You are on page 1of 108
eee » a oe, OMMENT LA SCIENCE " Dans esl de Dyrat! Plus que jamais, Dieu est partout. Peut-étre méme habite-t-il cet objet céleste arraché par Hubble & Vinfini cosmos. D’aucuns, en effet, se plaisent & imagines, sur cette image de la nébuleuse de PHélice, les reflets azurés de son iris divin Anthropomorphisme mystique? II n’empéche, Dieu est partout et il se porte plutit bien. Fortes de 4 milliards d’individus, les religions monothéistes consti- tuent le premier groupe spirituel au monde. Er si leur emprise sociale globale~ ment décline, du moins en Europe, le sentiment religieux, lui, s"incarne dans des formes toujours plus variées et les religions du Livre gagnent en importance dans le domaine public oi elles sont Sprement débattues. La violence de certains milieux radicaux musulmans, Pessaimaye des guerres saintes aménent ii tablement & se demander si la croyance en un seul dieu n'est pas intolérante par essence. On pourrait le penser, & lire dans la Bible comment Yahvé, divi- nité parmi d'autres, triompha des dieux de Babylone pour s'imposer comme Dieu unique au peuple d’lsraél. Mais Phistoire des civilisations, le retour aux .es des textes bibliques, les découvertes archéologiques apportent une tout autre réponse, et éclairent d’un jour nouveau les débats actuels. Ce numéro des Cahiers de Science & Vie, qui fait suite & celui sur les origines du sacré et des dieux, et paru été demier, s’attache & montrer comment et pourquoi dés leur naissance, le judaisme, le christianisme et V'slam, en interaction permanente les uns avec les autres, ont bouleversé les sociétés humaines. Il expose aussi ‘comment la science est parvenue &/affranchir de la religion au xvut sigcle, tout en prenant activement part a l'étude du monothéisme. Ceci sans compter la surprenante contribution « oculaire » Hubble. @) Vv K Ine LES CAHIERS Aux origines de Dieu jutdunom de 80. Remeron a Evang Conn, ia 10 iemenage divn a sevice guide poor Forgeniation de nsec et a condutehuralne. NPIBI «oft 2012 CADRAGE 6 _ lansisancede "Unique ’ faune des polythéismes Phitte Tescnd-Vallane Inierview 14% Cee la tvbationdeDen dansThisoire qui unit, les aois monothismnes » Inweryow de Mare-Frangoise Base istianisme per Emi Formos . 64 oe du Royaume de Diew Jean-Philippe Nott ‘AUX RACINES DU MONOTHEISME — Islam 18 LEXPGNE DES DIEUX 7.2 Tererourancovginesde a patle dine Mésopotamie: un panthéon foisonnant (Chrstophe Migeon et higrarchise ypte: Ré, sa grande famille et leroi Un Dieu, trois paroles, Gc leclse Rsscatde casjeniett, OO | deux ropa tn Mente Inde: le védisme ou Ihymnne au sacifice Marie-Améie Carpio Fabienne Lemarchand = DHHIER A AWJOURDIHUI 30) Aron: tgpteatelleivente Diu? Refatle Blau Liblam préine-til la violence? 9O seine cht 3 5 Le zoroastrisme, Punicité en question Arne Debrose Dieu, les fdeles et 94 | peed Dados 40 Le principe divin dans la pensée grecque Pasale Peis Ende Formos OG tzveiede lesiene ———— Nicolas Chewssusa-Leus Interview Judatsme 104 een AG! Lagentse du Dieu univenel Ronee Jer Bronce Trueriew de Fen Pa Wane par Jean-Frangos Mondor Aux sources des textes bibliques 52 Smet i La Bible a la lumiére de Parchéologie 56 Stacie tayo Une ene Se stp dene deere brs Mendes enamine amp ‘Sr dela amd on 200 enone 209, Petco Peer Pee meen ats) La naissance de AG reirerne a l’aune des polytheismes Au cours de V’histoire, théologiens et historiens occidentaux ont proposé PyUrtonep yj retccey ena ecm: Rove) ite tome roetar trae bce Re mr RoE dieu pour la Terre entiére. Avec, toujours, pour conclusion, la supériorité de cette derniére sur les croyances polythéistes. .. CADRAG! Quand cest-on passé de adoration dune kyrelle