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KI yew &» & be« CHAPITRE 1 man
C’est fou comme le temps passe vite! Je
n’arrive pas 4 y croire. J’ai l’impression
d’étre entrée en CE2 hier.
Je me revois encore avec ma nouvelle
trousse, mes nouveaux stylos, mes nou-
veaux crayons, ma nouvelle gomme, mes
nouveaux cahiers, mes nouveaux habits et
une t&te toute neuve, bien reposée aprés les
vacances d’été... bref, tout ce qu’il faut
pour attaquer une nouvelle année.
Et nous voila aujourd’hui a notre dernier
jour d’école. Il était temps !
= Smeewom CHAPITRE | &
Iln’y a plus d’encre dans mes stylos, mes
crayons sont tout usés, mes cahiers tout cor-
nés, je n’ai plus qu’un tout petit bout de
gomme et mes habits sont déja trop petits
pour moi. Quant a ma téte, elle est fatiguée,
pleine a craquer.
Vraiment, il était temps que ¢a se termine !
— Allons, les enfants! Finissez de ranger
vos bureaux et, dans un instant, on pourra
faire la féte.
C’est M. Cohen, notre maitre, qui nous
encourage 4 tenir encore quelques minutes.
moe6a
st CHAPITRE | mm
En le voyant s’amuser bétement avec un
petit lézard en caoutchouc, je me dis qu’il a
drélement besoin de vacances, lui aussi.
Non seulement il a fallu qu’il boucle toutes
les corvées de fin d’année, mais, en plus, il
a da régler un tas de problémes supplémen-
taires... tout ca 4 cause d’une épidémie
galopante de varicelle !
Presque toute la classe y est passée.
Ceux qui étaient malades étaient absents,
et ceux qui étaient présents étaient couverts
de croiites. La situation était tellement
catastrophique que j’avais accroché un pan-
neau a la porte de la classe :
BIENVENUE A VARICELLE-VILLE
(A VOS RISQUES ET PERILS)
Mais pendant tout ce temps-la, moi, Lili
Graffiti, je n’ai jamais manqué. Pour la
bonne raison que je suis la seule a ne pas
avoir eu la varicelle.
Je suis du genre solide. Je résiste A tous
a7oommm CHAPITRE | ®
les virus, 4 tous les microbes, a toutes les
petites bétes.
Je n’attrape jamais rien... a part les
mouches et encore! Je les relache toujours
au bout de quelques minutes.
— Allons, dépéchez-vous! nous dit
M. Cohen.
Je fourre tout ce que je peux dans mon sac
a dos : ma pommade pour les lévres gercées
(comme je ne m’en sers que |’hiver et qu’on
est presque en été, elle a un peu fondu), le
Schtroumpf porte-bonheur que tante Pam
m’a envoyé pour que j’aie de meilleures
notes 4 mes contréles de maths. (Ca m’a fait
plaisir mais ¢a n’a pas servi 4 grand-chose.
Les maths, pour moi, c’est du chinois. Il n’y
a qu’avec Justin que j’arrivais a y com-
prendre quelque chose. Justin Morris, mon
meilleur ami. L’ennui, c’est qu’il a démé-
nagé.) Je range aussi la grosse balle en che-
wing-gum qu’on avait fabriquée ensemble,
Justin et moi. Il me l’a donnée juste avant de
partir et j’ai juré de la garder toute ma vie.
aoe 8 a
# CHAPITRE | am
Jusqu’a maintenant, je préférais la laisser
a Vabri ici, dans mon casier, parce que chez
moi, elle aurait filé directement 4 la pou-
belle si ma mére était tombée dessus.
Ensuite, je sors un petit album photo.
C’est « Album Papa ». Depuis que mes
parents sont séparés, maman n’aime pas
trop voir des photos de lui trainer dans toute
la maison... Il me manque beaucoup, mon
pére. Il est parti trés loin... En France.
eOunmmwa CHAPITRE |
Pour me consoler, j’ai rassemblé plein
de photos de lui, tout seul ou avec moi.
I y en a méme quelques-unes de nous
trois : papa, maman et moi. Des photos
d’avant leur séparation, du temps ot nous
étions heureux... enfin c’est ce que je
croyais.
Je plonge sous mon bureau pour regarder
mon pére en photo et je lui donne un petit
baiser en chuchotant :
— Salut, p’pa. Aujourd’hui, c’est le der-
nier jour d’école. Je m’ennuie de toi, tu sais.
Jai tellement hate de te voir cet été !
— Arrétez, vous deux !
M. Cohen fait sa grosse voix.
Je glisse rapidement 1’Album Papa dans
mon sac a dos et je me redresse pour voir ce
qui se passe.
Jimmy Russell et Boby Clifford se battent
en duel avec leurs régles.
Pour des gargons qui vont entrer en CM1
dans quelques mois, on ne peut pas dire
qu’ils soient trés évolués.
nun lO®
w CHAPITRE | asm
Ils ont encore plein de croiites sur la
figure. De toute fagon, ils sont affreux ces
deux-la. Deux grosses vilaines croites.
Ils font toujours exprés de m’embéter,
surtout @ cause de mon nom. Ils se moquent
toujours de moi :
— Lili Graffiti s’appelle Lili Grabouillis !
Alors ¢a m’est bien égal quand ils se font
gronder par M. Cohen.
J’entends Jimmy chuchoter :
— Bah! Il ne peut rien nous faire... on a
déja nos notes.
Apparemment, M. Cohen l’a entendu
aussi, parce qu’il lui jette un dréle de regard
en disant :
— Il n’est jamais trop tard pour changer
une note, Jimmy.
Le regard de M. Cohen, c’est quelque
chose ! Les deux boutonneux se dépéchent
d@aller jeter des trucs dans la poubelle, puis
ils reviennent s’asseoir bien sagement.
M. Cohen est le meilleur instituteur du
monde. Enfin... le meilleur de tous ceux
elleoemem CHAPITRE | #
que j’ai eus. Mais quand il se met en colére,
il a vraiment une téte a faire peur.
— Bon. Tout le monde est prét ? reprend-
il.
Dans mon casier, il ne reste plus que deux
chouchous et une vieille balle en mousse. Je
ramasse les chouchous. La balle, je la laisse
4 qui veut.
A présent, tout le monde se tait en atten-
dant que M. Cohen prenne la parole.
Je regarde autour de moi.
La moitié des éléves sont absents 4 cause
de la varicelle, sauf Freddie Romano qui a
da partir plus t6t parce que son pére ne pou-
vait pas changer ses dates de vacances.
M. Cohen nous fait un petit discours : il a
été trés content de nous avoir cette année, il
va nous regretter et, méme s’il ne nous aura
pas dans sa classe l|’année prochaine, il
espére bien qu’on viendra le voir de temps
en temps.
Ensuite, il nous distribue nos « passe-
ports ». On s’en est servi toute l’année pour
awe l2e
»# CHAPITRE | asm
faire comme si on voyageait a travers le
monde.
—Je voudrais que vous gardiez ces passe-
ports en souvenir des pays que nous avons
visités ensemble... et des autres pays que
vous visiterez plus tard. Vous avez tous
fait un long voyage au cours de cette année
scolaire... un voyage qui vous a aidés
a apprendre des choses, 4 changer et a
grandir.
Je regarde mon passeport. Il y a tout ce
qu’il faut, comme sur un vrai. Mais
M. Cohen a mis un nouveau tampon
dessus :
VISA POUR ENTRER EN CM1
Et il a ajouté un petit mot personnel :
« Chére Lili, tu as été pour moi un rayon
de soleil. J’ai apprécié ton humour, ta curio-
sité, ton enthousiasme, ta volonté a te sortir
de situations difficiles (comme les maths,
par exemple... et le fait de t’habituer au
départ de Justin).
13000unm CHAPITRE | #
Ton passeport de CE2 est bien rempli.
Profite bien de ton vrai passeport cet été et
n’oublie pas de m’envoyer une carte postale
de Londres ou de Paris. »
Je léve les yeux vers M. Cohen et je lui
fais un grand sourire.
C’est stir que je lui enverrai des cartes
postales. Parce que moi, je vais partir en
Grande-Bretagne avec ma tante Pam et
ensuite nous irons 4 Paris pour retrouver
mon pére.
Cette fois-ci, je pars pour de vrai. Et je
meurs d’envie d’y étre déja !
= CHAPITRE 2 mom
Premier arrét : Londres. Lili Graffiti en
Angleterre. Ca sonne plutét bien.
Je me demande si je reviendrai en parlant
avec l’accent anglais...
Est-ce que je rencontrerai des rois et des
reines en visitant des chateaux ? Est-ce
qu’ils voudront bien me laisser essayer leur
couronne ?
Je me demande aussi comment vont se
passer ces deux semaines 4 1’étranger, seule
avec ma tante Pam.mam CHAPITRE 2 &
A Londres, je sais qu’il y a une dréle
d’horloge qu’on appelle Big Ben. Grand
Ben... Est-ce qu’il existe aussi un Petit Ben
et un Moyen Ben?
Deuxiéme arrét : Paris. C’est 14 que je
retrouverai mon pére. Pendant ce temps-la,
tante Pam ira chez des amis 4 elle. Pour le
moment, je ne tiens plus en place.
Je suis méme super excitée.
— Lili, mon chou.
Ma mére entre dans ma chambre et
dépose une montagne de vétements sur le lit.
= CHAPITRE 2 a8
— Il serait temps de faire ta valise une
bonne fois pour toutes. Je parle sérieuse-
ment.
Elle s’affale sur le lit, juste 4 c6té de mon
sac de voyage, puis elle se cache le visage
dans ma casquette de base-ball et fait sem-
blant de pleurer.
—Je vais m’ennuyer de toi, tu sais, mais je
suis contente que tu fasses ce voyage. Seu-
lement j’en ai assez de te répéter de faire ta
valise. Il y a quand méme des choses plus
intéressantes a faire avant ton départ !
ol7 enemom CHAPITRE 2 &
Je décide de venir 4 son secours.
— Ne t’inquiéte pas, maman. Reste 1a, je
vais me secouer 8a ta place.
Aprés lui avoir enlevé la casquette, je vais
me planter devant la glace et je prends une
grosse voix d’adulte.
