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AGIR Guide DSP Et Crise Sanitaire Covid 19 V08062020
AGIR Guide DSP Et Crise Sanitaire Covid 19 V08062020
Guide méthodologique
Introduction 5
1.Contexte 5
2.Objectifs du guide 5
4.Lexique 6
4.1. Délégation de service public 6
4.2. Rémunération du délégataire 7
4.3. Risque d’exploitation 7
4.4. Types de contrats de délégation de service public 8
4.4.1. Délégation de service public à contribution financière
forfaitaire 8
4.4.2. Délégation de service public à forfait de charges 8
2 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Table des matières - suite
2ème partie : Méthodologie proposée pour régler l’exécution
financière des contrats de DSP dans le cadre de la crise
sanitaire 18
1. Recommandations pratiques 18
1.1. L’organisation de temps d’échanges entre les différentes
parties 18
1.2. Point d’attention relatif à la saisine du comité des partenaires 19
3.Tableau synthétique 31
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 3
Juin 2020
Préambule
Avec désormais près de 300 adhérents, l’association AGIR Transport accompagne depuis 30
ans des collectivités de toutes tailles sur l’ensemble du territoire, quelles que soient leurs
problématiques en matière de transport public et de mobilité.
Ce guide comporte une synthèse des règles juridiques applicables en lien avec cette
situation exceptionnelle mais aussi une présentation des principales hypothèses
contractuelles pour parvenir à une valorisation financière des effets de la crise sanitaire
sur les contrats.
Cette méthodologie est accompagnée d’exemples pratiques par type de contrat de DSP
- avec contribution financière forfaitaire (CFF) ou à forfait de charges - avec différentes
hypothèses d’offre de transport.
L’équipe d’AGIR est à la disposition de ses adhérents pour répondre à leurs interrogations et
les accompagner dans leurs discussions avec leurs opérateurs.
Bonne lecture.
Contact
Tél. : 01 53 68 04 24
Mail : info@agir-transport.org
4 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Introduction
1. Contexte
Dans le contexte actuel lié à l’épidémie du virus covid-19 qui touche le territoire national
français depuis mars 2020, les services de transport des autorités organisatrices
de la mobilité (ci-après, « AOM ») et des régions sont impactés ; ces dernières sont
alors confrontées à des problématiques particulières, notamment dans leurs rapports
contractuels avec leurs transporteurs.
En effet, l’État a adopté des mesures ayant des conséquences sur l’organisation des services
de transport :
L’ensemble de ces mesures a affecté l’activité des transporteurs en provoquant une forte
diminution1 des services de transport qui leur ont été confiés. Elles n’ont pas non plus été
sans conséquence sur les ressources des autorités organisatrices2.
Les effets de la crise sanitaire sur l’exécution des contrats sont, en outre, susceptibles de se
prolonger pendant plusieurs mois, eu égard notamment à la prolongation de la fermeture
des établissements scolaires dans les départements à risque et à l’évolution des usages
individuels de mobilité.
2. Objectifs du guide
Le présent guide a pour objectif principal de proposer une méthodologie aux autorités
organisatrices de transport, en leur qualité d’autorités délégantes et aux exploitants, en vue
de régler les impacts financiers de la crise sanitaire.
À cet égard, il est nécessaire de rappeler que les parties au contrat de DSP ont noué des
relations contractuelles en poursuivant des objectifs communs, à savoir :
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 5
Juin 2020
Cela étant rappelé, le guide s’efforcera de permettre aux acteurs du transport public de
s’approprier les règles juridiques applicables aux contrats de délégation de service public
en lien avec la crise sanitaire (force majeure, imprévision, activité partielle, etc.) ainsi que
les mécanismes financiers de ces contrats, tout en prenant en compte l’environnement du
secteur des transports publics.
Il est important de préciser que le guide est le résultat d’une étude réalisée à une date
donnée, au regard de la réglementation en vigueur liée à la période couverte par l’état
d’urgence sanitaire et des pratiques observées à ce jour.
Par une loi du 23 mars 2020, l’état d’urgence sanitaire a été déclaré pour deux mois, jusqu’au
23 mai 2020 inclus.
La loi n°2020-546 du 11 mai 2020 a prolongé l’état d’urgence jusqu’au 10 juillet 2020 inclus.
Depuis le début de cette crise sanitaire, les pouvoirs publics ont adopté de nombreux
textes visant à répondre, dans l’urgence, aux difficultés rencontrées par les particuliers,
les opérateurs économiques, les collectivités territoriales résultant de cette situation
exceptionnelle.
L’état d’urgence étant prolongé, de nouveaux textes sont susceptibles d’être adoptés.
En cas de nouvelles règles afférentes aux contrats de délégation de service public, une
actualisation du guide sera réalisée par AGIR.
4. Lexique
« Un contrat de concession est un contrat par lequel une ou plusieurs autorités concédantes
soumises au présent code confient l’exécution de travaux ou la gestion d’un service à un
ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l’exploitation de
l’ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d’exploiter l’ouvrage ou le service
qui fait l’objet du contrat, soit de ce droit assorti d’un prix.La part de risque transférée au
concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute
perte potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement théorique
6 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
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ou négligeable. Le concessionnaire assume le risque d’exploitation lorsque, dans des
conditions d’exploitation normales, il n’est pas assuré d’amortir les investissements ou les
coûts, liés à l’exploitation de l’ouvrage ou du service, qu’il a supportés. »
Appliqué au cas des contrats de transport public, pour qu’un contrat soit qualifié de
délégation de service public, il est nécessaire que l’autorité délégante transfère une partie
du risque lié à l’exploitation du service public de transport à l’exploitant.
Autrement dit, le contrat doit réellement exposer le délégataire aux aléas du marché et
ne peut, dans des conditions d’exploitation normales, lui garantir l’amortissement de ses
investissements ou des coûts inhérents à l’exploitation du service de transport.
Par ailleurs, le contrat ne doit prévoir aucun mécanisme de correction qui viendrait supprimer
ou diminuer sensiblement le risque.
Si le risque d’exploitation à la charge du délégataire est trop faible ou qu’il est diminué par
de tels mécanismes, le contrat pourrait être qualifié de marché public et pas de délégation
de service public, ce qui impose alors de relancer une procédure.
Tel serait le cas d’un avenant qui viendrait diminuer de manière importante le risque
d’exploitation supporté par le délégataire. Un recours contentieux, par exemple de la part
du préfet, lors de l’exercice de son contrôle de légalité, n’est pas exclu.
• Le risque doit être réel (condition qui peut s’avérer difficile à satisfaire lorsque la
clientèle est captive comme dans le cas des scolaires) ;
3 .Cf. conclusions du Rapporteur public DACOSTA sous l’arrêt du Conseil d’Etat Société Avenance-Enseignement et Santé
du 5 juin 2009 (req. n° 298641)
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 7
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• Il faut que l’autorité délégante ait transféré ce risque ;
• Afin d’éviter que les collectivités ne créent des facteurs de risques uniquement
pour justifier un contrat de délégation de service public, le juge communautaire a pu
admettre que le risque puisse être limité4.
Un contrat de délégation de service public de transport public peut prévoir le versement par
l’autorité délégante d’une contribution financière forfaitaire (CFF) au profit du délégataire.
Il s’agit d’une subvention d’exploitation versée en contrepartie des charges importantes
résultant du service public de transport public. Cette contribution est complétée par les
recettes d’exploitation, collectées par le délégataire pour son propre compte.
Dans le cadre d’un contrat de délégation de service public à forfait de charges, l’autorité
délégante perçoit mensuellement l’intégralité des recettes d’exploitation récoltées dans un
premier temps par le délégataire (à l’exception de ses éventuelles recettes propres).
