– l’otoscopie, qui recherche un écoulement, et précise l’état du – le réflexe photomoteur ;
tympan normal ou lésé avec déchirure ou hémotympan, et l’état du
conduit auditif externe : plaies, hématomes. – le réflexe oculocardiaque, avec ralentissement de la fréquence
cardiaque lors de la pression des globes oculaires, qui correspond
Bilan fonctionnel au stade de coma dépassé.
Les réflexes du tronc cérébral disparaissent de façon progressive
Il complète l’examen, comportant une évaluation de l’olfaction dans l’ordre énoncé lors d’une aggravation des souffrances
(anosmie dans les fractures de la lame criblée de l’ethmoïde par neurologiques chez un traumatisé crânien. Les signes de localisation
lésion de la première paire de nerfs crâniens), et de l’audition : traumatiques : plaies du cuir chevelu, otorrhée, rhinorrhée, plaies
audiométrie pour confirmer ou non une hypoacousie ou surdité. craniocérébrales ; ou neurologiques : étude des paires crâniennes,
réflexe ostéotendineux, motricité, sensibilité des quatre membres
¶ Examen craniorachidien et neurologique [12]
complètent l’examen, de même que l’examen du rachis cervical à la
Il complète l’examen régional. Le traumatisme facial peut en effet recherche d’une fracture associée. Réalisé conjointement avec les
être associé à un traumatisme crânien dans 20 % des cas, réalisant mesures de réanimation, l’examen tomodensitométrique cérébral
ainsi un traumatisme craniofacial. L’examen clinique vise à évaluer permet de préciser les lésions cranioencéphaliques. L’indication
l’état de conscience : profondeur d’un coma, et à rechercher des opératoire est posée en urgence en cas :
signes de localisation traumatique ou neurologique. L’évolutivité – d’apparition de signes de localisation ou aggravation de signes de
des lésions impose une surveillance attentive, en renouvelant localisation préexistants, orientant vers un hématome extradural, ou
régulièrement l’examen clinique, afin de dépister toute aggravation un hématome sous-dural aigu évolutif ;
ou modification neurologique. L’état de conscience est évalué et
chiffré selon l’échelle de Glasgow de 1 à 15, établie par Teasdale et – de plaies craniocérébrales pénétrantes, compte tenu du risque
Jennet (Glasgow coma scale) : infectieux (méningite post-traumatique précoce ou tardive).
E pour ouverture des yeux (de 1 à 4) Dans les autres cas, l’indication opératoire peut être différée, avec
prise en charge chirurgicale conjointe à plusieurs équipes ou non.
1. jamais L’évolution des traumatismes craniofaciaux, avec fracture de l’étage
2. à la douleur (provoquée par un stimulus nociceptif au niveau antérieur de la base du crâne, est dominée par le risque de brèche
des membres ou du tronc) ostéoméningée (9 à 46 % des cas), elle-même source de rhinorrhée
3. au bruit (à la parole) par fistule de LCR dans 40 % des cas. Le risque de brèche
4. spontanée (avec respect des cycles éveil-sommeil) ostéoméningée et de rhinorrhée est plus marqué pour les
traumatismes craniofaciaux de type III (traumatisme de la voûte
V pour meilleure réponse verbale (de 1 à 5) crânienne irradié à la base) et de type IV (association des types III et
1. aucune II : traumatisme du tiers médian de la face) selon la classification de
2. incompréhensible (gémissements, grognements) Fain et Péri [9, 10, 27].
3. inappropriée (mots compréhensibles mais conversation
impossible) EXAMEN GÉNÉRAL
4. confuse (conversation possible mais avec signes de confusion et L’examen clinique est par ailleurs complété appareil par appareil :
désorientation temporospatiale) thorax, abdomen, pelvis, appareil locomoteur, à la recherche de
5. normale lésions associées qui peuvent conditionner elles aussi le pronostic
M pour meilleure réponse motrice (de 1 à 6) vital et la prise en charge ultérieure.
1. aucune L’examen clinique est volontiers pluridisciplinaire, afin de définir le
bilan lésionnel et la conduite à tenir, en particulier la chronologie de
2. décérébration (membres supérieurs en hyperextension et la prise en charge chirurgicale.
rotation interne, membres inférieurs en hyperextension et flexion
plantaire) Au terme du bilan clinique, plusieurs cas de figures peuvent se
présenter :
3. décortication (membres supérieurs réponse en flexion lente,
membres inférieurs en extension) – les polytraumatismes avec instabilité hémodynamique, imposant
4. réaction d’évitement (flexion rapide du coude avec évitement le maintien des fonctions vitales par des mesures de réanimation
mais sans réaction orientée) d’urgence voire une chirurgie de sauvetage : tamponnade par plaie
du cœur ou pneumothorax suffocant par exemple. Le bilan
5. orientée (le mouvement de flexion tend à faire disparaître la radiologique complémentaire et la prise en charge des lésions
source nociceptive) maxillofaciales sont effectués dans un deuxième temps après
6. obéit (à l’ordre oral). traitement des lésions viscérales ;
Le score de Glasgow est complété au besoin par l’étude des réflexes – les polytraumatismes avec stabilité hémodynamique, autorisant
du tronc cérébral, qui ont une valeur localisatrice pronostique. Ils la réalisation d’un bilan complémentaire. La tomodensitométrie sans
permettent d’évaluer plus précisément la profondeur d’une injection de produit de contraste est alors l’examen de choix. Elle
souffrance cérébrale : échelle de Liège. Au préalable, on doit permet, au cours d’une même acquisition, d’effectuer un bilan
s’assurer de l’absence de lésions du rachis cervical et de lésions du craniorachidien, maxillofacial, thoracique, abdominal, pelvien et de
globe oculaire. Ce sont des réflexes primaires : l’appareil locomoteur, avec éventuellement reconstruction
– le réflexe fronto-orbiculaire, avec contraction bilatérale des tridimensionnelle ;
muscles orbiculaires des paupières lors de la percussion de la – les traumatismes craniofaciaux (20 %) [12]
, où l’urgence est
glabelle ; neurochirurgicale et ophtalmologique ;
11
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
– les traumatismes faciaux isolés (74 %) [12] : les gros fracas liés à un
traumatisme violent à haute énergie cinétique (chute d’un lieu élevé, 25 Incidence du mordu.
accident de la voie publique avec décélération brutale voire éjection
du véhicule) sont explorés idéalement par le scanner. Les
traumatismes simples relèvent pour leur part de la radiologie
conventionnelle, éventuellement complétée par un bilan
tomodensitométrique.
Dans tous les cas, la priorité doit être donnée aux urgences vitales :
craniorachidiennes, thoraciques, abdominales, et aux urgences
fonctionnelles ophtalmologiques.
Dans le cadre d’un polytraumatisme, la prise en charge des atteintes
maxillofaciales est dans l’idéal intégrée dans un schéma
thérapeutique pluridisciplinaire et hiérarchisé, mais dans tous les
cas, après un bilan radiologique de qualité réalisé sur un patient
non agité, permettant une analyse précise des fractures et des lésions
associées. Toute précipitation ou imperfection est en effet susceptible
de compromettre le pronostic fonctionnel ultérieur. Il n’y a pas
26 Incidence rétroalvéolaire.
d’urgence à opérer un traumatisme facial, sauf en cas d’associations
lésionnelles viscérales, craniorachidiennes ou ophtalmologiques, ou
de mise en jeu du pronostic vital dans un tableau clinique
asphyxique ou hémorragique.
12
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
SM
OM
*
C
*
B
27 Plans de référence en radiologie conventionnelle. *
D
A. Plan orbitoméatal (OM) en orange.
B. Plan sagittal médian (SM) en vert.
C. Profil gauche : plan orbitoméatal (OM).
*
A D. Vue supérieure : plan sagittal médian (SM).
SM
RD
OM
*
B
*
A
1 17 *
C
3
5 6 7 28 Incidence de profil du crâne et de la face.
4 A. Plan orbitoméatal (OM).
10 9 8 21 B. Plan sagittal médian (SM). RD : rayon directeur.
C. Radiographie de la face de profil.
12 11 D. Incidence de profil (inspiré de F Heitz). 1. suture coronale ; 2. artère méningée moyenne ; 3. sinus frontal ; 4. apo-
physe nasale ; 5. toit des orbites ; 6. apophyse clinoïde antérieure ; 7. apophyse clinoïde postérieure ; 8. sinus sphé-
13
14 18 noïdal ; 9. grandes ailes du sphénoïde ; 10. cellules ethmoïdales ; 11. apophyses ptérygoïdes ; 12. sinus maxillaire ;
15 16 13. épine nasale ; 14. os palatin ; 15. arc antérieur de l’atlas ; 16. odontoïde ; 17. suture lambdoïde ; 18. branche
montante de la mandibule ; 19. angle de la mandibule ; 20. branche horizontale de la mandibule ; 21. conduit auditif
externe.
19
20
*
D
Le cliché de profil permet d’étudier à la fois les trois étages de la cervical), avec un appui nez-front-plaque parfaitement centré, le
face et le crâne, en particulier : plan sagittal médian strictement perpendiculaire au plan du film.
Le rayon directeur postéroantérieur est centré sur le nasion, et forme
– un recul du massif facial ;
un angle de – 25° avec le plan orbitoméatal. Les critères de qualité
– l’état de la voûte frontale et du sinus frontal ; sont :
– les os propres du nez à un moindre degré.
– des fentes sphénoïdales passant par les orbites ;
¶ Incidence face haute (ou incidence nez-front-plaque, – le bord supérieur des rochers se projetant à la partie inférieure
incidence des cadres orbitaires) (fig 30) des orbites ;
Le patient est installé en position assise ou en procubitus (donc – la distance processus orbitaire du malaire-table interne de la voûte
incidence non réalisable en cas de suspicion de lésions du rachis crânienne identique des deux côtés.
13
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
-25° RD
OM
*
B
*
A
*
C
19
16
18 *
D
14
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
RD
*
B
-50°
O
M
*
A
*
C
2 31 Incidence de Blondeau.
5 A. Plan orbitoméatal (OM).
3 B. Plan sagittal médian. RD : rayon directeur.
C. Radiographie de Blondeau.
4 D. Incidence de Blondeau (inspiré de F Heitz). 1. Voûte crânienne ; 2. sinus frontal ; 3. suture frontozygomatique ;
1 4. ligne innominée de Stenvers ; 5. toit de l’orbite ; 6. zygoma ; 7. sinus maxillaire ; 8. fosses nasales ; 9. arcade zygo-
8
6 matique ; 10. bord supérieur des rochers ; 11. processus mastoïde ; 12. mandibule ; 13. odontoïde.
7
9
10
11
12
13
*
D
15
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
RD
OM
+15°
*
B
*
A
1 *
C
10
*
D
34 Orthopantomographie.
16
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
*
A *
B
17
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
4
5
6 7 8
[23]
TRAUMATISMES ALVÉOLODENTAIRES
Ils sont de gravité variable.
¶ Contusion
Elle se caractérise par une sensibilité transitoire de la dent à la
percussion ainsi qu’au froid, avec des clichés radiographiques
normaux. L’évolution peut être défavorable, et aboutir à une perte
de la vitalité pulpaire.
¶ Subluxation
La dent mobile et douloureuse après un choc direct est restée en
place dans son alvéole. Les radiographies sont peu ou pas modifiées 38 Formes topographiques des fractures de la mandibule. 1a. Fractures capitales du
avec éventuellement un espace desmodontal élargi. condyle ; 1b. fractures sous-condyliennes hautes ; 1c. fractures sous-condyliennes bas-
ses ; 2. coroné ; 3. branche montante ; 4. angle ; 5. branche horizontale ; 6. région sym-
physaire et parasymphysaire ; 7. région alvéolodentaire.
¶ Luxation
Elle s’accompagne d’une avulsion de la dent avec alvéole deshabitée secondaire et complications infectieuses, peut en effet survenir à tout
par rupture des moyens d’union. Elle touche surtout le maxillaire et moment, d’où la nécessité d’émettre systématiquement des réserves
notamment les incisives centrales 11 et 21. Plusieurs types de lors de la rédaction du certificat médical initial.
mouvements sont possible, à savoir : ingression, égression,
vestibuloversion, linguo- ou palatoversion (fig 37). La réimplantation ¶ Fractures alvéolodentaires (fig 38)
d’une dent définitive est possible, mais doit être effectuée sans délai Elles entraînent une mobilité de deux ou plusieurs dents, par
après le traumatisme dans de bonnes conditions techniques. Le fracture associée de l’os alvéolaire de soutien concernant ainsi un
pronostic reste cependant bien souvent défavorable à moyen terme. bloc alvéolodentaire.
¶ Fractures dentaires : fractures coronaires parcellaires ¶ Traumatismes gingivomuqueux
avec ou sans atteinte pulpaire, fractures radiculaires,
fractures de l’apex (fig 37) Ils sont à type de plaies ou de contusions avec hématome
sous-muqueux.
Fractures coronaires parcellaires sans atteinte pulpaire
Ce sont des fractures asymptomatiques ou paucisymptomatiques TRAUMATISMES DE L’ÉTAGE INFÉRIEUR DE LA FACE :
MANDIBULE ET ARTICULATION
limitées à l’émail ou à la dentine, de bon pronostic. TEMPOROMANDIBULAIRE [23]
Fractures coronaires parcellaires avec atteinte pulpaire Les fractures de la mandibule sont très fréquentes. Elles se divisent
en fractures de la portion dentée (symphyse mandibulaire, branches
Elles sont responsables de douleurs importantes du fait de horizontales et angles de la mandibule) et fractures de la portion
l’ouverture de la chambre pulpaire, et imposent coiffage pulpaire ou non dentée (branches montantes, condyles, coronés) (fig 38).
pulpectomie et traitement endodontique.
¶ Fractures de la portion dentée
Fractures radiculaires
La portion dentée est caractérisée par l’existence de zones de
Le siège et la direction du trait sont importants à préciser, car ils faiblesse : canines, dents de sagesse et alvéoles qui représentent les
conditionnent pronostic et traitement. Les fractures à trait oblique sièges électifs de fractures. Sur le plan clinique, celles-ci sont
ou vertical sont des fractures instables avec mobilité caractérisées par l’existence :
interfragmentaire lors de la mastication, d’où la nécessité de
privilégier l’avulsion, à la différence des fractures à trait horizontal – de points douloureux exquis en regard du ou des foyers de
où l’avulsion n’est pas systématique selon la portion radiculaire fractures ;
concernée. – de déformations avec perte de l’alignement dentaire et troubles
de l’articulé souvent dans les trois plans de l’espace par déplacement
Fractures de l’apex (chevauchement, décalage, angulation-rotation), secondairement
Elles sont traitées par résection apicale ou abstention thérapeutique masquées par l’œdème et les hématomes ;
et surveillance. – d’une mobilité anormale interfragmentaire.
Dans tous les cas et quelle que soit l’importance du traumatisme Elles imposent une réduction parfaite, pour restituer l’articulé
initial, une surveillance régulière de la vitalité dentaire doit être dentaire antérieur et éviter des troubles occlusaux séquellaires avec
assurée au décours du traumatisme dentaire, compte tenu des retentissement éventuel sur la fonction temporomandibulaire. Il
risques évolutifs. La mortification pulpaire, avec lyse radiculaire faudra systématiquement :
18
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
39 Tomodensitométrie.
Fracture de la portion den-
tée de la mandibule en ré-
gion symphysaire, en coupe
axiale.
*
A *
B
19
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
– en bouche ouverte, une latérodéviation de la ligne interincisive Le trait de fracture est localisé au-dessus des apex de l’arcade
du côté atteint (on dit que « le menton regarde la lésion »), une dentaire supérieure. Elle sépare le plateau palatin du maxillaire qui
limitation douloureuse de l’ouverture buccale avec diminution ou reste solidaire du massif craniofacial, avec luxation ou section du
impossibilité de diduction et propulsion, et une absence de pied de la cloison nasale, et fracture associée à la partie inférieure
mobilité du ou des condyles fracturés lors des mouvements des apophyses ptérygoïdes, en arrière (fig 43).
d’ouverture-fermeture buccale. Fracture disjonction craniofaciale haute dite vraie ou Le Fort III
L’examen clinique et radiologique des régions condyliennes doit être
tout particulièrement attentif en cas de chute sur le menton, Elle associe quatre traits de fracture qui aboutissent à la séparation
notamment chez l’enfant, compte tenu des risques évolutifs des du massif facial de la base du crâne. Les traits de fractures
fractures condyliennes négligées. Elles peuvent en effet être à concernent ainsi la racine du nez, l’épine nasale du frontal, la lame
l’origine : de constrictions permanentes des mâchoires d’origine perpendiculaire de l’ethmoïde près de la lame criblée, le vomer à sa
musculaire et/ou articulaire, évoluant vers l’ankylose avec partie haute, les parois interne, inférieure et externe de l’orbite en
dysfonctionnement majeur des articulations temporomandibulaires ; passant sous le canal optique, la suture frontozygomatique, le
et surtout de troubles de croissance de la mandibule par atteinte des prolongement zygomatique du temporal et les apophyses
cartilages, responsables de dysmorphoses dentomaxillaires. ptérygoïdes à leur partie supérieure (fig 43).
