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MILES DAVIS (1926-1991) TUTU (1986) I. Qu’est-ce que le « jazz » ? Quand on lui posait cette question, Louis Armstrong répondait : « Si tu poses la question, alors tu ne le sauras jamais ». Difficile a définir, le jazz se reconnait pourtant a la premiére écoute, mais recouvre des réalités musicales tres différentes. Ecoutes Toutes ces musiques appartiennent a la grande famille du jazz, mais quels points communs ont- elles? = Original dixieland jazz band - Summertime (E. Fitzgerald & L. Armstrong) ~ Shlosre (Avishai Cohen) Elles en ont peu, mais il y a néanmoins trois domaines qui les réunissent : le rythme, Vimprovisation, la sonorité. 1. Le rythme : « Le swing », Le jazz, « ga swingue » dit-on, mais qu’est-ce que le swing ? Le swing est une sorte de balancement rythmique, propre au jazz, mais qui est, lui aussi, difficile & définir. Duke Ellington disait : « Aucun texte musical n’est du swing. Vous ne pouvez pas écrire du swing parce que le swing, c’est ce qui émeut 'auditoire et il n'y a pas de swing tant que Ia note n’a pas retenti. Le swing est un fluide et bien qu’un orchestre ait joué un morceau quatorze fois, il se peut qu’il ne swingue que la quinziéme fois. » Ecoute : It Don't Mean a Thing (If It Ain't Got That Swing), Duke Ellington Le swing est donc & chercher du cété de Vinterprétation et non sur la partition. On trouve souvent sur les partitions jazz indication ¢¢=« ¢) pour signifier a Vinterpréte quill va falloir « swinguer ». En réalité, le swing n’est réductible ni au binaire, ni au ternaire. Crest une liberté rythmique, un phrasé, qui crée un rebond, un balancement, une respiration différente, qui ne se rencontre dans aucune autre musique. Ecoute : Mood Indigo (Duke Ellington), binaire ou ternaire ? Le swing n’est donc ni binaire, ni ternaire, c’est une maniére de jouer, d’accentuer, légérement en décalé, qui vient de la confrontation entre les rythmes africains et la musique occidentale. Mais les jazzmen qui ont étudié de prés les rythmes africains sont formels : les rythmes africains ne swinguent pas. Le swing n’est donc pas une simple adaptation de ces rythmes a une autre civilisation, c’est une renaissance, une recréation, propre au jazz. 2. Limprovisation. Bien que certains morceaux de jazz soient totalement écrits (ils sont rares), le jazz se caractérise par un recours trés fréquent a l’improvisation. La aussi, improvisation vient en grande partie du caractére oral (sans partition) des musiques africaines. Mais contrairement au swing, Vimprovisation n’est pas propre au jazz, on la rencontre dans de nombreuses autres cultures musicales. C’est son recours quasi systématique qui fait I’originalité du jazz. improvisation se fait tres rarement a partir de rien. Un jazzman improvise toujours @ partir d’un théme, et donc sur la suite d’accords qui le sous-tend (on parle de grille harmonique). It Don’t Mean a Thing (mélodie + accords) : Grille harmonique : ai | el | | coni| CC | Cera | we |r Sai | ee | [on | Ce [ee | ee | Le theme est exposé, s'ensuit une série d’improvisations sur la grille du theme, le theme et réexposé pour finir. Cela donne donc la forme : Theme Improvisations Theme (on parle de chorus) Cette forme peut-étre rapprochée de la forme Sonate que l'on rencontre dans nombre de mouvements de symphonies a I'époque classique et romantiqu Theme — Développement - Theme improvisation dans le jazz est donc mélodique et/ou harmonique suivant le cas. Ecoute : When the Saints, Louis Armstrong, 1959. Le theme est varié das exposition. Someday my Prince will Come, Miles Davis, 1961. Le théme est ici plutét un prétexte a improvisations tant il est vite « évacué ». Mais sa grille est inchangée tout du long. Limprovisation pourrait donc se définir comme une variation/développement non écrite et joué « dans l'instant » d’un theme donné et de sa grille harmonique. Mais méme si les libertés peuvent étre tras importantes, et le théme, par moments, méconnaissable, les jazzmen ne le délaisseront jamais (sauf dans le Free Jazz). Le theme sert de support, de point de départ et d’arriver, d’étincelle a ’inspiration du musicien. Les thémes sont souvent des refrains de chansons connues ou a la mode (beaucoup de comédies musicales), regroupés par les jazzmen sous le nom de Standards. Ecoute : Autumn Leaves, Keith Jarret. Et a chaque époque ses Standards : Ecoutes : Smell Like Teen Spirit, Nirvana Smell Like Teen Spirit, The Bad Plus. 3. La sonorité. Aprés le rythme et l'improvisation, le jaz se caractérise aussi par sa spécificité au niveau du timbre. Au contraire d’un musicien « classique », qui se doit de s'effacer derriére son instrument pour servir au mieux le compositeur qu'il doit interpréter (recherche d’un son pur), le jazzman marque immédiatement une composition de son empreinte, de sa sonorité propre. Crest ce qui fait que les musiciens jazz sont immédiatement reconnaissables, et on le verra, c'est particuliérement vrai dans le cas de Miles Davis. Quelques sonorités/personnalités de la trompette : Chet Baker Miles Davis ll en va de-méme des chanteurs et chanteuses, immédiatement reconnaissables par leurs timbres de voix. ! , . En plus de cette recherche d’un son personnel, les jazzmen ne vont pas hésiter 8 volontairement « salir » le son, a utiliser toutes les techniques permettant de l'enrichir au niveau du timbre (certaines techniques utilisées simultanément ou par la suite en musique contemporaine). Ecoutes = Lady Sings the Blues, Billie