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w L‘QEUVRE DE SOGRATE On 0 beaucoup éerit sur Socrate, at, & ne compter que les cuvrages publiés en divers pays do notxe temps, sans avoir gard aux fivres antériours ni: ceux de Pantiquité, longue. serait la liste dea livres, méroires ou opuscules, consacrés & Ja vie ow & eouvre da penseur athénien, I! est probable qu'il ‘en sera encore de méme & Yavenir. La physionomie de Socrate, en raison méme do Vincertitude et do l'insuffisance de nos moyens de connaissance, ne cessera pas.d'avoir pour tous les chercheurs Vattrait d'une énigme t déchitlrer ; ot sans doute la dernier mot sur celte question ne sera jamais dit. Dans les ages qui vont suivre nous ne nous proposerons ni do.rovenir ‘sur la vie du philosophe, ni d'étudier son caractére, nl de , Dans divers dialogues, sorrd de prés par ses adversnires, it ee refuse & formuler fui-méme aucune doc trine, il se borne toujours A critiquor colle dea autres. refuso méme do so soumetiro ox procédés d'interrogation quo Tulsméme ‘ait. subir § ses interlocuteurs, Socrate, dit Aristote, interrogzoit, mais no répondalt pas: « ‘elie, 21" cin dnagiete» (Soph, elench., 189, B, 7). + On peut sane doute supposer quill y a quelque ironie dans cette prudence constarument observée par Soctate, ot quo, sil batinait & no falre aucune réponse, i n'en avait, pas moins i.devers [ui des opinions arrétées et des idées de derriéro ‘Yale, Male co n'est td, apris tout, qu'une supposition ; i et. plus probable, et c'est uno interprétation plus conforme aux texted, quil s'est reconnu lubméme impulssant & constitier la science idéalo, tolle- qu'il, avait congue. Rien n‘interdit de ‘supposer qu’on doive prendre au pied de Ia lettre lea réticences et lea négations ol fréquentes attribuées & Socrate par Xén0- phon et par Platon. On arrive & Ya méme conclusion si, Taissant de cOté les ‘t8moignages, on examine attentivement. quelques-unes des propositions qui paraissent constituer le fond méme de Ven- ‘de Socrate, La principale’de ges theses était cor- ‘tainement colle de Fidentité de ta science et de la vertu, Pour ‘tre vertueux il faut savoir, et il sullit de posséder la science pour étre vertueux. Xénophon lo dit expressément ef nous en trouvons la confirmation dans le. Profagoras de Platon (Prolagoras, p. 361 sq.). Enfin Aristote, dont le témoignage fen-ees questions a une si haute autorité, ottsibue expressd- ent b Socrate cette méme théorie: « Yangirye wlv abv Myore ‘the dpards Gro ela, drone pip eras wdeag » (Eth, Nicom., VI, 13, 1144, B, 17) sot ila consacré méme & la réfuter To Vie livre deEthique a Nicomaque. Cette thtse signifie’ que personne nest méchant volontairement, qu’on ne peut pas voutoir son ‘mal quand on.sait do science certaine quel est te bien, ou encore,'en d'autres termes, quo si, avec le vulgairo on entend par intempéranee (ixy2sti) Timpossibilité pour un homnio qui sait co qui eat bien de résister & ses passions, l'intempérance infexisto pus (dxyasieg oin tions), et vans doute la contradiction qui exiate entre co possago d'Aristote et celui do Xénophen (Mémarables, 1V, ch. 6) ob Socrote parle de Véxpaaia, nest quiopparente, Jo mot dxyzsia étent, pris dens co dernier ‘émolgnage dans éon sens large et habituel. Cependant il no euffit pas-de dire que ta vertu est la science, il faut-encore.indiquer’ quel est objet -do celte science, Rividemment, ches Socrate, uniquement préoceups des | choses humaines, comme on 'a vo ci-detsus, iI ne stegit pas dde'la science en général, mois de lo science relative & ta con- ‘duite de lo vie, en d’auties termes do ta sclenco du bien, Resto €& savoir on quo consisto le bien et quelle définiticn Socrate en, a donnée, La répoteo de Soorate & cette question est formiolle: Jo blen, d'apris les Memorable, c'est I'utile, 1 autfit do lire cet ‘ouvroge pour