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ORGANISATION

JUDICIAIRE
Présentée par Maitre AKMEL Mélèdje Marc Florent,
Maitrise de recherche en Criminologie,
Licence de Lettres Modernes
Maintenance informatique – Réseau - Conception
Attaché des Greffes et Parquets,
Assistant du Directeur de l’Ecole des Greffes

Promotion 2023-2024

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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
LE CONTENU DU COURS

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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
INTRODUCTION
La justice, considérée comme le dernier rempart de la société, serait le lieu de
l’injustice, de l’arbitraire, de règlement de compte voire même de désordre si des moyens
juridiques importants n’avaient pas été prévus pour sa mise en œuvre.
La justice ne désigne pas seulement un idéal moral, une vertu singulière ou un
concept philosophique, elle constitue également un corps de règles, de statuts, de
pratiques répétées et de discours réglés dont la totalité organisée définit une Institution.
L’institution judiciaire peut être définie comme l’ensemble des organes à qui la
souveraineté nationale a officiellement délégué le pouvoir d’interpréter la loi et d’en
assurer l’application par l’exercice de la faculté de trancher entre le juste et l’injuste.
Cette fonction judiciaire fragile, nécessite d’être assurée par une institution qui lui
confère stabilité, continuité et cohérence. L’étymologie du mot « institution » provient en
effet d’un verbe latin qui signifie « tenir debout ». Aborder le thème de la justice par le
prisme de l’institution judiciaire revient donc à se demander comment la justice tient-elle
debout dans notre société ? Au nom de quels principes, selon quels mécanismes, au
moyen de quels organes, avec quels acteurs la justice passe-t-elle du statut de valeur
abstraite à celui d’autorité politique pouvant requérir l’emploi de la force publique pour
assurer l’application de ses décisions ?
La réponse à ces questions passe par la connaissance des diverses institutions
juridictionnelles constitutives de notre justice. Notre système judiciaire est en effet formé
par de multiples juridictions : il s’agit des organes chargés de trancher les litiges en faisant
application d’une règle de droit. Le droit européen utilise plutôt le mot « tribunal » pour
décrire ces mêmes organes chargés de « trancher, sur la base de normes de droit et à
l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa compétence (Cour
Européenne des droits de l’homme, 22 octobre 1984). Les institutions juridictionnelles
désignent ainsi les organes que les règles d’organisation, de composition et de procédures
autorisent à rendre des décisions de justice dotées de l’autorité de la chose jugée.
L’article 143 nouveau de la Constitution dispose que « La justice est rendue sur
toute l’étendue du territoire national, au nom du peuple ivoirien, par la Cour de
Cassation, le Conseil d’Etat, la Cour des Comptes, les Cours d’Appel, les tribunaux de
première instance, les tribunaux administratifs et les Chambres régionales des
Comptes. »
Les modalités d’organisation et de fonctionnement de ces institutions, les principes
constitutionnels qui en définissent l’ordonnancement et le rôle, la description de
l’étendue de leur compétence, leur composition et le statut des personnes y collaborant
constitueront autant d’objets pour notre étude. Répondre à toutes ces problématiques
revient à décrire l’organisation du système judiciaire ivoirien. C’est l’objet de notre cours.
L’organisation judiciaire désigne « l’ensemble des règles qui déterminent la hiérarchie, la
composition et la compétence des juridictions ainsi que le statut des magistrats et
auxiliaires de justice ».
L’étude de l’organisation judiciaire de la Côte d’Ivoire impose avant tout de
comprendre sur quels fondements historiques, principes constitutionnels et sur quelles
modalités de fonctionnement est bâtie notre justice, avant de procéder à l’étude des
multiples juridictions et à l’analyse de leur répartition au sein des deux ordres
juridictionnels, puis aborder le rôle et le statut des personnels judiciaires concourant à la
bonne marche de la justice pour enfin terminer sur les juridictions supranationales.
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TITRE I :REPERES HISTORIQUES DES INSTITUTIONS JUDICIAIRES
Parler des repères historiques des institutions judiciaires revient à décrire l’histoire
de la mise en place de celles-ci en Côte d’Ivoire. Nous savons tous que l’Etat de Côte
d’Ivoire n’a accéder à la souveraineté internationale, c’est-à-dire à l’indépendance, que le
07 août 1960. Il est aussi vrai, qu’avant cette date, existait la justice prise dans son
ensemble dans toutes les communautés vivant sur cette terre appelée Côte d’Ivoire. Ces
différents peuples ou communautés avaient chacune son système judiciaire. En effet, la
Côte d’Ivoire compte quatre grandes aires culturelles que sont :
-l’aire culturelle MANDÉ ;
-l’aire culturelle AKAN ;
-l’aire culturelle GOUR ;
-l’aire culturelle KROU.
Chacune de ces aires culturelles possède son propre système judiciaire avec même
des différences à l’intérieur de celle-ci.
A l’indépendance, s’est posé la question du choix d’un système judiciaire et au-
delà d’un droit à appliquer aux citoyens ivoiriens. L’option du droit français s’est imposé
dans un souci d’unité au sein de l’Etat nouvellement crée. Il sera étudié successivement :
-la mise en place des institutions judiciaires en France ;
-la justice pendant la colonisation Côte d’Ivoire;
-la justice postcoloniale.

SECTION 1 : LA MISE EN PLACE DES INSTITUTIONS JUDICIAIRES EN FRANCE


L’adoption du droit français comme celui devant régir les rapports sociaux entre
les ivoiriens à conduit le pouvoir d’alors à faire sienne tout le système judiciaire français.
Or celui-ci possédait déjà, une histoire, des siècles de pratiques. Alors question :
Comment a évolué le système judiciaire français depuis le moyen-âge jusqu’à nos jours.
La réponse peut être dans le livre de Roger PERROT 1 intitulé « Institutions
judiciaires ».En effet, cet auteur divise la mise en place des institutions judiciaires en trois
périodes. Mais la justice existait depuis l’Ancien Régime.

Paragraphe 1 : L’Ancien Régime


La justice de l’Ancien Régime se caractérisait par la diversité et la multiplicité des
juridictions. A côté, des juridictions royales (bailliages, sénéchaussées, présidiaux), il
existait des juridictions seigneuriales et des juridictions canoniques dont, à la fin de
l’Ancien Régime, la compétence se limitait aux questions de mariages et d’état civil. On
trouvait en outre des juridictions spécialisées en certaines matières (prévôtés, tribunaux
consulaires en matière commerciale, tribunaux d’amirauté en matière maritime) et même
certaines juridictions de nature administrative (la Cour des aides en matière fiscale et la
Chambre des comptes du parlement de Paris).
A cela s’ajoutaient au sommet de la hiérarchie les parlements (qui dans chaque
province jouaient le rôle de juridictions d’appel), et enfin, le Conseil des Parties qui
siégeaient aux côtés du Roi.
Cet enchevêtrement engendraient de nombreux conflits de compétence qui rendaient
souvent malaisé le choix de la juridiction appelée à connaître du litige d’une part et

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Professeur émérite de l’Université Panthéon-Assas (Paris II) (1920-2014)
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d’autre part le fonctionnement de la justice présentait lui-même de très grave
inconvénient qui sont :
-la lenteur des procès en raison de la multiplicité abusive des recours (par le jeu de cinq
ou six appels successifs) ;
-les privilèges de juridictions dont bénéficiaient certaines catégories de justiciables (la
noblesse et le clergé notamment) ;
La vénalité2 des charges de judicature qui obligeaient les plaideurs à payer leurs
juges.
À la fin de l’Ancien Régime, la réforme de la justice était un souhait à peu près unanime
qui trouva de nombreux échos dans les cahiers de doléances présentés aux États
Généraux en 1789. Répondant à ce vœu, la Révolution française commença par faire table
rase du passé. Dans la nuit du 4 août 1789, les juridictions seigneuriales furent abolies, en
même temps que les privilèges de juridictions et la vénalité des charges. Les tribunaux
étaient maintenus, mais à titre provisoire ; et quelques mois plus tard un décret du 3
novembre 1789 décidait que les parlements ne reprendraient plus leurs fonctions. Le
champ était libre pour l’édification d’une nouvelle organisation judiciaire qui s’est fait en
trois grandes étapes.

Paragraphe 2 : Première période (1790-1810) : Mise en place des Institutions


Elle commence par la prise de la loi des 16 et 24 août 1790. Cette loi, votée par
l’Assemblée constituante après des débats très approfondis, fut de l’avis unanime une
des plus grandes lois de l’histoire politique française.
D’abord, le législateur commença par poser quelques principes fondamentaux dont
certains régissent de nos jours nos institutions modernes : le principe de la séparation des
pouvoirs, le principe de l’égalité devant la justice, le principe du double degré de
juridiction.
Ensuite, après avoir posé ces principes, l’Assemblée constituante s’attacha à
instituer de nouvelles juridictions dont certains subsistent encore sous des noms
différents. On peut citer notamment les tribunaux de district qui sont les ancêtres de nos
tribunaux de grande instance (ou tribunaux de première instance dans le contexte
ivoirien). Fait curieux cependant, une juridiction de l’Ancien Régime a survécut : il s’agit
des anciennes juridictions consulaires chargées de statuer sur les litiges commerciaux qui
parce qu’elles étaient composées de juges élus, trouvèrent grâce aux yeux du législateur
de 1790. Elles furent donc maintenues sous le nom de tribunaux de commerce. On peut
également citer l’arbitrage, ce mode de juridiction très spécial par lequel les parties en
conflits choisissent un simple particulier qui aura pour mission de juger leur litige.
Enfin la loi de 1790 contenait peu de dispositions sur le personnel judiciaire. En
des dispositions sur l’élection des juges, rien n’était dit au sujet des auxiliaires de justice.
Malgré les avancées notables, il faut reconnaître que la loi de 1790 présentait des défauts.
On peut citer notamment l’absence de juridiction de cassation et de conseil de
prud’hommes (Tribunal du travail en droit ivoirien). Cette situation va être corrigée par
la loi des 27 novembre et 1er décembre 1790 qui instituera entre autres juridictions celles
précitées.

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Le fait d’être cédé pour de l’argent au mépris des valeurs morales – bassesse, corruption /caractère de ce qu’il est
possible d’acquérir à prix d’argent ou encore de quelqu’un qui est prêt à se vendre par intérêt
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Paragraphe 3 : Deuxième période (1810-1958) : Stabilité des Institutions
En 1810, la loi du 20 avril intitulé « loi sur l’organisation de l’ordre judiciaire et de
l’administration de la justice » a constitué durant tout le XIXème siècle et la première
moitié du XXème, la véritable charte de l’organisation judiciaire en France. Cette loi
synthétisait toutes les réformes accomplies au cours des années précédentes. Le pivot de
cette organisation était constitué par un tribunal civil dans chaque arrondissement,
composé de trois juges nommés par le gouvernement ; avec au second degré, une cour
d’appel regroupant plusieurs départements ; et au sommet, la Cour de cassation.
À partir de ce texte, commence une période de remarquable stabilité qui devait durer
jusqu’au milieu du XXème siècle. La stabilité des textes n’exclut pas toutefois certaines
évolutions importantes. Il s’agit d’abord de la création de nombreuses juridictions
spécialisées que l’on a coutume d’appeler des « juridictions d’exceptions ». L’on note
aussi l’apparition d’une véritable justice administrative. Désormais, à côté des
juridictions traditionnelles, dites de l’ordre judiciaire, il existe des juridictions
administratives chargées de juger les procès qui mettent en cause l’administration. La
stabilité des textes ne doit pas faire illusion. Une réforme d’ensemble s’imposait et elle fut
réalisée en 1958.

Paragraphe 4: Troisième période (après 1958) : Rénovation des Institutions


Les principales rénovations réalisées portent tout à la fois sur les juridictions et sur le
personnel judiciaire.
En ce qui concerne les juridictions, la terminologie a changé : les tribunaux civils sont
devenus les tribunaux de grande instance et l’on a vu la création des Cours administrative
d’appel.
Quant au personnel judiciaire, elle a vu la prise de l’ordonnance 58-1270 du 22 décembre
1958 portant statut de la magistrature et l’attribution du statut de fonctionnaire au corps
des greffiers.

SECTION 2 : LA JUSTICE COLONIALE


A l’origine, la justice coloniale a été organisé par « deux décrets, ceux des 6 août 1901 et
15 avril 1902 sous la haute autorité d’un chef de service résidant à Conakry et ayant tous
les pouvoirs des procureurs généraux, sans en avoir le titre »3 Selon le Pr Séraphin NENE
BI BOTI, la justice coloniale présente des traits originaux et variés qui la différencient de
la justice traditionnelle et de la justice métropolitaine, étant entendu que cette dernière
reste le modèle de référence.
Pendant la période coloniale, cohabitaient deux systèmes judiciaires : le système
judiciaire de droit local ou coutumier s’appuyant sur les divers droits coutumiers
inhérents aux différentes aires culturelles et s’appliquant aux citoyens africains et le
système français s’appliquant aux européens vivant dans la colonie de Côte d’Ivoire. Le
dualisme juridique a engendré logiquement deux ordres de juridictions. Ainsi les
institutions judiciaires coloniales se divisaient en tribunaux coutumiers de droit local
encore appelés tribunaux indigènes et en tribunaux de droit français ou tribunaux de
droit commun.

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Roger Villamur et Léon Richaud cité par Séraphin Néné Bi Boti in Introduction historique au droit ivoirien
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Paragraphe 1 : Les tribunaux indigènes
« Sont considérés comme indigènes et justiciables des tribunaux indigènes, les individus
originaires des possessions étrangères comprises entre ces territoires qui n’ont pas dans
leurs pays d’origines, le statut de nationaux européens ». C’est ainsi qu’est définit
l’indigène dans le décret du 16 août 1912 portant réorganisation de la justice indigène en
Afrique Occidentale Française (AOF). L’idée ici est que l’autochtone qui est régi ou
gouverné par des coutumes locales qui constituaient son statut civil ou personnel
particulier devait en conséquence porter son litige l’opposant à une autre indigène devant
les juridictions dites de droit local dont l’organisation et le fonctionnement seront ci-
dessous étudiées.

A- L’organisation des juridictions de droit local


Ces juridictions ont été créées par le décret du 10 novembre 1903 qui affirme en son
article 1er que « la justice est rendue sur toute l’étendue du territoire de l’AOF, aux
indigènes par les tribunaux indigènes ». Par la suite, plusieurs textes sont venus apporter
des modifications à l’organisation de la justice indigène notamment le décret du 03
décembre 1931 promulgué le 20 janvier 1932 et celui du 26 juillet 1944. Cette organisation
est hiérarchisée et se présente par ordre de degré croissant comme suit :

1-Le tribunal du village


Ce tribunal est composé des notables du village et présidé par le chef du village. Il
est investi du pouvoir de conciliation en matière civile et commerciale et d’un pouvoir
répressif en matière de simple police

2-Les tribunaux de canton


Ils sont institués au chef-lieu de canton par arrêtés du Gouverneur Général. Ces
arrêtés fixaient la composition, le fonctionnement, le ressort et la compétence
d’attribution de ces tribunaux qui avaient pour finalité d’alléger la charge des tribunaux
de subdivision.
La composition de ces tribunaux est la suivante : Le chef de canton assisté de deux
notables, donc tous des indigènes. Ils connaissaient des affaires civiles, commerciales et
correctionnelles en premier ressort.

3-Les tribunaux de subdivision


Ils avaient une compétence générale en premier ressort pour tout ce qui concernait
la famille et l’état des personnes. En matière d’obligation et de successions, ils n’étaient
compétents que si l’intérêt du l’affaire était inférieur à 50 000 francs.
Les tribunaux de subdivision encore appelés tribunaux de premier degré étaient présidés
par des administrateurs (chef de subdivision, adjoint au commandant de cercle ou
fonctionnaires désignés par le gouverneur) avec deux assesseurs de statut personnel
coutumier.

4-Le tribunal de cercle


Situé au chef-lieu de chaque cercle, le Tribunal de cercle ou tribunal de 2ème degré
est présidé par le chef de cercle(ou adjoint au commandant de cercle ou fonctionnaire
désigné par le Gouverneur).

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Ce tribunal comportait en outre deux assesseurs de statut personnel coutumier
choisi parmi les notables et nommés par le Gouverneur.
Le tribunal de cercle était compétent en matière civile, commerciale et correctionnelle et
en appel de tous les jugements rendus par les tribunaux de cantons et subdivisions de
son ressort : le tribunal de cercle avait donc une double compétence en premier ressort et
en appel.
En premier ressort, il connaissait de toutes les affaires dont l’intérêt était supérieur
à 50 000 francs, en dernier ressort, les affaires dont l’intérêt était en inférieur à 15 000
francs.

5-Le tribunal colonial de droit local


Devenu en 1954 le tribunal supérieur de droit local, c’est un tribunal spécial crée
pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues en premier ressort par les
tribunaux de cercles(ou de second degré). Il siégeait au chef-lieu de chaque territoire.
Il est composé d’un magistrat, président du tribunal ou le juge de paix à compétence
étendue du chef-lieu du territoire, de deux administrateurs et de deux notables de statut
personnel coutumier.

6-La chambre d’homologation


Elle est instituée au chef-lieu de la Cour d’appel et statue sur l’homologation des
jugements des tribunaux de cercles prononçant des peines supérieures à cinq ans
d’emprisonnement.

7-La chambre d’homologation de l’AOF


Cette chambre coiffait les juridictions de droit local. Elle comprenait sept (07) membres :
-trois magistrats, membres de la cour d’appel ;
-deux fonctionnaires nommés par le gouverneur général ;
-deux assesseurs de statut personnel coutumier choisis par le président de la chambre
d’annulation sur une liste de douze notables dressé par le gouverneur général.
Le pourvoi en annulation ne pouvait être formé que pour incompétence ou pour violation
de la loi. Il était ouvert aux parties et au procureur.

B- Le fonctionnement de la justice indigène


Comme leur nom l’indique, les compétences des tribunaux indigènes ne devaient pas
s’étendre au-delà des affaires indigènes. En effet l’article 75 du décret du 10 novembre
1903 dispose que : « La justice indigène appliquera en toute matière des coutumes locales
en tout ce qu’elles n’ont pas de contraire aux principes de la civilisation française. Dans
le cas où les châtiments corporelles seraient prévus, il leur sera substitué
l’emprisonnement ».
La compétence « ratione personae » de ces juridictions s’étend aux seules qui n’ont pas
renoncé à leur statut local et la compétence « ratione materiae » est la coutume des parties.
Mais en cas de conflit, c’est la coutume de la femme qui s’applique dans les affaires
familiales, la coutume du défunt dans les matières de successions, la coutume du
donateur en matière de donation, la coutume du lieu de conclusion du contrat, et dans
les autres cas, la coutume du défendeur.
Au total, en créant la justice dite indigène, le colonisateur cherche à faire table du passé,
de l’existant, c’est-à-dire la justice traditionnelle, et à imposer sa loi et son sens de la

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justice. Ainsi l’expression justice indigène désigne le système judiciaire repensé et
organisé par le colonisateur et encadré par les règles qu’il aura édictées.

Paragraphe 2 : Les tribunaux de droit commun


Ici, il faut noter un paradoxe. En effet, le droit applicable à une minorité constituait le
droit commun.

A- Organisation de la justice de droit français dans les colonies


Trois sortes de juridictions composaient la justice française. Ce sont :
-les juridictions pénales ;
-les juridictions civiles et commerciales ;
-le tribunal du travail.

1-Les juridictions pénales


Les juridictions pénales ont acquis plus d’importance depuis la prise du décret du 30 avril
1946 qui supprimait toute compétence pénale à la justice indigène. On peut citer
notamment :

a- La cour d’appel
Elle siégeait à Dakar et sa compétence sur toute l’AOF et le Togo. Elle avait deux chambres
détachées : une à Bamako et l’autre à Cotonou. En 1952, fut créé la cour d’appel d’Abidjan.

b- La cour d’assises
La Cour d’assises existait dans chaque territoire sauf en Mauritanie dont le ressort est
rattaché à celui de Dakar. C’est une juridiction criminelle présidée par un haut magistrat
et comporte un jury non professionnel.

c- Les justices de paix à compétence étendue


Créées en 1928 elles ont été réorganisées par un décret de 1954. Elles jugent en matière de
simple police et en matière correctionnelle toutes les infractions commises.

2- Les juridictions civiles et commerciales


Elles comprennent les justices de paix à compétence étendue, les tribunaux de première
instance et la cour d’appel.

a- Les tribunaux de première instance


Par le biais des décrets des 6 août 1901 et 15 avril 1902, le tribunal de première instance
de Bingerville a été créé. Il se compose d’un juge-président, d’un procureur de la
République, d’un juge suppléant et d’un greffier-notaire.
En matière civile et commerciale, il statue, en premier et dernier ressort sur tous les litiges
dont la connaissance soit en dernier, soit en premier ressort, est attribuée par la législation
métropolitaine aux justices de paix. Il connaît également de tous litiges qui, en France,
sont de la compétence des tribunaux civils d’arrondissement.

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b- La cour d’appel
La cour d’appel juge en appel les jugements rendus en premier ressort par le tribunal de
première instance. Elle recevait en appel les affaires dont le montant était supérieur à
45 000 Francs.
La cour d’appel était collégiale : elle siégeait avec un président et deux conseillers

c- Les justices de paix à compétence étendue (abrogé par la loi n° 64-227 du 14 juin
1964)
Le fonctionnement des tribunaux de première instance, réputé couteux, au formalisme
trop rigoureux, s’est révélé peu compatible avec la vie coloniale. Selon le Pr NENE BI
BOTI, une réglementation spéciale, adaptée aux conquêtes et à l’aménagement des
territoires a prévu une institution simple, maniable, voire malléable : la justice de paix à
compétence étendue, forme de juridiction inconnue en métropole.
La Cour de cassation rappelle cependant, que les justices de paix à compétence
étendue « sont des tribunaux de premières instance proprement dits, rendant comme
ceux-ci avec les mêmes attributions, la justice dans l’étendue du ressort qui leur est
assigné. »

3-La justice du travail


Cette justice a été instituée en 1937 en AOF. La justice du travail est du ressort de la Cour
d’appel, qui choisit en la circonstance, les arbitres. Le pourvoi en cassation se fait devant
la Cour de cassation en France.

B- Le fonctionnement des tribunaux de droits français


Les tribunaux de droits français connaissent des litiges nés entre les français, européens,
assimilés ou entre eux et les indigènes.

Section 3 : La justice post coloniale


La mise en place des institutions judiciaires après l’indépendance s’est faite en plusieurs
étapes.

Paragraphe 1 : La refonte de l’appareil judiciaire


Après l’accession à la souveraineté, le tout jeune Etat a procédé à une refonte de
l’appareil judiciaire hérité de l’époque coloniale. Le but est de mettre en place une
organisation judiciaire moderne et adaptée à ses besoins. Elle a, cet effet, choisi le système
d’unité de juridiction à travers la loi n°61-155 du 18 mai 1961 portant organisation
judiciaire. En effet, un seul ordre a été créé en tenant compte de considérations
pragmatiques. D’une part, il y avait très peu d’affaires ; ce qui ne justifie pas la dépense
d’une création d’un Conseil d’Etat, d’autant plus que l’organisation judiciaire manque de
cadres. D’autre part, l’existence d’un Conseil d’Etat aurait exigé la création d’un Tribunal
des conflits. Enfin, les usagers n’ont pas le temps ni la patience de jouer au jeu subtil de
la recherche du juge compétent.
La loi du 18 mai 1961 a donc choisi la méthode de l’efficacité dans la simplicité
pour instituer une nouvelle organisation judiciaire.
Cette loi de 1961 a subi plusieurs modifications. L’article 1er de cette loi dispose
que « Dans la République de Côte d’Ivoire, la Justice est rendue en matière civile,

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commerciale, pénale et administrative par la Cour Suprême, des cours d’appel, des
tribunaux de première instance et des sections détachées de ces tribunaux.
Le siège, le ressort et la composition, ainsi que le nombre des chambres des cours
d’appel, des tribunaux de première instance et des sections détachées des tribunaux sont
fixés par décret ».
Il ressort de cet article que la justice, en Côte d’Ivoire, est rendue par les tribunaux de
première instance et les cours d’appel sous le contrôle de la Cour suprême.
Ce dispositif institutionnel a fonctionné jusqu’en 2000 où la Constitution du 1er août a
opéré un changement pour mettre fin l’ordre juridictionnelle unique.

Paragraphe 2 : La modernisation de l’appareil judiciaire


L’organisation judiciaire ivoirienne est régie par la loi n°99-435 du 06 juillet 1999
modifiant la loi n°61-155 du 18 mai 1961 portant organisation judiciaire.
Cette phase de modernisation a débuté avec l’adoption de la Constitution du 1er août
2000. Il ressort de celle-ci l’éclatement de la Cour suprême en plusieurs juridictions
suprêmes que sont la Cour de Cassation, le Conseil d’Etat et la Cour des comptes. Cette
réforme consacre ainsi la création de deux ordres juridictionnels : l’ordre judiciaire et
l’ordre administratif et le passage de l’Autorité judiciaire à un Pouvoir judiciaire.
Elle s’est poursuivie avec l’adoption de la loi numéro 2016-886 du 08 novembre
2016 portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire modifiée par la loi
constitutionnelle n°2020-348 du 19 mars 2020. De cette modification, il ressort que la
justice conserve son statut de pouvoir ; mais il faut noter que la Cour suprême a été
purement et simplement supprimé au profit des juridictions suprêmes précitées qui sont
représentatives du pouvoir judiciaire aux termes de l’article 144 de la nouvelle
Constitution. Elles contrôlent l’activité des Cours d’appels, des tribunaux de première
instance, des tribunaux administratifs et des chambres régionales des comptes.
La mise en place de ces différentes juridictions repose sur de grands principes.

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TITRE II : LES GRANDS PRINCIPES QUI GOUVERNENT
L’ORGANISATION JUDICIAIRE DE LA CÔTE D’IVOIRE
Les penseurs politiques ont affirmé dès le XVIIème siècle l’importance de la séparation
entre la puissance de juger et la puissance législative ou exécutrice. Ce principe est
consacré par l’article 139 alinéa 1 de la constitution ivoirienne qui affirme l’indépendance
du pouvoir judiciaire dont l’exercice se fait à travers le service public de la justice qui
repose sur plusieurs principes.

CHAPITRE I : INDÉPENDANCE DU POUVOIR JUDICIAIRE (ART 139


CONSTITUTION)
L’indépendance du pouvoir judiciaire ne constitue pas un privilège octroyé au corps
judiciaire dans son propre intérêt, mais au contraire une façon de garantir la prééminence
de l’Etat de droit au bénéfice des justiciables. Elle s’analyse à la fois comme une
indépendance fonctionnelle des juridictions par rapport aux autres pouvoirs, et comme
une indépendance statutaire accordée aux magistrats.

SECTION 1 : INDÉPENDANCE DES JURIDICTIONS (PRINCIPE DE LA


SEPARATION DES POUVOIRS)

L’indépendance exige avant tout que le fonctionnement des juridictions soit


possible sans que les pouvoirs politiques, législatif et exécutif, ne s’immiscent dans les
procédures et ne viennent peser ou influencer sur les décisions des magistrats. En effet,
ce principe constitutionnel qui découle du principe de la séparation des pouvoirs 4
implique le respect de la spécificité des fonctions dévolues aux juridictions « sur
lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur, ni le gouvernement(qui ne doivent pas
avoir la possibilité) de censurer les décisions des juridictions, d’adresser à celles-ci des
injonctions ou de se substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur
compétence »(Décision du Conseil Constitutionnel français du 22 juillet 1980)

Paragraphe 1 : Indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir législatif


Dans la tradition française, le pouvoir judiciaire ne peut prendre « aucune part à
l’exercice du pouvoir législatif ni empêcher ou suspendre l’exécution des décrets du corps
législatif à peine de forfaiture » (loi des 16 et 24 août 1790)
Les magistrats ne peuvent en conséquence se substituer au travail normatif du
législatif. Il est en effet défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale
et réglementaire. Certes cela n’empêche pas le développement informel d’une
jurisprudence, mais cela la prive de toute force normative contraignante. En outre le juge
se trouve obligé d’appliquer la loi, et ne peut tirer prétexte de son obscurité ou de lacunes
pour refuser de statuer(déni de justice). Le contrôle de constitutionnalité des lois
constitue en revanche une forme d’immixtion judiciaire au cœur du pouvoir législatif.

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La théorie de la séparation des pouvoirs vise à séparer les différentes fonctions de l’Etat, afin de limiter
l’arbitraire et d’empêcher les abus liés à l’exercice des missions souveraines. Montesquieu distingue trois types de
pouvoir : l’exécutif(le gouvernement), le judiciaire(les juges) et le législatif (Assemblée nationale + Sénat :
représentant du peuple. Ainsi, l’exécutif met en œuvre les lois conçues par le législatif, lois dont l’application est
confiée au pouvoir judiciaire. Cette relation triangulaire permet à la société de s’équilibrer.
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En retour, le législateur est censé ne pas pouvoir intervenir dans les affaires
pendantes devant les juridictions. Il existe néanmoins plusieurs moyens pour le pouvoir
législatif de contourner cette règle.
C’est tout d’abord le cas pour les lois rétroactives, qui sont susceptibles de créer au
bénéfice ou au détriment du justiciable un droit nouveau qui remet en cause ce qui a déjà
été jugé.
Ensuite, certaines lois interprétatives, destinées à préciser le sens et la portée d’une
loi antérieure, prennent effet à la date de la loi interprétée. Pour limiter cette forme
d’immixtion législative dans la fonction judiciaire, il faut que la loi rétroactive soit
justifiée par un « impérieux motif d’intérêt général » selon la Cour de cassation française.
Enfin, les lois de validation constituent une autre forme d’ingérence du pouvoir législatif
dans la fonction juridictionnelle : elles consistent à valider rétroactivement l’existence
d’un acte administratif pour éviter son annulation par le juge administratif ou pour priver
d’effet une annulation déjà prononcée par lui.

Paragraphe 2 : Indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir exécutif


Le principe est affirmé par l’article 139 alinéa premier qui dispose que « le pouvoir
judiciaire est indépendant ». Mais cette indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif est
limitée.
D’abord le pouvoir exécutif se trouve dans certains cas protégé de toute ingérence
du juge dans les affaires politiques : en vertu de la théorie des actes du gouvernement ni
le juge administratif ni le juge judiciaire ne peuvent connaître de certains actes considérés
comme purement politiques, tel que les actes diplomatiques et les actes organisant les
rapports entre le gouvernement et le parlement.
Ensuite, la séparation est incomplète entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir
exécutif. En effet, aux termes de l’article 81 alinéa 2 de la Constitution « Le
gouvernement est chargé de la mise en œuvre de la politique de la Nation telle que définie
par le Président de la République. » Or la politique pénale entre dans ce cadre général et
est conduit par le Ministère de la justice.
Enfin, l’article 139 alinéa 2 de la Constitution de la IIIème République place
l’indépendance du pouvoir judiciaire sous la protection directe du Président de la
République. En effet cet article dispose que « Le Président de la République est le garant
de l’indépendance du pouvoir judiciaire 5 . Il est assisté par le Conseil Supérieur de la
Magistrature.»

SECTION 2 : INDÉPENDANCE DES MAGISTRATS


L’indépendance fonctionnelle de l’institution judiciaire ne suffit pas à garantir
l’indépendance de la justice. Encore faut-il que les magistrats bénéficient d’un statut les
mettant à l’abri des pressions ou menaces qui pourraient peser sur leur faculté de juger.

5
Il faut noter une évolution depuis les premières Constitutions jusqu’à cette dernière. En effet la première
Constitution parlait d’Autorité judiciaire où le Président de la République(PR) présidait le Conseil Supérieur de la
Magistrature(CSM). A la faveur de la Constitution de 2000, l’on est passé de l’autorité au Pouvoir judiciaire avec
comme président du CSM le PR. La dernière Constitution de novembre 2016 modifiée le 19 mars 2020 a repris le
terme de pouvoir judiciaire. Mais le PR n’est plus le Président du CSM ; il ne fait que nommer la personnalité qui
doit le diriger parmi les hauts magistrats en fonction ou à la retraite.
13
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L’indépendance de la magistrature résulte donc à la fois de dispositions statutaires et
constitutionnelles.

Paragraphe 1 : Dispositions statutaires


Le statut de la magistrature constitue un corps de règles énonçant des garanties
renforcées par rapport au statut général de la fonction publique, qui assure aux magistrats
des conditions d’exercice de leur profession qui soient en conformité avec l’indépendance
de la justice. Ce statut se doit en somme de concilier le statut d’agent public des magistrats
et les exigences tenant à leur appartenance au pouvoir judiciaire. C’est la Constitution qui
prévoit ce statut en son article 101. Si le statut de la magistrature s’applique à l’ensemble
des magistrats, il convient de préciser qu’il existe des règles différenciées pour les
magistrats du siège et du parquet.
L’indépendance des magistrats du siège est garantie, d’une part par l’absence
totale de subordination hiérarchique dans l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles
et d’autre part par leur inamovibilité, qui résulte de l’article 140 de la Constitution.
Les membres du ministère public ne bénéficient pas de garanties d’indépendance
identiques à leurs collègues du siège. Ils sont par définition placés au cœur des relations
entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire, puisqu’ils sont notamment chargés
d’appliquer la politique pénale du gouvernement. Afin d’assurer la cohérence de l’action
publique, le statut de la magistrature pose donc le principe de la subordination
hiérarchique du parquet. Le Garde des Sceaux peut ainsi adresser aux magistrats du
parquet des instructions générales.