Holiday. It Don’t Mean a Thing, Ella Fitzgerald Ecoute : Solo de James Carter. Bien que le jazz soit d'une grande diversité, on peut donc néanmoins lui attribuer trois caractéristiques : Le travail le rythme La liberté mélodique La personnalisation du son Trois caractéristiques trés présentes chez Miles Davi Il. Petite histoire du jazz. 1. Le jazz avant le jazz. En 1619, les premiers Noirs foulent le sol américain, débarqués d’un navire hollandais, pour travailler dans les plantations de Virginie aux cétés de serviteurs blancs venus d'Europe. C’est le début de la traite négriére. Au moment de I'indépendance des Etats-Unis, en 1776, on estime le nombre de Noirs a 750 000, 90 % se trouvant dans les colonies du Sud. L’abolition de I’esclavage date de 1865, mais continuera, de fait, notamment dans le Sud. Ecoute : Oh Freedom, sur des images d’archives. Les esclaves n'ont comme réconfort que I'Eglise, et c'est ici que va prendre forme une des bases du jazz. a) Le negro-spiritual. Chant religieux de la communauté noire-américaine, c’est un chant d’espoir, qui se transformera par la suite en Gospel (version scénique et moins solennel). La plupart des chanteuses de jazz ont débuté dans les églises. Ecoute : God is so Good, Mahalia Jackson. b) Le Blues. Le Blues ne nait pas, lui, dans les églises, mais dans les champs de coton ou sur les chantiers de chemin de fers. Les esclaves chantent pour se donner du courage, c'est les Worksong. Ecoute : Long John (Old song by a chain gang). On entend déja dans ce chant trois caractéristiques essentielles du Blues. - utilisation de la gamme pentatonique (5 notes) oy pg de ~ la présence d'une tierce « basse » (la Blue Note), dont Miles Davis ferra un usage récurent : hésitation mib/mi en do majeur IA OL. hee a8 - la présence de questions/réponses, de dialogues, que l'on appelle dans les musiques afro- américaines Call and Response. Les Worksong vont ensuite évoluer en un style musical indépendant, le Blues, avec des caractéristiques musicales trés proches. Les textes du Blues sont liés aux difficultés de la vie de tous les jours et I'espoir d’une vie meilleure. Ecoute : Crossroad, Robert Johnson, 1936. c) Le Ragtime. Contrairement au negro-spiritual et au blues, le ragtime n'est pas destiné au réconfort d’une communauté et est I'ceuvre de musiciens professionnels, en général pianistes, ayant des rudiments de théorie musicale (les ragtimes sont écrits). Fortement syncopé, le ragtime utilise déja les éléments rythmiques que nous retrouverons dans le jazz : break, temps faibles accentués ou décalés, cassure dans le phrasé Ecoute : The Entertainer, Scott Joplin (1868-1917) Le ragtime est le plus juste équilibre entre lapport africain (le rythme) et apport européen (harmonie et mélodie). Il restait a faire la synthase entre le ragtime et la liberté d’improvisation du Blues et du negro-spiritual pour faire naitre le jazz. Negro-spiritual, Worksong, Blues, Ragtime, et on le verra, musique de fanfares européennes, le jazz est un métissage das les origines. Et c'est & la Nouvelle-Orléans que tout a commencer. 2. Le jaz « New-Orleans » ou Jazz-Hot (1917-1929). Cest a la Nouvelle Orléans que le jazz prend véritablement sa source, et particuliérement sur la place nommée Congo Square. C’était un lieu ol les esclaves se réunissaient chaque dimanche pour faire sonner les tambours, pour danser, pour oublier la dure semaine passée. Le banjo (venu d'Afrique) va vite s'imposer comme soutient harmonique, puis, sous I'influence des fanfares européennes, les musiciens Afro-Américains vont adapter les rythmes africains, les harmonies du ragtime, improvisation du Blues, 8 de petites formations comprenant : ~ une section rythmique : banjo et/ou piano, batterie, contrebasse par la suite - une section mélodique : trompette, clarinette, saxophone, trombone Ecoute : The Story of Jazz, documentaire. On situe généralement la naissance du jazz en 1917, date a laquelle Original Dixieland Jazz Band enregistre le premier disque de jazz. Cet orchestre, de musiciens blancs, fait beaucoup pour diffuser cette nouvelle musique, mais son style est jugé médiocre par les musiciens afro- américains. L’ensemble sera trés vite détréner par de véritables formations jazz, avec notamment le King Oliver's Creole Jazz Band, qui enregistre en 1923 le premier disque de jazz de musiciens noirs. En 1922, King Oliver engage dans son orchestre un jeune cornettiste du nom de Louis Armstrong. Le King Oliver's Creole Jazz Band, avec king Oliver (assis) et Louis Armstrong (Be en partant de la droite) Ecoute : Dipper Mouth Blues, King Oliver's Creole Jazz Band (1923) Les caractéristiques du jazz (swing, improvisation, sonorité) sont déja bien implantées. Le jazz va sortir de la Nouvelle Orléans pour gagner l'ensemble du pays. Des solistes vont émerger, la forme théme-solos-théme va s'imposer. C’est la grande époque du jazz « classique ». 