CNED 3e - L'Engagement

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AGIR SUR LE MONDE

Agir dans la cité : individu et pouvoir

Séquence 7
Découvrir comment l’engagement peut se manifester
Durée approximative : 10 h 30
Cette séquence 7 poursuit le thème du cycle 4 : AGIR SUR LE MONDE sur lequel tu as travaillé
en classe de quatrième à propos de la presse et à la séquence 4 de cette année consacrée à la poésie
engagée. Ici encore, il s’agira de questionner l’aspect Agir dans la cité : individu et pouvoir.

Dans cette nouvelle séquence, tu vas approfondir tes connaissances sur la manière dont peut se
manifester l’engagement. En effet, dans la séquence 4, tu as lu des poèmes engagés et dans la
séquence 6 tu as étudié un récit engagé : tu vas voir maintenant que de nombreux autres supports
peuvent témoigner d’un engagement pour une cause.

Ainsi, tu découvriras dans cette séquence, aussi bien des chansons, des discours, des lettres ouvertes
que des publicités.

Sommaire
Séance 1 Montrer son engagement

Séance 2 Chanter pour dénoncer et argumenter

Séance 3 La lettre ouverte pour dénoncer…

Séance 4 Le participe passé des verbes pronominaux

Séance 5 Dénoncer le racisme et la discrimination dans les textes et les images

Séance 6
Le participe passé des verbes impersonnels et le participe passé suivi d’un
infinitif

Séance 7 Un discours engagé

Séance 8 Je m’évalue

Je peux lire aussi


- Maus de Art Spiegelman
- Persépolis de Marjane Satrapi
- Cannibale, Didier Daeninckx

© Cned/ N. Julo

40 — © Cned, Français 3e
séance 1 — Séquence 7

Séance 1
Montrer son engagement
Durée : 1 heure
Pour cette première séance, c’est une tapisserie que nous avons choisi de te faire étudier.
Ouvre une nouvelle page dans ton cahier. En haut, note le numéro et le titre de la séquence en
rouge. Encadre-les.
Saute deux lignes, puis note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.
Observe l’œuvre ci-dessous et réponds aux questions posées.

Jean Lurçat, Liberté (1942) © Pierre Barbier / Roger-Viollet © ADAGP

Note : cette œuvre est une tapisserie. Elle fut composée et tissée en 1943, clandestinement
dans les ateliers d’Aubusson. Ces ateliers sont des ateliers très réputés de tapisseries.
Jean Lurçat revendique qu’elle peut être « lourde de sens ».

A Observer
1- Décris les différents éléments de cette tapisserie :
a) Quels sont les éléments centraux ?
b) Que peux-tu dire de la forme ? Des couleurs ?

© Cned, Français 3e — 41
Séquence 7 — séance 1

2- Une particularité :
a) Quels éléments remarques-tu à
chaque angle gauche de cette tapisserie ?
b) Quel est ce texte ? À quelle
occasion l’as-tu déjà lu ? Dans quelles
circonstances a-t-il été écrit ?
c) Quel mot du poème y est
particulièrement mis en valeur ?

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant de passer à la seconde partie.

B Interpréter

1- À quel phénomène les deux astres qui passent l’un devant l‘autre font-ils penser ?

2- Que représentent les motifs tissés à l’intérieur du soleil ? Et ceux sur l’autre astre ?

3- Que peut symboliser le coq en haut de l’image ?

4- Cette tapisserie a-t-elle uniquement une vocation décorative ?

5- En t’aidant du paratexte* et de tes connaissances historiques, explique quel est le


contexte de réalisation de cette œuvre.

C Conclure

En t’aidant des différentes réponses aux questions précédentes, réponds à la question


suivante :

La peinture, la tapisserie ont-elles seulement une fonction décorative ?

Réponds dans un paragraphe argumenté en y donnant arguments et exemples.

42 — © Cned, Français 3e
séance 2 — Séquence 7

Séance 2
Chanter pour dénoncer et argumenter

Durée : 1 h 30

Dans cette séance, tu vas lire et écouter deux chansons qui ont un point commun : l’objectif sera,
après les avoir étudiées, de dégager ce point commun et d’être capable de faire des rapprochements
entre ces textes.

Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.

TEXTE A : LE CHANT DES PARTISANS

Ce texte militant, hymne de la Résistance, a été commandé par un réseau de résistants.

En 1943, une artiste russe, Anne Marly, réfugiée à Londres, compose la musique. Joseph Kessel et
Maurice Druon, écrivains français eux aussi exilés à Londres, composent le texte.

Il est diffusé à la radio, transmis par les parachutistes, chanté par les résistants prisonniers, parfois au
moment de leur exécution.

Le chant des partisans

1 Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ?


Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne ?
Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c’est l’alarme.
Ce soir l’ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes.

5 Montez de la mine, descendez des collines, camarades !


Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades.
Ohé, les tueurs à la balle ou au couteau, tuez vite !
Ohé, saboteur, attention à ton fardeau : dynamite...

C’est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frères.
10 La haine à nos trousses et la faim qui nous pousse, la misère.
Il y a des pays où les gens au creux du lit font des rêves.
Ici, nous, vois-tu, nous on marche et nous on tue, nous on crève...

Ici chacun sait ce qu’il veut, ce qu’il fait quand il passe.


