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La Responsabilité Délictuelle 2015

5ème semaine : Les faits générateurs de la responsabilité civile (3ème partie)

§3.3. Responsabilité du fait des choses

§3.3.1. Responsabilité générale du fait des choses


inanimées

A. Le principe

Chute d’un arbre, explosion d’une machine dans une usine, collision avec
une voiture etc… Il s’agit ici de la responsabilité du fait des choses
inanimées.

C’est l’alinéa 1er de l’article 1384 qui prévoit la responsabilité du fait des
choses inanimées. Selon cet article, « on est responsable non seulement
du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui
est cause, par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des
choses que l'on a sous sa garde ».

L’article 1384 al. 1re a longtemps été perçu comme « une annonce » des
textes qui le suivent, notamment une annonce des dommages causés par
les animaux (article 1385 CCM) et des dommages causés par la ruine
d’un bâtiment (article 1386 CCM).

La grande question que l’on se posait était; est-ce que le détenteur de la


chose qui a causé un dommage serait présumé en faute ou est-ce que ce
serait à la victime de prouver (conformément à l’article 1382) que
l’accident était imputable à la faute du détenteur ? Nous verrons qu’après
plusieurs tâtonnements, ce principe a été défini.

Nous étudierons l’évolution de ce principe en France et à Maurice.

a. Évolution et fondement de la responsabilité générale du


fait des choses inanimées en France et à Maurice

En France, il y eu cinq phases importantes qui ont mené à une


interprétation de cet article.

1ère phase : application de l’article 1382

Jusqu’à la fin du XIXe siècle, la première phase s’agissait


d’appliquer aux accidents causés par des choses inanimées,

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l’article 1382 car les articles 1385 et 1386 ne visaient que les
animaux et les bâtiments.

L’origine de cette responsabilité découle du développement du


machinisme et la multiplication des accidents de travail pour
lesquels les victimes qui se trouvaient dans l’impossibilité de
démontrer l’existence d’une faute à l’origine du dommage, ne
parvenaient pas à obtenir une indemnité.

Il y eut tout d’abord certains auteurs qui proposaient d’appliquer


la responsabilité contractuelle (notamment le contrat de travail et
l’obligation de sécurité à la charge de l’employeur). Mais la
théorie n’a jamais pénétré dans la jurisprudence. Il y eu ensuite
l’idée d’appliquer l’article 1386 pour régir les dommages causés
par la ruine d’un bâtiment et par une chose inanimée quelconque,
mobilière ou immobilière (cela en vue de la dangerosité des
machines). A voir dans ce sens l’arrêt de la Cour de Paris du 20
juillet 1877 rendant le propriétaire responsable de l’accident
causé par la chute d’un arbre. Mais le problème était que
contrairement aux bâtiments qui supposent une construction et
un vice de construction, cela ne convenait pas aux arbres.

L’on comprenait jusqu’alors que le mot « choses » dans l’article


1384 al. 1er annonçait uniquement les animaux et les bâtiments
comme mentionnés dans les articles suivants. Mais vers la fin du
XIXe siècle, quelques auteurs (notamment Saleilles et Josserand)
soutinrent que le mot « choses » devait être compris dans un
sens général. De là, on comprenait qu’une personne devait être
déclarée responsable de plein droit de tout accident causé par les
choses, meubles ou immeubles, dont elle a la garde.

Les auteurs en vinrent ensuite à considérer une autre idée


notamment celle de la responsabilité objective fondée non pas sur
une présomption de faute mais sur le seul fait de la propriété de
la chose, cause du dommage. L’idée de faute a ainsi été
substituée par l’idée du risque.

Il y eut un célèbre arrêt de la Cour de Cassation en 1896


s’agissant d’un des tubes de la machine à vapeur d’un
remorqueur qui avait explosé, cet accident ayant causé la mort du
mécanicien. Les juges du fond avaient attribué l’explosion à un
défaut de soudure qui constituait un vice de construction. Il était
admis que le propriétaire du remorqueur ignorait ce vice et ne
pouvait pas le connaître. La Cour de Paris accorda une indemnité
à la veuve en appliquant par analogie l’article 1386. La Chambre
civile a rejeté le pourvoi, l’article 1384 al. 1 er d’après lequel on est
responsable des choses que l’on a sous sa garde, ayant une
portée générale et pouvant être invoqué à défaut de l’article

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1386. Ce fut un point de départ afin de mettre en avant une


application de la théorie du risque – les risques d’accidents
industriels devaient rester à la charge du patron qui a la garde
des machines dont le fonctionnement cause un accident.
A lire dans ce sens l’arrêt : Civ., 16 juin 1896 D. P. 97.1.433.

2ème phase : admission à partir de 1897 de la présomption


de faute 

Il y eut ensuite un arrêt de la Chambre des Requêtes (s’agissant


d’une explosion de la chaudière d’un navire) en 1897 qui permit
au propriétaire d’une chose inanimée de s’exonérer en prouvant
l’absence de faute. Ce fut alors l’abandon de la théorie du risque
et on s’en tint à l’époque à une présomption de faute.