§ 2 : Dispositions constitutionnelles
La Constitution en ses articles 145 et 146 a prévu les dispositions générales relatives au
Conseil Supérieur de la Magistrature(CSM). Le conseil est chargé d’assister le Président
de la République dans sa fonction de garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Il
doit permettre une collaboration entre les pouvoirs afin de garantir que la gestion de
carrière des magistrats, qui relève du pouvoir exécutif dans la mesure où ils sont agents
publics, évite toute forme d’arbitraire et s’effectue dans le respect de leur indépendance.
Le CSM est une institution constitutionnelle indépendante appartenant au pouvoir
judicaire. Il lui est confié des missions qui pourraient être regroupées en trois que sont :
-la nomination des magistrats ;
-la discipline des magistrats ;
-la mission consultative.

CHAPITRE II : LES PRINCIPES DIRECTEURS DU SERVICE PUBLIC DE LA


JUSTICE
Le terme de « principes directeur », ou de « notion cadre » s’applique traditionnellement
à la science processuelle et désigne les règles fondamentales devant guider le travail dans
le service public de la justice. Autrement dit, ces règles fondamentales désignent les
modalités élémentaires d’organisation et de fonctionnement de l’Institution judiciaire.
Dans un souci de clarté, on distinguera les principes traditionnels du service public tel
qu’ils trouvent application dans le domaine judiciaire avant de mentionner certains
principes spécifiques au fonctionnement du service public de la justice.

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SECTION 1 : L’APPLICATION DES PRINCIPES TRADITIONNELS DU SERVICE
PUBLIC AU DOMAINE JUDICIAIRE
On distingue traditionnellement en doit administratif plusieurs grands principes
communs au fonctionnement des divers services publics : le principe d’égalité, le principe
de neutralité, le principe de continuité. Il s’agit ici d’examiner la façon dont ces principes
s’appliquent à l’Institution judiciaire, aussi bien pour ceux réglant les relations du service
public avec ses usagers que pour ceux concourant à son fonctionnement.

Paragraphe 1 : Le service public de la justice dans ses relations avec les usagers :
égalité, neutralité, gratuité

A- Le principe d’égalité
Le principe d’égalité devant les services publics est le corollaire du principe d’égalité
devant la loi qui figure à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ,
surtout à l’article 3 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui
dispose que « Toutes les personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi. Toutes
les personnes ont droit à une égale protection de la loi » et enfin à l’article 4 de la
Constitution ivoirienne de novembre 2016. Ce principe signifie tout simplement
qu’aucune distinction ne soit faite entre les usagers quant à l’accès au service public de
la justice en raison de leurs conditions sociales, de leurs handicaps ou de tout autre motif
tenant à leurs situations personnelles ou à celles du groupe social auxquels ils
appartiennent.

B- Le principe de neutralité
La neutralité de la justice est un autre grand principe qui fonde les rapports entre le
service public de la justice et ses usagers. Il s’agit d’un concept relativement large qui
recouvre la nécessaire impartialité des magistrats et de tous les autres acteurs (greffiers,
notaires, commissaires de justice…) et l’exigence tenant à ce que la cause de chacun soit
équitablement entendue.
Ce principe est exprimé à l’article 45 de la Constitution ivoirienne qui dispose ainsi qu’il
suit : « Tout citoyen investi d’un mandat public ou chargé d’un emploi ou d’une mission
de service public, a la devoir de l’accomplir avec compétence, conscience et loyauté. Il
doit être intègre, impartial et neutre. »
La neutralité se traduit, du point de vue de la procédure, par l’exigence pour le juge de
respecter le principe du contradictoire qui suppose que la cause de chaque partie soit
entendue ou appelée avant de pouvoir être jugée. Elle implique également que le
justiciable puisse être protégé de la partialité des magistrats. Elle exprime enfin la
nécessaire laïcité du service public de la justice, au même titre que celle des autres services
publics.

C- La gratuité de la justice
Le principe de la gratuité de la justice signifie que les plaideurs ne paient pas leurs juges :
les juges sont des fonctionnaires payés par l’Etat. Il faut remonter à l’Ancien régime, en
France, pour comprendre ce principe.

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En effet, ce principe fut posé pour la première fois par l’article 11 du titre II de la loi des
16 et 24 août 1790 et l’article L.111 du code de l’organisation judiciaire en France ainsi
libellé :
« Le service public de la justice concourt à l'accès au droit et assure un égal accès à la
justice.
Sa gratuité est assurée selon les modalités fixées par la loi et le règlement. »
Il se comprend mieux par comparaison avec l’ancien droit. En effet, autrefois, les
juges étaient rémunérés non par l’Etat, mais par les plaideurs eux-mêmes : celui qui avait
gagné son procès faisait présent à son juge d’une somme d’argent plus ou moins
importante que l’on appelait des «épices 6 ». A cette époque, les juges achetaient leur
charge au roi. Donc les « épices » constituaient en quelque sorte la rentabilité de leur
office. Le législateur de 1790 a formellement condamné un tel système qui introduisait
dans l’administration de la justice un esprit de lucre assez peu compatible avec la dignité
et l’indépendance du juge.
Cela dit s’il est vrai que les plaideurs ne paient pas leur juge, tout procès entraîne
d’autres frais : ce sont les honoraires et émoluments des auxiliaires de justice qui ont
apporté leur concours à l’œuvre de justice d’une part et d’autre part les droits fiscaux.
En effet, l’Etat, qui voit en tout plaideur un contribuable, a institué des droits de timbres
et d’enregistrement.
Toutes ces dépenses liées au procès mises ensemble constituent une somme
importante. Du coup, la perspective des frais à payer risque d’être un frein à l’accès à la
justice surtout qu’il est affirmé dans la Constitution.
En effet, la Constitution ivoirienne en son article 6 qui dispose ceci : « Le droit de
toute personne à un libre et égal accès à la justice est protégé et garanti.
Toute personne a droit à un procès équitable et à un jugement rendu dans un délai
raisonnable déterminé par la loi.
L’Etat favorise le développement d’une justice de proximité »
La mise en place de ce grand principe s’est traduite au niveau national par la mise
en place d’un mécanisme d’aide juridictionnelle : c’est l’assistance judiciaire.
L’idée de l’assistance judiciaire repose sur le principe de l’assistance aux citoyens
ou aux individus les plus démunis afin que ceux-ci puissent exercer leur droit en justice.
Le demandeur de l’assistance judiciaire doit remplir certaines conditions même si le
nombre élevé de requête a entraîné une réforme de l’assistance judiciaire en Côte d’Ivoire
par la décentralisation des institutions chargées de statuer sur les demandes d’assistance.

Paragraphe 2 : Le fonctionnement du service public de la justice au cœur de l’Etat :


continuité et hiérarchie
Certains principes classiques de l’organisation du service public trouvent à s’appliquer
dans le domaine judiciaire. Il s’agit du principe de continuité et du principe de hiérarchie

6
Le mot « épices » semble provenir de ce que très anciennement le présent remis au juge consistait en des
dragées ou des confitures appelées, à l’époque, des « épices ». Plus tard, ce présent fut converti en une somme
d’argent qui, d’abord volontaire, fut ensuite tarifée. La littérature a conservé le souvenir de cette pratique et de
l’ambiguïté du terme, tel Racine dans « Les Plaideurs » :
« Il me redemandait sans cesse des épices, »
Et j’ai tout bonnement couru dans les offices
Chercher la boîte au poivre ». (Acte II, scène VII).
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A- La continuité du service public de la justice
Ce principe implique que tout service doit fonctionner de manière régulière, sans
interruptions autres que celles prévues par la réglementation en vigueur et en fonction
des besoins et des attentes des usagers. L’article 4 de la loi portant organisation judiciaire
de la République de Côte d’Ivoire organise cette continuité. En effet, l’année judiciaire
commence le 1er octobre de l’année n et se termine le 31 juillet de l’année n+1.
Cependant pendant les deux mois de vacances, des audiences dites de vacations sont
tenues au moins une fois tous les quinze jours. Selon cet article, la chambre des vacations
est une chambre chargée d’expédier les affaires correctionnelles et, en matière civile,
commerciale et administrative, les affaires qui requièrent célérité car il faut qu’il soit
possible de faire face à l’urgence à tout moment. L’idée ici est de faire en sorte que la
permanence et la continuité des services soient toujours assurées, et sans interruption
même si dans la pratique les juridictions tournent au ralenti.
Une application stricte du principe de continuité soulève certains problèmes. Le premier
est le maintien en l’état des vacances judiciaires, qui semblent s’opposer à celui-ci. Alors,
va-t-on vers la suppression pure et simple des vacances judiciaires telles qu’on le connaît,
quitte à aménager les départs en congés annuels des animateurs relevant de l’Etat en
tenant compte des dispositions statutaires ? Le second est lié au droit de grève qui a une
valeur constitutionnelle. Doit-on l’interdire au regard des spécificités et de l’importance
de la justice dans la paix sociale à tous les acteurs de la justice (magistrats et auxiliaires) ?

B- Le principe de la hiérarchie
La justice constitue également un service public marqué par un principe de
hiérarchie tant au niveau des juridictions que des membres du corps judiciaire.
Il existe, en effet, d’une part, une hiérarchie entre les juridictions ; ce qui est le
corollaire du principe du double degré de juridiction. Les juridictions du premier degré
connaissent ainsi des affaires en première instance ou en premier ressort, tandis que les
juridictions du second degré, hiérarchiquement supérieures, jugent les affaires une
seconde fois dans le cadre du mécanisme de l’appel. Par ailleurs une haute juridiction
exerce pour chaque ordre un contrôle juridictionnel de légalité sur toutes les décisions
qui lui sont soumises : c’est le mécanisme de la cassation. Il faut préciser que cette
hiérarchie ne possède cependant aucun effet sur l’autonomie de chaque juridiction, qui
demeure libre de statuer comme elle le souhaite.
Il existe, d’autre part, une hiérarchie entre les membres du corps judiciaires qu’ils
soient Greffier ou Magistrats.
Au niveau des Greffiers, le chef du greffe exerce sur tous les greffiers, et même les autres
personnels autres que magistrats, un pouvoir administratif.
Chez les magistrats, si certaines fonctions de chef de juridiction confèrent à leurs
occupants des attributions administratives, ce pouvoir hiérarchique n’a aucune incidence
sur les pouvoirs juridictionnels que chaque magistrat exerce, en principe, en toute
indépendance. Il faut toutefois noter que la situation est différente pour les magistrats du
parquet qui sont organisés selon un principe hiérarchique plus strict.

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SECTION 2 : LES PRINCIPES SPÉCIFIQUES AU FONCTIONNEMENT DU
SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE

Ces principes règlent l’organisation et le fonctionnement de l’Institution judiciaire. Il


s’agit d’une part de la séparation des fonctions et de la collégialité et d’autre de la
publicité et de la loyauté.

Paragraphe 1 : Les principes d’organisation du service public de la justice : séparation


des fonctions et collégialité

A- Le principe de séparation des fonctions


On a précédemment évoqué la neutralité du service public de la justice comme l’une des
composantes de l’impartialité des juridictions : le principe de séparation des fonctions en
constitue la principale garantie du point de vue de l’organisation de l’Institution. Outre
la séparation des ordres juridictionnels, ce principe s’applique à l’intérieur de chaque
ordre juridictionnel et recoupe la distinction entre magistrats du siège et magistrats du
parquet.
En matière pénale, l’impartialité des juridictions exige en outre que soit strictement
séparées les fonctions de poursuites, les fonctions d’instruction et les fonctions de
jugement afin que les magistrats qui mettent en marche le processus répressif ne soient
pas confondus avec ceux qui se prononcent sur l’enquête et avec ceux qui statuent sur la
culpabilité et la peine. Un tel système vise une meilleure protection des libertés
individuelles. En définitive, le principe de la séparation des fonctions se présente sous les
trois aspects suivants :

1- La séparation des autorités de poursuite et d’instruction


La poursuite appartient au ministère public, l’instruction aux juridictions d’instruction
en vue d’assurer au juge d’instruction une indépendance renforcée par rapport au
parquet. Il reste que la séparation des deux fonctions n’implique pas une absence totale
de liaison entre les deux types d’attribution :
Exemple 1 : Communication du dossier de la procédure (article 100 du Code de
procédure pénale (CPP)) ;
Exemple 2 : Assistance aux interrogatoires et confrontations de l’inculpé et aux auditions
de la partie civile (article 137 du CPP) ;

2- La séparation des autorités d’instruction et de jugement


Ce principe implique qu’un magistrat qui a eu une véritable activité d’instruction ne
puisse pas siéger dans la formation amenée à juger la personne contre laquelle il a instruit.
En claire, la juridiction de jugement doit être totalement différente de la juridiction
d’instruction même si le magistrat instructeur peut avoir une très bonne connaissance du
dossier et du délinquant.

3-La séparation des autorités de poursuite et de jugement


Ce principe a une double signification. D’une part aucun membre du ministère public qui
a personnellement participé à la poursuite du délinquant ne peut pas faire partie d’une
formation de jugement appelée à statuer sur le cas de celui-ci. D’autre part les juridictions

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de jugement ne peuvent pas exercer la poursuite puisqu’elle est réservée à un corps de
magistrats spécialisés, en l’occurrence ceux du parquet.

B- Le principe de la collégialité
Si le principe de séparation dans le fonctionnement des juridictions permet le respect de
l’impartialité, celle-ci est sans doute d’autant mieux assurée que si les magistrats sont
nombreux à trancher les litiges qui leur sont soumis.
Selon l’article 35 alinéa 1 de la loi portant organisation judiciaire, les jugements des
tribunaux de première instance sont rendus par des magistrats délibérant en nombre
impair assisté du greffier et en présence du ministère public. L’alinéa 2 de cet article
précise que « Les jugements sont toujours rendus par trois (03) juges au moins »
Le principe de collégialité présente de nombreux avantages.
D’un part, il permet au magistrat de se former et d’enrichir sa réflexion au contact de ses
collègues, tout en lui assurant une protection qui garantit la sérénité de ses délibérés et
l’indépendance de sa décision.
D’autre part, elle assure au justiciable une justice de meilleure qualité et des décisions
dotées d’une plus grande autorité.
Le principe de collégialité connaît une atténuation dans les sections détachées qui siègent
généralement avec un seul juge sauf dans les cas suivants où la collégialité est obligatoire :
-En matière civile, commerciale et administrative, lorsque l’intérêt du litige excède
cinquante millions (50 000 000) francs CFA ;
-En matière de faillite et liquidation judiciaire ;
-En matière délictuelle, et obligatoirement en présence du ministère public lorsqu’il s’agit
d’infractions contre la sûreté de l’Etat, la défense nationale, la sécurité publique.

Paragraphe 2 : Les principes de fonctionnement du service public de la justice :


publicité et loyauté
A- La publicité
Un adage anglais affirme ceci : « Justice is not only to be done, but to be seen to be done7 »
Cet adage rappelle que la justice est une scène, et la publicité en constitue l’un des
principes fondamentaux. Aussi bien le code de procédure civile ainsi que le code de
procédure pénale posent en effet le principe de la publicité des débats et du prononcé des
jugements. De plus la justice est rendue au « au nom du peuple ivoirien » comme le
proclame l’article 143 8 de la Constitution. Le public doit donc pouvoir contrôler la
transparence du procès, protégeant ainsi le justiciable contre une justice secrète et
arbitraire, et assurant à chacun une sécurité juridique renforcée.
Des exceptions au principe de publicité existent. En effet, les nécessités pratiquent de
l’organisation du procès ainsi que les importantes exceptions prévues par les textes
aboutissent à limiter cette exigence de publicité. Il s’agit des considérations tenant à
l’intérêt général (le risque de trouble à l’ordre public, la préservation de la sécurité
nationale) ou à l’intérêt des parties (la protection des mineurs ou de l’intimité de la vie
privée) qui permettent au juge de statuer à huis clos : on parle de chambre du conseil.

7
La justice ne doit pas seulement être rendue, mais doit être vue comme étant rendue.
8
La justice est rendue sur toute l’étendue du territoire national, au nom du peuple ivoirien, par la Cour de
Cassation, le Conseil d’Etat, la Cour des Comptes, les Cours d’Appel, les tribunaux de première instance, les
tribunaux administratifs et les Chambres régionales des Comptes.
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Toutefois, le prononcé des décisions judiciaires est par contre soumis à un principe absolu
de publicité qui ne souffre d’aucune exception.
En matière pénale, les phases d’enquête et d’instruction demeurent secrètes.
La question de la publicité du procès pose le problème de sa médiatisation, et notamment
de sa diffusion vidéo. La pression des médias est aujourd’hui très forte pour obtenir un
plus large droit à l’enregistrement et à la diffusion des débats judiciaires. Si la presse
possède aujourd’hui un libre accès aux audiences, la captation des débats est interdite par
la loi.
2-La loyauté
La loyauté peut s’entendre comme le caractère de ce qui est loyal, la fidélité à tenir ses
engagements, à respecter les lois, les conventions qu’on a librement acceptées, à obéir aux
règles de l’honneur et de la probité.
Le fonctionnement du service public de la justice doit être fondé sur un principe de
loyauté élémentaire. Ce concept a été récemment promu par la doctrine comme une façon
de penser les rapports entre les acteurs du procès. Il désigne une exigence
consubstantielle au procès équitable recouvrant à la fois la cristallisation juridique d’un
principe moral (la bonne foi), le nécessaire professionnalisme des auxiliaires de justice, et
la concrétisation en acte de l’impartialité des magistrats. Il s’agit en conséquence d’un
standard de comportement qui influe sur les modalités d’organisation du procès : la
loyauté doit permettre la préservation de la vivacité et de la sérénité des débats
judiciaires.
Elle implique notamment, de la part de celui qui est investi d’une autorité, un
comportement de nature à sauvegarder les droits et les intérêts de celui qui se trouve en
position de faiblesse. A ce titre la loyauté désigne tant le respect par les parties du principe
du contradictoire, que l’observation par les auxiliaires de justice des règles éthiques
relatives à leur exercice professionnel, ou l’effort de pédagogie des magistrats dans leurs
rapports aux justiciables. Cette notion qui se place à la frontière de l’éthique et de la
procédure constitue en ce sens l’un des principaux facteurs de la confiance de chacun
dans le fonctionnement de l’Institution. N’oublions pas ce que représente le symbole de
la justice.

Paragraphe 3 : Les principes de fonctionnement du service public de la justice :


principe du double degré de juridiction

Toute affaire peut être jugée une seconde fois « le recours en appel » si l’une des
parties au procès estime être lésée par la décision rendue par le juge d’instance. Ainsi,
une affaire jugée par une juridiction en première instance peut être portée devant une
juridiction de second degré par voie de recours ordinaire ou une juridiction suprême par
voie de recours extraordinaire.

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Le symbole de la Justice

Images de Thémis déesse de la Justice

La justice est symbolisée de plusieurs manières. La plus connue est bien sûr
« Thémis » (déesse grecque de la justice) tenant de la main gauche une balance, de la
main droite un glaive ou épée, parfois les yeux recouverts de bandeau.
Quelle est la signification de ces symboles ? quelles sont les autres, moins connus ?
La balance et le glaive sont les plus connus mais le bandeau, le genou dénudé et la main
de justice sont aussi attachés à l’institution.

- Une épée ou glaive à la main : symbole du châtiment, représente une idée de force,
de sanction et de puissance. Le jugement est une décision qui tranche un conflit
entre plusieurs intérêts. C’est d’ailleurs pour cela qu’on parle du « bras armé de la
justice »

- Une balance dans l’autre main : représente une certaine idée de d’équilibre et de
mesure, de ce qui est exact, bien pesé, équitable. La balance rappelle à la fois
l’objectif de la justice (concilier et apaiser les intérêts) et à la fois la manière d’y
parvenir (en départageant chacun, en pesant le pour et le contre). La balance est
un réel symbole d’impartialité dans la mesure où elle est censée ne pencher en
faveur en faveur d’aucune des parties.

- Les yeux bandés (le bandeau) : il représente lui aussi l’impartialité de la Justice,
qui se rend objectivement, indépendamment de l’identité des parties, de leur
influence ou de leur puissance

- La main de Justice qui a été jusqu’en 1792, l’emblème du pouvoir judiciaire

- Le genou dénudé matérialise l’attribut corporel de la piété, de la magnanimité (de


la clémence, de la bonté, de la bienveillance, de générosité …) du puissant.

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B- L’émergence d’un nouveau principe directeur de « dématérialisation » de la
justice
La dématérialisation, selon le Robert, est l’action de rendre immatériel, le fait de
rendre immatériel. Parler de dématérialisation revient à s’interroger sur l’impact ou
l’emploi des technologies de l’information et de la communication dans le domaine
judiciaire. En effet, les nouvelles technologies de l’information et de la communication
sont au cœur d’une révolution numérique affectant directement les institutions
judiciaires. L’objet principal est de faciliter le fonctionnement interne des juridictions, de
permettre une meilleure gestion des contentieux de masse et de fluidifier les relations
avec les citoyens et auxiliaires de justice.
En Côte d’Ivoire, la dématérialisation est certes timide. En effet, la législation en la
matière est encore parcellaire. Certaines dispositions du code de procédure autorisent la
dématérialisation des outils de travail. Il s’agit de l’article 40-19 Par ailleurs, l’article 461
du code de procédure pénale autorise le greffier à prendre des notes par enregistrement
audio dont les modalités de mise en œuvre sont déterminées par arrêté du ministre de la
Justice.
L’objectif est de permettre aux différents acteurs de la scène judiciaire de
communiquer entre eux d’une part et d’autre part avec la juridiction à travers un réseau
virtuel qui puisse permettre les échanges des pièces des dossiers des procédures.

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Le registre dit rôle général mentionné à l’article précédent peut se présenter sous la forme électronique. Il
comporte les mêmes mentions que celles du registre en version papier.
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TITRE III : L’ORGANIGRAMME JURIDICTIONNEL IVOIRIEN

Un organigramme est un tableau schématique des divers services d'une


administration, d'une entreprise, et de leurs rapports mutuels. C’est aussi une
représentation graphique des sous-ensembles d'un système et des relations qui les lient
entre eux.
Ainsi, l’on peut définir l’organigramme juridictionnel comme l’ensemble des
différentes juridictions qui composent le système juridictionnel ivoirien et les relations
existant entre celles-ci.
Comme nous l’avons signalé plus haut, l’Etat ivoirien a opté depuis les années 2000
une réforme de son système juridictionnel qui est passé d’un système à un seul ordre à
un système à deux ordres de juridictions. Mais l’analyse des institutions qui disent le droit
ou qui accomplissent l’œuvre de justice montre que certaines de ces juridictions
n’appartiennent à aucun ordre.

CHAPITRE 1 : L’ORGANIGRAMME DES ORDRES JURIDICTIONNELS


La Côte d’Ivoire possède deux ordres juridictionnels :
-l’ordre administratif ;
-l’ordre judiciaire

SECTION 1 : L’ORGANIGRAMME DE L’ORDRE ADMINISTRATIF

• Conseil d'Etat
Contrôle
Pourvoi
• Section du contentieux

Appel 2 ème
• Cour administrative d'appel
degré

• Tribunal administratrif
1er degré

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SECTION 2 : ORGANIGRAMME DE L’ORDRE JUDICIAIRE

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ORDRE JUDICIAIRE

JURIDICTION CIVILE JURIDICTION CORRECTIONNELLE

Juridiction Cour de Cassation Cour de Cassation


suprême
(contrôle et Chambre Chambre
Pourvoi) Chambre Civile Chambre Correctionnelle Chambre Criminelle
sociale Commerciale

Cour
2è Cour d'Appel d'Appel du Cour d'Appel
dégré Commerce
Appel Chambre Chambre Chambre Chambre spéciale Chambre
Chambre Civile Chambre Correctionnelle
Commerciale Sociale Criminelle criminelle d'Instruction
uniuement
Abidjan

Tribunal de 1ère Instance/Section de Tribunal Tribunal de Prémière Instance/section de Tribunal


Tribunal Tribunal
1er dégré Tribunal de
statuant dans statuant en Tribunal du Tribunal du Tribunal Tribunal Tribunal Criminel Cabinet
simple
les matières matière Travail Commerce Correctionnel Criminel pour mineur d'Instruction
Commerciale Police
Civiles
Juridiction d'Exception
ou spécialisée

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CHAPITRE 2 : L’ORGANIGRAMME PAR COUR D’APPEL

COUR D'APPEL D'ABIDJAN

Cour d'Appel d'ABIDJAN


Chambres Civile, Sociale et Administrative

Tribunaux de 1ère Instance (TPI)

TPI d'ABIDJAN TPI de TPI


TPI de DIVO
(Plateau) YOPOUGON d'ABENGOUROU

Sections des Tribunaux

Section de Tribunal Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de


d'ABOISSO DABOU BONDOUKOU LAKOTA

Section de Tribunal Section de Tribunal de Section de Tribunal de


d'ADZOPE TIASSALE BOUNA

Section de Tribunal
d'AGBOVILLE

Section de Tribunal de
GRAND-BASSAM

26
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COUR D'APPEL DE BOUAKE

Cour d'Appel de BOUAKE


(Chambres Civile, Commerciale, Sociale et Administrative)

Tribunaux de 1ère Instance (TPI)

TPI de BOUAKE

Sections des Tribunaux

Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de
TOUMODI BONGOUANOU DIMBOKRO M'BAHIAKRO KATIOLA

27
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
COUR D'APPEL DE DALOA

Cour d'appel de DALOA (Chambres Civile,


Commerciale, Sociale et Administrative)

Tribunaux de 1ère Instance (TPI)

TPI BOUAFLE TPI de DALOA TPI GAGNOA TPI de MAN TPI de SAN PEDRO

Sections des Tribunaux

Section de Tribunal DE Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de
SINFRA ISSIA OUME TOUBA SASSANDRA

Section de Tribunal de Section de Tribunal de Section de Tribunal de


SEGUELA DANANE TABOU

Section de Tribunal de
GUIGLO

28
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COUR D'APPEL DE KORHOGO

Cour d'appel de KORHOGO (Chambres Civile,


Commerciale, Sociale et Administrative)

Tribunaux de 1ère Instance (TPI)

TPI de KORHOGO

Sections des Tribunaux

Section de Tribunal de Section de Tribunal de


BOUNDIALI ODIENNE

29
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TABLEAU RECAPITULATIF
Cours d’appel Tribunaux de 1ère instance Sections de Tribunaux
GRAND BASSAM
ABOISSO
ABIDJAN (PLATEAU)
AGBOVILLE
ADZOPE
ABIDJAN YOPOUGON
DABOU
TIASSALE
BONDOUKOU
ABENGOUROU
BOUNA
DIVO LAKOTA
BONGOUANOU
KATIOLA
BOUAKE BOUAKE M’BAHIAKRO
TOUMODI
DIMBOKRO
ISSIA
DALOA
SEGUELA
TOUBA
MAN DANANE
GUIGLO
DALOA GAGNOA OUME
BOUAFLE SINFRA
SASSANDRA
SAN PEDRO TABOU
SOUBRE
ODIENNE
KORHOGO KORHOGO
BOUNDIALI
04 Cours d’appel 11 Tribunaux 26 Sections Détachées

NB : Il faudrait savoir qu’il existe des juridictions d’exception des juridictions existant en
Côte d’Ivoire. Notamment :
- Le tribunal du Commerce
- La Cour d’Appel du Commerce

30
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
TITRE IV : LES JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN
On appelle « juridictions », les organes chargés de trancher les litiges au moyen d’une
décision. En d’autres termes, ces organes sont chargés de « dire le droit ». Le mot
« juridiction » est un terme générique. En réalité, chaque type de juridiction porte un nom
particulier selon une terminologie10 façonnée par les usages.
Les juridiction de droit commun sont les juridictions qui ont vocation à connaitre de
tous les litiges sauf si un texte spécial exclut expressément de cette compétence de telle ou
telle affaire en la confiant à une autre juridiction11.
Les juridictions de droit commun sont :
- Les juridictions du premier degré
- Les juridictions du second degré
- Les juridictions suprêmes

CHAPITRE I : LES JURIDICTIONS DU PREMIER DEGRE


Les juridictions de première instance sont à la fois nombreuses et diversifiées.
Il ‘agit ici des tribunaux de premières instance et de leurs sections détachées.
Dès lors qu’aucun texte n’a confié la connaissance d’un litige à une autre juridiction
spécifique, les juridictions de droit commun sont en principe compétentes. On dit alors
qu’elles possèdent une compétence de droit commun ou une plénitude de juridiction.
Ce sont les juridictions qui sont en premier saisies des litiges. Elles sont donc celles qui
rendent les premières décisions. Ce sont les tribunaux de première instance et leurs sections
détachées qu’il convient d’examiner à travers les différentes chambres qui assurent leur
fonctionnement.

SECTION 1 : PRÉSENTATION DES TRIBUNAUX DE PREMIÈRE INSTANCE (TPI) ET


LEURS SECTIONS DÉTACHÉES.
La carte judiciaire des tribunaux de première instance de droit commun laisse apparaître
un nombre de onze (11) juridictions effectivement fonctionnelles à ce jour. Il s’agit, par ordre
alphabétique, des Tribunaux de première instance de : ABENGOUROU, ABIDJAN,
BOUAFLE, BOUAKE, DALOA, DIVO, GAGNOA, KORHOGO, MAN, YOPOUGON ET
SAN PEDRO. A ces tribunaux sont rattachées les sections au nombre de vingt-six (26)
suivantes :
 TPI ABENGOUROU (BONDOUKOU, BOUNA)
 TPI ABIDJAN (AGBOVILLE, ADZOPE, ABOISSO, GRAND BASSAM)
 TPI BOUAFLE(SINFRA)
 TPI BOUAKE (KATIOLA, M’BAHIAKRO, DIMBOKRO, BONGOUANOU,
TOUMODI),
 TPI DALOA (ISSIA, SEGUELA)
 TPI GAGNOA (OUME)
 TPI DIVO (LAKOTA)
 TPI KORHOGO (BOUNDIALI, ODIENNE)
 TPI MAN (GUIGLO, DANANE, TOUBA)

10
L’expression « tribunal », fréquemment utilisée, est réservée en générale aux juridictions du premier degré.
Certaines juridictions s’appellent « Cours ». Ce mot noble, désigne les juridictions d’un rang élevé dans la hiérarchie.
11
« Organisation judiciaire, P 32 » de l’auteur Maitre Bilé Guy Serge ANOUGBO
31
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
 TPI YOPOUGON (DABOU, TIASSALE)
 TPI SAN PEDRO (SASSANDRA, SOUBRE, TABOU)
Il sera examiné d’une part leur organisation et leur fonctionnement et d’autre part
l’étendue de leur compétence à travers les formations de jugement qui les composent.

SECTION 2 : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES TPI


La loi portant organisation judiciaire et ses modifications successives consacrent
l’existence de trois services au sein des juridictions ivoiriennes que sont le Siège, le
Parquet et le Greffe. De plus en plus le Service de la Protection Judiciaire de l’Enfance et
de la Jeunesse (SPJEJ) s’impose comme un service autonome (confère …….)

Paragraphe 1 : Le Siège
Le siège d’une juridiction est le lieu où elle fonctionne et tient ses audiences. Dans le
langage courant ou propre au milieu judiciaire, le siège désigne l’ensemble des magistrats
(dits assis) qui reçoivent pour mission soit de juger soit mener des investigations en vue
d’examiner les litiges qui leur sont soumis.
Il est organisé en plusieurs chambres spécialisées chacune présidée par un magistrat qui
est soit un vice-président, soit un juge appartenant à ce siège et aussi des cabinets.
Il y a entre autre :
 La chambre civile, commerciale et administrative
 La chambre correctionnelle
 La chambre criminelle
 La chambre sociale
 Des cabinets d’instruction (pour majeur, pour mineur) et des tutelles

Paragraphe 2 : Parquet
Chaque tribunal de première instance comprend un parquet qui regroupe les
magistrats du ministère public placés sous la direction d’un Procureur de la République. On
y trouve également des Adjoints au Procureur et des Substituts.
Le parquet d’un tribunal de première instance comprend deux services principaux :
- le service des poursuites qui a pour mission la saisine des juridictions d’instruction
et de jugement.
- le service de l’exécution des décisions qui assure l’exécution des décisions de justice
tant en matière pénale qu’en matière civile.