de diews et de déeses a la vénération dun dieu unique et universel ? Cette question, et bien d'autres lies & la gentse de V'idée dun seul diew pour la Terre entire » ide & lorie gine du judaisme et sins lequel nile chrstianisme ni slam nfauraient vulejour, préoccupe les commenta- teurs depuis des lustres. Leurs #é pponses, comme le montre Phistoire des idées, fone cessé de luctuer aa agé des modes de pensée dominants et des découvertes savantes, Relé tant « Thumeur idéologique » des auteurs et de leur époque, #entre- cchoquane de fagon parfois brutale souvent terrasées par les avancées dessclences humaines, de multiples hypotheses, depuis deux sibcles et domi, ont essayé de rendre compte duautpissement des religions profes- sant un diew unique et omnipotent Et les querelles que continue dali- smenter ce phénoméne capital dans histoire religicuse de Phumanité témoignent de son importance aautant que de sa complexité “Mais commengons par le commen- ‘cement. En Occident, les théologiens VL ixse7, ddu avi et du débue du xvut site prvi nité, es dhuts, aura éxé mono- theise. Mertant fin cet « Age d'or le péché originel aurit préipité la déchéancedes hommesquiseseraient ‘mis 2 vouer des cultes aux animaux, jenitencoreidée que Huma ‘au foreesmaturdles un idoleseta de multiples dvinités, avant que ne se prochiselarévélarion absokiede Dien A Thumaniné gre auchrisianisme. LA SEULE « VERITE. Diapres ce schema « christocen- triste», commente Arnaud S ous spécialise du judaisme antique A Ecolepratique deshautes études le chrittianisme ests laseulerierelgin verse, le judaiome wr monothéine “non about” qui a trouvé sa perfection danslechrstinisme, et?slam smmeno- théisme honni, le “pérl nae” faisant tremble! Europe cu xv see. Quant cauxpespies “nevus” dommes depuis la Renaisunce on Afque, en Aménque even Ase, om pense qu en sont restés cau stade de ladéchéance orgie» Dans un ownige publié en 1757, LHistoire navurele dela religion, le philesophe ethistorien €ccssaisDavid Huine renvene totalement la pers- pective, faisant du polythéiame la forme premitre de la religion. Pour quelleraison, demande il, nos ance du polythéisme apres avoir gon rmonarthéisme dans les temps les plus anciens, comme Laie Te dogine? Quelle absurdité qu'un tel retour en anrigre! Voila pourquoi, aux balbutie- rmentsde [Histoie, des culteséraient rendus & une pluralité de divinités, esprit de puisances invisbles. Et pourquoi In « vérité » duu mono- théisme a fini par sucoéder ace poly théisme originel, Mais si le mano- théismeest une forme dereligin pls évolue, phustafinée,ajoure Hume, avéreplosbelliqueus et intorantet pent engendrer la violence et Pexclu- son, Le dieu de la Bible ne se pré sente-til pas & plusieurs reprises comune «jalous » et « vergeur? Au xis stele, tandis que Darwin Selontes théolo- {lens oceldentaux auxvir ss tes hommes ont pays pour le peche Sriginel tombant ‘Gansle dechéonce ‘des religions poly thalstes (Repwésen- tation Adam ot Eve, sculpture sur ‘uesudes ndiens una du Ponama) ‘Au Xvi son prone ‘quele polinetsme apréckdéle Dieu Unique, faisant passer Ie religion de Tobscu- teal tumior, i 5 LHISTOIRE DES RELIGIONSSER AIT UN LONG FLEUVE TRANQUILLE COMMENGANT PAR LE MULTIPLE POUR ARRIVER AU STADE SUPREME, A LUNIQUE ryan al dias eRe dla spruce shades e- DES ETUDES MENEES SURLLHINDOUISME, le tacisme ou le bouddhisme, iressort que a thtore bile sur des eéjus cultures, eigeat le monctisme enaboutisementsabrémedupayme,ne tent {Gousha couche, Mandaly, Bl Les canens cescmncesie 9 smehobdites ot o = # Pes sects. asque zoulou, Afrique du Sud) * LE DIEU UNIQUE _ AURAITETE« , ont mis A mal le seénario Evolutionniste éigeant le mono: théisme en