20
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
*
C
*
A *
B
43 Traits de fracture dans les fractures-disjonctions craniofaciales horizontales de Le Fort : vue de face (A), de profil (B), inférieure
(C) et parasagittale médiane (D). En vert : fracture Le Fort I, en rouge : fracture Le Fort II, en bleu : fracture Le Fort III.
*
D
21
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
22
Stomatologie Examen d’un traumatisé facial 22-068-A-05
*
A *
B
51 Tomodensitométrie. 52 Tomodensitométrie.
Fracture du plancher de Fracture plurifragmentaire
l’orbite gauche type « blow- du plancher de l’orbite droit
out » avec hernie graisseuse avec pneumorbite en coupe
et esquille osseuse extraor- coronale et hémosinus ma-
bitaire en reconstruction xillaire droit associé.
2D coronale.
23
22-068-A-05 Examen d’un traumatisé facial Stomatologie
La rhinoscopie antérieure apprécie l’existence de lésions endonasales : arguments en faveur d’une lésion associée de l’étage antérieur de la
épistaxis, hématome de la cloison, déviation septale. L’examen base du crâne : anosmie, rhinorrhée témoin d’une brèche ostéo-
oculaire recherche une diplopie, une lésions des voies lacrymales, méningée, ou une pneumatocèle sur les clichés radiographiques. Les
voire des complications oculaires à type de cécité post-traumatique fractures du toit de l’orbite s’accompagnent le plus souvent d’une
par fracture irradiée au canal optique. Enfin, on recherche des hypo- ou anesthésie supraorbitaire (V1) : région frontale et sourcilière.
Références
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24
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 22-072-A-10
22-072-A-10
Fractures de l’orbite
P Barbrel
É Géré
Résumé. – L’orbite, de par sa position au sein de l’étage moyen de la face, constitue un véritable carrefour
traumatique.
Sa constitution anatomique, ses rapports limitrophes, son architecture biomécanique en sont la preuve et
expliquent la fréquence de ses fractures parmi l’ensemble des traumatismes faciaux. Au vu des conséquences
de ces fractures et de leur retentissement fonctionnel et morphologique, sans même parler d’esthétique, on
peut difficilement sortir l’orbite de son contexte. L’enfermer dans une des nombreuses classifications
anatomocliniques proposées au fil des temps ? Chacune a ses raisons, aucune n’est vraiment satisfaisante.
Elles témoignent seulement de la variété de ces fractures, de la plus simple à la plus compliquée, et de la
difficulté de leur systématisation. Ceci est paradoxal car la clinique est parfaitement connue et la prise en
charge bien codifiée. Plutôt qu’un cadre nosologique étriqué, nous avons choisi de les regrouper au sein de
trois grands chapitres qui ont pour points communs leur localisation régionale, leurs conséquences cliniques,
leur attitude thérapeutique.
Parmi les apports récents dont les fractures de l’orbite ont pu bénéficier, il faut insister sur l’imagerie
médicale. La tomodensitométrie spiralée a permis, en gagnant du temps, de multiplier les possibilités de
réalisation de ces examens qui sont devenus presque routiniers. Grâce aux logiciels de reconstructions, la
précision des images est devenue remarquable. Elle apporte un plus indéniable au bilan lésionnel qui guide
l’attitude thérapeutique et le geste du chirurgien.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Philippe Barbrel : Spécialiste des Hôpitaux des Armées, chef de service. RÉPARTITION SELON L’ÂGE ET LE SEXE
Éric Géré : Spécialiste des Hôpitaux des Armées, adjoint au chef de service.
Service de chirurgie maxillofaciale et de stomatologie, hôpital d’instruction des Armées Robert-Picque, BP
De fréquence faible chez l’enfant jeune, les lésions traumatiques
28, 33998 Bordeaux Armées, France. faciales augmentent à l’âge du vélo, puis du scooter et de la moto.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Barbrel P et Géré É. Fractures de l’orbite. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Stomatologie, 22-072-A-10, 2001, 20 p.
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
*
A
ORBITE OSSEUSE (fig 1)
Destinée à protéger le globe oculaire, elle se présente classiquement
comme une pyramide quadrangulaire ouverte vers l’avant, fermée
vers l’arrière par l’apex orbitaire. Elle est constituée d’un cadre
compact et de parois papyracées « empruntées » aux formations
osseuses du voisinage comme le démontre l’embryologie.
2
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
3
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
OD OG
Étape 1
Étape 2
Étape 3
*
A
Diplopies
horizontales
Droit
supérieur Petit
oblique
Droit Droit
interne externe
Grand
Droit oblique
inférieur *
C
4 Action des muscles oculomoteurs de l’œil gauche (d’après Rouvière).
A. Exploration des neuf directions du regard chez un sujet sain.
B. Atteinte des différents muscles oculomoteurs de l’œil.
C. Rappel des actions des muscles oculomoteurs de l’œil gauche.
4
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
5
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
Pare-chocs latéraux
8 Fracture du complexe naso-ethmoïdo-
Solides, ils sont représentés par les corps des os zygomatiques et maxillo-fronto-orbitaire. Schéma d’une
par les bords supraorbitaires. coupe tomodensitométrique en vue axiale.
A. Aspect normal.
B. Enfoncement monobloc de la racine
• Choc sur l’os zygomatique du nez.
La fracture isolée du pare-chocs zygomatique est une fracture- C. Fracture des os nasaux.
disjonction avec simple rotation (bascule autour d’un axe).
Si l’énergie du choc n’est pas épuisée dans cette première fracture, A
l’os zygomatique transmet les forces traumatisantes, en rompant ses
attaches. Il se déplace dans le sens d’application de la force,
habituellement en dedans, en bas et en arrière, en écrasant ses points
d’appui et en pénétrant dans l’orbite, dans le sinus maxillaire et dans
l’anneau zygomatique.
– Le plancher de l’orbite cède sur une plus ou moins grande surface,
selon les zones de relative résistance (canal infraorbitaire) ou
d’extrême faiblesse (postéromédiale).
– Le globe oculaire, ses annexes et la graisse périorbitaire
s’enfoncent dans le sinus maxillaire (d’où l’énophtalmie et la
diplopie, transitoires liées à l’œdème ou à l’hématome ou bien
définitives par incarcération du corps musculaire ou des expansions B
aponévrotiques du droit inférieur ou du petit oblique).
– L’arcade zygomatique subit un ou plusieurs traits de fracture
entraînant souvent une déformation en « coup de hache » au niveau
de l’anneau zygomatique et pouvant embrocher le muscle temporal
(d’où le trismus).
– Le rebord orbitaire latéral (frontozygomatique) est isolé par deux
traits de fracture ou plurifragmenté. Son déplacement entraîne une
dystopie canthale latérale.
– La paroi orbitaire latérale peut présenter des traits de fractures
irradiant vers l’apex orbitaire.
– Une fracture en valgus de l’os zygomatique peut survenir en cas C
de traumatisme tangentiel (environ 5 % des cas). La paroi orbitaire – Le plus souvent, la pyramide nasale se disloque et les processus
latérale se déplace en dehors et le plancher orbitaire s’ouvre frontaux des os maxillaires s’écartent. Parfois, elle résiste dans son
largement (d’où dystopie orbitaire et énophtalmie). ensemble, os nasaux et processus frontaux des maxillaires restant en
monobloc ; c’est alors la partie moyenne de l’ethmoïde qui se
• Choc sur le bord supraorbitaire fracture et le nez s’enfonce dans l’espace interorbitaire.
Sur cette zone de grande résistance, un choc latéral peut produire : – Le septum nasal ostéocartilagineux se fracture, se plicature et se
luxe.
– des lésions de redressement de courbure avec cisaillement dure-
mérien, rarement des fractures du massif facial. Il s’agit de trait de – Les parois médiales des orbites subissent rarement une fracture
fracture irradié de la voûte frontale à la base du crâne. Les points simple, beaucoup plus souvent une comminution, voire une
faibles sont alors le toit orbitaire et la gouttière olfactive ; véritable perte osseuse.
– une embarrure frontale en cas d’impact très localisé. – Les bords infraorbitaires se fracturent, le trait pouvant irradier au
plancher et/ou s’accompagner de perte osseuse.
Ces fractures intéressant le plancher de la région frontale peuvent
entraîner : – L’os lacrymal et le canal osseux lacrymonasal fracturé peuvent
léser les voies lacrymales.
– une ecchymose et un hématome périorbitaires, une incarcération – L’épine nasale de l’os frontal, noyau de résistance, joue, une fois
du muscle releveur et du muscle droit supérieur ; fracturée, un rôle lésionnel majeur en pénétrant par un mouvement
– une compression des éléments vasculonerveux du canal optique de bascule en haut et en arrière dans l’ethmoïde et l’étage antérieur
ou de la fissure orbitaire supérieure lorsque les fractures atteignent de la base du crâne.
l’apex orbitaire. – La poutre frontoethmoïdale transmet les forces à l’étage antérieur
de la base du crâne, avec effet de tassement.
Pare-chocs médians Les risques de brèche ostéodurale et de lésions des gouttières
Fragiles, ils occupent toute la partie médiane de la face : région olfactives par atteinte de la paroi postérieure du sinus frontal et de
glabellaire avec la paroi antérieure des sinus frontaux, pyramide la lame criblée de l’ethmoïde sont alors importants.
nasale avec les os nasaux et le squelette cartilagineux nasal. À ces lésions du CNEMFO s’associent donc, selon le siège de
Un choc faible s’épuise à leur niveau, mais un choc de grande énergie l’impact et l’inclinaison de la tête, des fractures de Le Fort I
entraîne toujours des lésions du squelette sous-jacent (paroi rarement, surtout des fractures de Le Fort II ou III, avec un risque
postérieure des sinus frontaux, processus frontaux du maxillaire, de fracture basicrânienne et de brèche ostéodurale nettement
labyrinthe ethmoïdal, lame criblée, os maxillaires). supérieur en cas de Le Fort III.
Un choc antérieur sur la région glabellaire et la voûte frontale CONSÉQUENCES DES LÉSIONS OSSEUSES
n’entraîne pas de conséquence orbitaire mais des complications
exclusivement crâniennes. ¶ Conséquences morphologiques
En revanche, un choc antérieur sur la région nasale entraîne la Les modifications traumatiques des reliefs du nez, des pommettes,
rupture et le recul du CNEMFO (fig 8). des bords supraorbitaires sont d’appréciation difficile en phase
6
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
¶ Conséquences nasales
La déformation nasale se présente parfois sous la forme d’un recul
en masse de l’auvent nasal sous l’os frontal creusant exagérément
l’angle nasofrontal et ouvrant l’angle nasolabial et plus souvent sous
la forme d’une ensellure par effondrement et élargissement de
l’auvent nasal.
La cloison nasale subit toujours un télescopage avec fracture du
septum cartilagineux, de la lame perpendiculaire de l’ethmoïde et
du vomer, source d’hématome de la cloison. La richesse vasculaire
des fosses nasales explique la gravité des épistaxis traumatiques. Ces
lésions ostéocartilagineuses et l’œdème de la muqueuse pituitaire,
constants, expliquent l’obstruction nasale sévère et le retentissement
respiratoire.
La dystopie canthale latérale peut résulter de l’arrachement du tendon
¶ Conséquences sinusales sur le tubercule de Whitnall ou du déplacement du bord orbitaire
latéral.
Selon la localisation de la fracture orbitaire, elles peuvent intéresser
Les ptosis, limitation ou abolition de l’ascension palpébrale, résultent
le sinus maxillaire, le sinus ethmoïdal et/ou le sinus frontal.
habituellement de l’atteinte du muscle releveur de la paupière
La muqueuse sinusienne, fragile, est rapidement œdématiée, supérieure par embrochage par une esquille osseuse, entrave du
infiltrée, voire partiellement nécrosée sur des fragments osseux muscle dans un foyer de fracture du toit orbitaire, désinsertion,
libres, ce qui favorise les complications infectieuses tant immédiates déhiscence ou élongation de l’aponévrose du releveur.
que tardives.
La pathologie du sinus maxillaire est moins souvent évoquée, car ¶ Conséquences lacrymales
ses complications sont moins bruyantes (hernie du corps adipeux
jugal, esquille osseuse, sinusite post-traumatique...). Les atteintes canaliculaires, sacculaires ou canalaires sont fréquentes
(20 % des cas).
La pathologie du sinus frontal est en revanche plus rare mais
beaucoup plus grave. Une sinusite frontale post-traumatique peut Les plaies des voies lacrymales, génératrices de larmoiement,
entraîner une infection méningée, cérébroméningée ou un abcès résultent de différents mécanismes :
intracrânien en cas de brèche de la paroi postérieure. Elle apparaît – section directe et franche, au niveau du canalicule inférieur et du
au cours de la première année, après effraction du sinus frontal ou canal d’union, plus rarement au niveau du canalicule supérieur ou
traumatisme du canal nasofrontal. des deux canalicules ;
L’obstruction du canal nasofrontal par une embarrure ou des
– arrachement de la paupière, siégeant de façon élective au niveau
esquilles osseuses peut conduire, dans de rares cas, à l’empyème
de la portion dite lacrymale, dépourvue de tarse (fig 9) ;
précoce ou à la mucocèle secondaire tardive (le délai habituel serait
de 7 ans). Par pression kystique ou par élaboration d’une enzyme – contusion directe ou embrochage par un fragment osseux au
ostéolytique, la mucocèle érode l’os adjacent pour pénétrer dans niveau du sac.
l’orbite ou dans les cavités intracrâniennes. Si le contenu du kyste À la différence du sac lacrymal, en grande partie intrapalpébral, le
mucoïde s’infecte, une pyomucocèle se forme et conduit, dans de canal lacrymonasal, strictement intraosseux, est vulnérable lors des
nombreux cas, à la formation d’abcès orbitaire ou crânien, à une lésions squelettiques (cisaillement, embarrure lors de fractures du
ostéomyélite crânienne ou à une méningite. CNEMFO, Le Fort II ou III).
Il est difficile de prédire si le traumatisme a engendré une
¶ Conséquences palpébrales obstruction définitive des voies lacrymales car certaines fractures
Les lésions directes palpébrales sont fréquentes : le chémosis, gênant complexes laissent un tractus lacrymal intact. En effet, il n’est pas
considérablement l’examen, les plaies palpébrales, notamment nécessaire que le sac soit interrompu pour avoir un blocage.
supérieures, peuvent masquer une atteinte plus profonde de L’œdème de la muqueuse peut suffire à provoquer l’obstruction de
l’appareil releveur ou du globe oculaire. la lumière du sac.
Les conséquences palpébrales habituelles des lésions osseuses sont
les dystopies canthales et les ptosis. ¶ Conséquences oculaires
La dystopie canthale médiale apparaît habituellement à la suite du Elles portent essentiellement sur le globe oculaire, sa statique et sa
déplacement de la zone d’insertion, plus rarement après section ou dynamique.
arrachement du tendon palpébral médial. Il en résulte : une dystopie
canthale dans les trois plans de l’espace par valgisation, Lésions du globe oculaire
antéposition, abaissement, une détente de la sangle palpébrale
raccourcissant le diamètre transversal de la fente palpébrale ; un Une plaie sclérale ou cornéenne est suspectée sur la diminution
abaissement du point lacrymal inférieur qui quitte le contact avec la d’acuité visuelle et l’hypotonie du globe à la palpation. La contusion
conjonctive bulbaire désamorçant la pompe lacrymale, source de oculaire fermée est plus fréquente.
larmoiement ; un pseudoptosis par abaissement de l’aileron
Troubles de la statique : énophtalmie et exophtalmie
aponévrotique médial. L’élargissement de la distance intercanthale
entraîne un télécanthus traumatique qui peut être uni- ou bilatéral. L’énophtalmie, enfoncement du globe dans la cavité orbitaire,
Témoin d’un traumatisme osseux sévère, il coexiste souvent avec souvent masquée par l’œdème initial, peut résulter de divers
une lésion lacrymale, canaliculaire ou même sacculaire. mécanismes :
7
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
¶ Conséquences neuro-ophtalmologiques
Les principales conséquences visuelles ou neuro-ophtalmologiques
sont la baisse de l’acuité visuelle (amblyopie, cécité), la mydriase et
l’ophtalmoplégie. Ces lésions ophtalmologiques sont le fait, soit des
déplacements osseux, soit de la contusion directe du contenu
orbitaire.
L’amblyopie et la cécité post-traumatique, maîtres symptômes, sont
retrouvées dans 3 à 10 % des cas de fractures de l’étage moyen de la
10 Niveau de l’incarcération en rapport avec l’équateur du globe. face. Le plus souvent secondaires à un traumatisme du globe
oculaire (lésions rétiniennes, hémorragies du vitré, paralysies
neuromusculaires...), elles peuvent aussi témoigner d’une atteinte du
– refoulement des parois orbitaires avec augmentation du contenant
nerf optique (0,5 à 5,2 % des cas de cécité).
