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MISSION PAPILLAGOU
Avril 2017
Ce guide pratique a pour objectif d’aider à la mise en place d’actions de prévention à partir de l’outil « Mission
Papillagou »
La MMPCR
La Mission métropolitaine de prévention des conduites à risques, créée à l’initiative du Conseil départemental de Seine-
Saint-Denis et de la Ville de Paris, a pour objectif général d’accompagner les professionnels dans la compréhension des
processus des conduites à risques, et la mise en œuvre d’actions de prévention qui visent à limiter l’incidence et à
réduire les effets négatifs de ces conduites. Cette structure-ressource métropolitaine intervient à la croisée des champs
de la cohésion sociale, de l’éducatif, de la santé, de l’insertion et de la justice, pour promouvoir la prévention des
conduites à risques.
APCIS
Accueils Préventions Cultures : Intercommunautaire et Solidaire (APCIS) est une association implantée sur le quartier du
Clos-Saint-Lazare à Stains, mais qui rayonne aussi sur la ville et d’autres communes (Bagnolet, Epinay-sur-Seine). Sur le
quartier du Clos, elle est une ressource de première intention pour les habitants de tout âge qui y trouvent
accompagnement scolaire, loisirs, accès à la culture, accompagnement social, juridique et vers l’insertion. L’APCIS
intervient aussi dans le champ de la prévention des conduites à risques.
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S O M M A I R E
p.3
Introduction p. 4
I. Objectifs et méthode p. 8
2
II. Déroulement des trois séances p. 20
3. La formation 30
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INTRODUCTION
Pour lire ce « Guide pratique », il est conseillé d’avoir sous la main le document « Outil de prévention Mission
Papillagou » pour relier le propos aux activités proposées dans le jeu.
L’efficacité d’une action préventive construite à partir de l’outil « Mission Papillagou » est étroitement liée à un cadre :
- qui permet aux enfants d’élaborer sur les questions du bien-être et de la santé mentale à partir de questions reliées à
leur vie de tous les jours,
- qui accorde aux enfants un temps suffisant pour qu’ils prennent le temps d’y réfléchir,
- qui implique les enfants dans l’élaboration de messages de prévention qui leur soient adaptés.
Mobiliser, durant 9 heures, 4 à 6 adultes pour intervenir auprès d’une seule classe pourra sembler hors de portée pour
un grand nombre de structures éducatives. La deuxième partie du Guide pratique suggère une méthode (testée et
validée) pour mobiliser des ressources humaines adaptées à la réalisation du projet : recruter des étudiants (notamment
étudiants infirmiers, éducateurs, psychologues…) dans le cadre d’un stage, afin qu’ils assistent le « meneur de jeu » qui
pilote l’animation.
Si l’animation des débats en groupe-classe exige des compétences importantes – et doit donc être assurée par un
professionnel chevronné -, les consignes pour l’animation des activités menées en équipes sont suffisamment
structurées pour que des étudiants encadrés et qui ont bénéficié d’une sensibilisation à l’outil, soient à même d’épauler
efficacement le « meneur de jeu ». Nous montrerons aussi qu’une telle expérience est bénéfique pour les jeunes
professionnels.
Les deux premières parties du Guide pratique ont une fonction de formation à l’outil. La première présente les objectifs
et la méthode. La deuxième présente le déroulement des trois séances. La troisième partie dispense des conseils pour
organiser l’activité avec les établissements scolaires et pour recruter et sensibiliser des stagiaires à l’outil.
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2. Historique de la création de l’outil Mission Papillagou
L’outil de prévention Mission Papillagou est une adaptation au contexte des collèges des quartiers populaires, d’un outil
de prévention intitulé « Papillagou et les enfants de Croque-Lune », créé il y a une quinzaine d’années par l’Association
Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA) et l’Institut Suisse de prévention des addictions (ISPA).
Cet outil avait été validé par la Mission Interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) et
recommandé pour mener des actions de prévention globale en direction des enfants scolarisés en primaire.
Mission Papillagou est une version remaniée de cet outil, réalisée par l’association APCIS en partenariat avec la Mission
métropolitaine de prévention des conduites à risques et la Mission de prévention de la violence scolaire du Conseil
départemental de la Seine-Saint-Denis. L’enjeu était d’adapter l’outil à un public d’élèves de 6e et de 5e et à une
intervention dans le contexte de quartiers populaires.
L’espace imaginaire de l’outil a été réinventé pour lui donner une tonalité « science-fiction ». Certaines activités de
l’outil initial ont été supprimées ; d’autres ont été créées pour susciter des questionnements sur les tensions de genres,
sur les conduites à risques et sur des réalités spécifiques aux quartiers populaires, en particulier la présence de trafics de
drogues qui sollicitent des enfants pour qu’ils fassent les guetteurs, par exemple. L’outil conserve néanmoins nombre
d’activités proposées par Papillagou et les enfants de Croque-Lune, ainsi que son objectif central, à savoir le
développement de l’estime de soi par la promotion des compétences psychosociales.
Mission Papillagou est proposée à des groupes classes de 6e ou 5e, sur trois séances de 3 heures (soit 9 heures par
classe).
Chacune des trois séances est décomposée en deux temps :
- durant la première partie de la séance (1h30-1h45 environ), les enfants participent à des activités en équipe. Ils sont
répartis en quatre équipes. Ils réalisent deux activités au cours de chaque séance. Chacune des équipes est
accompagnée par un intervenant dont le rôle est de s’assurer que les enfants comprennent bien les consignes, de
stimuler leur réflexion et de réguler d’éventuelles tensions.
- dans la seconde partie de la séance (1h00-1h15 environ), les enfants participent, en groupe classe, à un débat animé
par le « meneur de jeu ».
La 1re séance démarre par la lecture d’un conte qui relate un voyage interstellaire sur une planète étrange, nommée
Solaris (voir Outil, p. 3-4).
Solaris
Le conte évoque une planète étrange appelée "Solaris", planète qui est en fait un gigantesque cerveau capable d'envoyer des
"rêves" étranges aux hommes qui viennent la visiter... Rêves dangereux, car à cause d’eux les hommes sont enclins à décider de
rester à jamais sur cette planète. Le nom de la planète est emprunté au roman de science-fiction "Solaris", écrit en 1961 par
l'auteur polonais Stanislas Lem. Le roman a été adapté au cinéma en 1972 par le réalisateur soviétique Andreï Tarkovski et en
2002 par Steven Soderbergh.
Il y a cinq règles du jeu : 1) Chaque équipe doit garder secret le nom qui lui a été attribué jusqu’à la fin du jeu. 2) Sauf
exceptions, les décisions, au sein des équipes, sont prises par consensus. 3) Lorsqu’une équipe, pour mener son activité,
visite une autre équipe, cette dernière doit arrêter sa propre activité pour l’accueillir. 4) Une seule équipe à la fois au
Poste Central. 5) Le respect mutuel est impératif !
