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CS 3 (5), 383− 406 (2023)
Received 30 June 2023 | Revised 24 July 2023 | Accepted 25 August 2023 | Online Available 20 September 2023
https://doi.org/10.52845/CS/2023-3-5-2

OPEN ACCESS ISSN (O) 2795-8639

ORIGINAL ARTICLE

Modéliser Les Odd Dans Une Démarche Prospectiviste : Le Modèle Isdg

Arnaud Diemer1, Henri Sourgou1, Matteo Pedercini1
1
University Clermont Auvergne, CERDI, France, HVL, Norway, Jean Monnet Excellence Center on
Sustainability (ERASME), Jean Monnet Chairman on Industrial Ecology and Circular Economy,
OPCD, Post Growth Institute.
1
University Clermont Auvergne,
1
CERDI Millennium Institute
Corresponding Author: Arnaud Diemer
Abstract:
Depuis 2016, les différents gouvernements des pays du Nord et du Sud s’efforcent d’aligner leurs politiques de
développement durable sur les 17 Objectifs du Développement Durable (ODD). Les décideurs publics doivent ainsi définir
une feuille de route qui inscrit leurs actions à l’horizon 2030 et 2050. Le modèle iSDG, construit à partir du modèle
Threshold 21 (T21), a été conçu et développé afin de permettre aux responsables politiques de tirer parti des
interconnexions et des synergies entre les ODD. Le modèle iSDG est un outil basé sur la dynamique des systèmes, et
structuré de manière à analyser toutes les questions de développement durable à moyen et long terme. Ancré dans une
logique de durabilité forte (la sphère économique est encastrée dans la sphère sociale, elle-même encastrée dans la sphère
environnementale), le modèle iSDG propose d’évaluer les stratégies efficaces pour atteindre les ODD en s’appuyant sur
trois types de scénarios (BAU, moyen, optimiste). Une analyse des impacts croisés ainsi que des synergies positives et
négatives entre les ODD permet de visualiser les principaux résultats via un taux de réalisation des ODD.
Mots clés : Dynamique des systèmes, iSDG, T21, ODD, Simulation.
Abstract :
Since 2016, the different governments of countries in the North and South have been attempting to match their sustainable
development policies with the 17 Sustainable Development Goals (SDGs). Public decision-makers must thus define a
roadmap that sets out their actions for the 2030 and 2050 horizons. The iSDG model, based on the Threshold 21 (T21)
model, was designed and developed to enable policy makers to take advantage of the interconnections and synergies
between the SDGs. The iSDG model is a systems dynamics-based tool, structured to analyze all medium- and long-term
sustainability issues. Grounded in a strong sustainability framework (the economic sphere is embedded in the social sphere,
which is itself embedded in the environmental sphere), the iSDG model proposes to assess effective strategies to achieve
the SDGs based on three types of scenarios (BAU, medium, optimistic). An analysis of cross-impacts as well as positive and
negative synergies between the SDGs allows for the visualization of the main results via an SDG achievement rate.
Keywords : iSDG, T21, SDG, Simulation, Systems Dynamics

Introduction
Le programme de développement durable des entrepris de mobiliser leurs ressources humaines
Nations Unies à l’horizon 2030, qui comporte 17 et financières pour éradiquer la pauvreté et la
objectifs, a été adopté par les dirigeants du monde malnutrition, améliorer le bien-être et l’éducation,
entier lors du sommet de Nations Unies en 2015 résorber les inégalités et le travail indécent,
(Gérardin & al., 2016). En alignant leurs proposer une énergie propre et un accès à l’eau,
politiques de développement national sur le investir dans des infrastructures et des villes
programme 2030 et en mobilisant à la fois la durables, engager la société vers des
société civile et le secteur privé, les Etats ont comportements de consommation et de production