(surtout au niveau du plancher et de la paroi médiale), fuite du
contenu intraorbitaire à travers les traits de fracture avec diminution Les lésions directes du nerf optique relèvent de divers mécanismes :
du contenu ; – fracture du canal optique avec compression du nerf ou
– pincement des muscles oculomoteurs dans le foyer de fracture embrochage par un fragment osseux, fracture des clinoïdes
(muscle droit inférieur surtout) ; antérieures ;
– pincement de la périorbite, déplacement ou atteinte du ligament – compression par un hématome rétrobulbaire ou
suspenseur de Lockwood. ethmoïdosphénoïdal associée à une fracture des parois latérale et
supérieure de l’orbite ;
L’augmentation du volume de la cavité orbitaire est cependant le
phénomène prédominant dans la pathogénie de l’énophtalmie – compression par un hématome des gaines périnerveuses ;
post-traumatique [3]. – obstruction de la veine centrale de la rétine, ischémie après
L’exophtalmie, beaucoup moins fréquente, résulte de deux principaux hémorragie des vasa nervorum ;
mécanismes : – arachnoïdite périnerveuse secondaire.
– diminution du contenant, consécutive généralement à une Fait essentiel, les cellules sensorielles rétiniennes ne pourraient plus
embarrure du toit orbitaire ou plus rarement du plancher (blow-in) récupérer au-delà d’un délai de 4 heures d’ischémie.
qui refoule le globe vers l’avant et provoque fréquemment une La mydriase aréactive, rencontrée dans un tableau de section du nerf
diplopie associée ; optique, peut être secondaire à de nombreuses autres causes :
– augmentation du contenu par œdème, corps étranger ou – contusion du globe ;
hématome intraorbitaires. – hémorragie de la chambre antérieure ;
Les troubles de la statique oculaire entraînent parfois des troubles – rupture du sphincter irien ;
de la dynamique, mais sans parallélisme entre les lésions
anatomiques et les conséquences cliniques, ce qui est parfois – lésions du nerf moteur oculaire commun (III) ou du rameau
surprenant. destiné aux muscles droit inférieur et petit oblique, lésion
optochiasmatique, hypertension intracrânienne avec engagement
Troubles de la dynamique oculaire : diplopie cérébral.
Les troubles oculomoteurs neurogènes (ophtalmoplégie) résultent en
Le déficit de la motilité oculaire se traduisant par la diplopie, en règle d’une atteinte des paires nerveuses crâniennes au niveau de
règle immédiate, est consécutif : l’apex orbitaire et peuvent s’intégrer à un syndrome de la fente
– le plus souvent à une lésion mécanique par incarcération dans le sphénoïdale (fissure orbitaire supérieure) ou à un syndrome de
foyer de fracture du muscle droit inférieur ou du muscle petit l’apex.
oblique, les autres muscles droits et le muscle grand oblique étant Consécutifs à un impact latéral violent, ils accompagnent
plus rarement intéressés ; parfois leur embrochage par une esquille généralement des :
osseuse ; – fractures déplacées de la paroi orbitaire latérale (fractures fronto-
– plus rarement à une lésion neurologique (III, IV, VI) orbitaire latérale et fronto-sphéno-temporale) ;
essentiellement dans un fracas orbitaire avec trait irradié à la fissure – fractures déplacées type Le Fort II ou III ;
orbitaire supérieure ;
– hématomes du cône orbitaire ;
– parfois, à la décompensation d’une hétérophorie ancienne.
– hématomes et arachnoïdites de la base du crâne au voisinage de
Les diplopies d’apparition secondaire sont exceptionnelles. l’apex orbitaire.
La diplopie verticale, la plus fréquente, traduit l’atteinte du muscle
droit inférieur (fig 10) :
Examen clinique du traumatisé
– si la limitation de l’élévation est prépondérante, l’incarcération
musculaire est vraisemblablement antérieure ; orbitaire
– si la limitation de l’abaissement domine, il s’agit probablement Quand l’état de conscience le permet, l’analyse comporte un
d’une incarcération postérieure ; interrogatoire relevant les circonstances précises de l’accident.
8
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
EXAMEN MAXILLOFACIAL
11 Test de duction forcée (d’après
Centré sur la région orbitaire, il doit être bilatéral et comparatif. Il Converse).
comprend plusieurs étapes.
¶ Examen ophtalmologique
Quand un traumatisme perforant du globe est suspecté, il devient
une priorité devant toute réparation orbitaire, toute manipulation
pendant le traitement risquant d’aggraver les dégâts oculaires.
Traction
L’interrogatoire recherche une diminution ou une perte d’acuité
visuelle.
Un examen du segment antérieur, de la réactivité pupillaire et du
segment postérieur (fond d’œil) est systématiquement réalisé, au
mieux à l’aide d’un biomicroscope et d’un verre à trois miroirs,
sinon au lit du malade à l’ophtalmoscope, à la recherche
d’éventuelles lésions contusives de la rétine.
¶ Examen orbitopalpébral
Il apprécie :
– la statique et la symétrie des globes oculaires : exo- ou
énophtalmie, dystopie verticale. La distance intercanthale doit être
appréciée. Mais cette distance peut être difficilement évaluable en
cas de lésions bilatérales ; la comparaison des rapports entre les
distances interpupillaire et intercanthale est alors plus intéressante :
un télécanthus post-traumatique est hautement suspecté si ce
rapport est inférieur à 2 ;
A B
– les déformations du cadre orbitaire par une palpation prudente et
douce : les lésions du cadre siègent souvent au niveau des sutures
osseuses zygomaticomaxillaires, frontozygomatiques où l’on pourra
observer un ressaut en « marche d’escalier » avec point douloureux
exquis.
1
L’examen des paupières recherche des plaies, un ptosis post-
traumatique, des atteintes des voies lacrymales.
La palpation retrouve parfois un emphysème sous-cutané signant
une communication entre les tissus orbitaires et les cavités
sinusiennes environnantes ; elle évalue également les troubles de la 2
sensibilité dans les territoires des nerfs supra- et infraorbitaires.
Pour l’étude de la dynamique oculaire, la motilité oculaire doit être 3
évaluée dans toutes les positions du regard. L’observation d’une
diplopie n’est pas toujours significative d’une incarcération
musculaire.
C D
L’exploration de la motilité oculaire se fait en première intention au
doigt ou en fixant l’extrémité d’un stylo par exemple, recherchant
essentiellement des limitations de l’élévation ou de l’abaissement qui 12 Incidences radiographiques.
permettent théoriquement de prédire le site de la fracture du A. Blondeau (nez-menton-plaque).
B. Waters (45° avec le plan de Francfort).
plancher par rapport à l’équateur du globe. Cette exploration, si elle
C. Louisette (avec une cassette spéciale).
confirme une diplopie, est utilement complétée par un test de D. Lignes de McGregor et Campbell modifiées. 1. Ligne supraorbitaire ; 2. ligne
Lancaster qui permet de quantifier sur un schéma les limitations et infraorbitaire ; 3. cintre zygomatomaxillaire.
surtout d’en suivre l’évolution. Quant au test de duction forcée
(fig 11), s’il peut être pratiqué sous anesthésie locale en pinçant le
droit inférieur dans le cul-de-sac conjonctival inférieur, il est au incident pénètre dans la région bregmatique et sort au niveau de la
mieux réalisé sur un patient endormi : il n’a de valeur que très columelle, faisant un angle de 90° avec la plaque ;
positif et réalisé de façon comparative, signant alors l’origine – l’incidence de la Louisette, chère aux Lyonnais, se pratique avec une
mécanique du trouble oculomoteur. cassette spéciale échancrée qui permet de la glisser sous le menton.
L’examen maxillofacial est bien entendu systématique, recherchant Le plan du film est parallèle au plan de Francfort, le rayon incident
en particulier une épistaxis, une limitation de l’ouverture buccale, est vertical rétrobregmatique. Cette cassette permet une très bonne
ou des troubles de l’articulé dentaire associés. étude des parties postéro-latéro-inférieures de la face et surtout peut
s’utiliser au lit du malade.
IMAGERIE Il est commode d’analyser ces deux incidences en s’aidant des
différentes lignes décrites par Campbell et Mc Gregor.
¶ Examens radiographiques simples (fig 12)
Ils conservent toute leur utilité, même si leur importance diminue ¶ Tomodensitométrie [11]
9
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
10
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
15 Fracture orbito-maxillo-zygomatique.
A. Hématome en « monocle », hémorragie sous-
conjonctivale externe, pseudoptosis.
B. Effacement de la pommette, dystopie canthale externe.
*
A *
B
¶ Imagerie
Tomodensitométrie
restauration du plancher orbitaire, objet de très nombreuses
Elle n’est pas obligatoirement pratiquée et n’est pas indispensable à publications depuis celle princeps de Converse.
la stratégie diagnostique et thérapeutique d’une fracture de l’os
zygomatique sans retentissement ophtalmologique. Selon les ¶ Fréquence
possibilités du plateau technique, elle est cependant de plus en plus
souvent proposée par les radiologues en première intention. Elle Leur fréquence est estimée à 3 % des fractures de la région
permet d’obtenir une topographie lésionnelle précise, de mettre en orbitaire [ 6 6 ] . Elle reste faible (1,5 %) dans l’ensemble des
évidence une incarcération du contenu orbitaire et possède un traumatismes de la face [62]. Pour Ouadah, 32 % des atteintes du
intérêt iconographique préopératoire, voire médicolégal (fig 17). plancher sont des fractures isolées [53], 28,2 % pour Meyer [47]. Paoli [54]
retrouve 29 % de fractures du plancher sur 566 traumatismes
faciaux.
FRACTURES ISOLÉES DU PLANCHER ORBITAIRE Les étiologies suivantes sont relevées par Gas [19] sur 85 cas : sport
Elles méritent un chapitre particulier du fait de leur fréquence, de (de contact) 34 %, AVP 27 %, coup de poing 21 %, accidents
leur pathogénie qui reste discutée et de l’évolution des procédés de domestiques, chutes, mécanismes divers 18 %.
11
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
*
A
¶ Pathogénie
Leur pathogénie mérite d’être rappelée [1, 79] . Deux théories
principales, le plus souvent intriquées, semblent s’associer :
– un traumatisme indirect hydraulique, proposé par Smith et Regan
en 1957, confirmé en 1967 par Converse [8] qui lui donne le nom de
« blow-out ». Ici, l’œil amortit directement l’onde de choc sans que le
cadre orbitaire soit intéressé, ce qui implique des agents vulnérants
de petite taille et à faible vélocité. On peut en rapprocher les
fractures en milieu liquide survenues chez les plongeurs [58, 67] ;
– un traumatisme direct osseux, choc sur la margelle infraorbitaire
avec deux conséquences possibles : le rebord cède mais sans
déplacement et la fracture irradie au plancher (blow-out impur), le
rebord ploie sans se rompre et le plancher s’effondre sous l’onde de *
B
choc (mécanisme confirmé par les travaux de Fugino [18]) (fig 18).
Alors que dans les blow-out le plancher reste effondré, ici le
¶ Sur le plan clinique bâillement fracturaire antéropostérieur se remet spontanément en
place, piégeant les éléments herniés au moment de l’impact (droit
On peut retrouver les mêmes éléments que dans les fractures de l’os inférieur, petit oblique et fibres parasympathiques).
zygomatique, à la déformation du cadre orbitaire près.
Le diagnostic repose sur la netteté des signes oculomoteurs : fixité
Elles sont volontiers méconnues au début, du fait de l’absence de du globe dans les tentatives de duction volontaire qui sont de plus
trouble morphologique important et du fait de l’œdème douloureuses, avec diplopie très invalidante et parfois mydriase
ecchymotique palpébral qui masque diplopie et énophtalmie qui témoignant de l’atteinte du contingent parasympathique [22]. Le
sont les maîtres signes dans ces fractures. scanner doit être ici pratiqué en urgence.
Une discontinuité osseuse ne s’observe que dans les fractures en
« blow-out » impur. Fracture en « clapet »
L’hypoesthésie dans le territoire du nerf infraorbitaire est variable Décrite par Merville et Gitton [45], c’est une fracture à charnière
en intensité, parfois absente. interne le plus souvent. Elle pose surtout des problèmes
Compte tenu du mécanisme physiopathologique, l’examen oculaire thérapeutiques.
doit être particulièrement attentif à la recherche de lésions
contusives. TRAITEMENT
L’imagerie standard est souvent peu contributive : l’hémosinus n’est Le traitement obéit à plusieurs principes : restauration des contours
pas toujours présent et une opacité arrondie du toit du sinus peut osseux, restauration des fonctions visuelles et masticatoires afin de
n’être qu’un hématome sous-muqueux. limiter au maximum les séquelles toujours actuelles de ces lésions
dont on connaît la difficulté thérapeutique (déformations
C’est essentiellement la tomodensitométrie par des reconstructions persistantes des reliefs, diplopie, énophtalmie, troubles sensitifs).
frontales et sagittales obliques qui permet un diagnostic lésionnel
Pour atteindre ces objectifs, plusieurs étapes doivent être respectées :
précis : nature de la fracture, siège par rapport au canal
voies d’abord adaptées, libération des tissus incarcérés, réduction et
infraorbitaire, volet osseux effondré dans le sinus ou à charnière
contention des foyers de fracture, comblement des déficits osseux
(fig 19).
par greffons ou implants, sans oublier le traitement des parties
L’endoscopie est proposée par Sandler [71] par trépanation de la fosse molles.
canine sous anesthésie locale au lit du patient, chez certains
polytraumatisés dont l’état interdit temporairement d’autres ¶ Techniques
modalités d’explorations paracliniques.
Voies d’abord [17]
¶ Formes cliniques particulières Elles s’efforcent d’être discrètes, tout en donnant un jour suffisant
pour repérer, réduire et contenir les fragments. Plusieurs sont
Fractures en « trappe » possibles.
Décrites par Soll et Poley [75], il s’agit de variétés cliniques des
fractures du plancher, tirant leur originalité de l’importance des • Voies d’abord cutanées (fig 20)
troubles oculomoteurs nécessitant un traitement d’urgence, – La voie d’abord translésionnelle est possible, mais elle expose au
contrastant avec la pauvreté des signes radiologiques. Ces fractures risque infectieux, offre parfois un jour limité et son élargissement
se voient surtout chez l’enfant et l’adolescent. est difficile si l’abord est insuffisant.
12
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
20 Voies d’abord.
A. Voies d’abord de la région orbitaire ex-
terne. 1. Incision coronale ; 2. incision
temporale ; 3. incision sourcilière externe
(queue du sourcil) ; 4. incision dans la
patte-d’oie ; 5. incision palpébrale haute
(sous-ciliaire) ; 6. incision palpébrale
basse ; 7. incision conjonctivale ; 8. inci-
sion buccale vestibulaire supérieure.
B. Voie d’abord translésionnelle : frac-
ture orbito-maxillo-zygomatique (collec-
tion Dr Barbrel).
C. Voies orbitaires, coupe sagittale. Voie
sous-ciliaire (rétromusculaire). 1. Con-
jonctive ; 2. septum orbital ; 3. graisse
périorbitaire ; 4. orbiculaire ; 5. périorbite
(périoste orbitaire) ; 6. plancher orbitaire.
*
A D. Voies orbitaires, coupe sagittale. Voie
conjonctivale (préseptale).
13
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
Reconstruction
Le comblement des defects osseux a fait et fait toujours appel à une
grande variété de moyens autologues ou hétérologues.
• Autogreffes
Un greffon osseux autogène cortical ou corticospongieux (os
calvarial, crête iliaque, côte dédoublée [30]) est plus fréquemment
utilisé. L’os calvarial a pour avantage sa faible résorption par 24 Fracture maxillozygomatique. Stabilisation frontozygomatique par plaque vissée.
rapport à l’os iliaque et la proximité du site donneur, mais son
prélèvement n’est pas exempt de risques et de complications. on peut s’en tenir à cette simple réduction sous réserve d’un contrôle
Dans les autres sites donneurs osseux faciaux, il faut signaler la radiographique. Si la réduction est instable (30 % des cas), il faut
région symphysaire [34], la paroi antérieure du sinus maxillaire [40] et pratiquer une ostéosynthèse : en l’absence de fragments multiples,
même le processus coronoïde controlatéral [49]. une plaque vissée sur le pilier frontozygomatique suffit à assurer
D’autres autogreffes sont proposées, cartilagineuses : septum une stabilisation tridimensionnelle (fig 24). Dans le cas contraire il
nasal [36] ou conque auriculaire [39], uniquement utilisables pour le faut multiplier les sites d’ostéosynthèse. On reconstruit ensuite
plancher orbitaire. éventuellement le plancher orbitaire suivant les données
préopératoires et celles du test de duction forcée peropératoire
• Implants allogènes [79] (fig 25).
Certains ont été très à la mode pendant de nombreuses années Fractures isolées du plancher
(silicone : Silastict) mais semblent tombés en désuétude du fait de
la fréquence des complications tardives et de l’obligation du retrait Associées ou non aux précédentes, elles sont traitées, soit en urgence
des implants [38, 47, 51, 57]. (fracture en « trappe »), soit dans un délai habituel de 4 à 8 jours.
