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QUESTIONS CONTEMPORAINES – L’ALIMENTATION –

COURS 1
Gaëlle Bretenoux-Randrianarisoa – Louis Rossignol

COURS 1 : REVOLUTION(S) ALIMENTAIRE(S)

T ABLE DES MATIERES


Introduction .................................................................................................................. - 2 -
1. La « révolution » du néolithique............................................................................... - 3 -
1.1. Le passage d’une économie de prédation à une économie de production ....................... - 3 -
1.2. Une alimentation principalement carnée ? .................................................................. - 5 -
1.3. Domestiquer la nature .............................................................................................. - 6 -
2. Les grandes mutations de l’agriculture.....................................................................- 8 -
2.1 Nourrir les cités ........................................................................................................ - 8 -
2.2 Défricher la campagne .............................................................................................. - 9 -
2.3 Mécaniser les activités agricoles ................................................................................- 11 -
3. La faim, cause des révoltes ? ................................................................................. - 14 -
3.1 La faim, une cause de désordre social et politique ....................................................... - 14 -
3.2 Les émeutes de la faim, moyens de revendication....................................................... - 16 -
3.3 La faim, une illustration des inégalités persistantes .....................................................- 17 -
Conclusion .................................................................................................................. - 19 -
Bibliographie : ............................................................................................................. - 19 -

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I NTRODUCTION

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les sociétés occidentales ont connu des
bouleversements majeurs qui ont transformé les méthodes de production agricole mais aussi les
habitudes alimentaires. Les Trente Glorieuses sont apparues en France comme des années
d'abondance. Elles ont vu l'introduction quotidienne de la viande dans la constitution des repas et
surtout l'arrivée sur le marché et dans nos assiettes des aliments transformés par l'industrie. Ces
nouvelles pratiques alimentaires se sont rapidement diffusées à l'échelle mondiale après 1991.

Pour autant, depuis plus d'une dizaine d'années, la question de l'alimentation est devenue une
préoccupation : avec la croissance démographique mondiale, les sociétés se sont d'abord posées la
question de la quantité. Comment nourrir plus de 9 milliards d'êtres humains en 2050 ? Ainsi, lors
de l'Exposition universelle de 2015 qui s'est tenue à Milan, le thème « Nourrir la planète, Energie
pour la vie »1 souhaitait présenter la situation alimentaire mondiale et en particulier alerter les
visiteurs sur la problématique de la sous-alimentation dans les pays des Suds. Où en sommes-nous
sept ans plus tard ? Selon l'UNICEF, la faim touche encore 828 millions de personnes dans le monde
en 2021 ce qui signifie une augmentation de 46 millions depuis 20202. Le rapport de l'organisme
international montre que nos capacités et savoirs agricoles et techniques ne peuvent être les seules
solutions pour éradiquer la faim. La question de l'alimentation est aussi au cœur d'enjeux politiques
et sociaux qui impliquent de réfléchir à une meilleure production mais surtout répartition des
denrées alimentaires ainsi qu'à une autre manière de manger.

Ainsi, il s'agit pour beaucoup aujourd'hui d'opérer une nouvelle révolution alimentaire afin de
répondre à ce défi : la question des régimes végétariens voire vegan, de la consommation
calorifique, de la distribution des denrées et de l'influence des industriels de l'agro-alimentaires
sont autant de questions vives de société. Elles nous rappellent que si les nutriments désignent ce
dont à besoin l'organisme, l'aliment est toujours à penser en lien avec les mangeurs, leurs
imaginaires, leurs représentations, leurs nécessités et ce depuis la préhistoire. C'est ce que
l'exposition du Musée de l'Homme à Paris en 2020 a cherché à démontrer en proclamant « Je
mange donc je suis !»3.

1
Nourrir la planète, Energie pour la Vie, présentation sur le site du Bureau International des Expositions,
https://www.bie-paris.org/site/fr/2015-milan
2
« Le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde a atteint 828 millions dans le monde », publié le 7 juillet
2021 sur le site de l'UNICEF, https://www.unicef.fr/article/rapport-de-lonu-le-nombre-de-personnes-souffrant-de-la-
faim-dans-le-monde-atteint-828
3
Je mange donc je suis , exposition du 16 octobre 2019 au 31 août 2020, https://www.museedelhomme.fr/fr/exposition-
evenement/je-mange-donc-je-suis

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1. L A « REVOLUTION » DU NEOLITHIQUE
Longtemps, le Néolithique a été présenté aussi bien dans les livres d'histoire que dans la culture
populaire comme un moment de rupture brutale et totale dans l'histoire de l'humanité.
L'expression est popularisée par le préhistorien australien Gordon Childe dans l'entre-deux-guerres
pour désigner ce moment où l'Homme serait passé de chasseur-cueilleur à agriculteur sédentaire.
Aujourd'hui, les découvertes archéologiques et les études des préhistoriens ont largement nuancé
cette interprétation, préférant parler de néolithisation. Cependant, pour reprendre les termes de
Jean-Paul Demoule, préhistorien français, si l'évènement s'est étalé sur au moins un ou deux
millénaires, il faut souligner son aspect révolutionnaire par le fait qu'il touche en même temps des
régions du monde qui ne sont pas pour autant encore liées4.

1.1.Le passage d’une économie de prédation à une économie de


production

Le découpage périodique de la Préhistoire met l'accent sur deux temps importants de l'histoire
de l'Homme, la Paléolithique (de trois millions d'années à 10.000 avant notre ère) puis le
Néolithique. Dans la diversité des régimes alimentaires actuels, il est apparu dans un certain
nombre de publications et surtout sur les réseaux sociaux le régime dit « paléo ». Il propose de
revenir aux pratiques alimentaires des temps anciens principalement basées sur la consommation
de viande et de certaines protéines végétales. Céréales et produits laitiers en sont bannis. Très
critiqué pour les carences que ce régime peut apporter, il est tout important de souligner qu'il
repose sur une représentation assez fantasmée de l'alimentation des Hommes du paléolithique. Ce
que les préhistoriens savent, c'est que les populations du Paléolithique sont principalement
nomades car les sites archéologiques retrouvés et étudiés montrent des occupations saisonnières
et pourraient ainsi correspondre à des périodes de chasse où une espèce en particulier attire
l'attention du groupe5. Ces espèces chassées sont principalement des herbivores, du grand
mammifère comme le mammouth aux petites proies comme les lapins, les oiseaux mais aussi les
poissons ou les coquillages. Ainsi à la chasse s'ajoute la pêche mais aussi la cueillette et la collecte
de végétaux ou de graines. L'ensemble de ces moyens mis en œuvre pour se nourrir montre une

4
« Néolithique, une révolution mondiale », JP Demoule, in L'Histoire magazine, n° 492, Février 2022.
5
« L'alimentation au Paléolithique et au Mésolithique », Sandrine Costamagno et Camille Deaujard in QUELLIER Florent
(ss dir) , Histoire de l'alimentation , collection Références, Edition Belin, Paris, 2021.