Ami, si tu tombes un ami sort de l’ombre à ta place.
15 Demain du sang noir sèchera au grand soleil sur les routes.
Sifflez, compagnons, dans la nuit la Liberté nous écoute...

Ami, entends-tu ces cris sourds du pays qu’on enchaîne ?


Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ?
Oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh...

Paroles de Joseph Kessel et Maurice Druon, 1943 © Éditions Raoul Breton

© Cned, Français 3e — 43
Séquence 7 — séance 2

A Comprendre
1- Strophe 1 :
a) À quoi font référence « le vol noir » et « les corbeaux » ?
b) Que cherchent à souligner « les cris sourds » ?
c) Comment le pays est-il présenté ?
d) Quel est le terme qui lance la révolte ?
2- Strophe 2 :
a) Quels sont les différents moyens mis en œuvre pour la révolte ?
b) Quel est le mode employé dans ces vers ? Justifie son emploi.
3- Strophe 3 :
a) Relève les termes qui montrent une situation désespérée.
b) Quelle est la situation des Français ?
4- Strophe 4 :
Quels sont les risques encourus par tout résistant ?

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant de poursuivre ton travail.


Pour aller plus loin : connecte-toi sur Internet et cherche ce chant… tu y trouveras la version
originale et aussi une autre version adaptée par le groupe Zebda.

B Bilan
Pour répondre à ces questions, appuie-toi sur tes réponses précédentes. La réponse à ces
questions doit te permettre de construire un paragraphe synthétique.

Quel est le but de ce chant ? Que représente-


t-il ?
Que peux-tu dire du rythme de la musique ?
En quoi la jaquette du disque ci-contre
correspond-elle bien aux idées exposées
dans le poème ? (observe bien les différents
éléments dessinés)

Lis ensuite dans le corrigé un exemple de ce qu’il


était possible d’écrire.

Jaquette du disque de 1945


(litho en couleur de René Lefebvre)
© Collection privée / Archives Charmet /
The Bridgeman Art Library

44 — © Cned, Français 3e
séance 2 — Séquence 7

TEXTE B :
Anne, ma sœur Anne

1 Anne, ma sœur Anne,


Si j´ te disais c´ que j´ vois v´nir,
Anne, ma sœur Anne,
J´arrive pas à y croire, c´est comme un cauchemar...
5 Sale cafard!

Anne, ma sœur Anne,


En écrivant ton journal du fond d´ ton placard,
Anne, ma sœur Anne,
Tu pensais qu´on n´oublierait jamais, mais...
10 Mauvaise mémoire!

Elle ressort de sa tanière, la nazi-nostalgie:


Croix gammée, bottes à clous, et toute la panoplie.
Elle a pignon sur rue, des adeptes, un parti...
La voilà revenue, l´historique hystérie!

15 Anne, ma sœur Anne,


Si j´ te disais c´ que j´entends,
Anne, ma sœur Anne,
Les mêmes discours, les mêmes slogans,
Les mêmes aboiements!

20 Anne, ma sœur Anne,


J´aurais tant voulu te dire, p´tite fille martyre:
"Anne, ma sœur Anne,
Tu peux dormir tranquille, elle reviendra plus,
La vermine!"

25 Mais beaucoup d´indifférence, de patience malvenue


Pour ces anciens damnés, beaucoup de déjà-vu,
Beaucoup trop d´indulgence, trop de bonnes manières
Pour cette nazi-nostalgie qui ressort de sa tanière... comme hier!

Anne, ma sœur Anne,


30 Si j´ te disais c´ que j´ vois v´nir,
Anne, ma sœur Anne,
J´arrive pas à y croire, c´est comme un cauchemar...
Sale cafard!

Louis Chédid © Éditions Louis Chedid, Publications Francis Day, 1985.

Écoute si tu peux cette chanson en te connectant par exemple sur Internet : tu seras alors
particulièrement attentif à la partie instrumentale à la fin de la chanson.

le coin des curieux

Anne Frank est une jeune fille juive qui, durant la seconde guerre mondiale a dû entrer dans
la clandestinité pour échapper aux nazis. Le journal qu’elle a tenu a été publié après sa mort.
Pour la connaître mieux, tu peux te connecter sur le site suivant :
http://www.annefrank.org/fr/

© Cned, Français 3e — 45
Séquence 7 — séance 2

A Observer pour comprendre

1- À qui s’adresse le chanteur ?

2- Quels sont les termes qui montrent l’état d’esprit du chanteur ?

3- Que voit-il venir ? Relève tous les termes appartenant au champ lexical à l’appui de ta
réponse.

4- « les mêmes discours, les mêmes slogans, les mêmes aboiements ! » (v. 18-19)

Que peux-tu dire de la construction de cette phrase et sur la succession des termes ?

5- Que regrette le chanteur quand il dit « j’aurais tant voulu te dire …. » ?

6- Comment se caractérise cette « nazi-nostalgie » ? Cite précisément le texte.

Compare tes réponses avec celles du corrigé.

B Bilan

Pour répondre à ces questions, appuie-toi sur tes réponses précédentes. La réponse à ces
questions doit te permettre de construire un paragraphe synthétique.

Quel constat dresse ce texte ? Que cherche-t-il à montrer ?

Quel peut être l’impact d’une telle chanson sur ceux qui l’écoutent ?