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A) Le temps d’activités en équipes
Les quatre équipes sont formées soit par tirage au sort, soit par le professeur principal de la classe. Demander aux
professeur d’accomplir cette tâche a plusieurs intérêts : 1) impliquer le professeur ; 2) la composition des équipes
permet de mettre au travail des difficultés spécifiques au groupe classe : par exemple, réunir dans une même équipe
deux élèves notoirement en conflit, mais qui devront coopérer pour réussir les activités de leur équipe, peut faciliter un
changement positif dans leur relation ; former des équipes mixtes permet de travailler sur d’éventuelles tensions entre
garçons et filles... Une fois les quatre équipes formées, chacune d’elles rejoint un adulte qui les accompagnera durant
leurs parcours. Les équipes découvrent un espace de jeu qui s’assimile à jeu de piste : dans l’espace dédié à l’activité
(une grande salle, deux classes attenantes, etc.), les enfants pourront distinguer un bureau avec un panneau sur lequel
est inscrit Poste central et six chaises avec un panneau sur lequel est inscrit Camp de base et un nom de planète. À côté
des Camps de base sont disposées des enveloppes qui contiennent des consignes d’activités à mener.
Camp de
base
ESPACE DE JEU
Camp de
Pluton
base
Jupiter
POSTE
CENTRAL
Camp de
base Camp de
Mars base
Saturne
Camp de
Camp de
base
base
Neptune
Vénus
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Ajoutons qu’au Poste Central, on trouve aussi une affichette qui rappelle les règles du jeu (voir Outil, p. XX).
Une fois en possession de son matériel, l’équipe libère la place pour qu’une autre puisse s’y rendre. L’équipe s’installe
dans un lieu à sa convenance pour lire le texte de sa Feuille de route et pour résoudre la devinette.
La résolution de la première devinette
Quand les enfants ont résolu la devinette, ils vérifient la réponse (qui se trouve au dos) et découvrent le nom du Camp
de base qu’ils doivent rejoindre.
La première activité
Au Camp de base, le groupe trouve une enveloppe marquée d’une couleur correspondant à la couleur du logo de leur
équipe. En l’ouvrant, les enfants trouvent l’activité qu’ils doivent mener.
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I. Objectifs et méthode
En première analyse, faire de la prévention consiste à convaincre une personne d’adopter tel comportement favorable à
sa santé et à son bien-être, ou qui pourrait l’aider à réduire les risques et les dommages liés à tel ou tel de ses
comportements.
Cela parait simple dit comme cela… Mais dans les faits l’adhésion d’une personne à un message de prévention dépend
moins de la force de conviction et de l’habileté « rhétorique » de l’émetteur du message de prévention, que :
1. du désir qu’a la personne qui reçoit ce message de faire quelque chose de positif pour elle-même. Et ce désir de faire
quelque chose de positif pour soi-même dépend de l’estime que la personne a pour elle-même ; il en résulte que le
préventeur doit s’employer à renforcer l’estime de soi de la personne qui reçoit le message de prévention.
2. L’efficacité du message de prévention dépend aussi de la possibilité qu’a la personne qui en est destinataire de
percevoir qu’un changement de son comportement sera positivement accueilli au sein de son groupe d’appartenance
(notamment par les camarades de son groupe classe) ; il en résulte que le préventeur doit intervenir en médiation avec
le groupe pour que les changements soient perçus comme positifs.
3. L’efficacité du message de prévention dépend encore de la possibilité, pour la personne qui en est destinataire, de
faire le deuil d’autres formes de « valorisation » de soi, en particulier de celles que confère l’adoption de « conduites à
risque » qui permettent d’acquérir une forme de « prestige » aux yeux des autres ; il en résulte que le préventeur doit
favoriser la prise de conscience qu’il y a d’autres manières de se valoriser.
4. L’efficacité du message de prévention dépend enfin de la capacité qu’a la personne qui en est destinataire de se
sentir capable de changer de comportement. La capacité à changer dépend de son sentiment d’être effectivement
« compétent » et assez habile pour opérer de tels changements. Il en résulte que le préventeur doit convaincre la
personne qu’elle a des compétences et des ressources personnelles et qu’elle peut mobiliser des ressources de son
environnement pour entreprendre des changements.
En prévention, il ne suffit donc pas de donner des « bons arguments » en faveur de comportements favorables au bien-
être et à la santé. Il faut s’employer à réassurer la personne destinataire du message dans sa capacité à opérer des
changements.
Autrement dit, il ne suffit pas d’être un bon « émetteur » de message de prévention, il faut aussi s’employer à faire que
le destinataire du message devienne un « récepteur » actif, impliqué dans une co-élaboration du message de
prévention.
C’est bien pourquoi la réussite d’un projet comme Mission Papillagou requiert la mobilisation de moyens humains
conséquents.
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1. Le renforcement de l’estime de soi des enfants
Travailler au renforcement de l’estime de soi, au moment de l’entrée dans la préadolescence et de l’entrée au collège
est fondamental. En effet, l’entrée dans la puberté affecte fortement l’image corporelle de soi : alors que l’enfant a le
sentiment que son « Moi » ne fait qu’un avec son corps, le préadolescent commence à percevoir un écart entre son
« Moi » et un corps dont il subit les transformations. L’entrée au collège impose aussi d’importants remaniements
psychiques (adaptation à des contraintes scolaires plus fortes, exigences d’autonomie plus élevées…). Le contexte
souvent difficile des quartiers populaires (précarité sociale, précarité des liens, discrimination, etc.) rend ce travail
d’autant plus nécessaire.
Pour renforcer l’estime de soi des enfants, Mission Papillagou propose un cadre et des activités, comme :
1. Des devinettes qui permettent d’ « équiper » les enfants d’un lexique de 24 mots qui vont leur permettre de nommer
et de reconnaître leurs propres qualités et celles d’autrui.
2. Un cadre d’activité qui permet aux enfants de mettre en valeur les compétences scolaires qu’ils ont acquises.
3. Un cadre rassurant qui permet à chaque enfant de renforcer sa conviction qu’il a une place reconnue dans un groupe
et qu’il peut rencontrer un adulte qui s’intéresse à ce qu’il a à dire.
A. Équiper les enfants d’un lexique permettant de reconnaître ses propres qualités et celles des autres
Les Devinettes (voir Outil, p. 5) sont toutes structurées sous la forme d’un jeu qui consiste à relier une « qualité » (par
exemple les mots « courageux », « attentif », « curieux », « sportif », « studieux », « comique », etc.) à une définition. Au
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cours du jeu, les enfants rencontreront 24 mots désignant des qualités. L’intérêt de l’activité ne consiste pas seulement
dans une tâche « scolaire » qui consiste à relier chacun mot à sa définition. L’activité est surtout prétexte à un dialogue
sur les qualités en demandant à chaque enfant s’il a lui-même la qualité qui fait objet de discussion ou s’il connaît un
autre enfant qui a cette qualité. Il s’agit aussi de s’interroger sur le bien-être personnel et social que procure le fait de
cultiver telle ou telle qualité. À la fin du jeu, il sera demandé à chaque enfant de trouver trois qualités à un enfant qui se
trouve en face de lui, de les écrire sur un post-it et de le lui remettre ; en échange il reçoit un post-it où son camarade
aura lui aussi écrit trois qualités qu’il aura reconnues chez son camarade (voir plus loin, p. 25). Notons que la question
des qualités traverse nombre d’activités proposées au cours du jeu.