Longtemps la jurisprudence considéra que l’application de cet


article devait être écartée toutes les fois que le gardien de la
chose parvenait à démontrer qu’il n’avait commis aucune faute –
la présomption de faute tombait devant la preuve de l’absence de
faute. Le gardien devait établir qu’il avait pris toutes les
précautions nécessaires pour qu’il puisse échapper à toute
responsabilité. La charge de la preuve incombait au gardien.

3ème phase : apparition du caractère irréfragable de la


présomption de faute

Au fur et à mesure la jurisprudence se montra plus stricte. Vint


ensuite le temps où la jurisprudence exigea que le gardien
apportât la preuve positive d’un fait extérieur générateur du
dommage – cas fortuit ou cas de force majeur, faute de la victime
ou d’un tiers. Au cas contraire, le gardien était tenu pour
responsable.

A voir dans ce sens l’arrêt de la Cour de Cassation du 15 mars


1921 (Civ., 15 mars 1921, D.P. 1922. 1.25) s’agissant de
l’hypothèse de la communication d’un incendie d’un immeuble à
un autre.

4ème phase : application de l’article 1384 al.1er en cas


d’accident d’automobile

Au début, la Cour de Cassation ne voulait pas appliquer l’article


1384 aux dommages causés matériellement par une chose quand

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celle-ci était dirigée « par la main de l’homme » notamment une


voiture automobile sous la maîtrise de son conducteur ou une
bicyclette. Elle considérait que c’était l’article 1382 qui trouvait
application. On distinguait deux situations ;
 Celle où l’accident était dû au fait de la chose elle-même
comme une défectuosité de l’automobile – ici on appliquait
l’article 1384 ;
 Celle où l’accident était survenu au moment où le véhicule
était actionné par la main de l’homme – on appliquait
l’article 1382.

Ce principe posait une difficulté – celle du cas du piéton renversé


par une automobile. Ici, la victime devait démontrer la faute du
conducteur.

Il y a ainsi eu l’arrêt de la Chambre civile saisie d’un pourvoi


contre un arrêt de la Cour de Besançon du 29 décembre 1925, où
il était déclaré que l’article 1384 serait applicable à l’hypothèse du
piéton écrasé par une automobile en marche. Voir dans ce sens
l’arrêt – Civ., 21 fév. 1927, D.P.1927.1.97. Mais cet arrêt
précisait que le gardien n’est responsable «  que s’il s’agit d’une
chose soumise à la nécessité d’une garde en raison des dangers
qu’elle peut faire courir à autrui ».

L’idée de faire une distinction entre le fait de la chose et le fait de


l’homme a été substituée pour une distinction des choses dites
« dangereuses » parmi lesquelles figuraient les automobiles en
marche. Il y a eu ici un retour à la théorie de la faute. Cet arrêt
fut critiqué car selon certains, la notion de chose dangereuse est
difficile à déterminer.

Vint ensuite un arrêt majeur, celui des Chambres réunies du 13


février 1930 – l’arrêt Jand’heur. Cet arrêt vient ainsi condamner
les points suivants :
 la distinction du fait de la chose et du fait de l’homme ;
 la distinction des choses dangereuses et celles qui ne le
sont pas. La Cour précise « il n’est pas nécessaire que la
chose ait un vice inhérent à sa nature et susceptible de
causer un dommage, l’article 1384 rattachant la
responsabilité à la garde de la chose, non à la chose elle-
même  » ;
 la présomption de faute. Cet arrêt substitue à cette
formule celle de présomption de responsabilité : «  La
présomption établie par l’article 1384 al.1er, à l’encontre
de celui qui a sous sa garde la chose inanimée qui a causé
un dommage à autrui ne peut être détruite que par la
preuve d’un cas fortuit ou de force majeure ou d’une cause
étrangère qui ne lui soit pas imputable  ; il ne suffit pas de

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prouver qu’il n’a commis aucune faute ou que la cause du


fait dommageable est demeurée inconnue  ».

C’est cet arrêt qui a bouleversé les principes admis jusque-là en


matière de responsabilité civile.

5ème phase : jurisprudence postérieure à l’arrêt du 13


février 1930

Selon l’arrêt Jand’heur, c’est la présomption de responsabilité qui


prime. On en déduisait donc que la Cour de cassation avait
abandonné le fondement traditionnel de la responsabilité (basée
sur la faute) et s’était ralliée à la théorie objective de la
responsabilité fondée sur le fait, sur le risque.