Lis ensuite dans le corrigé un exemple de ce qu’il était possible d’écrire avant de poursuivre ton
travail.

46 — © Cned, Français 3e
séance 3 — Séquence 7

Séance 3
La lettre ouverte pour dénoncer…
Durée : 1 h 30

Dans cette séance, tu vas lire deux documents sous forme de lettres. Le premier est un texte
d’Emile Zola, le second un poème de Boris Vian.

L’objectif est de revoir ce qu’est une lettre « ouverte » et de dégager l’argumentation présente dans
ces textes.

Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.

Pour te remettre en mémoire ce qu’est l’affaire Dreyfus, lis d’abord le texte suivant :

L’affaire Dreyfus commence comme une banale histoire d‘espionnage militaire, par la
découverte d’un bordereau à l’ambassade allemande. Après une enquête rapide basée sur des
rumeurs, l’antisémitisme et une vague ressemblance d’écriture, le capitaine Alfred Dreyfus est
condamné et déporté en 1894 vers la Guyane, accusé à tort d’espionnage.
L’affaire commence réellement en 1898 quand l’article « j’accuse » d’Emile Zola est publié dans
l’Aurore. Il met en accusation le jury militaire du procès et réclame la révision du procès. Par la
suite la France va être déchirée en deux partis :
- Les Dreyfusards : qui prônent les droits de l’homme et la notion de justice.
- Les Antidreyfusards : dont l’importance majeure reste l’honneur de l’armée et le bien-fondé de
l’état. Mais de façon cachée le tout est réalisé sur fond d’antisémitisme.
Ces deux partis s’affronteront sur fond de guerre médiatique, d’article publié et de polémiques.
Cette affaire n’est pas seulement politique mais aussi sociale, morale et religieuse
Enfin le nouveau gouvernement de« défense républicaine » de 1899 ordonnera le rapatriement de
Dreyfus, Il sera rejugé en 1899 suite à cela ; il accepte la grâce présidentielle. Cependant, il n’est
réhabilité qu’en 1906, ainsi que réintégré dans l’armée tout en étant nommé chevalier de la légion
d’honneur.

Texte A : J’Accuse de Zola

Cet extrait est la fin de la lettre parue dans le journal l’Aurore.

Si tu veux consulter l’intégralité du document, tu peux consulter le site internet suivant :

http://www.cahiers-naturalistes.com/jaccuse.htm

Lis bien cet extrait avant de répondre aux questions.

© Cned, Français 3e — 47
Séquence 7 — séance 3

LETTRE À M. FELIX FAURE

Président de la République

1 Monsieur le Président,
Me permettez-vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que vous m'avez fait un jour,
d'avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu'ici, est
menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches ?
[…]
5 Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.
J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur
judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son oeuvre néfaste, depuis
trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.
J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par faiblesse d'esprit, d'une
10 des plus grandes iniquités du siècle.
J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves certaines de l'innocence de
Dreyfus et de les avoir étouffées, de s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de
lèse-justice, dans un but politique, et pour sauver l'état-major compromis.
J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même
15 crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des
bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.
J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une enquête scélérate,
j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du
second, un impérissable monument de naïve audace.
20 J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d'avoir fait des
rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une
maladie de la vue et du jugement.
J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse, particulièrement dans L'Eclair et
dans L'Echo de Paris, une campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir leur faute.
25 J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur
une pièce restée secrète, et j'accuse le second conseil de guerre d'avoir couvert cette illégalité, par
ordre, en commettant à son tour le crime juridique d'acquitter sciemment un coupable.
En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30 et 31 de
la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c'est volontairement
30 que je m'expose.
Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai contre eux ni
rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte
que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter l'explosion de la vérité et de la
justice.
35 Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et qui a
droit au bonheur. Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me
traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour !
J'attends.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de mon profond respect.

Émile Zola

48 — © Cned, Français 3e
séance 3 — Séquence 7

L’Aurore du13 Janvier 1898 © Collection privée / Archives Charmet / The Bridgeman Art Library

A Comprendre
1- En t’aidant du paratexte, réponds aux questions suivantes :

a) À qui cette lettre est-elle adressée ?

b) Cette lettre a-t-elle été envoyée directement à son destinataire ? Explique en détail.

2- De quelle manière le titre même de la lettre est-il repris ?

3- Quelles personnes Émile Zola accuse-t-il ?

4- Comment cette accusation est-elle mise en valeur par les premiers mots de chaque phrase ?

5- Quelle est la figure de style utilisée alors ?

6- Relève le champ lexical du mensonge.

7- « Et l’acte que j’accomplis ici n’est qu’un moyen révolutionnaire pour hâter l’explosion de la
vérité et de la justice. Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière, au nom de l’humanité qui a
tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme.
Qu’on ose donc me traduire en cour d’assises et que l’enquête ait lieu au grand jour. »

a) Quel est le but d’Emile Zola en écrivant cette lettre ?

b) Dans les expressions soulignées, quelle est la figure de style utilisée ?

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant de poursuivre.