produit ultime de poly théisme. « Ceme thoi dum progres de la pense eliginse gui repos sul p= sugposé de seproité du moruthéiome ne domme plus lewd des débats dans les milieu scienafiques, estime Fréieric Lenoir. Gerains concent de la sow tenis, mua les histenens des regions ne portent plus de tl jugements de valeur lis ade pring curls.» QUESTION DE TEMPS Si, de Vavis général, le monothéisme fest une invention récente, es cir constancesexnctesde.on avénement ne laisent cependant pas de diviser les chercheurs, Pour ks uns, major: tires, la reconstruction du passé du Proche-Orient incite & situer Pémer ence du monothéismeaus alentours du ve-sitele avant notre tre. Apres avoir € considéré comme un dieu pari dautres au debut da [* mill naire, of le polythéisme était Londi- naire de totes les sociétés proche: orientals, le dieu de la Bible (ahve) serait devena le diew exclusif da peuple hébrea au vit sige, puis le diew unique au vitsitcle ov au stele, apres destruction de Jem~ salem et de son temple par les Baby- loniens. emergence du mono- théisme hiblique procéderait done dune évolutioninterne spontanée du polythéisme. On constate, au milieu du F millenaie, «des tendances vers hénothdisme, puis vers le Diew Un, ésume Thomas Rémer Lge mono thei exten qualque soe dans “air du temp” etprend corps dans kes textes qui ‘vont devil Bibl » Pour dauttes chercheurs, cette pre sentation ne tient pas suffsamment compte de données dora historique et politique puisque Pavénement du judaisme résulterait de « le seuation propre ala Judée mex éboques pers et helérisegue >, plaide Amimad Séran. dour. Du vie sle au ve sidcle avant notre te, le systéme donganisaticn politique et sociale mis en place en Judée sous la dynastic achéménide, faisane des pres da Temple de Jénr salem les gardiens des coutumes du pays, aurie valu & Yah; le dieu dix Temple, de devenir le roi divin des Judéens Mais c'est seulement avec apparition au Proche-Orient, au sécle avant notre re, du premier empire mondial, Empire romain, ‘que « le judas, pus le distcnsme qué va surgir peu apres, wont adopter Vidée qui existe qu'un seul dw ser toute la were habitée, clit Pierre Bor- Arouil. Une tele prise de conscience nlauraic dre pu se dévelopber avant ques populations dela tere habiée ne Sofeneperques core xo tout» Oa Fon voit que la naissanee Fun systtme de pensée reconnaisant la qualité divine a un seul dieu, alex- clusion de tout autre, n'a pas fini de suscier les débaes, Philippe Testard-Vaitont Le retour du paganisme apitauxanonymes qui « réduicent Phomme fn esciavage », violence teroriste « apparem- ‘ment pratiquée au nom de Dieu % drogue ul tlle une BéteFéroce fend ses mains sur toutes Jes parties do fa Toro»... Qualifies do « grandes ‘pulssances de histoire aujourd'hui» parle pape ‘Benott XVI lors de Fassembiée spéciale pour le ‘Moyen-Oriont du synode dos évéques, on oc- tobre 2010, ces « iiéologies » représentent pour le chet de FEgiise catholique autant de « avnites » ‘modornes, de puissances obscures « détounant ‘Phomme du bonheur de vie éternellement avec Dieu» et devant étre « démasquées » Brel, pour 4 succossour de Pierre le polythismo est tout saut ‘mort De fat, au-dela des craintes émises parle pape, les sociologues des religions constatent que, depuis oe début des années 1980, unnombxe croissant Cindividus se éclament de religions issues des traditions nordique, ceique, égyptienne, grecque, di cchamanisme, de la sorcellerie, comme la Wicca (une néosorcellerie en vogue dans les pays angle-saxons), du néodruidisme, dela mage runique...Tous ces cultes pons flourisant dans le monde occidontal sont fondés sur un retus des valeurs et des dogmes des religions Issues de la Bible, et dénoncent Ia prétenchie supériorté du monothéisme sur le polythéisme. «On ‘peut émettre rhypothése que la modemits (des lain ‘dana side, Nal) état Bée a un certain rationelisme. (@t 9 Fid6o quil exist une Vérité unique, done un eeu Unique. Les polythéismes étaient alors considérés comme printf, dit Thomas REmer. La “pastmoder- hits" (partir des années 1970-1980, Nal adimet une versité de sens. 