— Lili, pour la derniére fois, boucle ta
valise! Tu vas, tu viens, tu prends des
affaires, tu les mets dans ton sac... tu les
ressors... tu en reprends d’autres... Tu vas
finir par me rendre folle! Voila trois
semaines que ¢a dure ! Et ton pére qui com-
plique tout en t’envoyant des vétements de
France... alors tu défais ta valise... pour la
refaire deux jours plus tard. Ton sac va finir
par exploser, tu rajoutes toujours des
choses... tes peluches, ton Monopoly, ton
mouton, ton coussin-doudou, ton singe, ton
koala... et ta pauvre mére qui doit passer
aprés toi pour faire le tri, revérifier et tout
recommencer... Faire et défaire, c’est tou-
jours travailler!
Maman se tord de rire.
asa l8ea
= CHAPITRE 2 a08
Les poings sur les hanches, je continue a
me faire la legon en me regardant droit dans
la glace.
— Il n’y a vraiment pas de quoi rire, Lili.
Regarde un peu ce bazar ! Ca suffit comme
ga!
Je tape du pied et je me tourne vers ma
mére.
— Ca ira comme ga? Je n’ai rien oublié ?
—Je n’aurais pas mieux fait !
Elle me fait signe d’approcher.
J’avance 4 cloche-pied, comme si je
jouais a la marelle. « Faire-défaire-faire-
refaire. »
Elle me prend dans ses bras et on se fait
un gros baiser.
La sonnerie du téléphone nous dérange en
plein calin.
Je me précipite et je décroche le portable.
C’est quelqu’un qui veut parler 4 Sarah
(c’est le prénom de ma mére).
— De la part de qui? je demande.
— Max... Je suppose que tu es Lili?
= 19 ennmem CHAPITRE 2 #
Je me tourne vers maman.
— C’est un type qui s’appelle Max et qui
connait mon prénom.
Elle sourit et sort de ma chambre en
emportant le téléphone.
Je l’entends dire d’une voix toute gentille :
— Moi aussi j’ai hate de te voir...
Et dire que j’avais peur qu’elle s’ennuie
toute seule !
Tout 4 coup, je me pose une foule de
questions.
— Alors, c’est qui ce Max ? je demande a
ma mére quand elle revient.
Moi, j’aime bien avoir des réponses
claires et nettes.
—C’est le frére d’une amie avec qui je tra-
vaille.
Sourire radieux de ma maman.
—II m’a proposé de sortir.
— Sortir !
Je n’en reviens pas.
— Tu ne vas quand méme pas sortir avec
n’importe qui? Tu ne lui as pas dit que ce
mon 208
= CHAPITRE 2 a0m
n’était pas possible ? Que papa et toi, vous
étes juste séparés ?
—Ecoute, ma chérie...
Elle soupire et repousse les cheveux qui
me tombent sur les yeux.
—J’ai accepté de sortir avec Max. Et toi, il
faut que tu acceptes le fait que nous allons
divorcer, ton pére et moi. Voila six mois
que nous ne nous voyons plus et nous ne
pourrons plus jamais revivre ensemble. I]
est temps que tu te fasses a cette idée. Quant
a moi, je ne peux pas rester enfermée dans
ma coquille. Tu comprends ?
— Non.
Je me laisse tomber sur le lit et je fais la
tte.
— Je veux que papa revienne vivre avec
nous. Je ne veux pas que tu sortes avec
quelqu’un d’autre. Ce Max... tu vas l’épou-
ser? M’obliger 4 vivre avec des tas de
demi-fréres et de demi-sceurs ?
— Voyons, Lili! C’est juste un rendez-
vous !
aw 2leommea CHAPITRE 2 #
Ma mére éclate de rire.
—Je regarde les séries a la télé, je sais trés
bien comment ga se passe, je lui réponds.
Maman me prend par la main, me force
a me relever et me montre mon sac de
voyage. Puis elle me tend les deux sweat-
shirts que mon pére m’a envoyés. Un avec
la tour Eiffel, l’autre d’Euro Disney.
— C’est gentil de sa part de me les avoir
offerts avant, comme ga je pourrai les
mettre quand je serai 4 Londres.
Je les range dans mon sac.
— Il aurait pu attendre que je sois 4 Paris
pour me les donner. Mais 4 ce moment-la,
il aurait fallu que tu m’achétes de nouveaux
habits avant de partir. Ca prouve qu’il pense
a nous, tu vois.
—Ecoute, ma puce, quoi qu’il ait pu se
passer entre ton pére et moi, dis-toi bien
qu’il t’aime et qu’il t’aimera toujours. Je
sais qu’il te manque beaucoup et c’est trés
important, pour toi comme pour lui, que tu
ailles le voir.
mom 22e
a CHAPITRE 2 mam
Elle s’arréte, réfléchit un instant et
répéte :
— Que tu ailles le voir... mais juste pour
les vacances.
— Et toi, tu ne t’ennuies pas de lui? je
demande.
Maman secoue rapidement la téte.
— Non.
C’est clair et net.
Je comprends qu’elle ne veut plus qu’on
parle de ga, alors n’en parlons plus.
Une fois ma valise bouclée, ma mére sort
de sa poche un petit cadenas avec des
numéros et elle le fixe A la fermeture Eclair.
— Eh! Mais je ne connais méme pas la
combinaison !
—Justement. Comme ¢a, tu ne pourras
rien mettre de plus dans ce pauvre sac.
On se regarde.
— Allez viens, je t’offre une glace, me dit
maman en souriant. ,
~— Avec des pépites de chocolat et des
morceaux de cookie ?
= 23 mommum CHAPITRE 25
— Si tu veux.
Elle sort de la piéce 4 cloche-pied.
« Faire-défaire-faire-refaire. »
Je la suis en faisant pareil.
Tout en sautillant, je me dis que je vais
beaucoup m’ennuyer d’elle... méme si j’ai
quand méme trés envie de partir.
Je me demande ce qui va se passer quand
je ne serai plus avec elle.
Il va falloir que j’en parle sérieusement &
mon pére.
S’il revenait, ils pourraient peut-étre réap-
prendre a s’aimer, tous les deux ?
Pourquoi pas ?
= CHAPITRE 3 mam
—Tu m/’as encore battue, Lilibulle.
Tante Pam ramasse les dés de son Yam
de voyage et regarde le score.
— Vingt-deux parties contre trois. Bravo !
Lilibulle, c’est le surnom que ma tante
in’a trouvé, Je lui ai fait promettre de ne pas
m’appeler comme ca devant les autres, sur-
tout ceux de ma classe.
Nous attaquons la vingt-sixiéme partie. Je
commence a étre fatiguée. Et il nous reste
encore un bon moment avant le départ. Ce
matin j’étais tellement excitée que je me
«25 mammwm CHAPITRE 3 #
suis réveillée 4 5 h 30. Un peu tét pour un
avion qui doit décoller 4 7 heures du soir.
Aprés quelques courses de derniére
minute, nous avons déjeuné au Mac-
Donald. Un cornet de frites et un dernier
milk-shake 4 la vanille avant de traverser
V’océan. Nous partons pour deux semaines.
Je bois mon milk-shake jusqu’a la derniére
goutte et je suce mon doigt pour récupérer
les grains de sel au fond du cornet.
usm 262
= CHAPITRE 3 am
Une fois a l’aéroport, ¢a a été tres dur de
dire au revoir 4 maman. J’ai bien vu qu’elle
faisait tout son possible pour ne pas pleurer.
Elle était dans un tel état que j’ai oublié de
lui dire de vérifier s’il n’y avait pas des
puces dans mon lit, parce que je me suis fait
piquer 4 deux endroits cette nuit. Ensuite,
tante Pam et moi, nous sommes passées
sous une grande porte et on a di montrer nos
passeports. Aprés, impossible de ressortirmwa CHAPITRE 3 #
pour aller voir maman. Tante Pam dit que
c’est toujours comme ¢a quand on part a
l’étranger.
Alors on est allées s’asseoir dans la salle
d’attente et on a commencé a jouer au Yam.
Juste au moment ot j’allais gagner la partie,
on entend une annonce dans le haut-parleur.
— Les voyageurs 4 mobilité réduite sont
priés d’embarquer dés maintenant, ainsi que
les personnes accompagnées d’enfants en
bas age.
Tante Pam me fait signe de la suivre avec
le chariot.
Je ne vois vraiment pas pourquoi.
— Dis donc, je ne suis pas un enfant en bas
age, moi!
— Je sais. Mais tu es quand méme assez
jeune pour pouvoir monter avant les autres,
alors, crois-moi, autant en profiter.
Nous montons dans |’avion et nous pas-
sons entre deux rangées de gros fauteuils.
— On se met 1a? je demande en posant
mon sac a dos.
man 282
a CHAPITRE 3 a#@
— Non, mon chou, désolée, me répond
tante Pam. Ici, ce sont les premiéres
classes... un peu trop chic et chéres pour
nous.
Bon. Je reprends mon sac a dos.
Pendant ce temps-la, les hétesses de I’air
distribuent des journaux et des boissons aux
milliardaires de premiére classe.
Nous continuons a avancer et nous arri-
vons dans un secteur oi il y a beaucoup plus
de siéges, nettement plus serrés et nette-
ment plus petits.
—C’est ici!
Ma tante ouvre un dréle de placard accro-
ché au plafond et elle y range son bagage a
main.
— Tu veux t’asseoir prés du hublot ?
—Oh oui!
Je saute sur mon siége sans penser que
ui toujours mon sac sur le dos.
— Aie!
Tante Pam m’aide a l’enlever et le glisse
sous le siége de devant.
= 29 enemem CHAPITRE 3
Je suis trop excitée ! C’est la premiére fois
que je prends I’avion. Je regarde autour de
moi. Quelle cohue !
Les gens essaient de fourrer des tonnes de
choses dans les compartiments au-dessus
d’eux. Un gros bonhomme se frotte le crane
parce qu’il vient de recevoir sur la téte une
cage a oiseaux qui ne voulait absolument
pas tenir dans le placard. Un autre se frotte
le bras parce que quelqu’un lui a donné un
grand coup de parapluie en passant dans
Vallée.