Moins les enfants ont une bonne estime d’eux-mêmes, moins ils sont enclins à penser qu’ils forment un « bon » groupe,
une « bonne » équipe, capable de réussir les tâches qui lui sont assignées. L’accompagnant doit réguler les tensions qui
traversent le groupe (passivité, hostilité, etc.) pour permettre à chacun de développer le sentiment qu’il peut apporter
quelque chose de positif à l’ensemble de l’équipe.
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C. Valoriser les compétences scolaires acquises par les élèves
Mission Papillagou offre de nombreuses occasions de valoriser les compétences scolaires acquises par l’enfant :
compétences en lecture (lire les Feuilles d’activité), compétences à rechercher un mot dans un dictionnaire pour aider à
clarifier un point mis en débat, compétences d’expression orale et écrite. Il est fondamental que l’accompagnant du
groupe ne fasse jamais « à la place » des enfants, qu’il sollicite leur participation et valorise le fait qu’ils mobilisent leurs
compétences.
Les activités permettent de nombreux débats en lien avec leur vécu quotidien. L’accompagnant doit investir une place
d’animateur de débat. Il lui revient d’aller chercher la parole de ceux qui se tiennent en retrait (sans toutefois forcer
l’enfant à prendre la parole et en respectant son souhait éventuel de rester silencieux) et de garantir le droit de chacun
à exprimer son point de vue. Il lui faut accueillir sans jugement et avec intérêt ce que les enfants ont à dire sur leur vécu
quotidien. Laisser émerger cette parole, de manière « non jugeante », ne signifie pas « approuver » tout ce que les
enfants pourraient dire ! Il s’agit de laisser émerger leurs questionnements pour les aider à s’interroger leurs
représentations et leurs certitudes et pour réajuster les informations erronées.
L’estime de soi est étroitement liée au bien-être dans la vie de groupe. Le « vivre ensemble » suppose que chacun puisse
percevoir sa place dans le groupe comme une place « sûre » et « reconnue ».
Comment se construit ce sentiment d’avoir une place « sûre » ? Le préalable est que les enfants perçoivent clairement
le clivage générationnel : les enfants et les adultes ne sont pas à la même place ! Dans Mission Papillagou, les enfants
sont invités, par les adultes, à jouer (activité qui est, par excellence, liée à l’enfance) et à expérimenter (activité
d’apprentissage – donc en lien avec l’enfance). Les adultes sont là pour garantir un cadre sûr aux activités ludiques et
d’expérimentation, en se posant en garants de règles qui affirment la nécessité de coopérer, de prendre des décisions
par consensus, de se respecter les uns les autres.
L’outil propose une ouverture sur l’imaginaire grâce à un conte sur un voyage interstellaire (voir le conte et les petits
récits qui précèdent les différentes activités). Dans Mission Papillagou, la fonction de l’imaginaire est de faciliter une
distanciation avec soi : les enfants ne sont pas invités à parler directement d’eux-mêmes, mais à imaginer comment ils
se comporteraient s’ils étaient tel ou tel personnage. Ce qui est finalement une manière de parler de soi, mais sans trop
le dire ! La capacité à se projeter dans l’imaginaire est en lien étroit avec l’estime de soi : imaginer suppose une capacité
à se confronter aux possibles et à l’avenir, ce qui implique de percevoir l’ « inconnu » de manière non anxiogène.
Imaginer suppose aussi d’avoir conservé en soi le plaisir de jouer (plaisir de jouer qui est signe de bien-être chez
l’enfant). L’accompagnateur doit parfois encourager des enfants à s’autoriser à jouer et, bien souvent, ceux qui se
tiennent d’abord en retrait finissent - parce qu’ils perçoivent le plaisir qu’éprouvent leurs camarades -, par s’adonner à
leur tour au jeu.
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Dans Mission Papillagou, la plupart des activités ont une dimension ludique. Elles prennent tantôt la forme de « jeux de
rôle », de jeu de « résolution de problème » ou de « joute verbale ».
Reconnaître à l’enfant un droit à expérimenter, c’est lui reconnaître le droit de commettre des erreurs, de se
« planter », sans subir d’autres conséquences dommageables que celles de tirer profit des leçons qu’il en tirera, ce qui
lui permet de progresser en opérant des réajustements. La plupart des activités invitent au débat avant toute prise de
décision et, par conséquent, à un examen contradictoire et critique.
Mission Papillagou va créer des situations « limites » où les adultes semblent jouer un « drôle de jeu » et paraissent se
rendre « complices » de « mauvaises blagues ». C’est le cas lors de la première séance avec l’activité dite de l’Offre
dangereuse (Outil, p. 8) où des enfants doivent « arnaquer » des camarades, ou encore avec l’activité dite de La Rumeur
(Outil, p. 32).
Lors de ces activités, même s’ils paraissent « complices » de la « mauvaise blague », les adultes demeurent bien à leur
place : ils créent une situation où des enfants peuvent se « planter à blanc » dans un cadre sûr, pour leur éviter de se
planter, demain, dans la vraie vie. L’enjeu est de les aider à réfléchir sur les risques qu’ils sont enclins à prendre, à
penser les conséquences des décisions qu’ils peuvent prendre, à s’interroger sur la prudence et sur la responsabilité. Si
l’adulte se mêle au jeu, c’est donc bien pour y assumer sa place d’adulte et son rôle de protection face à des risques
auxquels l’enfant pourra être confronté au cours de sa vie.
Par-delà ces quelques « situations limites », la plupart des activités proposées par Mission Papillagou, permettent aux
enfants de prendre des décisions, d’opérer des choix, tout en s’interrogeant sur leurs conséquences. L’adulte qui
accompagne le groupe ne leur donne pas la « bonne » solution, mais accompagne leurs réflexions.
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C. Place liée au sentiment d’appartenance à un groupe coopératif
Le sentiment que notre point de vue est écouté et respecté renforce le sentiment d’avoir une place « sûre » dans le
groupe. Les activités en équipe exigent un travail coopératif. La plupart du temps, les activités imposent aux enfants de
prendre leurs décisions par « consensus », ce qui les oblige à négocier et à trouver un accord acceptable pour chacun
d’eux. L’accompagnateur du groupe se pose en tiers, en médiateur et en facilitateur. Son rôle est, d’une part, de
valoriser les attitudes qui favorisent l’émergence du consensus au sein du groupe et, d’autre part, de réguler les
comportements qui peuvent nuire au bon fonctionnement du groupe.