Texte B : Le déserteur, Boris Vian

La chanson de Boris Vian a été écrite à la fin de la guerre d’Indochine (1946-1954) et au début
de la guerre d’Algérie qui a débuté en 1954.
Cette chanson a été censurée jusqu’en 1962 (c’est-à-dire qu’elle a été interdite de diffusion par le
gouvernement).
Au moment de la guerre du Vietnam, elle est reprise aux Etats-Unis par une chanteuse américaine,
Joan Baez.
Elle a également été chantée en France par Mouloudji.
© Cned, Français 3e — 49
Séquence 7 — séance 3

Lis-la bien avant de répondre aux questions.


Le déserteur

1 Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
5 Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
10 Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
15 Ma décision est prise
Je m'en vais déserter

Depuis que je suis né


J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
20 Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
25 Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
30 Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
35 De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens :
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
40 Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
45 Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer

Boris Vian © Éditions musicales Djanik, 1954.

50 — © Cned, Français 3e
séance 3 — Séquence 7

1- Cherche dans un dictionnaire le sens du verbe « déserter ».

2- Quelle raison Boris Vian donne-t-il au fait qu’il a l’intention de déserter, dans la première
strophe ?

3- À quel vers apparaît réellement sa décision ?

4- Deuxième strophe :

a) Quelles personnes évoque-t-il ?

b) Quelles autres raisons donne-t-il à sa décision ?

5- Troisième strophe :

a) À quel temps est conjugué le verbe du premier vers ?

b) À quel mode sont conjugués les verbes des vers 37 à 40 ?

c) Qu’a l’intention de faire le poète ?

Connecte-toi sur Internet et écoute cette chanson dans la version de Boris Vian. Si tu souhaites
l’écouter dans une autre version, tu peux chercher avec les mots clefs « déserteur », « Reggiani » ou
« Mouloudji ».

6- Le fait qu’il s’agisse d’une chanson rend-il le texte plus fort ?

j e sais déjà La lettre ouverte


Une lettre ouverte est un texte qui, bien qu’adressé à une ou plusieurs personnes
en particulier, est diffusée publiquement afin d’être lu par le plus grand nombre de
personnes.
Cette publication permet de diffuser largement le point de vue de son auteur, et de
servir une cause.
Pour cela, c’est le plus souvent la presse qui est utilisée, mais une lettre ouverte
peut également prendre la forme d’une affiche, d’une chanson, d’un tract, ou plus
récemment être mise en ligne sur Internet.

© Cned, Français 3e — 51
Séquence 7 — séance 4

Séance 4
Le participe passé des verbes pronominaux

Durée : 1 h 30

Dans cette séance, tu vas apprendre les règles particulières d’accord du participe passé des verbes
pronominaux.

Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.

A Qu’est-ce qu’un verbe pronominal ?


1- Choisis la bonne réponse :

a) Il se promène. verbe pronominal vrai  faux


b) Il le promène. verbe pronominal vrai  faux


2- Choisis la bonne réponse :

a) Le verre s’est brisé. Pronom COD  Pronom COI 

b) Il s’est cassé le bras. Pronom COD  Pronom COS 

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant d’apprendre le Je retiens qui suit.

j e retiens Les verbes pronominaux


 Un verbe pronominal se forme à l’aide d’un pronom qui renvoie au sujet, appelé
pronom réfléchi :
Ex : je me promène, tu te promènes, il se promène, nous nous promenons, vous vous
promenez, ils se promènent.
 On distingue parmi les verbes pronominaux :
- Les verbes essentiellement pronominaux, qui n’existent pas sous une autre forme.
Ex. : se souvenir (le verbe *souvenir seul n’existe pas).
- Les verbes pronominaux de sens réfléchi quand le sujet fait l’action sur lui-même.
Ex : Il s’est promené. (= Il a promené « lui-même ».)
- Les verbes pronominaux de sens réciproque quand les sujets (toujours au pluriel),
font l’action l’un sur l’autre.
Ex : Georges et Richard se regardent. (= Chaque personne regarde l’autre.)

52 — © Cned, Français 3e
séance 4 — Séquence 7

B Appliquer :
Dans les phrases suivantes, souligne les verbes pronominaux et dis s’ils sont essentiellement
pronominaux, pronominaux de sens réfléchi ou pronominaux de sens réciproque.
a- Les oiseaux se sont enfuis.
b- Nous nous sommes parlé.
c- Ils se sont rencontrés à la plage.
d- Elle s’est inscrite à l’université.

C Comment accorder le participe passé d’un verbe pronominal ?


1- a) Précise la fonction du pronom réfléchi en gras :

COD COI COS


Elles se sont rencontrées à la plage.
Les tempêtes se sont succédé tout l’été.
Ils se sont réunis pour organiser une fête.
Je me suis fixé des objectifs ambitieux.
Ils se sont frotté les mains.
b) Que remarques-tu concernant l’accord du participe passé dans ces phrases ?

