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‘Thomae de Aquino De ente et essentia' 1. Quia parvus error in principio magnus est in fine secun- ‘dum Philosophum in I Coe er mundi, ens autem et essentia sunt quae primo intellectu concipiuntur, ut dicit Avicenna in principio suae Metaphysicae, ideo ne ex corum ignorantia crrare contingat, ad horum difficultatem aperiendam dicen- ‘dum est quid nomine essentiae et enti signficetur, et quo- modo in diversis inveniatu, et quomodo se habeat ad inten- tiones logicas, scilicet genus, speciem et differentiam. 2 Quia vero ex composits simplicium cognitionem accipere 1. Sciendum est igitur quod, sicut in V Meraphysicae Philo- sophus dicit, ens per se dupliciter dicitur: uno modo quod 1. Puisqu’une petite erreur dans le principe finit par étre grande a la fin, d’aprés le Philosophe dans le livre T du ‘ Du ciel et du monde' et que Vétant et essence sont ‘ee que I"intellect congoit en premier, comme le dit Avicenne au début de sa Métaphysique, ds lors, si nous ne voulons pas tomber dans l’erreur par leur ignorance, nous devons, pour défricher la difficulté qu’ils présentent, dire ce que signifient le nom d’essence et d’étant, et comment cela" se trouve dans les diverses et se rapporte aux intentions logiques, & savoir le genre, l'espace et la diffé- 2. Mais comme nous devons tirer des composés notre ‘connaissance des simples, et parvenir partir de ce qui est pos- \éricur ce qui est antérieur, de sorte qu’en commengant par le plus facile l'étude soit rendue plus aisée, il faut done aller de la signification d’« étant » ala signification d"« essence ». 1. faut done savoir que, comme le dit le Philosophe au livre V de la Métaphysique’, « étant » se dit par soi de deux manitres : de lune, ce qui se divise par les dix genres, de l'autre, ce qui signifie la vérité de la propo- n Thomae de Aquino, De ente et essentia sitionum veritatem. Horum autem differentia est quia secundo ‘modo potest dici ens omne illud de quo affirmativa propo- sitio formari potest, etiam si illud in re nihil ponat;; per quem, ‘modum privationes et negationes entia dicuntur : dicimus, ‘quod affirmatio est opposita negationi, et quod caecitas est in oculo. Sed primo modo non potest dici ens nisi quod aliquid in re ponit; unde primo modo caecitas et huiusmodi ‘hon sunt entia. 2. Nomen igitur essentiae non sumitur ab ente secundo. modo dicto : aliqua enim hoc modo dicuntur entia quae essentiam non habent, ut patet in privationibus ; sed sumitur cessentia ab ente primo modo dicto. Vnde Commentator in ‘eodem loco dicit quod ens primo modo dictum est quod significat essentiam rei. Et quia, ut dictum est, ens hoc modo dictum dividitur per decem genera, oportet ut essentia signi- ficet aliquid commune omnibus naturis per quas diversa entia in diversis generibus et speciebus collocantur, sicut huma- nitas est essentia hominis, et sic de ais 3. Et quia illud per quod res constituitur in proprio genere vel specie est hoc quod significatur per definitionem indican- tem quid est res, inde est quod nomen essentiae a philosophis in nomen quiditatis mutatur; et hoc est etiam quod Philoso- phus frequenter nominat quod quid erat esse, id est hoc per quod aliquid habet esse quid. Dicitur etiam forma, secundum ‘quod per formam significatur certitudo uniuscuiusque rei, ut dicit Avicenna in Il Meraphysicae suae. Hoc etiam alio nomine natura dicitur, accipiendo naturam secundum primum modum illorum quatuor quod Boethius in libro De duabus naturis assignat : secundum scilicet quod natura dicitur omne illud {quod intellectu quoquo modo capi potest, non enim res st intelligibilis nisi per definitionem et essentiam suam: et sic etiam Philosophus dicit in V Metaphysicae quod ‘omnis substantia est natura. Tamen nomen naturae hoc modo sumptae videtur significare essentiam rei secundum quod Thomas d'Aquin, L'Etant et ! Essence B sition. La différence de ces deux , c'est que, au second sens, on peut appeler étant tout ce & propos de quoi on peut former une proposition affirmative, méme si cela ne pose rien dans la réalité; et c’est de cette manitre que les priva- tions et les négations sont appelées des étants : nous disons bien que l'affirmation est opposée a la négation, et que la ccécité est dans I'l. Tandis que, au premier sens, on ne peut appeler étant que ce qui pose quelque chose dans la réalité; en ce premier sens, la cécité et les autres de ce type ne sont donc pas des étants. 2. Le nom d’essence n'est donc pas tiré de étant, pris au second sens, car on appelle ainsi parfois étant ce qui n'a pas d’essence, comme c’est évident pour les privations, Mais « essence » est tiré de « étant » au premier sens. C'est pourquoi le Commentateur, au méme endroit, dit que «<étant», au premier sens, est ce qui signifie I'essence de Ia chose ®. Et parce que, comme on I’a dit, « étant » pris en ce sens est divisé par les dix genres’, « essence » doit signifier ‘quelque chose de commun & toutes les natures par lesquelles les. oe sont placés dans les divers genres et espces, ‘comme par eKemple I’humanité est I'essence de homme, et ainsi de site. 3. EtGomme ce par quoi une chose est établie dans son genre ou son espéce propre est ce qui est signifié parla défi- nition exprimant ce qu’est la chose, les philosophes* ont remplacé le nom d'essence par celui de quiddité; et c'est aussi ce que le Philosophe appelle fréquemment le ce que € était dire quelque chose? c’est-A-dire ce par quoi quelque chose a d°étre quelque chose. On l'appelle aussi «forme », dans la mesure oi c'est par la forme qu’est signi- fiée la certitude de chaque chose, comme le dit Avicenne au livre It de sa Métaphysique ®. On l'appelle aussi autrement «nature », en entendant « nature » au premier des quatre sens que Botce lui assigne dans son livre Des deux natures", ‘'est-a-dire au sens oi on appelle nature tout ce qui peut étre saisi de quelque fagon par Iintellect, car a chose n'est intel- ligible que par sa définition et son essence. Et c'est aussi en ‘ce sens que le Philosophe dit, au livre V de la Métaphysique ®, ue toute substance est nature. Pourtant, le nom de nature Ainsi entendu semble signifier essence de la chose en tant 14 Thomae de Aquino, De ente et essentia hhabet ordinem ad propriam operationem rei, cum nulla res propria operatione destituatur; quiditatis vero nomen sumi- tur ex hoe quod per definitionem significatur. Sed essentia dicitur secundum quod per eam et in ea ens habet esse. 4, Sed quia ens absolute et primo dicitur de substantis, ct per posterius et quasi secundum quid de accidentibus, inde est quod etiam essentia proprie et vere est in substantiis, sed in accidentibus est quodammodo et secundum quid. Substan- tiarum vero quaedam sunt simplices et quaedam compositae, et in utrisque est essentia; sed in simplicil liori modo, secundum quod etiam esse nobi enim causa eorum quae composita sunt, ad minus substantia, prima simplex quae Deus est. Sed quia illarum substantiarum essentiae sunt nobis magis occultae, ideo ab essentiis sub- stantiarum compositarum incipiendum est, ut a facilioribus convenientior fiat disc - 1. In substantiis igitur compositis forma et materia nota cst, ut in homine anima et corpus. Non autem potest dici quod alterum eorum tantum essentia esse dicatur. Quod enim mate- ria sola rei non sit essentia, planum est, quia res per essentiam suam et cognoscibilis est, et in specie ordinatur vel genere: sed materia neque cognitionis principium est, neque secun- ‘dum eam aliquid ad genus vel speciem determinatur, sed secundum id quod aliquid actu est. Neque etiam forma tan- ‘um essentia substantiae compositae dici potest, quamvis hoc ‘quidam asserere conentur. Ex hiis enim quae dicta sunt patet Thomas a’ Aquin, L’Etant et V Essence 8 {qu'elle est ordonnée a son opération propre, puisque aucune ‘chose ne perd son opération propre, tandis que le nom de ‘quiddité est tiré du fait que lessence est signfiée par Ia défi- nition. Mais elle est appelée « essence » en tant que c’est par elle ct en elle que I’étant a Petre, 4. Mais parce que « étant » se dit de maniére absolue et premigre des substances, et ensuite et comme de maniére relative des accidents, il s'ensuit que l'essence aussi est de ‘manitre propre et véritable dans les substances, et n’est que dune certaine fagon et de maniére relative dans les acci dents. Or, parmi les substances, certaines sont simples et d'autres sont composées, et en chacune il y a une essence ; mais dans les substances simples d’une ‘manitre plus vraie et plus noble, qui fat qu’elles ont aussi un tre plus noble, car elles sont causes de celles qui sont com- posées, du moins la substance premigre et simple qui est Dieu. Mais comme les essences de ces substances nous sont plus cachées, il faut commencer par les essences des sub- stances composées, si nous voulons que notre étude se fasse dde maniére plus aisée & partir des choses plus faciles . 1. Dans les substances composées on connait!” la forme et a matiére, comme, chez l'homme, I"ame et le corps. Mais fon ne peut pas dire que l'une des deux seulement est I'es- sence. Que la matidre seule de la chose ne soit pas lessence, cela est Evident, car c'est par son essence que la chose est connaissable et qu'elle est rangée dans une espce ou dans tun genre; alors que la matitre n’est pas principe de connais- sance, et que ce n’est pas d’aprés la matidre que quelque chose est déterminé a <étre dans> un gente ou a <étre dans> tune espéce, mais d’aprés ce qui est quelque chose en acte Eton ne peut pas dire non plus que c'est la forme seule qui est, essence de la substance composée, bien que certains s'effor- cent de le soutenir'®. Ce que l'on a dit montre clairement 16 Thomae de Aquino, De ente et essentia ‘quod essentia est illud quod per definitionem rei significatu definitio autem substantiarum naturalium non tantum for ‘mam continet sed etiam materiam, aliter enim definitiones naturales et mathematicae non differrent. Nec potest dict ‘quod materia in definitione substantiae naturalis ponatur sicut additum essentiae eius vel ens extra essentiam eius, quia hic modus definitionum proprius est accidentibus, quae perfectam essentiam non habent ; unde oportet quod in defi- hitione sua subiectum recipiant, quod est extra genus eorum. Patet ergo quod essentia comprehendit et materiam et for- "2. Non autem potest dici quod essentia significet relatio- ‘nem quae est inter materiam et formam, vel aliquid superad- ditum ipsis, quia hoc de necessitate esset accidens et extra- hneum a re, nec per eam res cognosceretur: quae omnia tessentiae conveniunt, Per formam enim, quae est actus mate- rie, materia efficitur ens actu et hoc aliquid ; unde illud quod Superadvenit non dat esse actu simpliciter materiae, sed esse ‘actu tale, sicut etiam accidentia faciunt, ut albedo facit actu ‘album. Vnde et quando talis forma acquiritur, non dicitur generari simpliciter sed secundum quid. '3. Relinguitur ergo quod nomen essentiae in substantiis, ccompositis significat id quod ex materia et forma compo- ‘itum est. Et huic consonat verbum Boethii in commento Praedicamentorum, ubi dicit quod usya significat compo- situm; usya enim apud Graecos idem est quod essentia ‘apud nos, ut ipsemet dicit in libro De duabus naturis. Avi- ‘cenna etiam dicit quod quiditas substantiarum compositarum fest ipsa compositio formae et materiae. Commentator etiam dicit super VII Meraphysicae : « Natura quam habent species in rebus generabilibus est aliquod medium, id est compo- situm ex materia et forma. » Huic etiam ratio concordat, quia esse substantiae compositae non est tantum formae ‘Thomas d' Aquin, L’Etant et ' Essence nn ‘que Tessence est ce qui est signifié par la définition de la chose ; or, Ia définition des substances naturelles ne contient ‘pas seulement la forme mais aussi la matitre, car sinon il n'y aurait pas de diffrence entre les définitions naturelles et les définitions mathématiques. Et on ne peut pas dire que la satire est posée dans la définition de la substance naturelle comme un ajout & l'essence ou comme un étant extérieur & essence, car cette sorte de définition est propre aux accidents, qui nont pas d'essence parfaite, et doivent donc recevoir, dans leur définition, un sujet, qui est extérieur & leur genre". lest done évident que l’essence comprend la matigre et la forme. 2. Or, on ne peut pas dire que « essence » signifie une rela- tion entre la matigre et Ia forme", ou quelque chose qui leur serait surajouté, car cela serait alors nécessairement acciden- tel et extérieur & la chose, qui ne serait pas connue par cette relation, autant qui conviennent a l'essence ®. C’est par la forme, en effet, qui est l'acte de Ia matiére, que la matitre est rendue lant en acte et ce quelque chose ; de sorte que ce qui lui est surajouté ne donne pas a la matiére d'étre en acte de manitre absolue, mais d’étre en acte tel, comme le font les accidents ~ par exemple la blancheur qui fait <étre> blanc fen acte. C’est pourquoi, quand une telle forme est acquise, ‘on ne dit pas qu’elle est engendrée de manire absolue, mais de manire relative. 