La bienveillance de l’accompagnateur et son souci d’aller chercher la parole de chacun des enfants ne suffit pas toujours
à garantir une véritable liberté d’expression. Les enfants subissent diverses pressions sociales et culturelles qui les
conduisent à adopter des points de vue conformistes. Le conformisme est une conduite qui témoigne d’une estime de
soi défaillante qui incline l'individu à se conformer aux attentes collectives, d’une part, pour se valoriser en gagnant
l'approbation du groupe et, d’autre part, en s’évitant les problèmes que pourrait poser une attitude différentiée. Plus
grave, par « conformisme », l’individu se mue en « suiveur » et participe à l’oppression de ceux qui affirment leur
différence. Mission Papillagou aborde ces questions en s’appuyant sur la vie quotidienne des enfants : le conformisme
lié au fait de porter des vêtements de marque et la stigmatisation de ceux qui n’en portent pas (activité dite L’influence
de la publicité, voir Outil, p. 24-26) ou les stéréotypes liés au genre (activité dite du Sondage sur le genre, voir Outil,
p. 27). Ces questions familières ouvrent sur des réflexions plus amples. L’enjeu est d’interroger les « normes » sociales
et culturelles dans la mesure où, en étant trop rigides, elles favorisent des conduites intolérantes.
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E. Faire sortir des enfants de leur place de « bouc émissaire »
Plus le groupe se perçoit comme insécurisé, en difficulté et « incompétent » pour atteindre les objectifs, plus il aura
tendance à rechercher des « fautifs ». Et ceux-là sont assignés à une place de « boucs émissaires », c’est-à-dire des
individus choisis par le groupe en raison de leur faiblesse relative et en raison d’une « différence » perçue comme
dépréciative.
Les activités menées en équipe permettent de repérer des enfants placés en position de « bouc émissaire » au sein de la
classe.
Nombre d’enfants occupent des places de « boucs émissaires ». Ils sont bien souvent porteurs de « stigmates » qui les
placent en marge de la « norme commune » du groupe : enfant avec des troubles « psy », enfant appartenant à des
communautés dépréciées, enfant supposé plus pauvre car sans vêtements de marques, enfant en grande difficulté
scolaire, etc. Des enfants perçus comme « au-dessus » de la « norme commune » peuvent aussi être des boucs
émissaires : enfant très bon à l’école, fille « trop belle », enfant qui a des centres d’intérêts « élitistes », etc. Enfin,
d’autres enfants font l’objet de rejet parce qu’ils se manifestent fréquemment par des conduites d’opposition vis-à-vis
des adultes et des enfants de leur âge, tout en affirmant des points de vue « clivants », voire provocateurs.
L’accompagnateur du groupe doit garantir le respect des règles de respect mutuel pour protéger l’enfant désigné
comme « bouc émissaire », et faciliter sa prise de parole au sein du groupe. L’enjeu est de favoriser un dialogue sur
l’acceptation des différences : ce qui est différent n’est ni inférieur, ni supérieur, c’est juste différent. Et cette différence
est ce qui me permet de me poser des questions sur ce que je crois vrai. Mais il s’agit aussi d’aider l’enfant « bouc
émissaire » à participer au débat, en l’aidant à s’exprimer d’une manière acceptable pour ses camarades et à passer par-
dessus le ressentiment qu’il a pu accumuler. Avec certains enfants qui se manifestent par de fortes conduites
d’opposition, il faut parfois renoncer à appliquer la règle du consensus.
L’activité dite de "La Rumeur" (voir Outil, p. 32) permet de travailler la question des rumeurs, qui jouent un rôle
considérable parmi les élèves. D’autant qu’avec les réseaux sociaux, les rumeurs fonctionnent « H24 ». Cette activité est
l’occasion de les interroger sur leurs expériences des rumeurs et des réseaux sociaux.
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F. L’amélioration du climat scolaire : le plaisir d’être ensemble
Mission Papillagou a un effet positif sur le climat scolaire car cet outil permet d’améliorer le climat relationnel entre les
élèves. L’hypothèse est que le climat scolaire est étroitement (mais pas exclusivement) dépendant du nombre d’enfants
qui, dans une classe donnée, ont endossé une place de « bouc émissaire ».
Mission Papillagou permet de travailler la question du climat relationnel entre élèves de manière progressive : la
première séance est axée sur la constitution d’une équipe qui, pour réussir, doit développer ses aptitudes à coopérer. La
deuxième séance crée des situations où les différentes équipes doivent coopérer entre elles pour réussir leurs étapes.
La troisième séance crée des situations où des équipes doivent se manifester aux autres enfants par des actes de
bienveillance. En permettant de faire émerger les liens de solidarité et en affirmant la possibilité de la bienveillance au
sein du groupe, Mission Papillagou facilite un travail en direction des élèves « boucs émissaires » en vue de les aider à
trouver une meilleure place au sein du groupe-classe.
L’hypothèse de Mission Papillagou est qu’il faut aider les enfants qui perçoivent le collectif comme une pesanteur à
accéder au plaisir d’être ensemble, de vivre une aventure collective dans un cadre où chacun a une place sûre et où
l’expression de la bienveillance est possible.
La prévention des conduites à risques est une dimension importante de Mission Papillagou. Les conduites à risques sont
un puissant moyen de rehausser son estime de soi, dans la mesure où ces conduites sont auréolées d’une forme de
prestige. Prestige dont se prévaut celui qui n’a « même pas peur » du danger, prestige de celui qui transgresse les
interdits, prestige de celui qui vit « intensément », prestige de faire partie d’une « bande » qui exerce une influence sur
le quartier ou dans l’établissement scolaire, ou qui inspire la crainte…
La « précocisation » des conduites à risques est observable : dès la fin du primaire et l’entrée au collège, des enfants
peuvent avoir leurs premiers contacts avec les réseaux de trafiquants de drogues pour effectuer des tâches subalternes
(faire le « guet », assurer un petit « transport » de drogue d’un point à un autre de la Cité, aller acheter les cannettes et
sandwichs pour ravitailler les dealers). Des enfants ont pu être initiés au tabac et à la chicha. De très jeunes filles
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peuvent adopter des comportements hypersexualisés et s’intéresser aux conduites de « michetonnage » (séduire des
adultes et/ou avoir des relations sexuelles pour se faire offrir des « cadeaux »). Des enfants peuvent développer un
mésusage des jeux vidéo au détriment de leur investissement scolaire. Ces engagements dans les conduites à risques
restent rares, mais peuvent avoir un impact délétère sur la vie de ces jeunes, la précocité de ces conduites étant
toujours un facteur négatif. À leur stade de développement, l’enfant devrait être dans le plaisir du jeu plutôt que dans la
recherche d’excitations que procure le fait de « jouer » avec sa santé et sa vie. La conduite à risque précoce est
révélatrice d’une souffrance psychique.
L’activité Les envies et les besoins (voir Outil, p. 16-17) permet d’aborder la question de l’usage des substances
psychoactives et de la dépendance aux produits. C’est l’occasion de faire passer des messages de prévention sur le tabac
et la chicha, notamment.
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Une activité comme Les envies et les besoins est l’occasion de faire passer des messages de santé globale. Savoir
prendre en compte ses besoins, en nutrition et en sommeil (tout particulièrement à la préadolescence, où le corps est
en croissance et où des efforts intellectuels importants sont demandés) est indispensable. C’est l’occasion de faire des
rappels sur les temps de sommeil, l’usage des jeux vidéo en soirée qui retarde les cycles du sommeil, l’importance du
petit-déjeuner, etc. L’activité Les envies et les besoins permet de poser qu’il peut y avoir des choses qui font d’abord
envie – comme par exemple la cigarette et l’alcool – mais qui peuvent devenir des besoins, et par conséquent, devenir
contraignantes.