3. Le middle-jazz ou jazz « swing » (1930-1940). Le jazz conquiert un public de plus en plus nombreux, les formations s'agrandissent (c/est l’époque des premiers Big Bands), de grands noms font leur apparition, les musiciens se professionnalisent. Crest aussi I’époque du New-Deal de Franklin Roosevelt, qui tente de redynamiser le pays apres la crise de 1929. Le jazz accompagne cet essor et les musiciens en profite financiérement. Ce jazz des années trente se voudra une musique de la joie, de innocence, de I’exubérance. Ecoutes : Deux grands Big Bands : Take the « A» Train, Duke Ellington (1939) Swingin’ the Blues, Count Basie (1941) Le soliste s’autonomise : Body and Soul, Coleman Hawkins (1939) Les musiciens blancs (de formation classique) se mettent au jazz, et le public suit : Sing, sing, sing, Benny Goodman Orchestra 4. Le be-bop (1940-1950). Le jazz est bien établi, les « stars » du middle-jazz ont profité de I'essor du pays et de Vengouement pour cette musique, mais la jeune génération n'y trouve pas son compte. Financigrement, ce sont les blancs qui ont le mieux tiré leur épingle du jeu, le racisme est encore trés présent au nord comme au sud, et la guerre éclate (ils savent qu’ils vont devoir y aller ... comme Américains). Les jeunes sont désenchantés et trouvent ce jazz trop lisse, trop consensuel, trop a la botte des blancs. Ils veulent un jazz qui puise plus dans les racines noires, un jazz plus revendicatif, d'une certaine maniére, plus agressif. Ce sera le « Be-bop ». Le be-bop voit le jour dans un cabaret New-Yorkais, le Minton’s Playhouse. De jeunes musiciens viennent y faire le boeuf, jouant une musique « étrange » pour les uns, « fascinante » pour d'autres, en tout cas une musique qui n’est plus le support de la danse. Parmi ces musiciens Charlie Parker et Dizzy Gillespie. Ecoutes : Hot House, Charlie Parker et Dizzy Gillespie (1951) ‘Round About Midnight, Thelonious Monk. Méme si I’'accompagnement reste swing, les phrasés sont plus hachés, les mélodies plus dissonantes, I'harmonie plus complexe. Ce jazz dérange et marque une rupture dans I’histoire du jazz. 5. Le jazz « cool » (1950-1960). En 1949, une groupe de musiciens, noirs et blancs mélés, enregistre un disque dont la tonalité générale est celle de la désespérance sans révolte. L'initiative a été prise par un jeune trompettiste de 23 ans, qui a était pendant quatre ans aux cétés de C. Parker. II s'appelle Miles Davis et son disque a pour titre Birth of the Cool. y ra j , i = « ca Ecoute : Jeru, Miles Davis Nonet (Birth of the Cool, 1949) Le jazz cool pourrait se définir comme une réhabilitation de la mélodie et du raffinement aprés les excés du be-bop. La musique est plus harmonieuse, plus fluide, plus écrite. Le jazz cool trouvera particuliérement écho auprés des jeunes musiciens blancs cultivés de la céte Ouest. = Ecoute : Take Five, Dave Brubeck Quartet (1959) Le jaz cool donnera lieu a de nouveaux métissages : Desafinado, Stan Getz (1962) 6. Le hard-bop et le free-jazz (1960-1970). Dans le jazz comme dans les arts en général, au niveau social et politique, les années soixante vont étre, aux Etats-Unis, marqué par V’agitation, la contestation, et par un changement profond des mentalités. Discours de Martin Luther King (« I have a dream ») en 1963, guerre du Viét Nam, la jeunesse noire-américaine se sent flouée. Nombre de jazzmen ne se reconnaissent pas dans le courant « cool » essentiellement dominé par les blancs et trop policé a leurs yeux. lls souhaitent revenir aux racines du jazz, le Blues, 4 l'expression brute du be-bop. Le jazz aussi doit étre contestataire, ce sera le hard-bop. Ecoutes : Moanin’, Art Blakey & The Jazz Messengers (1958), influence trés marqué du Blues. Giant Steps, John Coltrane (1960), le be-bop 4 son paroxysme. Les musiciens prennent de plus en plus de libertés vis-a théme et de la grille harmonique : Invisible, Ornette Coleman (1959) -vis du Pour ensuite s’en libérer totalement, ce sera le free-jazz : Cecil Taylor, répétition (1968) 7. Le jazz-fusion (1970-1980). Aprés I'éclatement musical que représentait le free-jazz, il était nécessaire aux jazzmen de reconstruire un langage sur des bases neuves. lls vont se tourner, notamment vers le rock (qui prit un essor formidable durant les années 60), vers le funk et les musiques électroniques. Miles Davis va jouer une part tres importante dans ce renouveau. Ecoutes : The Gumbo Variations, Frank Zappa (1969) On The Corner, Miles Davis (1972) Chameleon, Herbie Hancock (Head Hunters, 1973) Birdland, Weather Report (1978) 8. A partir des années 80... Dans les années 1980, le jazz connait un net recul de popularité. Pour certains, il s'essouffle, pour d'autres, il est mort. On lui préfére la Pop qui connait un essor formidable. Trois voies principales s'offrent alors aux jazzmen: le retour aux sources, la poursuite expérimentale d’un métissage encore plus marqué et le postmodernisme. - Retour au source, le Revival. II s'agit pour de jeunes musiciens de revenir aux fondamentaux swing du jaz et de délaisser toutes les « extravagances » du jazz a partir des années 60. Ecoute : Portrait of Louis Armstrong, Wynton Marsalis, 2002 - Le métissage, toujours plus loin ... Jazz et rock : Signal Path, Tribal Tech (1991) Jazz et funk : You're Under Arrest, Miles Davis (1985) Jazz et culture Hip-Hop : Rockit, Herbie Hancock (1983) Jazz et World Music : My People, Joe Zawinul Syndicate (1996) Jazz et Rap : Jazzmatazz, Guru (1993) Jazz et musique electro : Rose rouge, St Germain (2001) - La postmodernité, le jazz aprés le jazz. Des styles teintés de jazz, mais qui puisent a de nombreuses autres sources d’inspiration. anes ‘Music of the mind, Jamiroquai (1993) Listen, Urban Species (1996) Ill. Miles Davis (1926-1991) S'il ne fallait retenir qu’une idée de la pensée musicale de Miles Davis, ce serait sans doute l'une ou l'autre de ces deux citations du trompettiste : « La véritable musique est le silence, et toutes les notes ne font qu’encadrer ce silence » ou « Pourquoi jouer tant de notes alors qu'il suffit de jouer les plus belles ? ». Le style de Miles Davis ne se caractérise