Il y a eu par la suite des décisions rendues après 1930 qui


semblaient montrer que la Cour de Cassation entendait, d’une
part conserver à la présomption de l’article 1384, le fondement
traditionnel de la faute s’agissant de certaines situations. Voir
dans ce sens : Civ. 28 avril. 1947. D.P.1947.329. Mais selon
des arrêts plus récents, il y a eu un revirement de jurisprudence
quant au recul de l’idée de faute notamment en ce qu’il s’agit :
 d’une obnubilation passagère des facultés intellectuelles
qui n’était pas un événement extérieur, étranger au
gardien, susceptible de l’exonérer de sa responabilité
(Civ., 2e sect. Civ. 18 déc. 1964) – notion abstraite,
quasi-objective de la faute, très voisine de l’idée de risque;
 s’agissant du transport bénévole – voir dans ce sens Cour
de cass. Ch. Mixte. 20 décembre 1968.

Quid de la situation à Maurice ?

Avant les amendements de 1983, l’article 1384 du CCM se lisait


comme suit :

«  On est responsable non-seulement du dommage


que l’on cause par son propre fait, mais encore de
celui qui est causé par le fait des personnes dont on
doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

Le père, et la mère après le décès du mari, sont


responsables du dommage causé par leurs enfants
mineurs habitant avec eux;

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Les maîtres et les commettants, du dommage causé


par leurs domestiques et préposés dans les fonctions
auxquelles ils les ont employés;

Les instituteurs et les artisans, du dommage causé


par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu’ils
sont sous leur surveillance.

La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les


père et mère, instituteurs et artisans, ne prouvent
qu’ils n’ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette
responsabilité  ».

Suite à la décision rendu dans l’arrêt Jand’heur, la question se posait


de savoir est-ce que le législateur mauricien s’alignerait sur les
principes formulés en France concernant la responsabilité du fait des
choses inanimées.

….

En 1937, soit sept ans après l’arrêt Jand’heur, un arrêt important a


été rendu à Maurice notamment l’arrêt TOOLSEERAM MANGROO
AND ORS. vs SEEJOOPERSAD DAHAL AND OTHERS [1937 MR
43] où la Cour Suprême a eu à statuer sur une action calquée sur
l’article 1384 al.1er du CCM.

Il s’agissait en l’espèce d’une action intentée par les héritiers du


défunt M. Mungroo, qui a été heurté par la voiture du défendeur qui
était conduite par le fils du «  defendant in guarantee  ». Selon les
demandeurs, le défendeur était responsable selon l’article 1384 al.1 er
car il avait la garde de la voiture. Alternativement, selon les
demandeurs, le défendeur était responsable car il a permis que sa
voiture soit conduite par un conducteur incompétent ou car il avait
laissé sa voiture sur une route public sous la charge de personnes qui
ne détenaient pas de licence.

La Cour suprême a eu à déterminer plusieurs points de droit soulevés


par les parties. Le premier point concernait la responsabilité du
défendeur sous l’article 1384 al.1er notamment “Is the Defendant
liable under Article 1384, C. Nap., simply because “having the
custody of the motor car he is responsible in law for the damage
caused by the motor car?”

La Cour sûpreme dans cet arrêt ne s’aligne pas sur les principes
formulés dans l’arrêt Jand’heur. Le Juge Le Conte observe comme
suit aux paragraphes 49 et 50 de ce jugement :

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“Is it sound law to say, when a man is injured by the


reckless driving of a drunken or absent-minded
motorist, that the damage is due to the fait de la
chose, i.e. of the motor car? I emphatically answer: No.
That damage is due, not to the “fait de la chose” (Art.
1384), but to the “faute de l’homme”, (Art. 1382). I
consider that this answer is in rigorous accord with
what Professor Josserand terms “la logique juridique et
le bon sens”.

The only thing left for me to do is to find a formula


embodying the principle of law, which governs this
matter. In so doing I shall borrow some of the terms
used by the Cour d’Appel de Lyon in its arrêt of the 7th
July 1927 (D.H. 1927, p. 423) and by the Court of
Cassation itself in a case decided before the “théorie du
risque” had gained favour. (D.P. 1911.1.354).
Whenever damage is caused to a party by a moving
motor vehicle driven by man, in a case where it is not
alleged or proved that the accident was caused by the
vehicle itself, irrespective of the manner in which it was
driven, the liability incurred is not dependent upon the
application of Art. 1384 - 1º. C. Nap. but upon the
conduct of the person to whom the driving of the
vehicle is entrusted. In consequence the owner of a
motor car is not responsible for the doings of his
employee unless the latter has committed some faute
in the driving of the vehicle. It is incumbent upon the
victim or his representatives to prove such “faute””.

En 1964, dans l’arrêt de SAVANNE BUS SERVICE COMPANY Ltd.


vs GOVINDEN [1964 MR 64] Glover and Lalouette JJ, observent :

“Whatever view is taken of the basis of the


responsibility created by article 1384, paragraph 1, of
the Civil Code, we think that, in the particular
circumstances of the present case, which indicated that
certain leaves of the spring the main leaf of which gave
way at the time of the collision bore rusty marks of
cracks which had, according to the expert evidence,
occurred at least 24 hours previously, responsibility
must inevitably be fastened on the “gardien” unless he
can rely on one of the defences available to exonerate
a “gardien” sued under article 1384, paragraph 1, of
the Civil Code.