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responsables, lutter contre les changements
climatiques et l’érosion de biodiversité (terrestre
et aquatique), ou encore promouvoir l’avènement
de sociétés pacifiques et inclusives (UN, 2015).
Chaque année, le rapport sur les objectifs du
développement durable donne un aperçu des
efforts et des progrès réalisés par les différents
états (UN, 2019, 2018, 2017, 2016) ainsi que les
mesures supplémentaires qu’il convient d’apporter
pour atteindre certaines cibles (amélioration du
taux de scolarisation des filles, réduction de la
pauvreté extrême…). Si le réchauffement
climatique constitue une menace (GIEC, 2022)
qui détériore l’environnement naturel à un rythme
alarmant (acidification des océans, érosion des
terres, élévation du niveau des mers et des océans,
perte de la biodiversité…) et fragilise les progrès
réalisés, les 17 ODD nous démontrent chaque
année, qu’il est possible de tirer parti des liens qui
les unissent, pour générer une transformation
économique et sociale de la société (UN, 2019).
Tous les problèmes sont interdépendants, et les
solutions aux changements climatiques passent
par une réduction des émissions de Gaz à Effet de
Serre (GES), des investissements dans les
énergies propres, la création de nouveaux emplois,
le verdissement de la plupart des zones urbaines
ou encore l’amélioration de la qualité de l’air dans
les villes. Si l’interdépendance des ODD n’est
plus à démontrer, les Etats sont quelque peu
démunis lorsqu’il s’agit de planifier leurs
stratégies de développement durable (Riffon & al.,
2016). Les décideurs politiques doivent
notamment répondre à des questions telles que :
combien de ressources sont nécessaires pour
atteindre les cibles des ODD ? Comment répartir
les investissements entre les 17 ODD ? Où
investir en priorité ? Comment financer ces
investissements ? Afin d’accompagner les Etats
dans leur démarche de planification du
développement durable, le Millennium Institute a
conçu et développé le modèle iSDG (Integrated
Sustainable Development Goals). Construit à
partir du modèle Threshold 21 (T21) qui a fait ses
preuves aux Etats-Unis et dans de nombreux pays
d’Asie ou d’Afrique, le modèle iSDG est un outil
basé sur la dynamique des systèmes et structuré de
manière à analyser les questions de
développement à moyen et long terme. Le modèle
a été conçu pour compléter les apports des
modèles budgétaires, sectoriels ou autres outils de
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Arnaud Diemer et al.
planification à court et moyen terme.
L’article que nous proposons, cherche à
démontrer qu’au-delà du simple exercice de
modélisation, le modèle iSDG offre un nouveau
regard sur les politiques de développement
durable, et notamment sur les scénarios qu’il
convient de formuler pour atteindre l’ensemble
des ODD (ou certains d’entre eux). Pour ce faire,
nous présenterons la structure et les
caractéristiques du modèle iSDG à travers trois
prismes. Dans un premier temps, nous montrerons
que le modèle iSDG – composé de 30 secteurs (10
secteurs sociaux, 10 secteurs économiques et 10
secteurs environnementaux) - s’appuie sur une
approche dite de durabilité forte, dans laquelle
l’économie est limitée par la sphère sociale (la
société), elle-même encastrée dans la sphère
environnementale. L’analyse des ODD s’inscrit
dès lors dans le cadre des Planet’s Boundaries
(Rockstrom, 2009) et celui de l’économie du
Donughts (Raworth, 2017). De ce fait, certains
ODD traduisent les contraintes qui pèsent sur le
monde, mais également à des échelles locales.
Dans un deuxième temps, nous préciserons que le
modèle iSDG offre un cadre propice pour analyser
les interconnexions (fortes ou faibles) entre les
ODD. Les différents secteurs du modèle
interagissent les uns avec les autres par le biais
d’un réseau complexe de boucles de rétroaction.
De ce fait, il est possible de reproduire assez
fidèlement la plupart des relations qui existent
entre les ODD et de mettre l’accent sur les
principaux leviers d’actions (leverage points).
D’un point de vue méthodologique, le modèle
iSDG s’inscrit dans la droite lignée des modèles
World 2 (Forrester, 1972) et World 3 (Meadows
& al., 1972, 1992, 2002, 2022), considérés comme
les premiers modèles d’intégration assignée
(Integrated Assessment Models). La dynamique
des industries (Forrester, 1961) est une méthode
qui s’écarte radicalement des modèles d’équilibre
général et d’optimisation, prescrits par les
institutions internationales, telles que le FMI ou la
Banque Mondiale. Elle s’appuie sur des
diagrammes de boucles de causalité (CLD) et des
diagrammes stocks-flux (SFD) impliquant des
sens de polarité positive (boucle de renforcement)
et négative (boucle de régulation) ainsi que des
effets retard. Enfin, dans un troisième et dernier
temps, nous reviendrons sur la dimension
prospectiviste du modèle iSDG. Les scénarios
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renvoient à des formes narratives (qui ont fait le
succès du modèle World 3) construites sur des
données quantitatives. Derrière les perspectives
globales que propose le modèle, il existe à
l’échelle nationale, un grand nombre de
trajectoires susceptibles d’éclairer les différents
gouvernements. Au final, le modèle iSDG repose
la question de la planification en matière de
stratégies de développement durable.
1. Le modèle iSDG, un outil de simulation
intégrée
Le modèle iSDG est avant tout un outil intégré qui
vise à soutenir la conception et l’évaluation des
stratégies de développement durable visant à
atteindre les ODD (Diemer, Sourgou, Chan,
Pedercini, 2022). A ce titre, il s’insère
parfaitement dans les cinq grandes étapes du
processus d’élaboration des politiques publiques
(Howlett, Ramesh, 1995) : à savoir (1) la
définition d’un programme et l’identification des
questions ; (ii) la conception, la formulation et
l’évaluation des politiques ; (iii) l’adoption de la
politique, (iv) la mise en œuvre de la politique et
Figure 1 : Du modèle 21 au modèle iSDG
Source : Pedercini (2022)
Le modèle iSDG est le dernier né d'une série de
modèles appelés T21 (Threshold 21), développés
par le Millennium Institute (MI, 2003) à l’échelle
des Etats-Unis (Bassi & Shilling, 2009 ; Bassi &
Pedercini, 2007), puis dans un grand nombre de
pays africains (Bénin, Cap Vert, Egypte, Ghana,
Malawi, Mali, Mozambique, Somalie, Tunisie),
asiatiques (Bangladesh, Bhoutan, Cambodge,
Chine, Indonésie, Taiwan) ou européens (Italie,
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(v) l’évaluation, le suivi des politiques. Le modèle
iSDG est particulièrement bien adapté à l’étape 2,
laquelle peut devenir très complexe lorsque des
options alternatives d’allocation des ressources
dans différents secteurs sont évaluées, discutées et
négociées (Basle, Pelé, 1994 ; Deleau, 1996). Le
modèle peut fournir une aide quantitative aux
discussions exploratoires (Didier, 1991) sur les
principaux domaines d’intervention, à l’évaluation
de la progression de chaque objectif d’ici 2030 ou
encore à la mise en évidence des ODD qui ont
besoin d’une intervention (OCDE, 2016). Le
modèle iSDG apporte également un regard
intéressant lors de l’étape ultime d’évaluation et
de suivi des politiques nationales. Au fur et à
mesure que des experts précisent les modes
d’intervention de l’action publique à l’aide de
modèles sectoriels détaillés (Viveret, 1989), le
modèle iSDG peut simuler ces interventions de
manière ciblée (sur un ODD) ou combiner
différents ODD afin d’évaluer les synergies
intersectorielles et d’améliorer leur efficacité
(Pedercini, Arquitt, Collste, Herren, 2019).
Lituanie). Ces modèles présentent plusieurs
particularités (Diemer & al. 2022) :
(i) Ils s’inscrivent dans la longue tradition des
IAM (Integrated Assessment Models) et
notamment les modèles World 2 (Forrester, 1972)
et World 3 (Meadows, 1972). Au cours des deux
dernières décennies, les IAM sont devenus très
populaires en raison des recherches sur le
changement climatique et les premiers travaux du
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GIEC (Diemer & al., 2019). Le chapitre 10 du
rapport du GIEC (IPPC, 1995), intitulé
« Integrated Assessment of Climate Change : An
Overview and Comparison of Approaches and
results » souligne que les modèles d’évaluation
intégrée sont des outils combinant les
connaissances d’un large éventail de disciplines
afin de fournir des informations qui ne seraient
pas disponibles dans le cadre d’une recherche
disciplinaire traditionnelle. Ces modèles se
révéleraient ainsi utiles pour explorer les
interactions entre les systèmes humains et
naturels, pour tester les hypothèses de différentes
disciplines ou pour mettre en évidence des effets
de rétroaction (IPPC, 1995, p. 14).
Ces modèles reposent sur des récits (narratives) –
Arnaud Diemer et al.
ce que O’Neill & al. (2017) appellent aujourd’hui
des Narrative Shared Socioeconomic Pathways
(NSSP). Les récits décrivent des changements
futurs plausibles au niveau de la population, de
l’utilisation des ressources naturelles, des activités
économiques (agriculture, industrie…) ou encore
de l’environnement (pollution). Ces récits
couvrent une part d’incertitude en termes de défis
sociétaux pour atténuer et s’adapter au
changement climatique. L’un des principaux
résultats du modèle Limits to Growth (1972) a été
de proposer des scénarios (figure 2) articulant des
données quantitatives et qualitatives sur une
longue période (1900 – 2100) via une approche
flux-stocks (capitaux).