pas, en effet, par sa virtuosité (comme celui d’un Dizzy Gillespie par exemple), mais par deux aspects fondamentaux de son jeu : Sa sonorité Son économie de moyen ECOUTE : Miles Davis a propos de la spécificité de son son Miles Davis vu par un critique de jazz : ‘Jamais aucun musicien de jazz ne joua d'un instrument de facon plus intime, et plus proche de Mémotivité personnelle de Vauditeur. Ses notes changent de couleur comme les joyaux sous les variations de la lumiére, sa sonorité est si poignante quéelle ne peut appartenir qu’ lui, et son sens du swing se fonde sur une compréhension instinctive et juste du silence. Quand i! racontait une histoire dans un solo, il le faisait avec une telle prescience de sa forme finale, que tout devenait évident. Mais Miles Davis ne se contenta pas d'étre un exceptionnel trompettste, il fut également un grand innovateur et perfectionniste du jazz. Véritable géant de la musique du 20! siécl, i! influenga profondément le devenir du jazz & plusieurs reprise au cours de sa longue carriére. » 1. Jeunesse (1926-1944) Né a St Louis (Illinois) dans un milieu familial aisé, cultivé et musicien — sa grand-mére maternelle est professeur de musique, sa mére joue du piano et du violon, son pere est mélomane et écoute beaucoup de jazz 8 la radio — le petit Miles apprécie tout autant le sport que la musique. II recoit sa premigre trompette a I'age de 10 ans et apprend auprés d’Elwood Buchanan, un ancien jazzman professionnel. Ce dernier pose la plupart des jalons de son futur style de jeu : sobriété, douceur, absence de vibrato (« le St Louis sound », opposé de la Nouvelle-Orléans). Miles s'intéresse également & la musique classique puisqu’il suit les cours du premier trompettiste de l’orchestre symphonique de sa ville, Joseph Gustat, une référence, Celui-ci le pousse a utiliser un type d’embouchure auquel il sera fidéle toute sa vie. Les progrés sont tels qu’il commence a jouer en tant que professionnel dés 1942 (16 ans), tout en poursuivant ses études secondaires. Tres demandg, il devient vite une petite célébrité locale. mbouchure Heim 2 ou este] ruth wtlieee. par les cormetstes, cee fembouchire produit un son chad te, is 2. Période Be-bop (1944-1948) En 1944, aprés avoir obtenu son dipléme (équivalent du baccalauréat), Miles hésite : suivre les traces de son pére dans la chirurgie dentaire ou bien devenir musicien. Alors qu'il réfléchit, l'orchestre de Billy Eckstine, qui comprend dans ses rangs le trompettiste Dizzy Gillespie et celui que l'on surnomme « Bird », le saxophoniste Charlie Parker — références absolues dans le domaine du Be-Bop — passe a St Louis. Le jour du concert, on demande a Miles de remplacer un trompettiste absent. Trés impressionné par ce qu'il entend ce jour-la, le jeune homme décide de continuer dans cette voie et d’aller 4 New York suivre le groupe. Pour rassurer son pére, il s‘inscrit a la prestigieuse Julliard School qu'il fréquentera de maniére assez distante et va alterner études et prestations dans les clubs de jazz cotés. En 1945, il intégre le quintet de Charlie Parker (en remplacement de Dizzy Gillespie) jusqu’a sa dissolution en 1947, il est alors définitivement reconnu comme l'un des meilleurs trompettistes de son temps et compose ses premiers titres. C'est a cette période que la fréquentation de junkies notoires, avec Parker au premier chef, le rend toxicomane pendant de nombreuses années. ECOUTE : Donna Lee, 1947, premiere composition de Miles Davis (malgré un copyright attribué a C. Parker). Tres court solo de Miles Davis, car c'est Parker qui dirige la séance d'enregistrement. Le solo de Miles est encore trés influencé par ses paires (Parker et Gillespie). ECOUTE : Milestone, 1948. ici, cest Miles qui dirige la séance, et les choses slinverse. On constate que Miles commence a s'affranchir du style virtuose de D. Gillespie et commence a trouver un son plus personnel, notamment avec l'utilisation d'une sourdine, 3. Période Cool (1948-1949) En collaboration avec les arrangeurs Gerry Mulligan et Gil Evans, Miles Davis dirige a partir de 1948, une formation de neuf musiciens (nonet) a instrumentation inhabituelle (tp, tb, cor, tuba, sax alto et baryton, piano, basse, bat.) qui laisse envisager un au-dela du Be-bop. Postérieurement réunies sous le titre de Birth of the Cool, ces pieces qui font la part belle aux orchestrations ouvrent la voie au Jazz cool, alternative feutrée au frénétique Be-bop. Peu aprés, invité au Festival international de jaz de Paris, Miles vient séjourner en France, autre pays du Jazz, et découvre le bouillonnement intellectuel et artistique de Saint-Germain- des-Prés, Miles Davis mesure, en fréquentant l'intelligentsia du quartier, combien sa musique (et sa couleur de peau) sont considérées d’une maniére tout autre en Europe qu’aux Etats-Unis, Il entretient alors une relation avec Juliette Gréco. IIs se séparent aprés quelques mois, Miles voulant éviter 4 la Francaise de devenir 'épouse d’un Noir aux Etats-Unis, pays encore a époque, sinon raciste, du moins encore ségrégationniste. ‘Miles Davis ee Kon (9 ao), Gry Lenonet enerregatiment Matigan su Bayt) Le commentaire apporté par Boris Vian dans le n°5 de Jazz News qui concerne la prestation de Miles Davis a la Salle Pleyel en mai 1949 illustre parfaitement le style cool mais aussi la personnalité du trompettiste : « D’abord, une relaxation absolument parfaite. Je crois qu'il est impossible de jouer plus détendu que Davis. Ca se proméne comme un sentier fleuri au mois de mai [...]