3. Reste donc que, pour les substances composées, le nom d'essence signifie ce qui est composé de la matiere et de la forme. Et cela s'accorde avec les mots de Boece dans son ‘commentaire des Carégories, ot il dit que « usya » signifie le ‘composé. En effet, I'usya chez les Grecs est la méme chose ‘que essence chez nous, comme il le dit lui-méme dans son livre Sur les deux natures?!, Avicenne dit aussi que la quid- dité des substances composées est la composition méme de la matigre et de Ia forme. Et le Commentateur dit aussi en ccommentant le livre VII de la Métaphysique : « La nature {qu’ont les especes dans les choses sujettes 2 la génération est un intermédiaire, c’est-2-dire le composé de la matigre et de la forme,» La raison enfin s'accorde avec celte these, car Metre de la substance composée n’est pas celui de la forme 8 Thomae de Aquino, De ente et essentia neque tantumn materiae, sed ipsius compositi; essentia autem est secundum quam res esse dicitur : unde oportet ut essentia {qua res denominatur ens non tantum sit forma, neque tantum ‘materia, sed utrumque, quamvis huiusmodi esse suo modo sola forma sit causa, Sic enim in alis videmus quae ex pluri- bus principiis constituuntur, quod res non denominatur ex altero illorum principiorum tantum, sed ab eo quod utrumque ‘complectitur : ut patet in saporibus, quia ex actione calidi une et l'autre, bien que la forme seule sot, a sa manigre, cause de cet étre, Nous voyons ainsi que, dans les autres réalités qui sont constituées de plu- sieuts principes, la chose ne regoit pas son nom de I'un de ces principes seulement, mais de ce qui embrasse chacun, comme on le voit pour les saveurs 'action du chaud dans la «digestion de I"humide cause la douceur, et bien que de cette maniére la chaleur soit cause de Ia douceur, le comps n'est pas ce qui est signifié parla définition, C'est pourquoi il faut savoir que ce n'est pas Ia ‘matidre entendue en n’importe quel sens qui est principe individuation, mais c’est seulement la matigre désignée ~et j'appelle mati désignée celle qui est considérée sous des dimensions déterminées. Or, cette matitre n'est pas posée dans la definition que l'on donne de horame en tant qu’homme, mais elle serait posée dans Ia défintion de Socrate, si Socrate avait une definition. Tandis que dans la 4éfinition de homme on pose la matitre non-désignée : on ne pose pas cet os et cette chair, mais Ios et la chair pris absolument, qui sont la matigre non désignée de homme. 5. Test ainsi clair ue I'essence de l'homme ne differe de Tressence de Socrate que selon le désigné et le non-désigné. ‘C’est pourquoi le Commentateur dit en commentant le livre Vil de ta Métaphysique®: « Socrate n'est rien d’autre que animalité et la rationalté, qui sont sa quiddit. » Ainsi,V'es- sence du genre et de I'espece different aussi selon le désigné et le non-désigné, bien que dans ees deux cas le ‘mode de désignation soit distinct. En effet, la désignation de Vindividu par rapport & lespace est le fait de la matitre désignée par des dimensions, tandis que la désignation de | 80 Thomae de Aquino, De ente et essentia speciei respectu generis est per differentiam constitutivam uae ex forma rei sumitur. Haec autem determinatio vel desi- ‘natio quae est in specie respectu generis, non est per aliquid in essentia speciei existens quod nullo modo in essentia gene- ris sit; immo quicquid est in specie est etiam in genere ut non determinatum. Si enim animal non esset totum quod est hhomo sed pars eius, non praedicaretur de eo, cum mulla pars integralis de suo toto praedicetur. : '6. Hoc autem quomodo contingat vider potrit, si inspiciatur qualiterdiffert corpus secundum quod ponitur pars animals, et secundum quod ponitur genus; non enim potest esse eo ‘modo genus quo est pars integrals. Hoc igitar nomen quod est corpus multipliciter accipi potest. Corpus enim secundum {quod est in genere substantiae diitur ex eo quod habettalem naturam ut in eo possint designari tres dimensiones: ipse cenim tres dimensiones designatae sunt corpus quod est in genere quantitatis. Contingit autem in rebus ut quod habet tinam perfectionem, ad ulteriorem etiam perfectionem pertin- gat; sicut patet in homine, qui et naturam sensitivam habet, ¢t ullerius intellectivam. Similiter etiam et super hane per- feetionem quae est habere talem formam ut in ea possint tes dimensiones designari, potest alia perfecto adiungi, ut vita ‘el aliquid huiusmod. Potest ergo hoc nomen corpus signifi- care rem quandam quae habet talem formam ex qua seq in ipsa designabilitas tum dimensionum, cum praecisione : tut scilicet ex illa forma nulla ulterior perfectio sequatur, sed si quid aliud superadditur, sit praetersignificationem corporis sic dicti. Et hoc modo corpus ert integralis et materalis pars animals : quia sic anima erit praeter id quod significatum est rnomine corporis, et erit superveniens ipsi corpori, ita quod cx ipsis duobus, scilicet anima et corpore, sicut ex partibus cconstituetur animal. 7. Potest etiam hoc nomen corpus hoc modo accipi ut significet rem quandam quae habettalem formam ex qua tres dimensiones in ea possunt designari, quaecumque aa | B Thomas d' Aquin, L’Etant et "Essence |; al resptce par rapport au genre se fait par la différence const tutive qui est tise de la forme de la chose. Or, cette détermi nation ou désignation qui se trouve dans l'espéce par rapport au genre ne se fait pas par quelque chose d’existant dans essence de l’espace qui ne serait en aucune fagon dans I'es- sence du genre, mais au contraire: tout ce qui est dans espéce est aussi dans le genre, comme non déterminé. En cffet, si animal n’était pas le tout qu’est I’homme mais sa parti, il ne se prédiquerait pas de lui, puisque aucune partie intégrale ne se prédique de son tout. 6. On pourra voir comment cela se fait, si on examine la différence qu'il y a entre le corps pris en tant que partie de lanimal et le corps pris en tant que genre car il ne peut pas étre genre & la manitre dont il est parti intégeale. Ce nom « corps » peut donc étre pris en plusieurs sens, En effet, on appelle corps dans le genre de la substance ce qui a ‘une nature telle que les trois dimensions peuvent étre dési- sgnées en lui, mais”” ces trois dimensions désignées sont elles-mémes le corps dans le genre de la quantité™. Or, il arrive dans la réalité que ce qui a une perfection puisse atteindre aussi 4 la perfection ultgrieure, comme on le voit ‘chez I’homme, qui a la nature sensitive ef, en outre, la nature uellective. De la méme maniére, & la perfection qui consiste avoir une forme telle que les trois dimensions puissent y tre désignées, peut venir s’ajouter une autre perfection, comme la vie ou quelque chose de cette sorte. Le nom «corps » peut done signifier une chose qui a une forme telle que Ia possiblité de désigner les trois dimensions s"ensuive ‘en elle, avec cette précision : qu’aucune perfection ultérieure ne suive de cette forme, mais, si quelque chose lui est ajouté, ‘que cela ne soit pas compris dans la définition du corps ainsi entendu. Et de cette manigre, le corps sera une partie inté- sgrale et matériel de I’animal, car en ce sens I'éme ne sera pas comprise dans ce qui est signifié par le nom de corps, elle sera quelque chose de surajouté au corps, de telle sorte que ce soit des deux, de I'dme et du corps, que soit constitué animal, comme de parties ®. 7.On peut aussi entendre ce nom de comps de telle sorte qh signifie une chose qui a une forme telle que les trois dimen- sions puissent étre désignées dans cette chose, quelle que 82 Thomae de Aquino, De ente et essentia forma sit illa, sive ex ea possit provenire aliqua ulterior per- fectio, sive non; et hoc modo corpus erit genus animalis, quia in animali nihil erit accipere quod non implicite in cor- pore contineatur. Non enim anima est alia forma ab illa per {quam in re illa poterant designari tres dimensiones ; et ideo ‘cum dicebatur quod ‘corpus est quod habet talem formam ex {qua possunt designari tres dimensiones in eo’, intelligebatur quaecumque forma esset sive anima, sive lapideitas, sive {quaecumque alia. Bt sic forma animalis implicite in forma ‘corporis continetur, prout corpus est genus eius. : 8. Et talis est etiam habitudo animalis ad hominem. Si enim animal nominaret tantum rem quandam quae habet talem perfectionem ut possit sentire et moveri per principium in ipso existens, cum praecisione alterius perfectionis, tune quaecumque alia perfectio ulterior superveniret haberet se ad ‘animal per modum compart et non sicut implicite contenta in tatione animalis : et sic animal non esset genus. Sed est genus secundum quod significat rem quandam ex cuius forma potest provenire sensus et motus, quaecumque sit illa forma: sive sit anima sensibilis tantum, sive sensibilis et rationalis simul. '9, Sic ergo genus significat indeterminate totum id quod ‘est in specie, non enim significat tantum materiam. Simil ter etiam et differentia significat totum, et non significat tantum formam, et etiam definitio significat totum, vel ctiam species. Sed tamen diversimode : quia genus significat totum ut quaedam denominatio determinans id quod est materiale in re sine determinatione propriae formae, unde ‘genus sumitur ex materia — quamvis non sit materia —; 't patet quia corpus dicitur ex hoc quod habet talem perfec~ tionem ut possint in eo designari tres dimensiones, quae quidem perfectio est materialiter se habens ad ulteriorem perfectionem. Differentia vero ¢ converso est sicut quac- ‘Gam denominatio a forma determinata sumpta, praeter hoc ‘Thomas a’ Aquin, L'Etant et ! Essence 83 soit cette forme, qu’une perfection ultérieure puisse en pro- venir ou non. Et, ainsi entendu, « corps » sera le genre de «animal », car il ne faudra rien entendre dans « animal » qui ne soit implicitement contenu dans « corps ». En effet, lime n'est pas une forme différente de celle par laquelle, dans cette chose, les trois dimensions pouvaient étre désignées. Cest pourquoi, lorsqu’on disait «le corps est ce qui a une forme telle que les trois dimensions peuvent y étre dési- nes», on Tentendait quelle que ft la forme :I'dme, ou la jeméité, ou toute autre forme. Ainsi a forme de animal est plicitement contenue dans la forme du corps, dans 1a mesure oi le corps est son genre ®. 8. Tel est aussi le rapport d’« animal » a «homme». Si, en effet, « animal » ne nommait qu'une chose qui a une perfec- tion tlle qu'elle puisse sentir et se mouvoir par un principe dui existe en elle-méme™, a Pexclusion de toute autre per- fection, alors toute perfection ultérieure qui s'y ajouterait se rapporteait a ’animal sur le mode d'une partie , et non comme si elle tat implicitememt contenue dans ta notion d’animal : ainsi « animal » ne serait pas un genre. Mais c’est un genre, dans la mesure oi il signifie une chose ayant une forme dont peuvent provenir Ia sensation et Je mouvement, quelle que soit cette forme, que ce soit une dime sensible seulement, ou sensible et ration- nelle Ia fois. 9. Ainsi donc, le genre signifie de manitre indéterminée {out ce qui est dans espace, car il ne signifie pas seulement la matie. Et de la méme facon, la différence signifie aussi le tout, et ne signifie pas seulement la forme, et la définition aussi signifie le out, et de méme Hespbce. Mais ils le signi fient de diverses manidres : le genre signifie le tout comme tune certaine dénomination ® qui détermine ee qui est maté- Tiel dans la chose, sans détermination de la forme propre, c'est pourquoi le genre est pris & partir de la matitre ~ bien {qu'il ne soit pas la matiére ~; comme c'est évident pour le corps, qui est appelé ainsi parce qu’ a une perfection tele ue les trois dimensions peuvent étre désignées en lui, per- fection qui se rapporte & la perfection ultérieure comme sa matiére. Tandis que la différence, au contraire, est une cer- taine dénomination faite & partir de la forme déterminée, sans 84 Thomae de Aquino, De ente et essentia ‘quod de primo intellectu eius sit materia determinata; ut patet cum dicitur animatum, scilicet illud quod habet ani- ‘mam, non enim determinatur quid sit, utrum corpus vel al (quid aliud : unde dicit Avicenna quod genus non intelligitur in differentia sicut pars essentiae eius, sed solum sicut ens ‘extra essentiam, sicut etiam subiectum est de intellectu pas- sionum. Et ideo etiam genus non praedicatur de differentia per se loquendo, ut dicit Philosophus in III Meraphysicae et in IV Topicorum, nisi forte sicut subiectum praedicatur de passione. Sed definitio vel species comprehendit utrumque Scilicet determinatam materiam quam designat nomen generis, ‘et determinatam formam quam designat nomen differentia. 