Les biomatériaux sont en fait extrêmement nombreux, qu’ils soient Pour les fractures en « trappe », dès que l’incarcération est un peu
résorbables (polydioxanone : PDStcupules et plaques) [6, 55], inertes importante, il faut déposer le plancher, en général à sa partie interne,
(polytétrafluoroéthylène [Gore-Text] ; Téflont) [4, 53], ostéo-inducteurs autour de la fracture, puis remplacer par un biomatériau après
(corail type Biocoralt hydroxyapatite) [44, 48], voire métalliques (grilles réintégration du contenu orbitaire, la perte de substance étant
en titane) (fig 23). Ils ont pour avantage l’absence de morbidité du généralement modérée.
site donneur qui doit être comparé à leur tolérance propre [19]. Un Pour les fractures avec perte de substance, l’indication opératoire doit
procédé émergeant pour la réalisation d’implants « sur mesure », reposer sur au moins un des critères suivants :
semble être la stéréolithographie [2] permettant, pour Hoffmann [26],
la réalisation d’implants en céramique adaptés à la perte de – persistance d’une diplopie significative d’origine mécanique dans
substance. La lourdeur et le coût du procédé semblent encore devoir la semaine suivant le traumatisme ;
réserver cette technique à la chirurgie des séquelles osseuses [27]. – présence d’une énophtalmie supérieure à 2 mm responsable de
séquelles esthétiques majeures, surtout en cas de dystopie oculaire
¶ Indications opératoires associée ;
– volumineux déficit osseux supérieur à un tiers ou à 50 % de la
Fractures maxillozygomatiques surface du plancher, responsable d’une énophtalmie secondaire ;
Non déplacées, elles font l’objet d’une simple surveillance. – quant à l’hypoesthésie dans le territoire du nerf infraorbitaire,
Déplacées, elles doivent être réduites, le plus couramment à l’aide isolée, ce n’est pas une indication formelle, car elle est souvent
du crochet de Ginestet par voie percutanée : si la fracture est stable, seulement liée à des phénomènes œdémateux. Elle régresse alors
14
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
*
A
15
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
¶ Techniques
Réduction
Les clichés standards sont le plus souvent normaux et ne mettent en
évidence que des signes indirects comme une opacité ethmoïdale La réduction de l’impaction de la pyramide nasale est instrumentale.
homolatérale ou une pneumorbite sous forme d’un croissant gazeux On utilise selon son choix ou ses habitudes une pince de Martin ou
clair à concavité inférieure sous le toit orbitaire (fig 27). de Ash, ou des ciseaux droits mousse protégés. Le désengrènement
C’est la tomodensitométrie qui montre le siège exact de la fracture de la racine du nez peut être contrôlé directement si un abord cutané
(os planum), l’importance de l’impaction, le comblement des cellules est pratiqué. Il a pour corollaire le risque d’aggravation d’une brèche
ethmoïdales par l’hémosinus, ainsi qu’une éventuelle incarcération ostéoméningée, mais ce n’est pas toujours le cas. Pour cette raison,
du muscle droit interne (fig 28). certains neurochirurgiens préfèrent intervenir après le traitement
maxillofacial et effectuer secondairement le traitement de la brèche
La quantification des déplacements fracturaires peut être étudiée sur
si elle persiste ou si elle s’aggrave.
ce bilan. En effet, les fractures de la paroi médiale de l’orbite sont
une cause majeure d’énophtalmie secondaire [24]. Le problème est de
Contention
déterminer à partir de quel déplacement ce risque existe. Parson [56]
a essayé de quantifier expérimentalement l’importance de La contention des fragments osseux fait appel aux procédés
l’énophtalmie induite par le déplacement des parois orbitaires. Il en classiques (fils métalliques ou plaques d’ostéosynthèse).
16
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
*
A
La contention du tendon canthal interne s’effectue par canthopexie
interne transnasale (fig 30). Elle est réalisée selon la technique de
Mustardé à l’aide d’un fil d’acier serti chargeant le tendon canthal et
la périorbite, passé en arrière de la crête lacrymale postérieure, puis
toronné sur un taquet controlatéral.
Il faut à ce stade restaurer les voies lacrymales ou rendre les
conditions favorables à une future dacryo-cysto-rhinostomie.
¶ Indications opératoires
*
B
Traitement d’une dislocation orbitonasale 31 Fracture orbitocrânienne.
A. Risque de fistule.
La réduction sanglante s’effectue par voie cutanée adaptée au cas
B. Risque de fistule faible, risque important d’hématome extradural.
d’espèce ; elle est le plus souvent associée à une réduction par voie
endonasale. Classiquement, la levée de l’incarcération s’effectue par
La racine du nez est stabilisée par une plaque vissée miniaturisée esquillotomie, puis la prévention de la récidive par une interposition
s’appuyant sur une zone fixe : en haut frontale et en bas sur les de biomatériaux.
apophyses montantes du maxillaire. Rauch [64] prône une décompression radicale de la paroi médiale de
Si l’utilisation de microplaque vissée s’avère inadéquate en raison l’orbite qui est largement ouverte en dedans en réalisant une
d’une instabilité trop grande ou de comminution de l’auvent nasal, ethmoïdectomie partielle. Elle aurait pour avantage de lever les
ce qui est souvent le cas des dislocations orbitonasales bilatérales, le incarcérations importantes et de drainer le foyer de fracture vers les
galbe de l’arête et la projection nasale sont obtenus par la mise en fosses nasales, mais le risque d’énophtalmie secondaire paraît
place d’emblée d’un greffon d’apposition. Puis le traitement du important.
télécanthus fait appel aux techniques de canthopexie transnasale sur Chen [7], pour limiter la rançon cicatricielle cutanée, propose une
bourdonnets pour rétablir les dépressions orbitonasales et participer reconstruction par voie endoscopique transconjonctivale.
à la contention du nez fracturé. La nécrose cutanée qui peut survenir
en cas de serrage trop important est prévenue par une surveillance
régulière et une levée précoce si des signes de souffrance Fractures orbitocrâniennes
apparaissent. Les fractures du toit de l’orbite (roof des Anglo-Saxons) s’inscrivent
De la même manière, dans les dislocations orbitonasales unilatérales dans un tableau de traumatologie craniofaciale [29]. Elles intéressent
avec fracture comminutive de l’apophyse frontomaxillaire, un toute la partie supérieure de l’orbite et représentent 5 à 10 % des
greffon osseux (calvarial par exemple) taillé à la dimension de la traumatismes faciaux [43] [65], essentiellement par AVP, générateurs de
perte de substance peut être ostéosynthésé en place et la canthopexie traumatismes violents et de blessés polytraumatisés. Les statistiques
réalisée ensuite à travers ce greffon. montrent qu’elles sont fréquentes chez les enfants. Elles entraînent
En fin d’intervention, on réaligne le septum nasal. La contention par des complications cranioencéphaliques et neuro-ophtalmologiques
plaques préfabriquées placées de chaque côté du septum, fixées par connues depuis fort longtemps. Hippocrate ne disait-il pas : « les
un point en « U » transfixiant, est maintenue pendant 10 à 15 jours. blessures qui portent sur le sourcil ou un peu au-dessus
Un méchage endonasal bilatéral complète le traitement si nécessaire. obscurcissent la vue » ? Du fait de leur complexité thérapeutique,
elles impliquent une prise en charge multidisciplinaire où
Traitement des fractures isolées de la paroi médiale de l’orbite neurochirurgie, chirurgie maxillofaciale et ophtalmologie prennent
chacune leur part.
Une fracture simple de la paroi médiale n’impose qu’une
surveillance clinique, assortie d’un traitement médical Mettant en relation l’endocrâne, l’orbite et le sinus frontal selon des
(antibiothérapie, aérosols). degrés variables, il est habituel d’en distinguer deux sous-variétés [76]
qui s’expliquent aisément par leur étiopathogénie :
Une incarcération du muscle droit médial affirmée par le test de
duction forcée et la tomodensitométrie est une indication opératoire – des fractures médianes en dedans d’une verticale passant par
formelle. Il en est de même pour une incarcération de la graisse l’échancrure supraorbitaire (fig 31) ;
périorbitaire avec des troubles de l’oculomotricité objectivés par un – des fractures latérales en dehors de l’échancrure supraorbitaire :
test de Lancaster effectué lorsque la diminution du chémosis le fractures orbitoptérioniques ou fronto-sphéno-temporales [60] selon
permet. les auteurs (fig 31).
Les techniques utilisent la voie d’abord canthale médiale [17], plus ou Ces fractures sont souvent associées à des fractures transfaciales de
moins étendue en fonction de l’existence d’une atteinte associée ou type Le Fort II ou III. C’est parmi elles que l’on retrouve le plus
non du plancher orbitaire. fréquemment des atteintes de l’apex orbitaire.
17
22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
18
Stomatologie Fractures de l’orbite 22-072-A-10
¶ Indications
33 Fracture orbitocrânienne. Voie coronale. Possibilité d’utilisation d’un lambeau Fractures isolées du plafond orbitaire
de galéa à pédicule latéral ou à pédicule médian.
Il est licite de s’abstenir chirurgicalement lorsqu’elles ne sont pas
déplacées (fig 34).Pour une fracture déplacée, il faut désincarcérer la
antérieure du sinus frontal. La voie d’abord la plus commune de ces périorbite et éventuellement le releveur de la paupière. Les petits
lésions reste la voie coronale bitemporale qui, outre la dissimulation defects n’ont pas systématiquement besoin d’être reconstruits. En
intracapillaire, permet seule l’abord crânien avec exposition optimale revanche, si la perte de substance est large, il faut reconstruire par
du toit orbitaire, du sinus frontal, des piliers de la face et la un greffon osseux pour éviter une synéchie orbitodurale (entraînant
reconstruction des contours orbitaires supérieurs. Elle est menée au énophtalmie et fixité du globe).
ras de l’épicrâne jusqu’au trait de fracture, puis en sous-périosté.
Elle peut être prolongée latéralement vers les piliers orbitaires Lésions du sinus frontal
externes et les zygomas. En avant, le décollement sous-périosté doit Elles méritent une attention particulière. Pour éviter le risque de
ménager si possible le pédicule supraorbitaire qui peut être libéré mucocèle, de nombreux auteurs ont recommandé l’ablation
de son canal. En cas de brèche ostéodurale, il faut se réserver la (crânialisation) ou l’oblitération (exclusion) du sinus et du canal
possibilité de prélever un lambeau de galéa à pédicule latéral ou nasofrontal chez les patients ayant une fracture de ce sinus.
antérieur dont le tracé doit être prévu avant l’incision périostée L’attitude varie suivant la lésion présentée :
(fig 33). – les fractures isolées de la paroi antérieure font l’objet d’une
Ceci n’exclut pas, en cas de lésions associées, d’utiliser d’autres voies ostéosynthèse classique ou d’une reconstruction par greffon
d’abord orbitaires précédemment décrites. autologue après mise en place d’un drainage frontonasal, ceci
d’autant plus que certains grands sinus pneumatisent de façon
Réparations osseuses importante le rebord orbitaire supérieur et jouent donc un rôle
majeur dans le galbe frontal ;
Elles sont effectuées en même temps ou avant le temps
– les atteintes comminutives de la paroi postérieure du sinus
neurochirurgical s’il est nécessaire, avec en particulier
doivent conduire à sa crânialisation après éradication totale de la
l’étanchéification de la dure-mère avec un greffon d’épicrâne ou un
muqueuse sinusienne, obturation du canal nasofrontal par un taquet
lambeau de galéa.
osseux et « étanchéification » de la base du crâne par greffon
Les déplacements fracturaires sont réduits et contenus le plus corticospongieux ;
souvent par des ostéosynthèses miniaturisées vissées en titane, sous – a contrario, les fractures non déplacées sont, soit laissées en l’état,
forme de plaques simples pour les piliers osseux (frontomaxillaire, soit conduisent à l’exclusion des petits sinus.
frontozygomatique), sous forme de plaques tridimensionnelles plus
adaptables au niveau de la voûte. Ces fixations rigides ont Lésions des voies optiques
actuellement la préférence de nombreux auteurs, car garantes de L’exploration et la décompression des voies optiques peuvent se
l’absence de déplacements secondaires, même dans les fractures faire :
plurifragmentaires. Les ostéosynthèses au fil d’acier gardent
cependant des adeptes, en particulier pour la fixation des volets – soit par voie frontale neurochirurgicale après trépanation du toit
crâniens. du canal ;
L’existence de pertes de substance osseuse, soit du fait du – soit par voie canthale médiale transethmoïdosphénoïdale ;
traumatisme initial, soit du fait de l’extrême comminution rendant – soit par voie transmaxillaire, sous neuroleptanalgésie de façon à
les fragments inutilisables, doit conduire à une restauration, de pouvoir tester la vision.
préférence par greffon osseux autologue prélevé in situ Il faut toutefois rappeler que la neuropathie optique traumatique est
(dédoublement d’un volet d’abord neurochirurgical, greffon une urgence dont le traitement ne présente pas de consensus : la
calvarial) ou à distance (greffon iliaque, costal dédoublé...). Les place de la corticothérapie seule, de la décompression chirurgicale,
matériaux biocompatibles ne sont utilisés qu’au stade séquellaire. ou de l’association des deux est toujours controversée [41].
Références ➤
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22-072-A-10 Fractures de l’orbite Stomatologie
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20
¶ 22-070-A-12
Fractures de la mandibule
F. Denhez, O. Giraud, J.-B. Seigneuric, A.R. Paranque
Définies classiquement comme une solution de continuité de l’os, les fractures mandibulaires ont des
répercussions à des degrés divers, selon leur forme anatomoclinique et leur localisation, sur la fonction
manducatrice et l’esthétique de la face. Après des rappels anatomophysiologiques permettant de mieux
appréhender les mécanismes de survenue de ces pathologies traumatiques, le bilan lésionnel est exposé.
En découlent la prise en charge thérapeutique et l’exposé des différentes techniques d’orthopédie, de
chirurgie et de mécanothérapie utilisées pour traiter les fractures mandibulaires.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
■ Introduction
Parmi les lésions traumatiques du complexe maxillofacial, les
fractures de la mandibule occupent une place privilégiée par
leur fréquence. Seul os mobile de la face, la mandibule se trouve
particulièrement exposée dans les traumatismes en raison de sa
position basse et projetée qui lui fait jouer le rôle d’un véritable
pare-chocs. Les étiologies des fractures mandibulaires sont
multiples. On retrouve de façon préférentielle les accidents de
la voie publique, les rixes et les sports de haute vélocité.
Définies classiquement comme des solutions de continuité de
l’os, les fractures mandibulaires ont des répercussions à des Figure 1. Anatomie de la mandibule. 1 : Condyle ; 2 : col du condyle ;
degrés divers, selon leur forme anatomoclinique et leur locali- 3 : branche montante ; 4 : angle mandibulaire ; 5 : ligne oblique externe ;
sation, sur la fonction manducatrice et l’esthétique de la face. 6 : branche horizontale ; 7 : trou mentonnier (foramen ovale) ; 8 : sym-
Le traitement vise à rétablir autant que possible ces deux physe mandibulaire ; 9 : ligne oblique interne ; 10 : épine de Spix ; 11 :
éléments. coroné.
Stomatologie 1
22-070-A-12 ¶ Fractures de la mandibule
Vascularisation et innervation
La mandibule est un os à vascularisation terminale, laquelle
Figure 3. Système musculaire et cinétique mandibulaire. 1. Action des est assurée principalement par l’artère alvéolaire inférieure,
muscles élévateurs. 2. Action des muscles abaisseurs. 3. Rétropulsion . 4. branche de l’artère maxillaire, elle-même branche de division de
Propulsion, diduction. la carotide externe. L’artère alvéolaire inférieure pénètre dans le
canal osseux du même nom au niveau de l’épine de Spix. Dans
constituent des structures de renfort. L’os basal de la mandibule son trajet intraosseux, elle fournit des rameaux osseux et
est constitué d’une gouttière épaisse de tissu compact au sein de dentaires.
laquelle se trouve du tissu spongieux dont les trabéculations À son extrémité distale, elle se divise en deux branches : une
s’établissent et s’orientent selon les lignes de forces auxquelles extraosseuse qui émerge par le trou mentonnier ; c’est la
est soumis cet os. Ces trabéculations forment une structure branche mentonnière ; l’autre qui continue son trajet intraos-
classiquement décrite en « nid d’abeilles » qui contribue au seux et qui participe à la vascularisation de la région symphy-
renfort mécanique de l’entité osseuse. saire et du groupe dentaire incisivocanin correspondant.
Le maxillaire et la mandibule portent le système dentaire qui L’apport périosté est, quant à lui, mineur.
est enchâssé au sein de l’os alvéolaire. Sa structure histologique L’innervation est assurée par le nerf alvéolaire inférieur (V3),
ne présente pas de différence avec l’os basal mais sa genèse et branche du nerf trijumeau (V), qui, dans son trajet classique, est
sa persistance sont intimement liées à la présence des dents. satellite de l’artère et de ses branches terminales.
L’os alvéolaire apparaît donc avec les dents et disparaît progres- Notons dès à présent que dans certains traumatismes, des
sivement après édentement par défaut de sollicitation bioméca- mécanismes de cisaillement et de compression peuvent être à
nique. L’épaisseur des corticales externe et interne de l’os l’origine de complications nerveuses (paresthésies, hypoesthé-
alvéolaire n’est pas homogène sur l’ensemble de l’arc mandibu- sies, anesthésies) et/ou vasculaires (hémorragies, hématomes).
laire. Cette variation est liée à l’axe d’implantation des dents. La
corticale externe augmente d’épaisseur vers les secteurs posté-
rieurs et, inversement, la table interne diminue.