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In the present case the appellant contended that the


accident was due to “force majeure”.

The following notes from Dalloz, Encyclopédie de Droit


Civil, Vo Responsabilité du Fait des Choses, will help to
throw light on this

“328: … L’événement invoqué ne peut constituer la


force majeure que s’il était imprévisible . . .
L’imprévisibilité s’apprécie de façon abstraite: il ne
s’agit pas de savoir si l’individu avait prévu ou même
pouvait prévoir, mais s’il devait prévoir…”

329: L’événement survenu doit avoir mis le gardien


dans l’impossibilité d’agir autrement. On distingue
l’impossibilité de la simple difficulté qui, si grande soit-
elle, ne le libère pas . . .

331: … après quelques hésitations… la Cour de


cassation a affirmé, plusieurs fois, “qu’un fait qui n’est
pas extérieur à la chose ne saurait constituer au regard
du gardien un cas forfuit de nature à l’exonérer de la
présomption de l’article 1384, alinéa 1er”… Tel est le
cas notamment… de la… rupture d’un ressort . . .

336: La jurisprudence engage la responsabilité du


gardien lorsque l’accident est dû à la rupture d’une
pièce de la voiture: freins, lame de ressort, barre de
direction, etc . . .”

We are of opinion that although the bus was actually


being driven by the bus driver or “préposé” of the
appellant company, the latter must be looked upon as
having the “garde” of the bus within the meaning of
article 1384 of the Civil Code.

Dalloz, Encyclopédie de Droit Civil, Vo


Responsabilité du Fait des Choses, note 73,
observes:

“Lorsqu’un commettant remet une chose à son


préposé, en principe il reste maître de donner des
ordres quant à la chose remise; le préposé n’acquiert
que la direction au sens matériel. Aussi la doctrine et la
jurisprudence sont-elles aujourd’hui unanimes pour
affirmer qu’en général le commettant conserve la garde
par l’intermédiaire de son préposé…”.

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La Responsabilité Délictuelle 2015

À voir aussi l’arrêt Emamally & Ors v Patron [1975 SCJ 34] où la
Cour retrace les grandes lignes des principes applicables jusque-là.

Suite aux problèmes posés aux victimes des accidents de la route, en


1983, l’article 1384 est abrogé et remplacé comme suit par Act No. 9
of 1983 (attention aux alinéas 5 et 6):

On est responsable non seulement du dommage que


l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui
est causé par le fait des personnes dont on doit
répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Le père et la mère, en tant qu'ils exercent le droit de


garde, sont solidairement responsables du dommage
causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux;
Les maîtres et les commettants, du dommage causé
par leurs domestiques et préposés dans les fonctions
auxquelles ils les ont employés;

Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par


leurs é1èves et apprentis pendant le temps qu'ils sont
sous leur surveillance;

Le gardien de la chose, du dommage causé par le


fait de celle-ci.

La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les


père et mère, instituteurs et artisans, ne
prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui
donne lieu a cette responsabilité ou que le
gardien de la chose ne prouve que le dommage a
été causé par l'effet d'une force majeure ou de la
faute exclusive de la victime.

Toutefois, celui qui détient à un titre quelconque, tout


ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans
lesquels un incendie a pris naissance ne sera
responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés
par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être
attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il
est responsable. Cette disposition ne s'applique pas aux
rapports entre propriétaires et locataires, qui
demeurent régis par les articles 1733 et 1734 du
présent Code.

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Vint ensuite le célèbre arrêt de ROSE BELLE S.E BOARD v


CHATEAUNEUF LTD [1990 MR 16], où la Cour suprême considéra
les décisions rendues à Maurice sur la responsabilité du fait des
choses jusque-là. Elle remarque notamment dans cet arrêt que suite
à l’arrêt Mangroo vs Dahal, les décisions rendues au sujet de
l’article 1384 al. 1er, « became dormant in Mauritius  ».

En ce qu’il s’agit de l’arrêt Savanne Bus Company Ltd


vs Govinden, la Cour observa: “In other words the
Judges were merely saying that they were in presence
(at long last) of a genuine case of “fait de la chose” as
opposed to a “fait de l’homme”. The Judges went on to
analyse the appellant’s contention that the accident
was due to a “force majeure” but reached the
conclusion that not all of the three elements
constituting “force majeure” viz. “imprévisibilité,
irrésistibilité et extériorité” were present ».