10. Et ex hoe patet ratio quare genus, species et differentia, se habent proportionaliter ad materiam et formam et composi- tum in natura, quamvis non sint idem quod illa: quia neque ‘genus est materia, sed a materia sumptum ut ‘otum ; neque differentia forma, sed a forma sumpta ut signifi- cans totum, Vade dicimus hominem esse animal rationale, et hnon ex animali et rationali sicut dicimus eum esse ex anima et corpore : ex anima enim et corpore dicitur esse homo sicut ex duabus rebus quaedam res tertia constituta quae neutra illarum est, homo enim neque est anima neque corpus. Sed si homo aliquo modo ex animali et rationali esse dicatur, non crit sicut res tetia ex duabus rebus, sed sicutintellectus tertius ex duobus intellectibus. Intellectus enim animalis est sine determinatione specialis formae, exprimens naturam rei ab eo ‘quod est materiale respect ultimae perfectionis ; intellectus autem huius differentiae rationalis consistit in determinatione formae specialis : ex quibus duobus intellectibus constituitur intellectus specici vel definitionis. Et ideo sicut res constituta, ex aliquibus non recipit praedicationem earum rerum ex ‘quibus constituitur, ita nec intellectus recipit praedicationem ‘Thomas d’ Aquin, L’Etant et ' Essence 85 cconsidérer dans son premier concept ce qui est matitre déter- minée. Cela est clair quand on appelle animé ce qui a une Ame, car on ne détermine pas ce que c’est, un corps ou autre ‘chose. C’est pourquoi Avicenne dit que le genre n'est pas ‘pensé dans la différence comme une partie de l'essence, mais, seulement comme un étant hors de essence ¥, tout de meme {que le sujet est compris dans Iintellection des passions . C’est aussi pourquoi le genre n'est pas prédiqué par soi de Ia différence, comme le dit le Philosophe au livre Ill de Ia Métaphysique® et au livre IV des Topiques®, si ce n’est peut-étre au sens od le sujet est prédiqué de sa passion, Mais la définition et espéce comprennent l'un et l'autre, 3 savoir la matiére déterminée que désigne le nom de genre, et Ia forme déterminge que désigne le nom de différence 10. Apparait alors clairement la raison pour laquelle le ‘genre, 'esptce et la différence se rapportent de maniére pro- portionnelle & la matiére, a la forme et au composé dans la nature, bien qu’ils ne soient pas identiques & eux *. En effet, le genre n'est pas la matire, mais il est pris & partir de la ‘matigre comme signifiant le tout; et la différence n'est pas la forme, mais elle est prise a partir de la forme, comme signi- fiant le tout. C'est pourquoi nous disons que I’homme est un animal rationnel, et non qu’il est d’animal et de rationnel ®, comme nous disons qu’il est dame et de corps. En effet, on dit que I’homme est dime et de corps, comme a partir de deux choses est consti- luée une troisitme qui n’est aucune des deux, car homme n’est ni "ame ni le corps. Mais si on dit que I’homme est, dune certaine manigre d'animal et de rationnel, ‘ce ne sera pas comme une troisitme chose & partir des deux ppremiéres, mais comme un troisitme concept & partir de deux concepts. Car le concept d'animal est sans détermination, d'une forme spéciale, mais exprime la nature de la chose & partir de ce qui est matériel relativement sa perfection ultime. Et le concept de la différence « rationnel » consiste en la détermination d’une forme spéciale. De ces deux concepts est constitué le concept de lespece ou de la défini- tion“. C'est pourquoi, tout comme une chose constituée d'autres choses n'est pas sujet pour la prédication des choses dont elle est constituée, le concept ne regoit pas non plus la 86 Thomae de Aquino, De ente et essentia corum intellectuum ex quibus constituitur :non enim dicimus quod definitio sit genus aut differentia 11. Quamvis autem genus significet totam essentiam speciei, ‘non tamen oportet ut diversarum specierum quarum est idem ‘genus, sit una essentia, quia unitas generis ex ipsa indetermi- natione vel indifferentia procedit. Non autem ita quod illud {quod significatur per genus sit una natura numero in diversis speciebus, cui superveniat res alia quae sit differentia deter- ‘minans ipsum, sicut forma determinat materiam quae est una numero; sed quia genus significat aliquam formam ~ non tamen determinate hanc vel illam ~, quam determinate diffe~ rentia exprimit, quae non est alia quam illa quae indeter- ‘minate significabatur per genus. Et ideo dicit Commentator in XI Metaphysicae quod materia prima dicitur una per remotionem omnium formarum, sed genus dicitur unum per communitatem formae significatae. Vnde patet quod per additionem differentiae remota illa indeterminatione quae erat causa unitatis generis, remanent species per essentiam diversae, 12. Et quia, ut dictum est, natura specici est indeterminata respectu individui sicut natura generis respectu speciei : inde ‘est quod, sicut id quod est genus prout praedicabatur de spe- ccie implicabat in sua significatione, quamvis indistincte, totum quod determinate est in specie, ita etiam et id quod est species secundum quod praedicatur de individuo oportet ‘quod significet totum id quod est essentialiter in individuo, licet indistincte. Et hoc modo essentia speciei significatur ‘nomine hominis, unde homo de Sorte praedicatur. Si autem significetur natura speciei cum praecisione materiae designa~ tae quae est principium individuationis, sic se habebit per modum partis; et hoc modo significatur nomine humanita- tis, humanitas enim significat id unde homo est homo. Mate- ria autem designata non est id unde homo est homo, et ita rnullo modo continetur inter illa ex quibus homo habet quod. sit homo, Cum ergo humanitas in suo intellectu includat : | | Thomas d' Aquin, L’Etant et ' Essence 87 prédication des concepts dont il est constitué : nous ne disons pas que la définition est le genre ni qu’elle est Ia difference *! 11. Bien que le genre signifie toute l'essence de I'espece, iin'est pas nécessaire que diverses espces d'un méme genre naient qu'une seule essence, car 'unité du genre vient de cette indétermination ow indifférence. Il ne faut pas le com- prendre au sens oii ce qui est signifié par le genre serait dans les diverses espces une nature numériquement une, laquelle serait ajoutée une autre réalité~ la différence qui le <éerminerait 41a maniére dont la forme détermine une ‘matiére numériquement une; mais au sens oi le genre signifie tune forme ~ sans pourtant de manitre déter- minge celle-ci ou celle-a ~, que la différence exprime de manitre déterminée, et qui n'est pas distinete de celle qu était signifiée de manigre indéterminée par le genre. C’est pour- quoi le Commentateur dit, au livre XI de la Métaphysique ®, que la matiére premire est dite une par négation de toutes les formes, tandis que le genre est dit un par le caractére commun de la forme signifi. Il est ainsi évident que, une fois ajoutée Ja difference et écartée lindétermination qui était cause de TPunité du genre, les espdces demeurent diverses par essence. 12. Et parce que, comme on Ia dit, Ia nature de l'espece est indéterminge par rapport & individu, ainsi que la nature du genre par rapport a lespce, il s'ensuit que, de méme que ce qui est genre en tant qu’l se prédique de Fespace imp 4quait dans sa signification, bien que ce fat de maniére ind tincte, tout ce qui est de manitre déterminée dans T'espbce, de méme aussi ce qui est espce en tant qu'elle se prédique de I'individu doit signifier tout ce qui est essentiellement dans individu, bien que ce soit de maniére indistincte. Et ainsi, Messence de lespece est signifiée par le nom ‘homme, de sorte que « homme » se prédique de Socrate. Mais si ta nature de ’espece est signifiée &I'exclusion de la matitre désignée qui est principe "individuation, elle se tiendra sur le mode de Ia partie: et c’est ainsi qu'elle est signifiée par le nom d°humanté, car « humanité »signifie ce par quoi l'homme est homme. Or, la matigre désignée n'est Pas ce par quoi I"homme est homme, et elle n'est done aucu- nnement contenue parmi les & partir des- quels homme a d’étre homme. Puisque Mhumanité inclut 88 Thomae de Aquino, De ente et essentia tantum ea ex quibus homo habet quod est homo, patet quod a significatione excluditur vel praeciditur materia designata et uia pars non praedicatur de toto, inde est quod humanitas nec de homine nec de Sorte praedicatur. Vnde dicit Avicenna ‘quod quiditas compositi non est ipsum compositum cuius est uiditas, quamvis etiam ipsa quiditas sit composita; sicut hhumanitas, licet sit composita, non est homo : immo oportet ‘quod sit recepta in aliquo quod est materia designata. 13. Sed quia, ut dictum est, designatio speciei respectu ‘eeneris est per formam, designatio autem individui respecty speciei est per materiam, ideo oportet ut nomen significans id unde natura generis sumitur, cum praecisione formac speciem, significet partem materia- t corpus est pars materialis hominis; nomen, autem significans id unde sumitur natura speciei, cum prae- cisione materiae designatae, significat partem’formalem, Et ideo humanitas significatur ut forma quaedam, et di quod est forma totius; non quidem quasi superaddita part bus essentialibus, scilicet formae et materiae, sicut forma ddomus superadditur partibus integralibus eius : sed magis est forma quae est totum, scilicet formam complectens et mate- riam, tamen cum praccisione eorum per quae nata est materia designari 1. Sic igur pat quod esentiam hominis significa hoe nomen homo et hoc nomen humanitas, sed diversimode, ut dictum est: quia hoe nomen homo significat eam ut totum, in ‘quantum scilicet non praecidit designationem materiae sed implicite continet eam et indistincte, sicut dictum est quod ‘genus continet differentiam ; et ideo praedicatur hoc nomen homo de individuis, Sed hoc nomen humanitas significat eam ut partem, quia non continet in significatione sua nisi id quod est hominis in quantum est homo, et praecidit omnem designa- tionem ; unde de individuis hominis non praedicatur. Et prop- ter hoc nomen essentiae quandoque invenitur praedicatum de Thomas d’Aquin, L’Etant et "Essence seulement dans son concept ce dot l'homme tient d°étre 2: homme, il est évident que la matitre désignée est rejetée ou (7 exclue de la signification . Et comme la partie ne se prédique pas da tou ilenrésulte que « humanité» ne, se prédique ni de I'homme ni de Socrate. C'est pourquoi Avicenne dit que la quiddité du composé n'est pas le composé dont elle est la quiddite, bien que la quiddité elle. > méme soit composée “; par exemple I’humanité, bien qu’elle |, « soit composée, n'est pas I’homme. II faut, au contraire,/” 2 qu’elle soit recue dans ce qui est la matidre désignée. au, 13. Mais, comme on Ia dt, la désignation de lespace par 3% rapport au genre se fait par la forme, et la désignation de l'in-,?-°? dividu par rapport a l'espace par Ia matitre; il faut donc que Je nom qui signifie ce d’oi est prise la nature du genre, & 'ex- clusion de la forme déterminée qui acheve 'esptce, sigifie la partie matérielle du tout, de méme que le corps est la partie Imatérelle de homme, Tandis que le nom qui signifiece d’00 est prise la nature de esptce,& exclusion de la matte dési- née, signifie la patie formelle. C'est pourquoi lhumanité est signifige comme une certaine forme, et on dit qu'elle est la forme du tout; non pas comme si elle était surajoutge aux par- ties essentilles, savoir la forme et la matitre, au sens o4 forme de la maison s’ajoute & ses parties inégrales: mais elle est davantage la forme qui est le tout, e'esta-dire qui embrasse la forme et la matitre,&I'exclusion cependant de ce Par quoi la matiére est capable d'etre désignée. 