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économie de prédation, qui repose sur la capture de ressources sauvages mais aussi une économie
de subsistance. Les denrées alimentaires doivent nourrir le groupe. Les Hommes du Paléolithique
pratiquent la boucherie : les proies sont dépecées pour récupérer la viande sur l'ensemble du
squelette. De même, les charognes trouvées ne sont pas pas mises de côté et peuvent être
récupérées pour nourrir le groupe : le site de La Polledrara en Italie abrite des carcasses d'éléphants
antiques morts naturellement qui portent des traces d'utilisation humaine. En effet, les groupes
vivant dans cette région du Latium se sont servis des carcasses comme d 'une ressource alimentaire
mais aussi pour l'industrie des os. Ainsi, les traces archéologiques montrent qu'avant 10.000 av.n.è,
certaines régions connaissent déjà la pratique du stockage afin d'avoir des réserves de viande en
cas de chasses infructueuses. Les Hommes du Paléolithique conserve grâce au froid mais
connaissent déjà la pratique du séchage et du fumage.

La constitution de ces petits stocks de nourriture explique en partie la sédentarisation


progressive de certaines populations tout d'abord au Proche-Orient, puis en Asie, en
Mésoamérique et en Afrique avant de toucher l'Europe. Au Proche-Orient, des groupes humains se
sont sédentarisés avant 10.000 av.n.è et se sont installés dans de petits hameaux permanents. Pour
autant, ils continuent à pratiquer la chasse et la cueillette ce qui fait que leur économie de prédation
est toujours présente. Vers 9.500 av.n.è, différents groupes humains mettent en culture des
céréales et des légumineuses sauvages : pour conserver les production, les zones de stockage sont
agrandis et des installations pour transformer les récoltes apparaissent comme les meules.
L'élevage se développe à partir de 8000 av.n.è avec la constitution de petits troupeaux de mouflons,
de chèvres et de sangliers. Pour autant, la chasse ne s'arrête pas. La préhistorienne Stéphanie
Bréhard estime qu'il faut attendre 7500 av.n.è pour que l'économie de production s'installe de
manière définitive au Proche-Orient soit près de deux mille ans après les premières mises en culture
de céréales.

La mise en en place d'une économie de production transforme les rapports sociaux au sein des
communautés villageoises. La sédentarisation a favorisé la division et la hiérarchisation de la
société autour des enjeux alimentaires : il devient nécessaire de gérer les stocks pour assurer la
subsistance de l'ensemble de la communauté tout comme il faut les protéger des nuisibles aussi
bien naturels que des autres groupes. Pour l'ethno-archéologue Brian Hayden, la sédentarisation
et la pratique du stockage peuvent être à l'origine des inégalités sociales : les surplus alimentaires
sont sous la responsabilité des chefs de village qui, par ce biais, possèdent le pouvoir mais ont aussi
le moyen de le garder en faisant pression ou en instituant des relations de privilèges6.
L'alimentation est bien un enjeu politique et social fort dans la construction de ces premières
communautés sédentaires mais il faut bien souligner que le chasseur-cueilleur y accorde déjà une
grande importance.

6
L'homme et l'inégalité. L'invention de la hiérarchie dans la Préhistoire, Brian Hayden, CNRS Editions, Paris, 2008.

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1.2. Une alimentation principalement carnée ?

Dans son roman Les Racines du ciel paru en 1956, Romain Gary écrit : « La viande ! C'était
l'aspiration la plus ancienne, la plus réelle, et la plus universelle de l'humanité. »7. En effet,
l'alimentation des groupes humains de la Préhistoire est une alimentation principalement carnée :
l'animal est une ressource complète, à la fois alimentaire, technique (dès le Paléolithique, une
industrie se met en place avec le traitement des ossements, bois et dents) et symbolique. Les
Hommes préhistoriques sont des mangeurs de viande et il s'agit durant la période qui couvre le
Paléolithique et le Néolithique d'une véritable « conquête de la viande » pour reprendre
l'expression de Jean-Pierre Williot et Gilles Fumey. Nous avons vu précédemment que la chasse est
ainsi une des principales sources de subsistance avant que l'élevage ne s'impose. Il faut alors
souligner que les groupes ne se contentent pas de récupérer exclusivement les chairs animales. Les
Hommes du Paléolithique sont ainsi de grands mangeurs de graisse : les ossements des animaux
sont broyés afin de récupérer la moelle osseuse riche en graisse. Cela peut s'expliquer par les
difficultés, notamment en période hivernale, pour les groupes humains de trouver un gibier riche.
L'alimentation reposant alors principalement sur des viandes maigres, il devient nécessaire pour
les groupes de pallier la malnutrition de récupérer les denrées riches de l'animal. En effet, les traces
archéologiques montrent que ces populations pouvaient souffrir de périodes de pénuries
prolongées. Pour autant, d'autres explications peuvent expliquer la recherche de graisse animale :
les rites autour de l'animal qui se développent au sein des groupes humains mais aussi la croissance
démographique dans certaines régions comme au Proche-Orient qui pousse à trouver des aliments
de meilleure qualité. Le point sur lequel les préhistoriens ne parviennent pas à se prononcer de
manière définitive concerne la manière d'ingérer cette viande : les traces archéologiques laissent à
penser que la viande est consommée crue car il n'existe pas de traces de feu. C'est justement au
Néolithique avec l'apparition des foyers que des hypothèses plus affirmées sur la manière de
consommer la viande peuvent être formulées.