'oU le retour des polytheismes, des ‘mouvements de wiceo, ete.» PTW CADRAGE gos Se ae ésentancenvieon ‘religions monothéistes ct pour certains spécialstes, zoroasrisme) constituent de + Toi le pls grand groupe religieux actuel. Fortes de | 4 milliards de monothéistes polythélses regroupent 4 milliands de fidéles, les Thindouisme, appara en Inde, le taoisme, qui imprgne la (udaisme, chrstianisme, islam culture chinoise, et le shin- ‘wise, urement japonais Le confiianisme et le ‘ouldhisme (que pratiquent présde 400 millions de PAR PHILIPPE TES TARD- VAILLANT ccommentareurs comme des srcligions sans die créateu > des religions. Enfn, on estime que quelque 100 millions hommes et de ferames, vivant pour la pluparten ‘Afrique, éadonnent & des plusieurs centaines de millions personnes dans le monde) sont pratiquesanimistes, a exchu- ladepres, les sprimalieés + Panthéisme: Philosophie depres laquelle tout ce qui exist est identié & Dieu “© Polythéisme: systéme religieux _admettant Faxistenco de plusours dloux _ Monothélsme: systeme de pensée reconnaissant la qualité divine 8 un seul iou.& Fexclusion de tout autro “4 Monolitile: doctrine religious: reconnalssant lexstence de plusiaursdieux | mais non vénérant quiun | Hénothéisme: veneration tune ‘vinité principale au sein un systéme polythdiste, “¢ Naturalisme: adoration des forces ‘oe lamnature (estes, animaux sauvages, hénomenes météorologiaues..> vers 610 Début de la révélation du Coran EDITION SPECIALE fy) \c¥s) 10) Rs) eet eer eae ee nS CZ, le a ZI a YI a S| s S| a a & = a U & Gl x 5 MARIE-FRANCOISE BASLEZ ext histo- rienne et prfesseure histoire des regions ‘la Sorbonne-Pars 1, Spécaite contacts intereigieux entre le jucatsme, les potythsismes et Ie evitanisme cans monde est coven Chrétien (CLD, 2008), Nées a plusieurs siécles diintervalle, les trois grandes religions mononothéistes ont évolué en interaction les unes avec les autres, Bouleversant les sociétés, elles ont été a l'origine d’un nouvel ordre politique et social, et d’un nou- veau rapport a Dieu. Calers de Science & Vie: Le Judatame, le chrstanisme et slam sont nés 3 plusieurs icles @intorvale ot dans des ‘ontextoshistoriquesdiférents, Pour quelle ralson cos trois religons sont-olesconsidérées comme parentes? Marie-Francoise Baslez.: ly a carts presque deux mi lenaires d'écart entre Fappartion du judaisme dans la premizre mottié dur milénaire av. J-C.et cele defisiam au Wr slécie, Mais ces religions sont nées dans un milleu éogphique restreint,& Fest du Bassin mélterranden, font donc évalué en interaction les unesavecles autres, Lechrctianisme seconstnat dansla matrice juve — Jésus ‘tant un juif ot Muhammad, le fondatour de tislam, ost aussi en relation avec des communauté juives studes au ‘ord do a péninsule Arabique. Par alleurs, une tradition {res vaisemblable pose quia connulenestorianisme, une doctrine chretienne schismatique répandue en Mésopo- tamie, aul senare le menotheisme des valeurs ot du sys teme de pensée du monde gréco-romain, CSV: Lidée dun Diew unique est-ale alors originale? MF. B.: faut remonter au point de départ dela rfexion théologique aula conduit mergence du monothélsme. bibliqua. Ason orgine lejudatementest pasmenthéist, ‘Onaretrouween Judée des sanctuares du