L’os alvéolaire renforce l’architecture de la mandibule mais les
■ Topographie des fractures
dents enchâssées dans cette structure constituent parfois un mandibulaires (Fig. 4)
facteur fragilisant en traumatologie. Elles forment des lignes de
faiblesse en fonction de l’axe d’implantation et de la longueur La topographie lésionnelle des fractures de la mandibule est
radiculaire. C’est ainsi que la canine, par la taille de sa racine, bien établie à partir de nombreuses études. D’un point de vue
et la dent de sagesse, par son inclusion fréquente, oblique fondamental, elle s’explique parfaitement par la connaissance
mésiale au sein d’un angle, constituent des zones préférentielles de l’anatomie et de la fonction de cet os.
de fracture lors des traumatismes de la mandibule (Fig. 2). [3, 4]
2 Stomatologie
Fractures de la mandibule ¶ 22-070-A-12
Figure 5.
A. Pression sur la symphyse entraînant une douleur de
l’articulation temporomandibulaire (ATM).
B. Force latérale sur les angles déclenchant une douleur
symphysaire.
Stomatologie 3
22-070-A-12 ¶ Fractures de la mandibule
Malgré les nombreux défauts qu’elle présente, l’incidence Clichés en défilé mandibulaire
panoramique des maxillaires demeure un cliché de référence
dans le bilan lésionnel de la mandibule. L’image obtenue Ils ne sont plus vraiment d’actualité. Cependant, ils restent
permet l’analyse de l’architecture osseuse mandibulaire et des indiqués quand, pour des raisons techniques dépendantes ou
portions dentées. Elle s’apparente à une tomographie passant indépendantes du patient, la radiographie panoramique n’est
par un plan de coupe préétabli d’environ 1,5 cm d’épaisseur. Le pas réalisable. L’incidence du défilé permet l’analyse d’une
cliché se déroule d’une ATM à l’autre. Cependant, la radiogra- hémimandibule. Deux clichés sont donc nécessaires pour un
phie panoramique des maxillaires doit être considérée comme examen complet. Les images obtenues montrent beaucoup de
un cliché de débrouillage et doit être complétée par d’autres superpositions et, généralement, seule la portion dentée de la
incidences exposées ultérieurement. En effet, la déformation du mandibule est interprétable.
4 Stomatologie
Fractures de la mandibule ¶ 22-070-A-12
Figure 10.
1 A. Incidence face basse. a : plan orbitonasal ; b : rayon incident.
B. Schéma d’un cliché face basse. 1. Rocher ; 2. racine du
2 zygoma ; 3. condyle mandibulaire ; 4. col du condyle ; 5. co-
3 roné ; 6. branche montante ; 7. ligne oblique externe ; 8. épine
de Spix ; 9. alvéolaire inférieur ; 10. trou mentonnier (foramen
4 ovale).
a 5
8 6
+15 7
b
9
A
10
B
Stomatologie 5
22-070-A-12 ¶ Fractures de la mandibule
Localisation
■ Formes anatomocliniques
des fractures mandibulaires [8, 9]
Généralités
Les formes anatomocliniques des fractures mandibulaires sont
nombreuses. De façon générale, un certain nombre de qualifi-
catifs sont utilisés pour classer et définir les fractures : fractures
ouvertes ou fermées, uni- ou plurifocales (selon le nombre de
localisations de traits de fracture), déplacées ou non, partielles
ou totales (le trait de fracture rompt partiellement ou totale-
ment l’os), stables ou instables, isolées ou associées (s’il existe
d’autres atteintes de l’intégrité corporelle). Enfin, l’orientation
du trait de fracture définie dans les trois plans de l’espace
(vertical, horizontal et sagittal), et les rapports des extrémités
des segments fracturés (chevauchement, décalage, angulation)
précisent le type de fracture. L’ensemble de ces qualificatifs peut
donc s’appliquer à la classification topographique des fractures Figure 12. Fracture de la branche horizontale.
mandibulaires développée ci-dessous. A. Fracture stable.
B. Fracture instable.
Classification topographique
Classiquement, on distingue les fractures de la portion dentée choc violent direct sur le menton. Une fracture de l’un ou des
et de la portion non dentée. deux condyles peut y être classiquement associée par transmis-
sion des forces traumatiques.
Fractures de la portion dentée Fractures de la branche horizontale (Fig. 12)
La présence des dents et la déchirure de la muqueuse gingi- Elles siègent entre la face mésiale de la première prémolaire
vale entraînent une communication du foyer de fracture avec la et la face distale de la deuxième molaire. La stabilité de la
cavité buccale. Les fractures de la portion dentée de la mandi- fracture est conditionnée par l’orientation du trait de fracture.
bule sont donc considérées comme des fractures ouvertes et Une orientation oblique en bas et en arrière entraîne une
doivent être traitées comme telles. instabilité due à l’action du jeu musculaire. Le fragment
antérieur, sous l’action des muscles sus-hyoïdiens, tend à
Fractures symphysaires et parasymphysaires
s’abaisser. Inversement, le fragment postérieur ascensionne par
Par définition, elles sont localisées entre les faces distales des action des muscles élévateurs de la mandibule. Il existe parfois
canines. Le trait de fracture est variable, médian, paramédian, un déplacement du menton du côté fracturé par chevauche-
oblique ou vertical, avec une localisation préférentielle le long ment des fragments antérieur et postérieur. À noter que ces
d’une racine dentaire et plus spécifiquement le long de la mécanismes sont majorés en cas d’édentement, l’occlusion
canine, en raison de la raréfaction de l’os à ce niveau. Dans les dentaire agissant comme un facteur limitant les déplacements.
formes unifocales, les signes cliniques sont le plus souvent Un trait de fracture oblique en bas et en avant confère une
discrets. Ils peuvent même être tardifs avec des déplacements meilleure stabilité. Dans les déplacements importants, les
secondaires. Une simple plaie de la muqueuse gingivale est atteintes du nerf dentaire inférieur sont fréquentes, à type de
parfois le seul signe clinique révélateur de la solution de contusion ou de section, et sont alors responsables, selon le cas,
continuité. Les formes bilatérales peuvent entraîner un déplace- d’hypoesthésies ou d’anesthésies du territoire labiomentonnier.
ment vers le bas et en arrière de la région symphysaire, avec un La rupture de l’artère dentaire inférieure peut exceptionnelle-
risque de chute postérieure de la langue qui s’insère sur les ment être à l’origine d’une hémorragie gravissime, pouvant
apophyses geni pouvant ainsi engendrer une détresse respira- justifier une hémostase en urgence, ou d’un hématome à
toire. À l’origine de ces fractures, on retrouve généralement un évacuer.
6 Stomatologie
Fractures de la mandibule ¶ 22-070-A-12
Figure 13. Fractures du dans ce type de traumatisme, les condyles jouent le rôle de
condyle et du coroné. 1 : Frac- rupteur en cédant sous le choc afin de protéger les cavités
ture capitale ; 2 : fracture glénoïdes et la base du crâne.
condylienne haute ; 3 : frac- Fractures capitales. Elles concernent la tête du condyle. On
ture sous-condylienne basse ; peut parfois observer un véritable éclatement de l’extrémité
4 : fracture du coroné. condylienne mais généralement, la fracture se présente sous la
forme d’un trait unique. Comme dans les fractures sous-
condyliennes basses, les signes cliniques sont généralement
assez discrets et peuvent même passer inaperçus.
Tout traumatisme mandibulaire, même minime, chez un
patient se plaignant d’une simple douleur dans les mouvements
d’ouverture, sans signes évocateurs de perturbation de l’articulé,
impose tout de même de suspecter une fracture condylienne
intra-articulaire ou extra-articulaire haute. Celle-ci sera confir-
mée ou infirmée par les données de l’imagerie.
Fractures du coroné
Elles sont peu fréquentes. Le plus souvent, la symptomatolo-
gie est réduite à un simple trismus. Sous l’action des fibres
musculaires du temporal, le coroné est attiré en haut et en
Fractures de l’angle mandibulaire arrière. Le diagnostic reste essentiellement radiologique.
La région est limitée en arrière par la ligne horizontale du
Fractures alvéolodentaires et dentaires
trigone rétromolaire et en avant par la face distale de la
deuxième molaire. La présence d’une dent de sagesse incluse est Elles peuvent être isolées ou associées à une solution de
un facteur favorisant la survenue de ce type de fracture. Le trait continuité de l’os basal. Les fractures alvéolodentaires touchent
prend plutôt une orientation oblique en bas et en arrière et préférentiellement le bloc incisivocanin particulièrement
résulte le plus souvent d’un choc direct. Le déplacement est exposé, par choc direct antérieur entraînant une version
variable. Il se manifeste généralement par un décalage du point linguale du secteur dentaire. Les secteurs prémolaire et molaire
interincisif du côté fracturé et une béance postérieure controla- présentent généralement des lésions dentaires pures dans les
térale. Lorsque la troisième molaire est présente sur l’arcade ou chocs latéraux (fractures cuspidiennes).
en position d’inclusion, elle peut constituer un obstacle à la Classiquement, on distingue donc :
réduction de la fracture (cf. traitement fracture mandibulaire). • les atteintes dentaires pures :
L’atteinte du nerf dentaire inférieur est fréquente. C les fractures coronaires :
– fractures de l’émail ;
Fractures de la région non dentée – fractures amélodentinaires avec ou sans exposition
pulpaire ;
Fractures de la branche montante
C les fractures radiculaires (tiers apical, moyen, cervical) ;
Elles concernent la région s’étendant de l’angle mandibulaire C les fractures coronoradiculaires (horizontales, verticales ou
aux apophyses du condyle et du coroné. Ces fractures sont plus obliques) ;
rares et les déplacements sont peu fréquents, cela étant essen- • les atteintes alvéolodentaires :
tiellement dû à l’action protectrice et stabilisatrice de la gaine C la subluxation : la dent est mobile et douloureuse mais
musculaire constituée principalement des muscles masséter et reste dans son alvéole ;
ptérygoïdien médial. Quelle que soit l’orientation du trait de C la luxation partielle : la dent occupe une position différente
fracture, on observe généralement une limitation d’ouverture dans son alvéole. Elle peut être extrusée, ingressée, vestibu-
buccale associée, dans les fractures déplacées, à un contact
lée, ou lingualée ;
prématuré homolatéral dû à une diminution de la longueur de
C la luxation totale : la dent est expulsée de son alvéole ;
la branche montante.
C la fracture partielle ou totale du procès alvéolaire : le
Fractures du condyle (Fig. 13) fragment alvéolodentaire est plus ou moins mobile ;
Elles ont pour origine essentiellement des chocs indirects, sur généralement, il reste solidaire de l’os basal par l’intermé-
le menton ou le côté controlatéral de la mandibule. On peut les diaire de la fibromuqueuse gingivale.
observer particulièrement lors des chutes en avant dans les
pertes de connaissance en position orthostatique. La personne Fractures particulières
tombe brutalement sans interposition des membres supérieurs et
le menton percute directement le sol. Dans ce cas, les fractures Fractures comminutives
bicondyliennes sont fréquentes. Il s’agit de fractures plurifragmentaires pouvant comporter
On distingue les fractures extra-articulaires et les fractures des pertes de substance, voire une disparition d’un segment
intra-articulaires. osseux. Elles sont assez typiques des traumatismes balistiques
Fractures extra-articulaires : fractures sous-condyliennes par armes à feu ou des grands traumatismes rencontrés lors des
basses. En règle générale, les déplacements sont rares, l’articulé accidents du trafic ou des chutes de grande hauteur.
dentaire est peu perturbé. Ces fractures passent parfois inaper-
çues, la symptomatologie étant généralement réduite à une Fractures chez l’enfant
simple douleur à l’ouverture et à la fermeture buccale. Trois périodes sont distinguées :
Fractures intra-articulaires. • de la naissance à la première année : la plasticité de l’os est telle
Fractures condyliennes hautes. Sous l’action des fibres muscu- que les traumatismes sont réduits au minimum. Les dents ne
laires du ptérygoïdien médial, la tête du condyle bascule en font normalement leur apparition qu’à partir de l’âge de
avant et en dedans. Il en résulte une diminution unilatérale de 6 mois ;
la dimension verticale se traduisant cliniquement par une • entre 1 an et 6 ans : le développement de la motricité jusqu’à
prématurité des contacts occlusaux du côté fracturé. La cinéti- l’acquisition de la marche et la sociabilisation de l’enfant à la
que mandibulaire est contrariée en amplitude dans les mouve- vie courante font qu’il est naturellement plus exposé aux
ments d’ouverture et de diduction. La pointe du menton est traumatismes mandibulaires. Les condyles sont peu solides et
déviée du côté homolatéral. Les fractures bilatérales ne sont pas les portions dentées présentes ou futures de la mandibule
rares en cas de choc sur le menton ; on observe alors un recul sont rendues fragiles par la présence de nombreux germes
mandibulaire associé à une béance antérieure. Rappelons que dentaires ;
Stomatologie 7
22-070-A-12 ¶ Fractures de la mandibule
• entre 6 et 12 ans : l’enfant est en denture mixte. Les trauma- etc.), de pathologies générales à retentissement mandibulaire
tismes alvéolodentaires sont fréquents et favorisés par la (ostéoporose, dysplasie fibreuse, etc.), de pathologies infectieuses
présence de dents immatures sur l’arcade. Le secteur incisif ou postradiques (ostéite chronique, ostéoradionécrose).
maxillaire est particulièrement concerné. Ces pathologies compliquent généralement la prise en charge
Avant 12 ans, le traitement des fractures mandibulaires chez thérapeutique et sont sources de retard de consolidation.
l’enfant est rendu difficile par la présence de nombreux germes, .
ce qui réduit la prise en charge thérapeutique au seul traitement .
orthopédique.
■ Références
Fractures chez l’édenté [1] Rouvière H, Delmas A. Anatomie humaine. T 1: Tête et cou.
Descriptive, topographique et fonctionnelle. Paris: Masson; 654p.
La disparition des dents entraîne une perte conjointe de l’os [2] Brizon J, Castaing J. Feuillets d’anatomie n°11. Ostéologie de la tête et
alvéolaire. Celle-ci est d’autant plus importante qu’il n’y a pas du tronc. Paris: Maloine; 1997 (140p).
de compensation prothétique. La mandibule est donc fragilisée [3] Iida S, Nomura K, Okura M, Kogo M. Influence of the incompletely
par la perte d’un capital osseux et l’absence de dents amplifie erupted lower third molar on mandibular angle and condylar fractures.
l’impact des traumatismes par défaut de calage. Le déplacement J Trauma 2004;57:613-7.
des fractures est favorisé par l’édentement. La prise en charge [4] Dodson TB. Third molars may double the risk of angle fracture of the
thérapeutique est plus difficile en raison de l’absence de mandible. Evid Based Dent 2004;5:78.
[5] Denhez F, Seigneuric JB, Duhamel P, Cantaloube D. Examen d’un trau-
référentiel occlusal.
matisé maxillofacial. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris),
Stomatologie, 22-068-A-12, 2003: 11p.
Fractures pathologiques [6] LacanA. Nouvelle imagerie dentaire. Paris: CDP éditions; 1990 (168p).
[7] Teman G. Imagerie maxillofaciale pratique. Paris: éditions Quintes-
On les définit comme des fractures survenant sur un tissu sence International; 2001 (244p).
osseux fragilisé par l’évolution d’un processus pathologique [8] Le Breton G. Traité de séméiologie et clinique odonto-stomatologie.
ostéolytique. Les étiologies sont nombreuses. Il peut s’agir de Paris: CDP éditions; 1998.
tumeurs bénignes d’origine odontogène ou non (kystes mandi- [9] Piette E, Reychler H. Traité de pathologie buccale et maxillofaciale.
bulaires, améloblastomes, etc.), de tumeurs malignes (sarcomes, Bruxelles: De Boeck Université; 1991.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Denhez F., Giraud O., Seigneuric J.-B., Paranque A.R. Fractures de la mandibule. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Stomatologie, 22-070-A-12, 2005.
8 Stomatologie
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 22-071-A-10
22-071-A-10
Introduction
Les fractures du maxillaire supérieur correspondent à une solution
de continuité qui intéresse le maxillaire supérieur en partie ou en
totalité. Elles représentent en particulier les fractures décrites par Le
Fort.
Leur diversité tient au nombre de leurs combinaisons entre elles et
avec d’autres formes cliniques plus rares à traits verticaux. Bien que
moins fréquentes aujourd’hui, en raison de l’élaboration de moyens
de protection efficaces, néanmoins la violence des traumatismes leur
associe des fractures des autres régions de la face et peut induire
des troubles fonctionnels et morphologiques. Les moyens
radiologiques actuels aident efficacement à leur exploration.
Si les ostéosynthèses par plaques miniaturisées-vissées et les greffes
osseuses immédiates s’avèrent intéressantes, l’arsenal thérapeutique
classique reste toujours d’actualité, car tributaire des conditions
variables d’exercice et des perturbations anatomopathologiques.