. C’est d’une aisance et d'un abandon réellement apaisants. En second lieu, un phrasé ahurissant. Un phrasé sinueux, coupé de repos, qui ne vous Surprennent que pour vous détendre plus (physiquement) et vous exciter du méme coup (intellectuellement) ; Miles repart de note en note, logique, neuf, précis, et il arrive & vous emmener vraiment ailleurs avec des matériaux lisses et pleins. [..] En troisiéme lieu, une sonorité curieuse, assez nue et dépouillée, presque sans vibrato, absolument calme, mais aussi attirante Enfin, un sens de la structure rythmique plutét sensationnel.[...] ore an I n’a Vair de rien, comme ¢a, il reste presque toujours dans un ‘ " ‘ se 4] BIRTHOF THE: registre moyen, mais quand il a envie de faire l’acrobate, il peut aussi... Il grimpe bien haut et il tricote bien vite... D’ailleurs (ceci est une parenthése) il vaut mieux juger un soliste en général sur un tempo moyen ou lent, parce que c’est beaucoup plus difficile de rester intéressant et fascinant. » ECOUTES : Jeru et Boplicity, extraits de l'album Birth of the Cool (1949) 4, Période Hard-bop (1949-1958) De retour aux Etats-Unis, Miles Davis continue d’enregistrer avec de grands noms du jazz : Charlie Parker, Sarah Vaughan, Billie Holiday, Sonny Rollins, mais plonge sévérement dans la toxicomanie, II n’émerge qu’en 1954, avec l'aide de son pére, et réunit un nouveau sextet qui compte notamment le batteur Kenny Clarke et le pianiste Horace Silver. Ensemble, ils posent les bases d'un nouveau style, qui deviendra aprés le Be-bop et le Cool la « troisi@me vague » du Jazz moderne : le Hard Bop. Retour a I’énergie du be-bop, influence marquée du Blues, le Hard-bop bénéficiera aussi de l'apparition du disque 33 tours, qui permettra des morceaux beaucoup plus longs et développés. ECOUTE : Walkin’ (Album Walkin’, 1954). Durée : 13°22 - Premier Quintet (1955-1958) En 1955, Miles Davis monte son « 1er grand quintette » avec la participation du saxophoniste John Coltrane. Le groupe sort plusieurs albums considérés comme des chefs-d’ceuvre. La méme année, il improvise 50 minutes pour la musique du film de Louis Malle Ascenseur pour I’échafaud. ECOUTES : ‘Round Midnight (1957), Ascenseur pour I’échafaud (1957) ‘Cest 8 cotte époque que Miles Davis va utiliser de plus en plus fréquemment Ia sourdine Harmon afin f obtenir un son plus précis, plus inci. La sourdine Harmon est une sourdine Wah be Pou ‘wah dont le tube central est ote ey 5. Période « modale » (1958-1959) En 1958, Miles Davis intagre le saxophoniste Cannonball Adderley & son groupe qui se mute en sextet. album Milestones de cette méme année contient les prémices de la nouvelle orientation musicale du leader : improviser en se libérant du carcan habituel des standards, en jouant sur des séquences d’accords n’ayant plus forcement de rapports fonctionnels entre eux. Le coup d’essai de 1958 se transforme en coup de maitre l'année suivante avec la sortie de Kind of Blue, album considéré comme étant tout a la fois 'archétype du jazz modal, le meilleur ‘opus du musicien et I’un des plus grands disques de jazz de tous les temps. ECOUTE : So What, 1959. Uniquement construit sur le mode de ré (d’abord sur ré, puis sur mib). SO WHAT 0 0 nd of fhe 59) D’autre part, il enregistre d’ambitieux albums avec grand orchestre, destinés a toucher un plus large public, a occasion desquels Miles Davis renoue avec I'arrangeur Gil Evans : Porgy and Bess et Sketches of Spain. C'est dans cet album de 1960 que Miles et le « grand » orchestre dirigé par Gil Evans, joue une version du Concerto d’Aranjuez (initialement concerto pour guitare) de Joaquin Rodrigo. 5 ECOUTE : Concierto de Aranjuez, 1960. 6, Second grand quintette (1960-1968) ‘Au début des années 1960, Miles Davis doit faire face une situation inédite : ses musiciens le quittent pour mener carrire en leur nom Contraint de trouver du sang neuf, le trompettiste rassemble autour de lui, avec le flair qui le caractérise, des instrumentistes plus jeunes et surdoués qui vont le conduire sur de nouveaux territoires : le pianiste Herbie Hancock, le batteur Tony Williams, le contrebassiste Ron Carter et le saxophoniste Wayne Shorter. II dira dans son autobiographie, a propos de son jeune groupe : «5)Jéois inspiron, représentos fo sess et essurois Fhomogénéité du groupe, Tony en étit fe fu, Pétncellecréatrice; Woy éttFhomme es lees, le cancepteur inelectul ; Rot et Herbie en étalent les oncages Je tals que le leader gul evo rassembié tout le monde. saint Jeunes mais, méme ij leur apprenois certoines choses, is men opprenaientdoutres,surlo New Thing, srl free.) Yonprenis queaue chose ‘chaque sir vec cet formation, dabord parce que Tony Willams tat un bateur progress, Le eu! membre Jun de mes ochestes Qu mat tien jour: Bon Diu, Mies, pourauoi ne trovailestu poston instrument ?» out die qu'enessayant de enrlodrogee hate ce euro, e ‘tas des notes. ma done poussé 8 retraailr mon instrument, pusgue Je mais dspensé de cette discipline sons meme men rendre compte (chaque mut Herbie, Tony et Ron rentaient dans leu chambre e ascutlentjsqula pect matin dece gus venaent de jouer. Le lendemai, Is remontoient sur scene et ouaienaiferemment mal so opts So, fll que e m'odapt...» < XN Va 7 Ces jeunes musiciens transcendent avec audace les conventions du jeu collectif. Stimulés par les directions du trompettiste, ils abandonnent progressivement le répertoire traditionnel pour inventer un jazz libre, intuitif, contrélé et nerveux, qui se démarque du Free Jazz qui se développe en