En effet, les premières expériences d'élevage participent de cette conquête de la viande8. Les
principales espèces animales qui sont domestiquées par les communautés du Néolithique sont le
mouton, la chèvre puis le bœuf et le cochon. La viande de ces animaux est de moins en moins
consommée crue : la maîtrise du feu et surtout la sédentarisation transforment les habitudes
alimentaires. Surtout la cuisson réduit le temps de préparation mais aussi de mastication
représentant alors un gain d'énergie pour les Hommes. La viande peut être tout simplement

7
Cité in « L'alimentation au Paléolithique et au Mésolithique », Sandrine Costamagno et Camille Deaujard in QUELLIER
Florent (ss dir) , Histoire de l'alimentation , collection Références, Edition Belin, Paris, 2021.
8
« La révolution de l'élevage », Marie-Pierre Horard-Herbin in L'Histoire magazine n°466, décembre 2019
https://www.lhistoire.fr/la-r%C3%A9volution-de-l%C3%A9levage

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bouillie mais aussi cuite au feu, voire fumée, pour être conservée. C'est l'utilisation de ces
différentes méthodes qui participent de la révolution néolithique à partir de 7000 av.n.è.

Pour autant, le Néolithique se caractérise avant tout par la végétalisation de l'alimentation


sortant ainsi l'Homme de la Préhistoire de son statut de simple carnivore. En effet, bien avant
l'élevage, c'est la mise en culture des céréales qui marque le basculement vers les sociétés de
premiers paysans. Les plus anciennes plantes cultivées au Proche-Orient sont l'amidonnier,
l'engrain et l'orge pour les céréales, et la lentille, le pois chiche ou l'ers pour les légumineuses. Ces
plantes domestiquées arrivent jusqu'en Europe ou d'autres espèces sont mises en culture comme
le lin mais sont aussi cultivées en Afrique et en particulier dans la vallée du Nil. Il est cependant
difficile de quantifier la part du végétal et de l'animal : les travaux de certains archéozoologues sur
des sites précis permettent d'avoir une estimation. Ainsi, un habitat retrouvé sur les rives du lac de
Zurich conduit à formuler l'hypothèse que pour une occupation d'une durée de 25 ans,
l'alimentation devait se composer à moitié de céréales, un tiers d'aliments d'origine animale et le
reste de la collecte de fruits sauvages. Plus que de viande, la diversification alimentaire du
Néolithique montre que les populations introduisent dans leur alimentation les produits laitiers. Il
semble avéré qu'à partir de 7000 av.n.è, en Europe, la diffusion du mode de vie néolithique
s'accompagne de techniques permettant l'exploitation du lait. Dans tous les cas, ce qui marque la
révolution alimentaire du Néolithique, c'est la plus grande diversification des aliments consommés
du fait de la possibilité de stocker les récoltes de céréales ou de légumineuses ainsi que de pouvoir
avoir accès à des sources de protéines animales plus stables avec l'élevage.

1.3. Domestiquer la nature

La néolithisation est révolutionnaire en ce qu'elle installe de manière définitive de nouvelles


façons de produire les aliments et qu'elle bouleverse les relations sociales au sein des
communautés. Le dernier point que l'on pourrait souligner pour soutenir l'idée d'une révolution
mondiale est le suivant : par la mise en culture et l'élevage, les Hommes ont appris à domestiquer
la nature. En effet, pour sortir du principe de la subsistance et garantir une alimentation plus
régulière, il faut maîtriser la nature mais pouvoir aussi créer les outils nécessaires à cette maîtrise.

Les Hommes du Paléolithique possèdent déjà un certain nombre de techniques : nous avons
pu voir l'importance de la maîtrise du feu mais il ne faut pas oublier l'utilisation des silex en pierre
qui sont de plus en plus élaborés développant ainsi tout un outillage. La chasse s'organise souvent
comme une grande battue collective pour rabattre les troupeaux vers des pièges naturels qui ont
été au préalable repérés. Mais avec la finesse de l'outillage, les chasseurs peuvent s'attaquer au
gibier plus petit, affiner les techniques de pêche et récolter de manière plus efficace les végétaux.

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Le Néolithique voit le perfectionnement de ces techniques : plutôt que de créer les outils
par percussion, les Hommes découvrent la technique du polissage qui permet un outillage plus
précis. Ainsi avec la mise en culture et l'élevage, ce sont des techniques agricoles qui apparaissent.
Celles-ci s'adaptent à l'environnement, aux outils possédés et peuvent changer selon les besoins.
Pour stocker ou consommer les aliments, la poterie en terre cuite est développée ainsi que la
céramique. Les archéologues ont retrouvé des restes de faisselles néolithiques sur un site en
Pologne : il s'agit de fragments de céramiques percées datant de la fin VIe millénaire av.n.è et qui
présente des résidus laitiers.

Enfin, l'agriculture néolithique est révolutionnaire car elle met en place un système qui
repose sur la combinaison de cultures de différentes espèces végétales en lien étroit au fur et à
mesure avec l'élevage9. La diversité alimentaire que connaît les communautés sédentaires provient
de cette variété de cultures qui s'installent très rapidement au sein des villages. Les terres cultivées
se trouvent souvent à proximité des habitations et sont de faibles superficies mais très entretenues.
Les premiers paysans utilisent régulièrement du fumier, en grande quantité, pour s'assurer des
récoltes. C'est le développement d'un savoir-faire agricole qui participe à la domestication de la
nature : les espèces sauvages sont choisies, transformées et adaptées. Les animaux domestiqués
sont rapidement enfermés dans des enclos, les contraignant physiquement. Si des traces montrent
que le chien est domestiqué dès 28 000 av.n.è, vers 6500, il est attesté qu'il est présent pour
protéger les habitations, les cultures et surtout les enclos. La dernière domestication est celle des
arbres fruitiers : au début du Néolithique, la cueillette et la collecte sont encore très présents. Les
communautés cueillent les fruits des arbres sauvages locaux. A partir du IVe millénaire av.n.è, les
Hommes développent la culture de l'olivier, de la vigne, du figuier et du palmier-dattier. A la fin de
ce même millénaire, la vigne s'est répandue dans le Proche-Orient.

La « révolution » néolithique ne se définit donc pas par un changement brutal de pratiques


puisque l'évolution de l'alimentation préhistorique est longue mais plutôt par l'adoption de manière
définitive dans plusieurs régions du monde de nouvelles pratiques alimentaires et surtout de
nouveaux modes de production. Ces changements ont permis à ces sociétés d'avoir des
rendements plus élevés, du surplus et ainsi de sortir de l'économie de subsistance et de la peur de
la faim. Ils ont surtout marqué le début d'une longue histoire des révolutions agricoles.