Paragraphe 3 : Greffe
Dirigée par un Greffier en Chef, l’organisation du Greffe est fonction des attributions
principales des greffiers qui s’appuie sur :
- l’assistance soit juridictionnelle soit administrative du tribunal ;
- les fonctions de conservateur
L’assistance juridictionnelle impose au greffe d’être divisé en autant de chambres que le
siège du Tribunal. Le greffe comprend ainsi :
- une ou plusieurs chambres civiles et administratives qui forment le « Greffe
civil » ;
- une ou plusieurs chambres correctionnelles qui constituent le « Greffe
correctionnel »
- une ou plusieurs chambres sociales appelées « Greffe social »

32
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
- L’organisation administrative du greffe s’étend à l’activité des services suivants :
- les services du parquet près le tribunal ;
- les services des juridictions d’instruction ;
- les services administratifs du greffe

L’organisation relative aux fonctions de conservateur met en exergue la protection et


la sauvegarde des preuves des procès et de l’état civil. Le greffe tient à cet effet :
- un service de conservation des minutes des décisions ;
- un service de conservation des pièces à conviction ;
- un service de conservation du fichier du casier judiciaire ;

Un service de conservation des doubles des registres d’état civil des circonscriptions
d’état civil dépendant du ressort territorial du tribunal

SECTION 3 : COMPÉTENCES DES TRIBUNAUX DE PREMIÈRE INSTANCE


Parler de la compétence des tribunaux de première instance, revient à exposer sur les
formations de jugement12 qui les animent. A cet effet, il existe des juridictions13 civiles de
droit commun et des juridictions pénales de droit commun qui ont des missions propres.

A- Les juridictions civiles de droit commun


Elles ont pour mission de statuer sur les litiges d’intérêts privés. Elles possèdent de ce
fait une compétence virtuelle sur l’ensemble du droit privé, qui n’est limitée que par les textes
attribuant à des juridictions spécifiques les litiges d’un certain type. C’est ce qu’affirme
l’article 5 du code de procédure civile, commerciale selon lequel les tribunaux de première
instance et leurs sections détachées connaissent de toutes les affaires civiles, commerciales,
administratives et fiscales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une
autre juridiction en raison de la nature de l’affaire. Ce qui signifie que ceux-ci ont une
compétence de principe pour connaître, en première instance, de tous les litiges de nature
privée, dès lors du moins qu’aucune disposition particulière de la loi ne lui en n’a pas
expressément retiré la connaissance pour l’attribuer à une juridiction spécialisée.

B- Les juridictions pénales de droit commun


Les juridictions répressives, encore appelées juridictions pénales, ont pour rôle de
réprimer les infractions au moyen d’une peine (prison, amende, réclusion)
La spécificité du procès pénal tient notamment à son net découpage en phases distinctes
impliquant des magistrats et des juridictions différentes. En effet, la répression des
infractions nécessite tout d’abord une décision d’engagement des poursuites prise par un

12
Selon le lexique des termes juridiques de Dalloz, 26ème édition, une formation de jugement est la composition d’un
tribunal pour rendre une décision juridictionnelle. Pour sa désignation, plusieurs appellations sont utilisées : chambre,
section, sous-section, bureau.
La chambre désigne une réunion de plusieurs magistrats d’un même tribunal tenue à des fins juridictionnelles, soit
d’instruction, soit de jugement.
13
Le mot juridiction revêt plusieurs sens. D’abord dans un sens large, ce mot est proche ou synonyme d’autorité, de
souveraineté. Ensuite, dans un sens fonctionnel, et employé au singulier uniquement, il désigne le pouvoir de dire le
droit. Enfin, dans un sens organique, et employé au singulier comme au pluriel, il renvoie aux organes qui sont dotés de
ce pouvoir. Les juridictions font l’objet de plusieurs classifications, selon l’ordre auquel elles appartiennent
(administratif ou judiciaire) selon leur nature (droit commun ou d’exception) ou enfin selon leur degré qu’elles
occupent dans la hiérarchie judiciaire (juridiction de première instance, d’appel, de cassation)
33
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
magistrat du parquet(qui ne constitue pas une juridiction), puis une phase d’enquête
éventuellement confiée à un juge d’instruction lorsqu’elle est complexe, avant que l’affaire
ne soit renvoyée devant des juridictions de jugement qui vont se prononcer sur la
culpabilité du délinquant en lui infligeant une peine, dont l’éventuel aménagement
engagera le cas échéant une juridiction de l’application des peines.

1-Le juge d’instruction : juridiction d’instruction du premier degré


Dans notre système actuel, le juge d’instruction est à lui seul une juridiction mais c’est
d’abord un magistrat. Il est un magistrat du siège du Tribunal de première instance ; par
conséquent, il bénéficie des garanties d’indépendance spécifiques à la magistrature assise
prévues par l’article 140 de la Constitution.
Le juge d’instruction est investi d’une double mission : il procède à l’enquête qu’il doit
mener en toute impartialité à charge et à décharge, et prend diverses ordonnances qui
constituent autant de décisions juridictionnelles.
Selon les dispositions de l’article 102 du Code de Procédure pénale, lorsqu’il existe dans
un tribunal plusieurs juges d’instruction, le président du tribunal désigne, pour chaque
information, le juge qui en sera chargé. Il peut également désigner deux ou plusieurs juges
d’instruction pour instrumenter dans une affaire complexe ou grave comportant plusieurs
chefs d’inculpation. Dans ce cas, il désigne l’un des juges d’instruction pour coordonner
l’instruction. Chaque acte d’instruction est signé par le juge d’instruction qui l’accomplit.
Toutefois les ordonnances sont prises collégialement. En cas de partage égal des voix, celle
du juge d’instruction coordonnateur est prépondérante.

2-Les juridictions pénales de jugement du 1er degré


Les juridictions répressives, de façon générale, sont chargées de se prononcer sur la
culpabilité de la personne poursuivie et de prononcer le cas échéant une peine à son encontre.
Au premier degré, elles sont organisées en fonction de la classification tripartite des
infractions, de telle sorte qu’à chaque catégorie d’infractions correspond une juridiction
particulière :
 le tribunal correctionnel pour les délits ;
 le tribunal de simple police pour les contraventions.

a- Le tribunal correctionnel
Ce Tribunal sera examiné à travers sa compétence et sa composition

a-1 : Compétence
L’article 389 du code de procédure pénale dispose que « le tribunal correctionnel
connaît des délits ». Le délit, par définition est une infraction dont l’auteur est puni de peines
correctionnelles. Les peines correctionnelles sont prévues par le code pénal.
Selon l’article 390, est compétent, le tribunal correctionnel du lieu de commission de
l’infraction ou de la tentative, celui de la résidence du prévenu ou celui du lieu d’arrestation
de ce dernier, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause. Le tribunal
du lieu de détention d’un condamné n’est compétent que dans les conditions prévues au titre
VI du livre IV relatif aux renvois d’un tribunal à un autre.
Enfin la compétence du tribunal correctionnel s’étend aux délits et contraventions qui
forment avec l’infraction déférée au tribunal un ensemble indivisible. Elle peut s’étendre aux
délits et contraventions connexes au sens de l’article 236.

34
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
a-2 : Composition
Elle est prévue par l’article 408 du Code de procédure pénale. En effet, cet article précise
d’abord que le tribunal correctionnel est présidé par le président du tribunal ou un juge
délégué, ensuite que les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur de la
République ou l’un de ses substituts, enfin les fonctions du greffe sont exercées par un greffier
du tribunal.
Le président, les juges et le greffier composant le tribunal correctionnel sont désignés, par
ordonnance du président du tribunal, au début de chaque année judiciaire.

b - Le tribunal de simple police


Il sera examiné successivement sa compétence et sa composition.

b-1 : Compétence
Le tribunal de simple est compétent pour connaître des contraventions. Sont compétentes,
les juridictions dans le ressort desquelles les contraventions ont été commises.

b-2 : Composition
Le tribunal de simple police est une formation du tribunal composé d’un juge unique (qui
préside seul – art 532 du CPP).

CHAPITRE II - LES JURIDICTIONS DU SECOND DEGRE


S’il n’existe pas à proprement parler de hiérarchie juridictionnelle dans le système
judiciaire ivoirien, dans la mesure où chaque juridiction conserve sa pleine autonomie pour
exercer ses attributions, il faut cependant remarquer l’existence d’une hiérarchie
institutionnelle entre les juridictions. Cette dernière implique une distinction entre les
juridictions de premier degré qui connaissent des litiges en première instance, et les
juridictions du second degré dont le rôle est de juger les affaires une seconde fois dans le
cadre de l’exercice d’un recours contre une première décision juridictionnelle. Ce double
degré de juridiction constitue la traduction institutionnelle de l’existence de voies de recours,
qui sont des voies de droit ayant pour objet la remise en cause d’une décision de justice.
L’appel constitue la voie de recours ordinaire tendant à faire réformer (confirmer ou
infirmer) par la cour d’appel, un jugement rendu par une juridiction de premier degré : il
s’agit en conséquence d’une voie de réformation. L’appel remet ainsi en cause l’autorité de
la chose jugée afin qu’il soit à nouveau statué en droit et en fait sur la question litigieuse :
c’est l’effet dévolutif de l’appel.
En Côte d’Ivoire, il existe quatre (04) Cours d’Appel qui fonctionnent effectivement. Il
s’agit des Cours d’Appel d’ABIDJAN, de BOUAKE, de DALOA et de KORHOGO (la
dernière en date) qu’il convient d’examiner sous l’angle de leur organisation et leur
fonctionnement d’une part et leur compétence au regard des formations de jugement d’autre
part.

SECTION 1 : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES COURS D’APPEL


Selon la loi portant organisation judiciaire, chaque cour d’appel comprend un siège, un greffe
et un parquet général près la Cour d’Appel. Ces trois services remplissent les mêmes
fonctions que celles exposées pour les tribunaux de première instance.
35
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
La composition de chaque entité de la Cour d’Appel

- Le siège : composé de Magistrats


o Le Premier Président
o Des présidents de chambre
o Des conseillers dont deux (02) par chambre

- Le Parquet Général : composé de Magistrats


o Le Procureur Général
o Des Avocats généraux qui sont les adjoints du Procureur général
o Des Substituts généraux

- Le Greffe :
o Le Greffier en Chef
o Un personnel Greffier composé de Greffiers en Chef adjoints, de Chef de
section et de Greffiers
o Un personnel non greffiers

Chaque Cour d’Appel est organisée en chambre spécialisée. Ce sont :


- des chambres civiles et commerciales compétentes pour recevoir les recours contre les
jugements rendus en premier ressort par les tribunaux qui sont du ressort de leurs
circonscriptions judiciaires. (En raison de la présence de la Cour d’Appel du commerce
à Abidjan, il n’existe pas de chambre commerciale à la Cour d’Appel d’Abidjan)
- d’une chambre sociale destinée à connaitre les recours exercés contre les jugements
rendus par les tribunaux de travail
- une chambre criminelle, pour les recours exercés contre les jugements rendus par les
tribunaux criminels (Article 370 et suivants du CPP)
- la chambre des appels correctionnels et contraventionnelles, compétente pour
connaitre les recours exercés contre les jugements contradictoires correctionnels et de
simple police (Article 570 et suivants du CPP)
- la chambre d’instruction, laquelle chambre est compétente pour connaitre les recours
exercés contre les ordonnances rendues par le juge d’instruction du ressort de la Cour
d’appel et des activités des officiers de police judiciaire dans le même ressort
juridictionnel
- la chambre criminelle spéciale compétente contre les recours exercés contre les
tribunaux criminelles pour mineur

La Cour d’Appel peut se réunir :


- en audience solennelle, la Cour comprend cinq magistrats au moins. Elle se réunit
pour statuer notamment sur les prises à partie 14 , pour recevoir le serment des
magistrats, pour l’audience de rentrée de la Cour et pour l’installation de ses nouveaux
membres ;

14
La prise à partie est la procédure par laquelle un plaideur peut agir en responsabilité civile d’un magistrat pour
l’obtention de dommages-intérêts pour des causes tel la fraude, la concussion (profit illicite que l’on fait dans l’exercice
d’une fonction publique), le dol ou la faute lourde professionnelle
36
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
- soit en assemblée générale, à la demande du premier Président pour établir ou
modifier le règlement du service intérieur, fixer les audiences de vacations et les
audiences spéciales, statuer sur les décisions du Conseil de l’Ordre des avocats et
autres auxiliaires de justice ou officiers ministériels ;
- soit en audience ordinaire pour statuer sur les appels interjetés contre les décisions
rendues par toutes les juridictions de son ressort. En toutes matières, les arrêts des
Cours d’Appel sont rendus par des magistrats délibérant en nombre impair, assistés
du greffier et en présence du ministère public ;
- en chambre du conseil pour statuer sur les appels interjetés contre les décisions
rendues par la chambre du conseil des tribunaux de première instance ou des sections
de tribunaux de son ressort.

SECTION 2 : COMPÉTENCE DES COURS D’APPEL


Paragraphe 1 : Les juridictions civiles et sociales de droit commun du second degré
La mise en œuvre du double degré de juridiction implique que l’affaire soit jugée une
seconde fois par une juridiction hiérarchiquement supérieure. Mais on doit constater que la
mise en œuvre de cette règle en matière civile et sociale est régie par deux principes : à savoir
que la juridiction du second degré est toujours la Cour d’appel et que l’appel est exclu pour
les petites affaires.
D’une part, la juridiction du second degré est toujours la Cour d’appel. En effet dans
le contentieux privé, l’appel est toujours porté devant la Cour d’appel dans le ressort
territorial de laquelle se trouve située la juridiction de première instance dont la décision est
attaquée.
D’ autre part, l’appel est exclu pour les « petites affaires ». Le principe du double degré
de juridiction est écarté lorsque les frais et les lenteurs d’une procédure d’appel paraissent
injustifiés, eu égard à la simplicité ou la modicité du litige. Ainsi est-on conduit à faire une
distinction entre, d’une part, les affaires jugées à charge d’appel (et donc uniquement « en
premier ressort ») et, d’autre part les affaires pour lesquelles l’appel est exclu (et dont on dira
qu’elles sont jugées tout à la fois « en premier et dernier ressort »), étant précisé que, dans ce
cas, le jugement peut être directement déféré à la Cour de cassation.
Le critère essentiel est fonction de la valeur du litige, c’est-à-dire du montant de la
demande : la loi fixe un chiffre en deçà duquel l’appel est exclu. Ce chiffre s’appelle le taux
du ressort.
En matière civile, l’article 6 du code de procédure civile précise que ces juridictions(en
faisant allusion aux tribunaux de première instance et leurs sections détachées) statuent(…)
en matière civile(…) en premier et dernier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du
litige n’excède pas 500 000 francs.
En matière sociale, l’article 81.29 affirme que le tribunal du travail statue en premier
et dernier ressort lorsque le chiffre de la demande n’excède pas dix fois le salaire minimum
interprofessionnel garanti (SMIG) mensuel.

Paragraphe 2 : Les juridictions pénales de droit commun du second degré


Il s’agit de la chambre d’instruction, de la chambre des appels correctionnels et de simple
police et la chambre d’instruction de la Cour d’appel

37
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
A- La chambre d’instruction : juridiction d’instruction du second degré (Article 226 à
261 du CPP)
La chambre d’instruction est la nouvelle dénomination, depuis la loi n°2018-975 du 27
décembre 2018 portant code de procédure pénale, de la chambre d’accusation. Elle constitue
l’unique juridiction d’instruction du second degré. Mais selon l’article 226 alinéa 1 du code
de procédure pénale la cour d’appel peut comprendre une ou plusieurs chambres
d’instruction composée d’un président de chambre et de deux ou plusieurs conseillers
exclusivement nommés dans cette fonction.
Les fonctions du ministère public auprès de la chambre d’instruction sont exercées par le
procureur général près la Cour d’appel ou par ses substituts et celles du greffe par un greffier
de la Cour d’appel.
La chambre d’instruction possède une fonction juridictionnelle en matière d’appel des
décisions des juridictions d’instruction du premier degré et des fonctions d’instruction
puisqu’elle a la faculté d’ordonner tout acte d’information complémentaire qu’elle juge utile
et décerner tout mandat. En outre, la chambre d’instruction exerce un contrôle sur l’activité
des officiers ou des agents de police judiciaires.

B- La chambre des appels correctionnels (Article 555 à 584 CPP)


La chambre des appels correctionnels est composée d’un président de chambre et de
deux conseillers. Les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur général ou
ses substituts. Celles du greffe par un greffier de la Cour d’appel
Tout appel formé contre un jugement rendu soit par un tribunal de simple soit par un
tribunal correctionnel est porté devant une juridiction que l’on a coutume d’appeler, non sans
ambiguïté d’ailleurs, la « chambre des appels correctionnels ». On remarquera en effet, à quel
point cette appellation est trompeuse si l’on considère que la chambre des appels
correctionnels est, au second degré, une juridiction qui connaît des appels, aussi bien en
matière de délits que de contravention.

C- La chambre criminelle de la cour d’appel (Article 362 à 388 du CPP)


Les jugements rendus par le Tribunal criminel peuvent faire l’objet d’appel dans les
conditions énumérées à l’article 363 du code de procédure pénale. A cet effet, il est institué
auprès de chaque Cour d’appel une chambre criminelle. Il est donc tenu au siège de chaque
Cour d’appel, des sessions pour le jugement des affaires criminelles ayant fait l’objet d’appel
dans le ressort de cette Cour. Ce jugement a lieu tous les six mois.
La Chambre criminelle est composée d’un président et de deux conseillers choisis par
ceux de la Cour. Elle est présidée par le premier président ou par un président de chambre à
la Cour d’appel.
Le procureur général représente en personne ou par ses substituts, le ministère public
près la chambre criminelle.
La chambre criminelle de la Cour d’appel est, à l’audience, assistée d’un greffier qui
peut être soit le Greffier en chef de la Cour d’appel soit un greffier choisi par celui-ci.
Le président, les conseillers et le greffier sont désignés, par ordonnance du premier
président de la Cour d’appel, au début de chaque année judiciaire.

38
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CHAPITRE III - LES JURIDICTIONS SUPRÊMES NATIONALES DE DROIT
COMMUN

SECTION 1 : LA COUR DE CASSATION


Il ressort de la lecture combinée de l’article 2 de la loi organique n°2020-967 du 17 décembre
2020 déterminant les attributions, la composition, l’organisation et le fonctionnement de la
Cour de Cassation que ladite Cour est la « plus haute juridiction de l’ordre judiciaire ». Elle
statue souverainement sur les recours en cassation contre les décisions rendues en dernier
ressort par les Cours et tribunaux de l’ordre judiciaire. Elle veille ainsi à l’application de la
loi par ces juridictions. Son examen s’articulera autour de sa composition et son organisation
et son fonctionnement et ses attributions.

Paragraphe 1 : COMPOSITION ET ORGANISATION


I - COMPOSITION
A la différence des juridictions du second degré, la Cour de Cassation comprend : un
Siège, « un Secrétariat général », un Parquet général près la Cour de Cassation et le
Conseil d’Etat et un Greffe.

A- La composition du siège
Notons que la Cour de Cassation est structurée en chambres. Nous avons donc
- Les chambres civiles
- Les chambres commerciales
- Les chambres pénales
- Les chambres sociales
La Cour rend des arrêts en pourvoir en cassation contre les jugements en dernier ressort de
sa compétence d’attribution

Le siège est essentiellement composé de Magistrats que sont :


- le Président est nommé par le Président de la République pour une durée de cinq
(05) ans renouvelable une fois parmi les personnalités reconnue pour leur
compétence et leur expertise avérée en matière juridique. ;
- les Présidents de chambre sont des magistrats hors hiérarchie du groupe A choisis
parmi les conseillers à la Cour de Cassation ;
- les conseillers sont des magistrats hors hiérarchie ;
- les conseillers référendaires15 qui sont soit choisis parmi les magistrats du premier
grade, soit parmi les personnes titulaires d’un doctorat en droit ou d’un diplôme
équivalent et ayant au moins six ans de pratique professionnelle ;
- les auditeurs sont choisis parmi les magistrats du deuxième grade soit parmi les
personnes titulaires d’un doctorat en droit ayant au moins cinq années
d’expérience professionnelle en cette qualité.
Le nombre de conseillers référendaires nommés sur titre ne peut excéder le dixième du
nombre des auditeurs de justice issus du concours prévus par le Statut de la magistrature.

15
Un « Conseiller référendaire » est un Magistrat qui n’est pas encore en mesure d’obtenir le grade pour être nommé à
la Cour de…. Mais qui, pour des besoins de fonctionnement de cette juridiction, est cependant affecté au service de la
Cour. Il y rapporte les affaires qui lui sont confiées et y sige avec voix délibérative
39
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B- Le Secrétariat Général de la cour de cassation
Le Secrétariat Général de la Cour est assuré par un Secrétaire Général nommé par décret pris
en conseil des ministres parmi les magistrats hors hiérarchie, sur proposition du Président
de la Cour de cassation

C- Les membres du Greffe


Le Greffe de la Cour de Cassation est composé d’un Greffier en chef assisté de Greffiers.
L’article 27 alinéa 1 de la loi organique suscitée dispose que « Le Greffier en chef de la
Cour de Cassation est nommé par décret, sur proposition du ministre de la Justice. Il est
choisi parmi les Administrateurs des greffes et parquets ayant au moins cinq années
d’ancienneté dans cette catégorie. »

II - ORGANISATION
Il ressort de la loi organique que le Président de la Cour de cassation exerce des fonctions
administratives et juridictionnelles.
Il est chargé de l’administration et de la discipline de la Cour. A cet effet, il arrête le
règlement intérieur de la Cour après délibération de l’assemblée générale. Au début de
chaque année judiciaire, il répartit par ordonnance, les présidents de chambre, les conseillers,
les conseillers référendaires et les auditeurs de la Cour de cassation entre les différentes
chambres.
Par ailleurs sur proposition du Greffier en chef, il répartit les Greffiers entre les différentes
chambres.
En effet la Cour de cassation est composée de chambres civiles, commerciales, pénales et
sociales présidées chacune par un Président de chambre. Chaque chambre comprend un
président, deux conseillers au moins et un greffier.
Le Procureur général près la Cour suprême16 assure les fonctions du ministère public près la
Cour de cassation.

Paragraphe 2 : Attributions et Fonctionnement


I-ATTRIBUTIONS
La Cour de cassation a des attributions contentieuses et consultatives.

a) En matière contentieuse, elle statue souverainement sur les pourvois en cassation


dirigés contre les arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les juridictions statuant
en matière civile, commerciale, sociale et pénale, sous réserve des matières relevant
d’autres juridictions.
Elle connaît en outre en référence à l’article 76 et suivants de la loi organique n°2020-967
du 17 décembre 2020 déterminant les attributions, la composition, l’organisation et le
fonctionnement de la Cour de cassation 17 :
- des demandes en révision ;
- des demandes de renvoi d’une juridiction à une autre ;

16
La Cour suprême a été supprimée après la révision constitutionnelle du 19 mars 2020. Cette modification devrait
entraîner un changement au niveau de la loi organique comme l’a prévue l’article 151 nouveau de la Constitution.
17
Voir toutes les définitions en annexe
40
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- des prises à partie ;
- des récusations ;
- des inscriptions de faux ;
- des règlements de juges ;
- des demandes en annulation des actes par lesquels les juges de l’ordre judiciaire
excèdent leurs pouvoirs ;
- des recours contre ses arrêts ;
- des demandes en interprétation et en rectification ;
- de la tierce opposition.

b) En matière consultative,
la Cour émet des avis sur toute question de droit entrant dans le champ de ses compétences,
qui lui est soumise par voie de requête par les premiers présidents des Cours d’appel, les
Procureurs généraux près lesdites Cours, les présidents des tribunaux, et les procureurs de
la République près lesdits tribunaux, les ordres constitués et les institutions universitaires de
sciences juridiques.

II-FONCTIONNEMENT
La Cour de cassation fonctionne au moyen de ses formations de jugement. Selon le lexique
des termes juridiques, une formation de jugement est la composition du tribunal ou de la
cour qui a pour mission de rendre une décision juridictionnelle. L’article 32 de la loi
organique dispose que « les formations de la Cour de cassation sont les types de réunions
que tient la Cour de cassation. »
Ainsi elle (la Cour) se réunit :

 En audience solennelle soit pour son audience de rentrée soit pour procéder à
l’installation de ses membres. A cette occasion, la Cour est composée :
- du Président de la Cour de cassation, président ;
-de trois Présidents de chambre, membres ;
-de trois conseillers, membres ;
La Cour est assistée du Greffier en chef ou d’un Greffier.

 En assemblée générale pour adopter ou modifier le règlement intérieur de la Cour,


débattre de toutes les questions intéressant l’organisation et la discipline de la Cour et
émettre les avis sur les questions qui lui sont soumises en application de l’article 6.
Elle comprend l’ensemble des magistrats de la Cour ;

 En assemblée plénière dans les cas prévus par la loi ou pour le jugement des affaires
déterminées par le règlement intérieur. Elle est présidée par le Président de la Cour de
cassation et est composée des présidents de chambre et d’un conseiller par chambre ;
cette plénière est valablement constituée avec la moitié au moins des présidents de
chambre et des conseillers ;

 En assemblée mixte pour statuer sur les questions relevant de la compétence de


plusieurs chambres, si la question a reçu ou est susceptible de recevoir, devant ces
chambres, des solutions divergentes. Elle est valablement constituée avec la moitié au

41
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
moins des membres composant ces chambres, présidée par le président de chambre le
plus ancien et comprend neuf magistrats au moins ;

 En audience ordinaire pour juger les affaires dont elle est saisie. Pendant ces
formations de jugement, elle siège et délibère en nombre impair.

SECTION 2 : LE CONSEIL D’ETAT


L’article 147 alinéa 2 de la Constitution ivoirienne dispose que « Le Conseil d’Etat veille
à l’application de la loi par les juridictions de l’ordre administratif. » L’article 149 (nouveau)
de la Constitution consacre le Conseil d’Etat comme « la plus haute juridiction de l’ordre
administratif ». Il statue souverainement sur les décisions rendues en dernier ressort par les
tribunaux administratifs et par les juridictions administratives spécialisées en matière de
contentieux administratif. Hormis le Conseil d’Etat, les autres juridictions de l’ordre ne sont
pas encore créées. Il s’agit des Cours administratives d’appel et des tribunaux administratifs.
L’étude du Conseil d’Etat se fera successivement à travers sa composition et son organisation
d’une part(I) et ses attributions et son fonctionnement d’autre part(II)

Paragraphe 1 : Composition et Organisation


A- Composition
Il ressort de l’article 02 de la loi organique n°2020-988 du 19 décembre 2020 déterminant
les attributions, la composition, l’organisation et le fonctionnement du Conseil d’Etat que
cette haute juridiction est composée de magistrats et de conseillers en service extraordinaire,
tous membres du siège et est dotée d’un Secrétariat Général et d’un Greffe.

I- Les magistrats du siège sont :


Le siège est essentiellement composé de Magistrats que sont :
- le Président du Conseil d’Etat est nommé par le Président de la République pour
une durée de cinq (05) ans renouvelable une fois parmi les personnalités reconnues
pour leur compétence et leur expertise avérées en matière juridique;
- les Présidents de Section contentieuse et consultative sont des magistrats hors
hiérarchie du groupe A, choisis parmi les présidents de chambre et de formation.
Ils sont désignés sur ordonnance du Président de Conseil d’Etat ;
- les Présidents de chambre et de formation sont des magistrats hors hiérarchie du
groupe A ;
- les conseillers d’Etat sont des magistrats hors hiérarchie soit choisis parmi les
magistrats du premier groupe premier grade(02 ans au moins), soit parmi les
personnes titulaires d’un doctorat en droit ou d’un diplôme équivalent et ayant
quinze ans au moins de pratique professionnelle/ compétence de vingt années en
matière juridique ou administrative ou encore des professeurs agrégés ou titulaires
des facultés de droit ayant deux ans au moins de pratique professionnelle en cette
qualité ;
- les conseillers référendaires qui sont soit choisis parmi les magistrats du premier
grade, soit parmi les personnes titulaires d’un doctorat en droit ou d’un diplôme
équivalent et ayant au moins six ans de pratique professionnelle ;

42
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
- les auditeurs du Conseil d’Etat sont choisis parmi les magistrats du deuxième
grade, soit parmi les personnes titulaires d’un doctorat en droit.
Le nombre de conseillers référendaires nommés sur titre ne peut excéder le dixième du
nombre des auditeurs de justice issus du concours prévus par le Statut de la magistrature.

II- Le Secrétariat Général du Conseil d’Etat


Le Secrétariat Général du Conseil d’Etat est assuré par un Secrétaire Général nommé par
décret pris en conseil des ministres parmi les magistrats hors hiérarchie, sur proposition du
Président de la Cour de cassation

III- Les membres du Greffe du Conseil d’Etat


Le Greffe du Conseil d’Etat est composé d’un Greffier en chef assisté de Greffiers.
L’article 31 alinéa 1 de la loi organique suscitée dispose que « Le Greffier en chef du Conseil
d’Etat est nommé par décret, sur proposition du ministre de la Justice. Il est choisi parmi les
Administrateurs des greffes et parquets ayant au moins cinq années d’ancienneté dans cette
catégorie. »
- Des greffiers.

B- Organisation
Le Conseil d’Etat est structuré en deux sections :
-la section du contentieux ;
-la section consultative.
Le président du Conseil d’Etat est chargé de l’administration et de la discipline du
Conseil d’Etat. A ce titre, il arrête le règlement intérieur du Conseil d’Etat après
délibérations de l’assemblée générale et au début de chaque année judiciaire, il répartit,
par ordonnance, les magistrats du siège entre les différentes chambres. Il assure, sur
proposition du Greffier en chef du Conseil d’Etat, la répartition des greffiers mis à la
disposition du Conseil d’Etat, entre les différentes chambres.

Paragraphe 2 : Attributions et Fonctionnement


A- Attributions
Le Conseil d’Etat veille à l’application de la loi par les juridictions administratives et juge
la légalité des actes administratifs et la responsabilité des personnes publiques et services
publics. Il exerce, à cet effet, des attributions contentieuses et consultatives.

I-Attributions contentieuses
Elles sont énumérées à l’article 5 de la loi organique. Il ressort de cet article que le Conseil
d’Etat statue :
- sur les recours en cassation dirigés contre les décisions rendues soit en premier et
dernier ressort, soit en dernier ressort par les juridictions administratives de droit
commun ou par les juridictions administratives spécialisées ;
- en premier et dernier ressort, sur les recours en annulation pour excès de pouvoir
formés contre les décisions administratives émanant des autorités administratives
centrales, ou des organismes ayant une compétence nationale ;
- en premier et dernier ressort sur les recours dirigés contre les actes administratifs dont
le champ d’application s’étend au-delà du ressort d’un seul tribunal administratif ;

43
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- sur les recours en interprétation et en appréciation de la légalité des actes dont le
contentieux relève de sa compétence ;
- sur le contentieux des élections des organes des collectivités territoriales et des élections
à caractère administratif.
Les tribunaux administratifs, sous réserve des compétences attribuées au Conseil d’Etat,
et les juridictions administratives spécialisées peuvent saisir le Conseil d’Etat pour solliciter
des avis contentieux lorsqu’il se présente une question de droit soulevant une difficulté
sérieuse.

II-Attributions consultatives
Le Conseil d’Etat émet des avis sur tout projet de texte qui lui est soumis par le Président
de la République et les membres du Gouvernement. Il peut être consulté par le Premier
ministre ou les ministres sur les difficultés en matière administrative. Il donne également son
avis sur les projets de textes pour lesquels son intervention est prévue par les dispositions
constitutionnelles, législatives ou décrétales et propose en outre les modifications qu’il juge
nécessaire.
Le Conseil d’Etat peut, de sa propre initiative, appeler l’attention des pouvoirs publics
sur les reformes d’ordre législatif, réglementaire ou administratif qui lui paraissent
indispensables ou conformes à l’intérêt général.