paralléle (seul courant du jazz moderne que Miles Davis n’ait pas initié et qu'il nappréciait guére). Avec eux, Miles Davis retrouve un sourire juvénile, ainsi que le proclame 'un de ses albums : Miles Smiles en 1967. ECOUTE : Orbits (Miles Smiles, 1967). Anater 'absence de piano durant les Solos de Miles et W. Shorter, ainsi qu'un solo de piano réalisé Uniquement & la main droite. L’harmonie (les accords) est done absente (uniquement réalisée & la contrebasse) afin de laisser une plus grande liberté aux improvisateurs. International, son succés passe par Tokyo, Antibes ou Berlin, ou ses concerts sont enregistrés pour étre publiés sur disque. Fort de ce succés, Miles Davis partage sa vie avec des femmes artistes, affiche son godt du luxe et se distingue comme l'une des figures d’une aristocratie noire du show-business, admirée et respectée. 7. La révolution électrique (1968-1975) U’année 1968 apporte son lot de contestation sociale, de tensions raciales et de révolutions musicales Autour de Miles Davis, les musiciens s/intéressent aux nouveaux claviers et aux sonorités « électriques » ; Iui-méme s‘interroge sur la maniére d’intégrer les rythmes du rock dans sa musique, interpellé par la popularité d’artistes qui, tels Jimi Hendrix, transportent les foules alors que le jazz semble confiné une audience privilégiée. Mais ce passage a I’électrique n’est pas uniquement « commerciale », pour Miles Davis, le funk, porté par James Brown et Sly & The Family Stone, est la nouvelle musique du peuple noir. Miles se « branche » alors (au sens figuré comme au sens propre, puisqu'il électrifie sa trompette et se met a utiliser des pédales d’effets) et décide alors de mélanger le rock et le funk avec le jazz pour produire un nouveau style que I'on nomme « fusion », De nouveaux musiciens « électriques », comme John McLaughlin et Joe Zawinul vont faire partie de I’histoire et se retrouver dans le monumental double album Bitches Brew (1970). Le studio devient Vantre ou s’élabore la musique. En concert, son attitude change, c'est I'époque ou il se met systématiquement dos au public. ECOUTES = Interview de Miles Davis : « Dos au public ? » - Spanish Key (Live a Isle of Wight, 1970, album Bitches Brew) - Ife (Live a Vienne, 1973, album Big Fun). Utilisation d'une pédale d'effets. En 1975, Miles Davis quitte la scéne pour des motifs de santé. 8. Come-back et « Miles Superstar » (1981-1991) En 1981, le musicien revient dans les studios et sur scéne et livre des albums qui tentent d’étre en phase avec ce qu’écoutent les jeunes de I’époque (la musique pop notamment). Miles s‘entoure, une fois de plus, de jeunes musiciens qui feront de grandes carriéres solo par la suite comme Marcus Miller (bassiste), John Scofield et Mike Stern (guitaristes). Fasciné par les synthétiseurs et les possibilités offertes en studio par les nouvelles technologies, Miles Davis s'applique a faire une musique 8 l'image de cette époque. S'imprégnant de la pop du moment mais sans perdre de vue le blues, il cherche le moyen de concilier les sons contemporains avec ses trois décennies d'expérience. ECOUTES - Interview de Miles Davis en 1982 - Jean-Pierre (album We Want Miles, 1982) - Jean-Pierre (version live a Montréal, 1985) = Human Nature (album You're Under Arrest, 1985). Album orienté tres pop, ici une reprise de Michael Jackson. Concu sur mesure par Marcus Miller (bassiste de 27 ans), I’album Tutu (1986) sera un énorme succ’s. ECOUTES - Perfect Way (album Tutu, 1986) - Tutu (version live) Conforté dans son statut de star, courtisé par les médias, Miles Davis joue de son personnage et contribue a forger sa propre légende. |! publie son autobiographie en 1989, adopte des tenues insolites dessinées par de grands couturiers, expose ses talents de peintre et multiplie les apparitions a I'écran malgré une santé qui ne lui laisse que peu de répit. Son dernier album, Doo-Bop, posthume (1992), collaboration inachevée avec des rappeurs, proposait un mélange entre le Jazz et le Hip-hop. U'ultime pas en avant d’un artiste qui aura constamment cherché a renouveler sa musique.. Birth ofthe Cool ‘Round About Midnight Miles Smiles (1949) (0357) (1367) 1 oo a6? Poo 2 ol? soph . 2 % ooh wo6 we asl sf » te V i = ‘Savoy Sessions ‘ind of Bue Bich Brew We Wane Niles (a98a-1948) (0359) (as79) (1982), You're Under Arrest Documentaire : Miles Davis, une vie en jazz (SOmin.) (a5) IV. TUTU. Ualbum Tutu date de 1986, c’est I'avant dernier album de Miles Davis (hormis Doo-bop) nc! You're Under Arrest ‘Aura Tutu “Amandla 1985 1985 1986 1989 1992 (posthume) Ecoutes : Time After Time / Orange ~ Yellow / Perfect Way / Catembe / The Doo-Bop Song Valbum Tutu (comme le suivant) est le fruit d’une collaboration étroite entre Miles Davis et un jeune bassiste Marcus Miller. L’album est produit* par Marcus Miller et Tommy LiPuma. * Dans les pays Anglo-Saxons, le terme de producteur est équivalent a directeur artistique (choix des musiciens, organisation des sessions, mixage, ete) 1, Marcus Miller (1959-) Issu d’une famille de musiciens, Marcus Miller se fait tr8s vite remarqué comme bassiste funk/jazz virtuose, multi-instrumentiste (clarinette, sax. sop, claviers) et compositeur. Pendant des années, il est 'un des musiciens les plus demandés en studio et travaille sur ¥ plus de 500 albums avec des artistes comme Aretha Franklin, Marvin Gaye, Elton John, Carlos Santana, Frank Sinatra, Jean-Michel Jarre, les Bee Gees, Whitney Houston ou Claude Nougaro. Il sait s'adapter tous les styles, mais excelle