9
Histoire des agricultures du monde. Du néolithique à la crise contemporaine, Marcel Mazoyer, Laurence Roudart,
Editions du Seuil, Paris, 2004.

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2. L ES GRANDES MUTATIONS DE L ’ AGRICULTURE

Lorsque la Préhistoire se termine avec l'apparition de l'écriture vers 3500 av.n.è, les Hommes se
sont organisés au fur et à mesure en cités-Etats qui regroupent une densité plus importante de
population. Si les rendements agricoles du Néolithique sont plus importants, nourrir tous les
hommes, femmes et enfants d'une cité devient un impératif politique. L'activité agricole est alors
au cœur de l'organisation de ces Etats. La croissance démographique s'accélère malgré les
épidémies, les guerres ou les crises de toute nature qui frappent les sociétés dans le temps long de
l'histoire. L'agriculture doit alors s'adapter pour répondre à des besoins alimentaires toujours plus
importants : ce sont les révolutions agricoles.

2.1 Nourrir les cités

L'approvisionnement des villes apparaît rapidement comme une nécessité pour répondre
aux besoins des habitants mais aussi comme un enjeu politique important pour les élites. Les plus
anciennes tablettes écrites retrouvées sur le site de la cité d'Uruk dans le sud de l'Irak actuel sont
des listes de denrées agricoles et de bétails accompagnées d'une comptabilité montrant
l'organisation précise des stocks de nourriture. Les premiers Etats et premières cités possèdent
leurs terres et troupeaux : ce sont de grands domaines associés à des palais ou à des temples. Les
habitants y travaillent tout en y étant logés et nourris. Ce sont déjà de grands espaces de production
qui peuvent aussi transformer les ressources avant de les commercialiser. On y trouve les premières
techniques d'irrigation notamment dans les cités installées dans les vallées comme celle du Nil.

L'Antiquité gréco-latine est préoccupée par les mêmes nécessités que les premières cités-
Etats de Mésopotamie. Il faut parvenir à ravitailler Athènes ou Rome en nourriture notamment la
« triade méditerranéenne »10 composée du blé, de la vigne et de l'olivier. Pour répondre aux besoins
en denrées alimentaires toujours plus importants, l'activité agricole domine les empires. Dans
l'Empire romain du Ier et II s ap.J-.C. où la population est estimée à environ 60 millions d'habitants,
les historiens estiment que les trois quarts voire les quatre cinquième travaillaient dans
l'agriculture. En particulier, les esclaves forment une main d'œuvre agricole non négligeable et
travaillent dans les villas, ces grands domaines agricoles que Caton décrit dans son traité De
agricultura écrit au IIe siècle av.n.è. A cette date, les paysans de l'Antiquité pratiquaient déjà la
jachère c'est-à-dire une terre qui reçoit une suite de labours afin de faire remonter à la surface les

10
« La nourriture romaine au quotidien », Christophe Badel, in QUELLIER Florent (ss dir) , Histoire de l'alimentation ,
collection Références, Edition Belin, Paris, 2021.

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mauvaises graines et ainsi la préparer au mieux pour recevoir les nouvelles semences11. Cela montre
l'évolution des pratiques agricoles pour répondre à une demande alimentaire importante mais aussi
la connaissance agricole : il faut mettre en place une rotation des cultures pour assurer la fertilité
de la terre.

Avec la conquête territoriale, ces grandes cités-Etats vont voir leur alimentation se
transformer. La conquête apporte la découverte de nouveaux produits alimentaires : au Ier siècle
av.n.è, la cerise ou le melon sont introduits à Rome depuis la Grèce et l'Orient. Souvent la
construction de l'empire donne aussi accès à des denrées qui existaient déjà mais qui sont de
meilleure qualité : cela met en concurrence les exploitations agricoles. Pour continuer à exister sur
le marché alimentaire, les propriétaires des domaines agricoles doivent être en capacité de
répondre à la demande aussi bien en termes de quantité qu'en qualité des habitants de la Cité. Avec
le mouvement d'urbanisation, celle-ci est de plus en plus forte. Autour de Rome, des « ceintures
maraîchères » se mettent en place où l'on retrouve aussi des petits élevages. Ces ceintures
perdurent au Moyen Age et entourent les villes tandis que la seigneurie et les monastères sont aussi
des domaines agricoles. La pratique de la jachère traverse l'Empire romain et est utilisée par les
paysans médiévaux.

L'agriculture est surtout transformée par la mise en place d'un grand commerce de denrées
alimentaires. La Méditerranée antique est traversée de nombreux flux alimentaires et le système
de routes dans l'empire romain montre comme est pensée l'organisation du système de
ravitaillement. Athènes est tributaire de l'exportation de blé pour nourrir sa population : le port du
Pirée est au cœur de cette organisation, la route menant à la cité étant protégée par les Longs Murs.
Au Moyen Age, les routes terrestres sont longues : la route des épices en est l'exemple le plus
marquant faisant du Moyen-Orient un lieu de production mais aussi de distribution des denrées
alimentaires. Surtout, ce système conduit à la spécialisation agricole des régions de production dès
l'Antiquité et qui s'affirme au Moyen Age et dans les Temps modernes.

2.2 Défricher la campagne

Le Moyen Age est associé traditionnellement à une révolution agricole. Si la jachère est une
pratique connue et déjà exploitée, l'Europe du Nord-Ouest connaît de profondes mutations de son
agriculture. L'historien français Georges Duby parle « d'une immense conquête agricole » pour

11
La troublante histoire de la jachère, Pierre Morlon et François Sigaut, Coédition Quae et Educagri, 2008.

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décrire la Chrétienté médiévale au moment où se dressent les premières cathédrales12. C'est


l'utilisation de nouveaux outils qui expliquent cette révolution : le char à roue et surtout la charrue
qui vient remplacer l'araire permettent de vrais labours. Ils montrent aussi le lien entre cultures
céréalières et élevage : le bétail a un rôle crucial dans les travaux des champs. Associées à la rotation
triennale, ces nouvelles techniques permettent d'accroître considérablement la production et la
productivité agricole et conduit à une expansion économique, démographique et urbaine sans
précédent qui s'arrête avec l'épidémie de peste noire en 1347.

Le calendrier agricole, Rustican ou Livre des proffiz champestres et ruraulx, 1373.