14. Il est donc évident que le nom « homme » et le nom « comme un tout,en tant qu'elle n’exclut pas la désignation de la matigre mais la contient implicite- ‘ment ct de maniére indistinete, la manigre dont on a dit {que le genre contient la différence: et c'est pour cela que le nom «homme » se prédique des individus. Mais le nom « comme une par- tie, ear elle ne contient dans sa signification que ce qui appar- tient & ’homme en tant qu'il est homme, et exclut toute <ésignation; c'est pourquoi i ne se préique pas des individu de I' homme. C'est pour cette raison que le nom essence se trouve parfois prédiqué de la chose, car nous 90 Thomae de Aquino, De ente et essentia r Thomas d’Aquin, L’Etant et Essence a1 re, dicimus enim Sortem esse essentiam quandam; et quan- doque negatur, sicut dicimus quod essentia Sortis non est Sortes. < 1. Apres avoir vu ce qui est signifié par le nom d’essence dans les substances composées, il faut voir comment il se rapporte aux notions de genre, d'espace et de différence. Or, ppuisque ce & quoi convient Ia notion de genre, ou d'espece ‘ou de différence, est prédiqué de ce singulier désigné, il est impossible que la notion * de I’universel, & savoir la notion de genre ou d’espéce, convienne a I’essence en tant que signifiée sur le mode de la partie, comme c'est le cas par le nom d’humanité ou danimalit est pourquoi Avicenne dit que Ia rationalité n'est pas la dif. {érence, mais le principe de la différence ® ; et pour la méme raison I"humanité n'est pas l'espéce, ni l'animalité le genre. ‘On ne peut pas non plus dire que Ia notion d’espece ou de genre convienne & I’essence prise comme une certaine chose existant hors des individus, comme le soutenaient les Plato- niciens , car alors le genre et l’espce ne se prédiqueraient pas de l'individu; en effet, on ne peut pas dire que Socrate est ce qui est séparé de lui, et cette chose séparée ne servirait pas A connaitre ce singulier. C’est pourquoi il faut que la notion de genre ou d'espece convienne & I’essence en tant 4que signifiée sur le mode du tout, comme par le ‘nom d’homme ou d’animal, dans la mesure od il contient de facon implicite et indistincte tout ce qui est dans Vindividu, 2. Or, la nature ou I'essence ainsi entendue peut étre consi- dérée de deux maniéres*”. D’abord selon sa notion propre, et est la considération absolue de I'essence. De cette manitre, rien n’est vrai d’elle sinon ce qui lui convient en tant que telle. C'est pourquoi, quoi qu’on lui attribue d’autre, I'atri- bution sera fausse. Par exemple, & ’homme en tant qu'il est homme conviennent rationnel et animal et les autres qui appartiennent & sa définition ; mais blanc ou nigrum, vel quicquid huiusmodi quod non est de ratione hhumanitatis, non convenit homini in e0 quod homo. Vnde si {quacratur utrum ista natura sic considerata possi dici una vel plures, neutrum concedendum est, quia utrumgue est extra intellectum humanitatis, et utrumque potest sibi accidere. Si ‘enim pluralitas esset de intellectu eius, numquam posset esse ‘una, cum tamen una sit secundum quod est in Sorte. Similiter si unitas esset de ratione eius, tunc esset una et eadem Sortis et Platonis, nec posset in pluribus plurificari. Alio modo cconsideratur secundum esse quod habet in hoc vel in illo: et sic de ipsa aliquid praedicatur per accidens ratione eius in quo est, sicut dicitur quod homo est albus quia Sortes est albus, quamvis hoc non conveniat homini in €o quod homo. 3. Haec autem natura habet duplex esse : unum in singula- ribus et aliud in anima, et secundum utrumque consequuntur fctam naturam accidentia; in singularibus etiam habet mul- tiplex esse secundum singularium diversitatem. Et tamen psi naturae secundum suam primam considerationem, scilicet absolutam, nullum istorum esse debetur. Falsum enim est dicere quod essentia hominis in quantum huiusmodi habeat esse in hoc singulari, quia si esse in hoc singulari conveniret homini in quantum est homo, numquam esset extra hoc ingulare; similiter etiam si conveniret homini in quantum. fest homo non esse in hoc singulari, numquam esset in €0 : sed verum est dicere quod homo, non in quantum est homo, hhabet quod sit in hoc singulari vel in illo aut in anima. Ergo patet quod natura hominis absolute considerata abstrahit a Quolibet esse, ita tamen quod non fiat praccisio alicuius ‘eorum. Et haee natura sic considerata est quae praedicatur de individuis omnibus. 44. Non tamen potest dici quod ratio universalis conveniat, naturae sic acceptae, quia de ratione universalis est unitas et communitas; naturae autem humanae neutrum horum convenit secundum absolutam suam considerationem. Si ‘enim communitas esset de intellectu hominis, tune in quo- noir, ou quoi que ce soit de cette sorte qui nappartient pas & Ja notion d’humanité, ne conviennent pas & homme en tant qu'il est homme. C'est pourquoi, si l'on demande si cette nature ainsi considérée peut étre une ou plusieurs, il ne faut eonoéder ni une ni Pautre , car Tune et autre sont hors du concept d’humanié, et chacune ‘des deux peut lui arriver. Si la pluralité appartenait a son concept, jamais elle ne pourrait ére une, bien qu'elle soit une fen tant quelle est dans Socrate. De méme, si 'unité apparte- ait son concept, alors elle serait une et la méme de Socrate et de Piaton, et ne pourrait Etre multiplige en plu- sieurs . On considére aussi l'essence d'une seconde maniére, selon I’étre qu'elle a en ceci ou cela, et alors quelque chose peut en étre prédiqué par accident, en raison de ce en quoi elle est, comme on dit que l'homme est blane parce que Socrate est blanc, bien que cela ne convienne pas 4 Phomme en tant qu’homme. 3. Or, cette nature a un étre double‘, 'un dans les singu- lier, et autre dans I'ame, et selon chacun elle est accompagnée par des accidents; ajoutons que dans tes singuliers elle a encore un étre multiple selon la diversité des singuliers. Et pourtant aucun de ces accidents n'est ddA cette nature prise selon Ia premigre considération, A savoir la considération absolve. En effet, il est faux de dire que lessence de I’homme en tant que telle a l'etre dans ce singulier, car si éire dans ce singulier convenait & "homme en fant qu’homme, jamais il ne serait hors de ce singulier; et dde méme, sil convenait & 'homme en tant qu’homme de ne pas tre dans ce singulir, jamais il ne serait en lui. Mais il est rai de dire qu’il appartent & homme, non pas en tant qu'il est homme, d’étre dans ce singulier-ci ou dans celu-l, ou dans l'ime. I est donc évident que la nature de l'homme considérée absolument fit abstraction de tout étre, mais de telle sorte qu’elle n’en exclue aucun, Et c'est cette nature ’insi considérée qui est prédiquée de tous les individus. 4. Bt on ne peut pas dire que I'universalité convienne & la nature ainsi entendue, car l'unité et la communauté appar- tiennent a 'universalité, mais aucune des deux ne convient & Ja nature humaine selon sa considération absolue. Si la com- | munauté appartenait au concept d’homme, alors la commu- 4 Thomae de Aquino, De ente et essentia cumque inveniretur humanitas inveniretur communitas; et hoc falsum est, quia in Sorte non invenitur communitas ali qua, sed quicquid est in eo est individuatum. Similiter etiam ‘non potest dici quod ratio generis vel specie! accidat naturae hhumanae secundum esse quod habet in individu, quia non invenitur in individuis natura humana secundum unitatem ut sit unum quid omnibus conveniens, quod ratio universalis exigit, Relinguitur ergo quod ratio speciei accidat naturae hhumanae secundum illud esse quod habet in intellectu 5. Ipsa enim natura humana in intellectu habet esse abstrac~ tum ab omnibus individuantibus; et ideo habet rationem uniformem ad omnia individua quae sunt extra animam, prout equaliter est similitudo omnium et ducens in omnium Cognitionem in quantum sunt homines. Et ex hoc quod talem relationem habet ad omnia individua, intellecus adinvenit rationem speciei et atibuit sibi; unde dicit Commentator in principio De anima quod « intellectus est qui agit in rebus Universalitatem »; hoc etiam Avicenna dicit in sua Meta- physica. Et quamvis hacc natura intellecta habeatrationem Universalis secundum quod comparatur ad res extra animam, ‘quia est una similitudo omnium, tamen secundum quod habet esse in hoc intellectu vel in illo est quaedam species intel- lecta particulars. Et ideo patet defectus Commentators in II De anima, qui uoluit ex universalitate formae intellectae uni- tatem intellectus in omnibus hominibus concludere; quia non est universalitas illus formae secundum hoc esse quod habet in intellectu, sed secundum quod refertur ad res ut similitudo rerum; sicut etiam si esset una statua corporalis repraesen- tans multos homines, constat quod ila imago vel species sta- tue haberet esse singulare et proprium secundum quod esset in hac materia sed haberet rationem communitatis secundum {quod esset commune repracsentativum plurium. ‘6. Bt quia naturae humanae secundum suam absolutam considerationem convenit quod praedicetur de Sorte, et ratio speciei non convenit sibi secundum suam absolutam consi- r Thomas a’ Aquin, L’Etant et Essence 95 nauté se trouverait en tout ce en quoi I*humanité se trouverait, aussi et cela est faux, puisqu’en Socrate ne se trouve aucune communauté, mais tout ce qui est en lui est individué®. De :méme, on ne peut pas dire non plus que la notion de genre ou d’espece arrive a la nature humaine selon I'étre qu'elle a dans les individus, car on ne trouve pas dans les individus la nature humaine selon I’unité, de sorte qu'elle soit quelque chose d'un qui convienne a tous , ce qu'exige la notion d’universel*®, Reste donc que la notion d'espice arrive & la nature humaine selon I'étre qu'elle a dans I'intel- lect 5. Cette nature humaine a dans I'intellect un étre abstrai de toutes les conditions individuantes; elle a ainsi une rela- tion uniforme & tous les individus hors de I"éme, dans la ‘mesure oi, au méme degré, elle est une similitude de chacun, et conduit & la connaissance de chacun en tant qu'il est tun homme. Et, du fait qu’elle a une telle relation & tous les individus, intellect y découvre la notion d'espce et lattri- bbue a cette nature. C'est pourquoi le Commentateur dit, au début du traité De Mame, que «c’est Vintellect qui produit Vuniversalité dans les choses » 2, et Avicenne le dit aussi dans sa Métaphysique®. Et bien que cette nature pensée ait Vuniversalité en tant qu’on la rapporte aux choses hors de Mame, parce qu’elle est une similitude de chacune, cepen- dant, en tant qu'elle a létre dans cet intellect ou dans cet autre, elle est une certaine species pensée particuligre Apparait done clairement le défaut du Commentateur, au début du livre II De I'dme*®, qui voulait conclure a l'unicité de l'intellect a partir de l'universalité de Ia forme pensée: pparce que I"universalité n’appartient pas a cette forme selon Petre qu’elle a dans intellect, mais selon qu'elle se rapporte aux choses, comme leur similitude ; de méme que s'il y avait lune statue corporelle représentant plusieurs hommes, il est ‘certain que cette image ou espece de la statue aurait un étre singulier et propre en tant qu'elle serait dans cette matigre, mais elle aurait la notion de communauté en tant qu'elle serait une représentation commune de plusieurs choses. 6. Il convient a la nature humaine considérée absolument d'etre prédiquée de Socrate, tandis que la notion d’espece ne |ui convient pas selon sa considération absolue, car elle est 96 Thomae de Aquino, De ente et essentia derationem sed est de accidentibus quae consequuntur eam secundum esse quod habet in intellectu, ideo nomen specie’ non praedicatur de Sorte ut dicatur Sortes est species : quod de necessitate accideret si ratio speciei conveniret homini secun- dum esse quod habet in Sorte, vel secundum suam considera- tionem absolutam, scilicet in quantum est homo ; quicquid enim convenit homini in quantum est homo praedicatur de Sorte. 7. Et tamen praedicari convenit generi per se, cum in eius 1. Nune restat videre per quem modum sit essentia in sub- stantiis separatis, scilicet in anima, intelligentia et causa prima. Quamvis autem simplicitatem causae primae omnes ‘concedant, tamen compositionem formae et materiae quidam ‘Thomas d' Aquin, L’Etant et I’ Essence 7 au nombre des accidents qui accompagnent selon 1’etre {qu'elle a dans intellect. I s'ensuit done que le nom d’espece rest pas prédiqué de Socrate — comme on dirait Socrate est ‘ espace -, ce qui se produirait nécessairement si la notion d'espece convenait a "homme selon I’étre qu'il a dans Socrate, ou selon sa considération absolve, c’es-2-dire en tant {qu'il est homme; en effet, tout ce qui convient & homme en {ant qu’homme se prédique de Socrate. 7. Pourtant, étre prédiqué convient au genre par soi, puisque cela est posé dans sa définition. La prédication est, en effet, quelque chose qu’accomplit laction de I'intllect {qui compose et divise, et qui a comme fondement dans la chose Iunité des réalités dont une est dite de Pautre. C'est pourquoi la notion de prédicabilité peut étre incluse dans la notion de I'intention de genre, qui est formée de la méme ‘manifre par un acte de Fintellect. Néanmoins, ce & quoi V'in- tellect attribue lintention de prédicabilité, en composant une réalité avec une autre, n'est pas cete intention de genre, mais plut6t ce & quoi intellect attribue intention de genre, par exemple ce qui est sigifié parle nom danimal. 8. Comment essence ou la nature se rapporte a la notion espace, voila qui est maintenant clair, car la notion d’es- pice ne fait pas partie de ce qui convient a I’essence selon sa considération absolue, et n’est pas non plus un des acc dents qui I'accompagnent selon I’étre qu'elle a hors de I’ime, comme la blancheur ou la noirceur; mais elle est un des acc 1. Il reste maintenant a voir quel est le mode sur lequet ssence est dans les substances séparées, a savoir dans I’ame, intelligence et 1a cause premiére. Or, bien que tous accor dent la simplicité de la cause premiére, certains s'efforcent cependant d’introduire la composition de forme et de matidre 98 Thomae de Aquino, De ente et essentia nituntur tionis auctor videtur fuisse Avicebron, auctor libri Fontis vitae. Hoc autem dictis philosophorum communiter repugnat, {quia eas substantias separatas & materia nominant et absque ‘omni materia esse probant. Cuius demonstratio potissima est ex virtute intelligendi quae in eis est. Videmus enim formas non esse intelligibiles in actu nisi secundum quod separantur materia et a conditionibus eius, nec efficiuntur intelligibiles in actu nisi per virtutem substantiae intelligentis, secundum ‘quod recipiuntur in ea et secundum quod aguntur per eam. YVnde oportet quod in qualibet substantia intelligente sit fomnino immunitas a materia, ita quod neque habeat mate- riam partem sui, neque etiam sit sicut forma impressa in ‘materia ut est de formis materialibus. 