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant de lire et mémoriser le Je retiens suivant.

j e retiens
L’accord du participe passé des verbes pronominaux
 Le participe passé s’accorde avec le sujet si :
- Le verbe est essentiellement pronominal :
Ex. : Elle s’est évanouie. (Ce verbe n’est que pronominal car le verbe « évanouir » n’existe
pas.)
- Le verbe pronominal a un sens passif :
Ex. : Les vendanges se sont faites en Octobre. (= Les vendanges ont été faites en Octobre)
 Le participe passé des verbes pronominaux de sens réciproque et de sens réfléchi
se fait avec le COD si :
- Le pronom réfléchi est le COD :
Ex. : Ils se sont lancés dans cette aventure. (Se = COD)
- Un COD (autre que le pronom réfléchi) est placé avant le verbe :
Ex. : La balle qu’ils se sont lancée est restée dans le jardin.
 Le participe passé des verbes pronominaux de sens réciproque et de sens réfléchi
est invariable si :
- Le pronom réfléchi est COI ou COS et que le COD est placé après le verbe :
Ex. : Ils se sont lancé des plaisanteries. (« des plaisanteries » = COD / Se = COS)

© Cned, Français 3e — 53
Séquence 7 — séance 4

D Appliquer
1- Conjugue les verbes pronominaux des phrases suivantes au passé composé en accordant
chaque participe passé si nécessaire.

a) Ma sœur s’aperçoit de son erreur.

b) Il se tait.

c) Elle se lave les mains.

d) Elles s’évanouissent.

e) Il se prépare au concours.

2- Écris deux phrases dans les lesquelles tu utiliseras :

a) « ils se sont rappelé »

b) « ils se sont rappelés »

54 — © Cned, Français 3e
séance 5 — Séquence 7

Séance 5
Dénoncer le racisme et la discrimination dans
les textes et les images
Durée : 1 h 30
Dans cette séance, tu vas lire et observer des documents différents : extrait de roman, texte de
chanson, image… afin de dégager leur force de persuasion.
Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.
DOCUMENT A
Lis le texte suivant et réponds aux questions :
En 1931, le narrateur et son ami, Badimoin, originaires de Nouvelle-Calédonie, sont emmenés à
Paris pour figurer à l’Exposition coloniale, où ils sont présentés comme des cannibales. Ils
s’échappent et s’enfuient vers Paris.

1 Un grand bâtiment blanc à colonnades occupait toute la droite de l’esplanade de Reuilly ;


Badimoin la traversait en courant, pour se réchauffer, lorsqu’une voiture a surgi de nulle part,
lancée à pleine vitesse. Les pneumatiques ont glissé sur les pavés luisants, l’auto a fait une
embardée pour l’éviter et s’est arrêtée à quelques mètres, près d’une mappemonde où les
5 possessions françaises dessinaient de larges taches rouges. Le chauffeur a fait pivoter un petit
carreau rectangulaire. Il a détaillé Badimoin qui ne se remettait pas encore de sa peur et s’est mis
à hurler :
– Tu ne peux pas faire gaffe, le chimpanzé ! Tu descends de ta liane ou quoi… tu te crois
encore dans ta brousse ?
10 Une femme s’est mise à rire, à l’arrière, puis la voiture a filé vers les fortifications en crachant
des nuages de fumée. J’ai pris Badimoin par l’épaule.
– Tu vois, on fait des progrès : pour lui, nous ne sommes pas des cannibales, mais seulement
des chimpanzés, des mangeurs de cacahuètes. Je suis sûr que, quand nous serons arrivés près des
maisons, là-bas, nous serons devenus des hommes.
15 Nous sommes entrés dans la ville. Une jungle de pierre, de métal, de bruit, de danger. Les
publicités électriques, les lumières des candélabres, des restaurants, les phares des autos
transformaient la nuit en jour. Un véritable fleuve automobile nous séparait encore de Paris, et
nous ne savions comment le franchir sans risquer notre vie. Nous avions failli mourir mille fois
au cours de ces premières heures de liberté. J’ignorais jusqu’à la signification des mots
20 « passages cloutés », « feu tricolore » ! Le fleuve suspendait son cours de manière
incompréhensible, pendant quelques instants, et il suffisait que nous nous décidions à le traverser
pour que les moteurs se remettent à rugir. Cela faisait bien vingt minutes que nous étions rejetés
sur le trottoir, comme des naufragés sur un rivage hostile, quand un groupe de fêtards s’est
annoncé en braillant. Ils étaient trop saouls pour s’enquérir de qui nous étions. Ils ne se sont
25 même pas aperçus que nous avions emprunté leur sillage et ont passé le boulevard en marchant au
pas sur le rythme d’une chanson que les haut-parleurs de l’Exposition ne cessaient de diffuser.

Didier Daeninckx, Cannibale © Editions Verdier, 1998.


Note :
Cannibale : Ce mot est emprunté à l’espagnol. Avec le mot canibal, Christophe Colomb
désignait les Indiens des Caraïbes qu’il pensait être des mangeurs d’hommes.
Le mot anthropophage est un synonyme d’origine grecque.

© Cned, Français 3e — 55
Séquence 7 — séance 5

A Comprendre

1- Où se trouvent les deux personnages ? (Utilise le paratexte* pour répondre.)

2- Lignes 1 à 7 :

a) Quels sont les éléments de la ville qui surprennent ces personnages?

b) Que ressent Badimoin ?

3- Comment se comporte le chauffeur de la voiture ?

4- a) Quel terme emploie-t-il pour s’adresser à Badimoin ?

b) Pourquoi le tutoie-t-il ?

c) Qu’est-ce que le tutoiement révèle ?

5- Ligne 15 et suivantes :

a) Comment les personnages caractérisent-ils la ville ? Pourquoi ?

b) Relève les deux expressions qui décrivent la ville et son activité (ligne 15 à 17).

c) Quelle est la figure de style utilisée ?

6- « Il suffisait que nous nous décidions à le traverser pour que les moteurs se mettent à
rugir »

a) Quelle est la fonction de la proposition soulignée ?

b) Que cherche-t-elle à montrer ?