Le temps des paysans est rythmé par les travaux des champs associés aux saisons. Ces
innovations techniques s'accompagnent d'une extension de la surface agricole utilisée. Ce
mouvement dit des « grands défrichements »13 atteint son apogée entre les XIe et XIIIe siècles. Les
paysans défrichent tout d'abord autour de leurs villages : plus que des forêts, ce sont des friches ou

12
Le Temps des cathédrales, Georges Duby, 1976.

13
Expression de l'historien Robert Fossier.

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des broussailles qui sont enlevées pour laisser place à des espaces cultivés. Ce mouvement peut se
faire sans l'autorisation du seigneur. C'est au XIIe siècle que le seigneur voit un intérêt économique
dans ses défrichements : il y trouve un moyen d'agrandir sa seigneurie mais aussi d'avoir plus
d'hommes à leurs services. Les forêts sont alors détruites pour y installer des surfaces cultivées mais
aussi des villages comme dans l'est du royaume de France sur le plateau de Langres. Au XIIIe siècle,
les défrichements sont de nouveau individuels parfois accompagnés d'un peuplement moins dense
et que l'on retrouve dans la toponymie à travers le nom de « clos » ou de « plessis ».

Avec cette révolution agricole, les rapports sociaux entre paysans et seigneurs se sont aussi
transformés. Tout d'abord, les conditions de travail de la paysannerie ne sont plus les mêmes avec
l'introduction de nouvelles techniques. Les seigneurs demandent davantage de corvées aux
paysans laboureurs car ce sont eux qui possèdent les outils permettant de meilleurs rendements :
la charrue et les animaux de trait. Les autres paysans de la seigneurie voient un certain nombre de
leurs corvées, celles qui peuvent être accomplies par la charrue, être remplacées par des
redevances. Avec les défrichements, les serfs et les paysans libres ont vu leurs statuts se
rapprocher14. En effet, les serfs en participant aux opérations de grands défrichements avaient la
possibilité d'acquérir une terre. Au XIIe siècle, les affranchissements de serfs se sont ainsi multipliés
en France. Surtout, paysans libres et non libres sont soumis aux redevances que sont les banalités.

Le rapport aux villes se transforme aussi : si la production des ressources agricoles demeure
une prérogative des campagnes, les villes deviennent de plus en plus les lieux de transformation et
surtout de vente. Les autorités urbaines sont ainsi soucieuses de veiller à la quantité et à la qualité
des denrées alimentaires qui arrivent en ville. D'autant plus que les villes sont touchées au Moyen
Age par des disettes et il leur devient nécessaire de s'assurer de bons circuits d'approvisionnement.
Le mouvement communal en Europe chrétienne à partir de la fin du XIe siècle accentue ce
phénomène : l'autonomie que certaines villes acquièrent, et le pouvoir associé que les autorités
communales obtiennent, demandent aux élites de penser un « bon gouvernement » où la question
de l'approvisionnement est un enjeu majeur.

2.3 Mécaniser les activités agricoles

Le XVIIIe siècle apparaît comme une nouvelle rupture dans la longue histoire de
l'agriculture. Depuis les grands défrichements et l'utilisation de la charrue, l'agriculture connaît peu

14
Op.cit. Histoire des agricultures du monde. Du néolithique à la crise contemporaine, Marcel Mazoyer, Laurence
Roudart, Editions du Seuil, Paris, 2004.

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de transformations. Ce qui bouleverse les canaux d'alimentation, c'est la capacité à établir des
relations avec différentes parties du monde : les Temps modernes sont ceux du grand commerce
qui s'étend après 1492 vers le continent américain. De nouvelles denrées apparaissent dans
l'alimentation européenne comme la tomate, la pomme de terre, le chocolat ou le sucre de canne.
L'alimentation se mondialise toujours plus. Cependant, les Européens se nourrissent encore
principalement de céréales et en particulier de blé.

A partir de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, l'école de pensée des Physiocrates,


représentée en France par François Quesnay, défend la liberté du commerce et en particulier du blé
et critique ainsi le colbertisme en vigueur dans le royaume de France depuis Louis XIV15 et
notamment la « police des grains ». Il faut laisser la possibilité aux producteurs français d'exporter
leur surplus de blé ou de produits agricoles afin d'en tirer un « bon prix ». Cette liberté de commerce
permettrait alors d'augmenter la production agricole mais aussi les revenus des exploitants. Plus
que la petite exploitation, les physiocrates défendent le développement d'une grande culture. Ils
s'inspirent en ce sens du modèle anglais : au XVIe siècle, les grands propriétaires terriens expulsent
les paysans pour exploiter leurs domaines sur un mode capitaliste. C'est le « mouvement des
enclosures »16. Les paysans deviennent alors des « salariés » agricoles mais la main d’œuvre passe
entre 1500 et 1750 de 70 % à 35 %. C'est l'élevage qui s'impose comme l'activité agricole majeure :
les vaches et les moutons forment le gros du cheptel. Les rendements augmentent rapidement et
c'est une « révolution agricole » que vit alors la Grande-Bretagne.

Ces résultats s'expliquent aussi par la fin du système de jachère qui a permis une plus grande
production. Pour autant, l'utilisation de la traction animale limite la productivité. La machine à
vapeur de James Watt à la fin du XVIIIe siècle, perfectionnement des travaux du français Denis
Papin et du britannique Thomas Newcomen, marque une rupture et inaugure le temps de
l'industrialisation. Si aujourd'hui, les études historiques montrent que son utilisation est d'abord
limitée17, la machine de Watt est cependant essentielle dans la mécanisation progressive de
l'activité agricole. En effet, dès la première moitié du XIXe siècle, l'industrie s'est mise à produire
des nouveaux matériels à traction animale plus performants que les anciens ainsi qu'un nombre
assez important de nouvelles petites machines. Ce nouvel outillage a permis au travailleur agricole
d'être plus productif. Ces nouveaux outils sont vite adoptés de l'autre côté de l'Atlantique par les
fermiers américains. Il faut cependant attendre la fin du XIXe siècle pour voir la machine à vapeur
remplacer la force animale dans les champs : la locomobile, ancêtre du tracteur, est peu utilisée car
elle est lourde, peu pratique et surtout très chère. C'est l'invention du moteur à explosion qui va voir
l'accélération de la mécanisation de l'activité agricole.