La Cour dans cet arrêt observa aussi :

“The decision in Govinden cannot but mean that in a


case of ‘responsabilité du fait de la chose’ there is a
“présomption de responsabilité” as held in France by
the Court of Cassation. The learned judges after saying
that a ‘gardien’ could rely only on one of the defences
available to exonerate himself, never said that there
was only a presumption of fault under article 1384
paragraph 1 and that proof of an absence of fault of the
gardien was a good and sufficient defence. In fact the
judges analysed the defence of ‘force majeure’ put
forth by the “gardien” of the bus and found that the
three stringent conditions required before such a
defence could succeed were not united. They ultimately
upheld the judgment of the lower Court which had
applied article 1384-1 in the circumstances of the case.

Quant aux amendements apportés au CCM s’agissant


de l’article 1384, la Cour rappela: “In a footnote to
article 1385 in Venchard’s Civil Code, the learned editor
thought it important to note the following:–

“L’al. 1 est emprunté de l’article 1384-1 CCF… L’al. 5


est inspiré de la jurisprudence française. Pour favoriser
l’indemnisation des victimes d’accident, il est apparu

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La Responsabilité Délictuelle 2015

nécessaire de rendre le gardien d’une chose


objectivement responsable des dommages causés par
celle-ci, sous réserve toutefois de la force majeure et
de la faute exclusive de la victime. Le droit mauricien
s’aligne ainsi sur le droit français, tel qu’il résulte de
l’interprétation de la Cour de Cassation. Par conséquent
le législateur mauricien a rendu caduc le célèbre arrêt
Mangroo v. Dahal [1937 MR 43]…” ».

Ainsi donc, la Cour suprême affirma :

“If there was still any doubt as to the existence of a


generalised and autonomous “responsabilité du fait de
la chose” in Mauritius, article 1384-5 has, in my
judgment, now clearly removed it by specifically
providing for it.

The same observation applies to the type of


presumption which the custodian has to meet and
which has now clearly been settled by article 1384-6.
Without doubt that paragraph has created a
“présomption de responsabilité” or a “responsabilité de
plein droit” which can be rebutted only by the custodian
proving that the damage has been caused by a “force
majeure” or by the “faute exclusive de la victime”.

[…]

The present position in France seems to be as follows:–

1. There would be no “fait de la chose” where the


object was “inerte et passive” unless the object
presents some “anomaly”.

2. Moving objects (les choses en mouvement) would


always be considered as the “cause génératrice” at
least contributorily, even if they have functioned
normally unless there is proof of a “cause externe” i.e.
a ‘force majeure’ or a “fait du tiers ou de la victim”
where such is considered as the sole and exclusive
cause of the accident.

A proper analysis of the term “fait de la chose”


therefore seems to indicate that the real debate is to be
situated in the field of “causality” – whether in a
particular instance the “chose” has “caused” the
damage in which case we could properly talk of a “fait
de la chose” or whether it has not caused such damage

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La Responsabilité Délictuelle 2015

in which case it would not be proper to find that it was


a ‘fait de la chose’. The distinction hitherto made by
Mangroo between a “fait de la chose” and a “fait
de l’homme” is accordingly unfounded. I feel that
Mangroo’s case was wrongly decided and that the
theory of “fait autonome de la chose” on which
Mangroo’s case is based is not correct and that
henceforth we should accept and be guided by
Jand’heur”.

Appasawmy L. vs. The Albatross Insurance Co [1997 SCJ


180] où la Cour suprême fait les observations suivantes :

“In the course of his submission I understood


learned Counsel for the defendant to be saying that
the plaintiff can only claim damages if it is shown
that there was a defect in the vehicle.

Such a proposition is indeed misconceived. Le fait


autonome de la chose no longer finds its application
within the purview of article 1384 alinéas 1, 5 and
6 (1384-1-5-6) especially after the amendment
effected to our article 1384
by [Act No. 9 of 1983] rendering inapplicable the
principle enunciated in the case of Mangroo v.
Dahal [1937 MR 43 ] whereby the victim could
not make the custodian of a vehicle responsible
under article 1384 - 1 by proving simply that the
damage was caused by the vehicle - vide Rose
Belle S.E. Board v. Chateauneuf Ltd. [1990 MR
9 ].

The short answer to the submission of learned


Counsel for the defendant is the decision in the
famous case of Jand’heur where la Cour de
cassation (Chambres r éunies, 13 f évr ier 1930, D
1930.1.57) settled the jurisprudence in France by
condemning all the previous attempts to
undetermine the effects of article 1384 al. 1er of
the French civil code. La Cour de cassation toutes
Chambres réunies made it clear in the following
terms:

“Attendu que la loi, pour l’application de la


présomption qu’elle édicte, ne distingue pas suivant
que la chose qui a causé le dommage était ou non

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La Responsabilité Délictuelle 2015

actionnée par la main de l’homme; qu’il n’est pas


nécessaire qu’elle ait un vice inhérent à sa nature
et susceptible de causer le dommage, l’article 1384
rattachant la responsabilité à la garde de la chose,
non à la chose elle-même.”