début du ri Kenaito av. J-C. possédant plusieurs chapolles, co qui tondrait & montrerFexistonco do difirontos roprésonta- tions du divin sombleque lepouple stad acu connais- sance das tentatives de monolatria. cette concentration ou cuite sur un dieu lutot aun autre, qui ont au lew en. Egypte aus sitcla av J-C. avecla valorisation Aton, et en Perse avec le zorcastrisme, Ce demier les a sirement Inftuencés durant is période de demination perse, du vr au. I sidcle avant J.C. Progressivement, le judatsme concoit Fide que le dleu dsm! est le seul vrai die, exprimée dans le Pentateugque et les écrts prephétiques.II<'agit {lune prise de consclenee identtare at communautaire ‘Ui, sans récuser les cultes des autres pouples, affirme ‘copendant quils sadressont 3 de faux dieux (CSV: Ces trols monothélsmes ont-is également des points communs théologiques? MGF. B.: Leur grand point commun ast la révéation de Dieu dans histoire grdce la parole des prophétes ibi- ‘ques pour judatsme, du Chuist pourle chrstanisme et de Munammad pour slam Il existaitbien, dan ls poly thelsmes, des oracles et des interventions miraculeuses Mode de palement eons mon cheque tancare ou postal ore des Cahers de Scienssvie [varcane bene: NL met fenrenn L/L lcrptogamme CINES DU MONOTHEISME Au XIV° siécle avant J.-C., le pharaon Akhenaton rompt avec les divinités traditionnellement vénérées en Egypte pour imposer un dieu unique, Aton. Une parenthése singuliére, prés de huit cents ans avant l’'apparition du monothéisme biblique. ieaeainte a-t-elle " invente Dieu? ety tsa UIs even ha Nilo ii viviienten fermonis avec une multinade dediviniés depuis plusd'un millénaire. Puis,soudain, aux siécle av; J.-C., le pharion Amenchtep IV prone le culte ‘exclusif d’Aton, ledisque vivant, le dieu lumigre. En dix-septans de régne, celui quise rebaptise Akhenaton bouleverse les anciennes traditions égyptiennes, ‘construit une nouvelle capitale et wansforme la vallée du Nil selon sa propre vision du monde. Pour les Egypeiens cestun choc, ine napauerellequ'snefois le pharson mort, on rie son nom des Hstes des oi, con démolit es briment gui avait fais conse et las inscriptions fant wférence An personne, on cfface presque tour tice de son existence terete evanescent AKhenaton na 6 rec Ia toute finduxne sigcle, maisilasuscité depuis une masse considérable de travaux et Particles une série interprétations varies voirecontrafictoires. Alain Zivie, directeur de recherche au CNRS, résume en. ces mots la raison de cette étonnante fascination. « On voit dans ce régne, par une sorte de malentenca {fordarmental eten tout eas sans trops appuser sur eat réel de nos connaissances et de nos approches, le cadre um évenement majeur: tous bornement la naissance du monoehdisme. » Akkhenaton aurait-il écé un pr ccurseur? Auraitil « imuenaé » le monothéisme ?Et si oui, quelle influence a-t-il eue sur les autres grands monotheismes, le judaisme, le christianisme et Vislam? Parmi les spécialistes, le sujet fait encore largement déhat aujourdhui ‘LE CREATEUR DU MONDE. « Sion prend la definition strite due monothisme, & savoirle cuted’ sel dio, alors oui, lareligion d’ Ahe natn escim monothéisme , répond sansdétour Mare Gabolde, égyptoloyue et maitre de conférences & Tuniversitéde Montpellier IIL. Le pharaon introdit cen effet le culte unique d’Acon (ou R¢ Horakhty), dliou lamidre du Soleil, Danses tempslesphasancions deja, le soleil accompasné de ses rayons signifiait dans Pécriture hiéroglyphique la « brillance » ou Pre illumination ». Aton, lumiére qui émane du Soleil, fait naitee le monde et le maintient en vie. « Pax rapport au riche contexte mythologique ot s'ins2- rent les diviniués