— Maintenant, je comprends pourquoi tu
voulais qu’on monte dans |’avion avant tout
le monde! je dis 4 tante Pam.
— Fais-moi confiance. Je vais 4 Londres
au moins une fois par an depuis quinze ans.
Je commence 4 m’y connaitre en matiére de
voyages.
Elle me tapote la téte. Je déteste ga.
—Eh! Je ne suis pas un chien !
Ma tante me jette un coup d’ceil amusé.
— Excuse-moi, Lilibulle. Mais ne te plains
won 308
w» CHAPITRE 3 sam
pas : j’aurais pu en plus t’appeler Fido ou
Bibichette.
Parfois, les gens que j’aime me rendent
folle!
Il y a de plus en plus de monde et de
moins en moins de place. L’avion est plein
comme un ceuf.
Je me demande ce que |’hétesse a fait de
la cage 4 oiseaux. Je me demande aussi ot
est passé l’oiseau qui habite normalementgam CHAPITRE 3 &
dans cette cage. Peut-étre qu’il voyage de
son cété et qu’il retrouvera son maitre a
Londres. Est-ce que les oiseaux ont besoin
d’un passeport, eux aussi ?
Et cet avion ? Quand est-ce qu’il va se
décider a décoller ?
J’attache ma ceinture. Je suis tellement
excitée que je ne tiens plus en place.
La voix du pilote nous arrive par le haut-
parleur. Il nous dit que l’avion est a destina-
tion de Londres et que s’il y a quelqu’un a
bord qui n’a pas |’intention d’aller la-bas, il
ferait mieux de descendre en vitesse.
Ensuite, l’un des stewards déroule un
écran de cinéma et on nous passe un film
pour nous expliquer les régles de sécurité et
ce qu’il faut faire en cas d’urgence. Je me
sens un peu nerveuse, tout d’un coup. Je me
tourne vers tante Pam qui est en train de
feuilleter un magazine.
— Tu ferais mieux d’écouter ce qu’ils
disent. Entre nous, c’est toi la responsable,
non?
mem 328
» CHAPITRE 3 mem
Elle léve les yeux d’un air surpris.
— Ne t’inquiéte pas, mon chou. Depuis le
temps que je voyage, je connais les
consignes par coeur.
L’avion roule sur la piste pendant un cer-
tain temps, puis il s’arréte derriére d’ autres
avions en attendant son tour. Que c’est
long !
Au moment ot je commence 4 croire
qu’on ne s’envolera jamais, l’avion démarre
en trombe et nous décollons.
C’est génial ! Me voici dans les airs, moi,
Lili Graffiti.
Quelque chose me dit que je ne suis
pas prés d’oublier ces deux semaines de
vacances.usm CHAPITRE 4 «
— Lilibulle ! Dépéche-toi de défaire tes
bagages. Ensuite, on prendra une bonne
douche, on se changera et on ira faire un
tour.
Tante Pam a beau me presser, je me sens
incapable de m’activer. D’habitude je suis
du genre increvable, comme dit maman.
Mais pour le moment, je suis complétement
4 plat. Je me laisse tomber sur le lit en
gémissant.
— On ne pourrait pas faire une petite sieste
mon 345
# CHAPITRE 4 oem
d’abord? S’il te plait, tante Pam, je suis si
fatiguée !
— Allez, debout! me répond-elle en me
tirant par le bras. Nous avons cing heures de
décalage. Mieux vaut prendre le rythme dés
maintenant.
En plus des cing heures de décalage, j’ai
plusieurs raisons d’étre au bout du rouleau.
Premiérement, l’avion est parti en retard.
Nous avons mangé, regardé un film et
essayé de dormir. Le film était bon mais pas
le diner. Et le si¢ge trop dur pour dormir.
Pour couronner le tout, on nous a servi le
petit déjeuner 45 heures du matin.
Mais ce n’est pas fini! Quand on est des-
cendu de 1’avion, il a fallu marcher dans des
couloirs interminables, faire la queue pen-
dant des heures avant de passer la douane,
attendre encore je ne sais combien de temps
pour récupérer nos bagages, puis pour trou-
ver un taxi et ensuite rouler un temps fou
avant d’arriver 4 Londres et de pouvoir
enfin nous poser.
= 35 mommam CHAPITRE 4 &
Je trouve les voyages tuants et je ne réve
que d’une chose : m’allonger sur le canapé
pour piquer un petit roupillon.
— Tu peux prendre ces deux tiroirs-la, me
dit tante Pam en me montrant le bas de la
commode. J’ai retiré le cadenas de ton sac.
Installe-toi.
En sortant mes affaires, je vois que ma
mére a ajouté quelques petits paquets enve-
loppés dans du papier cadeau.
— Est-ce que je peux les ouvrir?
— Oui, bien sir! Pendant ce temps-la, je
file sous la douche.
Tante Pam disparait dans la salle de
bains et je déballe les paquets... Trois
livres, un bocal de gelée de groseille, une
bague avec une minuscule coccinelle et
de l’argent anglais... pour inviter tante Pam
au restaurant.
La téte appuyée sur le coussin du canapé,
je regarde mes cadeaux. Aprés... je ne me
souviens plus de rien, sauf que tante Pam est
en train de me secouer comme un prunier.
non 360
ss CHAPITRE 4 mem
—Aton tour, mon chou, va vite prendre ta
douche! Il ne faut pas dormir maintenant
sinon tu n’arriveras jamais a te régler sur
Vheure d’ici.
Je me traine jusqu’a la salle de bains. J’ai
du mal a garder les yeux ouverts.
J’arrive quand méme a prendre une
douche et 4 m’habiller. Me voici préte.
Enfin... 4 peu prés.
— Passons d’abord un rapide coup de fil a
tes parents pour leur dire que nous sommes
saines et sauves, me dit tante Pam. Je leur ai
promis d’appeler dés notre arrivée.
J’avais oublié qu’il fallait passer deux
coups de téléphone au lieu d’un.
Nous appelons mon pére en premier, tou-
jours 4 cause du fameux décalage horaire.
— Ta mére gagnera quelques minutes de
sommeil en plus, m’explique tante Pam.
Elle compose le numéro de mon pére A
son bureau, puisqu’il est une heure de plus
en France.
Jai trop hate de parler a papa.
= 37 menwom CHAPITRE 4 ®
Tante Pam dit quelques mots en frangais.
On la fait patienter. Elle me regarde en fai-
sant la grimace.
—J’ai horreur d’attendre au téléphone. Le
seul avantage, c’est que le message enregis-
tré est en frangais.
— Laisse-moi écouter.
Je prends l’appareil. Je ne comprends pas
un mot mais j’aime bien le son de cette
langue. Je me demande si papa va me parler
avec |’accent frangais.
Est-ce que j’apprendrai un peu le frangais
quand je serai avec lui?
J’arriverai sirement a dire quelques
phrases du genre : « Papa, je t’aime », « OU
sont les toilettes? » et «Combien ga
cotite ? »
J’arriverai peut-étre 4 en savoir assez
pour écrire une lettre en frangais 4 Justin. Je
parie que personne n’est capable d’en faire
autant dans sa nouvelle école !
Tout a coup il y a un déclic et j’entends
Hello ! en américain.
uaa 38 0
a CHAPITRE 4 mem
— Papa!
— Lili!
C’est bien la voix de papa, sans l’ombre
d’un accent.
—J’étais en pleine réunion dans la salle de
conférence, mais je leur ai dit qu’on me
réclamait... quelqu’un de la plus haute
importance... que ma princesse adorée
m’attendait au bout du fil, de l’autre coté de
la Manche.
—J’ai tellement hate de te voir, papa!
— Moi aussi, ma chérie.
Ila lair aussi excité que moi.
— Tu vas voir, on va bien s’amuser tous
les deux. Je t’ai préparé un programme du
tonnerre !
Je souris tellement fort que j’ai l’impres-
sion que ma figure va se couper en deux.
Il me demande comment s’est passé le
voyage. Je lui raconte tout en détail.
Derriére lui, j’entends quelqu’un dire
quelque chose en francais. Mon pére lui
répond en frangais, lui aussi.
239 mommem CHAPITRE 4 #
J’essaie de comprendre ce qu’il dit, mais
je n’y arrive pas. C’est peut-étre : « Atten-
dez une minute » ou bien : « Apportez-moi
un whisky-soda » ou encore : « Allez voir
1a-bas si j’y suis. Qu’on me laisse tran-
quille, je suis en train de discuter avec ma
petite fille chérie. »
Il s’adresse de nouveau a moi :
- Ecoute, Pucette, la réunion va reprendre
dans quelques minutes. Il faut que j’y aille.
Mais avant cela, passe-moi ta tante, je vou-
drais lui dire un mot.
Je tends le combiné a tante Pam qui me le
repasse ensuite en disant :
aon 40 5
® CHAPITRE 4 ae
— II veut te dire au revoir.
Sans lui laisser le temps de parler, je lui
dis :
— Papa... on fait un concours de baisers ?
— Chérie, ma réunion...
Il soupire, puis il éclate de rire.
— D’accord, allons-y !
— A vos marques... Préts... Partez !
Et nous faisons claquer tout plein de bai-
sers dans le téléphone, le plus vite et le plus
fort possible.
Je commence a avoir mal aux lévres.
— C’est bon, tu as gagné! reconnait mon
pére en s’arrétant.
= 41 omemom CHAPITRE 4 #
Quand on fait un concours de baisers au
téléphone, c’est toujours moi qui gagne.
Papa et moi, on fait ce jeu depuis que je suis
toute petite.
—Ecoute, il faut vraiment que je raccroche
maintenant. Nous aurons tout notre temps
quand tu viendras a Paris, je te le promets.
Plus de travail, je serai libre comme I’ air.
J’ai pris des vacances rien que pour toi.
Vivement qu’on y soit!
Nous raccrochons. Je souris 4 tante Pam
qui me sourit 4 son tour.
— Maintenant, appelons ta maman.
Ma tante reprend le téléphone et je l’en-
tends dire :
— Bonjour, petite sceur! C’est l’heure de
se lever!
Ma mérte et elle discutent pendant un
moment.