7- Explique, en relisant la fin du texte, comment les deux personnages sont considérés.

8- Quel sentiment le narrateur veut-il inspirer au lecteur ?

Vérifie tes réponses dans le corrigé avant de poursuivre.

j e retiens
Pour défendre une idée, l’auteur cherche à toucher le lecteur dans ses sentiments, en
suscitant la pitié, la révolte, la sympathie.
Pour cela, il fait en sorte que le lecteur s’identifie à un ou plusieurs personnages.

B Écrire

Raconte cette scène vue par un passant : il a, par hasard, suivi les « cannibales » et raconte
alors ce qu’il a vu à un ami.

Précise les sentiments qu’il a éprouvés et qu’il éprouve encore pour les deux personnages.

56 — © Cned, Français 3e
séance 5 — Séquence 7

DOCUMENTS B et C

Affiche publicitaire de 1930 © Bibliothèque Forney / Roger-Viollet

1- Comment les slogans publicitaires pour le savon sont-ils mis en valeur ?

2- Qu’arrive-t-il à la main de l’homme quand il se lave ?

3- Qu’est-ce que cela laisse sous-entendre ?

4- Observe le visage de l’homme : que semble-t-il ressentir ?

5- À quel métier est associé cet homme ?

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Séquence 7 — séance 5

6- L’image ci-dessous est une autre publicité, bien plus récente.

a) Que représentent les panneaux jaunes sur lesquels sont écrits « before » (avant) et
« after » (après) ? Quel est le message publicitaire ici exprimé par la marque Dove ?

b) O
 bserve la couleur de peau des trois femmes devant ces panneaux. Quelle autre
interprétation a pu être faite ? Est-ce une dérive proche de la publicité de 1930 ?

© Dove / Unilever

58 — © Cned, Français 3e
séance 5 — Séquence 7

C Écriture

« Avez-vous besoin de cacher votre vraie personnalité pour être accepté ? »

À partir de cette image, des affiches étudiées, du texte de D. Daeninckx, explique ce qu’est la
discrimination et ce qu’elle implique.

Quel est, à ton avis, le moyen le plus efficace pour interpeller la population ? Pourquoi ?

© Cned, Français 3e — 59
Séquence 7 — séance 6

Séance 6
Le participe passé des verbes impersonnels et le participe passé
suivi d’un infinitif
Durée : 1 h 00
Dans cette séance, tu vas travailler sur des cas particuliers d’accord du participe passé : lorsqu’il est
suivi d’un infinitif, et lorsqu’il s’agit d’un verbe impersonnel.
Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.

A Les verbes impersonnels

j e sais déjà
La forme impersonnelle du verbe

On dit qu’un verbe est employé à la forme impersonnelle quand il a pour sujet le pronom
« il » qui ne reprend aucun nom ou groupe nominal cité dans le texte.

1- Dans les phrases suivantes, souligne les tournures impersonnelles :

- Il a eu ce qu’il méritait.

- Il est tombé des mètres de neige cette année.

- Il est tombé dans la cour de récréation.

- Quelle catastrophe il s’est produit !

- Il lui a plu tout de suite.

- Il a plu la semaine dernière.

2- Que remarques-tu concernant le participe passé de ces verbes à la forme impersonnelle ?

Vérifie tes réponses puis lis et mémorise le « Je retiens » suivant.

j e retiens Le participe passé des verbes impersonnels


Le participe passé des verbes impersonnels est toujours invariable :
il a plu, il s’est produit...
Ex : Après la fuite d’eau qu’il y a eu, nous avons été très vigilants.

60 — © Cned, Français 3e
séance 6 — Séquence 7

B Le participe passé suivi d’un infinitif


Observe les phrases suivantes dans lesquelles des participes passés sont suivis d’un
infinitif.
 Les acteurs jouent la pièce que nous avons entendu répéter.
 Ces fleurs, je les ai vues se faner peu à peu.
 Mon frère a compté les voitures qu’il a vues passer.
1- Quel autre mot de la phrase remplace chacun des pronoms en gras ?
2- Quelle est la fonction grammaticale de chacun de ces pronoms par rapport au verbe à
l’infinitif ?
3- Quel est le seul de ces pronoms qui ne commande pas l’accord du participe passé ?

j e retiens Le participe passé suivi d’un infinitif


 Le participe passé s’accorde avec le sujet du verbe à l’infinitif.
Ex : Les enfants jouent dehors. Nous les avons entendus crier toute la journée.
Explication :
« Nous avons entendu les enfants crier » : « les », pronom mis pour « les enfants » est
sujet de l’infinitif « crier ». Il y a donc accord du participe passé avec « les ».
 Le participe passé est invariable dans tous les autres cas.
Ex. : La chanson que j’ai entendu chanter est magnifique.
Explication :
« J’ai entendu chanter une chanson » : le pronom « que » reprend « chanson » et est
COD du verbe « chanter ». Donc « entendu » ne s’accorde pas.
À noter : le participe passé du verbe faire + infinitif est toujours invariable :
Ex : Nous les avons fait examiner.