Les conduites à risques induisent aussi des formes d’emprise. L’étape de l’Offre dangereuse (voir plus haut, p. 12)
renvoie aussi à une forme de contrainte : celle qui résulte du fait que l’on devient redevable, que l’on se met en dette
vis-à-vis d’autrui. Par exemple, à fréquenter le trafic, on se retrouve rapidement contraint de faire des choses que l’on
n’envisageait pas de faire, parce que l’on subit la pression du réseau.
L’un des moteurs de l’entrée précoce dans les conduites à risque est le désir de « grandir ». Les consommations
marquent des passages d’une classe d’âge à une autre : l’enfant abandonne le chocolat au lait du matin pour boire du
café et, plus tard, il abandonne le soda pour l’alcool. Nombre d’activités portent sur cette question du temps que l’on
s’accorde pour grandir, sans brûler les étapes : voir les activités Les avantages des enfants et des grands (Outil, p. 21),
Les choses qui changent ou pas (Outil, p. 30), Le message codé (Outil, p. 37), Ce que l’on décide seul ou pas (Outils,
p. 38).
Grandir, c’est acquérir des compétences qui permettent d’être de plus en plus autonome, c’est-à-dire capable d’agir
selon les règles que l’on se fixe soi-même, tout en étant de moins en moins dépendant de règles fixées par les adultes.
La notion de « compétences psychosociales » renvoie aux capacités d’un individu à s’adapter à une situation qui le met
en difficulté et à élaborer des réponses adaptées et satisfaisantes. Plus ces compétences sont développées, plus les
capacités de résilience de l’individu sont renforcées.
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B. La capacité de l’individu à savoir résoudre les problèmes et à savoir prendre des décisions
Mission Papillagou confronte les équipes d’enfants à des « problèmes » à résoudre, à des « questions » auxquelles il
faut apporter des réponses. Ils doivent comprendre les énoncés, puis trouver ensemble une réponse ou une solution.
Dans nombre de cas, l’équipe doit prendre sa décision par consensus. Les activités permettent aux enfants de prendre
conscience de leurs ressources internes et de celles des autres enfants, et de l’intérêt à coopérer : croiser les points de
vue améliore la compréhension d’un problème et débattre et échanger permet de trouver de nouvelles réponses et
solutions.
L’outil propose une ouverture sur l’imaginaire grâce à un conte sur un voyage interstellaire (voir le conte, les récits
introductifs des Feuilles d’activités, les « noms secrets » et les identités fictives qu’ils suggèrent…). À l’occasion de
diverses activités, les enfants sont invités à jouer des situations imaginaires (par exemple l’activité "Le mot magique" -
voir Outil, p. 18) ou à faire des jeux de rôle (par exemple l’activité "Reconnaître les émotions" - voir Outil, p. 35-36).
L’outil contribue au développement de l’esprit critique en proposant des jeux de joute verbale avec des sujets qui
peuvent faire polémique (par exemple "Le Sondage sur le genre" - voir Outil, p. 27). Ces activités permettent de faire
l’expérience que le débat contradictoire permet de développer un regard nuancé, et de saisir la complexité de certaines
questions.
Les activités qui génèrent des débats sont l’occasion de valoriser les compétences scolaires des enfants, en particulier
leur capacité à clarifier le sens des mots, à rechercher le mot juste et à en trouver son sens précis par une recherche
dans le dictionnaire. Il s’agit de les aider à prendre conscience que bien des conflits sont liés au fait que les
interlocuteurs ne s’accordent pas sur le sens qu’ils donnent aux mots.
Mais il s’agit aussi de se rendre sensible aux effets que produisent les discours sur autrui : comment ce qui est dit est
perçu par autrui en fonction de ses représentations et de sa sensibilité. D’où un travail sur la capacité à adapter sa
manière de s’exprimer en tenant compte des émotions et des humeurs d’autrui (par exemple l’activité "Reconnaître les
émotions" - voir Outil, p. 35-36).
Les Devinettes, qui portent sur des définitions de qualités (voir Outil, p. 5), sont autant d’occasions d’acquérir un
vocabulaire de base qui permet de nommer des qualités. Mais l’activité est aussi prétexte à se demander quelles sont
les qualités que l’on possède soi-même et quelles sont celles que l’on reconnait chez autrui. Plusieurs étapes
permettent d’aborder la question de l’identité (par exemple, l’activité "Le signalement" – Outil, p. 9). Notre identité est
un ensemble de traits (physiques, caractère, goûts, attitudes, habitudes en lien avec la culture, l’éducation…) et de liens
d'appartenance (sociaux, culturels, quartier, groupes électifs, adhésion à des convictions, adhésion à des valeurs...) qui,
combinés entre eux, font de chacun de nous un être singulier et plus ou moins original. La question de l’identité est en
lien avec l’estime de soi, car la conscience que l’on a de nos propres caractéristiques dépend, pour partie, de ce que
celles-là sont reconnues par l’entourage et perçues de manière positive.
Plusieurs étapes permettent de travailler la question de l’empathie (par exemple, les activités Le cadeau et La
consolation - voir Outil, p. 29 et p. 20). La question de la conscience de soi et la question de l’empathie sont liées dans la
mesure où l’une et l’autre s’inscrivent dans des relations de reconnaissance mutuelle.
18
F. La capacité à gérer son stress et à prendre conscience de ses émotions
Plusieurs activités permettent de travailler la question du stress (par exemple, l’activité Gérer la colère - voir Outil, p. 11)
ou celle des émotions (par exemple, l’activité Reconnaître les émotions - voir Outil, p. 35-36). L’aptitude à reconnaître
ses propres émotions et à trouver des alternatives à l’expression de son mal-être par des manifestations agressives, de
même que la capacité à prendre en compte les émotions d’autrui dans les interactions, sont des compétences qui
favorisent le bien-être dans le groupe.
19
II. Déroulement des trois séances
Les messages de prévention de « Mission Papillagou » se déploient au cours de trois demi-journées d’activité. Il y a une
progressivité d’une séance à l’autre. À la première, il s’agit de « faire équipe… contre les autres » ; à la deuxième, de
« faire que les équipes coopèrent ensemble » ; à la troisième de « développer le vivre ensemble ».
Nous distinguons les activités « majeures » des activités « mineures ». Les « majeures » sont celles qui méritent d’être
priorisées lors du débat en groupe-classe, qui a lieu durant la seconde partie de la séance.