eyptiennes, Aton es libre de toute at- tache »,reléve Erik Homung, peofesseur d éeypeologie a Tumiversité de Bale. I] sest fait kitméme, de ses ppropres mains, et ne cesse de eréer le monde, AUX RACINES DU MONOTHEISME Ala stat religieuse adttionnelo, ‘on substtue ‘dos objets et sculptures ‘rakant AKHENATON A ACCOMPLI LA MEME REVOLUTION QUE CELLE ATTRIBUEE A MOISE Avecleculted Aton, lepanthéon ézyptiense dépeuple Ibrusquement. Fini b traverse du monde souterrain uiétait censé accomplir Re, ledieuSoleil, lorsdesen ‘voyage nochame: fini la defaited’ Apophis, dieudea nuit, achague lever du soleil. Alors quten Egypte, oft les cours dieau sont innombrables, tous les dieux vvoyageaient en bateau, Invest méme plusfaitmention dela barque vébiculane Soleil dans sa course. « Les ares divinitésne sontpas prises en consieraten, précise Mare Gabolde. Akhenaton ne ferme pas pover auaant vrs sanceuivs, maisilne ls souene pas nom ps, les pponctinme méme léghrement. Etlorzp'test faitmention Panu dint, ce sot des references cused et non religieuses;ladéesse Heather, par exemple, est seulement rmendionnée pone évcruer amour parfait.» nya aucun prosélytisme chez Akhenaton, qui ne cherche pas, au début, 2 imposer sa religion. Nulle part nest mentionnée intention de convertis toute Pgypte au culte d’Aton, et encore moins denvoyer desmissionnairesaudeladesfrontitwes Rien indique quelessancruairesaient été tansfomnésen sanctus Aton. Maislepharaon vad abord chercher® ure aio Sur le site de Tell chAmarna, immense, austire ct terriblementaraé ilerée unecié, érige une nouvelle capitale, Akhetaton («Thorn ’Aton),quidevient lecentre de Padoration du dieu. Au mémemomens, 425 kilométresdeld, danslavillede Neferus leculee deKhnoum, Thot et Oss ésit toujours prtiqus! LES DIEUX PERSECUTES: Lorsque Akhenaten franchitTulkime etlaplusradicale ‘tape dans létablisement de sa doctrine, il décide quilnedoit plus yavoied'autredieugu’Atwn, que les anciennesdivinitésdoivent disparate physiquement. Leur nom, et parfois leur visage, vont étre effacés— terrible sentence dns lamesure ot la représentation, chee les Egyptiens,incamaitlaréalitt. Ledieu Amon, roi des dieux et diew des rois, qui entretenait par cconséquent un vrai contlitidéologique avee Aton, ‘ex paniculidrement visé. Mais aussi son épouse Mot ‘et, de acon sporadique, autres divinités « Lapersé- ‘cuion déclenchée contre les nombreuses divinités du panchéim traccimnel utc un signe tangible dela voloneé Akhenaten de praveniy sans compromis & wax mono thsisme pls ou moins strict. De ce point de vue, la dési- sgnution de CEgypee comme “bercea. du monosheisne” semble jusfige »,reconnait & son tour Erik Homung, De fagon tour & fait inédite, un conflt entre deux religions fondamentalement différentes et incompa tibles sinstaure, et ce dans le cadre dune méme culture! Akherston rete la rtiion polyhse, change par une révolution « d’en haut » l'ensemble 4s systdme culturel de VEgypte. Le eulte d’Aton Pour 'établiszoment de éphé- mere Akhetaton dedige au cute {du leu unique Aton, le pharaon choisit un ste vierge de tout ‘autre culte ou sceupation. Dans le «Grand om peut Gere consiléné se distingue & bien dos er Lame, le ba, n'est pas consubstantielle prophet i, ‘Aton niest pas tun dew éthique qué chate et récompense, ajoute Marc Gabolde. Br, Amama, lawdditestic-bes individ, dle ssngicaprés la mort. On-ne a pas, definition inconnaissabe, dont personae ba, est éaccarion du dine, eige me sorter. Lasonic du défasedépenden sommect sousenir des suruivants er des rites fenéraives qui subsisent. » AUX RACINES DU MONOTHEISME En dépic de lous cliférences, ke culte d’Aton n'aurait- i pas influeneé les religions bibliques?Br