C Application
1- Réécris les phrases suivantes en remplaçant le mot en gras par celui donné entre
parenthèses à la fin de la phrase, et en faisant toutes les modifications nécessaires :
a) L’avion passe si haut que nous ne l’avons pas entendu venir. (Les avions)
b) Mon ami était en cours : la CPE l’a envoyé chercher. (Mon amie)
c) Quel effort il a fallu faire pour arriver au sommet ! (Quels efforts)
2- Complète les phrases suivantes avec le participe passé du verbe faire et accorde-le s’il y a
lieu.
a) Quelle bêtise as-tu encore ………………………….. ?
b) La CPE a ………………………….. appeler mon amie.
c) Ces gâteaux ont été ………………………….. par un grand pâtissier.
d) On nous a ………………………….. attendre longtemps.

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Séquence 7 — séance 7

Séance 7
Un discours engagé
Durée : 1 heure
Tu vas découvrir dans cette séance un discours engagé très célèbre qui a eu une conséquence très
importante : l’abolition de la peine de mort en France.

Prends ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le
travail demandé.

En 1981, Robert Badinter, ministre de la Justice, est chargé par le président de la République
François Mitterrand, d’œuvrer pour abolir la peine de mort. Le texte qui suit est un extrait de son
discours à l’Assemblée Nationale.

Tu peux écouter ce discours ou le lire en te connectant à Internet sur le site suivant :

http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/badinter.asp
1 Il s'agit bien, en définitive, dans l'abolition, d'un choix fondamental, d'une certaine conception
de l'homme et de la justice. Ceux qui veulent une justice qui tue, ceux-là sont animés par une
double conviction : qu'il existe des hommes totalement coupables, c'est-à-dire des hommes
totalement responsables de leurs actes, et qu'il peut y avoir une justice sûre de son infaillibilité au
5 point de dire que celui-là peut vivre et que celui-là doit mourir.
À cet âge de ma vie, l'une et l'autre affirmations me paraissent également erronées. Aussi
terribles, aussi odieux que soient leurs actes, il n'est point d'hommes en cette terre dont la
culpabilité soit totale et dont il faille pour toujours désespérer totalement. Aussi prudente que soit
la justice, aussi mesurés et angoissés que soient les femmes et les hommes qui jugent, la justice
10 demeure humaine, donc faillible.
Et je ne parle pas seulement de l'erreur judiciaire absolue, quand, après une exécution, il se
révèle, comme cela peut encore arriver, que le condamné à mort était innocent et qu'une société
entière - c'est-à-dire nous tous - au nom de laquelle le verdict a été rendu, devient ainsi
collectivement coupable puisque sa justice rend possible l'injustice suprême. Je parle aussi de
15 l'incertitude et de la contradiction des décisions rendues qui font que les mêmes accusés,
condamnés à mort une première fois, dont la condamnation est cassée pour vice de forme, sont de
nouveau jugés et, bien qu'il s'agisse des mêmes faits, échappent, cette fois-ci, à la mort, comme si,
en justice, la vie d'un homme se jouait au hasard d'une erreur de plume d'un greffier. Ou bien tels
condamnés, pour des crimes moindres, seront exécutés, alors que d'autres. plus coupables,
20 sauveront leur tête à la faveur de la passion de l'audience, du climat ou de l'emportement de tel ou
tel.
Cette sorte de loterie judiciaire, quelle que soit la peine qu'on éprouve à prononcer ce mot quand
il y va de la vie d'une femme ou d'un homme, est intolérable. […]
Le choix qui s'offre à vos consciences est donc clair : ou notre société refuse une justice qui
25 tue et accepte d'assumer, au nom de ses valeurs fondamentales - celles qui l'ont faite grande et
respectée entre toutes - la vie de ceux qui font horreur, déments ou criminels ou les deux à la fois,
et c'est le choix de l'abolition ; ou cette société croit, en dépit de l'expérience des siècles, faire
disparaître le crime avec le criminel, et c'est l'élimination. Cette justice d'élimination, cette justice
d'angoisse et de mort, décidée avec sa marge de hasard, nous la refusons. Nous la refusons parce
30 qu'elle est pour nous l'anti-justice, parce qu'elle est la passion et la peur triomphant de la raison et
de l'humanité.
J'en ai fini avec l'essentiel, avec l'esprit et l'inspiration de cette grande loi. Raymond Forni,
62 tout— © àCned,
l'heure,
Français 3e en a dégagé les lignes directrices. Elles sont simples et précises.
Parce que l'abolition est un choix moral, il faut se prononcer en toute clarté. Le Gouvernement
35 vous demande donc de voter l'abolition de la peine de mort sans l'assortir d'aucune restriction ni
d'aucune réserve.

Robert Badinter, Discours sur l’abolition de la peine de mort à l’Assemblée Nationale, 1981.
il y va de la vie d'une femme ou d'un homme, est intolérable. […]
Le choix qui s'offre à vos consciences est donc clair : ou notre société refuse une justice qui
25 tue et accepte d'assumer, au nom de ses valeurs fondamentales - celles qui l'ont faite grande et
respectée entre toutes - la vie de ceux qui font horreur, déments ou criminels ou les deux à la fois,
et c'est le choix de l'abolition ; ou cette société croit, en dépit de l'expérience des siècles, faire
disparaître le crime avec le criminel, et c'est l'élimination. Cette justice séance
d'élimination, cette justice
7 — Séquence 7
d'angoisse et de mort, décidée avec sa marge de hasard, nous la refusons. Nous la refusons parce
30 qu'elle est pour nous l'anti-justice, parce qu'elle est la passion et la peur triomphant de la raison et
de l'humanité.
J'en ai fini avec l'essentiel, avec l'esprit et l'inspiration de cette grande loi. Raymond Forni,
tout à l'heure, en a dégagé les lignes directrices. Elles sont simples et précises.
Parce que l'abolition est un choix moral, il faut se prononcer en toute clarté. Le Gouvernement
35 vous demande donc de voter l'abolition de la peine de mort sans l'assortir d'aucune restriction ni
d'aucune réserve.