B- FONCTIONNEMENT
Le Conseil d’Etat se réunit en audience ordinaire, en audience solennelle, en assemblée
plénière, en assemblée mixte et en assemblée générale pour les affaires dont il est saisi.
 En audience ordinaire, le Conseil d’Etat comprend au moins trois magistrats.
L’audience est présidée par un Président de chambre assisté d’au moins un conseiller
d’Etat et d’au moins un conseiller référendaire. En audience ordinaire, la chambre
siège et délibère en nombre impair.
 En audience solennelle, le Conseil d’Etat procède à l’installation des magistrats.
 En assemblée plénière, le Conseil d’Etat se réunit dans les cas prévus par la loi ou
pour le jugement des affaires déterminées par le règlement intérieur. L’assemblée
plénière est présidée par le Président du Conseil d’Etat. Elle est composée du Président
du Conseil d’Etat, des Présidents de Section, des Présidents de Chambre, d’un
Conseiller d’Etat et d’un conseiller référendaire de chacune des chambres. Elle siège
en nombre impair.
 En assemblée mixte, le Conseil d’Etat se réunit pour statuer sur les questions de droit
dont il est saisi par l’une des chambres ou par le Président du Conseil d’Etat. Elle est
présidée par le Président de la Section du Contentieux et composée par les membres
des chambres.
 En assemblée générale, le Conseil d’Etat se réunit pour adopter ou modifier son
règlement intérieur, débattre de toutes questions intéressant l’organisation et la
discipline et émettre des avis sur les questions qui lui sont soumises.
Le conseil d’Etat exerce deux fonctions principales :
-une fonction contentieuse
-une fonction consultative

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I-Fonction contentieuse
La section du contentieux est juge de toutes les affaires qui relèvent des activités
juridictionnelles du Conseil d’Etat. La section du contentieux, dans sa formation ordinaire,
comprend plusieurs chambres pour connaître de plusieurs procédures dont le pourvoi en
cassation, le recours en annulation pour excès de pouvoir, le sursis à exécution, le référé
administratif, l’intervention, la vérification d’écriture et l’inscription de faux, le recours en
matière de contentieux électoral, le règlement de juges, le renvoi d’un juridiction à une autre,
la connexité, la récusation.

II-La fonction consultative


Le Conseil d’Etat peut émettre des avis :
- soit à la demande du Président de la République et des membres du gouvernement
- soit des avis contentieux
- soit des avis sur sa propre initiative.
A l’exception des avis contentieux, les autres avis sont de la compétence de la section
consultative du Conseil d’Etat qui comprend deux formations :
- la formation Administration qui est chargée de préparer l’avis du Conseil d’Etat sur toute
question relevant de la réglementation et du fonctionnement de l’administration publique ;
- la formation Economie et Finances qui est chargée de préparer l’avis du Conseil d’Etat sur
toute question à caractère économique et financier.

SECTION 3 : LA COURS DES COMPTES


La Cour des Comptes fait partie des institutions qui rendent la justice en Côte d’Ivoire.
L’article 144 nouveau de la Constitution affirme que « la Cour de cassation, le Conseil d’Etat
et la Cour des Comptes sont les institutions juridictionnelles représentatives du pouvoir
judiciaire. » Et l’article 152 de la Constitution consacre celle-ci comme « l’Institution
supérieure de contrôle des finances publiques ».
L’étude de cette Juridiction Suprême se fera à travers d’une part sa composition et son
organisation et d’autre part à ses attributions et son fonctionnement (Confère la loi organique
n°2018-979 du 27 décembre 2018 qui les institue).

SECTION 1 : COMPOSITION ET ORGANISATION


Paragraphe 1 : Composition
La Cour des Comptes se compose de magistrats du siège et de membres du Greffe. Elle est
par ailleurs dotée d’un secrétariat général.

A- Les magistrats du siège sont :


 le Président de la Cour des Comptes est nommé par le Président de la République
pour une durée de cinq ans renouvelable une fois, parmi les personnalités reconnues
pour leur compétence et leur expertise avérées en matière d’économie, de gestion, de
comptabilité ou de finances publiques. Il prête serment devant le Président de la
République avant d’entrée en fonction ;
 les présidents de chambre sont choisis parmi les conseillers maîtres
 les conseillers maîtres sont des magistrats hors hiérarchie du groupe B choisis
conformément aux dispositions de l’article 26 de la loi organique ;

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 -les conseillers référendaires sont des magistrats du premier grade choisis
conformément à l’article 27 de la loi précitée ;
 -les auditeurs sont des magistrats du deuxième grade choisis conformément à l’article
29 ;

B- Les membres du greffe sont :


-le Greffier en chef ;
-les greffiers
La Cour des comptes comprend un greffe dirigé par un greffier en chef assisté de
greffiers. Le greffe est placé sous l’autorité du secrétariat général.
Le greffier en chef est nommé par décret, sur proposition du ministre chargé de la
Justice. Il est choisi parmi les administrateurs des greffes et parquets. Le greffier en chef
propose au secrétaire général la répartition des greffiers dans les différentes chambres et dans
les différents services du parquet général près la Cour des comptes.
Les greffiers sont nommés par arrêté du ministre chargé de la Justice parmi les attachés
des greffes et parquets ou les secrétaires des greffes et parquets ayant au moins cinq
d’ancienneté.
L’article 31 précise le rôle du greffe. Il enregistre les comptes et les autres documents
comptables produits à la Cour des comptes et en assure la distribution aux chambres selon
le programme des travaux de la Cour.
Il prépare les audiences des différentes formations de la Cour et en assure le
secrétariat. Il veille à l’archivage desdits comptes et documents en relation avec le service des
archives.
Le greffe conserve pendant cinq ans les pièces vérifiées et garde pendant trente ans au
moins les comptes jugés et les pièces frappées d’observations ainsi que les originaux des
rapports et arrêts définitifs.

C- Le service de vérification (Article 32)


La Cour des comptes dispose d’un service de vérification composé de vérificateurs
comptables, mis à la disposition de la Cour, par le ministère en charge de la Fonction
publique, à la demande du Président. Ce service est dirigé par un chef de service nommé par
ordonnance du Président.

D- Le secrétariat général de la Cour des comptes (Article 33)


La Cour des comptes est dotée d’un secrétariat général dirigé par un secrétaire général
nommé par décret pris en conseil des ministres parmi les conseillers maîtres ou les conseillers
référendaires de la Cour des comptes, sur proposition du Président de la Cour des comptes.
Le secrétaire général assure, sous l’autorité du Président, le fonctionnement du greffe de la
Cour et des services administratifs.
Le secrétaire général peut recevoir du Président délégation de signature en matière de
gestion du personnel. Il assiste le Président dans la coordination des travaux et l’organisation
des audiences des formations de la Cour.

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Paragraphe 2 : Organisation
A- Le Président
Le Président est chargé de l’administration et de la discipline de la Cour des Comptes.
Il assure la direction générale, l’organisation et la coordination des travaux de la Cour. Il
contrôle les activités des magistrats du siège. Il est assisté du secrétaire général.
Le Président arrête le règlement intérieur de la Cour des comptes, après délibération
de l’assemblée générale. Il assure la gestion administrative des personnels et des moyens
affectés à la Cour.

B- Formation de la Cour des comptes (Articles 40 et suivants)


La Cour des comptes se réunit soit en audience solennelle, soit en chambre du conseil,
soit en chambres réunies, soit en audience ordinaire, soit en assemblée générale.
La Cour des comptes se réunit en audience solennelle pour :
- recevoir le serment des magistrats nouvellement nommés en cette qualité, et de comptables
public ;
- l’installation des membres de la Cour des comptes et du Procureur général et des membres
du parquet général près ladite Cour ;
- l’audience de rentrée ;
L’audience solennelle est publique, le secrétariat est assuré par le greffier en chef de la
Cour des comptes.
La Chambre du conseil se compose du Président, des présidents de chambre et des
conseillers maîtres. Elle est saisie des projets de rapport public, du projet de rapport sur
l’exécution des lois de finances, de la déclaration générale de conformité et des rapports
particuliers, qui peuvent être thématiques ou sectoriels, les délégations de service public, les
organismes de sécurité et de prévoyance sociale et les organismes bénéficiant d’un concours
financier de l’Etat. Elle adopte le budget, le programme annuel d’activités et les rapports
annuels de la Cour.

En chambres réunies, la Cour des comptes :


-formule des avis sur les questions de droit ;
-statue sur des questions relevant de plusieurs chambres ou sur l’examen de rapports traitant
de questions relevant des attributions de plusieurs chambres ;
La Cour des comptes se réunit en audience ordinaire pour juger les affaires qui sont
de sa compétence. La Cour comprend plusieurs chambres. Chaque chambre est composée
d’un président de chambre, de conseillers maîtres, de conseillers référendaires et d’auditeurs.
La chambre, composée d’au moins trois magistrats, siège et délibère en nombre impair.

La Cour des comptes se réunit en assemblée générale pour adopter ou modifier le règlement
intérieur de la Cour, débattre de toutes questions intéressant l’organisation et la discipline de
la Cour.

C- Le Parquet général près la Cour des comptes


Il est créé près la Cour des comptes un Parquet général placé sous l’autorité du ministre de
la Justice. Il comprend :
-le Procureur général ;
-un premier avocat général ;
-des avocats généraux.

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SECTION 2 : ATTRIBUTIONS
Il ressort de la loi organique suscitée que la Cour des comptes a des attributions
juridictionnelles, de contrôle et de consultation.

Paragraphe 1 : Attributions juridictionnelles


Elles sont énumérées aux articles 10 à 11 de la loi organique.
D’abord, la Cour des comptes connaît en premier et dernier ressort des litiges non
dévolus aux Chambres régionales des comptes installées dans les différents ressorts
territoriaux.
Ensuite, elle est compétente pour connaître des pourvois dirigés contre ses arrêts
définitifs dans les conditions prévues par les articles 53 in fine et 112 de la loi précitée.
Enfin, la Cour des comptes connaît en appel des jugements rendus par les chambres
régionales des comptes.
A cet effet, elle juge les comptes des comptables publics, les comptes des comptables
de fait et les faute de gestion.

Paragraphe 2 : Attributions de contrôle


La Cour dispose d’un pouvoir de contrôle de la gestion des services de l’Etat, des
établissements publics nationaux et des collectivités territoriales. Elle s’assure de l’effectivité
du recouvrement des ressources publiques, du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés
par les agents de l’Etat et les autres personnes morales de droit public.
Elle assure la vérification des comptes et le contrôle de la gestion :
 des sociétés, groupements ou organismes, quel que soit leur statut juridique, dans
lesquels l’Etat, les collectivités territoriales, les personnes ou établissements publics
nationaux, les organismes soumis au contrôle de la Cour des comptes détiennent
directement, séparément ou ensemble, plus de la moitié du capital ou des voix dans
les organes délibérant ;
 des personnes morales dans lesquelles l’Etat ou les organismes soumis au contrôle de
la Cour des comptes, détiennent directement, séparément ou ensemble une
participation au capital d’exercer un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion ;
 -des services publics concédés.
Par ailleurs, elle contrôle les organismes de sécurité et de prévoyance sociale, y compris les
organismes de droit privé qui assurent en tout ou en partie la gestion d’un régime de
prévoyance obligatoire et la gestion de tout organisme ou association qui bénéficie d’un
concours financier de l’Etat ou d’une autre personne morale de droit public, ainsi que de tout
organisme bénéficiant du concours financier des entreprises publiques et de leurs filiales.

Paragraphe 3 : Attributions consultatives (Article 21)


La Cour des comptes peut être consultée par le Gouvernement, le Parlement et le Conseil
économique, social, environnemental et culturel, sur toute question relative à la gestion des
services de l’Etat et des collectivités publiques.

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SECTION 4 : LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Le tribunal des conflits est une juridiction d’exception qui règle les conflits de
compétence entre les juridictions de l’ordre administratif et celles de l’ordre judiciaire.
Pour l’étude transversale de cette juridiction, nous allons nous référer à la loi n° 2020-884 du
21 octobre 2020 déterminant sa composition, ses attributions et son fonctionnement.
Paragraphe 1 : Composition du Tribunal des Conflits
Le Tribunal des conflits est composé, en nombre égal de membres de la Cour de Cassation et
du Conseil d’Etat.
Il comprend :
- Le Président de la Cour de Cassation
- Le Président du Conseil d’Etat
- Le Président de Chambre de la Cour de Cassation le plus ancien dans le grade le plus
élevé
- Le Président de Chambre du Conseil d’Etat le plus ancien dans le grade le plus élevé
- Deux Conseillers de la Cour de Cassation les plus anciens dans le grade le plus élevé
- Deux Conseillers d’Etat les plus anciens dans le grade le plus élevé du Conseil d’Etat
Outre les membres désignés ci-dessus, le Tribunal des conflits comprend :
- Deux conseillers de la Cour de Cassation suppléants désignés par le Président de
la Cour de Cassation
- Deux conseillers d’Etat suppléants désignés par le Président du Conseil d’Etat
Les membres suppléants remplacent les membres de leur ordre de juridiction en cas
d’empêchement.
Le tribunal des conflits est présidé alternativement tous les deux (02 ans par le
Président de la Cour de Cassation et le Président du conseil d’Etat. Ainsi, lorsque l’un des
Présidents de juridiction assure la présidence du Tribunal des conflits, l’autre Président ne
siège pas. Celui est remplacé par un Président de Chambre de sa juridiction qu’il désigne.
Le Tribunal des conflits siège donc dans les locaux de la haute juridiction de celui qui en
assure la présidence.

Paragraphe 2 : Attributions du Tribunal des Conflits


Le Tribunal des conflits règle les conflits de compétence entre les juridictions de l’ordre
administratif et celles de l’ordre judiciaire lorsque :
1) Une juridiction de l’un ou l’autre ordre lui a envoyé la question de compétence soulevée
dans un litige
2) Le Ministre, le Préfet du département ou le représentant de la collectivité concernée a
élevé le conflit
3) Les juridictions de l’un ou l’autre se sont déclarées pour connaitre d’un litige ayant le
même objet
4) Des décisions définitives présentent des contrariétés conduisant à un déni de justice,
ont été rendues par les juridictions administratives et judiciaires dans les instances
introduites devant chacune d’elles, pour des litiges portant sur le même objet
NB : il est bon de savoir que le conflit de compétence ne peut être élevé entre les juridictions judiciaires
et administratives en matière pénale ou suite à l’exercice de l’action née du préjudice causé par une
infraction, conformément aux dispositions de CPP.
Le Ministère d’un Avocat est obligatoire pour toute procédure devant ledit Tribunal, Mais l’Etat en
est dispensé.
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TITRE V : LES JURIDICTIONS D’EXCEPTIONS
Les juridictions d’exception également appelées juridiction spécialisées désignent les
tribunaux dont un texte spécial prévoit la répartition des compétences. À l’inverse des
juridictions de droit commun, ils ne peuvent juger que les litiges qui leur sont expressément
attribués par un texte.
Classées en deux (02) grandes catégories, nous étudierons successivement ces
juridictions que sont :
- Les juridictions d’exception en matière civile et
- Les juridictions d’exception en matière pénale

SECTION 1 : JURIDICTION D’EXCEPTION EN EN MATIERE EN MATIERE CIVILE

Paragraphe 1-Le Tribunal de Commerce


Les juridictions de commerce existent de par la loi n°2016-1110 du 08 décembre 2016 portant
sa création, son organisation et son fonctionnement. L’article 2 alinéa dispose que « Les
juridictions de commerce sont des juridictions spéciales de premier degré et de second
degré dénommées respectivement tribunaux de commerce et cours d’appel de commerce. »

Avant toute saisine du tribunal de commerce, la tentative de conciliation est obligatoire et se


tient entre les parties elles-mêmes, ou avec l’intervention d’n tiers, dans le cadre d’une
médiation ou d’une conciliation.

A-Attributions
Les attributions des tribunaux de commerce sont énumérées à l’article 9 de la loi sus-
énumérée.
Les juridictions de commerce connaissent :
-des contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants au sens de
l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ;
-des contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un groupement d’intérêt
économique ;
-des contestations entre toutes personnes, relatives aux actes de commerce au sens de l’Acte
uniforme portant sur le droit commercial général ; toutefois, dans les actes mixtes, la partie
non commerçante demanderesse peut saisir les tribunaux de droit commun ;
-des procédures collectives d’apurement du passif ;
-plus généralement, des contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les
commerçants à l’occasion de leur commerce et de l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil ;
-des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par les juridictions de
commerce.
Par ailleurs, les tribunaux de commerce statuent :
- en premier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à
vingt-cinq millions de francs ou est indéterminé ;
- en premier et dernier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige n’excède
pas vingt-cinq millions.
- Mais « Lorsque l’intérêt pécuniaire des actions excède la somme de trois cent millions de
francs les présidents des tribunaux de commerce sont tenus, hormis les cas de récusation,

50
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
de présider les audiences sans pouvoir de délégation, sous peine de nullité de la
procédure »18.
Au regard de ce qui précède, on peut affirmer que le tribunal de commerce a une
spécialisation en fonction de l’objet du litige dont il est amené à connaître. L’objet est en effet
commercial.

B-Organisation des tribunaux de commerce


Les tribunaux de commerce sont composés :
- d’un président ;
- de vice-présidents ;
- de juges ;
- de juges consulaires ;

Le tribunal de commerce comporte un greffe composé d’un greffier en chef et de greffiers qui
assistent la juridiction.
Il comprend également des personnels administratifs.
Les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur de la République près le
tribunal de première instance dans le ressort duquel se trouve le siège du tribunal de
commerce. Mais sa présence à l’audience est facultative.

Le tribunal de commerce se réunit :


- en audience solennelle ;
- en assemblée générale ;
- en audience ordinaire ;
- en chambre du conseil.

Paragraphe 2 : Organisation des cours d’appel du commerce


La Cour d’Appel du commerce est composée de :
- d’un Premier Président
- de Présidents de chambres
- de Conseillers
- de Conseillers Consulaires
Le tribunal de commerce comporte un greffe composé d’un greffier en chef et de greffiers qui
assistent la juridiction.
Il comprend également des personnels administratifs.
Les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur Général près la Cour
d’Appel dans le ressort duquel se trouve le siège de la Cour d’Appel de Commerce. Le peut
intervenir dans toutes les affaires et en tout état de cause de la procédure, sauf si l’affaire est
déjà mis en délibéré
.

18
Article 11 alinéa 1 de la loi n°2016-1110 du 08 décembre 2016 portant sa création, son organisation et son
fonctionnement
51
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
Paragraphe 3 : Le Tribunal du Travail
A-Compétence d’attribution
Les tribunaux du Travail connaissent les différends individuels pouvant s'élever à l'occasion
du contrat de travail ou d'apprentissage, y compris des différents relatifs aux accidents de
travail et aux maladies professionnelles, entre les travailleurs ou apprentis et leurs
employeurs ou maîtres.
Ces tribunaux ont également qualité pour se prononcer sur tous les différends individuels
relatifs à la validité et l'exécution des conventions collectives et règlements en tenant lieu.
Leur compétence s'étend également aux litiges entre travailleurs ou apprentis à l'occasion des
contrats de travail ou d'apprentissage.
Le président du tribunal du travail est Juge des référés en matière de conflits individuels du
travail. Il est assisté d'un greffier.

B-Compétence territoriale
Le tribunal compétent est celui du lieu du travail. Toutefois, pour les litiges nés de la
résiliation du contrat de travail et nonobstant toute attribution conventionnelle de juridiction,
le travailleur a le choix entre le tribunal de sa résidence et celui du lieu du travail.
Les tribunaux du travail sont constitués par une chambre spéciale des tribunaux de Première
instance. Leur compétence s'étend aux ressorts de ces derniers. Toutefois, lorsque
l'importance du marché du travail l'exige, il peut être créé auprès des sections détachées des
tribunaux de Première instance, des tribunaux du travail avec la même compétence
territoriale

C-Composition du Tribunal du travail


La chambre spéciale est composée :
-du président du tribunal de première instance ou de la section détachée ou d’un magistrat
de la juridiction désigné par lui, président ;
-d’un assesseur employeur et d’un assesseur travailleur pris parmi ceux figurant sur les listes
établies conformément à l’article 81.13 du code du travail
Le tribunal du travail est assisté d’un greffier.

Paragraphe 4 : le juge des tutelles19


La tutelle est un régime de protection de l’enfant (du mineur). Elle est une charge publique
et personnelle.
L’article 55 de la loi n°2019-572 du 26 Juin 2019 sur la minorité dispose : « Les fonctions du
Juge de Tutelles sont exercées par un juge nommé à cet effet.
En l’absence de Juge des Tutelles, un Juge peut être désigné par le Président du Tribunal pour
exercer provisoirement les fonctions de Juge des Tutelles
Le Juge des Tutelles compétent est celui du ressort du domicile ou à défaut celui de la
résidence du mineur »
Assisté du Greffier, le Juge des Tutelles rend des décisions sous forme de jugement ou
d’ordonnance, sauf en cas de simple administration judiciaire

19
Tout le long de cette section, plusieurs termes et parties sont empruntés de l’œuvre « organisation Judiciaire, la
réalisation du droit en Côte d’Ivoire» de son auteur Maitre Bilé Guy Serges ANOUGBO
52
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
Dans chaque juridiction du premier degré que ce soit au Tribunal de 1re instance comme en
Section détachée, se trouve un Juge des Tutelles. Sa compétence territoriale s’étend au ressort
juridictionnel du tribunal de son établissement.
L’article 1er de la loi n°2019-572 du 26 Juin 2019 dispose : « est mineure la personne qui n’a
pas encore atteint l’âge de dix-huit (18) ans accomplis »
Il importe de connaitre les attributions du juge des tutelles, ses pouvoirs dans l’exercice de
ses fonctions et de la procédure devant ce juge.

A- Les Attributions du Juge des Tutelles


Aux termes de l’article 56 de la loi sur la minorité, La Juge des tutelles exerce une surveillance
générale sur les administrations légales et les tutelles de son ressort.

Les pouvoirs du Juge des Tutelles sont énumérés ainsi qu’il suit : Il peut convoquer les
administrateurs légaux, tuteurs et autres organes tutélaires, leur réclamer des
éclaircissements, leur adresser des observations et prononcer contre eux des injonctions. Le
fait de ne pas déférer aux injonctions du juge des tutelles sans excuse légitime, est puni d ’un
emprisonnement d ’un à trois mois et d ’une amende de 100.000 à 500.000 francs, ou de l’une
de ces deux peines seulement.

1- Administration légale
L’administration légale est la situation juridique pendant laquelle les biens du mineur sont
gérés par les détenteurs de l’autorité parentale (notamment les parents …)
L’article 42 de la loi sur la minorité dispose : « L'administration légale emporte pour
celui des parents qui exerce l’autorité parentale pouvoir d'administration sur les biens de ses
enfants mineurs et disposition de leurs revenus ».
L’administration légale des biens du mineur est pure et simple ou sous contrôle du
juge des tutelles. Elle est pure et simple lorsqu’elle est exercée conjointement par les père et
mère qui exercent en commun l’autorité parentale. Elle est soumise au contrôle du juge des,
tutelles dans tous les autres cas prévus aux articles 6 à 9 de la loi précitée ;
Dans l’administration l’égale sous contrôle judiciaire, le Juge des Tutelles délivre un
certain nombre d’actes que sont :
- Un certificat d’administration légale
- Un certificat d’autorité parentale (art 3 à 12 de la loi sur la minorité / art. 3 « L’autorité
parentale est l’ensemble des droits et obligations reconnus aux père et mère sur la personne et
les biens de leur enfant mineur et ayant pour finalité l'intérêt de celui- ci »)
- Un certificat de délégation volontaire de l’autorité parentale (Article 13 : « Ceux qui
exercent l’autorité parentale peuvent, dans l’intérêt du mineur, déléguer volontairement et
temporairement à une personne physique jouissant de ses droits civils, les droits qu’ils
détiennent et les obligations qui leur incombent relatifs, tant à la garde du mineur, qu’à son
instruction, son éducation et sa surveillance ». /
Article 15 : « Le juge des tutelles, à la requête des parties intéressées agissant conjointement,
peut, en outre, décider qu’il y a lieu, dans l’intérêt de l ’enfant, de déléguer à la personne visée
à l ’article 13, tout ou partie des droits qui ne lui avaient pas été conférés »)
- Un certificat d’autorisation parentale (Une autorisation parentale est un écrit par lequel le
titulaire de l'autorité parentale sur un enfant mineur autorise ce dernier à accomplir un acte
ou conclure un contrat).

53
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
2- Les Tutelles
En droit, c’est l’institution conférant à un tuteur le pouvoir de prendre soin de la personne et
des biens d’un mineur ou d’un incapable (Gestion de la tutelle = tutélaire).
Aux termes de l’article 52, La tutelle est un régime de protection de l’enfant. Elle est une
charge publique et personnelle. Nul ne peut refuser de l’exercer sauf dérogations prévues
par les articles 63 et 64. La tutelle ne se transmet ni au conjoint ni aux héritiers du tuteur.
Toutefois, les héritiers sont responsables de la gestion de leur auteur.

Il ressort de l’article 53 que : « La tutelle s'ouvre :


1. Lorsque le père et la mère sont tous deux décédés ou hors d ’état de manifester leur
volonté en raison de leur incapacité, de leur absence, de leur éloignement ou de
toute autre cause ;
2. Lorsqu’ils sont tous deux déchus des droits de l ’autorité parentale ;
3. Lorsque le survivant est déchu des droits de l ’autorité parentale ;
4. Lorsque tous deux ont été condamnés pour abandon de famille dans le cas où la
victime de cet abandon est un de leurs enfants, et même si la déchéance de
l’autorité parentale n'a pas été prononcée ;
5. Lorsque la filiation de l’enfant n ’est pas établie à l’égard de ses parents ».

NB : Art. 54 : Si la filiation d ’un enfant vient à être établie à l’égard d ’un de ses parents après l
’ouverture de la tutelle, le juge des tutelles peut, à la requête de ce parent, substituer à la tutelle
l’administration légale sous contrôle du juge des tutelles, sur une période probatoire de deux ans. A
l’expiration de ce délai, l’administration légale devient pure et simple. Toutefois, en cas de défaillance
de l’administrateur légal, la tutelle de l’enfant est ouverte.

En cas d’ouverture de la tutelle, un conseil de famille est constitué par le juge des Tutelles
soit d’office, soit à la requête des parents et alliés des père et mère ou autres parties intéressées
ou du Ministère public.
L’article 69 dispose : « Le conseil de famille est composé de quatre à six membres, non
compris le juge des tutelles et le tuteur ». Notons que ces membres sont en parité de part et
d’autre.
Le juge des tutelles choisit les membres du conseil de famille parmi les parents du mineur
ainsi que parmi les alliés de ses père et mère, en évitant, autant que possible, de laisser une
des deux lignes sans représentation.

Le Juges des Tutelles peut prendre des décisions suivantes :


- L’ordonnance d’émancipation (L'émancipation est l ’état du mineur qui est affranchi
de l’autorité parentale ou de la tutelle. Il devient capable d'accomplir tous les actes de
la vie civile, et de faire le commerce sous les réserves ci-après : Le mineur peut être
émancipé par ses père et mère ou parents adoptifs, lorsqu'il aura atteint l'âge de seize
ans révolus. L’émancipation s'opère par la déclaration conjointe des parents ou de l’un
d ’eux en cas de désaccord. Cette déclaration est reçue par le juge des tutelles. Si l'un
des parents est dans l'impossibilité physique ou légale de manifester sa volonté, la
déclaration de l'autre suffit, s'il a lui-même conservé l'exercice de l’autorité parentale.

54
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- Le jugement d’hérédité (pour déterminer la qualité des héritiers)
- L’ordonnance de garde juridique et de pension alimentaire (attribuer la garde de ou
des enfants mineurs ainsi que la pension alimentaire à verser à un des parents
biologiques de ce derniers (père ou mère)

SECTION 2 : JURIDICTION D’EXCEPTION EN EN MATIERE PENALE

Paragraphe 1 : Les juridictions des mineurs


On a déjà précisé que la juridiction d’exception était celle qui, par opposition à la juridiction
de droit commun, pouvait connaître uniquement des infractions ou juger seulement les
délinquants qu’une loi lui défère expressément. Dans la législation ivoirienne, il existe, au
premier degré, trois juridictions de mineurs :
-une juridiction d’instruction, le juge des enfants ;
-deux juridictions de jugement, le tribunal pour enfants et le tribunal criminel pour mineur ;

A- Le juge des enfants


Selon l’article 787 du code de procédure pénale, le procureur de la République est chargé de
la poursuite des crimes, délits et contraventions commis par les mineurs de dix-huit ans.
Lorsqu’une infraction est imputée à un mineur de dix-huit ans, il ne peut être déféré aux
juridictions pénales de droit commun. Il n’est justiciable que du juge des enfants, des
tribunaux pour enfants ou du tribunal criminel pour mineurs. (Article 794)
Au total, en cas de crime, de délit ou de contravention commis par un mineur de dix-huit
ans, le procureur de la République en saisit obligatoirement le juge des enfants. Il est exclu
l’usage de la procédure de flagrant délit ou de citation directe.
Dans les tribunaux de première instance, il existe un ou plusieurs juges des enfants qui sont
nommés compte tenu de leurs aptitudes et de l’intérêt qu’ils portent aux questions de
l’enfance.
Le juge des enfants est donc une juge d’instruction. A ce titre, il effectue toutes les diligences
et investigations utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et à la connaissance de la
personnalité du mineur ainsi que des moyens appropriés à sa rééducation.
Il est assisté d’un greffier.
Les diligences faites, le juge des enfants procède comme il est dit à l’article 812 du code de
procédure pénale.

B-Le tribunal pour enfants


Il ressort du code de procédure pénale, que le tribunal pour enfants est composé :
-du juge des enfants ;
-de deux assesseurs. Les assesseurs titulaires et cinq assesseurs suppléants sont nommés pour
quatre ans par arrêté du ministre de la Justice sur proposition du juge des enfants. Ils sont
choisis parmi les personnes de l’un ou de l’autre sexe, âgées de de plus de trente ans,
ressortissantes de la Côte d’Ivoire et s’étant signalées par l’intérêt qu’elles portent aux
questions de l’enfance et par leur compétence. Ils prêtent serment avant leur entrée en
fonction.
Les fonctions de greffier sont assurées par le greffier en chef du tribunal de première instance
ou par un greffier.

55
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En définitive contrairement à la règle de séparation de l’instruction et du jugement, le juge
des enfants est pour certaines infractions non seulement juge d’instruction, mais encore une
juridiction de jugement.

C-Le tribunal criminel pour mineur


Le mineur âgé de seize ans au moins, accusé de crime est jugé par le tribunal criminel pour
mineurs. Celui-ci se réunit durant la session du tribunal criminel.
Il est composé :
-d’un président désigné et remplacé s’il y a lieu, dans les conditions prévues pour le président
du tribunal criminel par l’article 270 du CPP ;
-de deux membres magistrats choisis parmi les juges du tribunal de première instance et
désignés dans les formes prévues à l’article 275 CPP ;
-de deux assesseurs choisis dans les conditions déterminées par l’article 821 ;
Les fonctions du ministère public auprès du tribunal criminel pour mineurs sont remplies
par les membres du parquet près le tribunal de première instance telle que prévue par l’article
801 alinéa 2.
Les fonctions de greffier du tribunal criminel sont exercées par un greffier du tribunal de
première instance désigné dans les mêmes formes prévues aux articles 274 et 275 du CPP.

Paragraphe 2 : Le Tribunal Militaire


L’histoire de la justice militaire commence réellement en 1973 en Côte d’Ivoire. En effet, c’est
le 28 juin 1973 que le législateur s’est penché sur la question de la justice militaire en adoptant
la loi nᵒ73-293 portant création d’un Tribunal Militaire Spécial 20 .Cette juridiction
d’exception, exclusivement militaire 21 était chargée « de la répression des crimes et délits
contre la sûreté de l’État ainsi que les crimes et délits connexes commis par les militaires et
assimilés ». Par la suite, la loi nᵒ74-350 du 24 juillet 1974, abrogeant entre autres la loi de
1973 précitée, a institué un véritable code de procédure militaire. Ledit code a instauré les
Tribunaux Militaires de Bouaké et de Daloa et a défini une procédure dérogatoire au droit
commun suivie devant ces juridictions. Cependant, à ce jour seul le tribunal militaire
d’Abidjan a été ouvert par arrêté nᵒ0068117/MDSC/DAALM-JM du 11 décembre 1974 et
s’est vu confier les ressorts territoriaux de compétence des deux autres juridictions militaires
jusqu’à leur ouverture effective.
Dès 1978, la compétence des juridictions militaires était élargie aux personnels des corps de
la sûreté nationale suite à leur militarisation par les articles 1er et 2 de la loi nᵒ78-635 du 28
juillet 1978 portant statut des corps des personnels de la sûreté nationale. La loi 2001
portant statut des personnels de la sûreté nationale a réitéré l’assimilation de ceux-ci aux
militaires et a confirmé la compétence des juridictions militaires à leur égard.
Longtemps méconnu du grand public et même de ses propres justiciables le Tribunal
Militaire d’Abidjan s’est positionné comme un outil incontournable de la lutte contre
l’impunité des « hommes en armes » et l’instauration d’un véritable Etat de droit. Une
véritable bataille que cette institution judiciaire livre contre la délinquance militaire,

20
L’analyse de l’exposé des motifs de la loi n°73-293 portant création d’un tribunal militaire spécial et du procès-
verbal de la séance parlementaire du 28 janvier 1973 ayant abouti à son adoption permet de saisir toute l’urgence du
moment. Ladite analyse révèle également les craintes d’abus et autres inquiétudes des parlementaires face à cette justice
d’exception.
21
Aux termes des dispositions combinées des articles 2,3 et 4 de la loi n°73-293 du 28 juin 1973, les fonctions du
Ministère Public autant que celles du siège et de l’Instruction étaient assurées par les militaires par décret.
Le greffier était désigné par le ministre de la Défense.
56
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notamment les actes répréhensibles de corruption, d’extorsion de racket, de complot contre
l’État et d’atteinte à la sûreté de l’État.
Comment appréhender cette juridiction d’exception qu’est le tribunal militaire ? Autrement
dit, quelles sont ses missions et sa composition ? Quels sont ses compétences et son
fonctionnement ? Ces questions relèvent d’un intérêt pertinent en ce sens que le régime
juridique applicable aux justiciables de cette juridiction est spécial.
Ainsi, le présent exposé s’articulera d’une part, autour de la mission et de l’organisation du
tribunal militaire et d’autre part de sa compétence et son fonctionnement.

