beénéficiaires concurrents ont lieu pes seulement dans le contexte de l'utilisation d'une seule
mais aussi dans le cas de l'emploi de plusieurs techniques juridiques. Des facteurs
supplémentaires de complication, comme la bonne foi des personnes impliquées dans le
conilit, peuvent aussi intervenir. Le cas oit les droits concurrents ont été eréés par le biais de
techniques juridiques différentes permet d’examiner la « cohabitation» difficile de ces
techniques, en relevant la nécessité de I’adoption d’un ensemble de régles cohérentes dans ce
domaine, compte tenu de I’état insatisfaisant du droit positif actuel.
L’analyse comparée des caractéristiques principales des techniques de transfert de créances
effectuée dans cette premiére partie permettra d’identifier les spécificités de chaque technique
de transfert de eréances, mais aussi d’esquisser, dans la deuxiéme partic les contours dune
notion de transfert de créances, a partir des points communs, qui dépasse la diversité des
techniques juridiques de transfert de créances.
3BTITRE 1:
TRANSMISSION DE CREANCES A TRAVERS
LE DROIT POSITIF
‘es solutions & ces conflits dans le droit positf actuel, francais et anglais, manquent souvent
de coherence et une systématisation est nécessaire, d’autant lus que la doctrine actuelle se
Hmite souvent a analyse des situations de conflits entre bénéficiaires concurrents qui
Sugissent dans le cadre de la méme techmique de transfert. II pourrait étre soutenu que,
‘atistiquement, les situations de confits entre bénéficiaires de transferts de créances effectués
Par le biais des techniques juridiques différentes sont relativement Tares. Toutefois la
ficquence des ces conflits ne peut que s'accroftre, compte tenu du contexte économique actuel
14caractérisé par la volonté délibérée des Iégislateurs de favoriser les échanges économiques et
la circulation des créances**,
Face aux changements dans T'utilisation du transfert de créances, la législation actuelle se
révéle dans la plupart des cas comme inadaptée, dés lors que la majorité des techniques
Juridiques qui permettent le transfert des eréances ont été congues a des époques od! le
transfert des eréances était plut6t un événement exceptionnel. Pour ceite raison, la philosophie
sur Inquelle elles reposent manque de perspective et perd de vue les situations oi plusieurs
techniques de transfert de eréances sont appelées a fonctionner ensemble. Les solutions
actuclles reposent généralement sur la théorie de T'opposabilté des actes juridiques, qui, par
son contenu actuel, est incapable de fournir des justifications rationnelles aux solutions
résultant de son application.
TI serait ainsi envisageable de préconiser la création d'une véritable théorie générale du
\ransfert de créances, mais l'ampleur d’une telle démarche dépasserait les objectifs qu'on s'est
imposés pour le présent travail. L'analyse menée dans cette thése ne permet pas
obligatoirement de conclure qu’une théorie générale du transfert des eréances est nécessaire
ou méme utile pour le droit frangais ou le droit anglais. Méme si certaines caractéristiques
communes a certaines des techniques de transfert de créances peuvent tre identifiges, il est
assez difficile d’isoler des éléments qui se retrouvent dans le cas de toutes les techniques de
transfert. L’approche de cette thése est dans ce sens moins ambiticuse, mais elle est due A la
volonté de bien circonscrire l'objet de la recherche, compte tenu des difficultés inhérentes au
‘raitement d’un sujet d°une telle complexité en droit comparé.
13, Méthode de travail. Compte tenu du fait que le transfert de eréances est étudié dans
lune Perspective comparative, il était indispensable d'apporter, d’emblée, les précisions
terminologiques nécessaires, tant au niveau de la terminologie propre employée qu’au niveau
es termes provenant du droit anglais employés (Chapitre 1), avant toute étude historique de
|i cession de eréance en droit frangais et en droit anglais (Chapitre 2). Cette présentation
historique permettra de comprendre micux la configuration actuelle de la législation en
“ V. supran? 7.
*V. infran® 199,
15matiére de transfert de créances en droit frangais et en droit anglais et aussi de mettre en
perspective les différences entre ces deux systtmes de droit. Aprés avoir précisé le contexte
historique de la réglementation du transfert de eréances, il sera temps de passer & une analyse
des caractéristiques principales des techniques juridiques qui permetient Ie transfert de
créances (Chapitre 3). L’analyse ne portera pas bien entendu sur la totalité des aspects de ces
techniques — elle sera centrée au tour de l'étude du mécanisme de transfert de créances
(Conditions de validité du transfert, situations dans lesquelles unc technique de transfert est
utilisable, moment de opposabilité du transfert, etc.), ainsi que sur la mise en relief des
spécificités de chaque technique de transfert. L’analyse du droit positif s'achévera avec la
Présentation de I'utlité et de la nécessité de la notion du transfert de eréances (Chapitre 4).