dans quelle mesure ?Le psaume 104 de la Bile, par exemple, ries une traduction dia « Grand Hiyrane » d'Akhe naten «Aton » et « Adonai » (nom de Dieu dansle judaisme) seraient ils un seul et méme nom? Fautl assimilerk figure dupharaon acellede Mose Ilsemble cexister autant de théses que de spécialites. Seule certitude: il convient d'abord détre prudent, de se tganderdlexerapoler’ parirde ceque Vonsaitde laville ’Amama et de le projeter sur le reste du pays. «La “seein” dAlenatonn apena-treceéqu ene nipre tovue reaive, aggre Alain Zivie, li oe monde de Lacon ce des grands temples, ase de news lites o- Phiques asi ien qe thmetiques et conceptucls.» Jan ‘Assman, quia réalisé une vaste enquete sur le sujet, est sansdéquivogue: «A mon avis, dn’y cancun len de causalté ere arévohution monothisted’ Akkenaton ete rmonotkésme bible. » Pour lu, le len ext dun tout autre onze: celui diun traumatisme enfoui qui se ‘appellee la mémoire collective. Pour le com- pprencke, i fae se placer du cbeé des Egyptiens, Les habitants des rives du Nil, qu avaient pour habitude denerjeterascimdieu,fontbeutalement experience cextréme de Talevté. On ferme des tomples,cndérait des images des dieu, on supprime les siensoitles dieu quittient lestempleset aupeuple. Les mortsnesoncplusmemifiés on décore seulement kes cadavies. « Dans la pensée éeyfuerne, analyse Jan Assman, interption des rites uv Veffondremene de Conde social etcasmizue. » Le caractéte traumatique de cette expérience a en. ute été renforeé par le refoulement de toutes les traces visibles, Mais, démontre Jan Asaman, le roi Gayption éapparattdanslesrécitsaniquessousd' artes traits. Manéthon, un prétre érudit de la premitre rmaoitié du uesidele av. J-C. raconte ainst Uhistoire LaVierge Marie descend-elle d’Isis ? LA FIN DES RITES SIGNIFIE LEFFONDREMENT DE LORDRE SOCIAL ET COSMIQUE ‘POsarsiph, chef des kepreux, qui conquit Egypte et la terorisa durant treze ans. Or, eee ans, est précisémene la durée du séjour d’ARhenaton & ‘Amama, « Supprimés, le nom et la personne d'Alhe ‘naton n'ont pourtane pas toralement dispar; sont subi sous le masque df Oxaniph,formé tne “ere” dans la mémotre dic peuple, sui ends possible som idenication fined Mose >, conclut jan Assman. En definitive, Inyapasdecasalitéenreleaulte Aton cet hy naiseance du monoshéisme liblique six ou huit ilyadunpeinedevwecslurel, certains ont w, centsansplistard, sTemergence> ln refoule ARtenaton,reouledars Sane rte la memove eiypienne, await resus la peiode seine Gon, bellenseiquesous nem de Mote eseie Rafae Brillaua Sune Fomule cpviskscrigns, uc Hrtage de ype 00), [beets ley expos quan Geile oe igen tea ean ero pel a el le ct ce oe DT ea CChrisane Deeroches Noble. soulignantles emprunts etlee _dotéa du méme sens. Méme Sans oublier que le mythe court en était convaincue:la _similitudes. Elle rapprochait 1a Sainte-Famille puiseraitsa__osirien proait Ia frateriné, rligion égyptienne apavéla Yimage du Soleiljailiseart de source, elon Vhisterienne, __‘Vhumanisme, Yamour de son, vole au christianisme Sisa son lotus ducalice evé parle dans la vénération des fgyp- prochain. L’historienne des re hieei’a pas mncontré décho peitrala meace; les fiidlla ens pour la divine famille cal-_ligions Marie Prangsise Bases auprds des autres spécialistes, égyptiens des @vontails® plu- rienne photoci-dessus):dieu, conteste la méthode: «Recurir uise méfient des rpproche- mes @autruches utliséslore le pie Isis, lame, et Horus, au comparatismepositf conduit ‘ments a posterior la grande des processions papales. Les enfant, ‘d'un mirace. sis bien souvent@ des amalgams. Gqyptologue francaise @ispa- animaux représentés surles A YenfantHorus ce