2. Nec potest aliquis dicere quod intelligiblitatem non impediat materia quaelibet, sed materia corporal tantum. Si enim hoc essetratione materia corporalistantum, cum mate- ria non dicaturcorporalis nisi secundum quod stat sub forma corporal, tune oporteret quod hoc haberet materia, scilicet impedire intlligibilitatem, a forma corporali; et hoc non potest esse, quia act intelligi bilis est sicut et aliae formae, secundum quod a materia abs- trahitur. Vnde in anima vel in intelligentia nullo modo est compositio ex materia et forma, ut hoc modo accipistur in eis sicut in substantis corporalibus. Sed est ibi io formae et esse; unde in commento nonae propo- sitionis libri De causis diitur quod intelligentia est habens formam et esse: et accipitur ibi forma pro ipsa quiditate vel natura simpli. 3. Et quomodo hoe sit planum est videre. Quaecumque nim ita se habent ad inuicem quod unum est causa esse alte- Fiusillud quod habetrationem causae potest habere esse sine alter, sed non convertitur. Talis autem invenitur habitudo materiae et formae quod forma dat esse materiae, et ideo dans les intelligences et dans I'ame ; position dont Vinitiateur semble avoir 1é Avicebron, auteur du livre Source de vie*. Mais cette these s'oppose aux doctrines communes des phi Tosophes, qui dénomment ces substances « séparées de Ia rmatigre » et prouvent qu’elles sont sans aucune matire, La simple n’est pas regue dans la matiére, il ne peut y avoir une telle multi tion, et on ne peut pas trouver parmi ces substances plusieurs individus de la méme espce, mais autant i ya la individus, autant ily a d'espces, comme Avicenne le dit expressément®. ', Ces substances, bien qu’elles soient des formes sans ‘sine materia, non tamen in eis est omnimoda simplicitas nee sunt actus purus, sed habent permixtionem potentiae ; et hoe sic patet. Quicquid enim non est de intellectu essentiae vel uiditatis, hoc est adveniens extra et faciens compositionem, ‘cum essentia, quia nulla essentia sine hiis quae sunt partes essentiae intelligi potest. Omnis autem essentia vel quiditas potest intelligi sine hoc quod aliquid intelligatur de esse suo : possum enim intelligere quid est homo vel fenix et tamen ignorare an esse habeat in rerum natura; ergo patet quod esse cst aliud ab essentia vel quiditate. Nisi forte sit aliqua res ‘cuius quiditas sit ipsum suum esse, et haec res non potest esse nisi una et prima : quia impossible est ut fiat plurificatio, alicuius nisi per additionem alicuius differentiae, sicut mul plicatur natura generis in species; vel per hoc quod forma recipitur in diversis materis, sicut multiplicatur natura speci in diversis individuis; vel per hoc quod unum est absolutum ct aliud in aliquo receptum, sicut si esset quidam calor separa- tus esset alius a calore non separato ex ipsa sua separatione. Si autem ponatur aliqua res quae sit esse tantum ita ut ipsum ‘esse sit subsistens, hoc esse non recipiet additionem diffe- rentiae, quia iam non esset esse tantum sed esse et practer hoc forma aliqua; et multo minus reciperet additionem mate- riae, quia iam esset esse non subsistens sed materiale, Vnde relinguitur quod talis res quae sit suum esse non potest esse nisi una unde oportet quod in qualibet alia re praeter eam aliud sit esse suum et aliud quiditas vel natura seu forma sua; unde oportet quod in intelligentis sit esse praeter formam, et ideo dictum est quod intelligentia est forma et esse. 6. Omne autem quod convenit alicui vel est causatum, ex principiis naturae suae, sicut risibile in homine; vel advenit ab aliquo principio extrinseco, sicut lumen in aere ex influentia solis. Non autem potest esse quod ipsum esse sit causatum ab ipsa forma vel quiditate rei, dico sicut a ‘causa efficiemte, quia sic aliqua res esset sui ipsius causa et aliqua tes se ipsam in esse produceret : quod est impossi matiére, n'ont pourtant pas une simplicité complete et ne sont pas non plus des actes purs, mais elles ont un mélange de puissance. Voici comment la chose est manifeste. Tout ce qui n’appartient pas au concept de I'essence ou de la quiddité, cela vient de I'extérieur et entre en composition avec I'es- sence, car aucune essence ne peut étre pensée sans ce qui cconstitue les parties de I’essence. Or, toute essence ou quid- dité peut étre pensée sans que rien ne soit pensé de som étre : je peux, en effet, penser ce qu’est Phomme ou le phénix, pourtant ignorer s'il a un étre dans la nature: il est done clair que Vétre est autre que Pessence ou la quiddité A moins 4u'il n'y ait une chose dont la quiddité soit son propre étre, auquel cas cette chose sera unique et premiére, car il est, impossible qu'une chose soit multipliée autrement que par rajout d'une différence, 21a manigre dont la nature du genre est multiplige en especes, ou parce qu’une forme est recue dans diverses matiéres, comme la nature de lespece est mul- tipliée en divers individus, ow parce que l'un est absolu et l'autre est regu en quelque chose, comme. par exemple, s'il y avait une chaleur séparée, elle serait dis- tincte de la chaleur non séparée, du fait meme de sa sépara- tion. Mais si on pose une chose qui serait Ire seulement, de telle sorte que cet étre serait subsistant, il ne recevrait pas, addition d’une différence, parce qu’alors il ne serait plus tre seulement mais étre et, en plus, forme; et il recevr plus subsistant mais matériel. C’est pourquoi, finalement, lune telle chose, qui est son étre, ne peut étre qu'unique, de sorte qu'en toute autre chose I'étre est distinct de Ia quiddité ‘ou nature ou forme; et il faut donc que dans les intel P8tre soit en plus de la forme, ce pourquoi on dit que l'intel- ligence est forme et étre. 6. Tout ce qui convient & quelque chose ou bien est causé par les prineipes de sa nature, comme le pouvoir de rire chez Thomme, ou bien Tui advient en vertu d’un principe exté- rieur, comme Ia lumigre dans I’air est émise par le soleil. Or, il ne peut se faire que l’étre méme soit causé parla forme ‘ou par la quiddité de la chose, je veux parler de la cause suffisante, car alors une chose serait sa propre cause et se produirait elle-méme dans I'étre, ce qui est impossible. 104 Thomae de Aquino, De ente et essentia Ergo oportet quod omnis talis res cuius esse est aliud quam natura sua habeat esse ab alio. Et quia omne quod est per reducitur ad id quod est per se sicut ad causam primam, oportet quod sit aliqua res quae sit causa essendi omnibus rebus eo quod ipsa est esse tantum; alias iretur in infinitum in causis, cum omnis res quae non est esse tantum habeat ccausam sui esse, ut dictum est. Patet ergo quod intelligentia, est forma et esse, et quod esse habet a primo ente quod est esse tantum, et hoc est causa prima quae Deus est. 7. Omne autem quod recipit aliquid ab alio est in potentia respectu illius, et hoc quod receptum est in eo est actus eius; ergo oportet quod ipsa quiditas vel forma quae est intelli. ‘gentia sit in potentia respectu esse quod a Deo recipit, et illud esse receptum est per modum actus, Et ita invenitur potentia et actus in intelligentiis, non tamen forma et materia nisi aequivoce. Vnde etiam pati, recipere, subiectum esse et omnia huiusmodi quae videntur rebus ratione materiae convenire, aequivoce conveniunt substantis intellectualibus et substan tiis corporalibus, ut in Ill De anima Commentator dicit. Et Quia, ut dictum est, intelligentiae quiditas est ipsamet intelli- Zentia, ideo quiditas vel essentia eius est ipsum quod est ipsa, et esse suum receptum a Deo est id quo subsistit in rerum natura; et propter hoc a quibusdam dicuntur huiusmodi sub- stantiae componi ex quo est et quod est, vel ex quod est et esse, ut Boethius dicit 8. Et quia in intelligentiis ponitur potentia et actus, non erit, difficile invenire multitudinem intelligentiarum, quod eset, impossibite si nulla potentia in eis esset, Vnde Commentator dicit in Ill De anima quod si natura intellectus possibilis eessctignota, non possemus invenire multitudinem in substan. tiis separatis. Est ergo distinctio earum ad inuicem secundum sgradum potentiae et actus, ita quod intelligentia superior quae ‘magis propinqua est primo habet plus de actu et minus de potenti, et sic de alii, 9. Et hoc completur in anima humana, quae tenet ultimum, Thomas d'Aquin, L'Etant et Essence 105 ‘Toute chose dont 'étre est autre que la nature doit tenir cet fire dun autre. Et parce que tout ce qui est par un autre se raméne & ce qui est par soi comme & sa cause premiére il faut qu'il y ait une chose qui soit cause de I’ére pour toutes les choses parce qu'elle est étre seulement. Sinon on irait 4 T'infini dans les causes, puisque toute chose qui n’est pas étre seulement a une cause de son étre, comme on T'adit. lest donc évident que 'intlligence est forme et ete, cet qu’elle tient I’éte du premier étant qui est étre seule- ‘ment, et telle est la cause premitre qui est Diew. 7. Tout ce qui regoit quelque chose d'un autre est en puis- sance i.1’égard de cet autre, et ce qui est regu en Tui est son acte; il faut donc que la quiddté ou la forme qui est intel sence soit en puissance par rapport a I’éure qurelle regoit de Dieu, et cet ere est regu sur le mode de I'acte. On trouve ainsi Ja puissance et Iacte dans es intelligences, et non la forme et Ja matire, sauf 4 Ventendre dans un sens équivogue. C'est pourquoi patir recevoir, Gre sujet, et autres déterminations de ce genre, qui semblent convenir aux choses en raison de la matigre, conviennent de manigre équivoque aux substances intellectuelles et aux substances corporelles, comme le dit le Commentateur dans le livre Il De T'dme®., Et comme la {uiddité de Vintelligence est intelligence elle-méme, ainsi 4qu’on ’a dit, sa quidlité ou son essence est ce quelle est elle méme, et son éte regu de Diew est ce par quoi elle subsiste ‘dans fa nature. Pour cette raison, certains disent que ces sub- stances sont composées de par quoi c'est et de ce qui est, ou bien de ce qui est et d’érre, comme le dit Bodce ®. 8, Puisque l'on pose dans les intelligences la puissance et Trace, il ne sera pas difficile de trouver une multiplicté d'in- telligences, ce qui serait impossible si aucune puissance état en elles. C'est pourquoi le Commentateur dit, au livre III De ame, que sila nature de T'inellect possible était inconnue, nous ne pourrions trouver de multiplcité dans les, substances séparées. Elles se distinguent donc entre elles selon le degré de puissance et d’acte, de tele sorte que I'in- telligence supérieure qui est plus proche du premier a plus d’acte et moins de puissance , et ainsi de suite 9. Et cela s'acheve avec I'ame humaine, qui est au demier 106 Thomae de Aquino, De ente et essentia gradum in substantis intellectualibus. Vnde intellectus pos- sibilis eius se habet ad formas intelligibiles sicut materia prima, quae tenet ultimum gradum in esse sensibili, ad formas sensibiles, ut Commentator in III De anima dicit; et ideo Philosophus comparat eam tabulae in qua nihil est scriptum, Et propter hoc quod inter alias substantias intellectuales plus hhabet de potentia, ideo efficitur in tantum propinqua rebus ‘materialibus ut res materialis trahatur ad participandum esse suum ; ita scilicet quod ex anima et corpore resultat unum fesse in uno composito, quamvis illud esse prout est animae non sit dependens a corpore. Et ideo post istam formam quae est anima inveniuntur aliae formae plus de potentia habentes, cet magis propinquae materiae, in tantum quod esse earum sine materia non est; in quibus esse invenitur ordo et gradus usque ad primas formas elementorum, quae sunt propinquis- simae materiae : unde nec aliquam operationem habent nisi secundum exigentiam qualitatum activarum et passivarum et aliarum quibus materia ad formam disponitur 1. Hiis igiturvisis, patet quomodo essentia in diversi inve- nitur. Invenitur enim triplex modus habendi essentiam in substantiis. Aliquid enim est sicut Deus euius essentia est ipsummet suum esse; et ideo inveniuntur aliqui philosophi dicentes quod Deus non habet quiditatem vel essentiam, quia essentia sua non est aliud quam esse eius. Et ex hoe sequitur ‘quod ipse non sit in genere; quia omne quod est in genere ‘oportet quod habeat quiditatem praeter esse suum, cum qi ditas vel natura generis aut speciei non distinguatur secundum rationem naturae in illis quorum est genus vel species, sed esse est diversum in diversis. 