A- Missions et Organisation du Tribunal Militaire


L’institution du code de procédure militaire et la création des tribunaux militaires d’Abidjan,
de Daloa et de Bouaké ressortent de loi nᵒ74-350 du 24 juillet 1974 et du décret nᵒ74-490 du
03 octobre 1974. Le ressort territorial de chaque tribunal se confondait avec le ressort de la
région militaire concernée. Mais dans la pratique, seul le tribunal militaire d’Abidjan
fonctionne, et il lui est confié certaines missions.
Quant à son organisation, il comprend un parquet militaire, le siège caractérisé par une
juridiction d’instruction et une chambre de jugement et enfin du greffe.

I- Les missions
Bien que le tribunal militaire ait une mission essentiellement répressive, il n’en demeure pas
moins qu’il s’évertue au règlement de certains litiges à caractère civil et joue un rôle de
conseil..
1 - Les missions juridictionnelles
Le tribunal militaire est essentiellement une juridiction répressive. Il exerce une
mission pénale. En effet, il exerce l’action publique à l’égard des militaires, gendarmes et
policiers pour des faits qualifiés crimes, délits, ou contraventions, commis dans l’exercice de
leur fonction ou à l’occasion du service ou encore toutes infractions commises dans l’enceinte
d’un établissement militaire.
Par ses actions, le tribunal militaire participe au renforcement de la lutte contre la
délinquance militaire et a l’instauration d’un État de droit.

2- Les missions de règlement des litiges à caractère civil


Précédemment indiqué le tribunal militaire est une juridiction essentiellement
répressive. Cependant, de façon coutumière il règle selon une procédure de conciliation
certains litiges opposant des militaires a d’autres citoyens, et relevant en fait et en droit de la
compétence des juridictions de droit commun. Les motifs de cette attribution de compétence
sont à rechercher d’abord dans la spécificité de la fonction militaire. En effet, le statut impose
à son titulaire le respect de l’éthique propre au métier et qui a pour corollaire la dignité, la
discipline, la loyauté et l’honneur. Et tout comportement susceptible de violer ces valeurs
doit être réprimé.
Dans tous les cas, une fois la décision rendue, le tribunal militaire se charge de son
exécution. Il en va ainsi en matière de concubinage ou la saisine du tribunal est faite par
plusieurs femmes pour des problèmes liés aux grossesses non reconnues par leurs présumés
auteurs. Il s’agit des jeunes femmes ayant vécu en union libre avec des militaires ont contracté
une grossesse, portent plainte au tribunal militaire, lorsque le prétendu auteur soit, refuse de
reconnaitre ladite grossesse soit bien que l’ayant reconnue refuse de s’en occuper.

57
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3 - La mission de conseil
En vertu de l’article 3 du code de procédure militaire, le commissaire du gouvernement fait
office de conseiller juridique des ministres de la Défense et de la Sécurité. Mais dans la
pratique, ces ministres préfèrent s’entourer de conseillers juridiques recrutés au sein du
cabinet. Cependant, les grands commandements font appel à l’expertise des magistrats
militaires lorsque des questions de droit sont posées. C’est ainsi que l’État-major général des
armées et le commandement Supérieur de la Gendarmerie ont fait appel au tribunal militaire,
pour l’interprétation de certaines ordonnances.

II- L’organisation du Tribunal Militaire


Au sein du tribunal militaire, l’on retrouve le service du parquet militaire, celui du siège et
un service de greffe rattaché au parquet.

1- Le parquet militaire
Le parquet militaire est dirigé par un procureur militaire appelé commissaire du
gouvernement. Il est surnommé Capitaine de Vaisseau-Major, et est nommé par décret. Il est
le chef du parquet militaire et chef de l’administration du tribunal militaire.
Conformément l’article 3 CPM, il a rang et prérogatives de chef de corps, assisté de substituts
(Substituts du Commissaire du gouvernement), tous issus des différentes composantes des
forces de défense et de sécurité qu’il affecte à leur fonction. Ils sont tous magistrats.
À l’instar du Procureur de la République, le commissaire du gouvernement est chargé de
poursuivre les infractions militaires et de droit commun commises par les justiciables du
tribunal militaire dans l’exercice de leurs fonctions.
D’après l’article 38 du code de procédure militaire : « les dispositions du code de procédure
pénale relatives :
1° À la Police Judiciaire, en ce qui concerne la Police Judiciaire militaire ;
2° Au Procureur Général et au Procureur de la République, en ce qui concerne
le Commissaire du Gouvernement ;
3° Au Juge d’Instruction, en ce qui concerne le Juge d’Instruction militaire ;
4° À la Chambre d’Instruction, en ce qui concerne la Chambre de Contrôle de
l’Instruction ;
5° À la Cour d’Assises, en ce qui concerne la chambre de jugement.
Sont de pleins droits applicables, sauf prescriptions contraires du présent code.»
Cependant, à la différence du Procureur de la République qui engage les poursuites de sa
propre initiative, donc qui a l’opportunité des poursuites, le commissaire du gouvernement
agit sur ordre des ministres en charge de la Défense et de la Sécurité intérieure. Ils sont
appelés Autorités investies des pouvoirs judiciaires. Ce sont donc ces derniers, autorités
politiques et administratives qui ont l’opportunité des poursuites. Il s’ensuit qu’à l’égard des
militaires et des gendarmes, le Ministre de la Défense est désigné comme autorité exerçant
les pouvoirs de poursuites judiciaires militaires. Quant au Ministre de la Sécurité,
prérogatives lui est donné en matière de poursuites judiciaires militaires à l’égard des
personnels de la police nationale.
Ces deux membres du gouvernement signent un document de poursuites appelé ordre de
poursuite, qui ordonne immédiatement au procureur militaire d’engager l’exercice de
l’action publique. Dès cet instant, celui-ci dispose de tous les pouvoirs reconnus à Monsieur
le Procureur de la République en matière de poursuites.
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2 - Le siège
Le siège comprend les juridictions d’instruction qui sont composées des juges d’instruction
militaire et de la chambre de contrôle de l’instruction, ainsi que de la chambre de jugement.

- Les juges d’Instruction


En ce qui concerne les juges d’instruction, ils sont répartis en trois (03) cabinets
d’instruction, dont celui du doyen des Juges d’Instruction. Ceux-ci (comme ceux du parquet)
sont des magistrats militaires nommés par décret aujourd’hui, mais autrefois ils l’étaient par
arrêté des ministres compétents. Les fonctions de juge d’instruction sont référencées au Titre
2 du code de procédure militaire.
À la différence des juges d’instruction de droit commun qui sont nommés juges dans
leurs fonctions, le juge d’instruction militaire est affecté dans cette tâche par le commissaire
du gouvernement. À ce propos, l’article 4 alinéa 3ème de la loi nᵒ74-350 du 24 juillet 1974,
relative à l’institution d’un code de procédure militaire énonce que ; « Les Substituts du
commissaire du gouvernement et les juges d’instruction militaire peuvent
indifféremment, sur décision du commissaire du gouvernement, remplir les fonctions du
Ministère Public ou procéder à l’information à condition qu’il s’agisse d’affaires distinctes
tant par les faits que par les inculpés ». Le juge d’instruction militaire est
administrativement sous l’autorité du commissaire du gouvernement, mais judiciairement,
il est sous l’autorité de la loi.
La question qui se dégage de cette situation est la suivante : Le juge d’instruction
militaire peut-il réellement travailler en toute indépendance sur le plan judiciaire tout en
étant administrativement sous la subordination hiérarchique du commissaire du
gouvernement ? Le débat à cet effet reste ouvert. Assistés de greffiers militaires, les juges
d’instruction militaires accomplissent des tâches identiques à celles des juges d’instructions
des juridictions de droit commun. Ils sont saisis par un réquisitoire introductif 22 .
Contrairement aux juges d’instruction de droit commun qui sont saisis in rem (sur des faits),
les juges d’instruction militaires sont saisis aussi bien sur des faits que des personnes. Ils ne
peuvent ni étendre les poursuites ni les aggraver sans avoir au préalable provoqué les
réquisitions écrites du parquet. Ils instruisent en premier et en dernier ressort en toute
matière.
L’information des dossiers criminels au tribunal militaire n’est donc pas soumise au
principe du double degré de juridiction (Juge d’instruction et Chambre d’instruction) comme
en droit commun.

-La Chambre de contrôle de l’Instruction


La Chambre de Contrôle de l’Instruction est prévue par l’article 20 du code de procédure
militaire. Elle est présidée par un Président, membre du siège de la Cour d’Appel, assisté de
deux (02) assesseurs dont un juge militaire ayant le grade d’Officier Supérieur ou Général.
La Chambre de Contrôle de l’instruction connait des référés, appels et requêtes dont elle peut
être saisie durant l’information (Art.93 CPM). Elle se réunit sur convocation de son Président
(Art. 94 CPM). Les fonctions de commissaire du gouvernement sont assurées par le
commissaire du gouvernement (Art.20 CPM). Elle « …statue uniquement sur pièces, hors

22
Document par lequel le ministère public saisit le juge d’instruction en lui demandant d’informer sur certains faits
paraissant constituer une infraction, Gérard CORNU, Vocabulaire Juridique, édition 2015, page 901
59
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la présence du commissaire du gouvernement, de l’inculpé et de la défense » et « … ses
décisions sont rendues en Chambre du Conseil » (Art.95 CPM).
Contrairement aux décisions des chambres de jugement du tribunal militaire qui ne sont pas
motivées, les décisions de la chambre de contrôle de l’instruction sont motivées (Art.99
CPM).
-la chambre de jugement
Chacune des chambres de jugement du tribunal militaire comprend un Magistrat de
l’Ordre Judiciaire, Président et quatre (04) juges (Art.16 CPM). En outre, la composition
présente quelques spécificités qui doivent être respectées à peine de nullité. Les articles 17,
18, et 19 du CPM fixent les différentes compositions des chambres de jugement (voir le
tableau en annexe). Cependant, la composition doit respecter un principe sacro-saint qui
stipule qu’on ne peut être jugé par son subordonné. À cet effet, l’article 18 du Code de
procédure militaire dispose que : « aucun des juges ne peut avoir un grade inférieur à celui
du prévenu. En cas d’égalité de grade avec le prévenu, le juge militaire doit justifier d’une
ancienneté supérieure. En cas de pluralité de prévenus, la composition de la chambre de
jugement est celle prévue pour le prévenu du grade le plus élevé ». Le Président de la
chambre de jugement est toujours un magistrat de l’ordre judiciaire exerçant à la Cour
d’Appel les fonctions de Président de Chambre ou de Conseiller.
Cependant, lorsque le prévenu a le grade de général, le tribunal doit être présidé par
un Magistrat Hors Hiérarchie. Les magistrats de l’ordre judiciaire, les juges militaires et leurs
suppléants appelés à composer la Chambre de Jugement et la Chambre de Contrôle de
l’instruction sont désignés pour chaque année civile par décret. Ils exercent cependant leurs
fonctions tant qu’il n’a pas été procédé à de nouvelles désignations. Mais pour chaque
formation de jugement, c’est le président du tribunal militaire qui désigne les juges militaires.
S’agissant du jugement, il a lieu quand les prévenus et les inculpés sont renvoyés devant le
tribunal militaire soit par un ordre de citation directe, soit par une ordonnance de renvoi du
juge d’instruction militaire ou soit par une ordonnance de dessaisissement d’une juridiction
de droit commun, ou par suite de revendication ou encore pour tout autre motif au profit de
la juridiction militaire. La chambre de jugement qui n’est pas permanente à une composition
semblable à celle des Tribunaux Criminels anciennement Cours d’Assises. Elle est donc
composée de magistrats professionnels, de juges militaires ou assesseurs.
Le tableau ci-dessous récapitule la composition des différentes formations de
jugement23.

23
Tableau emprunté de l’œuvre « organisation judiciaire – la réalisation du droit en Côte d’Ivoire » de son auteur
Maitre Bilé Guy Serge ANOUGBO
60
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Prévenu Président Juges civils Juges militaires
01 Officier Supérieur
Conseiller à la Cour
Homme de troupe Néant 02 Officiers Subalternes
d’Appel
01 Sous-Officier

01 Officier Supérieur
Conseiller à la Cour 02 Officiers Subalternes
Sous-Officier Néant
d’Appel 01 Sous-Officier du même
grade que le prévenu
01 Officier Supérieur
Conseiller à la Cour 02 Officiers Subalternes dont
Officier Subalterne Néant
d’Appel 01 du même grade que le
prévenu
04 Officiers Supérieurs ou
Président de Chambre
Officier Supérieur Néant généraux dont 01 du même
de la Cour d’Appel
grade que le prévenu
02 Conseillers ou 02
Magistrat hors
Officiers généraux Présidents de Chambre 02 Officiers Généraux
Hiérarchie
à la Cour d’Appel

3- Le greffe
Il est rattaché au parquet. Dirigé par un greffier en chef, il comprend plusieurs greffiers
et des huissiers appariteurs. Tous sont des militaires ou assimilés. À cet effet, pour être
greffier militaire, il faut avoir le niveau bac+2, être sous-officier des forces armées de Côte
d’Ivoire, de la gendarmerie nationale ou de la police nationale, passer le test de greffier
militaire. Une fois admis, il faut par la suite suivre une formation à l’école des greffes de
l’Institut National de Formation Judiciaire, à la fin de celle-ci, prêter serment selon l’article
26 du Code de Procédure Militaire. Quant aux huissiers appariteurs, ils sont formés sur le
tas pour le moment. Pour une organisation efficiente du travail, le greffe a été divisé en
bureaux de travail. Ainsi, nous avons :
- Le Bureau Poursuites : chargé de faire suivre tous les actes de poursuites
(Réquisitions aux fins d’enquête, les avis de poursuites, les ordres de poursuites et
les ordres de citation directe).
- Le Bureau Enrôlement : il est chargé d’enrôler les dossiers qui doivent faire l’objet
de jugement.
- Le Bureau Audiences : avant l’audience, il élabore les projets de réunion du tribunal
à la signature du commissaire du gouvernement et les projets d’ordre de convocation
du tribunal à la signature de l’autorité investie des pouvoirs judiciaires. À l’audience,
un membre du bureau tient le plumitif. Après l’audience, ce bureau dresse tous les
actes préalables à l’exécution des décisions du tribunal militaire. Il réceptionne aussi
les déclarations de pourvoi en cassation et procède aux notifications aux différentes
parties.

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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
III- Compétences et fonctionnement du tribunal militaire
La compétence d’une juridiction signifie son aptitude à connaitre d’une cause. Les
compétences sont au nombre de quatre à savoir :
- La compétence rationae loci ou compétence territoriale
- La compétence rationae personae ou compétence personnelle
- La compétence rationae temporis ou compétence temporelle
- La compétence rationae materiae ou compétence matérielle.
Relativement à son fonctionnement, le tribunal militaire présente des spécificités par rapport
aux juridictions de droit commun.

1- Les compétences
Le code de procédure pénale distingue les compétences en temps de paix et en temps de
guerre ou période exceptionnelle.

a) En temps de paix

- De la compétence territoriale
Du côté de la compétence territoriale, l’article 15 du CPM dispose : « est territorialement
compétente la juridiction militaire du lieu :
- Soit de l’infraction ;
- Soit de l’affectation ou du débarquement ;
- Soit de l’arrestation, même opérée pour autre cause, de tout auteur, coauteur
ou complice ;
- Soit de la résidence »
Il faut mentionner que seul le tribunal militaire d’Abidjan a ouvert ses portes. Il a donc une
compétence nationale.
Par ailleurs, l’article 240 du CPM prévoit que la compétence du tribunal militaire s’étend aux
infractions commises hors du territoire.

- De la compétence personnelle
Les justiciables du tribunal militaire d’Abidjan sont les militaires, gendarmes, les personnels
de la police nationale et les autres catégories de personnes.
C’est l’article 5 du CPM qui affirme la compétence personnelle du tribunal militaire à
l’égard des militaires et gendarmes. En ce qui concerne les membres de la police nationale
ils sont justiciables des juridictions militaires en vertu de la loi du 09 aout 2001 portant statut
des personnels de la police nationale qui a consacré ce principe.
En ce qui concerne les autres justiciables du tribunal militaire, ils sont prévus à l’article 6 du
Code de Procédure Militaire.

- De la compétence temporelle
La compétence temporelle en matière de poursuites par la juridiction militaire ne présente
pratiquement pas de particularité par rapport au droit commun. Les règles de prescription
définies par les articles 11 et 12 du code de procédure pénale, s’appliquent en matière de
procédure militaire. Cependant, pour certaines infractions purement militaires le Code de
Procédure Militaire déroge auxdites dispositions. Il en va ainsi des cas de désertion.

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- De la compétence matérielle
À ce niveau, il faut distinguer la nature de l’infraction de ses circonstances. S’agissant
des infractions, il faut souligner que la juridiction militaire est compétente pour connaitre des
infractions militaires prévues par les articles 498 à 563 du Code Pénal et qui sont non
connexes à des infractions de droit commun relevant de la compétence d’autres tribunaux.

b- En temps de guerre ou périodes exceptionnelles


On parlera dans cette catégorie des Prévôtaux qui sont des organes de décision
exerçant leur compétence sur l’étendue du territoire en temps de guerre et hors du territoire
national aux endroits où sont stationnées les troupes ivoiriennes.
Le personnel est désignés sous l’appellation prévôt est constitués de gendarmes qui
exercent des missions de polices générale et de police judiciaire militaire.
La période exceptionnelle s’entend comme l’indique l’article 36 CPM, les situations
de mobilisations même partielles des troupes, d’état d’urgence, ou d’état de siège. Au cours
de cette période, la compétence matérielle et la compétence personnelle du tribunal militaire
connaissent d’une extension considérable. Ces organes sont saisis en vertu de la décision de
renvoi de l’autorité investie du pouvoir judiciaire.

- De l’extension de la compétence matérielle


Selon l’article 31 CPM, la compétence des juridictions militaires s’étend :
 À toute infraction à la sureté de l’Etat ;
 À toutes infractions : dont l’auteur ou complices est militaire ;
 Commise contre les forces armées, leurs établissements ou matériels.

- De l’extension de la compétence personnelle


Édictée par l’article 32 CPM, elle concerne en plus des personnes visées aux articles 5 et 6 du
CPM, en temps de guerre ou période d’exception, tous les personnels employés à titre
statutaire ou contractuel par les forces armées, les personnes à la suite des Armées en vertu
d’une autorisation et les justiciables de la juridiction militaire au sens de l’article 31 du CPM.
Il résulte donc des dispositions des articles 31 et 32 du CPM qu’en période exceptionnelle,
des personnes étrangères au métier des Armées notamment des civils peuvent être
poursuivies par la juridiction militaire

2) Fonctionnement du tribunal militaire


Annoncé plus haut, le tribunal miliaire présente des spécificités par rapport aux juridictions
de droit commun.
Et ces spécificités sont présentes dans la mise en mouvement de l’action publique, dans la
procédure de jugement, les voies de recours et l’exécution des décisions du tribunal militaire.

a- L’action publique et la procédure de jugement

- L’action publique
L’exercice et la mise en mouvement de l’action publique sont dévolus dans un premier
temps aux autorités administratives et par la suite exercés par le commissaire du
gouvernement, aidé dans sa tâche par la police judiciaire militaire.
L’article 64 du code de procédure militaire énonce que : « l’action publique est mise
en mouvement par l’Autorité Investie des Pouvoirs Judiciaires sur ordre de poursuite
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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
adressé au commissaire du gouvernement ». Cette autorité a donc l’opportunité des
poursuites. Mais qui sont ces Autorités Investies des Pouvoirs Judiciaires ? Selon l’article 1er
du décret nᵒ74-483 du 03 octobre 1974, portant désignation de l’autorité qui exercera les
pouvoirs judiciaires prévus par le code de procédure pénal militaire, « Les pouvoirs prévus
à l’article 3 (1) du code de procédure militaire sont exercés par le Ministre de la Défense et
du Service Civique ». C’est donc le Ministre chargé de la Défense qui est l’Autorité investie
des pouvoirs judiciaires à l’égard des militaires des Forces Armées de Côte d’Ivoire et des
gendarmes de la gendarmerie nationale. Quant aux personnels de la police nationale, c’est le
décret N°79-41 du 17 janvier 1979 portant désignation de l’autorité exerçant les pouvoirs
judiciaires prévus par le code de procédure militaire à l’égard des personnels des corps de
la sûreté nationale qui fait du Ministre chargé de la police nationale, l’autorité investie des
pouvoirs judiciaires.
L’article 66 du CPM précise que l’ordre de poursuite est sans recours. En d’autres
termes, une fois que l’action publique est mise en mouvement par la signature de l’ordre de
poursuite par le ministre compétent, plus personne y compris cette autorité ne peut l’arrêter.
Mais que se passe-t-il lorsque l’Autorité Investie des Pouvoirs Judiciaires (AIPJ) refuse de
signer l’ordre de poursuite ? Dans ce cas, le dossier est momentanément classé car, au niveau
de la procédure pénale militaire, il n’existe pas la voie de la plainte avec constitution de partie
civile qui peut permettre de contourner le refus ou l’inertie du parquet dans la mise en
mouvement de l’action publique.
Quant au commissaire du gouvernement, il n’a pas l’initiative de la mise en
mouvement comme le Procureur de la République mais il exerce l’action publique une fois
qu’elle est mise en mouvement par l’AIPJ avec signature de l’ordre de poursuite. En théorie,
il intervient en second plan. Mais en pratique, compte tenu du caractère technique de l’ordre
de poursuite (qualification juridique des faits, qualification de l’infraction, les conditions de
la poursuite, les textes applicables…) c’est le commissaire du gouvernement qui établit le
projet d’ordre de poursuite à soumettre à la signature de l’Autorité Investie des Pouvoirs
Judiciaires. Ainsi, lorsque les procès-verbaux arrivent des unités de police judiciaires, le
commissaire du gouvernement les attribue aux différents substituts pour règlement. Le
dossier peut être soit classé sans suite et un avis de classement sans suite sera notifié au
plaignant, soit il peut être transmis à la juridiction compétente ou encore il peut être retourné
à l’unité de police judiciaire pour complément d’enquête. Enfin, il peut faire l’objet de
poursuite pénale devant la juridiction militaire.
Dans ce cas, un avis de poursuite et un projet d’ordre de poursuite sont élaborés pour
les dossiers devant faire l’objet de poursuites pénales. Ces documents accompagnés des
procès-verbaux sont transmis à l’AIPJ pour décision. Il faut dire que l’avis du Commissaire
du Gouvernement n’est pas un avis simple ni un avis conforme. C’est un avis obligatoire qui
ne lie pas l’AIPJ. En effet, si l’avis du commissaire du gouvernement est obligatoire, l’AIPJ
n’est pas lié par cet avis dans sa prise de décision. L’avis du commissaire du gouvernement
permet simplement à l’AIPJ de bien comprendre le dossier qui lui est soumis. Cette autorité
dispose d’un véritable pouvoir discrétionnaire et non d’une compétence liée dans
l’appréciation de la suite à donner au dossier. Après la signature de l’ordre de poursuite le
dossier revient au tribunal. Le commissaire du gouvernement choisi soit la procédure en
citation directe soit l’information, conformément aux dispositions de l’article 68 du code de
procédure militaire. Si le mis en cause est conduit devant le Commissaire du Gouvernement,
il peut être placé sous ordre d’incarcération provisoire pour une durée maximale de dix (10)
jours, selon l’article 82 du CPM, dans l’attente de l’ordre de poursuite de l’AIPJ. Si dans ce

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délai, l’ordre de poursuite est délivré et que le commissaire du gouvernement choisit la voie
de la citation directe, il peut confirmer l’ordre d’incarcération pour un nouveau délai de 60
jours, conformément à l’article 84 du code de procédure militaire. Passé ce délai, le mis en
cause est mis d’office en liberté. Lorsque le dossier doit suivre la voie de l’information, le
commissaire du gouvernement prend un réquisitoire introductif et la détention préventive
ne peut être consécutive qu’à un mandat de dépôt.
Les dispositions des articles du code de procédure pénale relatifs à la durée et aux
prolongations du mandat de dépôt ne sont pas applicables.
La police judiciaire quant à elle, est assurée, sous la direction du commissaire du
gouvernement, par les personnes désignées à l’article 27 du code de procédure pénale et par
les officiers de police judiciaire des Forces Armées tel que prévu par les articles 41, 45 et
suivants du CPM.

- La procédure de jugement
La procédure de jugement est subdivisée en l’étape des actes préparatoires, et l’étape
du jugement a proprement parlé.
 Les actes préparatoires à la tenue de l’audience.
Certaines formalités substantielles sont nécessaires avant la réunion de la
formation de jugement. Ces formalités sont édictées par les articles 100 et 101 du
Code de Procédure militaire. De la lecture combinée de ces articles, il ressort que
le commissaire du gouvernement est chargé de :
✔ Signifier la décision de citation directe et de l’ordonnance de renvoi au prévenu
;
✔ Adresser à l’Autorité Investie des pouvoirs Judiciaires une demande aux fins
de réunion du Tribunal ;
✔ Aviser les membres qui composent la formation de jugement.
L’autorité investie des pouvoirs judiciaires (AIPJ) quant à elle, délivre un ordre de
convocation du tribunal qui fixe la date, le lieu et l’heure de la ténue de l’audience. Et le refus
d’un juge de siéger constitue une infraction.
 Du jugement
Le tribunal se réunit au lieu et à l’heure indiquée dans l’ordre de convocation (Art.102 CPM).
En vertu des pouvoirs dont il dispose, le président a la police de l’audience. À ce titre, il
coordonne la comparution du prévenu, la production et la discussion des preuves et recueille
les exceptions, nullités et incidents. Dirige le déroulement et de la clôture des débats et de la
décision.

Des pouvoirs du président.


Le président de la formation du jugement dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour la
direction des débats et la découverte de la vérité (Art.103 du CPM). S’il est vrai qu’il n’existe
pas de procédure de flagrant délit dans les modes de poursuite du Tribunal Militaire, les
articles 105 et 106 du CPM en constituent une exception. En effet, le tribunal peut juger sur
le champ quiconque (civil ou militaire) commet une infraction à l’audience sans ordre de
poursuite de l’autorité investie des pouvoirs judiciaire.
En dehors, des crimes et délits visés aux articles 105 et 106 du CPM, le Président ne peut
juger les autres infractions. Il en dresse procès-verbal et conduit les auteurs devant la
juridiction compétente (Art.107 du CPM).

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De la comparution du prévenu à l’audience.
Une des spécificités de la procédure au tribunal militaire, que ce soit en phase d’instruction
ou de jugement, c’est que le prévenu comparait toujours assisté d’Avocats inscrits au barreau
de Côte d’Ivoire ou d’un pays étranger sous réserve de réciprocité, ou à défaut de défenseurs
militaires agréés par le commissaire du gouvernement. Les défenseurs militaires sont
commis d’office. Ils ont les mêmes obligations et ils jouissent des mêmes prérogatives que les
Avocats mais leur ministère est gratuit (Art.29 du CPM).

De la production et la discussion des preuves.


Le président fait lire par le greffier l’ordre de convocation et la liste des témoins qui devront
être entendus, soit à la requête du ministère public, soit à celle du prévenu, soit celle de la
partie civile.

Des exceptions et incidents.


Elles sont résumées dans les articles 114 et suivants du Code de Procédure militaire. Outre,
pour les exceptions, nullités et incidents, l’article 117-1er du CPM énonce que : « il appartient
à la juridiction saisie d’apprécier la légalité de sa composition et de sa compétence d’office
ou sur déclinatoire ». L’exception qui est la plus soulevée lors des audiences du tribunal
militaire d’Abidjan est l’exception d’incompétence matérielle.
Cependant, pour être recevables, toutes les exceptions doivent faire l’objet d’un mémoire
unique et être déposées « in limine litis », c'est-à-dire avant tout débat sur le fond, le tribunal
statuant par un seul jugement en la matière (Art.117 du CPM).

Du déroulement de la clôture des débats et de la décision de formation de jugement.


Elles sont contenues dans les articles 120 et suivants du code procédure militaire. Et en ce
qui concerne la décision de formation de jugement, le Tribunal Militaire d’Abidjan rend des
décisions tant sur l’action publique que sur l’action civile avec cependant une restriction.
Fonctionnant comme les anciennes cours d'assises, le tribunal militaire ne rend jamais de
décision sur le siège. À la fin des débats, l’affaire est mise en délibéré, et le tribunal se retire
pour délibérer. Le vote se fait à bulletin secret et la décision est prise à la majorité des voix.
Après la délibération, la décision est rendue en audience publique. Les juridictions militaires
prononcent les mêmes peines que les juridictions de droit commun. Il n’y a de peine
d’amende en cas de condamnation pour une infraction militaire. Sur l’action civile, il faut
préciser que le tribunal militaire n’est compétent pour recevoir la constitution de partie civile qu’en
cas de fait qualifié crime (Art.8 du CPM). Lorsque le tribunal retient sa compétence, l’audience
est renvoyée à une date fixée par le Président pour y statuer. Et très souvent le prévenu, étant
agent de l’Etat, est condamné soit « solidairement avec l’État de Côte d’Ivoire » ou « sous
garantie de l’État de Côte d’Ivoire ».

2 - Les voies de recours et l’exécution des décisions


Bien qu’étant des jugements, les décisions du tribunal ne peuvent faire l’objet que d’un
pourvoi en cassation devant la Cour de Cassation. Ainsi, au terme de l’article 150 du Code
de Procédure militaire « les jugements rendus par les juridictions militaires peuvent être
attaqués par la voie du pourvoi en cassation devant la Cour Suprême, pour les causes, dans
les formes et conditions et avec les effets prévus par les articles 561 et suivants du code de
procédure pénale… ».

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Le pourvoi en cassation doit se faire dans un délai de cinq (05) jours francs (Art.151 du CPM).
Elles peuvent également faire l’objet de demande de révision (Art. 156 du code de procédure
militaire).

En ce qui concerne l’exécution des décisions du tribunal militaire, les articles 187 et
suivants du Code de Procédure Militaire disposent que les décisions des juridictions
militaires sont exécutées conformément aux règles de droit commun. Lorsque la décision de
condamnation est devenue définitive, le condamné peut saisir l’autorité investie des
pouvoirs judiciaires d’une requête aux fins de suspension d’exécution de peine. Les articles
194 et suivants du Code de Procédure Militaire organisent cette procédure. Ce droit n’est
enfermé dans aucun délai et peut s’exercer dès que le jugement est devenu définitif. Dans la
pratique, il revient au condamné d’adresser une requête à l’autorité investie des pouvoirs
judiciaires. Cette autorité transmet cette requête au commissaire du gouvernement pour avis.
C’est un avis obligatoire et non conforme.
L’autorité investie des pouvoirs judiciaires dispose d’un pouvoir discrétionnaire dans
la prise de décision.
En définitive, il convient de retenir que le tribunal militaire est une juridiction dont la
spécificité se révèle tant dans ses organes, ses attributions que dans son fonctionnement.
Pour notre part, il est tout à fait légitime d’en faire un système sui generis en considération
de la qualité si particulière de ses justiciables qui ne pouvaient relever des juridictions de
droit commun. Toutefois, la mission assignée à ladite juridiction sera plus aboutie avec la
mise en place effective des deux autres tribunaux militaires tel qu’il ressort du décret 74-490
du 3 octobre 1974, portant création des juridictions militaires.

Paragraphe 3 : Le tribunal criminel


C’est l’une des innovations majeures issues de la loi n°2018-975 du 27 décembre 2018
portant Code de Procédure Pénale. Ce nouveau code consacre la disparition de la Cour
d’assises au profit du tribunal criminel dont la compétence et les attributions sont prévues
par les articles 262 et suivants dudit code.

A- Compétence du tribunal criminel


Le tribunal criminel est compétent pour juger en premier ressort les individus
renvoyés devant lui par l’arrêt de renvoi. Il ne peut connaître d’aucune autre accusation et sa
décision peut faire l’objet d’appel devant la Chambre criminelle de la Cour d’Appel.
Les juridictions criminelles ont plénitude de juridiction, ce qui signifie qu’elles ne
peuvent se déclarer incompétente à partir du moment où elles sont saisies : en conséquence,
elles sont non seulement compétentes pour juger les délits et contraventions connexes avec
les crimes dont elles sont saisies, mais encore en cas d’erreur de qualification de la juridiction
de renvoi. En outre, ces juridictions criminelles sont compétentes pour accorder à la partie
civile des dommages et intérêts.