transfor- On peut retrouver tout dans tout rueen 2011) la défendittoute- stiles grenouiles,snuterel-merait mémenaturellement Il ext priférable de commencer ‘fois dans son ouvrage LeFabu- les, serpents..ontsowent __enila Verge Marie tenant sur par releer ls differences» RB. AUX RACINES DU MONOTI Plusieurs siécles avant le judaisme, une religiGh centrée sur un dieu créateur, Ahura Mazda, est afparue au Moyen- Orient. Elle est porf€é par layfigure déVenue légendaire de Zarathoustra. A-tlle influém@eles religions du Livre? Le yboroastrisme p can | c Punicité en question Farvahar (Thomme-ciseau), symbole du zoreastisme, surplombe les runes ce Persépois. resume canceaciioal ‘Une dos caractrstiques de cotta roligion est fe cute i fou, manfostation du Seigneur sage, Ahura Mazda. i: AUX RACINES DU MONOTHEISME [Afin do no pas soul ta tore, élément sacré, fe corps du defunt état pas enterré, mals ‘exposis dans une tour du silence cireulae Gel fen ran) ol étalt dévoré par les olseaun de rote Le feu, symbole du divin, ost ropes 11660, de retour d'un pepe en Tran, le moine capucin Raphael du Mans décrit Véronnants religion des mayes adoratcurs du feu. ls rnesont ni chrétiens, nimuisulmans, maisnéanmoins rmonothéistes. Pour ls philosophes de l'époque, le zoroastrisme est forcément un culte postéricur au judatsme, et ifluencé pa lui Mais éeude deVAvest, aqui assemble es textes sacrés zoroastriens démon. {ret un sidcle plus tard, que cette religion este et bien antérieure aux teligionsdu Live, Et quelle les aasans doute influencées... Tres peu de témoignages archéologiques nous sont parvenus su 'Gpoque et les licux de Pappaction du roroastrisme. Ses préceptes, les hymneset es incan- tations qui accempagnaieneles tues ct été transmis coralement pendant des sigcles. Quand ils furent couchés sur le papier pour constituerI'Avesta la langue uilisée eee plus parlée depuis longtemps. « Un peu comme les catholiques ont longtemps clebré lameseen Latin, ls yoaseiens, eu, ulisaiee pour keuercuke une langue qu ise pariaienc pls», explique Jean Kellens, spécaliste deslangues indo-iraniennes ® au College de France. Cette langue fait partie des LES PLUS ANCIENS ECRITS DE LAVESTA REMONTENT A 1500 AVANT NOTRE ERE ‘sont Ie surune monnale sassonide. premiéres languesindo-européennes avec le sanskrit ancien auquel elle est apparentée. « Ces livres font ‘que Von dispose en Tran d ime sere de préhistote doce ‘mentée. Mais ls ont été composés ame époque et dans seni cu some impossblesd sitwer avec précision. Leurs autores et la société done ils xaient expression nous sont ‘entiwement inconmus », continue Jean Kellens. Leénude destextes permet juste ’évaluer 'archaisme de la langue avestique. Une démarche empiriqueq amine les linguistes a situer fa plus ancienne partie de PAvesta, les Ghatha’s, entre 1500 et 1000 avant notreére. Ces Gatha’s mpportent un dialogue entre ‘celuiquise présente comme leurauteur,Zarathoustra, ‘etun dieu créateur, Abura Mazda, Les quelques ins dications de lieux qu'on y trouve permettent de supposer que Zarathoustra a vécu dans une région, située au nord-est de U'lran, dans les antiques pro: vineos dela Bactriane ou dela Soggiane (aujourd'hui ‘Beaucoup de textes ont en effet été perdus.et détruits lors des conquéee arabe cetVislamisation de Tran, su Va" side, Le détitement abunadooresjpreeieneeuee eck ie ald A partirde 224, tes Perses rallent ide pr ecieu ‘Ahura Mazda) a PARDO GARE LTR Crete So mentareurs a réfléchir Sur Vémengence possible en Grice antique Pune forme de monothéisme propre a, Ta philosophie, en affirmant dans ce fragment n° 23 de ses pensées l'existence d'un dieu unique. Un dieu »?Plurdtune

You might also like