— Et moi alors ?
Je piétine devant elle en tendant la main
vers le récepteur. Elle se décide enfin 4 me
le passer.
ann 42e
w CHAPITRE 4 sam
— All6, maman ? Je pense beaucoup 8 toi,
tu sais...
Je lui raconte le voyage en avion, les
hétesses, le film et tout. Je la remercie pour
ses cadeaux et je lui décris l’appartement ot
nous sommes. Tante Pam me fait signe que
la note de téléphone va commencer a étre
lourde.
Mais maman a encore quelque chose a lui
dire. Au bout d’une minute, elle répond :
— Ne t’en fais pas, tout est arrangé.
Aprés un dernier au revoir, tante Pam
raccroche.
— Et maintenant, en route la troupe !mam CHAPITRE 5
— En route l’ascenseur! je crie en entrant
dans la cabine.
A Vintérieur, il y a une grande glace.
Tante Pam est ravissante. Elle porte une
robe d’été a fleurs et un joli petit gilet par-
dessus.
Elle s’est fait une natte, elle s’est
maquillée et a mis un parfum qui sent trés
bon.
Avec ses chaussures de marche, elle a ]’air
tout a fait préte 4 me faire visiter Londres.
aon 44a
s CHAPITRE 5 asm
Je me regarde dans la glace.
Moi, j’ai mis ma chemise violette. Elle est
si longue qu’on voit 4 peine mon short en
jean dessous.
Aux pieds, j’ai des sandales.
Je ne me suis pas attaché les cheveux.
Trop fatiguée pour me faire des couettes ou
autre chose. Je ne suis pas stire d’étre tout a
fait préte 4 visiter Londres, moi. En bas de
= 45 unmmm CHAPITRE 5 &
l’ascenseur, j’entends quelqu’un s’écrier :
—Pam ! vous voila de retour ! Contente de
vous voir.
Tante Pam fait un grand sourire et me dit :
— Lili, je te présente Mary, la gardienne
de l’immeuble. Depuis le temps, elle est
devenue une amie.
— Bonjour, Lili. C’est la premiére fois que
tu viens a Londres ?
Je fais oui de la téte en souriant.
— C’est son premier jour dans la capitale,
explique tante Pam. Je l’emméne a Trafal-
gar Square. A bientét, Mary !
Sur ce, elle me prend par la main et nous
marchons jusqu’au coin de la rue pour
prendre le taxi. J’ai beau étre trop grande
pour donner la main, je m’accroche ferme-
ment a la sienne.
— Tu te rappelles ce que je t’ai dit a
propos des voitures, dans ce pays? me
demande tante Pam.
Je suis fatiguée mais je m’en souviens :
ici, les voitures roulent du mauvais cété.
mam465
w CHAPITRE 5 wee
Je récite ma legon comme une bonne
éléve :
—TII faut toujours regarder de chaque cété
avant de traverser. Ne pas oublier que les
voitures roulent 4 gauche. Regarder par
terre, sur le trottoir, s’il y a écrit : « Attention
a droite » ou bien: « Attention 4 gauche »
pour ceux qui tournent. Si je ne fais pas
attention, je me ferai aplatir comme une
pizza.
— Trés bien!
Tante Pam héle un chauffeur de taxi.
— Nous allons 4 Trafalgar Square. Pou-
vez-vous nous déposer a l’arrét des cars de
tourisme, s’il vous plait ?
En montant dans cet énorme taxi noir, je
remarque que le chauffeur est assis a la
place du passager, alors qu’en Amérique,
c’est le contraire. Décidément, les Anglais
sont des gens bizarres. Je me demande bien
pourquoi ils ont mis le volant du mauvais
cété. Comment font-ils pour conduire dans
les autres pays ?
47 oommm CHAPITRE 5
Jai peur de ne pas pouvoir m’empécher
de crier : « Attention ! » A chaque carrefour.
Tout en me grattant le bras A cause de ma
piqire de puce, je réalise petit a petit que
nous sommes vraiment a Londres. Le taxi
s’arréte.
Nous sommes arrivées.
= CHAPITRE 6 ana
Trafalgar Square.
Moi qui imaginais un parc plein d’arbres
avec des massifs de fleurs, je suis plutét
dégue. En fait de square, c’est une grande
place ronde avec des fontaines au milieu et
des voitures tout autour.
C’est comme pour Piccadilly Circus.
Quand tante Pam m’en a parlé, j’ai sauté de
joie, croyant qu’on allait voir des clowns et
des éléphants. Mais non. En Angleterre, un
circus, c’est un rond-point, tout simple-
ment.
549 onemum CHAPITRE 6 #
Nous montons dans le bus.
Pour ¢a, au moins, pas de danger de se
tromper. Ici, un bus c’est bien un bus. Mais
un grand bus a deux étages, et 4 ciel décou-
vert. Je grimpe tout en haut et je m’assieds a
Pavant. Tante Pam me rejoint.
— Ma petite chérie, mets tout de suite ta
w CHAPITRE 6 mam
casquette, tes lunettes de soleil et de la
créme sur ton nez. Et rappelle-toi que nous
avons promis 4 ta mére de faire un repor-
tage photo sur tout ce que nous allons voir.
Ton appareil est dans ton sac 4 dos, avec ton
stylo et ton bloc-notes.mam CHAPITRE 6
Jespérais qu’elle avait oublié cette his-
toire de reportage... mais non.
— Demain, reprend-elle, on verra les
choses de plus prés. Aujourd’hui, nous fai-
sons juste un petit tour d’horizon.
Je me gratte encore le bras.
— Dis, tante Pam, avant de rentrer a la
maison tout A I’heure, est-ce qu’on pourra
s’arréter dans une pharmacie pour acheter
un truc contre les démangeaisons ?
Elle hoche la téte en souriant.
— Jespére que tu n’es pas allergique a ta
vieille tante, au moins ?
Je lui réponds par un grand sourire, mais
ga me gratte de plus en plus.
— Tu sais, Lilibulle, je suis vraiment
contente de t’avoir avec moi. On va pouvoir
faire des tas de choses ensemble. Et puis je
suis ravie de te faire découvrir Londres.
Le bus n’a pas encore démarré. Il y a
encore plein de gens qui montent. Une
famille vient s’installer prés de nous. Le
pére, la mére et une petite fille.
mom 52 6
CHAPITRE 6 asm
— Ce serait bien si maman et papa étaient
1a aussi, non ?
Tante Pam enléve ses lunettes de soleil et
me regarde d’un air sérieux. Trop sérieux.
Je sens venir la grande tirade que je connais
par coeur : mes-parents-m’ adorent-mais-
eux-ne-s’aiment-plus-alors-ils-ne-peuvent-
plus-vivre-ensemble-et-c *est-mieux-pour-
tout-le-monde...
Comme je n’ai aucune envie d’entendre
ce refrain pour la centiéme fois, je change
vite de sujet :
— Tante Pam, tu te souviens de Justin?
J’ai promis de lui rapporter un souvenir.
Qu’ est-ce que je pourrais trouver?
Elle cligne des yeux et réfléchit un
moment.
J’attends de voir si elle va me parler de
mes parents ou du cadeau de Justin.
Finalement, elle hausse les épaules, remet
ses lunettes de soleil et me dit d’une voix
joyeuse :
— Il y a des boutiques de souvenirs A
053 eenmem CHAPITRE 6
chaque coin de rue. Dans le tas, nous trou-
verons bien quelque chose pour ton Justin.
Ca y est, le bus démarre.
Tante Pam m’embrasse sur le front, puis
elle enléve le cache de mon appareil photo.
Je prends des photos de tout : l’abbaye de
Westminster, le Parlement, la Tour de
Londres... Je trouve ¢a super !
Quand je pense que je suis en train de voir
ga pour de vrai... toutes ces choses qu’on a
étudiées en classe!
Ensuite, le bus s’arréte devant le palais de
Buckingham. Le guide nous explique que si
le drapeau flotte, ga veut dire que la reine
est chez elle. Aujourd’hui : pas de drapeau,
donc la reine n’y est pas.
J’ai bien envie de faire la méme chose
chez moi. Je ferai flotter le fanion de base-
ball que mon pére m’a offert, la fois ot on
est allés voir un match ensemble.
Je continue 4 prendre des photos. Il y a
tant de choses A voir que je ne sais plus ot
donner de la téte.
usm S45
# CHAPITRE 6 sam
Vivement demain, qu’on aille visiter tous
ces endroits de prés !
Ily aun bonhomme qui n’arréte pas de se
mettre devant moi. Quand on fera dévelop-
per mes photos, je parie que j’aurai au
moins dix exemplaires de son dos A coller
dans mon carnet de reportage. Le bus nous
raméne au terminus, a Trafalgar Square.
— Allons-y, me dit tante Pam.
— Ot ¢a? Faire la sieste ? je lui demande
en me grattant le bras.
— Pas encore. Je veux d’abord te montrer
quelque chose.
Elle met sa main devant mes yeux.
Qu’est-ce que ¢a peut étre? J’ai hate de
savoir.mom CHAPITRE 7 =
Nous n’allons nulle part.
Nous sommes toujours a Trafalgar
Square, prés de la fontaine. Il y a méme des
gens qui trempent leurs pieds dans |’eau.
J’interroge tante Pam du regard. Elle me
fait oui de la téte. Aussitét, j’enléve mes
sandales, je m’assieds au bord du bassin et
j’en fais autant. C’est super !
Pendant que tante Pam prend des photos,
je balance mes pieds dans 1’eau tout en
regardant autour de moi. Il y a plein d’im-
meubles, un musée, une grande église. Il y a
mon568
= CHAPITRE 7 am
aussi des gens qui donnent a manger aux
pigeons. Certains viennent méme se per-
cher sur eux.
Je meurs d’envie de faire la méme chose.
Fini de barboter. Je remets vite mes san-
dales et je cours vers ma tante qui doit en
étre a la cent vingt-cinquiéme photo de moi.
— Dis, s’il te plait, est-ce que je peux don-
ner a manger aux oiseaux ? J’aimerais tant
leur donner, s’il te plait!
Je la tire par la manche.