Figure 2 : Le récit de Limits to Growth

Source : Meadows & al. (1972, p. 124)

Cette grille de lecture contraste avec les travaux théoriques des 50 dernières sur le capital physique, social,
humain ou environnemental ainsi que les effets des activités économiques sur l’environnement (figure 3).

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Figure 3: Une grille de lecture flux-stocks

Source: Diemer (2022, p. 10)

Le modèle iSDG reprend cette logique du récit à modélisation et de théorie scientifique, provenant
partir de données globales (flux/stocks) sur la de sources telles que celles de la Banque
période 1970-2022. Il s’appuie également sur un mondiale, du FMI, de la FAO, du GIEC ou du
examen détaillé de la littérature en matière de Département de l'énergie des États-Unis.

Figure 4 : Articulation entre indicateurs Flux/stocks et données globales

Source : Pedercini (2022, p. 5)

(ii) ils reposent sur une méthode – la dynamique
des systèmes (Forrester, 1972, 1969, 1968, 1961)
– et des outils de simulation (logiciels Vensim et
Stella) susceptibles de résoudre des problèmes
complexes et de produire des résultats quantitatifs
(graphiques) sur des horizons allant de 5 à 100
ans. La dynamique des systèmes s’appuie sur la
pensée systémique - Systems Thinking –
(Richmond 2000, 1997, Senge, 1990, Checkland,
1981) afin de cartographier toutes les relation
causales contenus dans un système complexe. Un
diagramme de boucles causales (CLD, Causal
Loops Diagram) peut ainsi voir le jour (Lane,
2000). Les CLD s’appuient sur une délimitation

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du système pour rendre compte des sens de
polarité (une boucle à polarité positive renforce le
système, une boucle à polarité négative régule le
Les leviers d’action jouent un rôle important
lorsqu’il s’agit de savoir comment modifier un
système (distinction entre ce que l’on observe et
ce que l’on voudrait voir). Le passage du Systems
Thinking à la Systems Dynamics s’effectue via la
La question des données devient ici primordiale,
puisqu’il s’agira de produire les premières
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système), des décalages temporels et des leviers
d’action (les fameux Leverage points décrits par
Donella Meadows, 1999).
modélisation d’un problème (Sterman, 2000). Le
modèle repose sur des liens de causes à effets
entre des flux et des stocks (SFD, Stocks and
Flows Diagram).
simulations sur un horizon temporel donné via des
logiciels tels que Vensim ou Stella.
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Figure 5 : Le passage de la pensée systémique à la dynamique des systèmes

Source : Diemer (2004)

(iii) Ils permettent de réaliser des simulations temporelles pour n’importe quelle variable ou
susceptibles de visualiser des trajectoires série de variables sur un horizon temporel donné.

Figure 6 : Perspective globale intégrant différentes trajectoires pour le revenu réel

Source : Pedercini (2022)

Il est alors possible de préciser les impacts de
politiques publiques ou de changements
structurels, mais également de générer des
dialogues sur les options choisies avec les
différents ministères d’un gouvernement, les
agences d’expertise partenaires ou encore la
société civile. Le modèle iSDG (comme le modèle
T21) s’inscrit dans cette longue lignée de modèles
qui sont apparus dans les années 70 et 80 à la suite
de la révolution informatique et des simulations
assistées par ordinateur (Garrett, 1990 ; Barney,
Wilkins, 1986).

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(iv) Ils inscrivent les impacts des politiques
nationales dans une approche dite de durabilité
forte (non substitution des facteurs de production,
préservation des stocks de capitaux naturels,
conséquences des investissements en matière
d’innovations). Les interactions Homme - Nature
s’inscrivent dans une logique de limites
planétaires (Planet Boundaries, Rocktrom, 2009)
Figure: 7 Planet Boundaries et Doughnuts Economy
Source: Raworth (2017)
Cette approche en termes de durabilité forte joue
un rôle primordial dans la conception et
l’utilisation du modèle iSDG, elle traduit le fait
qu’une planification stratégique du
développement durable doit écarter tout
comportement d’Overshooting (dépassement) et à
fortiori, un scénario d’effondrement (notons ici
que l’effondrement n’a pas besoin d’être absolu, il
peut être relatif via une baisse régulière du niveau
de vie ou de l’espérance de vie).
2. Les caractéristiques structurelles du modèle
iSDG
Le modèle iSDG, basé sur la dynamique des
systèmes, est un outil de planification globale et
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et de plancher social (Dougnhuts Economy,
Raworth, 2017). Dès lors, les choix de politiques
publiques (et notamment les cibles à atteindre en
matière d’ODD) doivent nous permettre de
réduire notre empreinte environnementale sans
pour autant nuire à un certain niveau de bien-être
(figure 7).
participative du développement durable. Globale
car il représente tous les éléments importants de la
complexité d’un système (limites, relations de
rétroaction, non linéarité, prise en compte des
délais, formulation des hypothèses, présentation
des équations, intégration des données…).
Participative car il intègre les parties prenantes
dans l’acte de modélisation (choix des hypothèses
et des scénarios, conception du data management,
enquêtes à réaliser…). D’une certaine manière, la
dynamique des systèmes est l’une des méthodes
qui a intégré très tôt, le rôle des parties prenantes
dans le processus de modélisation. Ce que l’on
nomme « Modelling with problem-owners » est
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l’une des caractéristiques principales en Systems Dynamics (Hovmand, 2014) ou de