As was held by the Supreme Court in Rose Belle


S.E. (supra), with regard to motor vehicle
accidents, we have to apply the provisions of article
1384-1-5-6 as they have been interpreted by the
courts in France during the period between 1930
and 1985, that is, until the promulgation of La Loi
no. 85-677 du 5 juillet 1985 (D. 1985 371, Rect.
588) governing Le véhicule terrestre à moteur”.

….

b. Qui peut se prévaloir de l’article 1384, al. 1er ?

L’article 1384 al. 1er devrait pouvoir être invoqué toutes les fois
qu’un dommage a été causé par une chose soumise à garde. Il
n’y a pas lieu de prendre en considération la qualité de la victime.

Ainsi, par exemple la veuve dont le mari a été tué dans un


accident de la route peut intenter une action en vertu de l’article
1384 al. 1er contre le gardien de l’automobile impliqué dans
l’accident. De même que les enfants du défunt.

En France, il y a eu des distinctions qui ont été faites en ce qu’il


s’agit de la responsabilité du fait des choses dont le gardien avait
à titre bénévole laissé l’usage à la victime.

Approche avant 1968 ; lorsqu’un automobiliste accepte de


transporter quelqu’un à titre bénévole afin de lui rendre service,
son acte de complaisance ne donne pas naissance à un contrat ;
en cas d’accident, l’usager ne pourra donc avoir recours à la
responsabilité contractuelle pour obtenir réparation. « Une
jurisprudence traditionnelle décidait que, […] la victime ne
pouvait se prévaloir de la présomption de responsabilité de
l’article 1384 al.1er à l’encontre du transporteur bénévole ; elle
n’avait contre lui que la ressource de l’article 1382, ce qui
l’obligeait à prouver la faute du défendeur  »1.

1
Droit Civil, Les Obligations, par Alex Weill, PRECIS DALLOZ, DALLOZ, 1971, «  Responsabilité du fait des choses  »,
Qualité de la victime, Qui peut se prévaloir de l’article 1384, alinéa 1, Note 694.

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La Responsabilité Délictuelle 2015

L’argument mis en avant était que, puisque c’était la victime elle-


même qui se servait de la chose, elle n’avait pas besoin de
protection spéciale. L’article 1382 lui suffisait. Autre argument
basé sur l’équité : il serait « choquant » de permettre à celui
auquel un service gratuit a été rendu d’assigner, sur le terrain de
l’article 1384 al.1er celui qui lui a rendu service, alors qu’il ne peut
prouver une négligence ou imprudence commise par ce dernier.

Cette jurisprudence a été abandonnée suite à trois arrêts de la


chambre mixte de la Cour de Cassation du 20 décembre 1968 qui
décident, sauf texte contraire, que la victime qui participait
gratuitement à l’usage de la chose dommageable demeure
néanmoins dispensée d’établir la faute du gardien.

Si l’usager bénévole, (le transporté à titre gratuit) décède des


suites de l’accident, les parents de ce dernier peuvent désormais
se prévaloir contre le gardien de la présomption de responsabilité
soit qu’ils agissent en leur qualité d’héritiers, à la place de leur
auteur, soit qu’ils agissent en leur nom personnel, demandant
réparation du dommage matériel et moral.

B. Conditions d’application de l’article 1384, al. 1er

Les conditions imposées par la jurisprudence à l’application de l’article


1384 al.1er sont : la chose, le fait de la chose et la garde. Nous
examinerons ainsi ces trois notions.

a. La chose

i. Le principe
Il est important de comprendre que la loi attache la
responsabilité de plein droit de l’article 1384 al.1er à la
garde de la chose et non à la chose elle-même. En
principe, toutes les choses inanimées sont susceptibles
d’engager la responsabilité de leur gardien. Un arbre,
une voiture, une machine… les exemples sont
nombreux.

Toutefois, comme nous l’avons vu sous le sous-titre «


Evolution et fondement de la responsabilité générale du
fait des choses inanimées en France et à Maurice », il y
a eu beaucoup de distinctions qui ont été faites en ce
qu’il s’agit du mot « choses » et qui ont été clarifiées
par la suite. Nous reviendrons ainsi sur ces distinctions.