— Arréte, Lilibulle ! Je vais finir par avoir
un bras plus long que I’autre si tu continues.mem CHAPITRE 7 w
Du coup, je tire de l’autre cété.
—S’il te plait, tante Pam !
Elle sort son porte-monnaie de son sac.
—Bon... d’accord ! Ces bestioles ont beau
tre pleines de microbes, je reconnais que
c’est une expérience incontournable. Aprés
tout, nous sommes 1a pour jouer les tou-
ristes, pas vrai? Va acheter un paquet de
graines et je te prendrai en photo.
Je cours faire la queue prés du marchand.
Mes pieds font pouich! pouich! dans mes
sandales. En attendant mon tour, je regarde
comment font les gens. Ils jettent d’abord
quelques grains par terre, puis ils en mettent
un peu au creux de leur main. Dés que j’ai
mon petit sachet, je retourne prés de tante
Pam et je commence la distribution.
Aussit6t un pigeon vient se poser 4 mes
pieds et un deuxiéme atterrit sur mon bras.
En voila encore un qui arrive et qui se
perche sur ma téte !
—Je n’aime pas beaucoup ¢a, me dit tante
Pam d’un air dégofité.
asm 58 =
= CHAPITRE 7 sem
— Moi, je trouve ¢a génial !
J’éclate de rire tandis que deux autres
pigeons battent des ailes au-dessus de moi.
Je prends encore du grain et les oiseaux
viennent picorer dans ma main. Tante Pam
continue a me mitrailler avec son appareil.
Bientét il ne me reste plus une seule
graine et les pigeons s’en vont.
— S’il te plait, est-ce que tu peux me don-
ner encore un peu d’argent ?
— Tu es sire ? me demande tante Pam en
faisant la grimace. J’ai peur que tu attrapes
une maladie a cause de ces sales bétes.
Je lui montre tous les gens qui donnent a
manger aux pigeons autour de nous.
— Regarde ! Ils ont l’air en pleine forme !
S’il te plait, c’est tellement dréle !
Elle finit par céder et je retourne faire la
queue chez le marchand de graines. A
quelques pas de moi, j’apercois une dame
qui nettoie les cheveux de sa fille avec un
mouchoir en papier. Pourvu que tante Pam
ne voie pas ca!
059 memmem CHAPITRE 7
J’espére qu’un pigeon n’aura pas la mau-
vaise idée de me déposer quelque chose sur
la téte. Berk!
Quand je reviens prés d’elle, tante Pam
me dit :
— Tu ne veux pas te contenter de jeter du
grain et de les regarder manger par terre ?
Je parie qu’elle a vu la maman de la petite
fille en train d’essuyer la crotte de pigeon
qu’elle avait dans les cheveux.
aon 602
Aprés une série de « s’il te plait » implo-
rants, tante Pam se laisse attendrir. Me voila
de nouveau entourée d’une nuée de pigeons
affamés. J’en ai un sur le pied, deux sur
chaque bras, un qui picore ma main droite,
un autre ma main gauche. Je suis aux anges.
D’un coup d’aile, un pigeon fait tomber
ma casquette. Je trouve ga trés dréle. Ensuite,
celui-la ou un autre, comment savoir, atterrit
sur ma téte. Je trouve ¢a trés dréle aussi.
Ol mee
= CHAPITRE 7 ammm CHAPITRE 7
L’ennui, c’est qu’il s’accroche 4 mes che-
veux. Ses pattes s’emmélent et il com-
mence 4 tirer de toutes ses forces. Alors 1a,
je ne trouve plus ga dréle du tout. Tante
Pam se précipite sur moi pour chasser le
volatile. J’ai mal au crane.
Le pigeon s’envole et tous les autres
aussi. Quelques-uns de mes cheveux se sont
envolés avec lui. En rouvrant les yeux, je
remarque que tante Pam est toute pale.
— Est-ce que je peux aller acheter un autre
paquet de graines, s’il te p...?
— Pas question !
Elle n’a vraiment pas l’air dans son
assiette. Cette fois, pas la peine d’insister.
—C’est bon...
Je l’embrasse sur la joue.
— Merci, tante Pam. C’est un des plus
beaux jours de ma vie.
Elle m’embrasse a son tour, puis m’exa-
mine sous toutes les coutures pour voir si
les pigeons n’ont pas laissé de traces sus-
pectes.
men 62e
# CHAPITRE 7 mam
— Maintenant, a la maison! me dit-elle.
Nous allons passer a la pharmacie pour
acheter ton produit anti-puces, aprés quoi tu
prendras une bonne douche et moi aussi.
Quand elle a dit « 4 la maison », j’ai
d@’abord pensé 4 maman et au New Jersey,
mais j’ai vite réalisé qu’elle voulait parler
de l’appartement de Londres.
Je commence a m’habituer a avoir une
maison dans chaque pays.unm CHAPITRE 8 «
Je me regarde dans la glace en me disant :
« Ces boutons-la, ma petite, soit c’est les
pigeons, soit c’est la varicelle. »
En tout cas, ce ne sont pas des puces qui
m/ont fait ca. Je m’en doutais vaguement
mais je ne voulais pas l’admettre.
Je vais m’allonger sur le canapé du salon
en essayant de réfléchir 4 ce qui va se passer.
J’aimerais bien que ma mére soit 1a.
Tante Pam dort dans la piéce d’a cété.
Je ne sais pas si elle saura quoi faire.
Aprés tout, elle n’a jamais eu d’enfant.
uon64a
¢ CHAPITRE 8 sam
Et puis une tante, ce n’est pas comme une
maman.
Mon pére est en France. De toute fagon,
un pére ce n’est pas comme une mére.
Il y a des péres qui se débrouillent trés
bien quand leurs enfants sont malades...
mais pas le mien. Ca le rend mal a I’aise.
C’est toujours ma mére qui s’occupait de
moi dans ces cas-la.
Et pour l’heure, je me sens vraiment mal
fichue.
Ca me gratte.
065 mommom CHAPITRE 8 »
Ca me gratte terriblement.
J’ai mal aux yeux.
Jai mal a la téte.
J’ai du mal a avaler ma salive.
Je dois avoir des boutons de varicelle jus-
qu’au fond de la gorge.
J’ai mal partout.
J’ai impression d’avoir été écrasée par
une de ces voitures qui roulent du mauvais
cété. Je me sens raplapla comme une pizza.
Mais si ¢a se trouve, je me fais des idées
pour rien.
C’est peut-étre 4 cause de ce fameux
décalage horaire ? Tout le monde dit que ¢a
pose des problémes (mais je n’ai jamais
entendu dire que ga pouvait donner des
boutons sur tout le corps).
Ou alors c’est 4 cause des pigeons. IIs
m/’ont peut-étre refilé une horrible maladie.
Est-ce que ¢a existe, la pigeonite ? Est-ce
qu’on peut en mourir?
En attendant, je suis 4 Londres et je suis
malade.
nnn 662
# CHAPITRE 8 asm
Je me demande s’il y a des docteurs, en
Angleterre.
Est-ce que maman va venir me rejoindre
d’un coup d’avion ?
Est-ce que papa va traverser la Manche
pour me voir? C’est peut-étre une bonne
occasion de les réunir...
J’ai l'impression que ga me gratte de plus
en plus... Est-ce que ¢a va durer long-
temps ?
Est-ce que je guérirai un jour?
Je souléve ma chemise. Je suis couverte
de boutons.
Je ferme les yeux pour essayer de me ren-
dormir. Aprés tout, ce n’est peut-étre qu’un
mauvais réve. Impossible de trouver le
sommeil. Je rouvre les yeux.
Ce n’est pas un mauvais réve. C’est un
véritable cauchemar, sauf que je suis bel et
bien éveillée.
Jai envie de crier.
D/ailleurs, c’est ce que je fais :ase CHAPITRE 9 =
Cher Justin,
J’ai la varicelle. Scratch, scratch,
scratch.
Ca me gratte partout. Je suis coincée
dans ma chambre depuis une semaine.
C’est mortel!
Tu sais ce que le docteur Kelly m’a dit
en arrivant ? (Parce qu ici, les docteurs
viennent chez toi pour te soigner.)
Im'a dit :
1) Tu as la varicelle.
2) La pigeonite, ¢a n’ existe pas.
non 68e
e CHAPITRE 9 mem
3) Passe-toi de la lotion calmante tous les
jours.
4) Surtout ne te gratte pas.
5) Tu survivras.
Tu sais quoi ? Je croyais que ma mere et
mon pére arriveraient en courant pour me
voir sur mon pauvre lit de douleur (en fait,
le lit n’est pas @ plaindre... c’ est moi qui
souffre !). Je croyais qu’en se revoyant, ils
retomberaient amoureux.
Eh bien pas du tout! Le docteur a dit
qu ils n’avaient pas besoin de venir et que
tante Pam pouvait trés bien s’ occuper de
moi (ce qui est vrai).
Conclusion, mes parents sont toujours
séparés. Snif.
Ca me grattouille, ¢a me chatouille et je
m’ ennuie a mourir. Ecris-moi vite.
Je t’ embrasse (par papier, ce n’ est pas
contagieux).
LHe p- pit:
669 ommem CHAPITRE 9 &
Je glisse ma lettre dans une enveloppe.
Tante Pam est a cété, en train de lire un
livre.
— On reprend notre marathon Monopoly ?
—Encore !
Elle léve les yeux en soupirant.
—S’il te plait, tantine !...
Je lui sors le grand jeu : regard implorant,
bouche amére et arguments chocs.
—J’ai trop mal aux yeux pour lire, tu ne
veux pas que je regarde la télé trop long-
temps et j’en ai marre de compter mes bou-
tons.
— Bon, d’accord. Mais laisse-moi quand
méme terminer ce chapitre.
J approuve en souriant.