2. Nec oportet, si dicimus quod Deus est esse tantum, ut in "Thomas d' Aquin, L'Etant et ! Essence 107 degré des substances intellectuelles. C’est pourquoi son intel- fect possible se rapporte aux formes intelligibles comme la ‘atitre premitre, qui a le dernier degré de I'étre sensible, aux formes sensibles, ainsi que le dit le Commentateur, au livre III De l'dme®; et c’est pour cela que le Philosophe le compare & une tablette sur laquelle rien n’a été écrit. Et ¢ qu'elle a plus de puissance que les autres substances intellectueles, elle se rapproche A tel point des choses maté- rielles que la réalité matérielle est Elevée jusqu’a participer & son étre, de sorte que de I"ame et du corps il résulte un seul tre dans un seul composé, bien que cet étre, en tant qt appartient a I"ame, ne soit pas dépendant du corps. Aprés cette forme qu’est I’ame, on trouve dautres formes qui ont plus de puissance et sont plus proches de la matiére, au point {que leur étre ne peut étre sans matigre. Etre ces formes, on trouve un ordre et des degrés qui vont jusqu’aux formes des €léments, qui sont les formes les plus proches de la matigre, et n’ont done pas d’opération autre que 2elles exigées par les qualités actives et passives et par celles qui disposent la satire & la forme. 1. Aprés avoir vu ce qui précéde, on comprend clairement comment essence se trouve dans les diverss réalités, puisque Jes substances peuvent la posséder de trois maniéres. En effet, ily a quelque chose comme Dieu dont lessence est son étre propre. C'est pourquoi certains philosophes disent que Dieu n'a pas de quiddité ou d'essence, puisque son essence n’est pas autre chose que son etre’. Ii sensuit qu'il n’est pas dans un genre, car tout ce qui est dans un enre doit avoir une quiddité en plus de son étre, puisque la étre. C'est pourquoi, dans le commentaire de la neuvitme proposition du Livre des ‘causes, il est dit que individuation de la premiére cause, qui est Iétre seulement, se fait par sa pure bonté. Or, ’étre commun, de méme qu’il ne comprend aucune addition dans son concept, ne comprend pas non plus l’exclusion d’une addition, car, si était le cas, on ne pourrait pas penser qu'il y edt une chose dont I'étre recevrait une addition. 3. De méme, bien qu'il soit I'étre seulement, il ne s’ensuit ‘pas pour autant que les autres perfections et noblesses lui fas- sent défaut. Au contraire il posséde toutes les perfections qui sont dans tous les genres, et pour cette rison il est dit parfait absolument, comme le disent le Philosophe et le Commenta- teur au livre V de la Métaphysique 7; mais il les posséde sur tun mode plus excellent que toxtes les choses, car en lui ces perfections sont unes, tandis que dans les autres elles sont diverses. C'est pourquoi toutes ces per- fections lui conviennent selon son étre simple; de méme que, si quelqu'un pouvait produire par une seule qualité les opéra- tions de toutes les qualité, il aurait dans cette unique qualité toutes les autres qualités. Dieu posséde ainsi dans son étre toutes les perfections. 4, C’est selon un second mode que I’essence se trouve dans Jes substances intellectuelles eréées, en qui etre et essence sont distincts, méme si l'essence est sans la matiére. C'est pourquoi leur étre n'est pas séparé ¥, mais regu, et donc limi et fini par la capacité de Ia nature de ce qui le regoit; mais leur nature ou quiddité est séparée et non recue dans une matiére. lest dit ainsi dans le Livre des causes que les intelli- gences sont infinies de maniére inféricure, et finies de maniére supérieure ®. Elles sont, en effet, finies quant & leur tre qu’elles recoivent de ce qui leur est supérieur, mais elles ne sont pas finies par I'inférieur, car leurs formes ne sont pas limitées par la capacité d'une matitre qui les recevrat. est pourquoi dans de telles substances on ne trouve pas de ‘multiplicité d’individus dans une seule espéce, comme on no Thomae de Aquino, De ente et essentia ut dictum es, nisi in anima humana proper corpus cui unitur. Et licetindividuatio eius ex corpore oceasionaliter dependeat ‘quantum ad sui inchoationem, quia non acquiritursibi esse individuatum nisi in corpore cuius est actus : non tamen ‘oportet ut subiracto corpore individuatio pereat, quia cum hhabeat esse absolutum ex quo acquisitum est sibi esse indivi- & partir de la quiddité tout entire. C’est pourquoi au début du livre De 'dme Avicenne dit que «ne possédent ‘une différence simple que les especes dont les essences sont ‘composées de matitre et de forme » ®, 7. C'est de méme & partir de toute I'essence qu’est pris le genre, mais d'une maniere différente. En effet, une substance séparée convient avec une autre dans limmatérialié, et elles different entre elles par le degré de perfection, selon leur loignement de la potentialité et leur rapprochement de V’acte pur. Et c’est donc a partir de ce qui les accompagne, en tant qu’elles sont immatérielles, que le genre est pris en elles, comme lintellectuaité, ou quelque chose de ce type. Tandis {que c’est & partir de ce qui accompagne leur degré de perfec- tion qu’est prise leur différence, ignorée de nous. Et si ces différences se font selon une plus ou moins grande perfec- tion, ce qui ne diversifie pas espace, il ne s’ensuit pas qu’elles doivent étre accidentelles. En effet, si le degré de perfection dans la réception dune méme forme ne diversifie pas l'espéce, par exemple le plus blanc et le moins blanc par- icipent une blancheur de méme nature, néanmoins un jegré divers de perfection dans ces formes mémes ou natures participées diversifie l'espéce. C'est ainsi que la nature pro- ‘ede par degrés, des plantes aux animaux par ce qui est inter- médiaire entre les plantes et les animaux, d’aprés le Philo- sophe, au livre VII du traité Des animaux. Et il n'est pas non pius nécessaire ici que la division des substances intel- lectuelles se fasse par deux différences vraies, car il est Impossible que cela se produise en toutes les choses, comme le dit le Philosophe, au livre XI du trate Des animaux. 8. C'est d'une troisigme maniére que Iessence se trouve dans les substances composées de matidre et de forme, ob Petre est recu et fini du fait qu’elles le regoivent dun autre, ‘de méme que leur nature ou quiddité est regue dans fa matitre ‘désignée. C'est pourquoi elles sont finies, et de maniére supé- rieure, et de manidre inférieue et, en raison de la division de la matigre désignée, il ya chez elles une multiplicité possible d’individus dans la méme espéce. Et comment, chez elles, essence se rapporte aux intentions logiques, on I'a dit plus haut, 4 Thomae de Aquino, De ente et essentia 1. Nune restat videre quomodo sit essentia in accidentibus ; qualiter enim sit in omnibus substantiis dictum est. Et quia, ‘ut dictum est, essentia est id quod per definitionem significa- tur, oportet ut e0 modo habeant essentiam quo habent defini- tionem. Definitionem autem habent incompletam, quia non possunt definiri nisi ponatur subiectum in eorum definitione; fet hoc ideo est quia non habent esse per se absolutum a Subiecto, sed sicut ex forma et materia relinquitur esse sub- ‘tantiale quando componuntur, ita ex accidente et subiecto relinguitur esse accidentale quando accidens subiecto adve- nit, Et ideo etiam nec forma substantialis completam essen- tiam habet nec materia, quia etiam in definitione formae substantialis oportet quod ponaturillud cuius est forma, et ita definitio eius est per additionem alicuius quod est extra genus eius sicut et definitio formae accidentalis; unde et in definitione animae ponitur corpus a naturali qui considerat fanimam solum in quantum est forma physici corporis. 2. Sed tamen inter formas substantiales ct accidentales tan- tum interest quia, sicut forma substantialis non habet per se fesse absolutum sine eo cui advenit, ta nec illud cui advenit, scilicet materia; et ideo ex coniunetione utriusque illud esse in quo res pet se subsistt, et ex eis effi per se: propter quod ex coniunctione eorum reling. tia quaedam, Vade forma, quamvis in se considerata non habeat completam rationem essentiae, tamen est pars essentiae ‘completae. Sed illud cui advenit accidens est ens in se com- pletum subsistens in suo esse, quod quidem esse naturaliter praecedit accidens quod supervenit. Et ideo accidens super- Veniens ex coniunctione sui cum e0 cui advenit non causat illud esse in quo res subsistit, per quod res est ens per se; sed ‘Thomas d’ Aquin, L’Etant et l' Essence ws. 1. Il nous reste maintenant & voir comment I’essence est dans les accidents, puisque l’on a dit comment elle était dans toutes les substances. Et comme essence est ce qui est signifié par la définition, ainsi qu’on I'a dit, ils doivent avoir tune essence de Ia méme maniére qu’ils ont une définition ®. , ils ont une définition incompléte, car ils ne peuvent étre définis si un sujet n’est pas posé dans la définition ; et il en est ainsi parce qu’ils n’ont pas un étre par soi séparé d'un sujet, mais, de méme que I’étre substantiel résulte de la ‘matitre et de la forme quand elles entrent en composition, de ‘méme I’ére accidentel résulte de l'accident et du sujet quand accident advient au sujet. C’est pourquoi la forme substan- tielle n’a pas d’essence complite, et la matitre non plus, puisque dans la définition de la forme substantielle il faut poser ce dont elle est la forme, ct sa definition se fait done par l'ajout de quelque chose qui est extérieur a son genre, tout comme la définition de l'accident;; de sorte que, dans la déinition de I’Ame, le philosophe de la nature pose le comps, lui qui étudie "Ame seulement en tant qu’elle est la forme d'un corps physique. 2. Cependant, il y a une différence entre les formes sub- stantielles et les formes accidentelles, car de la méme maniére {que la forme substantielle n’a pas par soi un étre séparé sans ‘ce & quoi elle advient, cela méme a quoi elle advient ~ la ‘matigre — n'en a pas non plus. Ainsi, c’est par la conjonction des deux que résulte cet étre dans lequel la chose subsiste par soi, et est effectivement une par soi & partir d'elles, de sorte qu'une certaine essence résulte de leur conjonction. est pourquoi la forme, bien que, considérée en elle-méme, elle n’ait pas une notion compléte d’essence, est cependant tune partie de I’essence complete. Tandis que ce & quoi I'acci- dent advient est un étant complet en soi qui subsiste dans son @rre, lequel étre précéde bien naturellement I'accident qui tui est ajouté. Ainsi, I'accident ajouté ne cause pas, & partir de la cconjonction entre lui et ce & quoi il advient,I’étre dans lequel la chose subsiste, et par Iequel elle est un étant par soi, mais, 116 Thomae de Aquino, De ente et essentia causat quoddam esse secundum sine quo res subsistens intel- ligi potest esse, sicut primum potest intel Vade ex accidente et subiecto non efficitur unum per se sed unum per aceidens. Et ideo ex eorum coniunetione non resul- tat essentia quaedam sicut ex coniunetione formae ad mate- ram; propter quod accidens neque rationem completae essentiae habet neque pars completae essentae est, sed sicut estens secundum quid, ita et essentiam secundum quid habet. 3. Sed quia illud quod dicitur maxime et verissime in quo- libet genere est eausa eorum quae sunt postin illo genere, sicut ignis qui est in fine caliditatis est causa caloris in rebus calidis, ut in 1 Metaphysicae dicitur: ideo substantia quae est primum in genere entis, verissime et maxime essentiam habens, oportet quod sit causa aceidentium quae secundario et quasi secundum quid rationem entis participant. Quod tamen diversimode contingit. Quia enim partes substantiae sunt materia et forma, ideo quaedam accidentia prinipaliter consequuntur formam et quaedam materiam. Forma autem invenitur aliqua cuius esse non dependet ad materiam, ut anima intellectualis;: materia vero non habet esse nisi pcr for- ‘mam, Vade in accidentibus quae consequuntur formam est liquid quod non habet communicationem cum materia, scut est intlligere, quod non est per organum corpora, sicut probat Philosophus in Ill De anima; aliqua vero ex conse- {quentbus formam sunt quae habent communicationem cum ‘materia, sicutsentice, Sed nullum accidens consequitur mate- riam sine communicatone forme. 4. In iis tamen accidentibus quae materiam consequuntur invenitur quaedam diversitas. Quaedam enim accidentia consequuntur materiam secundum ordinem quem habet ad formam specialem, sieut masculinum etfemininum in anima- Tibus, quorum diversitas ad materiam reducitur, ut dicitur in X Metaphysicae; unde remota forma animalis dicta acidentia non remanent nisi aequivoce. Quaedam vero consequuntur il cause un certain étre second, sans lequel on peut penser que la chose subsistante est, de méme que le premier peut dre pensé sans le second. C'est pourquoi & partir de la sub- stance et de I'accident, il ne se fat pas une unité par soi mais tune unité par accident. Et de leur conjonetion il ne résulte donc pas une essence comme & partir de la conjonction de la forme & la matire, de sorte que accident n’a pas la notion <’essence complete, ni n'est parte d'une essence complete, mais comme il est un étant de maniére relative, il a aussi une essence de maniare relative. '3. Mais, comme ce qui est dit au plus haut point et avec le plus de vérité dans un genre est cause de ce qui est apres lui dans le genre — par exemple, le feu, qui est au som- met de Ia chaleur, est cause de Ia chaleur dans les choses chaudes, ainsi qu’il es dit, au livre I de la Méraphysique™* Ja substance qui est premiére dans le genre de Iétant, pos dant avec le plus de vérté et au plus haut point lessence, doit done étre cause des accidents qui, de maniere secondaire et comme relative, participent la raison d’étant™®, Mais cela se produit de plusieurs manires. En effet, les partes de la substances sont la matitre et la forme, de sorte que certains accidents accompagnent surtout la forme, et d'autres la matie. Or, ily a des formes dont I’étre ne dépend pas de la matiere, comme I"éme intellectuelle, tandis que la matiére n'a Petre que par la forme. C’est pourquoi, parmi les acci- dents qui accompagnent la forme, il y en a qui n'ont pas de communication avec la matiée, comme celui de penser, qui n'a pas d’organe corporel, ainsi que le prouve le Philosophe, au livre Ill De 'éme®; mais d'autres qui accompagnent la forme ont une communication avec la matitre, comme celui de sentir. En revanche, aucun accident n’accompagne 1a matigre sans communication avec la forme. 