Robert Badinter, Discours sur l’abolition de la peine de mort à l’Assemblée Nationale, 1981.
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/badinter.asp
http://www.assemblee-national.fr/histoire/badinter.asp

Note : un orateur est la personne qui parle.

1- Que veut obtenir l’orateur ?

2- Ligne 6 : quelle est l’expression qui montre que l’orateur s’implique personnellement ?

3- « Aussi prudente que soit la justice, aussi mesurés et angoissés que soient les femmes et les
hommes qui jugent, la justice demeure humaine, donc faillible. » (l. 8 à 10)

a) Cherche dans le dictionnaire et recopie la définition de « faillible »

b) Quelle idée est exprimée ici ?

4- « Cette sorte de loterie judiciaire, quelle que soit la peine qu’on éprouve à prononcer ce mot
quand il y va de la vie d’une femme ou d’un homme, est intolérable. » (l.22-23)

a) Comment l’orateur caractérise-t-il certains jugements ?

b) Quelle est la force de cette expression ?

5- « Le choix qui s’offre à vos consciences est donc clair. » (l. 24)

a) À qui s’adresse l’orateur ?

b) Pourquoi interpelle-t-il directement son auditoire ?

c) Quel impact cela peut-il avoir ?

© Cned, Français 3e — 63
Séquence 7 — séance 7

6- Observe l’image ci-contre :


L’objet représenté sur cette affiche est
fait en cire.
a) Explique le lien entre cette image et le
texte que tu viens de lire.
b) « La peine de mort est condamnée
à disparaître » : en quoi ce slogan
est-il fort ? Explique particulièrement
l’utilisation du mot « condamnée ».

Affiche de la campagne d’Amnesty International


contre la peine de mort en 2011 © TBWA / Paris

7- Écriture

Tu es journaliste et tu dois écrire un court article pour rendre compte du discours et des
arguments donnés par Robert Badinter dans son discours.

Écris cet article.

Lis dans le livret de corrigés un exemple d’article.

64 — © Cned, Français 3e
séance 8 — Séquence 7

Séance 8
Je m’évalue
Durée : 1 heure

Comme à la fin de chaque séquence, tu vas faire un bilan de ce que tu as appris. Cela te permettra

de faire le point sur ce que tu dois savoir, et ce que tu dois être capable de faire pour le devoir.

Complète maintenant le tableau suivant. Tu peux bien sûr utiliser ton cours si tu as oublié quelque

chose. Quand tu auras fini, prends le corrigé afin de vérifier tes réponses. Il est très important que

ce tableau de synthèse ne comporte pas d’erreur.

Je connais Je suis capable de


 Une tapisserie qui reprend le poème  Citer l’artiste auteur de cette tapisserie :
intitulé ……………………………...... .
…………………………………...…………….
 Une chanson qui est un ……………………..
 Donner le titre de cette chanson :
à la résistance.
…………………………………...…………….
 Expliquer dans quel contexte elle a été
écrite :
…………………………………...…………….
…………………………………...…………….
…………………………………...…………….
 La lettre d’Émile Zola au président de la  Dire comment on appelle ce type de
lettre :
République. Elle s’appelle ……….………. . Elle
Il s’agit d’une lettre ……………………… .
défend le capitaine ……...………….. .
 Les verbes pronominaux  Indiquer le sens de ces verbes
pronominaux :
Je sais qu’un verbe pronominal peut être
Il s’est promené : …………………..………
de sens ……………………… ou de sens
Ils se regardent : …………….………..……
……………………… .

© Cned, Français 3e — 65
Séquence 7 — séance 8

 Les accords particuliers du participe  Accorder correctement les participes


passés passés des verbes entre parenthèses :
- Le participe passé s’accorde avec le - Elle s’est (enfuir) …………………… de chez
sujet si le verbe est essentiellement ses parents qui la battaient.
…………..…………..........…………………… .
- Les toits se sont (couvrir) ……...........……
- Le participe passé des verbes
………… de neige.
impersonnels est toujours
…………..…………..........…………………… . - Elles se sont (embrasser) ……………………
avant de partir.
- L’accord du participe passé des verbes
pronominaux de sens réciproque et de - Les ouvriers se sont (succéder)
sens réfléchi se fait si le pronom réfléchi …………………… pour terminer la maison
est …………..…………..........………………. . à temps.
- Le participe passé suivi d’un verbe à - Les enfants étaient fatigués. Leurs mères
l’infinitif …………………… avec le COD ont (penser) …………………… les garder à
du verbe conjugué si celui-ci est placé la maison.
…………………… le verbe et s’il est
…………………… du verbe à l’infinitif.

66 — © Cned, Français 3e
séance 8 — Séquence 7

Note :

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