so-rendro coraple quo cette difinition du bien ‘Couuvne De socnate . “aD par Futile est toujours présente A ta penste de Soorate. Etit ne faut pas s'y tromper, i ne donne pas & ce mot d'utile ‘cette signification tres générale suivant taquelle, dans touite doctrine ‘morale, lo bien et I'utilo, s'ils ne se confondent pas, 0 touchent inévitablement. Car dans quel systtme pourrait on concevoir que le bien ne soit pas utile & quelque degré ou en quelque fagon ? Comment pourrait-on dire d'une: chose quiello eat bonne, oi olle ne procurait. pas quelque avantoge & celui qui la posstde ? L’idée du-bien implique dono nécessai- ‘ement, en un-sens, Lidéo do Tutile ; pour toute morale; to bien, c'est, peut-on: dire, Futilté supréme, Moie il fout bien prendre garde qu'il n'y a rien do tel ches Socrate, Quand il dit que le bien, c'est Futile, il prend cef mot dona l'acception cou- ‘ante, il Ini donne ‘la signification qu'on lui attribue- vulgoi- fetent, Soerate est donc un utititaire, dans lo sons strict ot précis du mot. De sorto que, dans sa doctrine, le bien, ddfini pat utile, ne différe pas beaucoup du plaisir ow do Pogeéiblo, Crest ainsi que, dans tes Aémorablea (111, 8}, Socrate, & une ‘question qu’Aristippe lui-posait. pour Fembarrnsser, ztpond : « Qu’entonds-tu par hon ? 81 tn entends par ft, non pas ce qui ‘et hon en wus de tele ou tello choso, mals-co qui n'est bon A tien (c'est-tediro te bien en soi), je ne teconnals pas, et. Jo n'ai pos besoin de to conmaltro » ("Hi-y'ipdrer-un a x1 -dyadle dre, ob" lta. obte Beaas). Bt 1d suite de tenteotion nous ‘montre elairement, qu’éux youx do Soorate, to bien, c'est co ‘qui est approprid & une cestaine fin, Cela nous est,-du reste, teéa neltement confitmé par ta fagon dont Socrate ‘parle des diftérentes vertus; et par les indications que ndus trouvons & co eujet dans leo Mémorabies, Lo courage est utile, car it wet. Ia défin’ comme tin moyen dea plus efficaves-pour s'assurer core ‘eine avantages of pout priserver sa vie, ta justice, A: son ‘our, n'est pos eonsidérée par Socrate comme ayant une-valeur ‘propre, mais comme étant un moyen de gagner ta conflanco t Featiine de acs conteinporains ; Pamilié n'est pas loud pour co qu'cllo peut avoir do noble ot d'slevd, mais pour Favantago qu'elle présente, on tant qu’elle nous domme un alti, un protece tour fiddle, qui travaille & notre bonheur. La mottrito do pol, a0 ‘PunLosaPati ANCHE sdle-meéme, nous est représentze comme offrant certaine avan- ‘tages : cat, si nous sommes habituellenient. tempéraets, nous ‘en éprouvons que plus de jouigsance lorsque nous satisfat- ‘sons nos appétits, tondis qu’au contraire ‘les. ploisirs fre ‘quemment répétde aménent fa eatiété et émovssent nos eens. ‘Le beau lui-méme n'est pas défini autrement que por Tutile : ‘uno armure est belle si ello est solide et commode, un panier 44 Gamier est beau s'il est bien adapts & sa fin. La méme idée fe rotrouve sous une fotme plaisante dane le Banquel do ‘Xénophon : Socrate s'en sert pour prouver que con nes camus ‘et largement ouvert. est trés beau, parce qu'il est plus apte, 4 cause do ses dimensions, & seoueillir plus dodeurs ; ses ‘youx A flour do tate sont beaux, eux aust, parce quiilsoffrent, ‘une plus grande surface aux rayons fumineux, II paratt diffi- -eile de croire copendant qu'un homme tel que Socrate en ‘soit restd & uno conception aussi terre & terre de la moralité, ‘et Fon est tenté de supposer que Xénophon a interprdté inexactement. sa pensée, Tout de méme il est curleux de remarquer qu‘on retrouve & peu prés ta méme docteine dana to Prolagoras do Platon, exposée, cette fois; avec toute ta peécision et Io notteté qu'on doit attendre d’un vrai philo- ‘sopho, 11 stogit. de cette thése indiquée plus haut, d'aprés Taquelle Io vertu est identique 6 Ia science ov, comme dit Platon (Prolagaras, p, 381 sqq,)-: La