Le message de prévention de la première séance peut se résumer ainsi : le groupe nous rend plus fort. Certains
comportements nuisent à l’établissement de sentiments de confiance mutuelle au sein des groupes : la tromperie, la
pression, les rumeurs, le manque de tact. Mais souvent, c’est notre tendance à être impulsif, à agir sans réfléchir qui
favorise ce type de comportement, ainsi que notre manque de tact avec les autres. L’un des objectifs de la séance est de
développer au sein de chaque équipe un sentiment de solidarité. Comme les enfants ne se sont pas choisis, cela ne va
pas de soi. Parce qu’elles mettent les équipes en situation d’avoir à se méfier les unes des autres, les activités favorisent
la constitution d’un « nous » solidaire, opposé aux « eux » des autres équipes.
Trois activités permettent d’aborder la question des comportements qui nuisent au bon fonctionnement du groupe :
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L’activité L’offre dangereuse (Outil, p. 8)
(Voir plus haut, p. 12)
Nombre d’activités permettent de faire des liens avec la question des conduites à risques (voir plus haut, p. 15-18) : par
exemple, la pression des pairs et la pression de la mode sont évoquées dans l’activité sur la publicité. On peut aussi
s’interroger sur ce que l’on est prêt ou non à faire pour accéder à l’argent nécessaire pour acquérir des biens
somptuaires. À partir de l’activité dite de L’offre dangereuse, des enfants peuvent évoquer des situations liées aux
trafics de stupéfiants. En effet, les dealers sollicitent des enfants, notamment pour qu’ils rendent de menus services,
comme aller chercher un sandwich ou des cannettes, contre de petites rémunérations (ils gardent, en « cadeau », la
monnaie). Ce type de sollicitation permet aux dealers de tester les enfants : après leur avoir fait observé qu’ils ont reçu
plusieurs fois des « cadeaux » en menue monnaie, les dealers les informent qu’il serait « normal » qu’ils rendent à leur
tour quelques « services », comme par exemple, faire le guet ou faire un « transport » d’un produit d’un point à un
autre de la Cité. Créer chez autrui le sentiment qu’il est redevable, qu’il a une sorte de « dette », est un levier qui
permet la manipulation.
Les activités « mineures » sont celles qui ne seront abordées pendant le temps de débat que si l’on dispose d’un temps
suffisant.
L’activité Les pilules de la performance (Outil, p. 15) contribue à créer le climat de méfiance entre équipes, puisqu'il
s'agit de proposer des bonbons en racontant des mensonges sur leurs pouvoirs extraordinaires. Cette activité permet
d'évoquer la question des usages de substances psychoactives en lien avec un désir d'accroissement des performances
(psychostimulant, dopage). Lors de l’activité Refuser une offre, une équipe d’enfants a pour consigne de refuser les
bonbons qui leur sont proposés (voir Outil, p. 15). Elle permet d'évoquer la question de la frustration et de son
dépassement (le plaisir de manger les bonbons est remplacé par le plaisir de réussir l'étape en les refusant). Il est à
noter que l’accompagnateur de l’équipe des Pilotes (qui propose les bonbons) doit veiller à ce qu’ils ne rencontrent
l’équipe des « scientifiques » qu’en dernier, afin de laisser le temps à ces derniers de découvrir son activité. L’activité
dite de L’enquête sur les noms (Outil, p. 33) a, elle aussi, pour but d'attiser la méfiance entre équipes.
L’activité dite du Signalement (Outil, p. 9) a une fonction introductive à la thématique complexe que cette équipe aura à
explorer aux séances suivantes, à savoir celle de l'identité (il s’agit donc d’une étape de « training » pour la suite de leur
parcours). Cette étape requiert un accompagnement vigilant, car les enfants peuvent être tentés de dresser un portrait
21
à charge ou moqueur du camarade qu’ils doivent « signaler ». La règle est de n’humilier personne et qu’il leur faut
trouver des qualités positives pour le désigner.
Durant cette deuxième séance, les équipes doivent coopérer pour réussir leurs activités.
Le message de la deuxième journée peut se résumer ainsi : La force d’un groupe repose sur les liens de confiance qui
unissent ses membres, sur la capacité à prendre des décisions qui conviennent à tous, la capacité à faire des actes de
solidarité et à exprimer des sentiments positifs. Pour qu’il y ait confiance, il faut que chacun puisse être sûr de ne pas être
rejeté en raison de sa différence, mais aussi chacun doit essayer de gérer ses émotions trop vives (colère, frustration), et
prendre en compte les sentiments des autres.
Les étapes permettent d’aborder la question du sentiment d’avoir une place « sûre » au sein d’un groupe, la question
des émotions, de leur expression et de leur gestion.
22
L’activité Le mot magique (Outil, p. 18)
Cette étape est du registre du jeu de rôle, puisqu’il faut jouer une situation imaginaire : délivrer un groupe emprisonné
en leur communiquant un mot de passe secret. Le mot secret à faire découvrir est le mot « amour » et il faut amener les
enfants « prisonniers » à le prononcer en leur posant des questions et sans jamais soi-même prononcer le mot
« amour ». En français, ce mot a des sens multiples, alors que dans d’autres langues, plusieurs mots expriment ces
différents sens, selon que l’on parle de l’amour en lien avec la sexualité (éros chez les Grecs), de l’amitié (philia chez les
Grecs) ou de l’empathie et « amour du prochain » (agapé chez les Grecs). Pour faire deviner le mot « amour », il est
donc possible d’utiliser des phrases très différentes : « quand on éprouve ce sentiment pour une personne, on peut faire
des folies pour elle », « c’est un sentiment que l’enfant éprouve pour sa maman et que la maman éprouve pour son
enfant », « ceux qui éprouvent ce sentiment pour le genre humain, se comportent de manière juste », « on ressent des
papillons dans le ventre quand on l’éprouve »… Dans le contexte de la préadolescence, la question des rapports
amoureux suscite beaucoup de gêne. Paradoxalement, les enfants peuvent être tentés de recourir à la vulgarité pour en
parler ; par exemple, en proposant la phrase : « c’est quand tu as envie de baiser avec quelqu’un ». La grossièreté est un
moyen paradoxal de mettre à distance ce que l’on ne souhaite pas se représenter mentalement. Les gros mots ont, en
effet, une fonction d’euphémisation : par exemple, on se représente mentalement moins fortement la chose, si on dit
« ils niquent », « ils baisent » que si on dit « ils copulent », « ils pratiquent un acte sexuel »… Il faut donc prendre la
grossièreté des enfants comme une forme de résistance face à un sujet qui les dérangent… et les inviter à s’exprimer
correctement.
L’activité Sondage sur le genre (Outil, p. 27)
Voir plus haut, p. 13
L’activité Changer d’identité (Outil, p. 10) est du registre du jeu de rôle, puisque le groupe doit s’inventer une nouvelle
identité d’équipe et tenter d’y faire croire : ils s’appellent les « Solidaires » et doivent se comporter comme tels. Cette
activité est l’occasion de réfléchir sur ce qu’est la solidarité, notion qui renvoie aux intérêts communs, aux
responsabilités communes, à la conscience d'un devoir de soutien mutuel et d'assistance morale et matérielle. La
dimension « imaginaire » de cette activité doit être soutenue : les enfants sont invités à se créer une « marque », à
l’instar des « super-héros » (ils peuvent demander au Poste Central des autocollants vierges pour en dessiner et les
coller sur leurs habits). L’activité La machine magique (Outil, p. 19) renvoie à la question de la gestion du sentiment de
frustration, à la question des renoncements et à la capacité à faire des compromis pour aboutir à une décision par
consensus. Un compromis n’est possible que si chacun accepte de renoncer à une partie de ses souhaits et exigences, et
si chacun trouve une compensation dans la satisfaction partagée de conserver l’unité de l’équipe. L’activité "Ce qu’on
garde et ce qu’on laisse" (Outil, p. 34) renvoie aussi à la question des renoncements nécessaires, notamment pour
atteindre un objectif commun. L’activité de La compensation (Outil, p. 28) pose la question de la compensation dans une
situation qui crée une inégalité.