Le délégataire est rémunéré par l’autorité délégante via un forfait annuel de charges
d’exploitation qui correspond aux charges prévisionnelles annuelles d’exploitation. Il s’agit
du « forfait de charges ».
8 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Première partie : Rappel des principales règles juridiques applicables
aux contrats de délégation de service public dans le cadre de la crise
sanitaire
Sans être exhaustif, il est possible de les présenter schématiquement, selon les différentes
catégories suivantes :
En premier lieu, les contrats de délégation de service public contiennent des stipulations
relatives à son exécution, et très souvent aux modifications de ces conditions d’exécution et
aux conditions dans lesquelles ces modifications interviennent :
Par ailleurs, la grande majorité des contrats de délégation de service public de transport
public contient des clauses relatives à la modification de la consistance des services. Sont
distinguées les modifications à l’initiative de l’autorité délégante de celles à l’initiative du
délégataire.
Ce type de clause prévoit généralement que les parties se rencontrent pour réexaminer les
conditions financières de la délégation de service public.
• Éventuelles clauses relatives à la réfaction financière pour tous les kilomètres non
parcourus, quelle qu’en soit la cause
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 9
Juin 2020
Ce qu’il faut retenir :
L’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles
de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande
publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de
l’épidémie de covid-19 a pour objet de régler plusieurs situations contractuelles liées au
contexte de crise sanitaire. Néanmoins, l’ordonnance ne les a pas toutes envisagées, comme
cela est expliqué ci-après.
L’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 distingue deux situations différentes pour les
contrats de délégation de service public.
Plus particulièrement, l’article 6, 5° prévoit que « lorsque le concédant est conduit à suspendre
l’exécution d’une concession, tout versement d’une somme au concédant est suspendu et, si la
situation de l’opérateur économique le justifie et à hauteur de ses besoins, une avance sur le
versement des sommes dues par le concédant peut lui être versée ».
L’hypothèse visée par cette disposition est à notre sens celle d’une suspension totale de
l’exécution du contrat.
Or, dans l’hypothèse d’une délégation de service public dont l’objet est le transport public
régulier et à la demande de voyageurs, la suspension totale de l’exécution du contrat ne sera
que rarement la situation rencontrée puisqu’une offre minimum de transport a généralement
été maintenue en application des recommandations de l’État. Il n’y a donc pas de suspension
totale, mais plutôt une suspension partielle du contrat de délégation de service public.
10 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
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L’article 6, 6° de l’ordonnance vise l’hypothèse suivante :
« Lorsque, sans que la concession soit suspendue, le concédant est conduit à modifier
significativement les modalités d’exécution prévues au contrat, le concessionnaire a droit à
une indemnité destinée à compenser le surcoût qui résulte de l’exécution, même partielle,
du service ou des travaux, lorsque la poursuite de l’exécution de la concession impose la
mise en œuvre de moyens supplémentaires qui n’étaient pas prévus au contrat initial et qui
représenteraient une charge manifestement excessive au regard de la situation financière
du concessionnaire »
Or, dans les faits, il s’avère que cette situation devrait correspondre, dans le secteur des
transports publics de voyageurs, à la grande majorité des situations contractuelles.
L’ordonnance du 25 mars 2020 est une ordonnance qui a vocation à s’appliquer à tous
les services publics. Elle prévoit des mécanismes visant, sous certaines conditions, à
aider financièrement le délégataire à surmonter les impacts de la crise sanitaire.
Pour autant, la crise sanitaire n’étant pas achevée et le retour à la vie normale n’étant
pas encore réalisé, l’impact de la crise n’est pas encore complètement connu, ces
mécanismes pourraient trouver à s’appliquer dans les mois à venir.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 11
Juin 2020
3. En l’absence de prévision contractuelle ou textuelle
Plusieurs règles ou principes juridiques sont susceptibles d’être invoqués par les parties
au contrat de délégation de service public, en l’absence de dispositions contractuelles ou
textuelles, voire en complément de celles-ci.
La force majeure est un cas d’exonération de responsabilité, lorsqu’une des parties manque
à ses obligations contractuelles, en raison d’un événement qui lui est extérieur, imprévisible
et irrésistible.
Ainsi, en cas de force majeure, le délégataire qui ne remplirait pas ses obligations serait
exonéré de sa responsabilité.
Autrement dit, il est nécessaire, au cas par cas, de démontrer l’existence de la force majeure
Les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire n’ont pas retenu la force majeure
pour qualifier l’épidémie Covid-19.
Par conséquent, si un délégataire souhaite s’en prévaloir dans le cadre de ses relations
contractuelles, il faudra qu’il démontre à l’autorité délégante que les conditions qui la
caractérisent sont bien réunies..
3.2. Imprévision
12 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Fondée sur l’idée de continuité du service public, l’imprévision permet par conséquent au
cocontractant de l’administration de poursuivre l’exécution de la convention, nonobstant
la survenance d’un évènement imprévisible, extérieur, bouleversant l’économie du contrat,
grâce à l’octroi d’une indemnité.
Ainsi que le résume une formulation de principe d’une décision rendue en 2019 par le Conseil
d’Etat précisant les conditions d’octroi d’une indemnité d’imprévision : « une indemnité
d’imprévision suppose un déficit d’exploitation qui soit la conséquence directe d’un évènement
imprévisible, indépendant de l’action du cocontractant de l’administration, et ayant entraîné un
bouleversement de l’économie du contrat ».
Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises par l’Etat pour y faire
face, les conditions tenant à l’existence d’un évènement imprévisible, extérieur aux parties,
et à la nécessité d’y faire face seront probablement satisfaites assez aisément.
En revanche, il conviendra de vérifier, dans chaque cas, l’existence d’un déficit d’exploitation
engendré par l’évènement imprévisible ainsi que celle du bouleversement de l’économie
du contrat8.
Les applications récentes de cette théorie par les juridictions administratives sont très rares.
6. lorsque l’événement à l’origine du bouleversement économique du contrat s’inscrit dans la durée et/ou présente un ca-
ractère définitif, l’imprévision est alors susceptible de dériver en un cas de force majeure administrative, laquelle constitue
une impossibilité définitive de poursuivre l’exécution du contrat, susceptible de conduire à sa résiliation : CE Ass, 9 dé-
cembre 1932, Cie des tramways de Cherbourg, p, 1050 - CE, 14 juin 2000, Cne de Staffelfelden, p. 227 : « au cas où des cir-
constances imprévisibles ont pour effet de bouleverser le contrat et où les conditions économiques nouvelles ont créé une
situation définitive qui ne permet plus au concessionnaire d’équilibrer ses dépenses avec les ressources dont il dispose,
la situation nouvelle ainsi créée constitue bien un cas de force majeure et autorise à ce titre le concessionnaire, comme
d’ailleurs le concédant, à défaut d’un accord amiable sur une orientation nouvelle à donner à l’exploitation, à demander au
juge la résiliation de la concession avec indemnité s’il y a lieu ».
7. CE 5 novembre 1982, Société Propetrol, req. n° 19413.
8. CE, 21 octobre 2019, Société Alliance, req. n° 419155.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 13
Juin 2020
Ce qu’il faut retenir :
Il est possible que l’épidémie Covid-19 puisse constituer un cas d’imprévision. Mais il
faudra impérativement que toutes les conditions soient réunies, ce qui dépendra de
chaque situation.
Le fait du prince est un évènement imprévisible résultant de la prise d’une mesure licite par
l’administration contractante, qui cause un préjudice au délégataire.
Si les conditions du fait du prince sont réunies, le cocontractant a droit à une indemnisation
des préjudices directs et certains liés à cette mesure de l’autorité publique.