CHAPITRE 1:
PRECISIONS TERMINOLOGIQUES
14. Explication de la terminologie propre employée. Plusieurs précisions préliminaises
sur la terminologie employée sont nécessaires. Une premiére précision conceme la
signification du terme « transfert » qui est utilisé a maintes fois dans cette thése. Ce terme
décrit la transmission, dans un sens large, d'une créance d'une personne a une autre et il est
employ¢ pour éviter des confusions de terminologie avec la cession de eréance du Code civil
des articles 1689 et suivants, qui, selon la position défendue dans cette thésc, est sculement
lune hypothése particuliére de « transfert » de créance. Le terme est ailleurs utilisé, avec un
sens similaire, tant dans la doctrine’ que dans la Iégislation frangaise™,
La notion de transfert de eréances qui sera développée dans cette thése englobe toute
technique qui permet la transmission directe conventionnclle®, inter vivos, a titre
2 V. par ex, E. FRAUD, eLa notion de transfert de créances, RRI 1998, p. 817; P. MALAURIE, P
‘STOFFEL-MUNCK et L. AYNES, Les obligations, Defrénois, 2005, n° 1295 (titre intitulé : « Transfert de
Loblization ».
* Art 313-27 C. mon. fin, qui prévoit que la remise du bordereau de mobil
est ausi utilisé dans la doctrine: v. par ex. D. LEGEAIS, «Cession ef nantissraen de aces
Professionnelle», Jurisclasscur civil, décembre 2002. n° 8
GS {Ss tli, par exemple, par M. Biliau (M. BILIAU, La transmission des enéamceset dex dewes,
panels 2012) & par les contrbuteurs de La transmission des obligations: travis des [tes loursées Peed,
Jaridiques Jean Dabin dirouiées t Lowvain-la-Neuve ks 25 et 24 novembre 1978, Ed. Buiylanw ODI. teen
17signification est renforcée par la conception de la eréance dans la doctrine du temps : Pothier
compare la cession non-signifiée a la vente non-exécutée!, alors que Rogue décrit le
cessionnaire comme le « propriétaire de la cession » #9,
Une preuve supplémentaire de I'assimilation de la cession de eréance a la vente de biens
corporels est le fait que la doctrine de I'époque mentionnait la cession de eréance seulement
dans le cadre des analyses dédiées a Ia vente. Comme la mise en Possession d’un bien
CorPorel est apparente, elle a aussi une valeur de publicité du transfert de Propriété — c’est
Probablement ce raisonnement erroné par analogie qui a généré opinion que la signification
de la créance remplissait aussi une fonction de publicité!4!_
Malgré les nombreuses critiques qui sont formulées dans la doctrine aujourd'hui, il faut
Sonsinter que les dispositions du Code civil sur la cession de exéance étient trts modemes
Pour leur époque (en net contraste par exemple avee le droit anglais) et les exigences
opposabilité m’étaient pas trés génantes, dans la mesure oi la ‘fréquence et |’importance des
cessions de créances étaient aussi plus réduites.
§3. Evolution postérieure 4 Padoption du Code civil,
28. Le travail de la jurisprudence pour ’assouplissement des formalités de Ia cession
de créances, La jurisprudence a essayé de compenser la lourdeur des formalités
‘Topposabilité des transferts de eréances par une interprétation plus libérale des dispositions
du Code civil les régissant, en consacrant graduellement une théorie des équivalents"” de la
signification de Ia cession de créance. Il a été ainsi accepté que la signification par exploit
huissier ne soit plus nécessaire dés lors que le débiteur avait été informé de maniére
suifisamte par tout autre acte de procédure'*?, comme c'est le cas de assignation en paiement
du débiteur dont l'exploit mentionne I'acte de cession'“*, Je commandement précédant la
es
"ng: POTHIER, Traité du conmrat de vente, Nouvelle ‘dition, 1806, n° 555.
“° ROGUE, Jurisprudence consulaire et instruction des négociants, Lib. Guillin, 1773, p. 290,.n° 1
1 4 GARBONNIER, Droit ume 17 = Ls obligations, 22, PUF 200m 236 (Tess iis)saisie immobiliére pratiquée en vertu de la créance cédée"*, tout comme la dénonciation
une saisie-arrét effectuée par le cessionnaire contre le débiteur, dés lors que la cession était
décrite dans la requéte de la fin de saisie'.
Le raisonnement derriére la théorie des équivalents semble étre ds lors que les raisons des
dispositions de l'article 1690 du Code civil sont atteintes: assurer une date certaine a la
notification de la cession de créance et l'information du débiteur d’une manire satisfaisante,
peu importait la forme de I'acte qui les réalise. La jurisprudence est allée encore plus loin en
Permetiant au cessionnaire, méme dans l’absence d'une signification ou d'une acceptation, de