ssienen no peut étre ‘vainoue por les plalsirs ou par tout aiitre mobile, Co qui ignitie qu'll est impossible qu'un homme, sachant de eclence ‘eortaine of est to bien, 80 porte vera lo mal, Pour le démon- ‘rer, Soorate établit d'ahord vette proposition singullére, mals - cessenticlle, qu'il n'y.a pos do différence radicale entro te bien et Vagréable, que nous appelons hon eo qui est agréable ‘et mauvals co qui est déeagréable, Cela tant, dire qu'un ‘homme qui connott fo bien cbde a Fattrait tu plaisir, cela ‘revient & dire qu’il eat. vainew par le bien, Or cela ne peut ignifier que cect : qu'il choislt un plaisir moindro quand it enirlt_co cob un ple grand, Do mime, dire: d'un jomme qu'il prféro co qui éxt mauvats ce qi est hon, c'est ‘dire quill protire lo désagréable, —-En d'autres tormes,- da ‘moment quion no fait pas « ,'différence entro fe bon ob ‘ogrtablo, le mal et To désayréable, il feucra dire quo si Yon _ANeovRB'0B socraTE: ¥ ‘poncho do tel ou tel o0t4, c'est qu'on‘croit y trouver uns plus’ grande soinmo do plaisirs car, bi les mobiles en présence sdnt do mime noture, seat uno prédominanca de quantité qui, oute, pourra assurer la victoire A Vui-d’eux, Test vrai qu'on peut supposer que nous nous trompons dane l'évaluation des plaisira, pace quo Tour proximité ou leur éloignement.peu- ‘vent nous faire illusion, de ta méme fagon que la distance nous fait porter des appréciations erronées sur les dimensions ‘éelles des objets, A cela Socrate ripond que, dans ce dernicr cas, nous avons un moyen d’éviter toute erreur; c'est do recourir & la mesure. De méme quand il s’ogit d’évatuer les 'eat-h-dire de déterminer ce qui-est bien et we qui est mal, nous devons leo mesurer : c'est: précisément en cela qua ‘consiste ta science, Grace a "est toujours f'action la plus agréable qui Femaporte, et Ja science, o’est-d-dire la connais- ‘sance de ta quantité réclle do plaisir, rio peut étre vaiieue, St nous eédone & Vattrait. du mal, c'est dono, en réalité, parce ‘que nous commes dans I'ignorance ; celle-ci étant supprimée, comme nous voulons toujours natro plus grénd bien, c'estet- dire notre plus grand plaisir, nous {rons toujours vers lui; st ‘nous savons of il est, —Cétte curiouse démonstration, on le ‘sur deux principes : d'abord, quo lo bien o'est. Fogréablo ; erwito, qu'il agit. d'un mémo étre dans lequel ‘on ne distinguo pas plusieurs fonctions ou natures ; c'estte dire quello suppose units et dans tee motits d'action et dans Vagent. Gn n'a pu y Schapper qu’en établissant,au soin de ces deux prineipes, des distinctions que Hacrate n'avait pas faites, Sans contester: la valeur da témolgnoges aussl formels, Ed, Zeller 0 orm pouvoir trouver dans es textes relatifs & ‘Soovate quelques vues un peut phis élevéés et des conceptions pn semen. 1 reléve avec complatsance certains textes dé Xénophon, d’ot il semble ressortir quo, tout on professont, ta thtorio do ta relativité du bien, Socrate soutonait que cor taines choses cont bonnes par elics-mémes, et cointebiuent par leo mémes & notro: perfection intériere. Ba. Zeller ojonte ‘quo cea indications sont tds importantes A reoueitlir, venant do Xénophon, qui était, un homme trts pratique of un peu ‘perro b terro.-En spramo Ed. Zoller eatimie que Socrate s'est ‘contredit, pulsque d’un cOt6 il aurait professé t'utilitarisiie, , Saletan meee te aa hi nn ‘Platon, théorie doptts laiuelleerteities choses eer Yecommander en meme teinps& cause: des aventages.qu’ello. - procure, :et: Platon, ‘en effet, reconnaissant “tt uns. -eontra Uiton, Ta tvitde (Prag Boutroun, 1, p: Ws) Bd Zaller sjoute qu'on aurait tort de reprocher gravement & Socrate-ces «contradictions, car i. est arvivé & tous ses philosophes, y demitre dont Faccivse Ed, Zeller. Or, eect justément oo que je ne ervis pas, Jo no trouve rien,'en eftet; qui puisse-nous auto- "2 se0 disciptes-de