Il n’est pas possible d’exclure que certaines décisions prises par l’autorité délégante,
dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, puissent engager sa responsabilité sur
le fondement du fait du prince.
Le principe de mutabilité du service public signifie qu’il doit s’adapter aux évolutions
de l’intérêt général et donc des besoins de la collectivité. Il s’agit de faire évoluer le
service public en fonction des nouvelles circonstances d’exercice.
14 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Concrètement, cela signifie qu’un contrat administratif, et donc une délégation de
service public, peut être unilatéralement modifié par l’administration, qui se réserve
le droit de changer les dispositions du contrat si l’intérêt général l’exige9.
Ainsi que cela est désormais codifié à l’article L. 6 du code de la commande publique :
Toutefois, elle ne peut le faire que dans certaines limites. Par exemple, les modifications
financières apportées par une autorité délégante en faveur du délégataire ne sauraient
avoir pour effet de diminuer significativement le risque d’exploitation endossé par son
délégataire. En effet, l’ampleur de ces mesures pourrait remettre en cause la nature
même du contrat de délégation de service public. En cas de diminution trop importante
du risque d’exploitation, le contrat pourrait être requalifié de marché public, imposant
alors à l’autorité organisatrice de relancer une procédure de mise en concurrence
appropriée (cf point 4.1 du préambule).
La règle du service fait signifie que tout décaissement doit correspondre à l’existence d’une
dette.
Une exception à la règle du service fait est constituée par les versements constitutifs
d’avances, expressément envisagés par l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 portant
diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats
soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant
la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19.
9. L’existence de cette prérogative, qui a fait l’objet de débats doctrinaux, a été consacrée sans ambigüité par une importante
décision du Conseil d’Etat, CE, 2 février 1983, Union des transports publics urbains et régionaux, req. n° 34027, publié au
recueil Lebon.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 15
Juin 2020
Au titre des règles protectrices des deniers publics figure également celle de l’interdiction
de principe faite aux personnes publiques de verser des sommes qu’elles ne doivent pas10
et qui, en matière contractuelle, implique notamment que le contrat ne peut valablement
prévoir le versement d’une indemnité, par la personne publique à son cocontractant, qu’à
condition que « le montant de l’indemnité, en tout état de cause, [soit] fixé de manière (…) [à] ce
qu’il n’en résulte aucune libéralité de la part de la personne publique »11 .
Dans le contexte de la crise sanitaire, le dispositif d‘activité partielle a été renforcé par les
pouvoirs publics, afin de soutenir financièrement les entreprises contraintes de réduire ou
de suspendre temporairement leur activité12.
Le secteur du transport public a été largement impacté par les mesures générales de
restrictions de déplacement et de fermeture des établissements d’enseignement. A l’instar
d’autres secteurs, les exploitants de transport public ont dès lors recours à l’activité partielle.
Ils bénéficient ainsi d’une allocation de la part de l’Etat, visant à indemniser les heures
chômées de leurs salariés mis en activité partielle.
La gestion des incidences de la crise sanitaire sur les délégations de service public
ne peut justifier la méconnaissance des règles protectrices des deniers publics que
constituent la règle du service fait et celle de l’interdiction des libéralités.
À cet égard, l’indemnisation des heures chômées de salariés mis en activité partielle
doit faire l’objet d’une vigilance particulière de la part de l’autorité délégante, au nom de
l’interdiction d’octroi de libéralités.
10. CE Sect. 19 mars 1971, Sieur Mergui, req. n° 79962, publié au recueil Lebon
11. CE Sect. 29 juin 2018, Préfet des Alpes-de-Haute-Provence, req. n° 402251, publié au recueil Lebon
12 Voir articles L. 5122-1 et suivants et R. 5122-1 et suivants du code du travail
16 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
3.6. Exigence de loyauté des relations contractuelles
Par une décision du 4 octobre 2019, le Conseil d’État a récemment fourni une nouvelle
illustration de la jurisprudence topique « Béziers » relative aux effets du principe de loyauté
contractuelle dans le cadre d’un recours en contestation de validité du contrat administratif
entre parties (CE, 28 décembre 2009, n° 304802).
Les parties devront veiller au respect de cette exigence dans le cadre de l’exécution
financière des contrats de délégation de service public liée à la crise sanitaire.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 17
Juin 2020
Deuxième partie : Méthodologie proposée pour régler l’exécution
financière des contrats de DSP dans le cadre de la crise sanitaire
1. Recommandations pratiques
Afin de gérer les conséquences de cette crise sanitaire sur l’exécution du contrat de
délégation de service public, des temps d’échanges entre les parties doivent être
régulièrement organisés.
Les contrats de délégation de service public organisent d’ailleurs très souvent des échanges
entre les parties visant, préalablement à la mise en œuvre effective de la modification, à bien
en mesurer les incidences et, le cas échéant, à en ajuster la teneur.
Un dialogue régulier entre les parties permettra d’appréhender au mieux les impacts de
cette crise et de s’accorder sur les mesures à mettre en œuvre afin de poursuivre l’exécution
du contrat au regard des mesures étatiques prises pour limiter la propagation de l’épidémie
liée au covid-19.
Cet inventaire permettrait d’avoir une vue d’ensemble des décisions qui ont été prises au
cours de la crise, ce qui facilitera les éventuelles modifications du contrat ou encore les
évolutions relatives aux modalités financières.
18 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
1.2. Point d’attention relatif à la saisine du comité des partenaires
Pour rappel, depuis l’entrée en vigueur de la LOM, les autorités organisatrices de la mobilité
(AOM) et les autorités organisatrices de la mobilité régionale (AOMR) sont obligées de créer
ce comité des partenaires.
Cette disposition les oblige à saisir pour avis le comité des partenaires, notamment, en cas
de modification substantielle de l’offre de transport.
Or, au regard de la crise sanitaire et des conséquences qui vont probablement s’inscrire
dans le temps, l’offre de transport risque d’être substantiellement modifiée.
Même si la réunion de ce comité des partenaires dans cette situation exceptionnelle parait
difficilement envisageable à ce jour pour les autorités organisatrices, la saisine de ce comité
des partenaires deviendra obligatoire si les mesures de protection devant être mises en
œuvre à l’égard des usagers s’inscrivent dans la durée et modifient ainsi substantiellement
l’offre de transport.
Enfin, rappelons que la saisine du comité des partenaires créé par la LOM pourrait, selon
les mesures engagées par l’autorité délégante, être obligatoire avant toute modification
substantielle de l’offre de transport.
La crise sanitaire s’est traduite et pourrait continuer à se traduire à l’avenir par une
modification des obligations contractuelles et, plus généralement, par une évolution de
l’« environnement » dans lequel le contrat est exécuté. Ces circonstances peuvent affecter,
potentiellement de manière substantielle, l’équilibre économique du contrat.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 19
Juin 2020
Les configurations susceptibles de se présenter sont, pour l’essentiel, de deux ordres :
• face à la situation de crise sanitaire et aux mesures d’exception adoptées par l’Etat -
jusqu’au 11 mai 2020 et même après -, les autorités organisatrices ont tout d’abord pu
décider elles-mêmes, dans la sphère contractuelle :
• du fait de la crise sanitaire, et donc pour des raisons extérieures aux parties14, la
fréquentation des services et, par suite, les recettes générées par son exploitation ont
pu chuter ; les coûts d’exploitation, pour la part des services continuant à être effectués,
se sont renchéris du fait des mesures d’exception à mettre en place par les exploitants,
notamment pour assurer la protection de leurs salariés. Ces situations pourraient
se prolonger, de manière assez durable, compte tenu de l’évolution anticipée des
comportements individuels.
La crise sanitaire a des répercussions sur l’exécution financière d’un contrat de DSP.