dynamique des systèmes (Lane, 2010 ; Rouwette Participatory System Dynamics Modeling
& Vennix, 2006). (Antunes et al., 2015 ; Sedlacko et & al., 2014 ;
Videira & al., 2017). De ce fait, le modèle iSDG
Cet engagement des parties prenantes est présent
est particulièrement adapté pour analyser les
dans de nombreux champs : le marketing
interactions entre les politiques visant à atteindre
(Morecroft, 1984), le management en équipes
les ODD (figure 8). L’ODD 17 « partenariats
dans la prise de décisions stratégiques (Richmond,
pour la réalisation des objectifs », y tient même sa
1997), les méthodes pour faciliter la prise de
place via l’inclusion de toutes les parties
décisions en groupe (Lane, 2010), les pratiques de
prenantes dans une approche de modélisation
Group Model Building (Vennix, 1996 ; Andersen
participative.
& Richardson, 1997), de Community Based

Figure: 8 Reproduire les interdépendances entre les ODD

Source: Diemer, Khushik, Ndiaye, 2020

Le modèle iSDG retient des indicateurs pertinents indicateurs. Il est cependant possible d’intégrer
pour les 17 ODD. La liste ci-dessous donne un des indicateurs personnalisés pour les besoins
aperçu des cibles retenues pour chaque ODD dans spécifiques d’un pays.
la version de base du modèle, soit un total de 78

Tableau 1 : Les indicateurs des ODD dans le modèle iSDG

1.1.1 Proportion de la population
vivant sous le seuil de pauvreté
international, par sexe, âge, statut
d’emploi et situation
géographique (urbain/rural)
1.2.1 Proportion de la population
vivant sous le seuil de pauvreté
national, par sexe et par âge
1.4.1 Proportion de la population
vivant dans des ménages ayant
accès aux services de base
1.5.1 Nombre de décès, de
disparus et de personnes touchées
par une catastrophe par
10.1.1 Taux de croissance des
dépenses des ménages ou du
revenu par habitant des 40% les
plus pauvres de la population et
de la population totale
10.2.1 Proportion de personnes
vivant en dessous de 50% du
revenu médian, par âge, sexe et
personnes handicapées
10.4.1 Part du travail dans le
PIB, comprenant les salaires,
les transferts et la protection
sociale.

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100 000 personnes
1.5.2 Pertes économiques liées
aux catastrophes directes par
rapport au PIB mondial.
2.1.1 Prévalence de la sous-
alimentation
2.2.1 Prévalence du retard de
croissance chez les enfants de
moins de 5 ans
2.2.2 Prévalence de la
malnutrition chez les enfants de
moins de 5 ans, par type
(émaciation et surpoids)
2.3.1 Volume de production par
unité de travail par classes de
taille d’entreprise
agricole/pastorale/sylvicole
2.4.1 Proportion de la surface
agricole consacrée à l’agriculture
productive et durable.
3.1.1 Taux de mortalité
maternelle
3.1.2 Proportion de naissances
assistées par du personnel de
santé qualifié
3.2.1 Taux de mortalité des moins
de cinq ans
3.2.2 Taux de mortalité néonatale
3.4.1 Taux de mortalité attribué à
une maladie cardiovasculaire, un
cancer, un diabète ou une maladie
respiratoire chronique
3.6.1 Taux de mortalité dû aux
accidents de la route
3.7.1 Proportion de femmes en
âge de procréer dont le besoin de
planification familiale est satisfait
par des méthodes modernes
3.7.2 Taux de natalité chez les
adolescentes par 1 000 femmes de
ce groupe d’âge
3.8.1 Couverture des services de
santé essentiels.
4.1.1 Proportion d’enfants et de
jeunes atteignant au moins un
niveau minimum de compétence
en lecture et en mathématiques,
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11.5.1 Nombre de décès, de
disparus et de personnes
touchées par une catastrophe
pour 100 000 habitants
11.5.2 Pertes économiques
directes dues aux catastrophes
par rapport au PIB mondial, y
compris les dommages causés
par les catastrophes aux
infrastructures essentielles et la
perturbation des services de
base.
11.6.1 Pourcentage de déchets
solides urbains régulièrement
collectés et dont le rejet final
est adéquat par rapport au total
des déchets générés par la ville
11.6.2 Niveaux moyens annuels
de particules fines (par exemple
PM2,5 et PM10) dans les villes
(pondérés par la population)
12.2.1 Empreinte matérielle
(MF) et MF par habitant, par
PIB
12.2.2 Consommation
intérieure de matériaux (DMC)
et DMC par habitant, par PIB
13.1.1 Nombre de décès, de
disparus et de personnes
touchées par une catastrophe
pour 100 000 personnes
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par sexe
4.3.1 Taux de participation des
jeunes et des adultes à l’éducation
et à la formation formelles et non
formelles au cours des 12 derniers
mois, par sexe
4.5.1 Indices de parité
(femmes/hommes, zones
rurales/urbaines, quintiles de
richesse inférieurs/ supérieurs) et
autres, tels que le statut
d’handicapé, les peuples
indigènes et les personnes
touchées par des conflits, à
mesure que les données sont
disponibles)
4.6.1 Pourcentage de la
population d’un groupe d’âge
donné atteignant au moins un
niveau fixe de compétence en
matière de compétences
fonctionnelles (a)
l’alphabétisation et (b)
compétences en calcul, par sexe.
5.5.1 Proportion de sièges 14.4.1 Proportion des stocks de
occupés par des femmes dans les poissons dans les niveaux
parlements nationaux et les biologiquement durables
gouvernements locaux 14.5.1 Couverture des zones
5.6.1 Proportion de femmes âgées protégées par rapport aux zones
de 15 à 49 ans qui prennent leurs marines
propres décisions en connaissance
de cause concernant les relations
sexuelles, l’utilisation de
contraceptifs et les soins de santé
génésique.
6.1.1 Proportion de la population 15.1.1 La superficie forestière
utilisant des services d’eau en tant que proportion de la
potable gérés en toute sécurité superficie terrestre totale
6.2.1 Proportion de la population 15.1.2 Proportion de sites
utilisant des services importants pour la biodiversité
d’assainissement gérés de terrestre et d’eau douce qui sont
manière sûre, y compris une couverts par des zones
installation de lavage des mains protégées, par type
avec de l’eau et du savon d’écosystème
6.4.1 Changement de l’efficacité
de l’utilisation de l’eau dans le
temps
6.4.2 Niveau de stress hydrique :
prélèvement d’eau douce par
rapport aux ressources en eau
douce disponibles.