pesfectionner. leur’ dime at, dé:subordonner, toatl reste eta so plan folqu ges do tampon semblent aussi: montrer que, pour Socrate,: dino humuine Sic eae ncees par lhe Ily a-tn texte de'Xénophon qui paral A wm env ons tons gun yn Farina evel pola (Mémoraber 1-1 hiv. Ty tien lf préférable i 'éme humaine _leusement Saieoe wae saoe te ‘pour son-blen-itee ; en an snot, it eonsidére Pome non) conta dat une fi eats le inks commie: un mioy ‘admirablement adapta-6: sa font ta gel deme onme W gne c Tapas Ale eat bute devo toe Une dt Aétinition da 06 qu ostouFotit plained das reshiebt, 4 as cele seibarano daa nea captain, 5 Antiphon (dfémorablen, fi.~F, ch vi), colubet objecto uo ‘tout cbr chervhant le bien oi utile, tul, Sograte, n’artive, en: somnie, qu’: des résultats médiogres, ‘pitieque, mal. nourri, ‘mal vit, privd de tous les pais, vit. comme un mahen eux, A cela Soorate répen: ton lle at rn onto nourriture est grpssiére, jamais =a Iy.a done ict une’ diffjeulté, ot mémo une. radia différents do:cello quo’ Zeller reproghe;¢ Sacra come’ emonande to ‘isa rom wcian hea ae sean eee a ie on Fambsorarg ancien ~ t "Pour aclfover de comprendry pourqust Sccrate, gai le arce.de son esprit et la subtilite'de sa dialeotique, ‘impuissant, jl n'est pas sans intérét d'examiner comiment ses suocésséure ‘Platon et Aristote, sont parvenus & -rsondre le probléme qui avait, arrété. L’un et Yautre prennent. pour Poitit de dépert la proposition essentiolle dis tocratiai le its ‘admettent que ln'ecience:a pour objet dea notions énérales qu'il ayn point do verta sans In seinen. Hl ont ley van ‘ontinuateurs de Socrate, mais d'abord si la vertu suppose la ‘science, elle ne se raméné pas tout entire & la science, Pour ‘tre vertuoux il faut savoir, mais il ne sulfit pas de savoir, En + d'autres termes, a vertu ne dépend pas de Mintelligence ou de 4n raison toute seule, ct c'est pourquoi on no pout lenseigner. 11 y a dans Yame une autre partie, une ‘partie irrationnelle dont il faut tenir compte pour détinir ta vertu. Mais, pour jus- Ulier cette these Platon étude directement la nature de lime of il distingue trois parties. On sait par quel détour, dans les ‘premiers livres de la République, it arrive & cette conclusion aprés avoir comparé Paine humaine & une eité ot distingué dane la cité humaine trois castes diftérentes. Arjstote arrive ” ‘4 une conelusion toute semblable par un autre chemin et par ‘dea considérotions, non plus psychologiques, masis méta siques, en observant, Ia hiérarchie des étros ot la ‘tion des formes inférieurds aux formes supéricures de Nétre. En second lieu les successours de Socrate ne so bornent ‘pas A signaler une différence entre la science et Ia vertu, ils ‘donnent encore des définitions séparées de Ja vertu ot du bien. Gest Platon qui donne le premier cette definition do la vertu, qui sera conservée par toute Ja philosophie grecque + la vertu est la fonction propre de chaque tre e ciator yor » (Reb iv. 1, fin), La vertu de homme eat l'exercice de Cette dfinition vere opie ot complete par Arita, Dautre ‘part le bien est, pour Platon soft l'idée du bien, le bien en soi (ep., 1. VI), objet immuable do la raison, soit, au point de ‘vue purement humain, lo bien tel qu'il est défini.& fa fin du Philébe bs Voide do cing éléments différents : le beau, lo symé- ‘trique, intelligence, la science avec, opinion vraie, les plai- sire pure, Aristote envisagg le bien tout autremont. It le dé; nit par le bonheur, réductible lui-méme & action coriforme trey plus avant dans la connaissance paychologique et a he potwvait ou ne voulait pas faire, ot-c'est pourquoi eon couvre devait-rester incompléte, Il y avait contradiction entre Vidéo que Socrate s°était faite do la science ot les moyens dont if disposait poitr constituer.cette science. Mais si Soorate a, on derniére analyse, partiéllement