et popularise la technique du «slap » (technique consistant a faire claquer les cordes de la basse sur les frettes) Ecoutes : Marcus Miller, So what, Hard Slapping. Son instrument de prédilection est une Fender Jazz Bass de 1977. Fender produit d’allleurs un modéle « signature » de cet instrument en 4 ou 5 cordes. En 1981, Marcus Miller rejoint le nouveau groupe de Miles Davis. Il est le bassiste des albums The Man with the Horn (1981), We Want Miles (1982), Star People (1983). Quelques albums sont enregistrés sans lui, mais il revient en 1986 avec Tutu et Amandla, comme bassiste, mult-instrumentiste, compositeur et producteur. En tant que musicien Afro-Américain, Marcus Miller croit fermement que sa musique peut lutter contre les inégalités. Sa carrigre et son engagement lui ont valu d’étre nommé artiste de I'UNESCO pour la paix, Une fierté et une reconnaissance pour ce musicien : « C'est vraiment un honneur d’étre nommé artiste pour la paix par 'UNESCO (..]J'y vois une opportunité <—___ > cae Trompatte en re-recording Responses + 59x, soprano a Cite structure en aber alypique ca elle nese présente pos sous [forme wadtioneledujot: theme Tongs solos heme HE tienes Lavertoble pate de sole centrale est ute, cr Marcus Miler 2 ee protease de nombreux espces de ibeté a Hes Das tout tong du mores Tame secondaire =z var aileurs, Miles Davis ne jouant plus les themes pat de a =z neste Sra ques Paniesibres oles dem, Cavs) | 27 expen, on onstate gulimpro RESUME - Rythmique Half Time Shuffle (vient du blues), tempo modéré, Sol min. sans sensible, - Nombreuses « blue note » (réb), - Riff de basse omniprésent, Theme A progressant vers !'aigu, mals assez statique, - Théme B contrastant, accords en ate, - Succession des thémes AB (vient du blues), -4 expositions des thémes (le dernier sans 8), - Theme secondaire au synthétiseur, Accents sur des accords joués avec le son « Orchestral Hit», + Call & responses (vient du blues), «Forme assez ouverte laissant de nombreuses plages dimprovisation pour Miles Davis, + Pas de virtuosité dans les improvisations, mais un gros travail sur le timbre, et le rapport son/silence. ECOUTE : Tutu en Live, 2. Tomaas Co-écrit avec Miles Davis, Tomaas fait partie de la seconde session d'enregistrement de cet album, réalisée & New York Sur ce morceau, Marcus Miller joue pratiquement tous les instruments (basse, saxophone soprano, clarinette basse, aviers), mais fit néanmoins appelle & deux musiciens, Omar Hakim, @ la batterie et Bernard Wright, au synthétiseur, afin dlatténuer le caractére trés répétitif et mécanique du morceau ‘Composition : Marcus Miller, Miles Davis Enregistrement : 12-25 mars 1986 (New-York) Durée : 5/38 Titre : « Tomaas » était le surnom que donnait Miles Davis 8 Tommy LiPuma (I'autre producteur de Tutu) Musiciens Miles Davis : trompette Marcus Miller: guitare basse, synthétiseurs, programmation des boites a rythmes, saxophone soprano, clarinette basse. Omar Hakim : batterie Bernard Wright : synthétiseur Tomaas se caractérise par une forme, au premier abord, assez simple (alternance refrain/ponts) et par une rythmique (binaire) trés mécanique, en contraste avec la légéreté du Shuffle de Tutu A contrari, Il se caractérise aussi par une profusion, un foisonnement de motifs mélodiques enchevétrés, d’ une multitude de sons électroniques et acoustiques et par improvisation quasi constante de Miles Davis, par moment en dialogue avec Marcus Miller au saxophone. a) Forme Tomaas se présente de la maniére suivante Enno II sagit done d’une forme Rondo (alternance Refrain/partie contrastante). Miles Davis va au début essentiellement improviser sur introduction et les Pont 1, puis va constamment improviser a partie du 3°" refrain. b) Eléments mélodiques Le morceau débute par un mi répété au synthétiseur, accompagnée par la batterie. Cet ostinato sera présent tout au long du morceau : Miles Davis et Marcus Miller improvisent dja, de maniere tres chromatique, donnant ainsi I'atmosphére du morceau, Toujours dans 'introduction, suit un Riff de guitare funky Gna Th + Sax. ‘ter ance Le mode est ici (idem sur les Ponts 1) un mode de sol sur mi, mais, comme dans Tutu, avec un recours trés fréquent a la ‘blue note», so= Oi Se tp ed Le refrain, trés mélodique, est composé de 2 sections de 6 mesures. U'antécédent finissant sur un mi grave, le conséquent, sur un mi aigu. Il est & envisager en mode de la sur mi (mi — fai - sol ~ la ~ si do ~ ré) et présente un contrechant trés chromatique au synthétiseur (harmonie en 4te, comme dans Tutu) on wet A partir du 2° refrain, une petite mélodie, au synthétiseur, vient s‘ajouter : 00 Be € ‘Au 4° refrain, le theme est supprimé, il est remplacé par un solo de Miles Davis doublé (enregistrement de 2 trompettes fen overdubbing). Tomaas se termine par un refrain (6°) en fade out (decrescendo).. Les Ponts se présentent comme suit Les Pont 1: = Dialogue (Call & response) Trompette / Sax. soprano, ~ Improvisation virtuose et chromatique de M. Davis = Solo de M. Davis, mi grave (bourdon) de clar. basse Pont 2 : Contraste de nuances et harmonique, Contrechant de clarinette basse, 0 a Fae a vo be, “ee eee Pont 3: Partie trés modulante et trés contrastante au niveau mélodique. RESUME -Rythmique binaire, mécanique, tempo modéré, + Riff de guitare funky, et mi répété dans I'aigu, ~ Mode de sol sur mi, puis la sur mi (refrain), - Nombreuses « blue note », + Call & responses entre Miles Davis et M. Miller, Miles Davis improvise du début a la fin, Forme rondo : Refrain/partie