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La Responsabilité Délictuelle 2015

ii. Abandon de la distinction entre choses mobilières


et chose immobilières
Certains auteurs ont voulu soustraire les immeubles de
l’article 1384 al.1er car il y avait déjà l’article 1386 qui
déclarait le propriétaire d’un bâtiment responsable du
dommage causé par sa ruine. Selon eux, la
responsabilité générale du fait des choses ne devrait
s’appliquer qu’aux choses mobilières et non aux
immeubles (selon un arrêt Civ., 26 juin 1924, D.P.
1924.1.159). Mais cette thèse a été jugée comme
étant « irrationnelle ». Il n’y aucune raison de
distinguer les meubles des immeubles car c’est la garde
qui est à la base de la responsabilité du fait des choses.
Tout individu peut ainsi être gardien d’une chose
immobilière comme mobilière. Il n’y a donc pas lieu de
faire cette distinction.
Voir arrêt Req., 6 mars 1928, DP 1928.1.97.

iii. Abandon de la distinction des choses dangereuses


et non dangereuses
Comme on l’a vu plus haut, selon la jurisprudence a fut
un temps argué que l’article 1384 al.1er ne serait
applicable qu’aux choses dangereuses ; celles-ci en
raison de leur caractère, qui nécessitent de la part de
celui qui les détient, une garde « effective ». Exemple ;
automobiles, fusils. Alors que d’autre part, il y a des
choses « inoffensives » comme des meubles meublants
(voir arrêt Civ. 21 fév. 1927 cité plus haut).

Mais cette école de pensée n’est plus depuis l’arrêt


Jand’heur des chambres réunies du 13 février 1930.
Cette distinction étant jugée comme « irrationnelle »
car le seul fait que la chose ait occasionné un dommage
indique qu’elle est dangereuse et aussi parce qu’il serait
difficile de distinguer entre choses dangereuses et
choses inoffensives. Il n’y aucune mention de
« dangerosité » des choses dans cet article et il est
question de « garde ».

iv. Choses en mouvement et choses inertes


Les auteurs se sont aussi demandés s’il fallait écarter la
responsabilité du fait des choses lorsqu’il s’agit d’une
chose demeurée inerte.

Exemple  ; une voiture à l’arrêt contre laquelle un autre


véhicule vient percuter (arrêt Trib. Civ. Narbonne, 22

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La Responsabilité Délictuelle 2015

déc. 1930); un porte manteau contre lequel le client


d’un magasin vient trébucher  (arrêt Paris, 18 mars
1936) ; un escalier dans lequel une personne fait une
chuter (arrêt Colmar., 23 juin 1937).

Cette thèse a été condamnée par la Cour de cassation.


Une chose inerte peut aussi bien être cause de
dommage qu’une chose en mouvement (voir arrêt Civ.
21 janv. et 19 fév. 1941, D.C. 1941.85). Toutefois,
la Cour de cass précise : « …. que pour l’application de
l’article 1384 al.1er du Code Civil, la chose incriminée
doit être la cause du dommage, que si elle est
présumée en être la cause génératrice dès lors
qu’inerte ou non, elle est intervenue dans sa
réalisation, le gardien peut déduire cette présomption
en prouvant que la chose n’a joué qu’un rôle purement
passif, qu’elle a seulement subi l’action étrangère
génératrice du dommage » - Civ. 19. Fév. 1941.

L’on entend par là que le gardien peut s’exonérer de sa


responsabilité s’il prouve que la chose a eu un rôle
purement passif dans la réalisation du dommage.

A voir les arrêts suivants :


 ROSE BELLE S.E BOARD v CHATEAUNEUF
LTD [1990 SCJ 30]

 Supur vs. Central Electricity Board [1988 MR


32]: “We are left with grounds 4, 5 and 6 which
all concern the strict liability of a gardien d'une
chose inanimée for the fait de la chose and the
possible exoneration of such liability under article
1384-1 Code Napoleon.

There can be no doubt that the respondent was,


as averred in ground 4(a) of the reasons of
appeal, the gardien of the electric wires and that
the learned Judge must have considered them as
such since that particular fact was not disputed.

After careful consideration we do not think that


the learned Judge, in that paragraph of his
judgment quoted above, ever meant to restrict
liability of the gardien de la chose, under article
1384-1,to cases where the damage complained
of arises "because of something inherent
attributable to the chose itself" as ground 5 of
the reasons of appeal seems to suggest. We are

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La Responsabilité Délictuelle 2015

satisfied that, at that stage, the learned Judge


was only considering what has been called the
causalité between the chose and the damage, in
other words the role played by the chose, an
active or passive (one), in the damages
sustained by the appellant. It is significant that
the learned Judge starts by saying that he does
not think that counsel's analysis of the direct
cause of the electrocution is correct.

It is no longer true to say that a gardien can only


be exonerated where he proves 1'existence d'une
cause étrangère imprévisible et irrésis-tible,
(démontrant) par là même que la production du
dommage ne peut être attribuée au fait de la
chose.

It is now settled that a gardien may content


himself to prove that the chose for which he is
responsible only played a passive role in the
accident which caused the damage”.