En attendant qu’elle ait fini, j?examine
mon bras couvert de boutons et j’essaie de
deviner quel dessin ga ferait si on reliait
les points. A mon avis, ca ne ressemblerait
pas a grand-chose... Un gribouillis bizarre,
un vieux hamburger avec des grains de
sésame... ou peut-étre une photo de la Lune
aon 706
= CHAPITRE 9 oem
avec ses cratéres et tout. Tante Pam s’assied
a la table ot nous avons installé le Mono-
poly. Ca fait presque une semaine qu’il est
la. Je lance les dés et j’atterris sur la case
« Chance » :
Allez en prison
Rendez-vous directement a la prison
Ne franchissez pas la case « Départ »
Ne touchez pas £ 200
Tu parles d’une chance! J’ai déja l’im-
pression d’étre en prison depuis une
semaine.
a7l oemmum CHAPITRE 9 &
C’est 4 ma tante de jouer.
— La barbe! s’écrie-t-elle, ca fait la
deuxiéme fois que je tombe sur Mayfair.
Combien je te dois ?
— Deux mille livres. Ou si tu préféres, tu
me donnes la gare de Liverpool et les deux
cents livres que tu viens de toucher en pas-
sant par la case « Départ ».
— Au point ot j’en suis, ajoute ces deux
mille livres 4 ma note, répond-elle en sou-
pirant.
Je regarde l’addition. Tante Pam me doit
123 796. En livres, pas en dollars. En
Angleterre on paie avec des livres sterling
et des pence, pas en dollars et en cents
comme chez nous. Le plateau du Monopoly
est différent aussi, mais ga ne me géne pas.
J’ai acheté les meilleurs quartiers, tous a la
suite : Regent, Oxford et Bond Street, Park
Lane et Mayfair.
J'ai sept autres propriétés éparpillées un
peu partout.
En fait, ce n’est pas si désagréable d’étre
mon 725
® CHAPITRE 9 mam
en prison. Je n’ai rien @ craindre : je reste
bien au chaud sans rien faire et j’attends
tranquillement l’argent que mes propriétés
me rapportent.
— Flite et reflite !
Tante Pam vient encore d’atterrir chez
moi.
— Combien ?
— Quatre cent cinquante, j’annonce. Mais
pour cette fois, c’est gratuit.
— Tu es vraiment trop bonne, chérie, me
dit-elle en souriant.
Elle a lair fatiguée.
Il faut dire qu’elle est restée tout le temps
enfermée avec moi.
De temps en temps, il y a des amis qui
passent la voir. C’est chouette, parce qu’a
chaque fois ils m’apportent des cadeaux.
L’ennui, c’est qu’elle s’occupe moins de
moi pendant ce temps-la.
— Tante Pam? Je voudrais te dire merci.
— Pourquoi ?
— Pour tout.
«73 oommatm CHAPITRE 9 ##
Elle me sourit.
— Merci pour ton merci.
Je l’embrasse, puis je reviens au Mono-
poly.
— Tu es encore chez moi mais je t’ offre
une nuit gratuite dans mon hdtel.
Le téléphone sonne. C’est mon pére. Il
appelle tous les jours. Et comme je ne pour-
rai pas aller en France, c’est lui qui va venir
me voir 4 Londres. Il me raconte ce qu’il a
fait aujourd’ hui. Moi, je lui raconte mes
prouesses au Monopoly.
Ensuite, nous faisons notre concours de
baisers.
Cette fois, je le laisse gagner.
Aprés avoir raccroché, je me tourne vers
tante Pam.
—On fait la course en ascenseur ?
Je commence 4 en avoir assez du Mono-
poly.
—D’ac!
Elle en a sirement assez elle aussi...
d’autant plus qu’elle perd. Nous nous
usa74e
= CHAPITRE 9 oem
levons et nous sortons sur le palier. Je vais
vers l’ascenseur qui est tout au bout du cou-
loir. Tante Pam prend celui en face de notre
appartement.
Je crie:
—A vos marques, prét... partez !
Nous appuyons sur le bouton en méme
temps. C’est mon ascenseur qui arrive le
premier.
= 75 mommam CHAPITRE 9
Je m’engouffre dedans et j’appuie sur
« Rez-de-chaussée ».
C’est moi qui vais gagner, c’est stir.
Tout a coup, l’ascenseur s’arréte mais les
portes ne s’ouvrent pas.
Je regarde 4 quel étage on est.
Entre le cinquiéme et le quatriéme.
Me voila bien...
J’appuie sur le bouton mais il ne se passe
rien.
mon 760
= CHAPITRE 9 mem
C’est Vhorreur ! Je vais mourir.
J’aurais mieux fait de rester dans la prison
du Monopoly.
Comment va-t-on me sortir de 14? Com-
ment vais-je faire pour manger?
Et si j’ai envie d’aller aux toilettes ?
Bon. Pas de panique. Je n’ai jamais
entendu parler de quelqu’un qui est mort
parce qu’il était resté coincé dans un ascen-
seur.
Il suffit d’attendre calmement.
Ils vont peut-étre envoyer une équipe de
télé pour une émission du genre « Sauve-
tage en direct » et je deviendrai une vedette.
— Lili!
C’est tante Pam qui m’appelle.
—Reste calme, mon chou. Surtout ne t’in-
quiéte pas. On va vite te sortir de 1a, les
secours arrivent.
Je suis parfaitement calme. Pour tout dire,
ga fait longtemps qu’il ne m’est rien arrivé
d’aussi excitant depuis ma varicelle. Justin
sera vert de jalousie quand il apprendra ¢a!
a 77 oommam CHAPITRE 9 #
Je ne voudrais quand méme pas que ¢a
dure trop longtemps.
Pourvu qu’on me délivre avant que j’aie
envie de faire pipi !
Je vais peut-étre rester 14 toute la nuit...
rater le diner... le petit déjeuner.
Et si mon pére arrive avant que je sois
sortie ? Je ne pourrais pas le voir... seule-
ment entendre sa voix.
Soudain, l’ascenseur se remet en marche.
Cette fois, tout va bien: il va jusqu’au
bout et s’arréte au rez-de-chaussée.
C’est nul! Il n’y a méme pas la télé!
Tante Pam se précipite pour me prendre
dans ses bras.
— (Ca va, ne t’en fais pas. Je vais trés bien,
je lui murmure 4 l’oreille.
Mary, la gardienne, se précipite 4 son
tour.
— Mon fils est resté coincé dans un ascen-
seur, lui aussi, quand il était petit. Il n’a pas
arrété de crier et de pleurer.
—C’est vrai?
men 785
= CHAPITRE 9 ae
(Je ne voudrais pas me vanter, mais je
trouve que je me suis montrée trés coura-
geuse, moi.)
Elle hoche la téte.
—C était en plein été, il faisait une chaleur
terrible. Le pauvre petit... il avait tellement
chaud qu’il a enlevé tous ses vétements l’un
aprés l’autre. Quand on 1’a sorti de 18, il
n’avait plus que son slip!
Nous éclatons tous de rire. Je me sens
nettement mieux, tout a coup.
Jusqu’a maintenant, j’ai visité tous les
quartiers de Londres sur le Monopoly ;
demain, je serai d’attaque pour le faire en
vrai.ase CHAPITRE 10 »
Chére Lili,
Je viens de recevoir ta lettre. Alors
comme ¢a, tu as la varicelle! Tu dois étre
belle ! Est-ce que tu es rose a pois blancs ou
blanche a pois rouges ? (T’ énerve pas, je
rigole...)
J aimerais bien étre avec toi. Moi je vais
aller a un camp de karaté.
Tu te souviens quand Bob Simmons a eu
la varicelle, a la maternelle ?
Il voulait toujours manger ses crottes
parce qu'il croyait que c’ était des miettes
aon 80e
= CHAPITRE 10 mem
de gdteau! Heureusement que la maitresse
Va arrété a temps! Bon, en attendant, ne
fais pas pareil, hein ?
A bientot, Je t embrasse
Fuse*in
Justin... je m’ennuie vraiment de lui.
Il me fait toujours rire, méme si parfois je
le trouve un peu dégofitant.
Son histoire de crodite 4 la maternelle, par
exemple, c’est limite.
Enfin... Je me demande si j’arriverai un
jour a retrouver un ami aussi sympa que lui.
Tante Pam entre dans le salon.
— C’est I’heure de replier le canapé !
Je me léve et on fait un peu de rangement.
Tout en remettant les coussins en place,
elle me dit :
— Alors, ma Lilibulle, est-ce que tu te sens
d’attaque pour sortir, aujourd’ hui?
— Oui, tout a fait d’attaque !
Et je prends mon sac a dos.
=o 8leommam CHAPITRE 10 #
—En route la troupe !
Nous l’avons crié toutes les deux en
méme temps.
On appelle l’ascenseur. Cette fois, j’es-
pére qu’il ne tombera pas en panne.
Mary nous fait signe en nous voyant passer.
Dehors il pleut, mais juste un peu.
Tante Pam me dit que cela arrive souvent
a Londres.
Nous marchons jusqu’au métro. Les
Anglais l’appellent « le tube », a cause de sa
forme. Pour donner un peu de piment au
voyage, je fais comme si nous étions des
sardines en route pour la conserverie.
Je suis toujours pleine d’imagination, moi.
Nous descendons 4 notre arrét. Tante Pam
me dit :
— Direction : musée du Cinéma!
Aprés cing minutes de marche, nous arri-
vons a un endroit appelé « Bank du Sud ».
Mais j’ai beau regarder, je ne vois aucune
banque dans les parages. Ni au sud, ni au
nord, ni a l’est, ni a l’ouest.
man 820
= CHAPITRE 10 m%m
Je n’y comprends rien.
— Tu as l’intention de changer tes dollars
en argent anglais, tante Pam?
Elle me regarde avec de grands yeux.
Alors pour mieux me faire comprendre, je
lui montre la plaque « Bank du Sud ».
Ca la fait rire.
Je déteste quand les gens rient alors que je
n’ai rien dit de drdle.
— Ma chérie, tu n’y es pas du tout! C’est
le nom du quartier. En anglais, bank signifie
= 83 memmam CHAPITRE 10 w
«rive ». Ici, nous sommes sur la rive sud de
la Tamise.
En voyant mon air perplexe, elle ajoute
gentiment :
—Je reconnais qu’il y a de quoi s’em-
brouiller avec tous ces noms.
€a, c’est le moins qu’on puisse dire.
Nous achetons nos billets et nous entrons
enfin au Momi, le musée du Cinéma et de la
Télévision.
On y voit d’abord tous ces vieux appareils
avec des images qui tournent 4 |’intérieur.