Données anatomiques
MORPHOLOGIE
Le maxillaire supérieur, pair et symétrique, pièce maîtresse du
massif facial supérieur, participe à la constitution des principales
1 Maxillaire : vue de trois quarts.
cavités de la face : fosses nasales, palais osseux de la cavité buccale, 1. Maxillaire supérieur ; 2. frontal ; 3. malaire ; 4. os propre du nez ; 5. unguis ; 6. os
cavité orbitaire, fosse ptérygomaxillaire (fig 1, 2). planum ; 7. foramen infraorbitaire ; 8. canal infraorbitaire ; 9. fente sphénomaxillaire ;
Formé d’une pyramide quadrangulaire à base antéroexterne, 10. foramen ethmoïdal antérieur ; 11. foramen ethmoïdal postérieur ; 12. arcade alvéo-
couchée horizontalement, il est creusé d’une cavité, le sinus lodentaire.
maxillaire, à laquelle se trouvent soudées plusieurs apophyses en
rapport étroit avec les 13 os du massif facial supérieur (malaire,
unguis, palatin, cornet inférieur, os du nez, vomer et indirectement
Jean-Pierre Dandrau : Spécialiste des hôpitaux des Armées, chef de service de chirurgie maxillofaciale et
stomatologie. os zygomatique) [5, 6, 29].
Serge Aubert : Spécialiste des hôpitaux des Armées, adjoint au chef de service.
Service de chirurgie maxillofaciale, hôpital d’instruction des Armées Legouest, 27, avenue de Plantières,
57070 Metz, France. Ces apophyses sont représentées par :
Daniel Cantaloube : Professeur agrégé du Val-de-Grâce, chef du service de chirurgie plastique et
maxillofaciale, hôpital d’instruction des Armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart cedex,
France. – l’apophyse montante du maxillaire ;
Toute référence à cet article doit porter la mention : Dandrau JP, Aubert S et Cantaloube D. Fractures des maxillaires. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés), Stomatologie,
22-071-A-10, 2001, 13 p.
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Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
Artérielle
Elle est assurée à droite et à gauche par les branches d’une seule et
même artère : la maxillaire interne, branche de division terminale de
la carotide externe.
Adossée à la tubérosité maxillaire, elle distribue plusieurs branches
à destinée maxillaire avant de traverser le foramen sphénopalatin,
au-delà duquel elle prend le nom d’artère sphénopalatine.
• Artère sphénopalatine
Elle assure la vascularisation du palais :
– par la palatine descendante qui emprunte le canal palatin
postérieur et se termine en :
– branche antérieure à destinée palatine le long du rempart
alvéolaire ;
– branche postérieure à destinée vélaire ;
– par la nasopalatine qui irrigue le plafond, la cloison et le plancher
des fosses nasales avant de gagner le canal palatin antérieur.
• Artère sous-orbitaire
Elle naît dans la fosse infratemporale emprunte la fente
4 Coupe transversale passant par la deuxième molaire. sphénomaxillaire, la gouttière puis le canal sous-orbitaire avant de
1. Frontal ; 2. apex crista galli ; 3. cellules ethmoïdales ; 4. cornet supérieur ; 5. lame distribuer des branches terminales jugales et palpébrales inférieures,
perpendiculaire de l’ethmoïde ; 6. cornet moyen ; 7. vomer ; 8. cornet inférieur ; 9. ma- donnant sur son trajet intraosseux des branches alvéolodentaires à
laire ; 10. tissu cutané ; 11. masséter ; 12. petit zygomatique ; 13. nerf facial (VII) ; 14. destinées incisivocanines.
grand zygomatique ; 15. canal de Sténon ; 16. buccinateur ; 17. sinus maxillaire.
• Artère antroalvéolaire de Jasques
– Le plateau palatin constitue en quelque sorte un point d’appui
des trois piliers verticaux. Elle aborde le maxillaire au niveau de la tubérosité et assure la
vascularisation prémolomolaire et buccinatrice. Les différentes
Dans le plan sagittal branches alvéolodentaires de ces deux dernières artères
Le système vomer-lame perpendiculaire de l’ethmoïde unit la ligne s’anastomosent entre elles en un réseau sous-apical.
médiane maxillopalatine à l’ethmoïde et au sphénoïde, constituant Drainage veineux
une cloison sagittale verticale de résistance médiocre.
Il est assuré par les veines homologues des artères, se drainant dans
Ce squelette osseux présente quelques insertions musculaires les plexi veineux ptérygoïdiens (appliqués sur les reliefs
particulières : tubérositaires et les muscles ptérygoïdiens externes par des gaines
– le ptérygoïdien latéral inséré en partie sur la tubérosité maxillaire ; vasculaires décrites par Champy). Les plexi s’individualisent en
– le canin et le buccinateur traversés par le canal de Sténon ; veines maxillaires qui se drainent dans le réseau jugulaire interne.
– le masséter par ses insertions les plus antérieures. Innervation
Au-delà, le maxillaire supérieur présente des rapports étroits avec Elle est assurée par les branches du nerf maxillaire supérieur,
ses plans de couverture : la peau et les éléments sous-jacents que branche du trijumeau qui se distribue en : nerfs palatins antérieur et
sont le tissu cellulocutané et le système musculoaponévrotique inférieur, nerf nasopalatin, nerf alvéolaire supérieur (deux
superficiel (SMAS) sous lequel cheminent les branches terminales postérieurs, un inférieur, un antérieur) anastomosés en un plexus
du nerf facial (fig 4). sus-apical et le nerf sous-orbitaire, sources de dysesthésie
post-traumatique.
¶ Vascularisation du maxillaire supérieur
Mieux connue depuis les travaux de Bell et Cadenat, elle est fragile. ¶ Physiopathologie
Son mode de distribution conduit à utiliser des voies d’abord En 1901, René Le Fort, chirurgien militaire français publie la
limitées, des décollements prudents et des mobilisations douces, description princeps des trois niveaux de « fractures de la mâchoire
guidées, pour la préserver (fig 5). supérieure », à la suite de son étude expérimentale [16].
*
B
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Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
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Clinique
L’examen extrabuccal retrouve :
– des ecchymoses périorbitaire en « lunettes » ;
– un œdème facial avec rétrusion médiofaciale ;
– une épistaxis.
La palpation objective des points douloureux et une « marche
d’escalier » sur la racine du nez, l’apophyse zygomatique ainsi que
la margelle infraorbitraire.
Une hypo- ou anesthésie des nerfs sous-orbitaires est habituelle.
L’examen intrabuccal montre :
– des ecchymoses vestibulaires et palatine postérieure ;
– un trouble de l’articulé à type de béance incisive et contact molaire
prématuré.
La palpation retrouve un signe pathognomomique : la mobilité
palatonasale par rapport au crâne et aux zygomatiques fixes.
*
A
*
B ¶ Fracture de Le Fort III (fig 10)
Traits de fracture
– Le premier trait va du nez à la fente sphénomaxillaire sur la face
interne de l’orbite, il chemine au-dessous de la suture frontonasale,
coupant la partie haute des os propres du nez, l’apophyse orbitaire
interne du frontal ou disjoignant la suture fronto maxillaire ; il
traverse l’unguis et l’os planum, passe en dessous du canal optique
qui est respecté, et se dirige vers la partie postéro-interne de la fente
sphénomaxillaire, il coupe enfin les racines des apophyses
*
D ptérygoïdes.
– Le deuxième trait chemine sur la face externe de l’orbite, à partir
de l’extrémité antérieure de la fente sphénomaxillaire, court au
voisinage de la suture sphénomalaire et aboutit au niveau de la
*
C suture frontomalaire.
– Le troisième trait sectionne le zygoma en un ou deux fragments,
en arrière de la suture temporomalaire.
– Le quatrième trait, médian, sectionne le septum nasal, l’épine
nasale du frontal, la lame perpendiculaire de l’ethmoïde près de la
lame criblée, le vomer à sa partie haute, et atteint les choanes à ce
niveau.
Il existe des variantes extrêmement importantes : vers le haut avec
atteinte de la lame criblée et rhinorrhée cérébrospinale, et extension
du trait vers le canal optique.
Déplacements
*
E *
F L’ensemble de l’étage moyen recule et glisse en bas et en arrière sur
9 Le Fort II : vues de face, profil, trois quarts plongeant, inférieure, cloison nasale, le plan incliné basicrânien.
cloison sinusonasale.
Clinique
– L’inspection de face montre un important œdème périorbitaire qui
¶ Fracture de Le Fort II (fig 9)
devient rapidement panfacial avec ecchymoses sous-conjonctivales,
épistaxis, chémosis. On note également : une augmentation de
Traits de fracture hauteur de l’étage moyen, une augmentation de largeur de la face,
– Le trait externe coupe la partie moyenne des OPN, l’apophyse un faux prognatisme par recul et impaction du massif facial, une
montante du maxillaire supérieur (MS), l’unguis croise la margelle racine du nez effondrée.
infraorbitaire près de la jonction maxillomalaire ; il traverse la face – La palpation trouve des points douloureux frontozygomatiques,
antérieure du sinus maxillaire, sa face postérieure, les ptérygoïdes à zygomatotemporaux et glabellaires. Elle met en évidence la mobilité
leur partie moyenne, la paroi interne du sinus (entre cornet moyen anormale de la face par rapport au crâne. La sensibilité, dans le
et inférieur) et revient à son point de départ sur l’apophyse territoire du V2, est modifiée.
montante du MS.
– L’examen intrabuccal retrouve un trouble de l’occlusion avec
– Le trait médian est un trait septal coupant la cloison osseuse béance incisive et contact molaire prématuré.
depuis les os propres du nez jusqu’au milieu du bord postérieur du
vomer. ¶ Fractures de la région dento-alvéolo-palatine [4, 8]
– Il n’y a pas de trait zygomatique. De face, le fragment disjoint se Ce sont des fractures partielles du maxillaire, aux traits peu
présente comme une pyramide à sommet glabellaire et base complexes, dont l’exploration radiologique de base est suffisante,
dentoalvéolaire, d’où le terme de fracture pyramidale des complétée par des clichés « mordus » et rétroalvéolaires à la
Anglo-Saxons. demande.
6
Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
Clinique
Les signes endobuccaux dominent la scène :
– plaie palatine antéropostérieure ;
– diastème médian ou paramédian entraînant une déformation de
l’arcade dentaire. La dent située au niveau du trait s’est luxée.
Si les déplacements sont importants, il peut exister une
communication buccosinusienne.
Dans le cadre des fracas faciaux, elle se manifeste comme une
dislocation de la voûte palatine en deux ou trois fragments
principaux :
– un antérieur, répondant au bloc incisivocanin ;
– deux latéraux, grossièrement symétriques, porteurs des groupes
prémolomolaires.
Ces disjonctions rompent la muqueuse du plancher au sinus
maxillaire, des fosses nasales, moins souvent la muqueuse palatine
plus résistante.
*
A
*
B La mobilité est très importante.
Tous ces blocs osseux sont séparés, en haut, du reste de la face par
un trait de type fracture de Le Fort I.
Exploration radiographique
– Sur les clichés standards, la fracture est rarement visible.
– En TDM, les coupes sagittales fines, ou mieux, les coupes
coronales visualisent la fracture.
*
D Une rotation est possible dans les fractures complexes.
Avant l’âge de 15-19 ans, date de la synostose de la suture palatine,
des disjonctions suturaires peuvent survenir, plutôt que des fractures
parasagittales.
*
C ¶ Fractures combinées
Les fractures du maxillaire supérieur sont fréquemment associées
entre elles ainsi qu’à d’autres traits verticaux, obliques ou
horizontaux :
– la fracture de Richet associe une fracture de Le Fort III à une DIM ;
– la fracture de Walther, associe des fractures de types Le Fort III,
Le Fort I et une DIM ;
– la fracture de Bassereau comporte deux traits verticaux,
paramédian, séparant en tout l’os propre du nez et les branches
montantes du maxillaire, et libérant en bas le bloc incisif ;
*
E *
F – la fracture de Huet, présente deux traits verticaux plus externes
10 Le Fort III : vues de face, profil, trois quarts plongeant, inférieure, cloison nasale,
que la précédente, passant par la zone canine prémolaire, et ouvrant
cloison sinusonasale. les sinus maxillaires.
¶ Fractures associées
Elles réalisent des fractures du maxillaire supérieur à l’état pur, se
caractérisent par leur trouble morphologique discret et leur gravité Les fractures du maxillaire supérieur peuvent s’associer à des fracas
vitale nulle. centrofaciaux (fractures du complexe central naso-ethmoïdo-maxillo-
fronto-orbitaire (CNEMFO), avec risque de brèche ostéoméningée),
Elles s’accompagnent fréquemment de lésions dentaires (luxations, à des fractures mandibulaires, et participer à des fractures
subluxations, contusions, fractures corono- ou radiculodentaires, panfaciales. Nous ne les reprendrons pas car elles font l’objet d’un
lésion du paquet vasculonerveux dentaire. chapitre particulier de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale.
Cliniquement, une ou plusieurs dents sont douloureuses et mobiles
avec l’os adjacent, entraînant une déformation de l’arcade dentaire.
L’orthopantomogramme est suffisant et permet de juger de Traitement
l’existence des traits.
– Buts : ce sont le rétablissement fonctionnel de l’occlusion
préexistante et la restauration morphologique par une bonne
¶ Disjonction intermaxillaire [20]
projection du massif facial.
Fractures sagittales essentiellement visibles en tomodensitométrie – Moyens : ils sont orthopédiques et/ou chirurgicaux [2, 7, 8, 9, 10, 13, 21,
(TDM), caractérisées par un trait qui est classiquement médian ou .
22, 23]
7
22-071-A-10 Fractures des maxillaires Stomatologie
11 Intubation sous-men-
tale : incision muqueuse
paramédiane ; incision sous-
mentale.
*
A
8
Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
"
A1
"
A2
B1
"
A3
13 A. Davier de Rowe-Killey : mobilisation.
B. Traction par sonde nasale ou urinaire.
B2
– Conjonctivale (Tessier) pour des lésions localisées de la margelle Ce moyen, particulièrement fiable, doit être accompagné d’une
infra-orbitaire ou de la partie médiane du plancher. instruction particulière du patient (hygiène buccale, port permanent
de ciseaux de Bebee).
Le BIM est dans la plupart des cas avec déplacements, le préalable
RÉDUCTION
indispensable avant l’ostéosynthèse.
Elle peut être orthopédique à distance, ou directe à ciel ouvert,
manuelle ou instrumentale (crochet de Ginestet, spatule de Gillies, • Moyens chirurgicaux
ballonnet de Franchebois, sondes urinaires) (fig 13). Ils sont actuellement dominés par les plaques miniaturisées vissées.
– Méthodes parafocales : les suspensions internes d’Adams dont le
CONTENTION but est d’immobiliser les fragments mobiles à des structures
osseuses fixes, plus haut situées (fig 15). Ce système est très peu
Moyens utilisé aujourd’hui en raison de trois inconvénients majeurs :
– un recul du maxillaire supérieur (par sa traction en haut et en
• Orthopédique arrière) ;
Elle repose sur la mise en place d’arcs mandibulaire et maxillaire – une réduction de hauteur de la face ;
solidarisés aux arcades par des ligatures péridentaires en fil d’acier
– une stabilité pas toujours parfaite.
ou la pose de ligatures de type Ivy.
La réduction permet d’obtenir un articulé dentaire en – Méthodes intrafocales :
intercuspidation maximale et les deux arcs ou les ligatures d’Ivy sont – le fil d’acier : cette méthode est davantage un moyen de
unis par des fils d’acier verticaux (fig 14). coaptation que de contention osseuse. Le fil d’acier procure une
9
22-071-A-10 Fractures des maxillaires Stomatologie
10
Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
15 Suspensions faciales.
A. a : à l’épine nasale du frontal fixée sur plaques ou vis ;
b. à l’apophyse frontale, elle passe derrière l’arcade zygo-
matique ; c : à l’épine nasale ; d : à l’orifice piriforme,
mise en place par voie vestibulaire ; e : périzygomatique ;
f : sur le rebord orbitaire inférieur par une voie d’abord
et un trou de foret.
B. Mise en place de suspensions à l’apophyse orbitaire
du frontal par une voie d’abord canthale externe.
*
A
*
B
¶ Fracture maxillaire et fracture mandibulaire – chez le sujet édenté total, si les prothèses complètes sont retrouvées
et utilisables, la pose de merlons noyés dans de la résine permet
La mandibule sert de guide au maxillaire pour rétablir l’occlusion ; d’effectuer un BIM sur fils d’aciers entre prothèses, ou entre arcade
il faut reconstruire l’arc mandibulaire en premier. Pour cela, un BIM dentée et prothèse après avoir immobilisé chaque type de prothèse
est toujours nécessaire ; ensuite, les ostéosynthèses mandibulaires complète par suspension et/ou par cerclage périmandibulaire
sont réalisées. (fig 16) [8] ;
11
22-071-A-10 Fractures des maxillaires Stomatologie
"
A1 "
A2
"
A3 "
A4
16 A. Cerclage périmandibulaire.
A1 : le passe-fil charge le fil 4 ou 5/10 du côté lingual.
A2 : le fil passé sous la mandibule, est ramené en avant
en gardant le contact osseux. A3 : la gouttière est perfo-
rée au foret, le fil passé dans le trou et la gouttière ou la
prothèse ligaturée.
B. Blocage sur prothèse. B1 : fixée à la mandibule. B2 :
fixée au maxillaire et à la mandibule.