15
« La pensée des physiocrates », http://ses.ens-lyon.fr/articles/les-grands-themes-25510#section-2
16
« Que s'est-il passé en Grande-Bretagne ? », Fabrice Bensimon in L'Histoire, collections 91, avril-juin 2021.
17
« La machine à vapeur démythifiée », Liliane Hilaire-Perez, François Jarrige, in L'Histoire, collections 91, avril-juin 2021.

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Les modernisations de l'agriculture sont encore plus visibles après la Seconde Guerre
mondiale notamment en France. Si la période des Trente Glorieuses voit surtout l'explosion de
l'activité industrielle et des services, l'agriculture connaît de nombreuses mutations. Pour la IVe
République, l'agriculture française doit être en capacité de nourrir l'ensemble de la population. Les
machines agricoles sont de plus en plus utilisées sur des surfaces agricoles toujours plus grandes.
C'est à nouveau la culture céréalière et notamment le blé qui est au cœur de ces transformations.
Cette mécanisation des travaux agricoles conduit à une diminution de la main-d’œuvre et à un
bouleversement complet de la paysannerie comme le raconte l'écrivain Alain Prévost en 1966 dans
son livre Grenadou, paysan français où il revient sur la vie et le parcours d'Ephraïm Grenadou,
paysan de la Beauce18.

Cette mécanisation de l'agriculture participe aussi au phénomène de l'exode rural qui voit
partir s'installer en ville, les populations rurales. L'Europe voit l'accélération de son urbanisation à
partir de la deuxième moitié du XIXe siècle. Cependant, aujourd'hui, les pays émergents et en
développement connaissent les mêmes bouleversements. En effet, à partir des années 1990, des
pays comme l'Inde, le Brésil ou encore le Vietnam lancent de grandes politiques de modernisation
agricole afin de parvenir à nourrir leurs populations toujours plus importantes. Ces programmes
appelés « révolutions vertes » associent des objectifs de production et des transformations
complètes de leurs systèmes agricoles : recours à l'irrigation, introduction des machines dans le
travail agricole, utilisation de semences plus performantes avec l'utilisation des biotechnologies sur
des surfaces plus grandes… C'est le passage d'une agriculture dite vivrière à une agriculture
intensive et commerciale qui est mise en place dans ces Etats, suivant ainsi le modèle occidental.

Avec la fin de la Guerre froide, l'agriculture s'est insérée dans les flux de la mondialisation. Le blé
est côté à la bourse de Chicago, les États sont de plus en plus dépendants des importations de
denrées alimentaires tandis que la population active agricole diminue et connaît une baisse de son
niveau de vie. Les petits agriculteurs notamment dans les pays des Suds sont ceux qui connaissent
le plus la faim. Cependant, dans les pays développés où la part d'agriculteurs ne représente que
quelques pour cents, la situation économique et sociale est aussi marquée par des difficultés et la
pauvreté. Ainsi, la faim persiste dans le monde malgré les progrès techniques et scientifiques qui
auraient pu faire espérer son éradication.

18
On peut aussi penser à l'ouvrage d'Henri Mendras, La fin des paysans, paru en 1967.

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3. L A FAIM , CAUSE DES REVOLTES ?

« Au bout de quinze jours de Lager [camp], je connais déjà la faim réglementaire, cette faim
chronique que les hommes libres ne connaissent pas, qui fait rêver la nuit et qui s'installe dans toutes
les parties de notre corps ». Ces mots de Primo Lévi tiré de son ouvrage Si c'est un homme
témoignent de la dureté de la vie à Auschwitz, centre de mise à mort nazi durant la Seconde Guerre
mondiale, mais sont aussi une description bouleversante de ce qu'est la faim. Celle-ci est la
sensation que fait éprouver le besoin ou l'envie de manger19. Elle est ainsi le résultat d'un non accès
à la nourriture : soit pour des raisons qui sont parfois hors de portée des sociétés humaines comme
les catastrophes climatiques qui saccagent les récoltes, soit la conséquence d'actions menées par
des Hommes sur leurs congénères (siège, embargo, blocus etc.). Dans l'histoire, la faim apparaît
comme un facteur de désordre : elle remet en question les structures politiques et sociales, désunit
le corps social et peut mettre en danger les États.

3.1 La faim, une cause de désordre social et politique

Nous l'avons vu précédemment, l'alimentation est un enjeu politique important : une


population qui a faim est plus instable et peut apparaître pour les élites comme un danger capable
de remettre en cause leur pouvoir et l'organisation politique. Ainsi dans la Rome antique, afin que
la plèbe soit satisfaite le poète Juvénal critique l'évergétisme des empereurs romains qui offrent
panem et circenses, du pain et des jeux du cirque. Cependant dès la période républicaine, les
autorités romaines mesurent l'importance de nourrir correctement les habitants de la Cité et des
distributions frumentaires sont mises en place, les frumentationes. Ces distributions apparaissent
comme un droit du citoyen car elles font partie des profits qu''il tire des conquêtes menées par
l'armée romaine. Si la Cité connaît peu de famines, des crises de substances apparaissent
notamment lors des périodes d'instabilité politique comme à la fin des guerres civiles du Ier siècle
av.n.è. Il faut en effet distinguer « la famine qui est la pénurie aiguë de denrées vitales entraînant
souvent la mort » et la disette qui est une « réduction provisoire de la quantité d'aliments
disponibles »20. Surtout, ces distributions sont à destination des habitants de la ville et négligent
ceux des campagnes. Durant les périodes de disette, le peuple n'hésite pas à manifester son
mécontentement. Ces émeutiers sont souvent de petits artisans ou de petits commerçants : ils

19
Définition du CNRTL , https://www.cnrtl.fr/definition/faim
20
« La politique alimentaire des cités romaines», Christophe Badel, in QUELLIER Florent (ss dir) , Histoire de
l'alimentation , collection Références, Edition Belin, Paris, 2021.

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ferment leurs boutiques et leurs ateliers. Les rumeurs circulent autour d'un possible « complot de
famine » organisé par les élites aristocratiques. Il ne s'agit pas cependant de tuer ceux désignés
comme responsables mais de provoquer une réaction politique. De même, les autorités utilisent
rarement la violence pour réprimer ces manifestations. Cependant, elles montrent bien qu'aussi
bien du côté des dirigeants que des administrés, le risque de famine est une préoccupation cruciale
qui peut déstabiliser le contrat social.