B- Composition du Tribunal criminel


Il est tenu au siège de chaque tribunal de première instance, des sessions, pour le
jugement des affaires criminelles instruites dans le ressort de ce tribunal. Ce principe posé
par le Code de procédure pénale admet cependant une atténuation qui peut être accordée
soit par le premier président soit par le ministre de la justice.

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Premièrement, le premier président peut, sur réquisitions du procureur général,
décider par ordonnance motivée que tout ou partie des affaires criminelles soient jugées au
siège d’un tribunal autre que celui dans le ressort duquel elles ont été instruites.
Deuxièmement, sur requête du procureur général, après avis du premier président,
un arrêté du ministre de la justice, peut décider qu’un crime soit jugé par un tribunal situé
dans le ressort d’une Cour d’Appel autre que celle dans le ressort de laquelle l’affaire a été
instruite.
Dans tous les cas, la tenue des sessions de jugement des crimes a lieu tous les trois
mois. Toutefois le président du tribunal peut, après avis du procureur de la République,
ordonner qu’il soit tenu, au cours d’un même trimestre, une ou plusieurs sessions
supplémentaires. Qu’elle soit ordinaire ou supplémentaire, la date d’ouverture de chaque
session de jugement est fixée, après avis du procureur de la République, par ordonnance du
président du tribunal. Mais le projet d’ordonnance est préalablement transmis, pour avis, au
ministre de la justice et au bâtonnier de l’Ordre des avocats, par le procureur de la
République, deux mois au moins avant l’ouverture de la session.
Après sa signature, l’ordonnance est affichée au siège du tribunal, par les soins du
procureur de la République quinze jours au moins avant l’ouverture de la session. Le rôle de
chaque session est arrêté par le président du tribunal, sur proposition du ministère public.
Le tribunal criminel comprend le président du tribunal et quatre assesseurs. Si le
président du tribunal est empêché, il peut être remplacé par un vice-président du tribunal ou
par le juge le plus ancien dans le grade le plus élevé. Si la durée ou l’importance de la session
le requiert, le président du tribunal peut décider d’adjoindre à la formation de jugement un
ou plusieurs assesseurs supplémentaires. Ceux-ci assistent à l’audience et ne participent aux
délibérations qu’en cas d’empêchement des assesseurs titulaires constaté par ordonnance
motivée du président du tribunal criminel.
Les assesseurs sont choisis parmi les juges du tribunal de première instance du lieu de
jugement des affaires criminelles. Cependant en cas d’insuffisance de juges au siège du
tribunal criminel, les assesseurs sont choisis par ordonnance du premier président parmi les
juges des tribunaux du ressort de la Cour d’Appel dont relève le tribunal criminel.
Les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur de la République ou
par un de ses substituts.
Le tribunal criminel est, à l’audience, assisté d’un greffier. Les fonctions de celui-ci
sont exercées par le greffier en chef ou un greffier du siège du tribunal criminel, choisi par
celui-ci. La minute du jugement rendu par le tribunal criminel est signée par le président et
le greffier. Par ailleurs le greffier dresse, à l’effet de constater l’accomplissement des
formalités prescrites, un procès-verbal qui est signé par le président et celui-ci.
En définitive, toutes les minutes des jugements rendus par le tribunal criminel
sont réunies et déposées au greffe du tribunal.

Paragraphe 4 : Le Pôle pénal économique et financier


Le pôle pénal économique et financier, juridiction d’exception à part entière a été créé
par la loi n°2022-193 du 11 mars 2022.
Le pôle pénal économique et financier est une juridiction pénale de premier degré,
spécialisée en matière de délinquance économique et financière, et chargée de la poursuite,
de l’instruction et du jugement des infractions relevant de sa compétence.

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Cette loi portant création, détermine sa compétence, son organisation et son
fonctionnement qui seront successivement détaillés

A- Compétence du pôle pénal économique et financier


Le pole pénal économique et financier exerce sa compétence sur l’ensemble du
territoire national.
Il connait des infractions économiques et financières qui sont d’une gravité et d’une
complexité particulière, ainsi que des infractions connexes.

1- De la compétence matérielle exclusive du pôle pénal économique et


financière (art. 3 alinéa 1)
De la compétence matérielle exclusive (compétence attribuée uniquement du pôle pénal),
constituent une infraction économique et financière, au sens de la présente loi, les infractions
ci-après :
- Le blanchissement de capitaux ;
- Le financement du terrorisme ;
- La corruption et les infractions assimilées ;
- Les infractions douanières, fiscales et en matière de change ;
- Les infractions en matière de marchés financiers, de banques et
institutions financières ;
- Les infractions en matière financement des partis politiques, des
associations et des élections ;
- Les infractions en matière d’activités commerciales et économiques ;
- Les infractions en matière de métaux précieux ;
- Le financement de la prolifération des armes à destruction massive ;
- Les infractions économiques et financières commises par le biais de
systèmes d’information et communication
- La criminalité environnementale

Ainsi sont considérées comme étant d’une gravité et d’une complexité particulière, les
infractions présentant les caractères ci-dessous :
- La pluralité des auteurs, complices et victimes ;
- La commission de l’infraction dans le ressort géographique de plus d’un
tribunal ;
- Le caractère transactionnel de l’infraction ;
- Le flux financier excédant la somme de cent millions (100.000 000) F
CFA ;
- La gravité des conséquences de l’infraction ou l’importance des
dommages qui en résultent.

2- De la compétence matérielle concurrentielle


La compétence du pôle pénal, économique et financier peut s’exercer, pour l’infraction de
financement du terrorisme, concurremment avec d’autres juridictions.

B- L’organisation du pôle pénal, économique et financier

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Le pôle pénal économique et financier comprend un siège, un greffe et un parquet

1- Le siège
Le pôle pénal économique et financier comprend des juges du siège :
- Un Président
- Un ou plusieurs vice-présidents
- Un ou plusieurs juges d’instruction
- Des juges

2- Le parquet
Il est composé de :
- Un Procureur de la République
- Un ou plusieurs Procureurs de la République adjoints
- Un ou plusieurs substituts

3- Le Greffe
Le greffe comprend un Greffier en Chef et des Greffiers qui assistent le pôle. Il comprend
également un personnel administratif.

NB : il est institué auprès du pole pénal économique et financier, des unités de police et de gendarmerie
pour l’aider à mener à bien sa mission. Ainsi, les enquêtes relatives aux infractions visées à l’article 3
de la présente loi sont menées par des officiers et agents de police judiciaire relevant des unités
spécialisées de police et de gendarmerie.

C- Fonctionnement
Sans préjudice des dispositions particulières de la présente loi, le pôle pénal,
économique et financier est soumis au Code de procédure pénale et à la loi relative à
l’organisation judiciaire.
Les recours contre les décisions de cette juridiction sont portés devant une chambre
spéciale de la Cour d’Appel d’Abidjan.
Les officiers et agents de police judiciaire de ladite juridictions agissent sous la
direction du Procureur de la République près le pole pénal, économique et financier. Ils
exercent les délégations des cabinets d’instruction de cette juridiction et défèrent à leurs
réquisitions. Il en est de même lorsqu’ils sont requis par la chambre de jugement du pôle.
Les officiers et agents du pôle pénal, économique et financier sont compétents sur
toute l’étendue du territoire national.

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TITRE VI :LES JURIDICTIONS SUPRÊMES NATIONALES SPECIALISEES
Dans le cadre national, toutes les juridictions sont en principe rattachées soit à l’ordre
judiciaire, avec à sa tête la Cour de Cassation, soit à l’ordre administratif, avec à sa tête le
Conseil d’Etat. Cependant trois juridictions se situent à l’extérieur de cette double
organisation pyramidale. L’une le Conseil Constitutionnel-en raison de la nature des
questions dont elle a à connaître ; l’autre la Haute Cour –en raison de la qualité des personnes
susceptibles d’y être déférées.

CHAPITRE I : Le Conseil Constitutionnel


Il sera examiné successivement son organisation et ses compétences.

SECTION 1 : ORGANISATION
Le Conseil constitutionnel est composé de deux catégories de membres. En effet certains sont
des membres de droit tandis que d’autres sont nommés.

Paragraphe 1 : Les membres de droit


Ce sont les anciens Présidents de la République. Mais ceux-ci n’ont pas l’obligation de siéger
car ils peuvent renoncer de façon expresse à être membre de l’institution. En Côte d’Ivoire,
aucun ancien Président de la République n’a de façon express manifesté le désir d’user son
droit ne pas être membre du Conseil.

Paragraphe 2 : Les membres nommés


Ils sont au nombre sept répartis comme suit :
-un Président nommé pour une durée de six ans non renouvelable par le Président de la
République ;
-six conseillers dont trois désignés par le Président de la République, deux par le Président
de l’Assemblée nationale et un par le Président du Sénat. Les conseillers sont nommés pour
une durée de six ans non renouvelable par le Président de la République.
Le Conseil constitutionnel est renouvelé par moitié tous les trois ans et les membres prêtent
serment avant leur entrée en fonction.

SECTION 2 : COMPÉTENCES
Le Conseil constitutionnel contrôle principalement la constitutionnalité des textes et possède
d’autres attributions.

Paragraphe 1 : Le Conseil Constitutionnel, juge de la constitutionnalité


Ces compétences ne s’exercent que dans le cadre précis des attributions qui lui sont conférées
par la Constitution. Ce contrôle se fait soit par voie d’action soit par voie d’exception soit
sous forme d’avis.

I-Le contrôle par voie d’action


Selon l’article 134 nouveau de la Constitution, les engagements internationaux avant leur
ratification, les lois constitutionnelles adoptées par voie parlementaire, les lois organiques
avant leur promulgation, les règlements des assemblées parlementaires avant leur mise en
application, doivent être déférés par le Président de la République, le Président de
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l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat au Conseil constitutionnel, qui se prononce
sur leur conformité à la Constitution. Dans ces conditions, la saisine du Conseil
constitutionnel suspend le délai de promulgation ou de mise en application.
En cas de saisine par voie d’action, une loi ou une disposition déclarée contraire à la
Constitution ne peut être promulguée ou mise en application. La loi ou la disposition est
nulle à l’égard de tous.

II- Le contrôle par voie d’exception


Tout plaideur peut, par voie d’exception, invoquer l’inconstitutionnalité d’une loi devant
toute juridiction en vue de la faire annuler. Dans ce cas la décision du Conseil constitutionnel
s’impose à tous, au-delà des parties au procès et la loi ou la disposition déclarée
inconstitutionnelle est abrogée.

Paragraphe 2 : Autres attributions du Conseil constitutionnel


Le Conseil constitutionnel possède diverses autres attributions. Il est à la fois une juridiction
électorale et référendaire et un organe de constat et de consultation.

I-Le Conseil constitutionnel, juridiction électorale et référendaire


Le Conseil constitutionnel statue sur :
-l’éligibilité des candidats à l’élection présidentielle. A cet effet, il arrête et publie la
liste définitive des candidats à l’élection présidentielle quinze jours avant le premier
tour du scrutin ;
-l’éligibilité des candidats aux élections parlementaires pour permettre à la
Commission indépendante chargée des élections de publier la liste définitive des
candidatures aux élections des députés et des sénateurs ;
-les contestations relatives à l’élection du Président de la République, des députés et
des sénateurs
-la déchéance des députés et des sénateurs.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel proclame les résultats définitifs de l’élection
présidentielle et contrôle la régularité des opérations de référendum et en proclame les
résultats.

II-Le Conseil constitutionnel, organe de constat et de consultation


Cette intervention du Conseil constitutionnel a une portée plus ou moins grande selon les
cas : tantôt il lui est demandé de porter lui-même un constat qui lie le pouvoir politique,
tantôt il n’est consulté que pour émettre un avis qui n’a pas force obligatoire.
D’abord, seul le Conseil constitutionnel peut constater la vacance de la Présidence de la
République par décès, démission ou empêchement absolu. Si un tel cas survient, le Conseil
est saisi par une requête du Gouvernement approuvée à la majorité de ses membres. Dans ce
cas le Vice-Président de la République après avoir prêté serment devant le Conseil
constitutionnel se réuni en audience solennelle.
Ensuite, sur saisine soit du Président de la République, soit du Président de l’Assemblée
nationale soit du Président du Sénat, les projets ou proposition de loi peuvent être soumis
pour avis au Conseil constitutionnel.
Enfin, lorsqu’une des circonstances exceptionnelles telles que définies par l’article 73 de la
Constitution se présente, le Président de la République prend les mesures exceptionnelles

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exigées par ces circonstances après consultation obligatoire(…) 24 du Président du Conseil
constitutionnel.

CHAPITRE II : LA HAUTE COUR DE JUSTICE


Nonobstant l’indépendance des magistrats judiciaires, on a toujours craint qu’un tribunal
judiciaire soit impuissant à juger des infractions commises par les représentants du pouvoir
politique les plus hauts placés et tout particulièrement le Président de la République. C
constat a été à l’origine de la création des juridictions dont les juges sont le plus souvent eux-
mêmes des représentants du pouvoir politique. L’étude s’organisera autour de sa
composition et son fonctionnement d’une part et de ses attributions d’autre part.

Section 1 : Composition et fonctionnement


La composition et le fonctionnement sont régis par les articles 160 et 161 nouveaux de la
Constitution. Aux termes de ces articles, la Haute Cour de Justice est composée de membres
élus en leur sein en nombre égal par l’Assemblée nationale et par le Sénat dès la première
session de la législature. Mais elle est présidée par le Président de la Cour de cassation.
La mise en accusation du Président de la République, du Vice-Président de la République et
des membres du Gouvernement est votée au scrutin secret par le Parlement, à la majorité des
deux tiers pour le Président de la République et à la majorité absolue pour le Vice –Président
de la République et les membres du Gouvernement.

Section 2 : Attributions (Articles 156 à 159 de la Constitution)


La Haute Cour de Justice est une juridiction d’exception. Elle juge le Président de la
République, le vice-Président de la République et les membres du Gouvernement.
Le Président de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses
fonctions et traduit devant la Haute Cour de justice qu’en cas de haute trahison.
Quant au vice-Président de la République et les membres du Gouvernement, ils ne peuvent
être traduits devant la Haute Cour de Justice qu’en raison de faits qualifiés crimes ou délits
commis dans l’exercice de leurs fonctions.
La Haute Cour de Justice est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la
détermination des peines telles qu’elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où
les faits ont été commis.

24
Dans ces circonstances, le Président de la République doit consulter obligatoirement le Président de l’Assemblée
nationale et ceux du Sénat du Conseil constitutionnel.
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TITRE VII : LES JURIDICTIONS SUPRÊMES SUPRANATIONALES

CHAPITRE I : LA COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE


Instituée par le traité de port louis à l’ile Maurice le 17 octobre 1993,revisé par celui du 17
octobre 2008 dans la ville de Québec au canada, l’organisation pour l’harmonisation en
Afrique du droit des affaires (OHADA) est un espace juridique de 17 états membres (BENIN,
BURKINA FASO, CAMEROUN, COMORES, CONGO, CONGO RD, COTE D’IVOIRE,
GABON, GUINNEE, GUINNEE BISSAU, GUINNEE EQUATORIALE, MALI, NIGER,
REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE, SENEGAL, TCHAD, TOGO)qui adoptent des normes
communes en vue de régir différents domaines d’activités à l’image du droit communautaire
européen dont elle s’est inspirée. L’OHADA a été créée dans un contexte de crise économique
aigue et de régression considérable des investissements en Afrique dues à l’insécurité
juridique et judiciaire. Lesquelles insécurités furent alors identifiées comme étant les causes
majeures de la déficience des investisseurs. Dès lors, cette organisation panafricaine de
normalisation juridique a été créée en vue d’assurer la sécurité juridique et judiciaire des
affaires dans son espace communautaire par l’uniformisation et l’harmonisation des règles
applicables en la matière. Ainsi, pour parvenir à la mise en œuvre de ses objectifs,
l’Organisation s’est dotée de plusieurs institutions à savoir :
-La conférence des chefs d’état et de gouvernement, organe suprême de l’OHADA.
-Le conseil des ministres chargés de la justice et des finances
-Le secrétariat permanent
-L’école régionale supérieure de la magistrature (ERSUMA)
-La cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA)
La dernière citée, la cour commune de justice et d’arbitrage, objet de la présente étude est une
institution tirée sur le modèle européen de la cour de justice de l’union Européenne.
Cette cour qui a son siège à Abidjan en Côte d’Ivoire3 a été installée depuis 1998 et a connu
une évolution depuis lors.
Comment se présente la CCJA et à quel régime juridique répond t-elle ?
Pour y répondre, il faut se conférer aux dispositions du traité de création et ses textes
subséquents.
A l’analyse, l’étude de la CCJA sera d’abord orientée vers sa présentation générale (I) ensuite,
vers les règles de procédure (II) qui l’encadrent.

Section 1 : Présentation de la CCJA


Présenter la CCJA revient tout d’abord à analyser ces différentes compositions, avant de voir
ces attributions et son mode de fonctionnement.

§1 : La composition
La CCJA comprend trois (3) organes que sont :
 La présidence
 Les chambres
 Le Greffe

I - La présidence
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Selon l’article 6 du règlement n001/2014/ CM du 30 janvier 2014, la Cour élit son Président
pour une durée de trois ans et six mois, sans que cette durée puisse excéder celle du mandat
de l’intéressé en tant que membre de La Cour.
C’est donc dire que Le Président n’est pas rééligible. Il peut toutefois être réélu une fois au
terme de son premier mandat si ce dernier lui a été conféré pour une durée inférieure à trois
ans et six mois.
La durée du mandat de Président ne pouvant, en tout état de cause, avoir pour conséquence
d’allonger son mandat de Juge au-delà de sept ans.
Ainsi, si le Président cesse de faire partie de la Cour ou démissionne de ses fonctions avant
le terme normal de celle-ci, il est procédé à son remplacement pour la période restant à courir.

Notons que l’élection du Président se déroule sous la direction du Président sortant. Si


celui-ci a cessé d’être membre de la Cour ou est empêché, l’élection se déroule sous la
direction du membre de la Cour exerçant la présidence, conformément à l’article 8 du
présent Règlement.
Concernant le vote, il a lieu en assemblée plénière, au scrutin secret, après que le membre
de la Cour exerçant la présidence eut rappelé le nombre de voix requis pour être élu et seuls
les membres de la Cour présents participent au vote.
Ainsi, le membre de la Cour qui obtient la majorité absolue des voix des membres de
l’assemblée plénière de la Cour est déclaré élu. À partir du troisième tour de scrutin, la
majorité relative suffit.
L’élection des premier et deuxième vice-Présidents se déroule sous la direction du
Président nouvellement élu.
C’est au Président de diriger les travaux et contrôler les services de la Cour. Il en préside
les séances, représente la Cour et exerce toute autre mission qui lui est confiée.
Lorsque la Présidence est vacante, ou que le Président est empêché de l’exercer, elle est
assurée par le premier Vice-Président, ou à défaut par le second Vice-Président, ou à défaut
par l’un des juges selon l’ordre fixé par l’article 2 ci-dessus.
La cour commune de justice et d’arbitrage est aussi organisée en chambres.

II : Les chambres
Les chambres sont constituées par ordonnance du Président de la Cour en lieu et place de
l’élection telle que prévue par les anciennes dispositions de l’article 9 alinéa 2 modifié.
L’organisation d’une juridiction en chambre ou différentes formations répond toujours à
un souci de répartition harmonieuse du travail entre les membres de la juridiction, souvent
dans un objectif de spécialisation mais toujours de célérité.
L’article 9 alinéas 1 prévoit, outre la possibilité de siéger en formation plénière, ce qui
devrait être réservé aux arrêts de principe, la constitution de chambres de trois juges ou
cinq juges.
La Cour siège en formation plénière, notamment lors des audiences solennelles, en matière
contentieux arbitral et pour les affaires présentant une certaine difficulté ou à la demande
d’une chambre, sous la présidence de son président. La plénière est désormais constituée
de l’ensemble des treize juges composant la Cour.
Concernant les Chambres elles sont présidées par le Président de la Cour, soit par l’un des
vice-Présidents. En cas d’absence ou d’empêchement, la présidence d’une chambre peut
est assurée par un juge.

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III : Le greffe
Selon l’article 10 du Règlement n°2014-01, le Greffier en chef de la Cour est nommé par le
Président de la Cour pour une période de quatre ans renouvelable une fois, après avis de
celle-ci, dans les conditions fixées par le premier alinéa de l’article 39 du Traité
Ainsi, cas de vacance effective ou imminente, le Président avise les gouvernements des
États Parties, soit dès l’ouverture de la vacance, soit, si la vacance doit résulter de la fin du
contrat du Greffier en chef, six mois au moins avant cette expiration. Le Président fixe la
date pour la clôture de la liste des candidats de telle façon que les propositions (leur âge,
leur nationalité, les fonctions qu’ils ont exercées dans le passé) et renseignements les
concernant puissent être reçus en temps utile.
Suite à cela, il communique aux membres de la Cour la liste des candidats et sollicite l’avis
de la Cour sur ces candidatures.
Avant son entrée en fonction, le Greffier en chef fait devant la Cour la déclaration suivante
: « Je déclare solennellement que j’exercerai en toute loyauté, discrétion et conscience les
fonctions qui m’ont été confiées en ma qualité de Greffier en chef de la Cour Commune de
Justice et d’Arbitrage et que j’observerai scrupuleusement le secret attaché à mes fonctions
».
Notons que, le Greffier en chef exerce ses fonctions sous l’autorité du Président.
Ces différentes fonctions sont d’abord d’assurer le secrétariat de la Cour et d’assister la
Cour dans l’accomplissement de ses fonctions.
Ensuite, il est responsable de l’organisation et des activités du greffe et sert d’intermédiaire
pour les communications, notifications ou significations émanant de la Cour ou adressées
à celle-ci au sujet des affaires portées ou à porter devant elle.
Enfin il a la garde des sceaux et la responsabilité des archives, assure la responsabilité de
tous les travaux administratifs et juridictionnels et assiste en personne aux séances plénières
de la Cour et établit les procès-verbaux de ces séances.
Toutefois, le Président peut à tout moment, après avis de la Cour, confier d’autres fonctions
au Greffier en chef.
Il est tenu au Greffe, sous la responsabilité du Greffier en chef, un registre coté et paraphé
par le Président, sur lequel sont inscrits à la suite et dans l’ordre de leur présentation tous
les actes de procédure et les pièces déposées à l’appui.
La mention de l’inscription au registre est faite par le Greffier en chef sur les originaux et, à
la demande des Parties, sur les comptes qu’elles présentent à cet effet.
Un avis est publié au Journal Officiel de l’OHADA indiquant la date de l’inscription de la
requête introductive d’instance, les noms et domiciles des Parties et l’objet du litige.
Ainsi, toute

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Partie à l’instance peut en outre obtenir, suivant le tarif du Greffe, des copies des actes
de procédure, ainsi que des expéditions des ordonnances et des arrêts.
Il est important de noter que, le Greffier en chef ne peut être relevé de ses fonctions que
s’il n’est pas en mesure de les exercer ou s’il a manqué aux obligations qui lui incombent.
Avant qu’une décision soit prise en application de cette possibilité de révocation, le
Greffier en chef est informé par le Président de la mesure envisagée dans une
communication écrite qui en expose les raisons et indique tous les éléments de preuve
s’y rapportant. La possibilité lui est ensuite offerte de présenter ses observations à une
séance privée de la Cour et la décision est prise par le Président, après avis donné par
la Cour.
Si le Greffier en chef cesse ses fonctions avant l’expiration de son mandat, son
successeur est nommé pour une période de sept années.
Le plan d’organisation des services du Greffe est établi par le Président sur proposition
du Greffier en chef et les agents du Greffe sont soumis au Règlement du personnel de
l’OHADA en toute matière qui n’est pas incompatible avec l’indépendance de la Cour.

La cour commune de justice apparait ainsi comme un instrument organisé et hiérarchisé


au service de l’harmonisation et de l’interprétation du droit communautaire dans son
ensemble. Raison pour laquelle elle dispose d’attributions propres qui conditionnent
son bon fonctionnement.
§2 : Attributions et fonctionnement

I - Les attributions de la cour


La CCJA dispose de prérogatives juridictionnelles, arbitrales et consultatives.

A- Les attributions Juridictionnelles.


La CCJA est l’organe juridictionnel de l’OHADA notamment juge de cassation. Cette
mission est prévue par les dispositions du traité de l’OHADA.
En sa qualité de juge de cassation, la CCJA est compétente dans tout litige concernant
les matières relevant de la législation de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique
des Droits des Affaires. Ainsi, elle assure l’interprétation et l’application commune des
textes de L’OHADA dans neufs domaines à savoir :
- Le droit commercial général ;
- Les sociétés commerciales et les groupements d’intérêt économique ;
- Le recouvrement des créances et des voies d’exécution ;
- Les suretés ;
- Les sociétés coopératives ;
- La comptabilité des entreprises ;
- Les procédures collectives d’apurement du passif ;
- Le transport des marchandises.
Dans les domaines suscités, la CCJA peut être saisie d’un pourvoir en cassation contre les
décisions rendues par les cours d’appel et celles rendues en premier et dernier ressort par
les juridictions de premier degré des Etats parties.
En dehors des litiges concernant les matières relevant de la législation de l’OHADA, la
CCJA est également juge de cassation pour les sentences arbitrales et les décisions
statuant sur des recours en annulation dans les sentences rendues dans les dix-sept Etats
parties.

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Dans tous les cas de cassation d’une décision, la CCJA peut évoquer l’affaire au fond.
La fonction juridictionnelle ainsi appréhendée, il convient d’analyser les fonctions
d’arbitrage de la CCJA.

B- Les attributions arbitrales de la CCJA.


L’arbitrage est institué par l’article 14 du traité OHADA et s’appréhende comme un
mode alternatif de règlement des litiges qui consiste à faire trancher un différend par un
ou au plus trois personnes non magistrat appelées arbitres. Le législateur de l’OHADA
a prévu deux mécanismes d’arbitrage dans l’espace OHADA : L’arbitrage institutionnel
et l’arbitrage plus général régis respectivement par le règlement spécifique d’arbitrage et
l’acte uniforme portant droit d’arbitrage. La CCJA en matière d’arbitrale institutionnel
ne tranche pas. Par conséquent, au terme de l’article 1.1 du règlement d’arbitrage du 23
novembre 2017, la cour exerce les attributions d’administration des arbitrages dans le
domaine qui lui est dévolu par l’article 21 du traité OHADA. A ce titre, les décisions
prises en vue d’assurer le suivi scrupuleux des procédures d’arbitrage à toutes les étapes
du processus, de la mise en œuvre au prononcé de la sentence arbitrale en passant par
l’instance arbitrale sont de nature administrative.

De la mise en œuvre de la procédure arbitrale :


La mise en œuvre de la procédure est subordonnée à l’existence d’une convention
d’arbitrage visant la CCJA ou d’un instrument relatif aux investissements. Dans cette
phase, le centre d’arbitrage administre sous son égide en arrêtant la liste des arbitres
d’une part et en désignant et /ou confirmant les arbitres d’autre part. En effet, chaque
année notamment en février, la CCJA établit et arrête la liste d’arbitres purement
indicative qu’elle met à la disposition des parties et des plaideurs. Pour la nomination
des arbitres dans un litige, la cour tient compte de la nationalité et du lieu de résidence
des parties, des conseils et des arbitres, de la langue des parties, de la question en litige
et du droit applicable au différend. Quand elle le souhaite utile, elle sollicite l’avis
préalable d’un chevronné dans le domaine de l’arbitrage commercial international.
Dans tous les cas, le tribunal arbitral constitué d’un ou au plus de trois arbitres doit être
confirmé par la CCJA avant la procédure arbitrale. Cette confirmation vise à la rassurer
de l’impartialité et l’indépendance des arbitres vis-à-vis des parties.

Du déroulement de la procédure :
La CCJA, prise dans sa fonction de centre d’arbitrage dispose d’un cadre institutionnel
lui permettant d’administrer efficacement les procédures d’arbitrage.
Le prononcé de la sentence : En la matière, la CCJA est dépourvue de tout pouvoir de
décision. Cependant, il lui revient l’examen préalable des projets de sentence
conformément à l’article 24 du traité OHADA. Sont soumises à son examen préalable,
les sentences partielles, définitives et les sentences additionnelles en rectification, en
interprétation et en complément de la sentence à l’exception des sentences d’accord
partie. Dans le cadre de cet examen préalable la cour fait des propositions portant sur de
simples modifications de forme, attire l’attention du tribunal sur les demandes qui ne
semblent pas avoir été traitées, sur les mentions obligatoires ne figurant pas dans le projet
de sentence et en cas de défaut de motivation ou en cas d’apparente contradiction dans
le raisonnement sans toutefois intervenir sur le fond du différend. L’examen des projets
de sentences se fait dans un délai d’un mois.
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Au terme de l’analyse des attributions arbitrales de la CCJA il convient d’analyser ses
attributions à caractère consultatif

C- Les attributions consultatives


La mission ou attribution consultative de l’OHADA est prévue à l’article 14 du traité
OHADA. En la matière, La CCJA, est habilitée à émettre des avis consultatifs à la
demande :
-De tout Etat partie ;
-du conseil des ministres des 17 Etats parties ;
- d’une juridiction nationale saisie d’un litige relatif à l’OHADA et pendante
encore devant elle.
Les différents avis émis par la CCJA à la demande des parties susvisés portent sur :
- les projets d’actes uniformes ;
-des questions relatives à l’interprétation et à l’application du traité, des actes
uniformes et des règlements pris pour leur application.
Lesdits avis émis par la CCJA sur les questions qui lui sont soumises tiennent lieu
d’indication dans l’interprétation et l’application de la règle invoquée. Toutefois ils
s’imposent à la juridiction dans la mesure où celle-ci a sollicité L’AVIS afin de pouvoir
l’appliquer à une affaire qui lui est soumise.
Au regard de ce qui précède, il échet de conclure qu’il est essentiellement assigné à la
CCJA trois grandes missions ou attributions de nature juridictionnelle, arbitrale et
consultative. A ce stade de notre réflexion, il convient de savoir comment la cour arrive-
t-elle à accomplir ses différentes missions ?
Répondre à une telle préoccupation renvoi à l’analyse du fonctionnement de la CCJA.

II : DU FONCTIONNEMENT DE LA COUR
Le fonctionnement de la CCJA repose sur une base textuelle qu’il convient de rappeler
avant d’exposer les règles de fonctionnement proprement dites.
A-La base textuelle de fonctionnement de la cour
LA CCJA répond quant à son fonctionnement à la mise en œuvre d’une base textuelle
multiforme que sont :
-le traité OHADA, signé à port louis le 17 octobre 1993 et révisé par celui de la ville d
Québec au CANADA le 17 octobre 2008 qui est l’acte juridique fondateur de l’institution
mère dont est issue la CCJA ; objet de plusieurs modifications et ajouts successifs en
adéquation avec l’évolution du monde des affaires, il contient en son sein aujourd’hui
neuf (09) actes uniformes dont celui portant droit de l’arbitrage.