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7.1.1 Proportion de la population
ayant accès à l’électricité
7.2.1 Part des énergies
renouvelables dans la
consommation totale d’énergie
finale
7.3.1 Intensité énergétique
mesurée en termes d’énergie
primaire et de produit intérieur
brut
8.1.1 Taux de croissance annuel
du PIB réel par habitant
8.2.1 Taux de croissance annuel
du PIB réel par personne occupée
8.4.1 Empreinte matérielle (MF)
et MF par habitant, par PIB
8.4.2 Consommation intérieure
de matières (DMC) et DMC par
habitant, par PIB
8.5.2 Taux de chômage, par sexe,
âge et personnes handicapées
— 8.6.1 Proportion de jeunes
(âgés de 15 à 24 ans) qui ne
suivent ni études, ni emploi, ni
formation
9.1.1 Proportion de la population
rurale vivant à moins de 2 km
d’une route toutes saisons
9.2.1 Valeur ajoutée
manufacturière en proportion du
PIB et par habitant
9.2.2 Emploi manufacturier en
proportion de l’emploi total
9.4.1 Émissions de CO2 par unité
de valeur ajoutée
Source : MI (2021) modifié par les auteurs
La structure du modèle iSDG représente les
mécanismes de développement que l’on trouve
dans la plupart des pays en développement et
industrialisés. Les limites du modèle sont définies
à partir des variables utilisées, du niveau
d’agrégation et des échelles spatio-temporelles.
L’approche fondamentale représente de manière
endogène les variables qui constituent une partie
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Arnaud Diemer et al.
16.1.1 Nombre de victimes
d’homicide volontaire pour 100
000 habitants, par sexe et par
âge
16.5.2 Proportion d’entreprises
qui ont eu au moins un contact
avec un agent public et qui ont
payé un pot-de-vin à un agent
public, ou à qui ces agents
publics ont demandé un pot-de-
vin, au cours des 12 mois
précédents.
16.6.2 Proportion de la
population satisfaite de sa
dernière expérience des
services publics
17.1.1 Recettes publiques
totales en proportion du PIB,
par source
17.1.2 Proportion du budget
national financé par les impôts
nationaux
17.3.1 Investissements directs
étrangers (IDE), aide publique
au développement et
coopération
Sud-Sud en proportion du
budget intérieur total
17.4.1 Service de la dette en
tant que proportion des
exportations de biens et
services
essentielle des mécanismes de développement
analysés (il s’agit ici du PIB et de ses
composantes, de la population et de ses
déterminants, de l’offre et de la demande de
ressources). Les variables qui ont une influence
importante sur les questions analysées, mais qui
ne sont que faiblement influencées par les
questions analysées, sont exogènes (on citera les
CS 2 (5), 383−406 (2023) 394
 Arnaud Diemer et al.
CURRENT SCIENCE

cycles de pluie, les dons reçus, les taux de change.
Comme le modèle iSDG se concentre sur les
questions de développement à long terme,
l’inflation et les taux d’intérêt sont également
considérés comme exogènes (dans le cas d’une
application particulière à un pays, ces variables
peuvent cependant être endogénéisées). Enfin, les
variables qui sont en dehors du champ de
l’analyse, qui n’ont pas d’effet quantifiable ou qui
ne sont pas susceptibles de changer sur l’horizon
temporel considéré, ne sont pas explicitement
représentées dans le modèle. Les exemples
incluent les tremblements de terre, les questions
ethniques, la diversité culturelle, etc.
Le modèle iSDG de base est conçu comme un
modèle national, d’un point de vue géographique,
les données sont donc agrégées. Toutes les
variables renvoient à des moyennes ou des
données nationales. Une forme de désagrégation
est toutefois présente dans le modèle via
l’existence de sous-composantes d’une variable
principale. Ainsi, la population est divisée en
classes d’âge et en genre. La distinction âge/sexe
est utilisée pour construire des indicateurs
socioéconomiques.
Enfin, les échelles spatio-temporelles sont
analysées sous deux angles. D’une part, le modèle
iSDG se concentre sur le pays (questions
internes). Il s’agit de savoir comment faire pour
s’engager dans une politique dite de
développement durable. D’autre part, le modèle
analyse avant tout les questions de développement
de long terme. Il repose ainsi sur des simulations
allant jusqu'à 2030, 2050 ou 2100. Ces échéances
dépassent de très loin les prévisions que l’on
retrouve dans les modèles économiques de la
Banque Mondiale ou de l’OCDE.
Dans sa catégorie, le modèle iSDG est considéré
comme un modèle de grande taille, il comprend
plus de 3600 variables de stocks et plusieurs
milliers de boucles de rétroaction. Sa structure est
organisée en unités logiques plus petites, appelées
secteurs. Un secteur correspond à un mini-modèle
doté de mécanismes internes qui peuvent être pris
en compte, indépendamment du reste du modèle.
Le modèle iSDG est composé de 30 secteurs. Ces
secteurs sont classés en fonction de leur
dimension (environnemental, social et
économique) tout en respectant le processus des
cercles intégrés de durabilité forte (la sphère
sociale est contenue dans la sphère
environnementale, la sphère économique est
contenue dans la sphère sociale). Ils interagissent
les uns avec les autres de manière dynamique par
le biais d’un réseau complexe de boucles de
rétroaction.