A l'époque contemporaine, de grandes famines ont pu avoir comme conséquences la


déstabilisation totale d'une région et de la population qui y vit. C'est le cas de la famine qui touche
l'Irlande à partir de 1845 et jusqu'en 1852. Le territoire irlandais, membre du Royaume-Uni depuis
l'Acte d'Union de 1801, voit l'apparition du mildiou qui anéantit les cultures de pomme de terre. Sur
8,5 millions d'habitants, un million d'Irlandais meurent pour les deux tiers de faim et les autres des
suites des maladies qui se développent avec la famine. Deux millions prennent le chemin de
l'émigration. Ce bilan s'explique aussi par le choix du gouvernement britannique de mobiliser peu
de moyens pour aider les Irlandais. Sir Charles Wood, chancelier de l'Echiquier, pense alors « seul
un passage par le purgatoire de la misère et de la famine peut assurer en bout de course un semblant
de prospérité à l'Irlande »21. Les migrants prennent d'abord le chemin de la Grande-Bretagne et
s'installent dans les villes industrielles dans des conditions de forte insalubrité et surtout de grande
pauvreté. De nombreux départs plus lointains sont alors envisagés vers l'Amérique du nord (Etats-
Unis et Canada), l'Australie ou la Nouvelle-Zélande. La Grande famine bouleverse profondément
la société irlandaise. Elle nourrit des tensions fortes entre l'île et sa voisine britannique, ce qui a
conduit en 1997 le premier ministre d'alors, Tony Blair, a présenté les excuses du gouvernement
pour l'absence d'aide montrant à cette occasion la vivacité des mémoires sur cet épisode.

Si l'Etat britannique a peu agi conduisant à un désordre social en Irlande, dans d'autres
situations, les famines sont organisées volontairement pour étouffer des revendications. Ainsi les
grandes famines soviétiques de l'été 1931 à l'été 1933 sont le fruit d'une confrontation en l'Etat
soviétique et les paysans. Sept millions d'hommes et de femmes meurent, principalement des
paysans : quatre millions en Ukraine, 1,5 millions au Kazakhstan et autant en Russie22. Par la faim,
Staline a cherché a brisé les résistances paysannes qui s'étaient organisées dans ces territoires face
aux réformes et aux nouvelles normes agricoles et sociales qui ont bouleversé les structures
traditionnelles des régions concernées. Au contraire du gouvernement britannique, l'Etat russe est
aujourd'hui toujours silencieux face à ces famines alors que l'Ukraine les considère comme une
politique génocidaire.

21
La Grande Famine en Irlande, documentaire de R. Magan, diffusé le 30 novembre 2021 sur Arte.
22
Les grandes famines soviétiques, Nicolas Werth, Que-sais-je ? , Paris, 2020.

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Dans tous ces exemples, la famine est vue ou est utilisée comme une cause de désordre social
et politique. Le risque est alors mesuré par les autorités qui tentent d'encadrer la faim pour assurer
la stabilité d'un État ou la domination des populations.

3.2 Les émeutes de la faim, moyens de revendication

La faim peut aussi provoquer des révoltes et des révolutions menées par les populations
malgré les décisions prises par les autorités pour éviter ces débordements. Les manifestations,
appelées « émotions » sous l'Ancien régime, sont alors un moment de remise en cause du système,
vu comme inefficace pour instaurer la sécurité alimentaire. En effet, l'implication dès le Néolithique
des autorités au pouvoir dans la gestion des ressources les désigne comme les responsables des
moments de disette. On peut ainsi penser aux journées révolutionnaires du 5 et 6 octobre 1789
menées par les femmes de Paris et en particulier celles que l'on nomme les « Dames des Halles »,
chargées de vendre la nourriture sur les marchés parisiens. La Gazette nationale rapporte leur
demande à travers les mots de leur porte-parole, le révolutionnaire Maillard :

« Nous sommes venus à Versailles pour demander du pain, et en même temps pour faire punir les
gardes du corps, qui ont insulté la cocarde patriotique. […] Il est nécessaire pour le bien de la paix,
d’engager sa majesté à prononcer le renvoi de ce régiment qui, dans la disette cruelle qui afflige la
capitale et les environs, augmente les malheurs publics ; ne fût-ce que par l’augmentation nécessaire
qu’il occasionne dans la consommation journalière. »23

On voit bien ici que la revendication alimentaire s'accompagne de revendications politiques


le jour même où Louis XVI refuse de signer la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen. La
garde royale est non seulement un ennemi politique qui ne respecte pas les volontés du peuple mais
aussi un poids économique alors que le prix du pain ne baisse pas dans la capitale faisant planer le
risque de famines pour les plus pauvres des habitants.

Avant la Révolution française, les populations paysannes se sont révoltées contre les
représentants d'un système qu'ils considèrent comme responsables de leur insécurité alimentaire.
En effet, l'historien français Jean Nicolas, auteur d'une œuvre importante, La Rébellion française
(2002), dénombre entre 1661 et 1789 8500 événements rébellionnaires dans la France d'Ancien
Régime souvent contre l'impôt et pour le pain. Son étude montre qu' « au deuxième rang dans le
répertoire émeutier, on trouve les troubles de subsistances. Gels tardifs, tempêtes, étés pourris ruinent

23
« L'évènement le plus important de 1789 : la Marche des Femmes », Guillaume Mazeau, 14 octobre 2019,
https://www.retronews.fr/politique/chronique/2019/10/14/1789-marche-des-femmes

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les récoltes et enclenchent à chaque fois le cycle disette-cherté : au moment de la soudure, entre mars
et juillet, les prix bondissent sur les marchés, car le blé de l’année est encore sur pied et les greniers déjà
vides. C’est alors que les villes remuent et même les villages. La foule renverse les étals et emporte le
pain, elle attaque les dépôts des marchands et exige des autorités municipales l’annonce d’une baisse
des prix, ce qu’on appelait la « taxation ». Schéma plus de mille fois répété »24. Lorsque la disette est
grande, la révolte peut dépasser le village et s'étendre à toute une région. Comme le souligne
l'historien, elle est souvent associée à des demandes fiscales : comme nous l'avons rappelé, les
grands défrichements ont vu l'augmentation des redevances prises par les seigneurs. Les habitants
des villes se révoltent ainsi régulièrement contre les droits prises à l'entrée des villes sur le bétail, le
vin ou le grain. Les paysans peuvent organiser la grève aux champs, dite « bacchanale » notamment
dans les provinces où se situent les grands champs, ceux qui demandent le plus de main-d’œuvre.