- L’acte uniforme portant droit de l’arbitrage susvisé signé le 23 novembre 2017 à


Ouagadougou ;
- Le règlement d’arbitrage de la CCJA du 18/04/1996 révisé le 30/01/2014 à
Ouagadougou et 23/11/2017 à Conakry
-Le règlement de procédure de la CCJA du 18 avril 1996 modifié par le règlement
N°01/2014/CM/OHADA du 30 janvier 2014.
-L’acte uniforme relatif à la médiation du 23/11/2017

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-Le Règlement Intérieur : son établissement est d’ordre facultatif tel que prévu par
les dispositions du traité OHADA. Ce sont des textes adoptés par la présidence de la cour
si elle le désire aux fins de règlementation et de gestion des services de la cour sur la base
de règles en vue d’une bonne administration des missions qui lui sont dévolues.
B- Les règles de fonctionnement proprement dites
D’une façon générale, le fonctionnement de la Cour rentre dans le cadre classique du
fonctionnement des juridictions, comme la fixation des dates et heures des audiences par
ordonnance, les délibérations en chambre de conseil, le secret des délibérations, la
possibilité d’organiser des audiences foraines.
Ces audiences foraines permettent le traitement d’un nombre important de dossiers et
contribuent au rapprochement de la cour et des justiciables. Elles ont reçu un accueil très
favorable des avocats et entrainent une réduction considérable du coup de la procédure.
La cour à cette occasion délivre les grosses ou les expéditions des arrêts rendus sur place.
Concernant les audiences foraines de la cour en application de cette disposition, la cour
a organisé en, 2014, deux séries d’audiences foraines en Afrique du centre (Brazzaville et
Kinshasa) et en Afrique de l’ouest (Lomé et Cotonou). De même, en 2015, la cour a
effectué deux séries d’audiences foraines à Yaoundé et Libreville, puis à Bamako et
Ouagadougou. Toutefois, pour
rendre ces audiences plus instructives, il aurait été utile que les parties demandent au
préalable l’autorisation de plaider.
Selon l’Article 19 Le siège de la Cour est fixé à Abidjan. La Cour peut toutefois, si elle le
juge utile, se réunir en d’autres lieux, sur le territoire d’un Etat Partie, avec l’accord
préalable de cet Etat qui ne peut, en aucun cas, être impliqué financièrement. L’article 19
en évitant d’impliquer financièrement le pays choisi par la cour pour se réunir, facilite ses
réunions et ne constitue aucun souci pour le pays hôte L’Article 20 et 21 (R.
n°001/2014/CM du 30 janv.2014) du REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA COUR
COMMUNE DE JUSTICE ET D'ARBITRAGE DU 18 AVRIL 1996 TEL QUE MODIFIE ET
COMPLETE PAR LE RÈGLEMENT N° 001/2014/CM/OHADA DU 30 JANVIER 2014
Les dates et heures des séances de la Cour sont fixées par ordonnance du Président. Une
chambre est composée de trois Juges. Ce nombre est porté à sept Juges lorsque la Cour
siège en formation plénière. Relativement au Quorum l’article 21 nouveau ferait-il
doublon ou entrerait-il en conflit avec l’article 9 précédent, qui fixe à trois ou treize juges
la composition d’une chambre ? Il ne saurait, en tout cas, contredire l’article 31 du traité,
fixant à neuf juges la composition de la Cour. Selon toute probabilité, cette disposition
porte plutôt sur le quorum requis pour la validité des délibérations de la Cour lorsqu’elle
siège en chambre pou formation plénière. Tel était, en tout cas, l’objet de l’article 21 ancien
et dans l’avant-projet approuvé par le comité des experts à Dakar le 22 aout 2013. Sauf
interprétation ou avis contraire de la Cour elle-même, le correctif que le secrétaire
permanent se prépare à soumettre au conseil des ministres aboutira à une formulation
plus explicite de l’article 21 : le quorum requis est de trois juges pour que la Cour délibère
valablement en chambre. Ce nombre est porté à sept lorsqu’elle siège en formation
plénière. A noter que, même composée de cinq juges, une chambre délibère valablement
dès la réunion de seulement trois juges. L’article 22 du Règlement n°001/2014/CM du 30
janv.2014 en ses alinéas 1 ; 2 ; 3 et 4 prescrit que la Cour délibère en chambre du Conseil.
Ses délibérations sont et restent secrètes. Seuls les Juges prennent part aux délibérations.
Il n'est tenu aucun procès-verbal des délibérations de la Cour en matière judiciaire. Les
décisions de la Cour sont prises à la majorité des Juges présents. Les votes sont émis dans
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l'ordre inverse de celui établi à l’article 2. En cas de partage des voix, celle du Président
est prépondérante.
En ce qui concerne le secret des délibérations l’article 22 nouveau indique sans
équivoque les délibérations sont secrètes et que seuls les juges prennent part aux
délibérations. La reforme a exclu la possibilité offerte à la Cour d’autoriser une personne
autre qu’un juge a pénétrer dans la salle de délibération, possibilité qui avait soulevé de
nombreuses interrogations (v. sur ce point les observations sur l’art .22 in Ohada , Traité
et actes uniformes commentés et annoncés , éditions 2008 et 2012 ) . Cette disposition,
qui indique que << seuls les juges prennent part aux délibérations >>, écarte la
participation, voire la présence du greffier en chef. Cependant, elle reste imprécise quant
à la participation des juges qui étaient absents au moment des débats. En règle générale,
seuls les juges qui ont compose la formation la formation prennent part aux délibérations.
Cette imprécision se renforce dans la mesure où les décisions de la Cour sont prises à la
majorité des juges présents.
Enfin l’alinéa 4 règles la question de la majorité requise pour décider valablement, étant
précisé que l’article 21 ci-dessus traite du quorum, et qu’en outre la procédure devant la
Cour est essentiellement écrite.
Ainsi, la copie du dossier est remise, en plus du juge rapporteur, à chacun des juges
composant la plénière ou la chambre en vue de la préparation du délibéré.

Section 2 : Procédures devant la CCJA


La CCJA admet devant elle les procédures dites arbitrales et consultatives, et
juridictionnelles ou contentieuses.

§ 1: Les procédures arbitrales et consultatives


Le fonctionnement de la CCJA en tant qu’institution d’arbitrage nécessite la mise en place
d’un dispositif institutionnel constitué de quatre organes. Il s’agit du Président, de
l’assemblée plénière, de la formation restreinte et du secrétaire général. Ces organes sont
chargés de l’administration et de la mise œuvre de la procédure arbitrale du déroulement
de l’instance et de la sentence arbitrale aux voies de recours

I : L’administration et la mise en œuvre de la procédure d’arbitrage.


La saisine de la cour (A) et la constitution du tribunal arbitral (B), le déroulement de
l’instance, la sentence et les voies de recours (C) sont les règles qui président à
l’administration et la mise en œuvre de la procédure d’arbitrage.

A-La Saisine de la cour


1- la Requête
Toute partie désirant avoir recours à l'arbitrage institué par l'article 21 du Traité de
l’OHADA adresse sa demande au Secrétaire Général.
Cette requête doit contenir :
- les nom, prénoms, qualités, raison sociale et adresses postale et électronique des parties
avec indication d'élection de domicile pour la suite de la procédure ;
-la convention d'arbitrage liant les parties, qu'elle résulte d'un contrat ou de tout autre
instrument ou, le cas échéant, l'indication de l'instrument relatif aux investissements sur
lequel est fondée la demande ;

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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
-un exposé sommaire du différend, des prétentions du demandeur et des moyens
produits à l'appui, ainsi que l'énoncé du montant de ses demandes ;
-toutes indications utiles et propositions concernant le nombre et le choix des arbitres ;
-les conventions intervenues entre les parties sur le siège de l'arbitrage, la langue de
l'arbitrage, la loi applicable à la convention d'arbitrage, à la procédure de l'arbitrage et au
fond du litige ; à défaut de telles conventions, les souhaits du demandeur à l'arbitrage sur
ces différents points sont exprimés.
La demande doit être accompagnée du montant du droit prévu pour l'introduction des
instances dans le barème des frais de l'Annexe II du Règlement devant la CCJA.
Le Secrétaire Général notifie immédiatement aux défendeurs, la date de réception de la
demande, joint à cette notification un exemplaire de la requête avec toutes les pièces
annexées, un exemplaire du Règlement et accuse réception de sa requête au demandeur.
Le Secrétaire Général peut exiger une preuve du pouvoir de tout représentant d'une
partie agissant au nom du ou des demandeurs.
La date de réception par le Secrétaire Général de la demande d’arbitrage, constitue la date
de l'introduction de la procédure d'arbitrage.
Si la demande d'arbitrage n'est pas accompagnée du montant du droit ou si la demande
du Secrétaire Général de lui adresser un nombre d'exemplaires suffisant de la requête et
de toutes pièces n'est pas satisfaite, le Secrétaire Général peut impartir un délai au
demandeur pour satisfaire à ces demandes et, en cas de besoin, proroger ce délai. A son
expiration, la demande d'arbitrage sera classée sans que cela fasse obstacle à la
réintroduction des mêmes prétentions à une date ultérieure, dans une nouvelle demande
d'arbitrage.

2- la réponse à la requête
Le ou les défendeurs doivent, dans les trente (30) jours à compter de la date de réception
de la notification de la demande d'arbitrage par le Secrétaire Général, adresser leurs
réponses à celui-ci.
L’accord des parties doit être réalisé dans le délai de trente (30) jours prévu audit article.
La réponse doit contenir :
-confirmation ou non de ses nom, prénoms, raison sociale et adresse tels que les a énoncés
le demandeur, avec élection de domicile pour la suite de la procédure ;
-confirmation ou non de l'existence d'une convention d'arbitrage résultant d'un contrat
ou de tout autre instrument entre les parties renvoyant à l'arbitrage en vertu du présent
Règlement ;
-un bref exposé du différend et de la position du défendeur sur les demandes formées
contre lui avec indication des moyens et des pièces sur lesquelles il entend fonder sa
défense ;
-les réponses du défendeur sur tous les points traités par la demande d'arbitrage sur les
rubriques (d) et (e) de l'article 5 suscité.
Si le défendeur a formé dans sa réponse une demande reconventionnelle, le
demandeur peut, dans les trente (30) jours de la réception de sa réponse, répondre à cette
demande par une note complémentaire.
Un arbitrage sous l'égide de la Cour peut avoir lieu entre plus de deux parties lorsqu'elles
ont consenti d'avoir recours à l'arbitrage conformément au Règlement de procédure de la
CCJA en matière d’arbitrage. Dans l'hypothèse d'un arbitrage multipartite, toute partie
peut former des demandes contre toute autre partie.
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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
Toute partie qui forme une demande conformément au paragraphe 8-3.1 fournit les
éléments requis à l'article 5 du règlement.
Dès lors que le tribunal arbitral a été saisi du dossier, il détermine la procédure à suivre
pour toute nouvelle demande.
Des demandes découlant de plusieurs contrats ou en relation avec ceux-ci peuvent être
formées dans le cadre d'un arbitrage unique.
Lorsque ces demandes sont formées en application de plusieurs conventions d'arbitrage,
il appartient au tribunal arbitral de constater que :
-les parties sont convenues d'avoir recours à l'arbitrage conformément au présent
règlement et qu'il y a compatibilité entre ces conventions d'arbitrage, et
-toutes les parties à l'arbitrage sont convenues de faire trancher les demandes dans le
cadre d'une procédure unique.
Lorsqu’il n'existe pas entre les parties de convention d'arbitrage visant l'application du
Règlement de procédure, si la défenderesse décline l'arbitrage de la Cour ou ne répond
pas dans le délai de trente (30) jours visés à l'article 6 ci-dessus, la partie demanderesse
est informée par le Secrétaire Général qu'il se propose de saisir la Cour en vue de la voir
décider que l'arbitrage ne peut avoir lieu.
La Cour statue, au vu des observations du demandeur produites dans les trente (30) jours
suivants si celui-ci estime devoir en présenter.
Lorsque les parties sont convenues d'avoir recours à l'arbitrage de la Cour, elles se
soumettent par là même aux dispositions du titre IV du Traité, au présent Règlement de
procédure de la cour en matière d’arbitrage, au Règlement intérieur de la Cour, à leurs
annexes et au barème des frais de l'arbitrage, dans leur rédaction en vigueur à la date de
l'introduction de la procédure d'arbitrage indiquée à l'article 5 du Règlement.
Si l'une des parties refuse ou s'abstient de participer à l'arbitrage, celui-ci a lieu
nonobstant ce refus ou cette abstention.
Lorsqu'une des parties soulève un ou plusieurs moyens relatifs à l'existence, à la validité,
ou à la portée de la convention d'arbitrage, la Cour, ayant constaté prima facie l'existence
de cette convention, peut décider, sans préjuger de la recevabilité ou du bien-fondé de
ces moyens, que l'arbitrage aura lieu. Dans ce cas, il appartiendra au tribunal arbitral de
prendre toutes décisions sur sa propre compétence ainsi que sur la recevabilité de la
demande d’arbitrage. Mais avant, il doit être d’abord constitué.

A-La Constitution du tribunal arbitral


La CCJA établit chaque année une liste d’arbitres de réputation internationale qu’elle met
à la disposition des parties ; mais cette liste ne s’impose ni aux parties ni à la Cour. En
outre, pour la désignation des arbitres, la Cour tient compte de la nationalité des parties,
et de leur lieu de résidence, celui de leurs conseils, la langue des parties, la nature des
questions en litige et, éventuellement, les lois choisies par les parties pour régir leurs
relations.
Le différend peut être tranché par un tribunal arbitral constitué par un arbitre unique ou
par trois arbitres.
Lorsque les parties sont convenues que le différend sera tranché par un arbitre unique,
elles peuvent le désigner d'un commun accord pour confirmation par la Cour. A défaut
d'accord entre les parties dans un délai de trente (30) jours à partir de la notification de la
demande d'arbitrage à l'autre partie, l'arbitre est nommé par la Cour.

83
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Lorsque trois arbitres ont été prévus, chacune des parties, dans la demande d'arbitrage
ou dans la réponse à celle-ci, désigne un arbitre indépendant pour confirmation par la
Cour. Si l'une des parties s'abstient, la nomination est faite par la Cour. Le troisième
arbitre, qui assume la présidence du tribunal arbitral, est nommé par la Cour, à moins
que les parties n'aient prévu que les arbitres qu'elles ont désignés devraient choisir le
troisième arbitre dans un délai déterminé. Dans ce dernier cas, il appartient à la Cour de
confirmer le troisième arbitre. Si à l'expiration du délai fixé par les parties ou imparti par
la Cour, les arbitres désignés par les parties n'ont pu se mettre d'accord, le troisième
arbitre est nommé par la Cour.
Si les parties n'ont pas fixé d'un commun accord le nombre des arbitres, la Cour nomme
un arbitre unique, à moins que le différend ne lui paraisse justifier la désignation de trois
arbitres. Dans ce dernier cas, les parties disposent d'un délai de quinze (15) jours pour
procéder à la désignation des arbitres.
Lorsque plusieurs demandeurs ou défendeurs doivent présenter à la Cour des
propositions conjointes pour la nomination d'un arbitre et que celles-ci ne s'accordent pas
dans les délais impartis, la Cour peut nommer la totalité du tribunal arbitral.
Lorsqu'elle doit nommer un ou plusieurs arbitres, la Cour y procède aussi rapidement
que possible et, sauf convention contraire des parties, selon la procédure suivante :
-le Secrétaire Général communique à chacune des parties une liste identique établie par
la Cour et comportant au moins trois noms ;
-dans un délai fixé par le Secrétaire Général, chaque partie lui renvoie cette liste sur
laquelle elle indique les noms des arbitres par ordre de préférence et, le cas échéant, raye
le ou les noms auxquels elle s'oppose ;
-après expiration du délai fixé par le Secrétaire Général, la Cour nomme le ou les arbitres
sur la base des noms approuvés sur les listes qui lui ont été renvoyées, et conformément
à l'ordre de préférence indiqué par les parties.
Si, pour quelque motif que ce soit, la nomination ne peut pas être faite en vertu de
cette procédure, la Cour peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour nommer un
ou plusieurs arbitres.
Des incidents à la constitution du tribunal arbitral peuvent intervenir
Des blocages, à la constitution initiale du tribunal arbitral, peuvent intervenir en cas
de récusation, d’incapacité, de décès, de démission ou de révocation d’un arbitre. Il
peut être procédé au remplacement d’un arbitre pour les motifs sus évoqués après
appréciation souveraine de la cour.
En l’absence de tout incident ou après leur règlement, intervient la
La procédure de confirmation des arbitres qui permet à la Cour de s’assurer que les
arbitres désignés sont indépendants des parties et réunissent les conditions requises
pour s’acquitter de leur mission. Elle procède ensuite à leur confirmation. A cet effet,
chaque arbitre doit signer une déclaration d’indépendance (voir infra).

C- Le déroulement de l’instance, la sentence et les voies de recours


L’instance arbitrale suit un déroulement découlant sur une sentence arbitrale (1)
susceptible de voies de recours (2).

1-Le déroulement de l’instance arbitrale


L’instance se déroule selon des procédés expressément prévus afin d’aboutir à une
sentence arbitrale et son exécution.

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1-a-Les procédés du déroulement de l’instance arbitrale :
-L’instance débute par une réunion préliminaire entre l’arbitre et les parties. Cette
réunion est sanctionnée par un procès-verbal qui fixe la mission des arbitres. Il est établi
et signé par l’arbitre et les parties ou leurs représentants. En cas de refus ou de réserves
émises par une partie, « ledit procès-verbal est soumis à la Cour pour approbation »51.
Une copie du procès-verbal est notifiée à toutes les parties.
-L’instance se poursuit avec la détermination de la loi applicable en la forme et au fond
du litige.
A cet égard, l’article 10.1 RA/CCJA, dispose que « lorsque les parties sont convenues d’avoir
recours à l’arbitrage de la Cour, elles se soumettent par là-même aux dispositions du Titre IV du
Traité de l’OHADA, au présent règlement, au règlement intérieur de la Cour, à leurs annexes et
au barème des frais d’arbitrage… ». En outre, en vertu de l‘article 16 RA/CCJA, « les règles
applicables à la procédure devant l’arbitre sont celles qui résultent du présent règlement et, dans
le silence de ce dernier, celles que les parties ou à défaut l’arbitre, déterminent, en se référant ou
non à une loi interne de procédure applicable à l’arbitrage ».
Pour la règle de fond, l’article 17 alinéa 1er du RA/CCJA oblige aussi l’arbitre à tenir
compte de la volonté des parties, des stipulations du contrat et des usages du commerce.
A défaut du choix par les parties de la loi applicable, l’arbitre doit utiliser la règle de
conflit de lois car il devra appliquer « la loi désignée par la règle de conflit qu’il jugera
appropriée en l’espèce ».
-L’affaire est par la suite instruite par le tribunal arbitral dans le respect du principe du
contradictoire et de l’égalité des parties pour l’administration de la preuve, l’expertise et
les mesures conservatoires ou provisoires.
Copies des procès-verbaux des auditions dûment signés, doivent être envoyés au
Secrétaire Général de la Cour.
Il convient de préciser également que toute la procédure est confidentielle et cette
obligation de confidentialité pèse sur toutes les parties et cette confidentialité est aussi
exigée en ce qui concerne la sentence arbitrale et les réunions de la Cour.

1-b-La sentence arbitrale :


-La sentence arbitrale est l’appellation donnée à la décision rendue par les arbitres.
Elle peut être partielle (porte sur la compétence ou certaine prétentions des parties),
d’accord partie (en cas d’accord en cours d’instance), définitive (qui met fin au litige) ou
additionnelle ( en rectification, en interprétation, qui complète une autre)
La rédaction de la sentence obéit à des règles de forme et de fond. Elle doit comporter
certaines mentions obligatoires et rendue à la majorité s’il y a trois juges. En cas de
désaccord, le Président peut statuer seul.
Lorsque les frais d’arbitrage auront été intégralement payés, le Secrétaire Général de la
CCJA notifie la sentence aux parties. Cette notification met fin à la procédure d’arbitrage.
Le Secrétaire Général peut aussi délivrer des copies certifiées conformes aux parties qui
en font la demande.
La sentence dont l’exécution n’est pas conditionnée par l’exequatur produit plusieurs
effets. :
- Le dessaisissement des arbitres : effet décisoire :
- La reconnaissance de la sentence : autorité de la chose jugée : La sentence constitue
un titre qui fixe des droits. L’autorité de la chose jugée implique que l’affaire tranchée

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ne peut être portée devant un juge, faute de quoi il peut se voir imposée l’exception
de chose jugée.
Lorsqu’elle a été signée puis notifiée aux parties, la sentence arbitrale doit être
exécutée, sous réserve de recours dont elle peut faire l’objet.

1-c- L’exécution de la sentence arbitrale :


La sentence arbitrale peut faire l’objet d’une exécution provisoire sous certaines
conditions.
Elle fera ensuite l’objet d’exécution volontaire ou forcée, selon les cas.

L’exécution provisoire :
L’exécution provisoire peut être volontaire ou forcée. Elle peut être accordée par le
juge arbitral, si elle a été sollicitée, de même qu’il peut la refuser par une décision
motivée25. Les conditions de cette exécution relèvent de l’appréciation souveraine des
arbitres.

L’exécution volontaire :
L’exécution volontaire ne nécessite pas l’exequatur de la sentence arbitrale.
Généralement les parties exécutent volontairement la sentence ; mais en cas de
réticence de l’une des parties, l’exécution forcée peut être recherchée.

L’exécution forcée : l’exequatur.


L’exécution forcée de la sentence nécessite son exequatur.
En raison de l’autorité de la chose jugée dont elles sont revêtues, les sentences
arbitrales rendues sous l’égide de la CCJA peuvent faire l’objet d’exécution forcée sur
le territoire de chacun des Etats parties.
Les sentences rendues sous l’égide de la CCJA « peuvent faire l’objet d’une exécution
forcée en vertu d’une décision d’exequatur »26 accordée par ordonnance du Président de
la CCJA ou du juge délégué à cet effet.
« La Cour Commune de justice et d’Arbitrage a seule compétence pour rendre une telle décision
»27. Le juge se prononce dans le cadre d’une procédure non contradictoire28.
L’article 30 AU/DA règle l’exequatur des sentences CCJA dans les Etats membres de
l’OHADA et ne s’applique pas à l’exequatur de sentence CCJA dans les Etats tiers29.
« L’exequatur d’une sentence arbitrale rendue sur la base du Règlement d’Arbitrage de la
CCJA dans un Etat tiers à l’OHADA relèvera de la législation nationale de l’Etat où

25 Cf article 24 AU/DA.
26 Article 25 alinéa 2 du Traité OHADA du
17/10/1993.
27 Article 25 alinéa 3 du
Traité.
28 Article 30.2 RA/CCJA.
29 Cf Pierre MEYER, commentaire sous article 30
AU/DA.
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l’exequatur est requis ou, le cas échant, des conventions internationales pertinentes en
particulier la convention de New York du 10 juin 1958 »30.
Ainsi, l’exequatur de sentences CCJA dans un Etat tiers à l’OHADA relève de la
législation nationale de l’Etat où l’exequatur est demandé.

2- Les voies de recours :


Comme on l’a déjà signalé, dans cette phase la CCJA intervient comme organe
juridictionnel et certains recours peuvent être exercés contre les sentences arbitrales.
Cependant, celles-ci ne sont susceptibles ni d’opposition, ni d’appel, ni de pourvoi
en cassation. Elles ne peuvent faire l’objet que d’un recours en annulation, d’un
recours en révision ou d’une tierce opposition97.

2-a/ la voie de recours ordinaire : le recours en annulation ou en contestation de


validité.
Dans l’arbitrage CCJA ce recours est ouvert dans les mêmes cas que ceux qui peuvent
motiver un refus d’exequatur (Cf supra).
En outre, le recours n’est recevable que si les parties n’y ont pas renoncé dans la
convention d’arbitrage.
- Procédure du recours en annulation31 :
La Cour statue conformément à son Règlement de Procédure. Lorsqu’elle refuse
l’autorité de chose jugée à la sentence, elle procède à son annulation. La demande peut
être déposée dès le prononcé de la sentence, et cesse d’être recevable deux mois après la
notification de la sentence. La CCJA instruit la cause et statue conformément à son
Règlement de Procédure. Pendant cette procédure l’exequatur ne peut être accordé, la
requête à cette fin est jointe à la requête en contestation de validité.
Si les parties en font la demande, la CCJA évoque et statue sur le fond ; la Cour rendra
alors un arrêt. Si les parties n’ont pas demandé l’évocation, la procédure est reprise à la
demande de la partie la plus diligente à partir, le cas échéant, du dernier acte de l’instance
arbitrale reconnu valable par la Cour32.

Effets du recours :
Le recours en annulation a un effet suspensif33, sous réserve de l’exécution provisoire
qui a pu être ordonnée par le tribunal arbitral ; dans ce cas, le juge étatique est
compétent pour statuer sur le contentieux de l’exécution provisoire.
« En cas d’annulation de la sentence arbitrale, il appartient à la partie la plus diligente
d’engager, si elle le souhaite, une nouvelle procédure arbitrale… »34, sauf s’il s’agit d’une
annulation pour défaut de convention d’arbitrage.

En cas de rejet du recours en annulation la sentence arbitrale devient exécutoire de


plein droit35.

30 Ibidem.
31 Voir articles 25, 27 et 28 de l’AU/DA.
32 Cf article 29.5 RA/CCJA.
33 V. Article 28 de l’AU/DA.
34 Article 29 AU/DA.
35 Voir article 33 AU/DA.
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2-b/- Les voies de recours extraordinaires : la tierce opposition et le recours en révision
Outre le recours en annulation ou en contestation de validité, la sentence arbitrale peut
faire l’objet d’une tierce opposition ou d’un recours en révision.

- La tierce opposition :
La tierce opposition contre une sentence arbitrale CCJA36 est portée devant cette Cour
conformément à l’article 47 de son Règlement de Procédure. En effet, « la tierce opposition
contre les sentences arbitrales et contre les arrêts de la Cour lorsqu’elle a statué au fond (évocation
prévue par l’article 29.5 du règlement) est ouverte, dans les cas et sous les conditions prévues par
l’article 47 du règlement de procédure ».
Ce recours n’est soumis à aucun délai et la CCJA rend un arrêt au terme d’une procédure
contradictoire.

- Le recours en révision :
Le recours est porté directement devant la CCJA37 conformément à l’article 49 de son
Règlement de Procédure de la CCJA, et non devant le tribunal arbitral.
Comme dans l’AU/DA, le recours est introduit en raison de la découverte d’un fait de
nature à exercer une influence décisive et qui était inconnu du tribunal arbitral. Le délai
est de trois mois à compter du fait susceptible de fonder la révision ; une demande est
irrecevable à l’expiration du délai de dix ans suivant le prononcé de la sentence ou de
l’arrêt (si la Cour a statué au fond dans le cas de l’évocation prévue à l’article 29.5
RA/CCJA)38.
Enfin, ce recours n’est recevable que si les parties n’y ont pas renoncé dans la convention
d’arbitrage.
A côté de cette procédure arbitrale, il existe au sein de la cour, la procédure consultative.

PARAGRAPHE II : LA PROCEDURE CONSULTATIVE


La procédure consultative il faut le rappeler tire son fondement du traité OHADA en son
article 14 alinéa 2. Quant à sa procédure devant la cour, elle est détaillée par les
dispositions du titre III du règlement de procédure de la CCJA du 30 janvier 2014 (R
N°001/2014/CM/ du 30 janvier 2014).
Ce texte de base fixe les règles tenant au mode de saisine (A) les diligences pour la tenue
de l’audience (B) et le contenu de l’avis (C).

D- LE MODE DE SAISINE DE LA PROCÉDURE CONSULTATIVE : LA


REQUÊTE
La cour est saisie pour avis consultatif par voie de requête obéissant à des conditions de
formes et de fond.

1- Les conditions de forme de la requête

36 Cf article 33 RA/CCJA.
37 Cf article 32 RA/CCJA.
38 Cf article 49.5 RP/CCJA.
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Selon l’article 54 du règlement susvisé, le requête doit émaner d’un Etat partie, du conseil
des ministres et l’article 56 de citer toute juridiction nationale visée à l’article 14 du traité
ohada.
En outre, cette requête doit se faire sous la forme écrite.
La requête doit se conformer à des conditions de fond.

2- Les conditions de fond de la requête.


Ces conditions s’analysent quant au contenu de la demande formulée.
En effet, qu’elle émane de l’état partie, du conseil des ministres ou d’une juridiction
nationale, la requête doit être formulée en des termes précis sur la question soumise à
avis. Elle est accompagnée de tout autre document pouvant servir à élucider la question.
Transmise à la cour, la requête est reçue par le greffier en chef qui président aux diligences
pour l’audience éventuelle.

B- les formalités pour l’audience éventuelle.

Ces formalités se résument en des actes de notifications, de communication.


Les notifications sont effectuées par le greffier en chef de la cour qui, dès réceptions de la
requête, la notifie immédiatement:
-aux autres Etats parties au traité si la demande émane d’un état partie ou du conseil des
ministres.
-aux parties en cause devant la juridiction préalablement saisie de la question, mais aussi
aux Etats parties au traité, si la requête émane de cette juridiction en vue d’être éclairée
avant de rendre un jugement.
Dans tous ces deux cas, le greffier en chef informe ses correspondants de la faculté qui
leur est donnée d’émettre leurs observations sur la question et les transmettre dans les
formes, mesures et délais fixés par le président de la cour. Ces formalités précédent la
tenue de l’audience qui selon les dispositions du règlement de procédure est décidé par
le président qui peut ainsi prendre l’avis.

C- L’avis consultatif
Lorsque l’avis est pris par la cour, il doit contenir des mentions légales énumérées par
l’article 58 que sont :
-l’indication qu’il est rendu par la cour.
-la date du prononcé
-le nom des juges qui y ont pris part ainsi que celui du greffier
-l’exposé sommaire des faits
-les motifs
-la réponse à la question posée à la cour.

Les avis de la cour ainsi rendus ont une portée obligatoire aux entités qui l’ont saisi tel
que la juridiction demanderesse qui doit l’appliquer à la cause pendante devant elle.

SECTION II : LA PROCEDURE JURIDICTIONNELLE OU CONTENTIEUSE SUIVIE


DEVANT LA CCJA

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L’examen de cette section se décline dans une première partie, sur les modes de saisine
contentieuse de la CCJA (paragraphe 1), puis, dans une seconde partie, les règles de
procédure contentieuse qui y sont suivies (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les modes de saisine juridictionnelle de la CCJA


La CCJA peut être saisie soit par les parties au litige (A) soit par les juridictions suprêmes
nationales (B).

A- La saisine par les parties au litige


Deux sortes de situations sont envisageables s'agissant de ce mode de saisine de la CCJA.
Il s'agit de la saisine par une partie au procès soit pour un recours en dernier ressort soit
pour soulever l'incompétence d'une juridiction nationale.
S'agissant, en premier lieu, de la saisine par une partie en dernier recours, il y a
lieu de mentionner qu'elle intervient lorsqu'une partie, souhaitant se pourvoir en
cassation contre un arrêt d'une cour d'appel statuant sur le fond dans une affaire
soulevant des questions ayant trait à l'application des Actes Uniformes, saisit directement
la CCJA. C'est l'hypothèse classique du pourvoi en cassation pour violation,
méconnaissance ou mauvaise interprétation de la loi. Ainsi, dans un tel cas, le recours en
cassation doit être présenté au Greffe de la CCJA dans les deux mois de la signification
de la décision attaquée.
Pour ce qui est, en second lieu, de la saisine par une partie pour incompétence, elle
est prévue par l'article 18 alinéa 1 du Traité. De la sorte, la CCJA peut être directement
saisie par une partie qui, après avoir soutenu en vain l'incompétence d'une juridiction
nationale statuant en cassation, estime que cette juridiction a méconnu la compétence de
la CCJA. La saisine doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification
de la décision contestée. Le greffe de la CCJA, quant à lui, signifie ce pourvoi à toutes les
parties à la procédure. Celles-ci peuvent, trois mois au plus tard après cette signification,
présenter un mémoire qui peut être combattu par un autre en réponse du requérant dans
le délai fixé par le Président. Si la CCJA conclut à l'incompétence de la juridiction
nationale, la décision que cette dernière a rendue est réputée nulle et non avenue. Chaque
partie dispose alors d'un délai de deux mois pour contester devant la CCJA la décision
des juges d'appel.

B- La saisine par les juridictions suprêmes nationales


Dans le cadre d'un contentieux privé judiciaire, la saisine de la CCJA peut également être
initiée par une juridiction suprême nationale. Dans cette hypothèse, il s'agit d'un renvoi
de l'affaire par la juridiction nationale statuant en cassation et s'estimant incompétente
pour connaître de l'affaire à elle soumise parce qu'étant dénouée par l'application des
Actes Uniformes. Ainsi, la procédure de cassation pendante par-devant elle est
suspendue de plein droit. Toutefois, cette procédure pourra reprendre si la CCJA, par un
arrêt, se déclare incompétente pour connaître de l'affaire.
Une telle possibilité est cependant difficilement compréhensible. En effet, si au
stade de la cassation, l'application du droit harmonisé relève de la compétence de la seule
CCJA, on comprend mal qu'une Cour de cassation nationale puisse être saisie à ce sujet.
Le but de l'institution par le législateur OHADA d'une juridiction unique chargée de
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veiller à la bonne application du droit harmonisé est d'éviter, en effet, qu'il y ait autant
d'interprétation et d'application des Actes Uniformes que de juridictions nationales. C'est
pour cette raison que toute juridiction suprême nationale qui serait saisie d'un litige relatif
au droit harmonisé devrait, en principe, se déclarer incompétente afin de ne pas
engendrer un conflit de compétence entre la CCJA et elle.
Une fois la Haute Cour saisie par l'un quelconque des moyens sus évoqués, une
procédure spécifique devant aboutir à l'examen du litige et à sa solution est à observer
par les parties. Cela dit qu’en est-il de la procédure contentieuse suivie ?