B1 B2
– chez l’édenté partiel, lorsque l’occlusion entre les dents restantes L’hygiène buccale repose sur un brossage dentaire soigneux et des
s’avère impossible ou instable l’emploi de prothèse(s) selon le même bains de bouche après chaque prise alimentaire.
schéma est utile quand il est possible, sinon le rétablissement de
Le déblocage et la dépose des arcs réalisés après contrôle
l’occlusion sera un rétablissement prothétique de convenance après
radioclinique de la consolidation osseuse, se font avec ou sans
consolidation fracturaire ;
anesthésie locale. S’impose alors une rééducation des ATM.
– chez l’enfant en denture mixte, l’immobilisation fracturaire osseuse
par BIM sur arcs n’est pas toujours possible mais reste Dès que l’ouverture buccale est suffisante, un détartrage est réalisé
contraignante. On peut s’aider de moyens orthodontiques (brackets et les soins dentaires nécessaires entrepris.
associés à des arcs rigides munis de crochets). Des microplaques Les cicatrices faciales sont l’objet de massages.
vissées trouvent aussi leur utilité à condition de ne pas
compromettre l’évolution des germes dentaires en devenir ;
À DISTANCE DU TRAITEMENT PRIMAIRE
– en ce qui concerne les lésions dentaires (luxation et fracture
alvéolodentaire) associées aux fractures maxillaires, l’utilisation de Même bien conduit, les séquelles sont fréquentes et de traitement
composites auto- ou photopolymérisables renforcés par l’association secondaire difficile, renforçant l’idée de bien traiter d’emblée toutes
de treillis métalliques, voire de fils d’acier, rend de grands services les lésions à retentissement tant fonctionnel que morphologique ou
(cf chapitre particulier de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale). cosmétique. Objets de chapitres particuliers dans l’Encyclopédie
Médic-Chirurgicale, nous ne les détaillons pas mais les évoquons en
soulignant ici les principaux.
Suites opératoires
Dans les suites opératoires immédiates : selon les écoles, l’extubation RETARDS DE CONSOLIDATION
se fait dès la reprise de la ventilation spontanée ou de manière
différée à la reprise de conscience du patient. Au-delà de 6 semaines, ils doivent faire rechercher une infection
De même, l’emploi d’une sonde nasogastrique est fréquent mais pas sous-jacente (sinusite, ostéite) et déposer le matériel d’ostéosynthèse.
systématique. La stabilité des fragments englués mais non consolidés est assurée
par un BIM aidé parfois de suspensions. Une antibiothérapie
En revanche, la plupart des auteurs prônent :
adaptée après prélèvement in situ s’impose.
– un traitement antibiotique et anti-inflammatoire pendant 8 jours ;
Les pseudarthroses vraies sont exceptionnelles au même titre que les
– des instillations nasales ; nécroses maxillaires, dues en général à un dépériostage excessif ou
– quand le BIM est réalisé, ce dernier est maintenu par fils d’aciers : maladroit lors de délabrements déjà importants. Leur traitement
10 à 15 jours si les ostéosynthèses sont solides ; 30 à 45 jours si le s’avère long, difficile et délicat.
montage est fragile, complété éventuellement par la pose
d’élastiques pour retrouver un articulé de convenance.
SÉQUELLES OCCLUSALES
Des ciseaux de Bebee ou une pince coupante sont toujours à portée
de main pour lever le blocage en cas de nausées et vomissements, à Elles traduisent une consolidation en position vicieuse associant des
moins de disposer d’un système d’arcs à déblocage rapide. troubles fonctionnels masticatoires et des troubles morphologiques
12
Stomatologie Fractures des maxillaires 22-071-A-10
réalisant au pire une déformation faciale globale avec un excès Les communications buccosinusiennes ou bucco-sinuso-nasales
vertical antérieur et une rétrusion de l’étage moyen de la face restent en général séquellaires d’une DIM.
(dish-face).
SÉQUELLES NASALES
SÉQUELLES SINUSIENNES À l’origine de troubles morphofonctionnels, elles peuvent associer :
À type de sinusites post-traumatiques, elles sont associées élargissement de la racine du nez, télécanthus, ensellure nasale,
fréquemment à une ostéite des parois minces du sinus. déviation du dorsum et de la cloison.
Références
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13
Stomatologie
[22-067-B-10]
Résumé
Les plaies de la face sont un défi lancé au chirurgien maxillofacial. Le patient veut que lui
soient garantis non seulement un résultat fonctionnel satisfaisant mais aussi le meilleur
résultat esthétique possible. Le bon traitement n'est pas celui qui consiste en une
cicatrisation correcte des parties molles mais celui qui restitue aussi les contours,
l'élasticité et la plasticité de la peau. La première démarche consiste à s'assurer qu'il n'y a
pas de fracture sous la plaie. Le parage est le plus économique possible. Le recours à des
lambeaux locaux ou libres est parfois nécessaire tel le cas de l'avulsion d'une paupière ou
d'une perte de substance totale des lèvres. Les incisions réalisées suivent au mieux les plis
naturels de la face. Les techniques courantes pour la réparation des pertes de substance
sont rappelées région par région : joue, lèvre, nez, scalp... La prise en charge de certaines
catégories de plaies telles les morsures ou les brûlures est expliquée. Une classification
des traumatismes balistiques est proposée. Cependant, au-delà des techniques
expliquées, l'expérience chirurgicale reste irremplaçable.
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INTRODUCTION
La plaie est une solution de continuité concernant un tissu. La cicatrice est la marque
laissée par cette plaie, que ce soit le résultat d'une suture chirurgicale ou d'une
cicatrisation dirigée. Le visage identifie : il exprime l'altérité qui procède de l'organisation
sexuée de l'espèce humaine. Le visage est communicant : dans ses relations à autrui,
l'humain se fait précéder de son visage : sourire, colère, étonnement...Le visage expose la
vulnérabilité de la personne. Le temps et la vie y laissent leurs empreintes ; or, la peau du
visage est celle qui reste la plus nue. Aristote, fournissant déjà les bases concrètes de
l'esthétique, insistait sur la précision, la symétrie et les proportions. À ces trois critères,
Charles-Auguste Baud [3] rajoutait la fonction comme condition intrinsèque du beau. La
plaie du visage, d'un seul trait, peut affecter les canons de la beauté. Elle a cela de
singulier que la blessure narcissique qu'elle provoque dépasse bien souvent ses
répercussions fonctionnelles. Le visage est ontologique ; celui de la mère comme miroir du
sien propre participe à la genèse tardive du " je ". Emmanuel Levinas [21], le grand
penseur de l'éthique, va encore plus loin, et voit dans le visage que nous regardons, une
épiphanie qui nous confère d'emblée une responsabilité totale vis-à-vis de l'autre sans que
la réciprocité ne soit jamais requise. Si le visage est paré de tant de vertus, le traitement
de ses plaies ne peut être que l'affaire du spécialiste.
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ÉPIDÉMIOLOGIE
Le port de la ceinture de sécurité et le casque intégral ont déjà bien contribué à faire
baisser le nombre de plaies liées aux accidents de la circulation. L'Air Bag® (ABSR) et les
pare-brises en Triplex® ont accentué cette tendance. En milieu urbain, les étiologies les
plus fréquentes concernent les chutes et les agressions. Les traumatismes sportifs
représentent une étiologie en progression du fait de l'augmentation de la pratique sportive
et surtout de l'essor de nouveaux sports (patins en ligne, vélo tout terrain, surf des neiges)
pratiqués hors fédération.
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[33]
Sa coloration est due à la densité capillaire extrême de la région , et à l'exposition aux
agents physiques : air et ultraviolets.
La variabilité de son épaisseur est minimale en ce qui concerne les paupières, moyenne au
front, importante au menton. Le tissu sous-dermique est faible en ce qui concerne le
pavillon de l'oreille et important à la joue.
La variabilité de ces caractéristiques est fonction de l'âge. Chez l'enfant, elle est fine et
élastique ; elle repose sur un tissu sous-cutané important ; les cicatrices sont volontiers
hypertrophiques. Chez l'adulte, elle est épaisse, plus ou moins grasse. Chez le sujet âgé,
elle est fine et a perdu son élasticité ; en revanche, elle offre plus de réserve cutanée du
fait de sa distension et les cicatrices sont discrètes.
Sa pilosité : cils, sourcils, barbe, ligne capillaire constituent autant de repères esthétiques.
Les parties molles de la face sont également caractérisées par l'importance des structures
nobles (nerfs sensitifs et moteurs, canaux salivaires et lacrymaux) qui les traversent. Leur
systématisation sera rappelée plus loin, avec chaque type de plaie.
[25]
Le système musculoaponévrotique superficiel (SMAS) est une structure
anatomochirurgicale strictement superficielle dérivée du platysma primitif [20]. Il ne
présente aucune insertion osseuse. Anatomiquement, il regroupe les différents muscles
peauciers de la face, agencés de façon à réaliser des sphincters périorificiels [14]. Le
muscle platysma en fait partie. Son importance est considérable, puisque cette lame porte-
vaisseaux est responsable de la mimique faciale.
Les structures molles sont indissociables des structures osseuses et dentaires sous-
jacentes. Ces dernières peuvent constituer des agents vulnérants directs et indirects :
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EXAMEN CLINIQUE
Comme pour tout blessé, l'examen initial consiste à vérifier la liberté des voies aériennes,
à contrôler une hémorragie, à traiter un état de choc, puis à diagnostiquer et traiter les
dommages associés ; les lésions neurochirurgicales et ophtalmologiques sont prioritaires
(les paupières sont systématiquement ouvertes à la recherche d'une plaie oculaire). Les
lésions faciales sont traitées en dernier. L'anamnèse précise les circonstances, la date et
l'heure du traumatisme. La vaccination antitétanique est systématiquement vérifiée.
L'éventualité de corps étrangers au sein des plaies est évoquée.
les plaies franches : elles sont provoquées par le verre ou l'arme blanche. Elles
sont superficielles ou profondes pouvant atteindre des structures nobles (nerf facial,
canal de Sténon, etc) ;
les plaies contuses : elles sont souvent tangentielles et renferment des corps
étrangers pouvant tatouer la cicatrice ;
les plaies avec perte de substance : les dimensions, le trajet et la topographie des
plaies sont décrites avec précision. Une lésion des organes dentaires, une fracture
associée ou une atteinte à distance est recherchée. Dans le cas d'une plaie isolée et en
dehors des exceptions qui sont discutées plus loin, aucun examen complémentaire n'est
sollicité. Tous les renseignements sont consignés dans le dossier du malade. Un bilan
photographique est une bonne pratique. Le certificat médical initial est rédigé par le
chirurgien qui explore et traite la plaie.
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PLAIES SIMPLES
Ce sont toutes les plaies ne risquant pas de léser une structure noble (nerf facial, canal de
Sténon, voies lacrymales...) et sans perte de substance. La plupart des plaies de l'arcade
sourcilière, du cuir chevelu ou du menton en font partie. Elles peuvent être prises en
charge par un chirurgien généraliste, dans une salle d'urgence au calme, sous anesthésie
locale ou locorégionale (sous-orbitaire, sus-orbitaire, mentonnier). Une prémédication est
parfois nécessaire chez les jeunes enfants. Les nourrissons sont enveloppés dans un drap
et portés par une infirmière. Un bon éclairage, quelques instruments fins et une large
palette de fils suffisent.
Traitement général
Arcade sourcilière
Mécanisme
L'arcade sourcilière constitue l'un des pare-chocs protégeant l'oeil. Le mécanisme le plus
fréquent est réalisé par les chocs directs. Un coup de poing par exemple, fait glisser la
peau sur l'arcade d'avant en arrière jusqu'à la limite de son élasticité ; une plaie se
produit. L'hémorragie peut être abondante contrastant avec une plaie généralement peu
profonde mesurant 2 à 3 cm de longueur et située dans la " queue " du sourcil.
Traitement
Séquelles
Les séquelles sont traitées par le spécialiste. Une suture décalée est traitée par une plastie
en Z. Une perte de substance justifie un lambeau volant ou des greffes pileuses.
Traitement
Elles peuvent être très hémorragiques. Les cheveux sont rasés le long des berges de façon
à faciliter la suture. Elles sont suturées en deux plans : un plan profond sur la galéa à
l'aide d'un fil résorbable et un plan superficiel avec un fil Monobrin non résorbable 3/0, des
agrafes ou un fil à résorption rapide. S'il existe un espace de décollement, un pansement
compressif est réalisé. Les fils ou agrafes sont retirés vers le huitième jour.
Séquelles
l'absence de plan profond ou lorsque le parage n'a pas tenu compte de la direction de
l'implantation capillaire.
Plaies de langue
Mécanisme
Les plaies de langue sont relativement fréquentes. Leur mécanisme le plus courant
s'explique par automorsure. La langue est interposée entre les arcades dentaires au
moment d'une chute ou d'un choc.
Traitement
Ces plaies peuvent être impressionnantes par l'hémorragie qui peut les accompagner.
Après quelques minutes de compression à l'aide d'une compresse, une hémostase se
réalise. La grande majorité ne nécessite pas de suture et cicatrise très bien sous
antibiotiques et bains de bouche. Il peut arriver qu'une plaie détache un lambeau dont le
parage et la suture sont à faire. Les plaies transfixiantes ou avec saignement actif
persistant sont en principe les seules qui nécessitent une suture (fil résorbable).
Par son mécanisme, une chute avec un objet dans la bouche (un crayon par exemple), ce
type de plaie est plus fréquent chez l'enfant. Elle détache un petit lambeau en V (fig 1).
L'hémorragie cède le plus souvent spontanément. Un traitement symptomatique par bains
de bouche suffit généralement. Dans le cas contraire, la fermeture musculaire et
muqueuse est assurée par quelques points séparés avec du fil résorbable.
Elle est le plus souvent consécutive à un choc sur la joue, mâchoires ouvertes. La suture
est réalisée au fil résorbable.
La plaie accompagne généralement une fracture sous-jacente et est traitée avec cette
dernière.
Constitution
La lèvre supérieure déborde la lèvre inférieure en avant. Les deux lèvres sont jointives au
repos (stomion) et réunies latéralement par les commissures, idéalement situées au repos
à l'aplomb de la pupille de l'oeil correspondant.
Chaque lèvre comprend une partie cutanée (lèvre blanche) et une partie muqueuse (lèvre
rouge). Le limbe définit la ligne qui les sépare. La lèvre blanche supérieure comprend une
dépression médiane : le philtrum, bordé par les crêtes philtrales. Le limbe qui limite le
philtrum en bas porte le nom d'arc de Cupidon. La lèvre rouge est elle-même divisée en
deux portions : une partie semi-muqueuse (vermillon) et une portion humide muqueuse.
Le vermillon de la lèvre supérieure présente en regard de l'arc de Cupidon un tubercule
médian. La lèvre inférieure répond à ces deux éléments par une incurvation inverse et une
légère dépression. La portion humide s'étend jusqu'au fond des vestibules buccaux et
présente sur la ligne médiane de chaque lèvre un repli ou frein. Elle vient s'attacher à l'os
pour former la gencive qui s'unit au collet des dents. La muqueuse de cette portion humide
est séparée du plan musculaire par un tissu conjonctif lâche, riche en glandes salivaires
accessoires.
Musculature
[31]
Vascularisation
Les lèvres sont vascularisées par les artères coronaires supérieure et inférieure,
branches de l'artère faciale. Nées près de la commissure, elles traversent le plan
musculaire et cheminent de dehors en dedans, à la face profonde du plan
musculaire, pour s'anastomoser sur la ligne médiane. Très sinueuses (réserve de
longueur physiologique), elles sont situées à 7 ou 8 mm du bord libre des lèvres,
à peu près au niveau de la jonction entre lèvre rouge humide et sèche. Les veines
suivent le trajet des artères et gagnent la veine faciale.
Innervation (fig 2)
Mécanisme
Les plaies sont essentiellement provoquées par deux mécanismes : soit un choc
direct sur la lèvre qui est prise dans un étau contre le secteur incisivocanin, soit
par automorsure de la lèvre inférieure au cours d'une chute. L'examen de la
cavité buccale recherche une plaie vestibulaire, voire transfixiante. Un bilan
dentaire est systématique. En cas de luxation, la dent peut se retrouver dans
l'épaisseur de la lèvre.
Traitement
Les contusions simples sont traitées par application de glace puis de pommade
anti-inflammatoire.
Les plaies cutanées simples de la lèvre blanche sont suturées avec un fil fin non
résorbable Monobrin (5 ou 6/0) par points séparés. La cicatrice est souvent
hypertrophique.
Les plaies de la lèvre rouge sont suturées à l'aide de points séparés avec un fil
résorbable. Le résultat est toujours excellent.
Les plaies mixtes, c'est-à-dire " à cheval " sur la ligne cutanéomuqueuse, posent
le problème du réalignement de ce repère. Un point de suture est placé au-dessus
de la ligne, l'autre au-dessous (fig 3).
Les plaies cutanéomusculaires sont les plus fréquentes. Le muscle orbiculaire est
repéré et suturé à l'aide d'un fil résorbable.
Haut de page
Ce sont les plaies qui, par leur topographie ou leurs caractéristiques, peuvent
être à l'origine de séquelles importantes. Elles nécessitent une bonne
compétence et de l'expérience. Comme il se trouve que bon nombre de plaies de
la face sont associées à un traumatisme osseux facial ou craniofacial, le recours à
un chirurgien spécialisé est habituel. Les collaborations entre spécialités voisines
étant courantes, il est à l'aise au contact des structures profondes de la face. Sa
formation chirurgicale lui permet de reconnaître une urgence extrafaciale.