4. Parmi les accidents qui accompagnent la matigre, on trouve une certaine diversité. En effet, certains accidents sui- vent la matire selon le rapport qu'elle a avec une forme spé- cifique, comme le sexe masculin et le sexe féminin chez. les animaux; leur diversité se raméne 2 la matiére, comme i est dit, au livre X de la Mésaphysique™. C'est pourquoi, tune fois disparue la forme de I'animal, les dits accidents ne demeurent pas, sauf A I'entendre de manitre équivoque. ‘materiam secundum ordinem quem habet ad formam gene ralem; et ideo remota forma speciali adhuc in ea remanent, sicut nigredo cutis est in ethiope ex mixtione elementorum ‘et non ex ratione animae, et ideo post mortem in eo manet 5, Et quia unaquaeque res individuatur ex materia et collo- catur in genere vel specie per suam formam, ideo accidentia quae consequuntur materiam sunt accidentia individu secundum quae individua etiam eiusdem speciei ad invicem differunt; accidentia vero quae consequuntur formam sunt propriae passiones vel generis vel speciei, unde inveniuntur in omnibus participantibus naturam generis vel specie, sicut risibile consequitur in homine formam, quia risus contingit x aliqua apprehensione animae hominis. ‘6. Sciendum etiam est quod accidentiaaliquando ex princi piis essentialibus causantur secundum actum perfectum, sicut calor in igne qui semper est calidus; aliguando vero secun- ‘dum aptitudinem tantum, sed complementum accidit ex agente exteriori,sicut dyaphaneitas in aere quae completur per corpus lucidum exterius; et in talibus aptitudo est acci- dens inseparabile, sed complementum quod advenit ex aiquo principio quod est extra essentiam rei, vel quod non intrat Constitutionem rei, est separabile, sicut mover’ et huiusmodi 7. Sciendum est etiam:quod in accidentibus modo alio sumitur genus, differentia et species quam in substantis. Quia enim in substaniis ex forma substantial et materia efficitur per se unum, una quadam natura ex earum coniunctione resul- tante quae proprie in praedicamento substantiae collocatur, ideo in substantis nomina concreta quae compositum signifi ‘cant proprie in genere esse dicuntur, sicut species vel genera, Uut homo vel animal. Non autem forma vel materia est hoc ‘modo i praedicamento nisi per reductionem, sicut princi in genere esse dicuntur. Sed ex accidente et subiecto non fit ‘unum per se; unde non resultat ex eorum coniunctione aliqua natura cui intentio generis vel speciei possit attribui. Vnde D’autres accidents suivent 1a matiére selon son rapport a la forme générique, et ils y demeurent, méme quand la forme spécifique disparait, comme la noirceur de la peau chez éthiopien, qui vient du mélange des éléments et non de la nature de l"ame, et demeure donc en lui aprés la mort. 5, Et comme chaque chose est individuée par sa matitre et placée dans un genre ou dans une espce par sa forme, les accidents qui accompagnent la matidre sont des accidents de individu, selon lesquels les individus de la méme espice different entre eux; tandis que les accidents qui accompa- ‘gnent la forme sont les passions propres du genre ou de I'es- péce, de sorte qu’ils sont en tout ce qui participe & la nature du genre ou de l’espece, par exemple la faculté de rire dans homme accompagne sa forme, car le rire se produit & partir d'une certaine appréhension que réalise I'ame de "homme. 6.11 faut aussi savoir que des accidents sont parfois causés, selon un acte parfait par les principes essentiels, comme la chaleur dans le feu qui est toujours chaud ; tandis que parfois ile sont selon aptitude seulement, et un complément vient d'un agent extérieur®, comme la diaphanéité dans lair est achevée par le corps lumineux extérieur. Et dans ces cas lap titude est un accident inséparable, mais le complément qui advient d’un principe extérieur a l'essence de la chose, ou {qui n’entre pas dans la constitution de la chose, est séparable, comme celui de se mouvoir et d’autres du méme type. 7. Et il faut aussi savoir que, dans les accidents, le genre, Pespéce et la différence se prennent dune autre maniére que dans les substances. En effet, dans les substances, & partir de Ja forme substantielle et de la matiér, il se fait une unité par soi, une seule nature résultant de leur conjonction, nature qui est placée A juste titre dans la catégorie de la substance, de sorte que, pour les substances, ce sont les noms concrets, {qui signifient le composé, que I’on dit & juste ttre €tre dans un genre, comme les noms d'espéce ou de genre, par exemple “homme » ou «animal». La forme ou la matiere ne sont alors dans la catégorie que par réduction, tout comme on dit {que les principes sont dans le genre, Mais & partir de l'acci- dent et du sujet il ne se fait pas une unité par soi, et de leur conjonction il ne résulte donc pas une nature & laquelle I'in- tention de genre ou d'espce pourrait étre attribuée. C'est 120 Thomae de Aquino, De ente et essentia rnomina accidentalia concretive dicta non ponuntur in prae- dicamento sicut species vel genera, ut album vel musicum, nisi per reductionem, sed solum secundum quod in abstracto, significantur, ut albedo et musica. Et quia accidentia non ‘componuntur ex materia et forma, ideo non potest in eis sumi genus a materia et differentia a forma sicut in substantiis compositis; sed oportet ut genus primum sumatur ex ipso modo essendi, secundum quod ens diversimode secundum prius et posterius dicitur de decem generibus praedicamento- rum, sicut dicitur quantitas ex eo quod est mensura substan- tiae et qualitas secundum quod est dispositio substantiae, et, sic de aliis, secundum Philosophum in IX Metaphysicae. 8, Differentiae vero in eis sumuntur ex diversitate princi- piorum ex quibus causantur. Et quia propriae passiones ex propriis principiis subiecti causantur, ideo subiectum ponitur in definitione eorum loco differentiae si in abstracto defi- niuntur, secundum quod sunt proprie in genere, sicut dicitur quod simitas est curvitas nasi. Sed ¢ converso esset si corum, definitio sumeretur secundum quod coneretive dicuntur; sic, enim subiectum in eorum definitione poneretur sicut genus, quia tunc definirentur per modum substantiarum composi- tarum in quibus ratio generis sumitur a materia, sicut dicimus quod simum est nasus curvus. Similiter etiam est si unum, accidens alterius accidentis principium sit, sicut principium relationis est actio et passio et quantitas; et ideo secundum hace dividit Philosophus relationem in V Metaphysicae. Sed quia propria principia accidentium non semper sunt ‘manifesta, ideo quandoque sumimus differentias accidentium ex eorum effectibus, sicut congregativum et disgregativum, dicuntur differentiae coloris quae causantur ex abundantia vel paucitate lucs, ex quo diversae species coloris causantur. 9. Sic ergo patet quomodo essentia est in substantiis et 121 pourquoi les noms accidentels dits de manitre conerite, par exemple «blanc » et « musicien >, ne sont pas posés, comme Pespéce ou le genre, dans une catégorie, si ce n'est par réduction; mais c"est seulement quand ils sont signifiés dans Tabstrait, comme « blancheur » et « musique », . Et parce que les accidents ne Sont pas composés de matiére et de forme, on ne peut pas prendre en eux le genre parti de 1a matire et la difference 2 partir de la forme, comme pour les substances composées; mais il faut que le genre premier soit tié du mode d’etre, apres lequelI'tant est dit de diverses maniéres, selon V’an- térieur et le postérieu, des dix genres prédicamentaux : par exemple, i est appelé quantté& partir de la mesure de ta sub- Stance, et qualité en tant qu'il est une disposition de la sub- stance, et ainsi de suite, d°aprés le Philosophe, au livre IX de a Métaphysique.% '8. Les différences dans les accidents sont tirées de la diver- sité des prineipes qui les causent. Et puisque les passions propres sont causées par les principes propres du sujet, le Sujet est posé dans leur définition au lieu de la différence si elles sont définies dans I'abstrat, moyennant quoi elles sont proprement dans un genre, comme la camosité est la cour- bure du nez. Mais il en irait A 'inverse, si leur définition était formée en tant qu’ils sont dits concrétement. En effet, le sujet serait alors posé dans leur definition comme le gente, car les accidents seraient définis en ce cas sur le mode des sub- stances composées, dans lesquelles la raison de genre est tirée de la matitre, tout comme nous disons que le camus est Te nez courbe®. en va de méme si un accident est principe 4un autre accident, comme le principe de la relation est I'ac- tion, la passion et la quantté, de sorte que c’est selon ces ‘tois que le Philosophe divise la relation dans le livre V de la Métaphysique’®. Mais, parce que les principes propres des accidents ne sont pas toujours manifestes, parfois nous tirons les différences des accidents & partir de leurs effets, comme par exemple on appelle comprimante ou dis- sociante les différences de Ia couleur® qui sont causées & partir de 'abondance ou de Ia rareté de la lumigre, et qui cau- sent les diverses espaces de couleur. ‘9, On voit done clairement comment I'essence est dans les 122 Thomae de Aquino, De ente et essentia accidentibus, et quomodo in substantiis compositis et sim- plicibus, et qualiter in hiis omnibus intentiones universales logicae inveniuntur; excepto primo quod est in fine simplici- tatis, cui non convenit ratio generis aut speciei et per conse quens nec definitio propter suam simplicitatem : in quo sit finis et consummatio huius sermonis. Amen. Thomas d’ Aquin, L'Etant et ! Essence 123 substances et les accidents, et comment elle se trouve dans les substances simples et les substances composées, et com- ‘ment en chaque cas les intentions logiques s'y rapportent; & exception du premier qui est au sommet de la simplicité, et auquel ne convient ni la notion de gente, ni celle d'espece, ni, par conséquent, non plus la définition, en raison de sa simplicité, Qu’en lui ce traité trouve sa fin et son accomplissement. Ainsi soit-il, NorEs 1.27108-13, Averrots reprend souvent la formule d’Aristote, notamment In Aristotelis De an, IH, comm. 4, 6. Crawford, p. 384, 532, qui semble avoir inspiré directement Thomas, 2. Avicenne, Liber de philosophia prima... 1,5, 6 Van Riet, p31, 2-4; «Nous dirons done que res, ens et necesse sont tls quis sont immédiatement imprimés dans ame par une Impression premigre, et non acquise partir d'autres plus connues, » "3 Le texte de I'éition Léonine préfere le singuliet. Un pluie! n'a gute de sens, il doit reprendre« les noms d'essence et état», car ‘ce ne sont pas les noms qui se trouvent dans les choses. On pourrait ‘comprendre que Thomas parle de I'étant et de P’essence, et demande ‘comment is se rouvent dans les choses, mais on ne voit pas bien quel fens ily aurait se demander comment P'étant est dans les choses. [Nous préférons comprendre qu'il y a un signiffé des noms « ant» ct «essence », pour instant non distingués, et que l'on demande ‘comment ce signifi (cette ralitésignifi6e) se trouve dans les choses. “4 Aristote, Métaph,, V, 1017422-35, voir aussi VI, 1027b17-35. La ivision est fondée dans les deux textes, mais aucun ne la propose ‘comme tele 5 La traduction du neutre pluriel est dificil, surtout en ce cas od i faut éviter de parler de choses qui ont pas d'essence. Capele fait un contresens en lassant entendre que ce sont tous les étres au second sens qui n'ont pas d'essence, 6. Averrots, In Aristotelis Metaph., V, comm. 14, Venise, 1562, Pune 7.Ceestdire les dix prédicaments ou catégories d’Aristote, com= prises comme les dix genres suprémes de a réalit 8, Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 5. passim, et Aver rods, In Aristotelis Metaph., Vl, comm. 36, passim. 124 Thomas d’ Aquin, L’Etant et ! Essence 9, Voir Arstte, Ana. post, Il, 91825-92425; Métuph., V, 1028634- 1032329, et surtout VII, 4-11, pour expression fot én einai, dont le ‘sens exact est encore discué, et que les premitres taductions latines rendaient par le décalque quod quid erat esse 10. Thomas renvoie sans doute & Liber de philosophia prima... ll, 2, p.78, 72-73, qui traite de exacte détermination (certitudo) de | substance corporelle. Fidele 3 Aristote, Avicenne soutient que la matidre (hulé) en elle-méme na pas d'actualité, mais ne peut étre en acte (in effect) que pat une détermination qui lui soit extérieure (erttudoextrinsecus per quam far n effect). 