Au cours de cette séance, il s’agit de rendre possible des actes de bienveillance au sein du groupe classe.
Le message de la troisième journée peut se résumer ainsi : La force d’un groupe repose sur la capacité de ses membres à
reconnaître les qualités des uns et des autres et à se soutenir mutuellement. Pour éviter les mises en danger de soi, il faut
reconnaître ses limites, en particulier celles qui sont liées au fait d’être un enfant et comprendre que l’on doit prendre le
temps de grandir sans brûler les étapes.
L’activité Le dernier arrivé (Outil, p. 13) participe du développement de l’empathie, en amenant le groupe à s’intéresser
à l’histoire du camarade qui est arrivé le plus récemment dans la classe ou sur le quartier (élève qui peut, d’ailleurs,
avoir des difficultés à s’intégrer au groupe-classe). L’activité de La consolation (Outil, p. 20) implique la prise en
considération de la personnalité d’autrui, car il faut découvrir ce qui fait plaisir à une personne lorsqu’elle se sent triste,
ce qui est très variable d’une personne à l’autre.
L’activité Les choses qui changent ou pas (Outil, p. 30) renvoie à la question du passage de l’enfance au monde des
adultes. L’activité Ce que l’on décide seul ou pas (Outils, p. 38) renvoie à la même problématique, sinon qu’elle pose la
question des modèles éducatifs qui laissent plus ou moins d’autonomie à l’enfant, les parents posant un cadre plus ou
moins structurant, plus ou moins protecteur, plus ou moins « laxiste » ou plus ou moins rigide et « surprotecteur ».
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C. Conclusion de la troisième séance
Lors du débat en groupe-classe, une activité collective peut être proposée : demander à chaque enfant d’écrire sur un
post-it trois qualités de l’enfant qui est en face de lui, puis lui donner son post-it et recevoir le sien.
Pour conclure, on reconnaîtra comme « gagnante », l’équipe qui aura le mieux protégé le secret de son nom. On dessine
un tableau (comme ci-après).
Puis, il est demandé à chacune des équipes d’écrire sur une feuille les noms qu’elle suppose être ceux des trois autres
équipes. Puis, on inscrit au tableau les noms que chacune des équipes a proposés pour désigner les autres équipes. Puis
on révèle les « noms secrets » des équipes et on comptabilise le nombre de fois où chacune des équipes a été
« découverte ».
L’équipe qui n’a pas été découverte, ou qui a été le moins découverte (dans l’exemple ci-dessus, les « Pilotes » ont
réussi à faire croire aux autres qu’ils s’appelaient les « Pokémons »), reçoit des félicitations, car cela témoigne de la
cohésion d’équipe de leur groupe.
25
4. Quatre, cinq ou six adultes ? Les rôles des adultes.
Quatre adultes est un minimum pour animer l’outil, sans quoi la qualité des échanges qui s’établissent lors des activités
en équipe sera perdue. Être cinq adultes permet d’avoir une personne qui s’occupe exclusivement de la gestion du
Poste central. Être six adultes permet au « meneur de jeu », libéré du Poste Central, de venir en appui des adultes qui
animent les équipes et d’observer les élèves pour mieux préparer son intervention en groupe-classe.
Les accompagnateurs doivent rester neutres lors des interactions entre équipes. Ils ne doivent pas répondre si les
enfants leur demandent s’ils doivent faire « ceci ou cela » face à la proposition formulée par une autre équipe.
S’il n’y a aucun adulte au Poste central, celui-là n’est plus qu’un espace où se trouve déposé le matériel nécessaire au
jeu. L’accompagnateur valide la réussite des activités en apposant des marques (type « OK ») sur la Feuille de route et
prend lui-même les Devinettes. L’accompagnateur doit veiller au temps, pour que dans le délai imparti, les enfants aient
réussi les deux activités et les deux Devinettes prévues à chaque séance (en tenant compte du fait que l’étape dite
majeure prend généralement plus de temps que l’étape dite mineure).
26
Pendant le débat en groupe classe, l’accompagnateur se tient au milieu de son équipe. Son rôle est d’encourager les
enfants de son équipe à prendre la parole, s’il constate qu’ils ont des choses à dire en lien avec le sujet abordé. Si les
enfants de son équipe sont invités par le Meneur de jeu à présenter à toute la classe une activité qu’ils ont menée, il
peut les accompagner, si cela les rassure. Il contribue à réguler les bavardages, mais doit aussi tolérer les échanges en
aparté s’ils sont en lien avec le sujet abordé. Il doit inciter les enfants à redire devant tout le groupe classe ce qu’ils
viennent de dire si cet échange est pertinent.
S’il n’y a que cinq adultes, il peut être judicieux que l’animateur du Poste central soit aussi le Meneur de jeu.
S’il y a six adultes, l’animateur du Poste central soutient le Meneur de jeu, notamment en lui signalant que tel enfant
souhaite prendre la parole ou en faisant observer qu’une partie des enfants se lassent du sujet actuellement traité.
27
C. Rôles du Meneur de jeu
Autant le rôle de l’accompagnateur d’équipe et le rôle de l’animateur du Poste central sont très rigoureusement définis,
autant le rôle du Meneur de jeu mobilise beaucoup de capacité d’improvisation. C’est bien pourquoi ce rôle doit être
dévolu à un professionnel expérimenté.
Il doit tout d’abord créer une sorte d’espace scénique, où seront présentées des activités par les équipes, afin de les
soumettre au débat collectif. Il valorise les enfants en leur proposant de le rejoindre (avec leur accompagnateur, si
besoin est) pour qu’ils présentent leur activité à l’ensemble de la classe. Il construit le débat en s’appuyant sur ce que
les enfants ont vécu en équipe pour rendre concret les messages de prévention propres à chaque séance (voir plus haut,
p. 20-25). Son rôle est de favoriser l’expression de liens concrets entre les activités du jeu et le vécu de tous les jours (la
vie en groupe, les relations interpersonnelles entre enfants, entre enfants et adultes, les conduites à risques observables
dans l’environnement…).
Il doit savoir s’émanciper des activités pour privilégier un débat sur un sujet qui concerne la vie du groupe : par exemple,
après avoir présenté l’activité de La Rumeur (voir plus haut, p. 14 et voir Outil, p. 32), s’il est fait mention qu’un ou une
élève de la classe est victime d’une rumeur, il est pertinent de s’intéresser à cette situation concrète.