Plaies palpébrales
[16]
Constitution
la peau ;
une couche de tissu cellulaire lâche ;
le muscle orbiculaire (avec le releveur de la paupière supérieure) ;
une deuxième couche de tissu cellulaire lâche ;
le muscle tarsal ;
la conjonctive.
Traitement
Plaies cutanéomusculaires
Elles sont suturées à l'aide de points séparés avec un fil de Nylon® 6/0, le
résultat est généralement excellent.
Elles sont suturées plan par plan. La conjonctive est suturée à l'aide de points
inversants (afin d'éviter une kératite) avec un fil résorbable de 7/0. Le tarse est
également suturé. Le muscle peut bénéficier de quelques points de
rapprochement, une suture trop ample à ce niveau est source d'ectropion
(particulièrement au niveau de la paupière inférieure). Une suspension de la
paupière inférieure ou une blépharorraphie de 24 à 48 heures limite ce risque. À
la paupière supérieure, l'atteinte du releveur doit être réparée afin d'éviter un
ptosis secondaire. Le pansement ophtalmologique occlusif est retiré le soir même
de l'intervention afin de faciliter la surveillance. Des soins des yeux sont réalisés
à l'aide de collyre antiseptique ou de sérum physiologique.
Inférieures au quart de la longueur du bord libre : elles sont traitées par suture
directe comme les plaies transfixiantes. La suture doit être d'autant plus parfaite
que les risques d'ectropion et d'entropion (source d'ulcère cornéen) ou
d'éversion du punctum lacrymal (source de larmoiement) sont plus importants.
[32]
Canalicules lacrymaux
Ils sont issus des puncta inférieur et supérieur situés à l'angle interne de l'oeil.
Par un trajet intrapalpébral, ils rejoignent le sac lacrymal et sont drainés vers la
cavité nasale par le conduit lacrymonasal. Le canalicule inférieur draine 80 % des
larmes. L'interruption du canalicule supérieur peut être négligée. En revanche,
l'interruption du canalicule inférieur se complique d'un larmoiement et peut être
source de dacryocystite.
Diagnostic
L'atteinte des voies lacrymales est suspectée devant toute plaie du tiers interne
de l'oeil. Le diagnostic se fait par cathétérisme des voies lacrymales.
Traitement
La réparation primaire est réalisée à l'aide d'une sonde bicanaliculaire dont les
extrémités sont laissées dans la fosse nasale et fixées à l'orifice narinaire ou
d'une prothèse monocanaliculaire. La difficulté réside dans la découverte du
fragment distal. Des soins des yeux par collyre sont prescrits. Le traitement dure
4 à 6 mois afin de limiter les sténoses secondaires. En cas d'échec une
dacryocystorhinostomie est réalisée secondairement.
Branche temporofaciale
Branche cervicofaciale
Diagnostic
L'atteinte du VII est suspectée devant toute plaie latérofaciale (fig 9) et repose
sur l'étude de la mimique faciale. Par exemple, l'atteinte du rameau marginal se
traduit par une chute de la commissure labiale et par la perte de la continence
labiale. L'atteinte de la branche temporofaciale se manifeste par le signe de
Charles Bell : fermeture de l'oeil impossible avec globe oculaire se portant vers le
haut.
Traitement
Si la plaie siège au-delà d'une ligne verticale passant par le canthus externe, un
bon affrontement musculaire permet la récupération motrice. La réparation
directe des filets nerveux serait illusoire compte tenu de leur nombre et de leur
taille. Si la plaie concerne le tronc ou les premières branches de division, une
suture microchirurgicale épipérineurale est réalisée. L'extrémité proximale est
recherchée par voie de parotidectomie. L'extrémité distale est recherchée à l'aide
d'un neurostimulateur. La perte de substance nerveuse pose l'indication d'une
greffe nerveuse prélevée aux dépens du plexus cervical superficiel ou du nerf
saphène externe. La surveillance de la récupération est réalisée à l'aide
d'électromyogrammes répétés. Une vitaminothérapie B est prescrite. En cas
d'atteinte du rameau temporal, une tarsorraphie protège l'oeil, le temps de la
récupération. La localisation proximale de la section, la nécessité d'une greffe
nerveuse et l'âge du patient sont les facteurs qui allongent le temps de
récupération.
[6]
Canal de Sténon
Le canal excréteur de la parotide se projette sur une droite passant par le tragus
et la lèvre supérieure, 15 mm sous l'arcade zygomatique (fig 10). D'abord
superficiel entre peau et masséter, il se glisse ensuite par un trajet en baïonnette
en dedans du buccinateur. Son ostium se situe en regard de la deuxième molaire
supérieure.
Diagnostic
L'atteinte du canal est suspectée devant toute plaie coupant la ligne tragus-lèvre
supérieure accompagnée d'un écoulement salivaire à travers la plaie ou de la
présence de sang à l'ostium. Le diagnostic de certitude peut se faire à l'aide d'un
test au bleu de méthylène ou au sérum bétadiné : issue par la plaie du colorant
injecté dans l'ostium. Dans les cas difficiles (plaies suturées non explorées et
examinées avec un délai de plusieurs jours) la sialographie fait le diagnostic (fig
11).
Traitement
Plaies labiales
Transfixiantes
la lèvre. Elles nécessitent une suture en trois plans (muqueux, musculaire et
cutané) avec respect de la ligne cutanéomuqueuse. La profondeur du cul-de-sac
vestibulaire est respectée. Le port d'une prothèse dentaire en sera facilité (fig
12 et 13).
Lèvre supérieure
Lèvre inférieure
Lambeau de grand pectoral [1, 27], de grand dorsal [22], temporopariétal bilatéral,
sous-mental [9, 22], lambeau libre antébrachial [15] ou parascapulaire [5, 26].
Plaies narinaires
[13]
Nez
La peau du nez est mince et mobile dans ses deux tiers supérieurs, avec un tissu
sous-cutané épais dans le tiers supérieur et très mince dans le tiers moyen. La
peau du tiers inférieur (pointe et ailes) est épaisse, sébacée et très adhérente
aux cartilages alaires. Le nez est particulièrement vascularisé : les artères
proviennent de la faciale, de la maxillaire interne et de l'ophtalmique. Les veines
sont satellites des artères. L'anatomie de la charpente ostéocartilagineuse sur
laquelle reposent ces structures ne sera pas rappelée ici, il importe cependant de
bien la connaître.
[30]
Traitement
maintien prolongé d'un conformateur, afin de prévenir le risque de sténose (fig
15 et 16). Lorsque la plaie affecte l'orifice narinaire, un soin particulier est
apporté afin d'éviter tout décalage. Les plaies de la columelle font courir le risque
d'une rétraction secondaire avec chute de la pointe du nez. Ce risque est limité
par un parage le plus économique possible et la réalisation d'une suture
minutieuse.
Les plaies du nez avec perte de substance sont réparées en fonction de leur
importance par cicatrisation dirigée, greffe ou lambeaux locorégionaux. Chaque
localisation a ses lambeaux de prédilection mais les indications sont à discuter au
cas par cas :
Constitution
Elles posent peu de difficultés. Une attention particulière est apportée en ce qui
concerne l'hélix afin d'éviter une encoche inesthétique.
Plaies transfixiantes
Elles constituent un défi à la chirurgie réparatrice. Dans les meilleurs cas, une
réimplantation microchirurgicale est tentée. Les difficultés sont multiples : le
diamètre artériel est réduit (souvent moins de 1 mm), le pédicule est court et
nécessite souvent la réalisation d'un pontage veineux, le pédicule est souvent
strippé, entraînant des lésions intimales sur tout le trajet artériel, et pourtant la
difficulté majeure provient du drainage veineux. Les chances de succès peuvent
être augmentées par les vasodilatateurs veineux, un traitement antiagrégant
plaquettaire à faible dose, une anticoagulation, la réalisation de scarifications ou
un plan de décollement rétroauriculaire. Cette poche lui assure une nutrition par
imbibition. À défaut de revêtement cutané rétroauriculaire de qualité, un
lambeau de fascia temporal est utilisé. Trois semaines sont nécessaires à
l'autonomisation de l'oreille. La réépithélialisation se fait parallèlement. Le
résultat final est celui d'une oreille dyschromique mais dont la morphologie est
respectée. Si le pavillon ne peut être récupéré, la reconstruction fait appel à des
greffes de cartilage costal [10].
Avulsion du scalp
Mécanisme
Traitement
Le premier geste sur place est la réalisation d'un pansement compressif. Une
transfusion sanguine est le plus souvent nécessaire. Le scalp est récupéré et
conservé sur de la glace (et non dans la glace qui risquerait de le congeler). La
réimplantation du scalp est extrêmement difficile en raison du mécanisme qui
strippe les vaisseaux. C'est néanmoins la seule possibilité qui permette à la
patiente de retrouver une chevelure naturelle.
Morsures
Épidémiologie
Contamination bactérienne
Il doit être le plus précoce possible. L'exploration chirurgicale est réalisée au bloc
opératoire sous anesthésie générale, car bon nombre de plaies cutanées
punctiformes sont associées à des décollements et des délabrements profonds
importants. L'objectif est double : décontaminer les lésions par le parage et le
lavage, puis les réparer [8].
Si le patient est pris en charge au cours des 6 premières heures, il est licite de
pratiquer une suture plan par plan avec points séparés au niveau cutané. Sinon,
une cicatrisation dirigée sous couvert de soins locaux quotidiens donne de
meilleurs résultats. Cette limite des 6 premières heures n'est pas rigide et est à
moduler en fonction des cas.
Antibiothérapie
Animal mordeur
Risque rabique
Traumatismes balistiques
Épidémiologie
En pratique civile, environ deux tiers sont dus à des tentatives d'autolyse, un
tiers à des agressions (actuellement en progression), moins de 5 % à des
accidents. La moyenne d'âge est de 40 ans, elle est plus jeune en ce qui concerne
les traumatismes balistiques par agression. Ce type de plaies est nettement plus
fréquent chez l'homme que chez la femme.
[11]
Cinq types de projectiles peuvent être grossièrement distingués :
Clinique
La diversité des lésions liées aux armes à feu est extrême et donc difficile à
systématiser. Trois variétés peuvent néanmoins être distinguées :
[35]
Traitement
La liberté des voies aériennes est vérifiée. Une intubation ou une trachéotomie
peut être nécessaire en urgence. L'hémorragie et l'état de choc éventuels sont
contrôlés. L'intervention sous anesthésie générale réalise le parage et l'exérèse
des corps étrangers (fig 26, 27, 28 et 29). En cas de perte de substance
mandibulaire, un fixateur externe est posé (fig 30 et 31). Le compte rendu
opératoire et le certificat médical initial décrivent les lésions, les points d'impact,
le trajet des projectiles, les éventuelles traces de poudre (tir à bout portant),
traces de brûlure (tir à bout touchant)... Les projectiles extraits sont conservés à
disposition des autorités. Le suivi psychiatrique fait partie intégrante du
traitement.
La reconstruction secondaire peut être réalisée par une greffe osseuse (perte
osseuse inférieure à 5 cm avec tissus receveurs sains) ou un transplant libre
ostéo-musculo-cutané (péroné, crête, scapulaire...) (fig 32). Une technique
récente et pleine de promesses repose sur la distraction ostéogénique [18] ; elle
réalise un apport local en os et en parties molles sensibles sans rançon
cicatricielle supplémentaire. La prise en charge psychiatrique fait partie
intégrante du traitement.
Brûlures
Mécanisme
Traitement
Sur place, le premier geste consiste à réfrigérer immédiatement les lésions par
irrigation à l'eau froide de façon à limiter leur importance. En cas d'atteinte de
l'oeil, celui-ci doit être lavé abondamment. La face représente 5 % de la surface
corporelle augmentée à 8 % s'il existe une brûlure de l'orifice buccal. Si la
surface corporelle brûlée est supérieure à 10 % ou si la muqueuse des voies
aériennes supérieures est atteinte, le patient est dirigé en centre de réanimation
spécialisé. Les brûlures superficielles sont traitées par des soins locaux à l'aide
d'antiseptiques et de pansements gras. Les brûlures du deuxième et du troisième
degré sont traitées suivant les équipes par excisiongreffe précoce ou par
détersion enzymatique progressive puis greffe de peau semi-épaisse. Lorsque la
brûlure atteint les paupières, la protection du globe est assurée suivant la
gravité, par des collyres protecteurs, une tarsorraphie, voire une blépharorraphie
temporaire.
Les séquelles de brûlures profondes sont dans leur grande majorité cutanées.
Leur correction est essentiellement un problème de remplacement de la peau
cicatricielle par une peau de bonne qualité. L'expansion cutanée a révolutionné la
prise en charge de ces séquelles (fig 34). Elle permet de réaliser des autoplasties
ambitieuses, des lambeaux locaux préexpansés ou d'importants sites donneurs
pour la réalisation de greffes de peau totale.
Mécanisme
Elles sont provoquées par un mouvement de glissade sur le sol. À l'effet abrasif
se surajoute un effet thermique qui provoque une brûlure (fig 35).
Traitement
Plaies infectées
était l'un des plus savoureux aphorismes de Raymond Vilain. L'infection d'une
plaie faciale est rare, elle procède d'un déséquilibre dans cet écosystème au
profit de germes pathogènes. Les infections à pyocyaniques sont fréquentes. Il
s'agit le plus souvent de plaies négligées. Le traitement consiste à recréer, par
une détersion mécanique et une désinfection, les conditions idéales d'une
cicatrisation dirigée. Une antibiothérapie est associée.
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Les fils sont retirés vers le cinquième jour. L'application de vaseline permet
d'éliminer les croûtes résiduelles. À ce stade et en l'absence de phénomènes
infectieux, la cicatrice est fine. Puis commence une réaction inflammatoire qui
augmente jusque vers la fin du deuxième mois. Elle rétrocède ensuite
progressivement pendant 6 mois. La chéloïde correspond à une cicatrisation
pathologique (fig 37).
Le résultant définitif d'une cicatrice ne peut être apprécié qu'à 1 an. Sauf
indication contraire (ablation de corps étrangers, cicatrice périorificielle
rétractile, atteinte d'une structure noble non réparée lors de la suture), il est
préférable de ne pas reprendre la cicatrice avant ce terme. Dans l'intervalle,
plusieurs techniques peuvent permettre d'améliorer les cicatrices :
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ASPECT MÉDICO-LÉGAL
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PRÉVENTION
Protections extraorales
Protections intraorales
Le meilleur modèle est celui mis au point par Sametsky [2]. Il répond à tous ces
critères. Il est réalisé à partir d'empreintes des arcades dentaires et d'une
occlusion contrôlée. La prise d'occlusion se fait avec une béance de 1 mm afin de
permettre la respiration buccale d'effort.
Références
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Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Drainage d'un hématome orbitaire provoqué par une plaie par arme blanche.
Fig 5 :
Fig 5 :
Tomodensitométrie montrant l'hématome orbitaire le long de la paroi externe de l'orbite.
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Rameaux du nerf facial.
Fig 9 :
Fig 9 :
Fig 10 :
Fig 10 :
Fig 11 :
Fig 11 :
Sialographie chez un patient ayant consulté tardivement pour une plaie dans la région du canal
de Sténon.
Fig 12 :
Fig 12 :
Fig 13 :
Fig 13 :
Fig 14 :
Fig 14 :
Perte de substance de la lèvre supérieure négligée qui aurait dû bénéficier d'un lambeau
locorégional.
Fig 15 :
Fig 15 :
Plaie du nez transfixiante par verre, traitée par une suture plan par plan.
Fig 16 :
Fig 16 :
Résultat à 15 jours de face et de profil : contrairement aux apparences, il n'y a pas de perte de
substance.
Fig 17 :
Fig 17 :
Fig 18 :
Fig 18 :
Fig 19 :
Fig 19 :
Fig 20 :
Fig 20 :
Fig 21 :
Fig 21 :
Fig 22 :
Fig 22 :
Munitions : groupe 1.
Fig 23 :
Fig 23 :
Munitions : groupe 2.
Fig 24 :
Fig 24 :
Munitions : groupe 3.
Fig 25 :
Fig 25 :
Plaie de l'orbite par carabine à air comprimé ayant justifié une décompression du nerf optique
par voie canthale interne.
Fig 26 :
Fig 26 :
Fig 27 :
Fig 27 :
Fig 28 :
Fig 28 :
Fig 29 :
Fig 29 :
Fig 30 :
Fig 30 :
Fig 31 :
Fig 31 :
Fig 32 :
Fig 32 :
Fig 33 :
Fig 33 :
Fig 34 :
Fig 34 :
Séquelle de brûlure cervicale : expansion cutanée.
Fig 35 :
Fig 35 :
Fig 36 :
Fig 36 :
Extension cutanée.
Fig 37 :
Fig 37 :
Fig 38 :
Fig 38 :
Lymphatiques de la face (d'après Küttner). 1. Ganglion parotidien ; 2. ganglion de la chaîne
jugulaire externe ; 3. ganglion de la chaîne jugulaire interne ; 4. ganglion facial ; 5. ganglion
sous-maxillaire.