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1M Dissertation

DOSSIER 5 : Le paragraphe argumentatif

Vous avez soigneusement analysé l’énoncé, reformulé la thèse, choisi une démarche, établi
une problématique, rédigé un plan détaillé… vous êtes maintenant prêts à rédiger votre
dissertation.
Après une introduction qui ne manquera pas de donner à votre lecteur l’envie de lire la suite,
il est temps de vous attaquer au développement, composé de paragraphes argumentatifs
soigneusement pensés.

Un paragraphe argumentatif commence toujours par un connecteur / organisateur. Il


présente une idée principale (IP), elle-même développée par des arguments et des
exemples. L’argument (A) est une affirmation qui démontre la validité de l’idée principale.
L’exemple (EX) est une illustration qui étaye de manière concrète l’idée principale et/ou les
arguments. Le paragraphe se termine par une conclusion locale (CL).

Si les éléments constituant un paragraphe argumentatif sont les mêmes, leur ordre
d’apparition peut varier, selon que le paragraphe propose un raisonnement déductif ou
inductif :

Raisonnement déductif Raisonnement inductif


• Idée-prise de position introductive • Exemple illustrant l’idée-prise de position
• Développement de l’idée-prise de position • Développement de l’exemple menant à
(arguments et/ou exemples) l’idée-prise de position (arguments)
• Conclusion locale • Idée-prise de position – conclusion locale

Variante de type déductif :

Exemple :

(Org) Pour commencer, (IP) L’idéal transcende un être. (A) On trouve de multiples illustrations
de cette idée dans la littérature. (EX) Katov, par exemple (le héros de La Condition humaine de
Malraux), jeune révolutionnaire chinois capturé par les troupes nationalistes, est condamné à
être brûlé vif. Dans sa prison, deux jeunes captifs destinés au même supplice sont terrorisés
par la mise à mort qui les attend. L’idéal de fraternité humaine qui anime Katov lui permet alors
de vaincre sa propre peur. Il donne à ses compagnons les deux capsules de poison qu’il gardait
pour lui, et affronte seul le supplice. (CL) Ainsi l’idéal grandit celui qu’il inspire, en le poussant
à se dépasser.
(D’après G. Niquet, Du paragraphe à l’essai, 1989)

Variante de type inductif1 :

Exemple :

(EX) Avant d’être la Paix, l’olivier est huile. Prêtez attention à ce que l’on ne croque pas l’olive
sur l’arbre – c’est infect. Il faut l’apprêter, la mariner en saumure, la confire, ou la presser. De
même, le vin ne coule pas de la grappe, mais de la cuve, après soins et fermentation. (A) Dans
l’un et l’autre cas, l’ingéniosité humaine est requise pour exprimer le suc et la saveur du produit
végétal. (IP-CL) Placé sous le double signe de l’olivier et de la vigne, l’Attique2 dit une ambition
qui est celle de l’art, la tekhnê grecque, savoir-faire humaniste, comme l’oublient les adorateurs
stupides de la nature brute. Oui, à l’orée de notre histoire, dans l’environnement clinquant des
âges métalliques, se profile une civilisation qui n’est ni nomade, ni pastorale, ni guerrière, ni
même agricole au sens ordinaire du terme, mais technicienne.
(J.Gaillard, Beau comme l’antique, 1993)

v Veillez à baliser votre développement de connecteurs argumentatifs qui en montreront

1
Plus risquée, à mon humble avis…
2
La région d’Athènes (l’Athènes de l’Antiquité, centre intellectuel et politique de la civilisation grecque
classique)
1
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la logique interne.

Exemple :

(IP) Être heureux dépend en grande partie de soi ; (A1) si l’on a confiance en soi, si l’on se sent
fort et que l’on sait ce que l’on veut, les désirs se réalisent plus facilement et la quête du bonheur
se trouve simplifiée. (A2) En outre (amplification, adjonction), si l’on est en accord avec soi-même,
si l’on a conscience de ses qualités comme de ses défauts et si l’on sait rester modeste, il est
alors plus facile de se sentir bien dans sa peau, ouvert aux autres et, par conséquent
(conséquence), apprécié de ses proches, ce qui est un facteur non négligeable du bonheur. (A3)
En revanche (opposition), une personne qui n’a pas confiance en elle et se croit mal aimée se
sentira mal dans sa peau et risquera de se referme sur elle-même, ce qui peut nuire à son
équilibre et à sa joie de vivre, voire même (adjonction, amplification) la rendre franchement
malheureuse. (EX) Par exemple (introduction d’un exemple), si un homme cherche un emploi mais
n’est pas vraiment entreprenant, s’il se montre timide et se sent en position d’infériorité vis-à-
vis de ses semblables, il aura beaucoup de difficultés à parvenir à ses fins. A l’opposé (opposition),
s’il se montre optimiste et convaincu de ses qualités, ses employeurs le remarqueront et ses
chances d’embauche s’en trouveront augmentées, ce qui bien sûr le rendra heureux. (CL) Ainsi
(conclusion), nous constatons que le fait de posséder une certaine force de caractère peut se
révéler d’une importance décisive dans notre quête du bonheur.

v Ne négligez pas la dimension rhétorique3 !