Il lui faut aussi s’appuyer sur sa propre expertise : il est un professionnel de terrain qui connaît son public. Aussi doit-il
utiliser l’outil dans une finalité de prévention des dommages occasionnés par les conduites à risques qu’il observe sur
son secteur d’intervention, qu’il s’agisse de conduites comme l’usage précoce de substances psychoactives, les usages
abusifs des écrans, les engagements dans les trafics, les violences et rixes dans et entre quartiers, ou encore les
conduites pré-prostitutionnelles (dites de « michetonnage »).
Il lui faut mobiliser des talents de comédien, en particulier quand il lui faut évoquer l’activité de l’Offre dangereuse (voir
plus haut, p. 12 et voir Outil, p. 8).
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III. Conseils pour l’organisation
Mener à bien un tel projet requiert une organisation solide.
Le projet implique :
1. De construire ou de consolider un partenariat avec un ou des collège(s).
2. De mobiliser des ressources humaines conséquentes, ce qui implique :
- d’une part, d’étudier les modalités de financement des heures dévolues au projet ;
- et, d’autre part, de mettre en place un partenariat avec des instituts de formation (Institut de formation en
soins infirmiers, école de travail social…) ou des universités (psychologues) pour bénéficier de stagiaires
mobilisables pour mener l’action.
3. D’assurer la formation des stagiaires
L’outil Mission Papillagou offre un cadre de rencontre entre des structures sociales, sanitaires et éducatives et les
établissements scolaires autour d’un intérêt commun : le renforcement de l’estime de soi des enfants grâce à une action
collective qui améliore le climat scolaire. La mise en œuvre du projet suppose une conviction partagée, entre les
intervenants et l’équipe éducative de l’établissement scolaire, que les deux objectifs (amélioration de l’estime de soi et
amélioration du climat scolaire) vont de concert.
La mise en œuvre de l’action suppose son inscription dans le projet de l’établissement scolaire et/ou sa validation par le
Comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC) du collège, ainsi que l’information des enseignants et des
parents.
Des échanges avec les équipes socio-sanitaires et socio-éducatives de l’établissement scolaire sont nécessaires. En effet,
des élèves peuvent, parce qu’ils auront noué des relations de confiance avec les intervenants, révéler des faits qui
relèvent de la protection de l’enfance. Il importe que cette confiance ne soit pas trahie, et que l’enfant puisse être
orienté et entendu au sein de l’établissement.
D’expérience, l’engagement des enseignants est inégal. Certains soutiennent avec enthousiasme, sont présents au cours
des animations et apprécient de voir leurs élèves dans un cadre différent de celui de la classe. D’autres n’ont pas autant
d’intérêt et de bienveillance. C’est pourquoi il importe de prévoir des temps de bilan où l’action est évaluée d’après ses
effets sur le comportement des élèves et de la dynamique des groupes-classes bénéficiaires de l’action.
L’action requiert du temps : 9h00 d’intervention par classe, auquel s’ajoutent les temps d’organisation et de
planification de l’action et de formation des stagiaires. Cet investissement en temps, pour qu’il ne se fasse pas au
détriment d’autres missions, justifie des recherches de financement spécifiques. L’action, de par ses objectifs, est
éligible à diverses subventions portant sur la santé mentale, la prévention de la violence et de la délinquance, ou encore
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la prévention des conduites à risques, octroyées par l’Agence régionale de Santé (ARS), la Mission interministérielle de
lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), le Fonds interministériel de prévention de la délinquance
et de la radicalisation (FIPD), les Contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) et diverses fondations.
La mobilisation de stagiaires est pertinente car, d’une part, participer à une telle action est très formateur pour de
jeunes et futurs professionnels. Et, d’autre part, il s’instaure entre élèves et stagiaires, une relation d’apprenant à
apprenant qui permet une relation enfant-adulte, sans trop d’effets de « surplomb ».
La mobilisation de stagiaires suppose d’avoir convaincu les équipes de formateurs des étudiants que ce stage permettra
aux étudiants de développer leurs compétences en prévention et que ces compétences seront transférables dans leur
future activité professionnelle (par exemple dans le champ de l’éducation thérapeutique du patient pour des étudiants
infirmiers). La mise en œuvre des stages implique des tâches administratives (mise en place de conventions de stage,
évaluation des stagiaires) et pédagogiques (encadrement des stagiaires).
Un débriefing après chaque séance est essentiel, non seulement pour ajuster la stratégie de prévention à mettre en
œuvre avec chaque groupe-classe, mais aussi pour que les étudiants développent leur capacité à analyser leur travail.
3. La formation
La meilleure manière de se former est de réunir les adultes impliqués dans l’action pour qu’ils lisent ensemble les
diverses activités proposées par l’outil, tout en organisation des « mises en situation ».
Ces mises en situation consistent à demander à l’un des adultes de jouer le rôle de l’accompagnateur d’équipe et que
les autres jouent le rôle des enfants. L’accompagnateur d’équipe peut ainsi s’entraîner à mener les activités.
Ceux qui jouent les enfants peuvent recevoir des consignes complémentaires :
1. des consignes relatives au fonctionnement du groupe : par exemple, se comporter comme un « groupe dépendant »
(voir plus haut, p.10) ou comme un groupe où l’un des enfants occupe une place de « bouc émissaire » (voir plus haut,
p. 14). L’animateur, en plus de mener l’activité, devra réguler les tensions du groupe.
2. Des consignes relatives à des réactions qui peuvent être suscitées par le sujet abordé au cours de l’activité : par
exemple, de l’excitation (agitation agressivité…), l’affirmation de préjugés, des postures (affirmation de soi, retrait,
machisme, etc.).
Ces mises en situation sont ensuite débriefées. Elles peuvent être interrompues, comme dans un théâtre-forum, pour
prendre le temps d’analyser les difficultés rencontrées, pour ensuite rejouer la situation. Ces mises en situation
permettent de s’approprier l’outil de manière dynamique, mais aussi de se réassurer face à des difficultés qui pourraient
survenir pendant les animations.
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Une « répétition générale » avec une mise en place du dispositif de jeu (Poste central, Camps de base, etc.) est
indispensable pour éviter les cafouillages en termes d’organisation.
En plus de ces trois journées de prise en main de l’outil, il est opportun de renforcer les compétences des adultes en
termes de connaissance du public (la préadolescence) et de connaissance des messages de prévention qui peuvent être
délivrés au cours de l’animation. Ces messages de prévention peuvent être spécifiques, par exemple liés aux conduites à
risques repérées dans l’environnement des jeunes (abus d’écrans, usages précoces de substances psychoactives…) ;
mais aussi être des messages de santé globale (le sommeil, le petit-déjeuner, etc.).
Les mises en situation permettent aussi de renforcer les compétences en termes de techniques d’entretien.
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CONTACT
MMPCR - Mission métropolitaine de prévention des conduites à risques
mmpcr@cg93.fr ; dases-mmpcr@paris.fr ; 01 71 29 26 91
41 rue Delizy, 93500 Pantin - Bâtiment A - 5e étage
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