Tableau 2 : Les différents secteurs du modèle iSDG

Environnement Social Economique
Utilisation des terres Population Agriculture
Sol Fertilité Industrie
Prélèvement d’eau Mortalité Services
Approvisionnement en eau Education PIB
Consommation d’énergie Santé Investissement
Production électrique Infrastructures Ménages
Approvisionnement en énergie primaire Véhicules Gouvernement
Consommation de matériaux Emploi Gouvernance
Emissions et déchets Répartition des revenus Finance
Biodiversité Pauvreté Balance des Paiements
Source : MI (2021, 2017)

Les indicateurs utilisés pour suivre un ou
plusieurs ODD, intègrent donc plusieurs secteurs.
La figure 9 donne un aperçu des relations entre les
30 secteurs de leur affiliation à la sphère
environnementale (cercle vert extérieur), la sphère
sociale (cercle rouge central) et la sphère
économique (cercle bleu intérieur).
Finalement, le modèle iSDG peut être appliqué à
n’importe quel pays grâce à un processus de
calibrage et de personnalisation. Le calibrage est
effectué au moyen de calibrages partiels du
modèle, comprenant également des cycles
d’optimisation multi-paramétrique (les paramètres
du modèle sont estimés sur la base de la

CURRENT SCIENCE CS 2 (5), 383−406 (2023) 395

 Arnaud Diemer et al.
CURRENT SCIENCE
littérature).

Figure 10 : Affiliation des secteurs aux trois sphères

Source : MI (2021) modifié par les auteurs

Sans chercher à décrire toutes les hypothèses du
modèle, il est possible de cerner les
caractéristiques d’un secteur à partir d’un
diagramme de boucles causales (CLD), des arbres
de causalité et de conséquences et du diagramme
des flux et des stocks (SFD). Ainsi, le secteur des
infrastructures de transport influence de nombreux
secteurs tels que l’éducation, la santé, l’industrie,
les services. Deux boucles (renforcement R1 et
régulation B1) viennent ainsi créer une dynamique
dans un modèle simple (figure 11). Une
augmentation des infrastructures routières
augmente le nombre de véhicules en circulation,
ce qui peut générer des embouteillages et donc la
congestion de certaines voies. Cette congestion
appelle une nouvelle dépense publique pour
augmenter les voies routières et faire face à la
montée du trafic (R1). L’expansion des routes
peut cependant générer une baisse du transport
ferroviaire et donc réduire l’entretien et
l’utilisation de ces infrastructures (B1). Les
infrastructures sont très exposées au changement
climatique, via les dommages causés par les
catastrophes naturelles.

Figure 11 : CLD des infrastructures

CURRENT SCIENCE CS 2 (5), 383−406 (2023) 396

 Arnaud Diemer et al.
CURRENT SCIENCE

Figure: 12 Arbre des causalités

Source: Les auteurs
Modéliser avec le logiciel Stella, le diagramme budgétaire), les conséquences en matière d’accès
des stocks (infrastructures en construction et en à la santé, à l’alimentation (logistique) ou à
réparation) et des flux (catastrophes naturelles, l’éducation, les dommages économiques causés
décès dans les infrastructures de transport) peut par les catastrophes naturelles, les incidences sur
dès lors prendre la forme suivante (figure 13). Son les terres disponibles et les inégalités créés avec le
niveau de détail permet d’intégrer la question du monde rural (zones non desservies par les
financement des infrastructures (choix infrastructures de transport).

Figure 13 : Diagramme des flux et des stocks (SFD) du secteur Infrastructure

Source : Les auteurs

A l’aide de ce modèle structurel et du secteur possible d’appréhender les performances d’un

« infrastructure » développé sur Stella, il est pays en matière de développement durable et les
CURRENT SCIENCE CS 2 (5), 383−406 (2023) 397

CURRENT SCIENCE
interventions nécessaires pour améliorer un ODD
(ici l’ODD 9 Industrie, innovation et
infrastructures) ou un ensemble d’ODD (ODD 3
santé, ODD 4 éducation, ODD 8 travail décent et
croissance économique…). Le scénario Business
As Usual (BAU) permet d’analyser la situation
sans changement de politique en cas de choc
externe (couleur bleu dans la figure 14). Il est
ainsi possible d’identifier les ODD qui
Figure 14 : Simulation du modèle
Source : Les auteurs
Dans le cas du secteur « Infrastructures » et de son
articulation avec l’ODD 9, une hausse des
infrastructures suggère une nouvelle dépense
(publique, privée ou les deux à la fois), cela peut
se traduire par une augmentation des
infrastructures de transport routières ou
ferroviaires (voir le CLD de la figure 11). La
CURRENT SCIENCE
Arnaud Diemer et al.
progressent rapidement et ceux qui peinent à
s’améliorer. Dans le cas présenté ci-dessous, les
ODD 4, 7, 11 et 16 progressent moins que les
ODD 1, 3, 6, 8, 10, 12, 14, 15 ou 17.
Par la suite, il sera possible de sélectionner les
interventions nécessaires, il s’agit des points
leviers (Meadows, 1999) sur lesquels il convient
d’agir (couleur rouge du nouveau scénario dans la
figure 14).
hausse des routes bitumées va engendrer une
hausse du nombre de voitures en circulation,
lesquelles vont améliorer l’accès aux soins et à
l’éducation, mais également détériorer la qualité
de l’air via les émissions de CO2 et de particules
fines. Cette dégradation de la qualité de l’air peut
avoir des conséquences sur l’espérance de vie.
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 Arnaud Diemer et al.
CURRENT SCIENCE

Figure 15 : Résultats des simulations autour d’une hausse des infrastructures de transport
Source : Les auteurs

La hausse des dépenses publiques dans l’un des
ODD (financement des infrastructures routières
dans l’ODD 9), une nouvelle recette fiscale ou
encore un changement des taux de fiscalité
apparaissent dans l’ODD 17, en fonction de la
nature du financement (publique, privé ou issu
d’un partenariat public privé, PPP). Dans la
version « démo » et actualisée du modèle iSDG
(accessible en ligne), il existe désormais un
module qui permet de modifier les taux et les
paramètres sur lesquels reposent les politiques
publiques (Modify Policies), de faire apparaître
les graphes correspondant à des simulations de
long terme (All Graphs), de lancer plusieurs
scénarios ou encore d’intégrer des bases de
données (le modèle iSDG repose sur un fichier
excel comportant un grand nombre de données).