Pour savoir comment les traiter juridiquement, il convient de distinguer deux situations
différentes :
13. Parfois pour garantir le respect des mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le
cadre de l’état d’urgence sanitaire (v. notamment, Décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 prescrivant les mesures générales
nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire).
14. Même si, on le verra, les décisions des autorités organisatrices ont également, la plupart du temps, elles-mêmes eu une
incidence sur les recettes d’exploitation, notamment en cas de modification de la consistance des services.
20 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
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2.2 Schéma de décisions selon le type de contrats de DSP
DSP
DSP DSP
classique à forfait de
à CCF charges
Principes de Adaptation tunnel Application recette Principes de Adaptation tunnel Application recette
valorisation à d’évolution des kilométrique marginale valorisation à d’évolution des kilométrique marginale
définir charges ou clause ou mécanisme définir charges ou clause ou mécanisme
génériques ? spécifique ? génériques ? spécifique ?
2.3. 1ère situation : l’appréhension des modifications décidées par l’autorité organisatrice
S’agissant des perturbations qui résultent d’une décision de l’autorité organisatrice, deux
principaux cas de figure peuvent être distingués :
• le cas dans lequel le contrat contient des clauses prévoyant spécifiquement les
modifications de la nature de celles décidées par l’autorité organisatrice du fait de la
crise sanitaire (en particulier, la modification de l’offre kilométrique), et qui traitent des
conditions financières de mise en œuvre de ces modifications (2.3.1) ;
• le cas dans lequel le contrat ne contient pas de clause traitant spécifiquement de ces
modifications ou se borne à prévoir le principe d’une rencontre entre les parties pour
s’accorder sur les conditions financières de la modification (2.3.2).
Des principes d’appréciation des incidences financières peuvent enfin être dégagés pour
illustrer le propos (2.3.3).
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 21
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2.3.1. L’application des clauses contractuelles, en cas de modifications décidées par
l’autorité organisatrice
Les mécanismes les plus classiques distinguent les conséquences des modifications
de l’offre kilométrique en fonction de l’ampleur de la modification par rapport à l’offre
contractuelle.
Il s’agira ainsi d’examiner les clauses contractuelles à cet égard, de les rapporter à
l’ampleur des modifications décidées par l’autorité organisatrice pour faire face à la
crise sanitaire et d’établir, au terme d’une concertation avec l’exploitant, dans quel
régime contractuel l’on se trouve pour en faire application.
Soulignons que les clauses contractuelles font le plus souvent référence à l’appréciation
des modifications apportées à la consistance des services à l’échelle de l’année et qu’en
pareil cas, il convient de tenir compte de l’ensemble des ajustements qui ont été décidés
avant le 11 mai 2020, de ceux qui l’ont été pour la période postérieure au 11 mai 2020 et, le
cas échéant, d’anticiper ceux qui pourraient l’être par la suite, notamment un renforcement
– ponctuel ou pérenne – de l’offre contractuelle pour permettre le respect des règles de
distance interpersonnelle.
En effet, s’il y a eu une réduction importante des services pendant la période allant du 16
mars au 10 mai, puis une adaptation de l’offre entre le 11 mai et la fin du mois de juin et enfin,
un retour à la normale (voire une augmentation de l’offre par rapport à la situation initiale),
il ne sera possible de mesurer l’impact sur l’offre kilométrique annuelle qu’au moment du
retour à la normale dans les transports publics.
C’est pourquoi, la présence de telles clauses, lorsqu’elles prévoient que les modifications
à la consistance des services sont à apprécier à l’échelle d’une année, pourrait justifier de
22 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
reporter15 la détermination des conséquences financières de la crise sanitaire à une période
à laquelle les parties disposeront d’un recul suffisant pour en apprécier les conséquences
globales à l’échelle de l’année, sur l’offre kilométrique effective.
Précisons également que le fait que les clauses contractuelles prévoient précisément
les conséquences d’une modification de l’offre kilométrique ne signifie pas que ces
clauses permettent systématiquement de traiter l’ensemble des incidences de la crise
sanitaire sur l’exécution du contrat.
Ainsi, leur application ne permettra, dans la plupart des cas, que de traiter d’une partie de
ces incidences, renvoyant les parties à l’application de règles et concepts plus généraux en
ce qui concerne les incidences non spécifiquement couvertes par les clauses du contrat.
Les contrats de délégation de service public de transport comportent très souvent des
clauses qui encadrent les conditions dans lesquelles certaines modifications peuvent
être mises en œuvre : il revient donc aux parties d’examiner en premier lieu les clauses
contenues au sein de leur contrat de délégation de service public.
- de prévoir une rencontre entre les parties, afin qu’elles puissent échanger les
informations en leur possession et les analyses qui ont pu être menées afin que chacun
ait connaissance de la situation. Ces échanges permettront d’identifier les clauses
contractuelles applicables.
2.3.2. L’appréhension des conséquences non prévues par le contrat, en cas de modifications
décidées par l’autorité organisatrice
Il est probable que, parmi les modifications décidées par l’autorité organisatrice (consistance
de l’offre, conditions tarifaires, etc.), le contrat ne prévoie pas l’intégralité des conséquences
financières à y attacher, soit que le principe de ces modifications ne soit pas expressément
prévu par le contrat, soit que celui-ci n’en prévoie pas les conséquences financières, ou
renvoie à une discussion entre les parties.
Pour illustrer cette situation, tel pourrait notamment être le cas de mesures arrêtées par
l’autorité organisatrice en application de l’article 6, I du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020
prescrivant les mesures générales pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de
l’urgence sanitaire.
15. Sauf à ce que le délégataire soit confronté à une situation difficilement tenable financièrement, pouvant justifier une
réaction plus rapide.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 23
Juin 2020
En effet, ces dispositions imposent aux autorités organisatrices de la mobilité d’ « organiser »
en concertation avec les autres parties prenantes (collectivités intéressées, employeurs,
associations d’usagers et exploitants) « les niveaux de services et les modalités de circulation
des personnes présentes dans les espaces et véhicules affectés au transport public de
voyageurs, ainsi que l’adaptation des équipements, de nature à permettre le respect » des
mesures barrière et des règles de distance interpersonnelle.
Sauf accord des parties16 , l’autorité délégante peut décider de modifier unilatéralement
le contrat de délégation de service public pour déterminer les incidences financières
des mesures qu’elle a adoptées.
Ces règles imposent ainsi en principe à l’autorité délégante qui fait usage de son
pouvoir de modification unilatérale de compenser les effets de sa décision sur
l’équilibre financier du contrat17.
Il convient de préciser que le recours à la notion même d’« équilibre » du contrat suppose
que la modification décidée par la personne publique ait un impact non négligeable sur les
coûts supportés par le délégataire et/ou la rémunération qu’il est en situation de percevoir
pour qu’il y ait droit à indemnité.
Autrement dit, la modification décidée par la personne publique est supposée affecter de
manière suffisamment significative l’exécution du contrat pour que l’on puisse considérer
que son équilibre financier est lui-même impacté et que des mesures propres à le rétablir
doivent être mises en œuvre.
En toute hypothèse, dès lors que le délégataire est en droit de bénéficier d’une
compensation, la validité juridique de celle-ci est conditionnée à ce qu’elle n’excède pas
ce qui est nécessaire au rétablissement de l’équilibre financier du contrat.
Ainsi, en pratique, une analyse précise doit être conduite par les parties pour déterminer les
conséquences financières de la modification décidée par l’autorité délégante, de manière
16. Une prudence particulière devra néanmoins être observée, en cas d’ajustement convenu d’un commun accord, aux
incidences des modifications, au regard de leur durée et de leur ampleur, surtout s’il en résulte une modification de l’économie
générale du contrat, par une suppression ou une limitation excessive du risque d’exploitation par exemple. La prévision des
parties étant nécessairement limitée, la prudence commande, s’il est recouru à l’avenant, d’en limiter dans le temps les effets.