La rédaction d’un paragraphe fait appel à une dimension rhétorique qu’il ne faut pas sous-
estimer. L’originalité de l’« attaque » du paragraphe, de son ouverture mais aussi de sa
clôture, la variété des structures interne et l’habileté des transitions, la force persuasive
des arguments, la pertinence des illustrations comme des images utilisées, enfin l’unité de
style et d’esprit du paragraphe participeront largement de sa capacité à convaincre.

On pourra ainsi user consciemment d’effets rhétoriques afin de frapper le lecteur et de


donner un caractère plus personnel, plus original ou plus percutant à l’argumentation.

N’hésitez pas à recourir à certaines figures de style comme l’anaphore, le parallélisme,


l’antithèse, la comparaison, …, ou encore aux questions rhétoriques4.

Exemple :

(EX1) Sait-on qu’un journal télévisé de vingt minutes tiendrait dans trois colonnes d’un
quotidien, et peut-on comprendre ou même connaître son époque en ne lisant qu’une demi-
page de journal ? (EX2) Sait-on que l’on peut lire vingt-cinq mille mots à l’heure mais qu’on peut
en entendre neuf mille ? (A) On reçoit plus d’informations en lisant qu’en écoutant. (CL) Si
paradoxal que cela puisse paraître, un homme pressé et qui veut s’informer a finalement plus
d’intérêt à lire qu’à entendre.
(J.-C. Meyer, Apprendre à écrire le français au collège, 1989)

=> Dans ce cas, on a recouru à l’anaphore (Sait-on) pour relier rhétoriquement les deux
exemples. L’emploi de questions rhétoriques contribue par ailleurs à la vivacité du paragraphe.

Il est aussi possible d’employer la narration, donnant à l’exemple illustrant l’idée principale un caractère
vivant et séduisant :

Exemple :

(EX) Considérons ce garçon de café. Il a le geste vif et appuyé, un peu trop précis, un peu trop
rapide, il vient vers les consommateurs d’un pas un peu trop vif, il s’incline avec un peu trop

3
Science, art du discours, ou comment bien dire / écrire les choses…
4
Interrogation qui ne requiert pas de réponse, car elle est suggérée dans l’énoncé ou à l’avance connue
par la personne qui la pose. La question a alors la plupart du temps valeur d’affirmation en dépit de sa
tournure souvent négative.

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d’empressement, sa voix, ses yeux, expriment un intérêt un peu trop plein de sollicitude pour la
commande du client, enfin le voilà qui revient, en essayant d’imiter dans sa démarche la rigueur
inflexible d’on ne sait quel automate, tout en portant son plateau avec une sorte de témérité de
funambule, en le mettant dans un équilibre perpétuellement instable et perpétuellement rompu,
qu’il rétablit perpétuellement d’un mouvement léger du bras et de la main. (A) Toute sa conduite
nous semble un jeu. (…) Mais à quoi donc joue-t-il ? il ne faut pas l’observer longtemps pour
s’en rendre compte : il joue à être un garçon de café. Il n’y a rien là qui puisse nous surprendre :
(IP-CL) le jeu est une sorte de repérage et d’investigation. L’enfant joue avec son corps pour
l’explorer, pour en dresser l’inventaire ; le garçon de café joue avec sa condition [de garçon de
café] pour la réaliser.
(J.-P. Sartre, L’Etre et le Néant, 1943)

v Les écueils à éviter

Vous éviterez :
• Les paragraphes trop peu nombreux parce que trop longs (le paragraphe forme un bloc
compact dont on ne sait plus l’idée principale) ;
• Les paragraphes trop nombreux parce que trop courts (les alinéas ne sont formés que d’une
ou deux phrases et l’on ne voit plus le mouvement général du texte, trop émietté) ;
• Les paragraphes graphiques mais non logiques pour lesquels le passage à la ligne n’est
qu’arbitraire, c’est-à-dire les pseudo-paragraphes qui, mal ou pas du tout structurés, ne
constituent pas vraiment une unité sémantique, ne renvoyant pas clairement à une idée
principale ou à un thème central ;
• La reproduction systématique du même mode de structure, qui pourrait engendrer à la lecture
un sentiment de monotonie ;
• Les répétitions d’idées, ou redondances, à l’intérieur d’un même paragraphe ou d’un
paragraphe à l’autre, qu’on peut éviter en retravaillant le texte et en le condensant ;
• Le manque d’exemples concrets (ce qui rend l’argumentation trop abstraite) ;
• Le manque d’arguments ou d’idées (le développement ne consistant alors qu’en une
juxtaposition d’exemples) ;
• Le piège du « catalogue », qui consiste à ajouter les uns aux autres une suite d’arguments (et
d’exemples) dont l’articulation logique est faible ;
• La dérive (ou l’éloignement progressive) par rapport à l’idée principale ou au thème central du
paragraphe ;
• L’insertion dans le paragraphe d’une citation d’auteur hors sujet, c’est-à-dire n’ayant rien à
voir avec son contenu ;
• La juxtaposition de paragraphes non articulés entre eux.

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