contrastante «Refrain trés mélodique, chantant, - Plus de virtuosité que dans Tutu, beaucoup de chromatismes. - Profusion sonore, foisonnement de motifs mélodiques enchevétrés Suge parton ECOUTE: Tomaas, Live (Allemagne, 1986) En ive, Cest sur les ponts que les musiciens peuvent Sexprimer le plus ibrement. Dans cet exemple, Tomaas passe en Shuffle 4'3, le refrain dsparaft, aissant place a un dialogue Mies Davis / Kenny Garret (sax. alto, puis 3 un extraordinaire solo de ce decnier. ‘Marcus Miller Kenny Garret 3. Portia Morceau le plus lent et le plus calme de l'album, Portia est une ballade écrite par Marcus Miller. Sommet de l'album Tutu, Portia est fortement influencé par les musiques espagnoles, et fait directement référence a 'époque hispanisante de Miles Davis, notamment avec ’album Sketches of Spain (1960). ECOUTE : Concierto de Aranjuez, 1960. Portia est aussi le titre sur lequel Marcus Miller va prendre le plus de place en tant que saxophoniste soprano, jouant & égalité avec Miles Davis, Composition : Marcus Miller Enregistrement : 13 février 1986 Durée :6'18 Titre : « Portia » est le nom de I’héroine du Marchand de Venise de William Shakespeare, nom que Miller trouvait beau et adapté au morceau qu'il avait composé. ‘Musiciens Milles Davis : trompette ‘Marcus Miller : guitare basse, saxophone soprano, synthétiseurs, programmation des boites rythmes, guitare électrique Paulinho da Costa : percussions ‘Adam Holzman : synthétiseur Saxophone soprano a) Forme Portia se présente de la maniére suivante DRE ee L sol: Theme Portia débute par une introduction faisant entendre deux agrégats (accord dense et inclassable) dans I'aigu qui installent le climat énigmatique et aérien du morceau. La batterie entre ensuite sur un rythme binaire, avec une décomposition de double-croches bien marquée et un accent sur le 4* temps ee TTL »b) Eléments harmoniques Portia est essentiellement constrult autour de 2 accords alternés La et Sol min. (A/Gmé) qui vont sans cesse revenir : a ine _ 6 = Ce balancement harmonique conclut chaque partie, occupe la totalité de la partie D (solo) et de la Coda (en rouge : les 2 accords) Introduction : 4 mes. (sans accord) Partie A:5 mes +4 mes. Partie B: 7 mes +4 mes. Partie C: 4 mes +4 mes. Partie D : 16 mes. Coda :24 mes. En comptant la reprise de ABCD, ces 2 accords occupe donc 80 mesures sur les 116 que compte le morceau, soit prés de 70%. C'est sur ces 2 accords que Miles Davis et Marcus Miller vont improviser tout au long du morceau (les improvisations ne selimitent donc pas a la seule partie D), ©) Eléments mélodiques Pour improviser sur ces 2 accords, M. Davis et M. Miller vont essentiellement utiliser le mode de mi sur la, mode fréquemment utilisé dans la musique espagnole es iéanmeins, Mls Davis va sowent tener ente do et do voi sle dns le suv de parton, equ donne arse tmode dtc Andaons (use core paramo econ dee) ¥ ee SS Les thémes A, B et C sont amples, avec des valeurs longues, ils ont un ambitus large (distance entre la note la plus grave et Ja note la plus aigué) et débutent par le méme motif rythmique (noire — triolet — noire pointée) et le méme intervalle de a DebutdeA: 5 Quin Gude SS $n Besse Début des dee Cue ¢ Début de ¢ * f, the o> dus Comme pour Tutu, on retrouve un accompagnement et des contrechants au synthétiseur, avec un son trés doux (travaillé 2 partir de samples de voix), qui vont privilégier, comme pour Tutu et Tomas, Vintervalle de ate Enfin, la Coda fait entendre une nouvelle mélodie (en mode de mi sur Ia), répétée 8 fois, issue du contrechant de synthétiseur durant les 2 accords A/Gm6 see 4) Marcus Miller : multi-instrumentiste. Portia est lettre de album Tutu ol Marcus Miller prend le plus portance comme instrumentiste, Tout d/abord au saxophone soprano (c'est M. Davis qui’aincité a prendre plus de place), puisque c’est lui qui interpréte le theme C, les deux fois, ainsi que les themes A2, B2 et la Coda. Le saxophone soprano, notamment dans l'aigu, donne au morceau une sonorité trés aérienne, trés fluide, absente des deux titres préceédents. ‘Au niveau de improvisation, hormis D1 (entiérement dévolu & Miles Davis), Marcus Miller improvise aussi, tout au long du morceau, dialoguant avec la trompette d’égal a égal Ensuite & la basse, Les fondamentales des accords sont normalement assurées tout du long 3 la basse (en slap dans la partie ), mais, on entend, en plus, & de nombreuses reprises, des improvisations dans l'aigu, qui crées alors un dialogue & 3, absent des 2 autres morceaux au programme (ala fin de C2 par exemple). Par ailleurs, Marcus Miller double trés souvent. les themes a la basse (ex. : fin de B, Coda) ECOUTES : = A2, B2, C2: theme au sax. + fin de C2 : improvisation Tp./Sax/basse = Coda : theme doublé a la basse RESUME = Tempo lent, ballade, - Binaire, double-croches a la batterie et accent surle 4° temps, ~ Caractere trés hispanisant, trés calme, atmosphére aérienne, - Trois thémes assez semblables, en valeurs longues, = Contrechants au synthétiseur, avec un son trés doux (« vocal »), - Omniprésence du balancement harmonique La/sol min, + Utilisation du mode « espagnol » (mode de mi) et du mode « andalou », - Grande place laissée & Marcus Miller (saxophone et basse), Dialogues « d’égal a égal » Miles Davis/Marcus Miller, - Un des plus beau morceaux de album. ECOUTES : + Suivide partition Portia (Live), Miles Davis avait habitude de conclure ses concerts par Portia, eb La teeta Begg pyr

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