Figure 16 : iSDG en version Démo

Source : Les auteurs

Ce n’est qu’à la suite de ce travail de simulation et
du choix des scénarios (iSDG retient trois
scénarios : BAU Business As Usual, Scénario
Moyen et Scénario Optimiste), qu’il est possible
d’appréhender un taux moyen de réalisation des
ODD pour le pays concerné. Une analyse intégrée
des scénarios permet notamment de comprendre
les conséquences d’un investissement
supplémentaire (comparaison à partir des trois
scénarios décrits plus hauts).

CURRENT SCIENCE CS 2 (5), 383−406 (2023) 399

 Arnaud Diemer et al.
CURRENT SCIENCE

Figure 17 : Analyse intégrée des scénarios

Source : Les auteurs

A partir de ces scénarios et des choix
d’investissements publics, un indicateur de
performance (de la dépense publique) pourra être
représenté en fonction des impacts intersectoriels
(entre les différents secteurs du modèle iSDG), du
choix des cibles (ODD) et des outils mobilisés
(hausse de la pression fiscale, taxes sur le
commerce international, subventions et transferts,
normes, politique de genre, taux d’intérêt de la
dette étrangère, planning familial, protection
d’aires naturelles, stratégie de reforestation…).

Figure 18 : Impact Policy and Synergy Assessment (exemple de la Côte d’Ivoire)

Source : MI (2016, p. 4)

CURRENT SCIENCE CS 2 (5), 383−406 (2023) 400


CURRENT SCIENCE
3. Le modèle iSDG, un outil de prospective
pour la planification du développement
durable
Depuis 2015 et l’avènement des ODD, les pays du
Sud ont fait des progrès considérables pour
atteindre les objectifs du développement durable
et les intégrer dans les processus de planification
et de budgétisation nationaux, et ce même si la
production de données a été un puissant frein. A
ce jour, la plupart des plans de développement
national ont réussi à intégrer la totalité les ODD
(ciblage de 75 à 85%) en les adaptant au contexte
national. Il restait cependant un enjeu important à
Figure 19 : Représentation schématique de la mise en politique des ODD
Source : Brimont, Demailly, Vaillé (2016, p. 2)
Malgré des progrès notables, il est apparu
nécessaire d’intégrer davantage les ODD (ciblage
proche de 100%) et surtout de cerner les liens
complexes – à la fois explicites et implicites qu’ils
exercent les uns par rapport aux autres. En effet,
des interventions visant à atteindre une cible
particulière des ODD pouvait entraîner la sous-
réalisation ou l’échec d’une autre cible (exemple
du choix des investissements en infrastructures
dans l’éducation de qualité au niveau du primaire
et du supérieur). Par ailleurs, les interventions qui
ont un effet désirable immédiat peuvent également
avoir un impact indésirable à long terme (exemple
du planning familial). Certains nouveaux plans
nationaux de développement durable (Ouganda,
CURRENT SCIENCE
Arnaud Diemer et al.
relever : définir un cadre directeur pour la mise en
œuvre de l’Agenda 2030. Entre 2016 et 2018, de
nombreux pays se sont engagés dans la rédaction
d’une feuille de route visant à créer un
environnement favorable à la mise en œuvre des
ODD (Southern Voice, 2019). Ces actions
définies à l’échelle des gouvernements ont permis
d’établir un cadre de coordination institutionnelle
(Brimont & al., 2016), qui rassemble tous les
acteurs, qu’ils soient étatiques ou non, y compris
les gouvernements locaux, pour réaliser les ODD
(ceci apparaît au niveau de l’ODD 17).
Sénégal, Malawi, Côte d’Ivoire…) ont donc
cherché quelles approches devaient être
mobilisées pour mieux comprendre les
interventions et les activités qui pouvaient être
mises à profit pour atteindre rapidement plusieurs
ODD simultanément. Sous l’impulsion de la
PNUD (2020, NPA, Ouganda ; 2019, Nigeria)
mais également de l’OCDE (via sa plateforme :
OECD Knowledge Platform on Policy Coherence
for Sustainable Development1) et des relations que
le Millennium a tissées avec certains
gouvernements (MI, 2017), le modèle iSDG s’est
très vite présenté comme un outil de simulation
1
https://www.oecd.org/governance/pcsd/toolkit/tools/
CS 2 (5), 383−406 (2023) 401