 Appasawmy L. vs. The Albatross Insurance


Co [1997 SCJ 180] où la Cour suprême observe
entre autres :
“To come back to our present case, unless there
is proof under article 1384 -6 that the damage
was caused by a force majeure or the exclusive
fault of the victim, the van would be considered
as being the cause génératrice of the accident
even if it was functioning normally, thus entailing
the responsibility of the owner as gardien”.

v. Les choses qui échappent à l’application de


l’article 1384, al.1er
Il y a malgré tout certaines « choses » qui échappent à
l’application de cet article ;

 Res nullius : Ce sont des choses qui


n’appartiennent à personne. Elles échappent
donc à l’article 1384 al.1er car on ne peut leur
attribuer de gardien. Par contre, la responsabilité
du fait des res nullius peut être engagée sur le
fondement des articles 1382 et 1383 quand celui
qui les a abandonnées ou laissées a commis une
faute – voir dans ce sens l’arrêt Civ., 2e sect.

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La Responsabilité Délictuelle 2015

Civ., 18 janv. 1963 ; Sem. Jur. 1963, II,


13316).

Voir par exemple Nundloll v FUEL [1992 MR


262] – où la Cour suprême observe que les
abeilles sont des res nullius ici et non "immeubles
par destination" comme « bees in a hive »
(ruches à miel) mentionné à l’article 524 of the
Civil Code.

Dalloz, Répertoire de Droit Civil Vo.


"Responsabilité du fait des animaux": “Note
17.…L'article 1385 n'entend assurer la réparation
que des dommages causés par des animaux qui
peuvent faire l'objet d'une garde … C'est ainsi
qu'il a toujours été admis que les dommages
causés par les animaux qui sont res nullius ne
sauraient être réparés sur la base de l'article
1385.”

 Le corps humain ; on ne peut traiter le corps


humain comme une chose même quand le
dommage a été causé par la chute d’une
personne enformie ou évanouie, mais vivante –
voir dans ce sens l’arrêt Civ., 22 juin 1942 – il
s’agissait ici d’une chute d’un passager de
manège forain sur un spectateur.

 Biens incorporels – cette responsabilité est


limitée aux choses corporelles à l’exclusion des
choses incorporelles. Mais elle s’applique, sauf
dérogations spéciales, à toutes les choses,
qu’elles se présentent à l’état solide, liquide,
fluide ou gazeux.

 Choses soumises à un régime spécial de


responsabilité – maxime speciala generalibus
derogant s’applique ici et exclut l’application de
l’article 1384 al.1er, les choses soumises par la loi
à un régime spécial de responsabilité.
Responsabilité du fait des animaux (art. 1385) et
responsabilité du fait des bâtiments (art. 1386).

b. Le fait de la chose

i. Relation de cause à effet entre la chose et le dommage

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La Responsabilité Délictuelle 2015

Il faut que le dommage soit « le fait de la chose » c’est-à-dire


que la relation de cause à effet soit établie entre la chose et le
dommage. Comme vu plus haut, il devait être établi que
c’était un vice de la chose qui avait rendu celle-ci
dommageable. Ou que la chose fut animée d’un dynamisme
propre qui a contribué au dommage ou encore qu’il y ait eu
fait autonome de la chose qui se distinguait du fait de
l’homme.

Mais depuis l’arrêt Jand’heur, les chambres réunies décident «


il n’est pas nécessaire que la chose ait un vice inhérent à sa
nature et susceptible de causer un dommage, l’article 1384
rattachant la responsabilité à la garde de la chose, non à la
chose elle-même ». Les chambres réunies décident aussi qu’il
ne devrait pas y avoir de distinction entre le fait de la chose
et le fait de l’homme.

Ainsi, il faut établir qu’il y a un rapport de causalité entre la


chose et le dommage.

Il faut que la chose soit matériellement intervenue dans la


réalisation du dommage. Toutefois, l’absence de contact
matériel pose des difficultés. Selon l’auteur Alex Weill, « le
fait de la chose ne suppose pas nécessairement un contact
matériel entre la chose et la personne blessée ou l’objet
endommagé ». Exemple ; la roue d’un véhicule automobile
fait sauter un caillou qui brise une vitrine – Req. 24 nov.
1930, Gaz. Pal. 1930.2.953. Cette situation a été admise
par la Cour de cassation.

Qui doit donc prouver le fait de la chose ?


S’il y a eu contact dommageable, la victime doit démontrer
l’intervention de la chose dans la réalisation du dommage. La
chose est alors présumée être la « cause génératrice » du
dommage.
S’il n’y a pas eu contact, la victime doit établir ce lien de
causalité.

Ainsi donc, il faut également que la chose qui est


matériellement intervenue dans la réalisation du dommage ait
joué un rôle actif dans la production du dommage. Toutefois,
nous reviendrons sur les causes d’exonération qui s’offrent au
gardien.

ii. Coopération de plusieurs choses à la réalisation du


dommage
Collision entre deux véhicules. Il y a dans cette situation deux
gardiens. Selon la jurisprudence, la présomption de

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La Responsabilité Délictuelle 2015

responsabilité continue à peser sur chacun des gardiens, tant


que la preuve de la faute n’a pas été faite contre l’un ou
l’autre des conducteurs. Les assurances de chaque véhicule
entreront aussi en jeu afin de réparer les dommages causés
par la chose.

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