17. Le rapporteur public, M. Gilles Pellissier, signalait à cet égard, dans ses conclusions sur la décision Commune du
Mont-Saint-Michel (CE, 9 mars 2018, req. n° 4009972), qu’en cas de modification des conditions d’exécution d’un service, il
appartient « aux parties de décider des modalités de la compensation des surcoûts que représente pour le délégataire cette
modification des conditions d’exécution du service, tout en préservant l’équilibre économique initial du contrat : soit une
hausse des tarifs strictement limitée à ce qui est nécessaire pour la compenser ; soit un prix versé par le [délégant], qui ne
devra pas davantage excéder le surcoût que représente cette modification ».
24 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
à déterminer la compensation due au délégataire pour faire face au déséquilibre engendré
par la modification.
Dès lors, l’autorité délégante usant de son pouvoir de modification unilatérale doit
compenser les effets de sa décision sur l’équilibre financier du contrat. Pour autant, cette
indemnisation ne doit pas avoir pour objet d’indemniser le délégataire au-delà de ce qui
est nécessaire pour rétablir l’équilibre financier du contrat.
Les parties doivent donc procéder à une analyse précise des conséquences financières
de la modification décidée par l’autorité délégante.
Les incidences financières de la crise sanitaire peuvent affecter tant les charges supportées
par le délégataire que ses recettes :
En matière d’évaluation des incidences financières sur les charges, l’autorité délégante
devra veiller, quel que soit son type de contrat à bien identifier de façon contradictoire et
partagée avec son délégataire :
• les services non réalisés traduits en unités d’œuvre (kilomètres en ligne et HLP, heures
de conduite non effectuées) pour chaque typologie de service (lignes de bus, tramway,
Métro, transports scolaires, TAD),
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 25
Juin 2020
Le schéma ci-après précise les méthodes et conseils pour l’approche de réfaction financière
de l’offre de services non réalisée, selon le dispositif contractuel le plus couramment
rencontré.
• Nombre de kilomètres non réalisés (en ligne Les coûts de roulage comprennent généralement les
Coûts et HLP) par activité (bus, cars, tramway, coûts d’entretien...
métro...) et par type de véhicule Vérifier si maintien d’une prestation de
roulage • Application des coûts de roulage contractuels maintenance via la présence de tout ou partie du
par type de véhicule personnel d’atelier
• Nombre de kilomètres non réalisés (km en Les coûts de roulage comprennent généralement les
Subdélégation ligne et HLP) par activité coûts d’entretien...
• Nombre d’heures de conduite non réalisées Vérifier si maintien d’une prestation de
d’exploitation maintenance via la présence de tout ou partie du
personnel d’atelier
En matière d’évaluation des incidences sur les recettes, l’approche stratégique pourra être
totalement différente selon que l’on se situe dans un contrat de délégation de service public
« classique » (avec une contribution financière forfaitaire « CFF ») ou à forfait de charges :
26 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
2.4. 2ème situation : Le traitement des autres incidences éventuelles de la crise
sanitaire sur l’exécution du contrat (hors décision de l’autorité délégante)
Par exemple, la crise sanitaire peut provoquer une baisse substantielle de la fréquentation
dans les transports publics, étant précisé que cette baisse pourrait se prolonger, dans les
mois à venir.
Cette dégradation peut être la conséquence des mesures adoptées par l’Etat (restrictions
des déplacements individuels, fermetures de nombreux établissements recevant du public,
y compris au-delà du 11 mai 2020), ou simplement liée à l’existence de l’épidémie et de
l’évolution des comportements individuels qu’elle induit.
Le délégataire peut alors chercher à se prévaloir, s’il estime que les conditions en sont
réunies, de la théorie de l’imprévision.
- d’une part, aux pertes de recettes dont on peut considérer qu’elles ne sont pas
imputables aux décisions de l’autorité délégante ;
- d’autre part, aux surcoûts engendrés par la crise sanitaire sur l’exécution du
contrat, dans la mesure où ceux-ci ne sont pas non plus imputables à une décision
de l’autorité délégante (par exemple, le renforcement de mesures d’entretien, la
fourniture d’équipements de protection aux salariés et, le cas échéant, aux usagers,
etc.).
Une vigilance doit être portée sur l’ampleur des incidences susceptibles de faire l’objet
d’une indemnisation au titre de l’imprévision20 :
18. À tout le moins pas autrement que par une clause de rencontre entre les parties.
19. Au sens où il s’agit de saisir le seul impact du contexte de crise sanitaire hors décision de l’autorité délégante
20. Prévue par l’article L. 6 du code de la commande publique ; Voir également la notion d’imprévision dans la première partie
du guide
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 27
Juin 2020
S’il demeure, au résultat de ce bouleversement, un déficit d’exploitation – que l’on imagine
essentiellement lié à une baisse durable de la fréquentation et des recettes –, il incombe en
principe à l’autorité délégante de le supporter pour l’essentiel, en laissant néanmoins une
part au délégataire.
À cet égard, la jurisprudence n’a pas défini de règle précise s’agissant de la répartition du
déficit entre les parties.
D’après la doctrine21 qui semble avoir adopté une position commune et au regard notamment
d’une application jurisprudentielle relativement récente de cette théorie, une part comprise
en 5 et 10 % du déficit devrait être laissée à la charge de l’exploitant22, l’autorité publique
contractante en assumant ainsi la très grande majorité. Mais il ne s’agit là que d’un référentiel
indicatif qui ne peut exclure une appréciation au cas par cas.
21. Voir, notamment, les auteurs des Grands arrêts de la jurisprudence administrative (GAJA) sur CE, 30 mars 1916, Cie
générale d’éclairage de Bordeaux, cités par G. Pellissier dans ses conclusions sur CE, 21 octobre 2019, Société Alliance, req.
n° 419155. Voir également L. Richer et F. Lichère, Droit des contrats administratifs, LDGJ, 10ème éd. p. 281, évoquant la prise en
charge de 90 % du déficit par l’autorité publique contractante, précisant que « cette part peut être diminuée en considération
de la plus ou moins grande diligence du cocontractant ».
22. Voir également, pour une décision fixant à 5 % du déficit le montant laissé à la charge du délégataire : CE, 14 juin 2000,
Cne de Staffelfelden, p. 227.
28 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
En ce sens, il est possible qu’au sortir de la période de confinement, les conditions d’application
de l’imprévision ne soient pas réunies, mais qu’elles le deviennent quelques semaines ou
quelques mois après le 11 mai 2020.
En premier lieu, lorsque les impacts de la crise sanitaire ne nécessiteront pas de modifier
le contrat de délégation de service public, l’indemnisation versée au délégataire pourra
résulter d’une décision de l’autorité délégante (voir point 2.3.2 ci-dessus). Dans ce cas, les
parties ne seront pas tenues de conclure un avenant.
En effet, il est probable que certaines modifications décidées par l’autorité organisatrice
puissent être traitées rapidement sans difficulté particulière.
Exemples :
Lorsque les conséquences financières des modifications sont précisément envisagées par
le contrat, il s’agit alors d’appliquer purement et simplement les clauses contractuelles (voir
illustration au point 2.3.3 ci-dessus).
Dans cette hypothèse, un règlement relativement rapide semble pouvoir être envisagé.
En tout état de cause, chaque hypothèse devra toujours faire l’objet d’une analyse spécifique.