Dans une autre salle, on nous apprend
comment faire un dessin animé.
On s’assied autour d’une grande table
ronde avec un trou au milieu, ot quelqu’un
nous explique ce qu’il faut faire. Ensuite, on
nous distribue une longue bande de papier
divisée en douze cases. Moi, je décide de
dessiner un bonhomme en train de faire la
roue : je ne suis pas trés douée en dessin.
Apparemment, tante Pam non plus.
Ensuite, tous ceux qui sont assis a la table
mon 845
= CHAPITRE 10 mem
glissent leur bande de papier dans une
espéce de machine dont le nom signifie
« roue de la vie » (c’est le professeur qui
nous explique ¢a).
On dirait une cage 4 hamster avec des
petites fentes pour regarder A travers.
Chacun son tour, on fait défiler notre des-
sin animé.
Mon bonhomme n’aura sfirement pas le
premier prix de gymnastique !
Quant a la fleur de tante Pam, vue dans
cette machine, elle ferait plut6t penser a la
roue de la mort.
Je vais regarder ce que ¢a donne pour les
autres. Le dessin animé que je préfére, c’est
un garcon de mon age qui I’a fait.
Il a dessiné quelqu’un en train de vomir.
Quand on fait tourner la manivelle dans
l’autre sens, on dirait qu’il ravale tout.
C’est vraiment dégofitant mais je trouve
¢a super !
Je suis sire que ¢a plairait aussi a Justin.
—En route la troupe, me dit tante Pam.
= 85 anemem CHAPITRE 108
Fone di fou Mle 8
vuojgts
Ca me géne quand elle dit ¢a devant tout
le monde.
Nous nous dirigeons vers le « Bureau du
casting », 14 ol on choisit les acteurs.
Un homme déguisé en vieux metteur en
scéne se précipite vers moi.
— Mademoiselle ! Venez par ici!
Je me retourne pour voir si c’est bien a
moi qu’il parle.
— Oui, oui, c’est bien vous. Vous étes
exactement celle que je cherche.
Il me prend par le menton et me regarde
attentivement.
SGO666¢6
usm 865
m CHAPITRE 10 mam
hx XK yp
et ée uu
— Absolument parfaite pour le réle !
Est-ce qu’il dirige un film d’horreur du
genre L’ Invasion des boutonneux?
Il choisit deux ou trois autres enfants dans
la salle.
C’est décidé, moi, je serai Lulubelle.
Quant au garcgon qui a dessiné le bon-
homme en train de vomir, il jouera le rdéle
de Max, le gros dur de la ville.
ly a aussi Clint, le shérif, et Mama Bou-
lange, la reine des beignets aux pommes.
Nous répétons pendant quelques minutes,
aprés quoi un homme habillé comme un
GO9ae8
= 87 oemmom CHAPITRE 10 w
cameraman d’autrefois fait semblant de
nous filmer. Dans la salle, tout le monde se
met a applaudir.
Ce n’est pas désagréable, comme sensa-
tion. Je sens que j’y prendrais vite goit.
— En route la troupe !
Tante Pam me tend mon sac a dos.
— Nous avons encore plein de choses a
voir. Il y a une salle od on a |’impression
d’étre Superman en train de voler au-dessus
de Londres, une autre ot on prend la place
dun présentateur de télé et encore une autre
ou tu te fais interviewer comme si tu étais
une grande vedette.
Décidément, tout ¢a me plait bien. Le
cinéma, la télé, la gloire...
En tout cas, dés qu’on rentrera a l’appar-
tement, je m’entrainerai 4 faire une belle
signature... pour le jour ow je serai célébre.
Et demain, quand mon pére arrivera, je lui
donnerai mon premier autographe de star !
= CHAPITRE 11 mam
he
Ca y est, j’ai trouvé ma nouvelle signa-
ture. Maintenant il ne me reste plus qu’a
devenir célébre.
Tante Pam arrive dans le salon, son
séche-cheveux a la main.
Dans ce pays, il n’y a jamais de prise
électrique dans les salles de bains. Les
Anglais sont vraiment des gens bizarres.
«89 memmem CHAPITRE 11 #
Enfin, je suppose qu’ils doivent aussi
trouver les Américains bizarres pour cer-
taines choses.
C’est comme pour les noms de famille. Il
y a souvent des gens qui sont étonnés quand
je leur dis que je m’appelle Lili Graffiti.
Pourtant, ce n’est pas plus étrange que
Smith, Stevenson ou Jackson.
Tout a coup, on sonne a la porte.
C’est peut-étre mon pére qui est en
avance. Je me précipite pour ouvrir.
Mais non, ce n’est pas papa. C’est la gar-
dienne.
— Une lettre pour toi, Lili.
— Merci, Mary. A plus tard.
C’est une lettre de ma mére. Je l’ouvre
immédiatement.
Ma chérie,
Nous nous sommes tellement parlé au
téléphone depuis que tu es malade que je
n'ai pas grand-chose de nouveau @ te dire.
Si, quand méme : I’ autre jour, en faisant
aon 908
CHAPITRE 11 mem
du rangement dans ta chambre, j’ ai trouvé
une grosse balle en chewing-gum. Quelle
horreur ! Tu tiens vraiment a garder ca ? Je
n'ai pas osé y toucher, mais j’ aimerais bien
qu’ onen parle a ton retour.
Ne sois pas trop triste de n’ avoir pas pu
visiter Londres en long et en large comme
tu le prévoyais. Aprés tout, cette varicelle
vous a sans doute rendues plus proches
Pune de l’ autre, tante Pam et toi. C’ est le
bon cété de la chose, non?
J’ espére que tu vas bien t’ amuser avec
ton peére.
Mais n’oublie pas que ce sont les
vacances. Apres cela, il faudra revenir. Il
n’ est pas question que tu ailles vivre avec
lui en France, tu comprends ?
Jet’ aime et j’ ai hate de te revoir.
Je t’ embrasse trés, trés fort.
Mam’
Je vais voir tante Pam.
— Dis, pourquoi est-ce que maman me
Onamam CHAPITRE 11
parle d’aller vivre en France ? Est-ce que
papa veut m’emmener avec lui?
Elle pose son séche-cheveux et me
demande si elle peut lire ma lettre.
Je la lui tends.
Elle a l’air triste.
— Qu’est-ce qui se passe ?
—Fcoute, Lili. Tes parents sont en train de
régler les détails de leur divorce. Tl ne faut
pas que tu t’inquiétes ou que tu te croies
responsable de quoi que ce soit... Ton pere
et ta mére t’aiment énormément et tu leur
manques beaucoup quand tu n’es pas
auprés d’eux. Ils ont discuté pour savoir ce
mon 92
= CHAPITRE 11 sam
qui était le mieux pour toi et ils ont décidé
que tu continuerais 4 vivre avec ta maman.
Mais comme tu es loin d’elle en ce
moment, je suppose qu’elle est un peu
inquiéte, voila tout.
— Aah...
C’est tout ce que j’arrive a dire.
Tante Pam me serre dans ses bras.
— Encore une chose, ma chérie. Dis-toi
bien que tu as des parents formidables. Ne
te fais pas trop de soucis. C’est dur, je sais,
que ton pére ait été obligé de partir en
France. Ce n’est pas ce qu’il voulait, mais il
n’a pas pu faire autrement 4 cause de son
travail.
Tante Pam pousse un soupir, puis elle
continue :
— Ils ne savent plus trés bien ot ils en
sont. Ce divorce les a bouleversés. Mais
une chose est sfire : ils t’aiment plus que
tout et ils feront tout pour ne pas te faire
souffrir.
Eh bien, c’est plutét raté. Parce que pour
993 omusm CHAPITRE 11 #
souffrir, j’ai déja souffert. Je sais que ma vie
ne sera jamais plus pareille maintenant...
méme si j’arrivais 4 les convaincre de
revivre ensemble.
Quelqu’un frappe a la porte.
Je reconnais tout de suite le toc-toc-toc
de mon pére. Mon pére que je n’ai pas
vu depuis des siécles. J’ai tellement de
choses a lui dire !
= CHAPITRE 12 sae
— Oh papa! Papa! Mon papa!
Ca manque un peu d’inspiration mais
c’est tout ce que je trouve 4 dire pour |’ ins-
tant.
— Ma chérie!
Il me prend dans ses bras.
— Tu m’as tellement manqué, mon amour.
Nous restons serrés l’un contre |’ autre
pendant quelques minutes, puis on s’écarte
pour se regarder.
— Tu as pris quelques centimétres, me
dit-il.
995 oommom CHAPITRE 12
— Et aussi quelques boutons, je réponds
en souriant de toutes mes dents.
—Ma pauvre puce ! Alors comme ¢a, tu as
vraiment eu la varicelle !
A son tour, il me fait un grand sourire.
Tante Pam arrive.
— Bonjour, Phil !
— Pam ! Comment vas-tu ?
Il s’approche d’elle et lui serre la main.
Ca me fait tout dréle. Avant, ils s*embras-
man 968
a CHAPITRE 12 sem
saient. Je suppose que tante Pam et papa
sont un peu en train de divorcer, eux aussi.
— €a va, répond-elle en le regardant d’un
dréle d’air. Oui, ta fille a vraiment eu la
varicelle... Pourquoi ? Tu en doutais ?
Ca alors ! Papa ne croyait pas que j’avais
la varicelle.
J’aurais peut-étre di lui glisser quelques
croaites dans une enveloppe.
Décidément, mes parents se conduisent
bizarrement.
Je n’aime pas ¢a.
— En fait... je n’en étais pas absolument
persuadé.
Papa regarde tante Pam dans les yeux.
— Au début, ga ne m’est pas venu a
Vidée... jusqu’au jour ot quelqu’un de
mon bureau m’a raconté que son ex-femme
prétendait souvent que ses enfants étaient
malades alors qu’ils se portaient 4 mer-
veille.
— Maman ne ferait jamais une chose
pareille !
097 oommm CHAPITRE 12 »
Je le pense sincérement.
— Ecoute, papa, on s’est parlé tous les
jours au téléphone. Pourquoi est-ce que tu
ne m’en as jamais rien dit? Je t’aurais
envoyé des crofites par la poste.