Schous dahs Vcouvre qu'll avait entreprise, ce n'est pas pout, fi) un ‘ince honnéur d'avoir te premier compris co que devait dtre Ja science morale ot d'avoir poss les premidres pierres de Védifice quo ses glotieux disciples devaiént achever. Ainsi sexplique et so justitio Ia grande place ‘que Soorate occupé ‘dans histoire de esprit humain, ot admiration que tant dz géntrations suocessives lui ont témoignée, v LES MYTHES DANS LA'PHILOSOPHIE DE PLATON * Parmi les questions préjudicielles qué doit nécessairemont, résoudre quiconque veut pénétrer un peu avant dans la philo- sophie de Plator. se trouve au premier rang celle de la valeur des mythes, It est certain que Platon a souvent présenté eos doctrines sous forme podtique ou allégorique, It s'est, compla ~ ‘dans Ia fiction, ot il n'est presque’ pas de dialogue od Von ne ppuisse, on cherchant bien, découvrir dea mythes plus ou moins développés. Il semble que ce soit surtout sur lea questions cesscntielles, celles de Dieu, de Tame, de In vie future, que le pphilosophe ait pris plaisir & présenter sa ponode sous la forme Ja plus opposée & ea méthode ordinaire qui est Ia dialectiquo. Cortaina diologues, tels que lo Timée, Ye plus considrable & Jo fols par 'étendue et Fimportance dea questions quits traitent, puisqu'll s'agit de la formation du monde, de‘lori- gine des dioux et ‘des dea, paraissent mythiques d'un bout ‘1 Vautre, Que faut-il penser de cette intervention perpétuelle ‘do imagination dans Vexposé des doctrines platoniciennes ? Doit-on rejeter impitoyablement ct considérer comme Stranger {Ja philosophic de Platon eo qui eat présenté sous forme podtique ou paratt entaché de mythologis 7 Peut-on au con- ‘traire admettre que les mythes renferment, au moins yne'part do vérité et que, & certains égarde ot dans une mesure qui” resto h déterminer, is font partie integrante do la philosophio Platonicienne ? Us UYTARS ans La PamOsoratE {La premitre de ces cotations, ta plus simple ¢t la plus radi- ‘cle, celle aussi qui, & certains égards, convient le miowx & a doctrine d'un véritable.philosophe, devait ¢éduire bean- coup do bons esprits, Rilo « #8 défendue aveo une force sin- gulitre dans un travail remarquable, trés-approfondi ot taés documents, publié par M. Louis Couturat sous forme de thése latine :De Mgthls platonicis. Bt il faut convenir quettes raisons que Je jeune et savont auteur met en avant méritent une Personne, peut-8tee parmi tes philosophes anciens, n'a cu plus quo Platon Fidee notte de ve quo-doit dtro la-sclenco et de ta diftérenca quia sépare des autres modes d'atfirmation, Ltobjet doa science ne comporte aucun changement, demoure toujours identique & sol-mémo ; la raison voule, soit par Vin tuition, soit par la démonstration, peut l'atteindre. L’opinion, au gonteaire, est infiniment variable et. changeante, La vrai semblanco présente uno infinité de degrés, Elle est essentielle~ ment fuyante et mobile, On sait fe jugement de Platon sur les podtes ot comment il traite Homére dans sa République, ‘est plein d'admiration pour enx, mais les eonsidére comme dangeroux et eo défie do leurs inventions, Comment supposer ‘qu'un pareit philosophe ait pu, dans exposé de sea'propres doctrines, recourir & un procédé dexposition oi éloignd do sa manitre habituelle do raisonner, et peut-on voir autre ‘chose qu'un jou dans lea fictions od it so complatt quelquo- {ola, parco quo c'est la mode do son temps, et que, d'aillours, Je toar naturel de son esprit I'y inclinait. peut-étrg 7 Mais. ‘ne semble pas possible qu'il ait jomals présenté sons ta forme podtique wie doctrine qu'il aurait prise au sérlenx ou quol- que proposition qu'il aurait ea a owur de défendre, Cte usage, au,temps.de Platon, dinvoquer toute cirvonstance ot & tout: propos. Les ouvrages d'Homere of d'Hésiode étaient pour Mantiquitd ce quotes tivees saints ‘ont été longtemps pour les modernes, et 1! faut se souvenir qu'alors on-n'avait gudro d'autres livres. C'est 1b du’on ollelt chorcher de ‘beaux exomples, des préceptes of dee rdgles do conduite. Oa voit, par les dialogues mémes, dons te Profa- _geraa notamment, que oétait un exercice favori des sophietes a a f+ PRMOROPANE aNCHENONE do choisir quelque penséa.dane uni viewx. podte, de la-déve- Vopper; do.la ‘commenter: et d'en tiror: souvent les consi quences les plus singulidres ot lea applications les plus inat- tendues. Or contre ces.joux deaprit alors oi répandud et si fréquents Platon s'éléve cans cesse.aveo ta plus grande dner- ie. On sent tout son mépris pour cea vaines divagations. Il suffit, pour s'en convainore, dé lire entre autres In Phédre ob Jo Protagoras. Comment eroire quo Platon soit tombé préci- sémont dans te défaut qu'il reproche & ses 1 c quill ait revétu ves propres pensées de cette forme podtique qu'il proserit partout ob il la rotrouve, et qui lui semble, & lle seule, une marque derreur.ct de fausseté ? Il faut, done que partout od Ip caprice de Platon s'est joud'& ‘quelque vision poétique, nous toyons avertis que co n'est lt-qu'un, jeu, et on doit éearter de sa philosophi, i Yon vout Ia salsir en elle-méme, tout 0 qui n'est pas sévérement démontré et Figoureusement établi, Lvimagination eit suspecte partout of ‘llo se manifeste, En procédant, avec cette rigueur, on arrive, comme I'a montré M, Couturat, & écarter comme sans valour tune granule partie de 1a philosophie de Platon. 1a théorie do Dieu oot un mytho ; i! en eat de méme do celle de Mame et de 1a doctrino relative & Vimmortalité, L'explication de univers, ‘elle qu'elle est présontée dans le Timée, n'a rien do platoni- clon, Soules la théorie des Tdées ot la'théorle des Idées-Nom- ‘bres qui s'y rattache, eb pout-dtre en fait la suite, méritont considération. 11 no.reste que pou de chose du Platonisino, ‘mais au moins ce que nous en avons eat solide, démontré, et, comme il est exempt do toute fantasio, digne du mom do la science, : Cette opinion si simple et oi plausible ne paratt pas copen dant & Vabri do toute contestation, et jo serais disposé, pour ‘ma part, & faire les résorves les plus expresses. Jo crois len fout accorder 6 M. Couturat que, dana Platon, les thtoties do Dicu, do lame et do Mimmortalitd, Feuplication do 1a Gentso du mondo sont mythiques.’ Maia la question est do savoir si tout eo qui est mythique est, par Ta méme, euppoat, et doit étro rojetd. It faudrait s'entendre sur 1a signification ‘exugte du mot « mythe », et jo sul ports & eroire quo certains. mythes expriment la peneéo fa plus intime de Platon, et que, AEE THES Dans ta PonosoearE ns PLaAvON © 40" ‘malgeé lour forme mythiqué, la:plupart dea’ grandes théorios ‘qui viennent d'étse nommées. font partie intdgrante du aye tame au mémo titre que Ia théotie des'Idées. D'abard, si on élimine du Platorieme toutes ces grandea "htories, quo restera-Lil ? A. vrui dire, la Uhdotio des Idées et out-dtze aussi.celle des 1déés-Nombrea sont seules, on vient, de le voir, & trouver grico devant une eritique trop impi- toyable. Mais comment croire-quo Platon s'en soit tenu Ia et ‘qu'il se soit boraé ‘poser lee principes, sans chercher &’ on déduirg les conséquences et les applications, qu'il ait renoned 4 expliquer le mondo, Vame et réduit, ressemble vraiment. trop ‘roire surtout que, si tel était le Platoniame véritable ot au- thentique, Aristote et les anciens s'y soiont. trompés, et Qu'Arislot, nous parle souvent des ‘théories du Timée’ sur ‘Ame ot sur la matiére en tes prenant fort au sdrieux ? Test certain quo Platon bldme souvent V'interprdtation des Pottes Lolle qu'elle était pratiquée par les sophistes ef qu'il so d'un autre oGté, comment comprendre que Ini-méme s0,soit

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