Exemples :
Sans pouvoir lister toutes les hypothèses dans lesquelles la conclusion d’un avenant
pourrait être envisagée, on peut d’ores et déjà en identifier certaines :
23. Pour rappel, un avenant est un contrat ayant vocation à modifier un contrat en cours d’exécution.
24. Sauf à ce que celle-ci corresponde, dans sa totalité, à l’une des évolutions couvertes par les prévisions contractuelles.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 29
Juin 2020
- Impacts durables constatés sur le niveau de fréquentation et de recettes, rendant
nécessaire une révision des engagements du délégataire sur ce point.
Dans ces cas de figure, il s’agira davantage de traiter les conséquences plus durables
de la crise sanitaire sur le contrat, postérieures à la période de confinement.
C’est pourquoi, comme conseillé au point 2.3.3 ci-dessus, s’il est envisagé de modifier le
contrat sur ce point, une rencontre en fin d’année 2020, permettrait une période d’analyse
plus conséquente et significative des tendances de fréquentation et recettes.
À ce stade, il est donc recommandé aux parties de ne pas se précipiter pour conclure un
avenant en vue de régler la situation née d’une crise sanitaire dont les effets peuvent se
poursuivre et varier considérablement.
En effet, il pourrait s’avérer délicat, voire risqué, au regard du risque d’exploitation qui doit être
supporté par le délégataire, de modifier dès à présent, par avenant, le contrat de délégation
de service public initial, sur toute sa durée d’exécution, alors même que :
- tous les impacts avec leur origine et leur ampleur ne sont pas encore précisément
connus des parties ;
- le délégataire devra jouer un rôle actif dans la reconquête de la clientèle en déployant
une stratégie et des actions commerciales ciblées.
Enfin, il peut être utile de rappeler qu’en application de l’article L. 1411-6 du code général
des collectivités territoriales, tout projet d’avenant venant modifier un contrat de délégation
de service public doit intervenir après un vote de l’assemblée délibérante et si ce projet
d’avenant entraine une augmentation de plus de 5% du montant global du contrat alors la
commission de délégation de service public doit être saisie pour avis25.
Cette voie pourrait être privilégiée notamment dans l’hypothèse où il s’agirait principalement
de régler les incidences financières passées de la crise sanitaire et où les parties estimeraient
soit que la situation à venir ne devrait pas engendrer de nouveau déséquilibre, soit qu’elles
25. Cependant, l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de
covid-19 est venue modifier l’ordonnance précitée n° 2020-319 du 25 mars 2020 en y intégrant l’article 6-1. Ce nouvel article
prévoit que les projets d’avenants qui ont pour effet d’augmenter de plus de 5% le montant global d’une délégation de
service public ne sont pas soumis à l’avis de la commission de délégation de service public.
26. Pour le recours à la transaction, voir la circulaire du 6 avril 2011 relative au développement du recours à la transaction
pour régler amiablement les conflits
30 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
ne sont pas en mesure de l’évaluer avec suffisamment de précision pour en régler d’avance
les incidences par avenant.
Dans certains cas de figure, les discussions entre l’autorité délégante et le délégataire se
traduiront, à terme, par la conclusion d’un avenant.
Avant de franchir cette étape essentielle, il est recommandé de ne pas modifier trop
rapidement le contrat, ne serait-ce que pour mesurer, à moyen terme et le mieux
possible, les impacts réels de la crise sanitaire sur le contrat.
3.Tableau synthétique
Le tableau suivant présente une synthèse des principaux points d’attention ; il ne saurait
toutefois être totalement exhaustif, en raison de la diversité des situations contractuelles et
contextuelles.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 31
Juin 2020
Modifications décidées Incidences de la crise
par l’AO sanitaire sur l’exécution
du contrat (hors celles
résultant d’une décision
de l’AO)
32 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
Troisième partie : Exemples de cas de figure
Les développements suivants ont vocation à illustrer les impacts de la crise sanitaire sur
l’exécution des contrats de DSP, selon qu’ils sont à forfait de charges ou à contribution
financière forfaire (CFF).
Les illustrations qui suivent sont basées sur deux exemples de contrats de DSP conclus par
une autorité organisatrice de la mobilité, qui lève du versement mobilité.
10M€
5M€
0M€
Forfait de charges
Voyageurs
Dans une DSP à « forfait de charges », l’autorité organisatrice verse au délégataire une
rémunération égale aux charges contractuelles. Le délégataire collecte les recettes pour
le compte de l’autorité organisatrice et lui reverse le montant exact des recettes collectées,
mais il est en outre tenu par un montant minimum de reversement. Si les recettes réelles
sont inférieures à son engagement, il doit verser le complément à l’autorité organisatrice. Le
délégataire bénéficie en général d’un intéressement si les recettes sont supérieures à son
engagement de reversement minimum.
Le délégataire supporte le risque tant sur les charges que sur les produits, le contrat est
donc bien une délégation de service public.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 33
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : principes contractuels
illustration 30 M€ de charges, taux de couverture 25%
Salaires :
18M€
Participation budget Recettes réelles avec
général : 2,5M€ minimum garanti : 7,5M€
Autorité
Délégataire
organisatrice
Voyageurs
Trésorerie du
Trésorerie de l’AO Situation nominale contrat et finances de l’AO équilibrés délégataire
à l’équilibre
à l’équilibre
• L’économie générale du délégataire est équilibrée : ses charges (salaires + autres) sont
égales au forfait de charges qu’il perçoit de l’autorité organisatrice. Il reverse à l’autorité
organisatrice les recettes qu’il collecte pour son compte. On considère ici qu’il collecte un
niveau de recettes égal à son engagement de reversement minimum.
34 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : période de confinement (- 75% km),
si pas de modification du forfait de charges et de l’engagement
de recettes
Salaires :
12M€
Participation budget Recettes réelles avec
général : 2,5M€ minimum garanti : 0,5M€
Autorité
Délégataire
organisatrice
Voyageurs
En période de confinement :
‑ Ses charges (salaires + autres) diminuent (une partie de ses salariés est en
chômage partiel ou arrêt maladie pour garde d’enfants) ;
‑ Attention, à l’arrêté des comptes, il devra verser en plus le solde entre son
engagement de reversement et ce qu’il aura effectivement reversé pendant
toute l’année, sauf s’il y a eu entre temps un accord pour revoir l’engagement de
reversement.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 35
Juin 2020
• L’économie générale de l’autorité organisatrice est très déficitaire pendant la période :
27. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
36 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : offre kilométrique dégradée
jusqu’à la rentrée (- 20% km) si pas de modification du forfait
de charges et de l’engagement de recettes
Salaires :
16M€
Participation budget Recettes réelles avec
général : 2,5M€ minimum garanti : 5M€
Autorité
Délégataire
organisatrice
Voyageurs
‑ Ses charges (salaires + autres) diminuent un peu (une petite partie de ses salariés
restent en chômage partiel) ;
28. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 37
Juin 2020
‑ Attention, à l’arrêté des comptes, il devra verser en plus le solde entre son
engagement de reversement et ce qu’il aura effectivement reversé pendant
toute l’année, sauf s’il y a eu entre temps un accord pour revoir l’engagement de
reversement.
29. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
38 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : retour à l’offre kilométrique nominale,
si pas de modification du forfait de charges et de l’engagement
de recettes
Salaires :
20M€
Participation budget Recettes réelles avec
général : 2,5M€ minimum garanti : 6M€
Autorité
Délégataire
organisatrice
Voyageurs
‑ Attention, à l’arrêté des comptes, il devra verser en plus le solde entre son
engagement de reversement et ce qu’il aura effectivement reversé pendant
toute l’année sauf s’il y a eu entre temps un accord pour revoir l’engagement de
reversement31.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 39
Juin 2020
• L’économie générale de l’autorité organisatrice est déficitaire pendant la période :
‑ Le VM diminue un peu (le gros de la perte aura eu lieu jusqu’en août, mais la crise
économique pourrait se poursuivre après la rentrée) ;
‑ Les recettes voyageurs collectées pour son compte par le délégataire et reversées
au réel diminuent (baisse de la mobilité du fait de la crise, baisse spontanée de la
fréquentation des transports en commun, par peur de contagion) ;
40 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à forfait de charges : ajustement du forfait de charges
75% pendant 2 mois = -12% de l’offre annuelle Au-delà de l’impact sur les charges
30% pendant 1 mois = -2,5% de l’offre annuelle contractuelles (facture de régulation au
10% pendant 1 mois = -0,8% de l’offre annuelle printemps 2021); ajustement des acomptes
Total environ -15% de mai / juin ?)
Il y a différents leviers pour ajuster le forfait de charges pendant toute la durée de la crise
sanitaire :
• Ceux prévus par le contrat, principalement via les clauses prévoyant les conséquences
de la réduction de l’offre kilométrique, mais aussi via les clauses dites « de paysage »32,
qui peuvent prévoir un champ d’application plus ou moins large selon les contrats ;
L’application de ces clauses prévues ou non par le contrat modifiera le montant du forfait
de charges et aura une répercussion financière à la clôture de l’exercice33. Les parties
peuvent également tenter de se mettre d’accord pour réduire les acomptes du forfait de
charges avec effet immédiat, surtout si l’autorité organisatrice fait face à des problèmes
de trésorerie.
De la mi-mars à la mi-juillet, il est probable que la crise sanitaire ait pour conséquence
une réduction de l’offre représentant environ 15 % du volume annuel (hypothèses : - 75 %
pendant les 2 mois du confinement, - 30 % à compter du 11 mai et – 10 % à compter de la
mi-juin, retour à l’offre nominale avec les services été).
32. Ou « de rencontre ».
33. Ou selon d’autres échéances (trimestre, etc…), voire dès la mise en œuvre de la modification.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 41
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : Ajustement du forfait de charges,
mode d’emploi
Exemple d’articles de DSP susceptibles de prendre en compte une partie des évolutions
induites par la situation sanitaire :
� « Continuité du service »
� « Modifications du cahier des charges à l’initiative de l’AO »
� « Modifications comprises entre – 10 % et - 20 % et entre + 10% et + 20 % de l'offre »
� « Modification donnant lieu à concertation entre l’AO et le délégataire »
� « Modifications de l’offre »
� « Indexation des recettes du trafic »
� « Révision des charges et des produits contractuels », et notamment les clauses
relatives à
· « en cas de mise en place de nouvelles normes de sécurité ou
environnementales »
« Solde de l’année n » et notamment les éventuelles clauses de réfaction de
rémunération :
· « les kilomètres non réalisés quelle qu’en soit la cause donneront lieu à une
réfaction de la contribution forfaitaire calculée comme suit : »
42 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : Ajustement de l’engagement de reversement
de recettes
L’engagement inscrit au contrat sera parfois modifié automatiquement par les clauses
relatives à la réduction de l’offre (la réduction de l’offre entraînant en général automatiquement
la réduction de l’engagement de recettes) et probablement par les décisions tarifaires prises
par l’autorité organisatrice courant mars 2020 (par exemple gratuité du réseau).
Un traitement de l’engagement de recettes non prévu par le contrat peut également être
mis en œuvre par les parties sur la base par exemple des mesures administratives décidées
par l’Etat ayant des conséquences sur la fréquentation et de règles sanitaires empêchant la
perception de certaines recettes, dont l’autorité organisatrice pourrait décider de supporter
une partie.
Les conséquences sur les recettes des décisions directes de l’autorité organisatrice devront
être compensées, même si cela n’était pas prévu au contrat (par exemple, suspension des
prélèvements automatiques des abonnements).
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 43
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : Modalité de l’indemnisation
extracontractuelle
L’autorité organisatrice peut être amenée à verser à son délégataire une « indemnité pour
imprévision » pour compenser les incidences financières de modifications qui s’imposent
aux parties, qui n’ont pas été initialement envisagées par le contrat et qui en bouleversent
l’économie.
Il s’agit donc là de s’intéresser aux modifications résiduelles (après avoir traité celles relevant
des cas prévus au contrat). La jurisprudence précise que l’autorité organisatrice pourra
prendre en charge une part significative du déficit entraîné par ces modifications sur les
comptes du délégataire.
Une indemnité pour imprévision n’a donc pas pour objet de compenser le manque à gagner
pour le délégataire mais uniquement un éventuel déficit.
Si ses comptes hors ces modifications qui s’imposent aux parties, non envisagées par le
contrat et qui en bouleversent l’économie auraient dû faire ressortir un bénéfice de 1 M€ et
que les modifications ont un impact défavorable de 1,5 M€ sur les comptes du délégataire,
il dégagera une perte comptable de 0,5 M€ sur laquelle l’autorité organisatrice pourra
intervenir (l’indemnité d’imprévision sera nécessairement inférieure à ce montant).
44 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Forfait de charges : temporalité des ajustements contractuels,
impacts trésorerie
Conclusion sur la trésorerie pour l’AO en 2020 : sorties en trésorerie restent inchangées, ren-
trées en trésorerie diminuent très sensiblement : Effet de ciseaux très défavorable sur la tréso-
rerie à partir d’avril, qui va s’ajouter à l’impact sur le VM, à compter d’avril également.
Conclusion sur la trésorerie pour le délégataire en 2020 : aucun impact de la diminution des
recettes, effet d’aubaine de la diminution des charges réelles alors que les acomptes de forfait
de charges ne sont pas diminués. Attention à la régularisation très significative du manque de
recettes à l’arrêté des comptes
Dans une DSP à forfait de charges, les acomptes sont parfois définis pour toute l’année
(ils sont souvent mensuels), la régularisation pour tenir compte par exemple de la forte
diminution de l’offre n’interviendra dans ce cas qu’au printemps 202134. Si rien n’est fait en
cours d’année, le concessionnaire aura encaissé normalement ses acomptes et devra rendre
une régularisation élevée à l’AOM au printemps 2021.
Les recettes sont reversées tout au long de l’année selon les encaissements réels. Si
rien n’est fait en cours d’année, le délégataire devra une forte compensation à l’autorité
organisatrice au printemps 2021 quand il devra verser la différence entre le reversement
minimum sur lequel il s’était engagé et les encaissements réellement reversés au fur et à
mesure de l’exercice.
En conclusion dans le courant de l’année 2020, c’est surtout l’autorité organisatrice qui est
pénalisée en trésorerie ; le délégataire ne sera pénalisé qu’à partir de la rentrée de septembre
si les charges liées à la situation sanitaire continuent à être élevées et commencent à
dépasser les économies qu’il aura réalisées pendant le confinement.
C’est au moment de l’arrêté des comptes 2020 que l’impact de la crise sanitaire pourra
se faire sentir pour le délégataire : sauf accord préalable entre les parties, il devra rendre
une partie des acomptes de forfait de charges et verser le manque à gagner entre son
engagement de reversement de recettes et les recettes réellement encaissées.
34. Nous avons néanmoins déjà relevé que l’ajustement de l’acompte peut parfois être immédiat ou intervenir selon des
échéances inférieures à un an.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 45
Juin 2020
2. DSP à contribution financière forfaitaire
Rémunération du délégataire :
recettes + CCF
5M€
0M€
CCF
Voyageurs
Si les recettes réelles sont inférieures à la prévision contractuelle, le délégataire n’a plus
assez de produits pour couvrir ses charges. L’autorité organisatrice bénéficie en général d’un
intéressement si les recettes sont supérieures à la prévision contractuelle.