Tante Pam et lui éclatent de rire. Ou plus
exactement : papa éclate de rire et tante
Pam fait :
— Aaargh!
Tout a coup, papa redevient sérieux.
— Je ne sais plus quoi penser... Enfin!
Tout est arrangé, maintenant, tout va bien.
Mais moi, je sais trés bien ce que j’en
pense et il faut absolument que je le lui dise.
Les mains sur les hanches, je me plante en
face de lui:
— Ecoute papa : tante Pam ne ment pas,
maman non plus et toi non plus, d’accord ?
Il hoche la téte.
— Tu n’as pas l’intention de m’emmener
vivre en France avec toi, n’est-ce pas ?
Je le regarde droit dans les yeux.
— Réponds-moi !
man 98a
m CHAPITRE 12 sem
Ila d’abord I’air choqué, puis furieux.
— Bien stir que non!
— Quand je pense que tu ne voulais pas
croire que j’avais la varicelle !
Je ne sais pas si je dois pleurer ou me
mettre en colére.
— C’est joyeux : mon pére ne croit pas
ce que dit ma mére et ma mére n’a pas
confiance en mon pére.
— Phil..., intervient tante Pam d’une voix
douce.
Puis ils échangent un coup d’ceil, l’air de
dire : « Pas devant les enfants. »
— Ne vous regardez pas comme ¢a!
Je tape du pied.
— Je sais que c’est 4 cause de moi. Tout
est de ma faute. Si je n’étais pas née, il n’y
aurait eu aucun probléme, vous n’auriez
méme pas continué 4 vous voir, maman et
toi.
J’ai envie de m’enfuir dans ma chambre
en claquant la porte. L’ennui, c’est que je
n’ai méme pas de chambre 4 moi, ici.
99 oommem CHAPITRE 12 w
Il me reste la solution du canapé-lit. Je
pourrais me glisser a ]’intérieur et tout le
monde s’assiérait sur moi, comme si de rien
n’était.
Finalement, je me laisse tout bétement
tomber sur le canapé.
Cette histoire me rend folle. Qu’est-ce qui
leur prend, 4 mes parents ? Pourquoi est-ce
qu’ils se méfient l’un de l’autre ? S’ils ne se
font plus confiance, comment pourrais-je,
moi, leur faire confiance de mon cété?
Je suis encore petite. Qu’est-ce que je fais
dans tout ga, moi?
Mon pére vient s’asseoir sur le canapé.
Tante Pam va pour s’asseoir prés de moi,
elle aussi, mais finalement, elle préfére
prendre une chaise.
Mon pére me passe la main dans les che-
veux.
— Chérie, ne sois pas triste. Nous n’avons
que quelques jours 4 passer ensemble.
Apres... il faudra que je retourne au travail.
—Je le déteste, ton travail! Pourquoi tu
asm 1008
# CHAPITRE 12 o9m
parles de repartir alors que tu viens juste
d’arriver ? Et d’abord, pourquoi ils t’ont
expédié si loin?
—Ecoute, Lili, nous avons déja discuté de
tout cela, me dit-il en soupirant. J’avais
prévu de me libérer dés ton arrivée mais tu
es tombée malade et ga a chamboulé tout
mon emploi du temps, tu comprends ?
Quant 4 mon départ, tu sais trés bien qu’on
m’a envoyé en France pour une mission
spéciale.
— Mais est-ce que tu étais obligé d’y aller
ou bien est-ce que tu voulais partir 4 cause
de maman ? J’ai besoin de savoir.
2101 eonmem CHAPITRE 12 #
—Il fallait que je parte.
Je l’observe. Il prend le temps de réfléchir
puis il ajoute :
— Sur le coup, ca m’était égal... C’ était
une facon de m’échapper, de ne pas avoir a
affronter une situation qui empirait de jour
en jour.
— Et moi, dans tout ¢a?
— Toi? Si tu savais comme tu me
manques ! Je ne supporte pas d’étre loin de
toi, de ne pas te voir grandir, de ne pas te
parler, de ne pas pouvoir me promener avec
toi, t?emmener au cinéma ou ailleurs... et
méme de rater la féte de 1’école.
— Moi aussi, ca me manque, papa.
Je me mets a pleurer.
— Je m’ennuie d’avant... du temps ov je
n’avais pas a penser a tout ¢a.
Papa me prend dans ses bras et je le serre
trés fort. Au bout d’un moment, on se
regarde et on se fait un sourire.
— Tu sais ce que j’ai dit 4 mon patron?
Quand j’aurai terminé ce travail en France,
won 1020
= CHAPITRE 12 a28
je veux rentrer 4 New York, pour étre plus
pres de toi.
Je saute de joie.
— Tu crois que ce sera possible, Phil ?
demande tante Pam.
Papa soupire.
— Je espére... Sinon, je chercherai autre
chose.
Je décide de tenter le coup :
— Et maman et toi, vous essaierez de
revivre ensemble ?
Papa secoue la téte.
— Non, mon chou. Mais nous pourrons
discuter et sans doute trouver une solution
pour que tu n’aies plus a t’en faire.
—C’est vrai? Promis ?
J’espére que ca marchera. Que les choses
s’arrangeront... méme si tout n’est pas par-
fait.
—C’est promis, déclare mon pére. J’appel-
lerai ta mére dés mon retour a Paris. Pour
V’instant, profitons de ces quelques jours ici.
— D’accord!
«103 mommwa CHAPITRE 12 &
— Bon, alors direction : Madame Tus-
saud* ! dit-il en se levant. Ensuite, nous
irons déjeuner au Hard Rock Cafe.
— Super!
Tante Pam, toujours assise, nous regarde
en souriant. Je jette un coup d’ceil 4 mon
pére. Il me regarde puis se tourne vers ma
tante.
—Ca te dirait de venir avec nous, Pam?
Elle l’interroge du regard, sans répondre.
— Ca me ferait vraiment plaisir, tu sais,
insiste mon pére.
Tante Pam se léve d’un bond en s’écriant :
— Alors... en route la troupe !
Mon pére éclate de rire et fait mine de me
chuchoter 4 l’oreille :
— C’est toujours son expression favorite,
A ce que je vois.
— Eh oui! Je l’entends au moins dix fois
par jour!
—Il faut t’y faire, Lilibulle : il y a des
* Célébre musée de cire, |’équivalent de notre musée Grévin.
usa l045
= CHAPITRE 12 sam
choses qu’on ne pourra jamais changer, me
dit tante Pam.
Dans un grand éclat de rire, papa se
penche pour m’embrasser. C’est vrai, il y a
des choses qui ne changeront jamais. Par-
fois ¢a a du bon, parfois ga n’en a pas.
— En route la troupe!
Nous l’avons dit tous les trois en méme
temps.
Sur ce, nous sortons tous les trois de l’ap-
partement.mem CHAPITRE 13 «
Cher monsieur Cohen,
Excusez-moi de ne pas avoir écrit plus
tot, mais je n’ avais pas grand-chose a vous
dire. Je suis restée coincée dans ma
chambre pendant une semaine a cause de la
varicelle. Je me suis beaucoup ennuyée... et
beaucoup grattée.
Apres, j’ ai fait tellement de choses que je
yous raconterai tout ¢a en revenant.
En attendant, voici un petit apergu.
Je suis allée visiter Madame Tussaud.
C’ est un musée ou on voit plein de manne-
mon 1068
)
|
CHAPITRE 13 am
quins en cire qui ressemblent a des person-
nages connus. Je vous envoie quelques pho-
tos pour vous montrer. Ce que j’ ai préféré,
c’ est la chambre des horreurs. C’ est dégoii-
tant mais c’ est super !
Ensuite, le palais de Buckingham. La
reléve de la garde, ¢a nest pas fait pour les
petits. J’ ai passé mon temps a me faire
bousculer par des touristes armés de camé-
scope.
BRK
Maintenant : le Hard Rock Cafe. Un
endroit plein de bruit, avec des tas de sou-
venirs sur les chanteurs de rock. Je pense
que je suis un peu trop jeune pour appré-
cier. Tous les gens faisaient la queue pour
acheter un T-shirt, mais pas moi. J’ ai pré-
Sféré m asseoir tranquillement et j’ ai com-
mandé un thé glacé... que je me suis ren-
versé sur les genoux. Du coup, c’ est moi qui
me Suis retrouvée glacée !
ae
= 107 memmsm CHAPITRE 13 @
Nous avons aussi fait un tour en bateau
sur la Tamise pour aller jusqu’ au zoo. J’ ai
beaucoup aimé les grands singes (je
ne parle pas de Jimmy Russell et Bobby
Clifford).
okoKK
Vous savez quoi? Il y a des MacDonald
partout, a Londres. Mais ici, ils ne parlent
pas tout a@ fait comme nous: ils disent
« chips » au lieu de frites. Bizarre, non ?
C’est la premiére fois que j’ écris une
lettre aussi longue ! Comme je commence a
avoir mal a la main, je vais vous quitter
at in
i i
# CHAPITRE 13 sem
(surtout que j’ai encore deux cartes a
écrire).
A bientét al’ école,
Votre éléve préférée,
LL Gofpte
P.- S.: J espére que vous aimez ma nou-
velle signature. C’ est pour quand je serai
vedette de cinéma.
= 109 momusm CHAPITRE 13 »
Ma chére maman,
Moi aussi, je m’ ennuie beaucoup de toi.
J’ espere que tu t’es bien amusée, I’ autre
soir, avec Max Machin. Mais attention : il
ne faudrait pas que ¢a devienne trop
sérieux. (J’espére que tu ne m’ en voudras
pas de dire ¢a, mais je trouve que papa et
toi, vous devriez prendre des legons de
mariage si vous vous décidez a €pouser
quelqu’un d’ autre un jour... Mais je ne dis
Pas Ga que pour vous. A mon avis, ily a
beaucoup de parents qui devraient suivre
des cours de mariage... et aussi des cours
de divorce !)
Je t embrasse trés, trés fort.
Ta fille qui aime ses deux parents,
Lt Sofpty
Cher Justin,
Ne t’en fais pas, je n'ai pas grignoté mes
crotites.