11, Botce, Contra Eurychen, chap. 1, in The Theological Tractates, with an English Translation by H. F Stewart and E, K, Rand (Loeb ‘Classical Library), London, 1968, p. 78, 8-10: « Natura est earum rerum gue, cum Sint, quoquomodo capi possunt», trad. fr par H. Merle, in Bodce, Courts Tratés de théologie, Cerf, « Sagestes Chrétiennes », 1991, p54: « Le trme nature s'applique ces choses ui, puisqu’etes sont, peuvent dre saisies, de quelque manitre, par Tintellect.» La seconde définition ne s'applique qu'aux substances, ccorporelles ou non, et serait aussi bien une description de Ia sub- stance: « Est une nature ce qui peut ou agir ou pati» La tositme ne ‘applique qu’aux corps, puisque pour certains philosophes, dont Aristote, dit Boéce, il n'y de substance que corporelle: « La nature test le principe du mouvement par soi et non par accident» (ef. Phys. I, 1, 192b21-23), Enfin la quatriéme, qui n'était pas annoncée, est celle que retiendra Bodce, puisque c'est elle qui sert& formuler la ‘duplicité de nature du Christ: « La nature est la difference spécifique ‘qui donne sa forme & chaque chose.» C'est aussi celle que Thomas retient Ie plus souvent 12 Aristote, Métaph., V, 4, 101Sal2. Tadvetion de Ia Media (AL, XXV 2, 89, 12-14): « Metaphora vero iam et omnino omnis sub- stant natura deitur propterea, quia et natura substantia quaedam est,» 13. Traduction incertaine sur un texte incerian, On pourat préfrer la legon essenria sunt a celles retenues par la Léonine (nova es) et par Roland-Gosselin et Capelle (nore sun), car c'est celle qui correspond Je mieux au sens de tout ce chapitre. Mais elle aurtit Pinconvénient de mettre la conclusion en premier. Le singuices’expliquerait cont avec le second terme seulement, qui est assez fréquent chez ‘Thomas. I est difficile de rancher su le sens, 14. Léonine : id quod, Roland-Gosselin et Capelle: id quo (mais & traduire: ce par quot quelque chose esten ace), 15. Averrots, In Aristorelis Metaph., VII, comm, 21, Venise, 1562, f17ivi: «La quiddité de homme est Vhomme dune certaine rmanigre, et nest pas homme d'une autre manigre (quiditas hominis est homo uno modo, et non est homo alio modo); elle est alors forme de homme et n'est pas "homme qui est Notes 125 composé (congregatus) de matire et de forme» (voir aussi comm, 534, P 184rD-E). Et le commentaire de Thomas sur le texte d'Aristote dira: «ete opinion semble etre celle d'Averrods et de ses secta= teurs (In Metaph., Vil, é. Mariet,n. 1467). 16.CE. Arisiote, Métaph., VIL, 4, passim. 17. Avicenne montre (Liber de philosophia prima... 4) qu'il n'y 1 pas de relation entre la matitre et Ta forme, au sens d'un accident rel. Toutefois, ily a bien un rapport qui est un rapport de causalité, ‘ear on peut dire que la forme cause Ia matiée. 18, Léonine: et, Roland-Gostelin et Capel : vel 19, Le texte va encore une fois trop vite, puisqu'il it en fait «toutes caracéristiques qui conviennent & essence » 20, Bien que cete reference & Bobce se trouve chez Albert le Grand, (Super I Sent, dist. 23, art. 4, Borgnet,t.25, p-59la) et chez Bona venture (ibid, dub. 1, Quaracchi I, p. 46a), et bien que Thomas per- siste dans son commentaire des Sentences (ibid. quaest. 1, art. I). celle 6quivalence terminologique n'est pas proposée par Bodce. Dans le De potenti quaest. 9, art. 1, Thomas précise cete référence, en disant que ousia signifi e composé, ousidsis la subsistance ou forme, et hupostass la matire. El remarque (ad rationes in oppesitun) que ‘ce n'est pas la maniére habituelle de parler de Botce, par exemple ‘dans le De duabus nanuris, augue! il renvoie 21. CL. Bodee, Contra Eutychen, chap. 3, 64. cit. p-90, 79-85, 22. Avicenne, Liber de philosophia prima....V, 5, 64 cit, p.275,, on. 23. Avertods, In Aristotelis Metaph., VIL, comm. 27, Venise, 1562, eT. 24, Dans les Méréorologiques, IV, 3, 381b6-8, Aristote explique {que la digestion est une espce de coction. Vor le texte paralldle de Ind Sent dist. 23, quaest. 1, art. 25, Aventods, In Aristorelis Metaph., VII, comm. 20, Venise, 1562, 169k 26, Tout ce qui suites largementinspiré d'Avicenne, Liber de phi- losophia prima... V, 3, Pout la distinction inital, voir en particulier 64, cit, p. 247, 15-20: « Nous dirons done que le corps est appelé Je genre de homme ainsi que la matitre de homme. Puisqu’il est Ja matige de homme, len sera sans aucun doute une parti; or est Impossible que I partie doit prédiquée du tou. Enudions done quelle difference il y a entre le corps considéré comme gente et le corps ‘consid comme parti, et nous aurons alors le moyen de connate ce ‘que nous voulons mettre en lumibre. > 27. Nous préférons la legon de Roland-Gosseln (vero) celle dela LLéonine (enim) qui n’offre pas de sens clair. Capelle donne autem, qui figure dans d’anciennes éitions, mas pas dans Yapparat critique de Ia Léonine 126 Thomas d' Aquin, L’Erant et ! Essence 28. Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 3, 6 ct, 247, 21-22: « Cum ergo acceperimus corpus substantiam habentem lon gitudinem et latitudinem et spssitudinem....» La précision qui dit ‘que les dimensions peuvent étre désignées n'est pas dans le texte que Thomas suit ici, mais elle est aussi d’Avicenne, cf. bid. I, 2, 6. cit, p.7l, 35-37 : «La vértable description du corps sera done celle-c Je comps est une substance oi ’on peut poser la dimension (substantia jn qua potest ponidimensio).» En revanche, la classification du comps das Ia catégorie de la quantté n'est pas dans le texted Avicenne. 29..CX. Avicenne, ibid, V, 6d. cit, p. 247, 21-25, 30. CL ibid, p. 247, 25-249, 49. BI. Cr. Aristte, De anima, 1, 403025. 32. CF. Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 3, 6. cit, p.249, 50-61 3, Legon de la Léonine : denominatio determinans, qui para, ‘moins pléonastique que determinatio determinans (Roland-Gosselin et Capelle). Surtou, Ia seconde occurrence (denominatio a forma ddeterminata sumpra) n’aurait aucun sens avec determinatio : ce sont les moms qui sont pris (sumpta) & partir de déterminations des choses. ‘34. Avicenne, Liber de philosophia primar... V, 6, 64 cit, p.281, 94-282, 4 35, 99824, 36 122020, 537, Avicenne consacre le chaptre 7 du live V de sa Métaphysique 2 {a definition, mais i n'y est question que des parties de la definition et ddeson unit ‘38. Voir Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 5, passage cté plus aut 439. CF, Avicenne, ibid. V, 5,64 it, p. 265, 73-266, 78. 40, Sur tout ce passage, voir Avicenne ibid, V, 5, 6d-cit, p.271, 85 ‘87: «Nous disons que la définition determine vraiment une nature, par exemple, quand on dit animal rarionne, du fait méme, intention ‘de quelque chose qui est animal est déterminée en ce que cet animal fest rationnel», et p. 272, 6-14. ‘41, CF. Avicenne, iid. V5, 64. cit p.271, 7881 42, Averrots, In Arisotelis Metaph., XI (= XII), comm. Venise, 1562, f° 300VK-301rA : « Aristote voulaitindiquer la ment de l'imprédicabilité des formes séparées. Voir en particulier Liber de philasophia prima... VIL, 2,64. cit p. 360, 25 sg. « Plato ‘vero plus inclinabat se ad hoc ut formae sin separatae...» ‘47, La doctrine avicennienne des tis éats de lessence (ct Intro- ‘ction, 1,3) Sera souvent rappelée par Thomas, ef. Quodlber VIII, (quaest. 1, art. 1: «I faut dire que, daprés Avicenne dans sa Méta physique, la considération d'une nature donnée est triple. On peut ta ‘considérer dune par, selon Metre quelle a dans les singuliers; comme fa nature de la pierre dans cette piere-ci et dans cette pierre-a D'autre part, sclon son étre intelligible: par exemple, la nature de Ia pierre selon T'étre qu'elle a dans ['intellect. Enfin, on peut considérer la nature prise absolument, en fasant abstraction de chacun des deux dies, de telle sorte que la nature de la pierre, ou de ‘importe quoi d'autre, est considérée seulement quant 2 ce qui fui evient par soi,» Ce quodlibet fut disputé pat Thomas lors de son. premier enseignement parisien, & Noél 1257, et est done fort proche {1 DEE. Pour Avicenne, vot Ie texte célebre de Liber de philosophia prima... V, 1, 64. cit, p.228, 24-32: « L'universl, en tant qu'il est tniversel, est quelque chose (quiddam), et en tant qu'il est quelque those 8 quoi sdvient (accidi) | universal il est autre chose (quid dam ald); par conséquent, Puniversel, en tant qu'il est un universel ‘constitue, est signifié par un terme relevant des dix prédicament parce que, comme il s'agit de l'homme ou du cheval, ce sera une Intention autre que celle de I'universalté = Vintention de Phumanité ‘4 de I'équinit. En effet, Ia definition de I’équinité est extérieure 2 celle de Tuniversalité, qu'elle ne contient pas. L'équinité a une <éfinition qui n'a pas besoin de Muniversalté, mais & laquelle I'uni- ‘versalité advient. C'est pourquoi I'équinité n'est que I'équinité seu- fement (unde ipsa equinitas non et aliquid nisi equinitas tantum...)» La suite du texte de Thomas est fortement dépendante de celui d'Avicenne, mais plus aucune référence n'est faite au philosophe persan. 48, Au sens de deux Eres (deux esse). 49.CF. Avicenne, Liber de philasophia prima.... V, 1, 64. cit p.228, 24-32, dea ce 128 Thomas d'Aquin,L’Etant et Essence 50.Cf, Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 2, 6 p.244, 65-69. 51. Nous corrigeons «rationem » par « relatonem », 52, Avert, In Aristotelis De an. 1, comm. 8, 6d, Crawford, p. 12, 23.25 53. Avicenne ne dit pas, comme le fera Averrots, que intellect fait VPuniversalité dans les choses. Mais Thomas pense peut-ére au texte de Liber de philosophia prima... NL 6, city ps 237, 29-238, 39 54.CF. Avicenne, Liber de philosophia prima.... V, 2; &4. eit, p.241, 19-242, 22: « Cette forme, en tant qu'elle est dans I'ame, est ‘une des formes de Mame et elle est singuliére een tant que plusieurs choses conviennent en elle selon une des trois manigres évoquees, elle cestuniverselle. Iln'y a ene ces deux aucune contrat.» '35. Avertods, In Arisiorelis De an., IH, comm. 5, éd. Crawford, p.ll, 710-412, 721. Sura question de l'uniité de Mintellectséparé chez. Averroes, et les critiques que Tui adressera Thomas, ainsi que sur ’évolution de ce demier 4 Végard d’Averrots, voir "introduction @'A.de Libera & Thomas d'Aquin. Contre Averrods. Liunté de line tellecr contre les avervoistes suivi des textes contre Averroes anté- views @ 1270, tad. A. de Libera, (GF, 713), Paris, GarnierFlamma- rion, 1994, 36.p.27 0, 557, Liobjection, en germe chez Gabirol, se trouve formulée chez ‘Alexandre de Hales, Summa th. I, quaest.20,m. 2et quaest. 61. m. 1, ex chez Bonaventure, Jn H Sent, dist. 3, art. , quaest. 1-3 et dist. 17, art 1 quest. 2. ‘58 Live des causes, prop. 8 [9], comm. 64, Pati, § 90 : « Et ntel= Higentia est habens_yliatim, quoniam est esse et forma», trad ff, Magnard eta, p. 55 :« EtT'intlligence posséde une helyatin puis- qu'elle est tre et forme. » 59.Cf. Avieenne, Liber de philosophia prima... V, 5, 64. cit, p.275, 65.61 (60. fbi. p. 274, 57: « Quilts autem omnis simplicis est psum- ‘met simplex : iil enim est ibi reptile sae quidditatis, » 61. Avicenne, Liber de philosophia prima... V, 2, 64 cit, p.239,, 14-240, 76. (62. Avercoes, In Arisiorelis De an, Ill, comm. 14, 6d. Crawford, p.429, 23.28 163, Botce, De hebdomadibus, reples Tet 8, 6d. Rand-Stewart, p. 42, 44-48, (64. Averrots, In De anima, Il, comm. 5,64. cit, p. 410, 667-672, 65. Averrots, ibid. p. 387, 27-32: « Et puisque tele est la defini tion de intellect matériel, est 6vident qu'entre lui et la matire pre tee il ya cette difference que celui-ci est en puissance toutes les, intentions des formes universlles matérielles,tandis que la mate Notes 129 __premire est en puissance toutes ces formes sensibles, mais sans les Eonnatve oils comprende.» Avertolsappelle« itllet matric» e que Ta wradition 2 phttappe «intellect posible» ou «intellect e 66. Cf. Aristote, De anima Il, 430a1. 69. Nous ne voyons pas comment construire aulrement que «in gui tus [forms] este inveitur ordo et gradu» en accordant invent Sve le substan le plus proche, Roland- (F Nicholai Trev! annales, a Hog, Londres, 1845). Voir ausi Guillaume d’ Auvergne, De Tin, chap 4 "1, Terme impossible 3 traduire, nous reprenons son dive qui avait sardé ce wens propre dans la langue de Me de Sévigné “P.Lire dex causes, prop {9} comm, 6 atin $91 apres avoir exposé que intelligence, ime eta ature on iri, comme nous Fravons vu pls ha, le Liber continue « Et causae quidem prise zon est yarn, quoniam ipsa est ess tantum. Et si dixerit aliquis hnecesse stu it habens> tim, dicemus lari i et suum esse infinitum, et individu sum est bonitas pur...» "73 rite Metaph.V, 1021630-33, ne parle pas de Dic, mais a version arabian trait « dcuntur perfect, quedam modo uni-

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