Le délégataire supporte le risque tant sur les charges que sur les produits, le contrat est
donc bien une concession.
46 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à Contribution Financière Forfaitaire (CFF)
Illustration taux de couverture 25 %
Salaires :
18M€
Participation budget
général : 2,5M€
Autorité
CFF* : 22,5M€ Délégataire
organisatrice
Versement
mobilité : 20M€ Recettes réelles : 7,5M€
Autres charges
exploitation :
12M€
Voyageurs
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 47
Juin 2020
DSP à CFF: période de confinement (offre km – 75%),
si pas de modification de la CFF
Salaires :
12M€
Participation budget
général : 2,5M€
Autorité
CFF : 22,5M€ Délégataire
organisatrice
Versement
mobilité : 14M€ Recettes réelles : 0,5M€
Autres charges
exploitation :
10M€
Voyageurs
‑ Ses charges (salaires + autres) diminuent (une partie de ses salariés est
en chômage partiel ou arrêt maladie pour garde d’enfants) ;
35. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
36. Taux de couverture des charges par les recettes : part que représentent les recettes par rapport aux charges (ici, en
situation nominale, 7,5 M€ de recettes pour 30 M€ de charges soit un taux de couverture de 7,5 / 30 x 100 = 25 %)
48 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
• L’économie générale de l’autorité organisatrice est très déficitaire pendant la période :
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 49
Juin 2020
DSP à CFF : offre kilométrique dégradée jusqu’à la rentrée
(- 20 % km), si pas de modification de la CFF
Salaires :
16M€
Participation budget
général : 2,5M€
Autorité
CFF : 22,5M€ Délégataire
organisatrice
Versement
mobilité : 7,5M€ Recettes réelles : 5M€
Autres charges
exploitation :
13M€
Voyageurs
37. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
50 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
• L’économie générale de l’autorité organisatrice est très déficitaire pendant la période :
38. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 51
Juin 2020
DSP à CFF : retour à l’offre kilométrique nominale,
si pas de modification de la CFF
Salaires :
20M€
Participation budget
général : 2,5M€
Autorité
CFF : 22,5M€ Délégataire
organisatrice
Versement
mobilité : 19M€ Recettes réelles : 6M€
Autres charges
exploitation :
13M€
Voyageurs
52 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
• L’économie générale de l’autorité organisatrice devrait être un peu déficitaire
pendant la période :
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 53
Juin 2020
DSP à CFF : Ajustement de la partie « charges contractuelles »
de la CFF
Il y a différents leviers pour ajuster les charges contractuelles entrant en compte dans le
calcul de la CFF pendant toute la durée de la crise sanitaire :
• Ceux prévus par le contrat, principalement via les clauses prévoyant les conséquences
de la réduction de l’offre kilométrique, mais aussi via les clauses dites « de paysage »41,
qui peuvent prévoir un champ d’application plus ou moins large selon les contrats ;
L’application de ces clauses prévues ou non par le contrat modifiera le montant de la CFF et
aura une répercussion financière à la clôture de l’exercice42. Les parties peuvent également
tenter de se mettre d’accord pour réduire les acomptes de la CFF avec effet immédiat,
surtout si l’autorité organisatrice fait face à des problèmes de trésorerie.
De la mi-mars à la mi-juillet, il est probable que la crise sanitaire ait pour conséquence
une réduction de l’offre représentant environ 15 % du volume annuel (hypothèses : - 75 %
pendant les 2 mois du confinement, - 30 % à compter du 11 mai et – 10 % à compter de la mi-
juin, retour à l’offre nominale avec les services d’été).
41. Ou de rencontre.
42. Nous avons néanmoins déjà relevé que l’ajustement de la CFF peut parfois être immédiat ou intervenir selon des
échéances inférieures à un an.
54 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à CFF : Ajustement de la CFF, mode d’emploi
Exemple d’articles de DSP susceptibles de prendre en compte une partie des évolutions
induites par la situation sanitaire :
• « Continuité du service »
• « Modifications du cahier des charges à l’initiative de l’AO »
• « Modifications comprises entre – 10 % et - 20 % et entre + 10% et + 20 % de l'offre »
• « Modification donnant lieu à concertation entre l’AO et le délégataire »
• « Modifications de l’offre »
• « Indexation des recettes du trafic »
• « Révision des charges et des produits contractuels », et notamment les clauses
relatives à
· « en cas de mise en place de nouvelles normes de sécurité ou
environnementales »
• « Solde de l’année n » et notamment les éventuelles clauses de réfaction de
rémunération :
· « les kilomètres non réalisés quelle qu’en soit la cause donneront lieu à une
réfaction de la contribution forfaitaire calculée comme suit : »
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 55
Juin 2020
DSP à CFF : ajustement des "recettes contractuelles" de CFF
L’ajustement des recettes contractuelles prises en compte pour le calcul de la CFF produira
ses effets lors de l’arrêté des comptes43 : si un certain nombre d’événements prévus par le
contrat se sont produits, les recettes contractuelles sont susceptibles de diminuer.
Un traitement des recettes contractuelles non prévu par le contrat peut également être mis
en œuvre par les parties sur la base par exemple des mesures administratives décidées
par l’Etat ayant des conséquences sur la fréquentation et de règles sanitaires empêchant la
perception de certaines recettes, dont l’autorité organisatrice pourrait décider de supporter
une partie.
Les conséquences sur les recettes des décisions directes de l’autorité organisatrice devront
être compensées, même si cela n’était pas prévu au contrat (par exemple, suspension des
prélèvements automatiques des abonnements).
43. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
56 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
DSP à CFF : temporalité des ajustements contractuels,
impacts trésorerie
Conclusion sur la trésorerie pour l’AO en 2020 : sorties en trésorerie restent inchangées, même
si l’offre diminue : Pas d’impact du contrat de DSP sur la trésorerie (même si l’AO paie pour un
service qui n’est plus fait). Le seul impact en trésorerie pendant l’année 2020 est celui du VM
Conclusion sur la trésorerie pour le délégataire en 2020 : fort impact de la diminution des
recettes, compensé par la diminution des charges réelles tant que dure le confinement. Trésore-
rie en revanche très affectée dès lors que le niveau d’offre kilométrique repart à la hausse.
Dans une DSP à CFF, les acomptes de CFF sont définis pour toute l’année à venir (ils sont
souvent mensuels), la régularisation pour tenir compte par exemple de la forte diminution de
l’offre n’interviendra qu’au printemps 202144. Si rien n’est fait en cours d’année, le délégataire
aura encaissé normalement ses acomptes et devra rendre une régularisation élevée à
l’autorité organisatrice au printemps 2021, du fait d’une offre de transport effectivement mise
en œuvre plus faible que celle qui avait été prise en compte pour le calcul des acomptes.
Les recettes sont conservées par le délégataire. Si rien n’est fait en cours d’année, le
délégataire aura supporté un fort manque à gagner sur les recettes, dès le mois de mars
2020, qui ne devrait pas lui permettre pas d’équilibrer ses comptes.
44. Certains contrats prévoient néanmoins un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats 57
Juin 2020
3. Conclusion sur les schémas financiers de DSP avec un taux de
couverture de 25 % selon le type de DSP (forfait de charges ou CFF)45
Tant que la régularisation de fin d’année n’est pas faite, le délégataire titulaire d’un contrat
à « forfait de charges » devrait être peu exposé, il aura même dégagé une trésorerie
excédentaire pendant la durée du confinement.
45. Pour des contrats ne prévoyant pas un ajustement selon des fréquences variables (trimestre, etc.), ou à compter de la
mise en œuvre de la modification de l’offre.
58 Crise sanitaire de covid-19 et DSP : guide méthodologique relatif à l’exécution financière des contrats
Juin 2020
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