CURRENT SCIENCE
répondant aux attentes des ministères de la
planification nationale. Les visions 2030, 2040 et
2050 permettent de cibler les interventions
associées qui ont le plus grand potentiel pour être
des accélérateurs des ODD et catalyser les progrès
vers la réalisation des objectifs pressentis. Dans ce
qui suit, nous souhaitons illustrer nos propos en
nous appuyant sur deux études de cas d’études
(Côte d’Ivoire et Sénégal) proposant une synthèse
des taux de réalisation des ODD. Ces rapports -
réalisés en étroite collaboration entre le
Millennium Institute et les différentes directions
Figure 20 : Taux de réalisation des ODD en Côte d’Ivoire et au Sénégal
Source : MI (2016), Côte d’Ivoire
(1) Les simulations réalisées sur le modèle Côte
d’Ivoire (notamment le scénario BAU) conduit à
une réalisation moyenne de 21% des ODD. Avec
des ajustements stratégiques supplémentaires
(scénario optimiste), il est possible d’atteindre
67% des ODD. Pour parvenir à de tels résultats,
une mobilisation importante de ressources est
nécessaire, soit une augmentation des dépenses
(15% du PIB contre 4,5% dans le scénario
moyen), une augmentation des recettes publiques
(12% du PIB au lieu de 4% dans le scénario
moyen) et le renforcement des politiques de
redistribution et de genre. Les interventions visant
à améliorer la gouvernance, la santé, l’éducation,
les questions de genre et l’adaptation au
changement climatique ont des impacts
CURRENT SCIENCE
Arnaud Diemer et al.
du Ministère de l’Economie, des Finances et du
Plan -intègrent les trois scénarios (BAU, moyen,
optimiste) décrits précédemment, les interventions
qui génèrent le plus d’impacts, les synergies
négatives indiquant qu’une meilleure performance
peut être obtenue à travers une réallocation des
ressources entre les interventions prévues, les
synergies positives qui contribuent
substantiellement au progrès vers les ODD, mais
également le séquençage et le calendrier (timing)
de mise en œuvre desdites interventions (ceci pour
mieux en bénéficier).
Source : MI (2017), Sénégal
substantiels sur tous les objectifs. Pour les ODD 1,
2, 5, 10, 11 14 et 15, les résultats de la simulation
indiquent des synergies positives, résultant de
l’amélioration des conditions favorables et des
mécanismes de renforcement causés par des
politiques dans d’autres domaines. Pour les ODD
6, 9 et 17, les résultats font apparaître des
synergies négatives, principalement dues au fait
que plusieurs politiques individuelles
permettraient de réaliser plus de 100% de ces
objectifs, de sorte que l’amélioration
supplémentaire apportée par les autres politiques
n’est pas visible dans le scénario global des ODD.
(2) Le modèle T21 a été introduit au Sénégal en
2009 suite à un partenariat entre le gouvernement
sénégalais, le Millennium Institute et la Fondation
CS 2 (5), 383−406 (2023) 402

CURRENT SCIENCE
Biovision (BV). En 2017, une mise à jour du
modèle 21 a été proposée afin de faciliter
l’intégration des ODD dans les analyses
prospectives. Le nouveau modèle baptisé T21-
iSDG-Sénégal a été enrichi de 19 secteurs
spécifiques, développés et inclus dans le modèle
d’origine (30 secteurs) pour mieux appréhender
les dynamiques de développement. La sphère
sociale est ainsi composée des secteurs
urbanisation, migration, HIV/AIDS, ressources en
matière de santé, nutrition et sécurité alimentaire.
La sphère environnementale est constituée de
l’empreinte écologique et de la dégradation des
terres. La sphère économique est composée des
facteurs sociaux agricoles, des ressources
économiques agricoles, des assurances agricoles,
des semences agricoles, de la comptabilité
agricole, des émissions et des inputs agricoles, des
stocks d’animaux, de la pêche, de la forêt, des
mines, des télécommunications et de la
décentralisation. Les résultats des trois scénarios
testés (BAU, moyen, optimiste) montrent que la
mise en œuvre du scénario optimiste aurait un
impact significatif sur le niveau de réalisation des
ODD à l’horizon 2030 (61,3% vs 29% dans le
scénario BAU).Toutefois, en termes absolus, le
taux de réalisation reste assez modeste pour les
ODD 4, 5 et 9. Les interventions qui génèrent le
plus d’impacts sont celles liées à : (i)
l’investissement pour l’adaptation au changement
climatique; (ii) l’augmentation de la pression
fiscale ; (iii) la combinaison de politiques
d’agriculture, élevage, pêche et aquaculture, et
agroalimentaire; et (iv) la bonne gouvernance.
L’analyse des synergies permet d’identifier les cas
où les rendements décroissants ralentissent le
progrès vers les ODD, en particulier pour les
objectifs 1, 3, 10 et 16. Par conséquent, il est
nécessaire d’identifier des politiques alternatives
favorables aux groupes cibles. Les synergies
négatives relatives aux objectifs 6, 7, et 11,
indiquent qu’une meilleure performance pourrait
être obtenue via une réallocation des ressources
entre les interventions prévues.
Précisons pour conclure, que dans les deux cas
d’études présentés ci-dessus, la contribution
globale des synergies induites par les simulations
du modèle iSDG est nettement positive, ce qui
souligne l’importance d’une planification et d’une
mise en œuvre intégrée des interventions visant à
atteindre les ODD simultanément. Ces
CURRENT SCIENCE
Arnaud Diemer et al.
interventions concernent principalement
l’amélioration de la gouvernance, la répartition
des revenus, les politiques de genre et
d’adaptation au changement climatique, ainsi que
des dépenses supplémentaires dans l’éducation, la
formation en agriculture durable, la santé et la
planification familiale.
4. Conclusion
Depuis 2015, les pays du Nord et du Sud sont
tenus de définir une feuille de route en matière de
développement durable. Ce que l’on a coutume
d’appeler les 17 ODD (Objectifs du
Développement Durable) est ainsi un appel à
l’action afin de promouvoir une certaine forme de
prospérité à l’échelle de la planète. Mettre fin à la
pauvreté, répondre à des besoins sociaux
(éducation, santé, emploi décent…) ou encore
protéger l’environnement tout en luttant contre le
changement climatique constituent une vision
commune à l’horizon 2030. Pour aider les États à
mobiliser tous les acteurs et à prendre des
décisions urgentes, il est nécessaire à la fois de
proposer des solutions qui améliorent
simultanément tous les ODD et de démontrer les
nombreuses possibilités de mise en œuvre. Le
modèle iSDG est un outil de simulation politique
conçu pour aider les décideurs et les parties
prenantes à comprendre le réseau complexe
d'interconnexions entre les ODD. Contrairement
aux bases de données et aux indicateurs
macroéconomiques qui fournissent une mesure de
la situation d'un pays, l'iSDG se concentre sur les
interactions dynamiques au sein du système des
ODD pour révéler les meilleurs chemins et la
meilleure progression vers la réalisation des ODD.
S’appuyant sur une méthodologie - la dynamique
des systèmes, le modèle iSDG propose des
simulations à long terme afin d’optimiser la
dépense ou la recette publique. De ce fait, l’effet
multiplicateur d’un investissement ne se limite
plus à la sphère économique, il crée également
une dynamique dans la sphère sociale et
environnementale.
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