Aujourd'hui, les émeutes de la faim n'ont pas disparu avec la persistance des famines
notamment dans les pays des Suds. A la suite de la crise des subprimes de 2008, la faim est revenue
de manière brutale dans de nombreux Etats provoquant de nombreuses émeutes. Les pays dits
moins avancés comme Haïti sont les plus touchés et ce sur la durée puisqu'en 2019 l'envolée du prix
du riz, base de l'alimentation des populations, conduit à de nouvelles manifestations25. Les crises
de subsistance mettent ainsi en lumière les fragilités du système agricole des États les plus
précaires dans le cadre de la mondialisation économique.

3.3 La faim, une illustration des inégalités persistantes

La non-éradication de la faim démontre que les écarts de développement dans le monde sont
encore très forts. En effet, en termes de production, le système agricole est en capacité de nourrir
l'ensemble de la population mondiale. Pour autant, le nombre de personnes souffrant de la faim
connaît un niveau bien trop élevé. La faim peut alors apparaître comme un révélateur des inégalités
économiques, certes, mais aussi sociales au sein de nos sociétés.

Dès le Néolithique, la gestion des stocks permet de structurer la communauté villageoise. La


hiérarchisation de la société se construit autour des enjeux alimentaires : les chefs ont autorité sur
les stocks et peuvent mettre en scène ce pouvoir à travers des rituels comme celui du banquet.
Ainsi, la volonté d'avoir un surplus dans la Préhistoire a pu être analysé par certains préhistoriens
non pas comme une volonté d'éviter la disette mais plutôt comme celle d'avoir les moyens

24
« Portrait des Français rebelles », Jean Nicolas in L'Histoire, collections 25, octobre - décembre 2004
25
« A Haïti, des émeutes de la faim se multiplient, les morts aussi », France TV Info, 13 février 2019

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d'affirmer son pouvoir. Des auteurs comme Marshall Sahlins dans Age de pierre, âge d’abondance
en 1974 veulent sortir de l'image d'un homme préhistorique dont le quotidien était dominé par la
lutte contre la faim. Selon l’anthropologue américain, l’invention de l’agriculture ne répond pas à
une volonté d’éviter la famine. En revanche, les élites ont su très tôt utiliser la question de sécurité
alimentaire pour affirmer leur autorité

Les révoltes alimentaires apparaissent majoritairement au moment de crises économiques


majeures et sont révélatrices des fortes inégalités qui tendent au sein des sociétés. Dans le contexte
de la mondialisation, la crise alimentaire s'envisage comme un système complexe qui est le résultat
à la fois des décisions politiques à l 'échelle nationale mais surtout de l'organisation du système
agricole mondial qui rend dépendants de nombreux Etats des importations, en particulier ceux qui
ont développé une économie de rente. C'est sûrement pour cela que les émeutes de la faim
apparues au début des années 2000 revendiquent, au-delà de la baisse du prix des denrées, une
refonte du système mondial. C'est le cas lors de la « crise de la tortilla » qui frappe le Mexique en
février 2007. Les manifestants ont ainsi scandé des slogans réclamant « la souveraineté
alimentaire » et critiquent ouvertement les accords commerciaux de l'Alena. Ces derniers liaient
alors le pays à son voisin états-unien et au Canada26 mais aussi les grandes firmes transnationales
qui manipulent les stocks de céréales.

Cette situation préoccupe en particulier les instances internationales et en premier lieu l'ONU.
La mise en place des ODD (Objectifs de Développement Durable) en septembre 2015 dans l'Agenda
2030 des Etats membres de l'organisation place l'objectif de « faim zéro » en deuxième position
après l'éradication de la pauvreté. Mais ce sont surtout les acteurs de la société civile qui sont
aujourd'hui au cœur de la révolution alimentaire : les ONG qui défendent une meilleure répartition
des ressources alimentaires ou les les associations qui appellent à changer nos modes de
consommation en mangeant moins de viande ou des produits issus d'une agriculture plus locale.
La question de l'alimentation n'appartient plus à présent aux seules autorités mais un sujet social
et civique qui mobilise les populations.

26
« La crise de la tortilla fait descendre les Mexicains dans la rue », Le Monde, 1er février 2007

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C ONCLUSION

La pandémie de Covid 19 en 2020 et la guerre en Ukraine depuis Février 2022 ont mis à nouveau
en lumière l'importance de la question de la sécurité alimentaire. La pénurie de certaines denrées
alimentaires (comme la moutarde en France cet été) et la flambée des prix des matières premières
agricoles ont réveillé le spectre des disettes et des famines. Les conséquences touchent déjà les
catégories les plus précaires des sociétés développées et les populations des pays en
développement : avec l'inflation, les experts prévoient une augmentation de 12% des prix des
denrées alimentaires. Le risque d'une nouvelle crise alimentaire illustre à nouveau que la
mondialisation d'aujourd'hui s'opère dans ces flux : l'espace agricole est mondial et mondialisé
rendant toujours plus dépendants les territoires entre eux mais les populations aussi. A cela s'ajoute
l'urgence climatique. La sécheresse mondiale qui a sévit durant l'été 2022 a montré les limites des
systèmes de production et nourrit les arguments de ceux qui défendent une révolution alimentaire
dans nos assiettes. Celle-ci semble en effet nécessaire et les appels à la sobriété qui se multiplient
montrent une prise de conscience générale qu'il faut cependant transformer en acte. Pour autant,
l’œil historien ne peut s'empêcher de souligner que les révolutions alimentaires s'appuient sur des
ressorts connus : une production capable de forts rendements grâce à de nouvelles techniques et
savoir-faire, une nécessité de gérer les stocks pour assurer la sécurité alimentaire, des
revendications pour une redistribution plus juste et égalitaire et un rapport à la nourriture qui porte
les évolutions des mentalités et des habitudes.

B IBLIOGRAPHIE :

ARIES, Paul, Une histoire politique de l'alimentation, 2016 Edition Max Milo, Paris, 2016.

QUELLIER Florent (ss dir) , Histoire de l'alimentation , collection Références, Edition Belin, Paris,
2021

WILLIOT Jean-Pierre, FUMEY Gilles, Histoire de l’alimentation, Que sais-je ? Paris, 2021

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