Paragraphe 2 : La procédure contentieuse devant la CCJA


Toute partie à un litige devant la CCJA doit se faire représenter par un conseil étant
entendu que la procédure en vigueur dans cette institution est essentiellement écrite (A).
Hormis les principales parties litigantes, une possibilité d'intervention des tiers au
contentieux, objet du recours en cassation a été prévue par le législateur OHADA (B). En
outre, il apparait nécessaire d’examiner le renvoi de procédures par le juge national et du
recours en annulation de décisions (C)

A- L'obligation du ministère d'avocat et le caractère écrit de la procédure


Selon l'article 23 du Règlement de Procédure de la CCJA, « le ministère d'avocat
est obligatoire devant la Cour (...) ». C'est donc dire que, contrairement aux juridictions
de fond des Etats parties où les parties peuvent conclure en personne, tel n'est pas le cas
devant la CCJA où la représentation de chacune des parties par un avocat est d'ordre
public. En outre, l'avocat qui doit nécessairement être inscrit à l'un des barreaux des Etats
membres, devra être muni d'un mandat spécial de la partie qu'il représente.
La procédure, aux termes de l'article 34 du même texte, est essentiellement écrite.
En d'autres termes, ni les parties ni leurs avocats ne sont tenus de se déplacer devant la
Cour. Il leur suffit seulement de faire parvenir, qui, le recours en cassation dans le délai
de deux mois de la signification de la décision attaquée, lequel recours devra obéir aux
conditions de l'article 28 du Règlement, qui, le mémoire en réponse assurant quant à lui
aux conditions de l'article 30 du même Règlement, au greffe de la CCJA soit par envoi
postal recommandé avec accusé de réception, soit par remise contre récépissé ou
attestation de dépôt. Toutes ces formalités doivent, évidemment, se faire dans le respect
du principe du contradictoire.
Toutefois, la Cour peut, à la demande de l'une des parties, organiser dans certaines
affaires une procédure orale. Les parties sont alors entendues à l'audience par la voie de
leurs conseils après que le juge-rapporteur désigné à cet effet eut présenté son rapport.
La Cour rend ensuite son arrêt. Mais il y a lieu de retenir que dans la plupart des
procédures orales, la Cour met l'affaire en délibéré pour arrêt à être rendu à une date
ultérieure.
Aussi, est-il important de noter qu'à l'heure actuelle, la langue de procédure
devant la CCJA est le français, et cela même si aucune des parties au procès n'est
francophone.
Le point relatif à l'obligation du ministère d'avocat et au caractère écrit de la
procédure ayant été examiné, quid de celui relatif à la procédure d'intervention prévue
par le Règlement de Procédure de la CCJA ?

91
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
B- La possibilité de l'intervention d'un tiers au litige
L'article 45 du Règlement précité prévoit, en effet, une procédure d'intervention de
tiers au litige objet du pourvoi en cassation. Ainsi, par le truchement de cette procédure,
tant les Etats parties au Traité que toute personne ayant intérêt, pour la conservation de
ses droits, à soutenir les prétentions de l'une des parties, peuvent intervenir aux litiges
soumis à la Cour.
La demande d'intervention doit être présentée au plus tard dans les trois mois de
l'inscription du recours en cassation au journal officiel de l'OHADA. Cette demande,
transmise par les soins du greffe aux parties, lesquelles disposent du droit de faire des
observations y relatives, ne peut être examinée par la Cour sans que les parties aient été
mises à même de faire des observations. Au surplus, ladite demande, pour être recevable,
doit contenir l'indication de l'affaire et de celle des parties principales au litige, les nom
et domicile de l'intervenant, l'élection de domicile de l'intervenant au lieu où la Cour a
son siège, les conclusions au soutien desquelles l'intervenant demande à intervenir, et
enfin, dans le cas de demandes d'intervention autres que celles d'Etats membres, l'exposé
des raisons justifiant l'intérêt à intervenir.
Une fois la demande admise, toutes les pièces de la procédure, excepté celles jugées
confidentielles par le Président de la Cour, à la demande d'une partie, sont
communiquées à l'intervenant qui accepte le litige dans l'état où il se trouve lors de son
intervention. L'intervenant, dans le délai fixé par le Président de la Cour, peut alors
présenter un mémoire en intervention auquel les parties ont toute latitude pour répondre.

C- Du renvoi par le juge national et du recours en annulation d’une décision


Lorsque la Cour est saisie conformément aux articles 14 et 15 du traité par une juridiction
nationale statuant en cassation qui lui renvoie le soin de juger une affaire soulevant des
questions relatives à l'application des actes uniformes, cette juridiction est
immédiatement dessaisie. Elle transmet à la Cour l'ensemble du dossier de l'affaire, avec
une copie de la décision de renvoi. Dès réception de ce dossier, les Parties sont avisées de
cette transmission par la Cour. Les dispositions des articles 23 à 50 du présent Règlement
sont applicables sous réserve des adaptations imposées par le mode de saisine.
Lorsque la Cour est saisie, conformément à l'article 18 du traité, d'un recours tendant à
l'annulation d'un jugement par lequel une juridiction nationale statuant en cassation
aurait méconnu la compétence de la Cour, ce recours est immédiatement signifié par le
Greffier en chef à toutes les Parties à la procédure devant la juridiction nationale. Chacune
de ces Parties peut présenter un mémoire dans un délai de trois mois à compter de la
signification du recours. Les mémoires ainsi déposés sont communiqués au requérant et
aux autres Parties. Ceux-ci peuvent présenter un nouveau mémoire dans le délai fixé par
le Président. Ce dernier décide en outre s'il y a lieu à l’audience. Si la Cour décide que la
juridiction nationale s'est déclarée compétente à tort, la décision rendue par cette
juridiction est réputée nulle et non avenue. Toute Partie devant ladite juridiction peut
dans les deux mois de la signification du jugement de la Cour saisir cette dernière d'un
recours en cassation contre la décision du juge du fond dans les conditions prévues à
l'article 14 du traité et aux articles 23 à 50 du présent Règlement.

92
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
CONCLUSION

En définitive, outre sa composition, la CCJA par la diversité de ses fonctions (arbitrale,


consultative et judiciaire) et l’autorité de ses décisions sur l’ensemble de ses pays
membres font d’elle une institution particulièrement importante dans l’architecture
institutionnelle de l’OHADA. Elle apparait comme le garant de la sécurité juridictionnelle
tant recherchée au sein de l’espace juridique intégré consécutivement à l’interprétation et
l’application des normes communautaires issues du traité OHADA et obéissant à des
normes procédurales particulières. La croissance du taux de saisine de l’institution ainsi
que la récurrence des procédures arbitrales dénotent de la confiance des justiciables et
demeure indubitablement une chance pour relever le défi de l’accroissement des
investissements face à une économie communautaire encore tributaire des apports et
capitaux étrangers.
Néanmoins, ne serait-il pas capital d’opérer un assouplissement des règles de procédure
pour une meilleure accessibilité de cette instance juridique ?

CHAPITRE II : LA COUR DE JUSTICE DE L’UEMOA


Le contexte actuel de la mondialisation commande une autre forme d’échanges
internationaux par le biais de la régionalisation. Celle-ci peut se définir comme le fait
pour des pays voisins de transférer une partie de leurs pouvoirs administratifs,
économiques, politiques et juridictionnels à une entité supranationale en vue de faciliter
la coopération et agrandir leur influence sur le plan international. Il existe de nombreuses
organisations régionales à travers le monde. Le continent africain, en général, et l’Afrique
de l’Ouest, en particulier, ne font pas exception à cette réalité. Au nombre des institutions
régionales qu’héberge l’Afrique de l’Ouest figure l’Union Économique et Monétaire
Ouest-Africaine (l’UEMOA).
L’UEMOA est créée par un traité signé à Dakar le 10 janvier 1994 par les Chefs d’État et
de Gouvernement de sept pays côtiers et sahéliens de l’Afrique de l’Ouest ayant en
commun l’usage d’une monnaie, le Franc CFA et bénéficiant de traditions culturelles
communes. Ledit Traité est entré en vigueur le 1er août 1994. La Guinée Bissau, en
rejoignant en 1997 les premiers pays signataires du Traité de 1994 que sont le Bénin, le
Burkina, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo porte aujourd’hui les
membres de l’Organisation à huit de sorte que l’UEMOA couvre aujourd’hui une
superficie de 3 506 126 km2 et compte 120,2 millions d’habitants.
L'objectif de cette union est de renforcer la compétitivité des activités économiques et
financières des États membres dans le cadre d’un marché ouvert et concurrentiel et d’un
environnement juridique rationalisé et harmonisé. Autrement dit, elle a pour mission
l’édification en Afrique de l’Ouest d’un espace économique harmonisé et intégré, au sein
duquel est assurée une totale liberté de circulation des personnes, des capitaux, des biens,
des services et des facteurs de production. Aussi, devra-t-elle permettre la jouissance
effective du droit d’exercice et d’établissement pour les professions libérales, de résidence
pour les citoyens sur l’ensemble du territoire communautaire39.

39
www.uemoa.int/fr/presentation-de-luemoa
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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
Pour atteindre ses objectifs, l’UEMOA s’est dotée d’organes de direction40, d’organes de
contrôle démocratique 41 , d’institutions spécialisées 42 , d’organes consultatifs 43 et
d’organes de contrôle juridictionnel44 dont la Cour de justice. Cet organe juridictionnel
de l’UEMOA prévu et créé par le Traité de 1994 en ses articles 16 et 38, installé le 27 janvier
1995 et ayant son siège à Ouagadougou au Burkina Faso est celui qui retiendra notre
attention tout au long de cette étude.
Comment appréhender la Cour de justice de l’UEMOA ?
La réponse à cette question s’opérera à travers la présentation de la Cour d’une part (I),
et la prise en compte de l’aspect procédural et des décisions de ladite Cour, d’autre part
(II).

I. PRESENTATION DE LA COUR DE JUSTICE DE L’UEMOA


La présentation de la Cour de Justice de l’UEMOA consistera à examiner son organisation
et son fonctionnement (A) puis ses missions et compétences (B).

A. ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE LA COUR


L’examen de l’organisation de la Cour (1) précèdera celui de son fonctionnement (2).

1. Organisation
L’organisation de la Cour de Justice de l’UEMOA résulte de deux textes de base à savoir
le Protocole Additionnel n° 1 relatif aux organes de contrôle de l’UEMOA et l’Acte
Additionnel n° 10/96 du 10 mai 1996 de la Conférence des Chefs d’État et de
Gouvernement, portant Statuts de la Cour de Justice, complétés par les Règlements n°
01/96 du 5 juillet 1996 portant règlement de procédure de la Cour de Justice et n° 02/96
du 20 décembre 1996 portant statut du Greffier de la Cour de Justice. De l’examen de ces
différents textes, il ressort que la Cour de Justice comprend aujourd’hui huit membres
(a), un greffe (b) et des auditeurs (c).
a. Les membres de la Cour
Le Protocole additionnel suscité dispose en son article 2: « La Cour de Justice est composée
de membres nommés pour un mandat de six (6) ans, renouvelable, par la Conférence des Chefs
d’État et de Gouvernement. Les membres de la Cour sont choisis parmi les personnalités offrant
toutes les garanties d’indépendance et de compétence juridique nécessaires à l’exercice des plus
hautes fonctions juridictionnelles.
Les membres de la Cour désignent en leur sein pour trois (3) ans, le Président de la Cour de Justice.
Ils repartissent entre eux les fonctions de juges et d’avocats généraux. »
Les alinéas 2 et 3 de l’article précité nous permettent de voir que les membres de la Cour
se partagent trois fonctions distinctes : celle de président de la Cour, celle de juge et celle
d’avocat général. Dans la pratique, chaque État Partie de l’UEMOA a un membre à la

40
La conférence des chefs d’Etat et de de Gouvernement, le Conseil des Ministres et la Commission
41
Le Comité Interparlementaire (CIP)
42
La Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), et la Banque Ouest Africaine de développement
(BOAD)
43
La Chambre Consulaire Régionale (CCR), le Conseil des Collectivités Territoriales (CCT), le Conseil du Travail et du
Dialogue Social (CTDS)
44
La Cour de Justice (CJ) et la Cour des Comptes (CC)
94
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
Cour quoique les textes n’interdisent pas qu’il y ait deux membres ressortissants d’un
même État.
Le Président de la Cour de Justice est nommé comme membre de la cour par la
Conférence des Chefs d’États et de Gouvernement (CCEG). Ce sont ses pairs qui le
désignent pour un mandat de trois (3) ans, renouvelable. Durant ce mandat, la Cour est
placée sous sa direction. Il conduit les différents travaux de la Cour. Il veille à la bonne
administration de l’institution en tant qu’autorité hiérarchique. Il préside les audiences
de la Cour auxquelles il siège en collégialité avec les autres juges. L’actuel président de la
Cour de Justice de l’UEMOA est le juge malien Daniel Amagoin TESSOUGUE qui
succède à l’ivoirienne Joséphine Suzanne EBAH-TOURE.
Cinq membres assurent les fonctions de juges. Ils assistent le président dans l’examen des
affaires que connait la Cour. Ils délibèrent avec lui et participent à la prise des décisions.
C’est parmi les juges que le Président désigne pour chaque affaire celui qui doit en
présenter le rapport.
Enfin, deux des membres de la Cour assurent les fonctions d’Avocats généraux. Le plus
ancien et à défaut le plus âgé est désigné Premier avocat général. Le moins ancien ou le
plus jeune joue le rôle d’avocat général. Le Premier Avocat général décide des dossiers à
attribuer à l’Avocat général et s’assure du traitement diligent des affaires qui leur sont
soumises. Leur mission est, selon l’article 9 du Règlement n° 01/96 portant Règlement
des procédures de la Cour de Justice de l’UEMOA, de présenter publiquement, en toute
impartialité et en toute indépendance des conclusions motivées sur les affaires soumises
à la Cour, en vue d’assister celle-ci dans l’accomplissement de sa mission.
Cela dit, la Cour de Justice de l’UEMOA compte à ce jour un Président, cinq Juges et deux
Avocats généraux. Il s’agit de :

Nom et Prénom (s) Pays d’origine Fonction


Daniel Amagoin TIESSOUGUE Mali Président

Salifou SAMPINBOGO Burkina Faso Juge

Joséphine Suzanne EBAH-TOURE Côte d’Ivoire Juge

Augusto MENDES Guinée Bissau Juge

Mahawa Sémou DIOUF Sénégal Juge

Bawa Yaya ABDOULAYE Bénin Premier Avocat


Général
Victoire Eliane ALLAGBADA-JACOB Niger Avocat Général

b. Le Greffe de la Cour de Justice de l’UEMOA


Il est prévu à l’article 4 du Protocole Additionnel n° 01 de la CCEG relatif aux Organes
de contrôle de l’UEMOA la nomination d’un Greffier à la Cour de Justice, par le Président
de la Commission, pour une période de six ans renouvelable. Il lui est reconnu
d’importantes attributions qui sont soit d’ordre juridictionnel, soit d’ordre administratif.

95
Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
L’article 13.1 du Règlement n° 01/2012/CJ abrogeant et remplaçant le Règlement
n°01/2010 relatif au Règlement Administratif de la Cour de Justice de l’UEMOA présente
le Greffe comme l’ensemble des services administratifs et financiers, techniques et
d’authentification de la Cour.
Le Greffier, premier responsable du greffe, est chargé de la réception, de la transmission,
des significations et de la conservation des documents de la Cour. Il assiste la Cour et les
membres de la Cour aux audiences qu’elle tient ainsi qu’aux séances qui ne lui sont pas
interdites. Le Greffier assure les publications des actes de la Cour. Il est en outre chargé
de la gestion des archives. Il a aussi la garde des sceaux de la Cour. Il assure par ailleurs
la gestion financière de la Cour et la comptabilité du Greffe. Enfin, sur nomination par le
Président de la Commission, le Greffier assure les fonctions de Secrétaire Général de la
Cour lorsque celle-ci se réunit en Assemblée Intérieure ou Assemblée Générale.
En vue d’aider le Greffier à accomplir diligemment les importantes attributions qui lui
sont dévolues, l’article 21 des Statuts de la Cour stipule qu’un ou plusieurs greffiers
peuvent lui être adjoints. A côté de ces greffiers adjoints, des fonctionnaires et autres
agents sont attachés à la Cour et sont placés sous la responsabilité du Greffier.
Le Greffier de la Cour jouit d’importants privilèges. Il a un statut particulier prévu par
un texte spécial (le Règlement n°02/96 du 20 décembre 1996) qui précise, outre le mode
de recrutement, ses privilèges, ses attributions et ses obligations. Il jouit de l’immunité de
juridiction pendant et même après la cessation de ses fonctions, à l’instar des autres
membres de la Cour. Il bénéficie d’un congé annuel. Avant d’entrer en fonction, le greffier
et ses adjoints prêtent serment devant la Cour.
Quelles sont les conditions et la procédure de recrutement du Greffier de la Cour de
Justice de l’UEMOA?
Le Règlement n° 02/96/CM/UEMOA en son article 2 dispose : « Tout candidat aux
fonctions de Greffier de la Cour de Justice doit remplir les conditions suivantes :
- être ressortissant de l’un des États membres de l’UEMOA;
- être âgé de cinquante ans au plus à la date de la candidature,
- être titulaire de la Maîtrise en Droit, de la Licence en Droit en quatre ans, ou de tout
diplôme équivalent;
- justifier d’une expérience professionnelle d’au moins dix ans d’exercice effectif des
fonctions de Greffier;
- jouir de ses droits civiques et être de bonne moralité ».
L’article 3 du même texte dispose : « la procédure de recrutement et de nomination du Greffier
de la Cour de Justice comporte :
- la publication d’un avis officiel d’appel à candidatures dans l’ensemble des États
membres de l’Union;
- la présélection;
- le concours qui s’effectue conformément à la méthode indiquée dans l’avis officiel
d’appel à candidature;
- le recrutement;
- la nomination ».
A ce titre, il faut souligner que l’actuel directeur de l’École des Greffes de la Côte d’Ivoire
en la personne de Maitre SORO Fanvongo a exercé les fonctions de Greffier de la Cour de
Justice de l’UEMOA pendant 6 ans de 2010 à 2016.
L’actuel Greffier de la Cour est Maitre Boubakar TAWEYE MAIDANDA.

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Il importe de noter que le Greffier de la Cour ne peut cumuler des fonctions politiques ou
administratives sans y avoir été autorisé par la Cour. Il est tenu de résider au siège de la
Cour. Il est par ailleurs soumis aux mêmes obligations de réserve, de probité que tous les
autres fonctionnaires de la Cour. En cas de manquement à ses obligations
professionnelles, le Greffier encourt des sanctions qui vont de l’avertissement à la
révocation.
A l’examen des missions qui lui sont confiées et des privilèges reconnus au greffier de la
Cour, l’on peut dire sans craindre d’exagérer que le greffe est la cheville ouvrière de la
Cour de justice de l’UEMOA.
A côté des services du Greffe, il existe des auditeurs de justice de la Cour.
c. Les auditeurs de la Cour de justice
Les auditeurs sont nommés par le Président de la Commission de l’UEMOA pour deux
(2) ans renouvelables aux fins d’assister les Juges et les Avocats généraux dans l’exercice
de leurs fonctions. C’est un personnel qualifié offrant des garanties de moralité et
d’indépendance qui viennent collaborer avec les membres de la Cour dans le traitement
des procédures dont la cour est saisie.
Le Président de la Cour ou un juge peut confier à l’auditeur l’instruction préalable d’une
procédure avant son examen par la Cour en vue d’y déceler et mettre en évidence les
différents problèmes et éventuellement rechercher la jurisprudence qui pourrait aider à
la résolution des questions juridiques posées. En clair, les auditeurs rédigent des rapports
pour éclairer la Cour sur les affaires dont elle connait. Ils prêtent serment avant d’entrer
en fonction et sont soumis aux mêmes obligations que les autres fonctionnaires de la
Cour.
En somme, la Cour de Justice est composée de membres dont certains désignés juges,
tranchent les litiges en rendant les arrêts tandis que ceux désignés avocats généraux
concluent dans les affaires à l’attention des juges. Ils sont aidés dans leurs fonctions par
des auditeurs nommés auprès de la Cour. Ils sont assistés d’un greffier, responsable du
service du greffe, lequel est aidé par d’autres greffiers et fonctionnaires.
Cela dit, comment ces différents acteurs et structures fonctionnent-ils pour remplir les
missions assignées à la Cour ?
2. Fonctionnement
Le fonctionnement de la Cour est régi par l’Acte additionnel n°10/96 du 10 mai 1996
portant Statuts de la Cour de l’UEMOA et le Règlement n°1/2012 relatif au règlement
administratif de la Cour. La Cour fonctionne avec des formations qui peuvent se réunir
en Assemblée Plénière, en Chambre du Conseil, en Assemblée générale consultative et en
Assemblée intérieure.
L’Assemblée Plénière est la formation ordinaire de la Cour. Elle réunit l’ensemble des
juges en présence d’un Avocat général pour statuer sur les litiges portés devant la Cour.
Au besoin, le Président peut convoquer une Assemblée Plénière Extraordinaire qui
siégera alors en audience solennelle, soit pour recevoir les serments des membres des
organes de l’Union, soit pour procéder à l’installation du Président de la Cour.
La Chambre du Conseil se réunit pour garantir le secret de certaines procédures dont la
publicité serait de nature à compromettre l’ordre public, la sécurité et la tranquillité
publiques.
L’Assemblée générale consultative est la formation qui émet des avis et des
recommandations sur les demandes adressées à la Cour par un organe compétent de
l’UEMOA. Elle est assistée par le greffier qui en assure le secrétariat.
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L’Assemblée intérieure est celle qui voit la participation de tous les membres du
personnel de la Cour. Elle se réunit au moins deux fois dans l’année pour :
- adopter ou modifier le règlement administratif de la Cour,
- arrêter les activités à mener au cours de l’année,
- définir les modalités d’application des Règlements généraux,
- se prononcer sur la discipline de la Cour et sur toute question liée au
fonctionnement de la Cour que le Président inscrit à l’ordre du jour,
- faire le bilan des activités.
L’Assemblée intérieure peut être élective et permettre ainsi l’élection du Président par les
membres de la Cour.
B. Missions et compétences de la Cour
Il convient d’étudier les missions confiées à la Cour de justice de l’UEMOA (1) puis
l’étendue de ses compétences (2).
1. Missions de la Cour
Le Protocole Additionnel n°1 relatif aux organes de l’UEMOA détermine les missions de
la Cour. En effet, elle veille au respect du droit quant à l’interprétation et l’application du
Traité de l’UEMOA. Spécifiquement, elle s’assure de la bonne application du Traité de
l’Union, sanctionne les manquements des États membres de l’Union quant aux
obligations qui leur incombent au regard du Traité, veille à la légalité des actes des
organes et intervient sur les litiges opposant l’Union à ses agents.
3. Compétences
Les compétences de la Cour de Justice de l’UEMOA se déclinent en compétences
d’attributions (a) et compétences territoriales (b).
a. Compétences d’attribution
Les compétences de la Cour sont essentiellement prévues par le Protocole Additionnel
n°1/96 portant statuts de la Cour de Justice de l’UEMOA en son article 27. Celles-ci
s’observent en matière contentieuse et en matière consultative.
En matière contentieuse, la Cour est compétente pour connaitre :
- Du recours en manquement. Ce recours permet à la Cour de contrôler le respect
par les États membres des obligations qui leur incombent en vertu du Traité. Si la
Cour constate le manquement, l’État membre est tenu d’y mettre fin sans délai.
- Du recours en appréciation de légalité. Le recours en appréciation de légalité est
dirigé contre les actes communautaires : les règlements, les directives et les
décisions ainsi que les décisions individuelles faisant grief.
- Du plein contentieux de la concurrence. Saisie de ce recours, la Cour se prononce
sur les décisions et sanctions que la Commission de l’UEMOA a pu prendre contre
des entreprises qui n’ont pas respecté le principe de la libre concurrence ou qui ont
abusé de leur position dominante sur le marché de l’Union.
- Du recours du personnel de l’Union. La Cour statue sur tout litige entre les
organes de l’Union et leurs agents dans les conditions déterminées au statut du
personnel.
- Du recours en responsabilité extracontractuelle. Cette action, fondée sur la
responsabilité non contractuelle, permet à la Cour de déterminer la responsabilité
de l’UEMOA pour les dommages causés par les Institutions ou les agents dans
l’exercice de leurs fonctions.
- Du recours préjudiciel. Lorsqu’un problème d’interprétation du Traité de
l’UEMOA, de la légalité et d’interprétation des actes communautaires dérivés, se

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pose devant une juridiction nationale, celle-ci sursoit à statuer et interroge la Cour
sur l’interprétation à donner par le renvoi préjudiciel. La raison est que la Cour de
Justice de l’UEMOA est la seule habilitée à interpréter les dispositions du droit
communautaire et qu’elle est la gardienne suprême de la légalité communautaire.
Concernant les compétences consultatives de la Cour, il faut noter que la Cour de Justice
de l’UEMOA est compétente pour connaitre, d’un côté, des avis, des recommandations.
En effet, La Cour peut être amenée, sur demande de la Commission de l’UEMOA, d’un
État membre ou du Conseil des Ministres de l’UEMOA, à donner des avis. Ces avis sont
consultatifs. Elle peut également donner des recommandations.
D’un autre côté, la Cour est compétente pour connaitre des clauses d’arbitrage. Ainsi, la
Cour remplit également les fonctions d’arbitre en vertu d’un compromis établi par les
États membres à l’occasion de la survenance d’un litige relatif à l’interprétation ou à
l’application du Traité.

b. Compétences territoriales
La Cour a une compétence territoriale qui s’étend sur plusieurs pays. Autrement dit, la
compétence territoriale de la Cour de Justice de l’UEMOA s’exerce dans les huit pays
membres de l’UEMOA que sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée
Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.
A ce stade de notre analyse, après avoir présenté la Cour de Justice de l’UEMOA en
indiquant sa composition, son fonctionnement, ses missions et compétences, il est
opportun de nous intéresser à la manière dont les procédures sont conduites devant ladite
Cour ainsi que sur la nature et la force de ses décisions.

II. PROCEDURE DEVANT LA COUR ET DECISIONS


La procédure devant la Cour de justice de l’UEMOA obéit à certaines règles qu‘il convient
d’analyser (A). Nous examinerons ensuite les types de décisions qui peuvent émaner et
leur portée (B).
A. Procédure devant la Cour
Nous aborderons les modalités de saisine de la Cour (1) avant d’indiquer le déroulement
de la procédure (2).
1. Des modalités de saisine de la Cour
La compréhension des règles de saisine de la Cour de Justice requiert la convocation et
une appropriation des différents textes qui créent et organisent ladite institution. Il s’agit
en l’occurrence du Protocole additionnel n°1 relatif aux Organes de contrôle de
l’UEMOA, de l’Acte additionnel n°10/96 du 10 mai 1996 portant Statuts de la Cour, du
Règlement n°01/96/CM du 5 juillet 1996 portant règlement des procédures de la Cour,
et du Règlement n°01/2012 relatif au règlement administratif de la Cour.
A l’analyse, la variété des recours dont la Cour peut être saisie, eu égard à l’étendue de
ses compétences appelle une diversité de règles à observer qui sont communes pour
certaines aux justiciables et aux recours et d’autres qui sont spécifiques. Sous les
modalités de la saisine, nous nous intéresserons à la qualité des justiciables de la Cour (a)
et aux principes qui gouvernent l’introduction de l’instance (b).
a. Les justiciables de la Cour
Qui peut saisir ou être attrait devant de la Cour de Justice de l’UEMOA?
En fonction des types de recours, les justiciables de la Cour pourront être :
- Les États membres de l’UEMOA;

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- la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement;
- le Conseil des Ministres de l’UEMOA;
- la Commission de l’UEMOA;
- les agents de l’UEMOA;
- les autres personnes physiques ou morales;
Devant la Cour, la constitution d’un avocat inscrit au barreau de l’un des États membres
est obligatoire pour toutes les parties autres que les Organes de l’Union et les États
membres qui ont la faculté de nommer un agent pour leur représentation ou de constituer
un Avocat.
A ce stade, il est important de noter que toute personne physique ou morale, éprouvant
des difficultés financières, peut solliciter et obtenir de la Cour, préalablement à une
instance ou en cours d’instance, une assistance judiciaire en présentant sa demande à la
Cour. Cette demande est dispensée du ministère d’Avocat.
Cela dit, comment ces différentes personnes peuvent-elles saisir la Cour?

b. Le mode d’introduction de l’instance


Faisant l’économie de ce qui a été déjà dit sur sa compétence d’attribution, nous
indiquerons que l’instance devant la Cour de Justice de l’UEMOA se fait soit par requête,
soit par la notification du compromis, dans la langue officielle qui est le français.
A l’examen, la requête se présente comme l’acte de saisine qui est prescrit pour tous les
types de recours qui peuvent être portés devant la Cour à l’exception du recours à
l’arbitrage. La requête est obligatoirement écrite et établie en autant de copies qu’il y a de
partie à l’instance.
En matière de clause arbitrale, l’acte qui saisit la Cour est le compromis d’arbitrage. Il est
adressé au Président.
En tout état de cause, l’acte introductif d’instance doit être daté et signé de son auteur ou
du représentant légal de la partie requérante. L’acte doit en outre comporter tous les
éléments permettant d’identifier les parties et cerner la demande. Il est envoyé,
accompagné des pièces et documents annexés, au Greffe de la Cour qui l’enregistre et
l’estampille avant de le transmettre au Président.
Si la requête s’avère irrégulière au regard des conditions de forme qu’elle doit remplir, le
Greffier adresse une demande de régularisation au requérant et lui impartit un délai à cet
effet. Si au terme de ce délai, l’acte n’est pas régularisé, il est transmis au Président tel que
reçu par le Greffier.
L’affaire ainsi introduite, comment la procédure est-elle conduite?

2. Déroulement de la procédure
La procédure devant la Cour, quel que soit le type de recours, commence par une phase
écrite. Cette première phase peut être suivie d’une phase orale. A partir de la
transmission du dossier au Président par le greffe, deux hypothèses peuvent se présenter.
Première hypothèse : La Cour s’estime incompétente ou juge la requête
irrecevable si cette irrecevabilité est manifeste. Dans ce cas, elle met fin à l’instance par
un arrêt qu’elle rend avant même qu’il soit donné signification de la requête au
défendeur.
Deuxième hypothèse : La Cour estime que les débats peuvent être poursuivis.
Dans ce cas, le Greffier, sous le contrôle du Président, communique la requête aux
défendeurs et autres parties qui pourraient être intéressés par la décision de la Cour. Il
100
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s’ensuit les échanges d’écritures entre les parties. Le Greffe veille à la communication des
réponses, mémoires, répliques ou dupliques entre les parties dans les délais qui leur sont
impartis par le Président. C’est la phase écrite de la procédure. Cette phase est close par
le Président soit au terme des délais qu’il impartit aux parties pour les répliques, donc
dès le dépôt de la duplique ; soit lorsque la partie ayant le droit de réponse déclare par
écrit qu’elle n’entend pas en user.
La phase orale de la procédure débute avec la désignation par ordonnance du Président,
du juge rapporteur. Le Greffier notifie à ce dernier la décision qui le nomme et lui
transmet une copie du dossier. Le Juge rapporteur peut proposer toutes les mesures
d’instruction qu’il juge utiles. C’est la Cour qui apprécie la suite à donner à ses
propositions.
Une autre copie de la procédure est communiquée en même temps, par le Greffe, sur
instruction du Président, au Premier Avocat Général en vue de provoquer ses
conclusions.
Au terme des délais qui leur sont impartis, sauf prorogation par le Président, et à
l’audience qui est indiquée à cet effet, le Juge rapporteur présente son rapport et l’Avocat
Général est entendu en ses conclusions.
Les parties qui le souhaitent sont entendues par la Cour. Mais ne sont admises que les
plaidoiries qui sont portées par les agents des États ou les Avocats.
En tout état de cause, si la Cour le juge nécessaire, elle peut faire comparaitre des témoins,
émettre des commissions rogatoires ou ordonner des expertises. Et, lorsqu’elle s’estime
suffisamment éclairée, elle rend sa décision.
A présent, il convient de nous interroger sur la nature et la portée des décisions que prend
la Cour.

B. DECISIONS DE LA COUR ET PORTEE


1. Décisions
Les types de décisions rendues par la Cour découlent du Règlement n°01/2012/CJ
abrogeant et remplaçant le règlement n° 01/2010/CJ relatif au règlement administratif
de la cour de justice de l’UEMOA. Il s’agit des arrêts, des avis et recommandations et
des ordonnances.
Les arrêts sont pris en matière contentieuse en audience ordinaire publique (article 10.1)
ou après que la Cour ait siégé en Chambre du Conseil lorsque la cause soumise est de
nature à compromettre l’ordre public, la tranquillité publique et la sécurité publique
(article 10.2).
Les avis et recommandations sont émis en Assemblée Générale Consultative sur
convocation de son Président lorsqu’elle est saisie d’une demande d’avis :
- portant sur un projet de textes soumis par la Commission ;
- formulée par la Conférence des Chefs d’État, le Conseil des Ministres, la Commission
ou un État membre sur la compatibilité d’un Accord international avec le Traité ou sur
toute difficulté rencontrée dans l’application ou l’interprétation des actes relevant du
droit communautaire
(Article 11.1).
Les ordonnances sont prises par le Président de la Cour pour fixer la composition des
formations de jugement (article 10.1), la date du début, ainsi que la durée des vacances
judiciaires, les modalités de fonctionnement de la Cour, ainsi que celles des départs des
Membres et du personnel en vacance, l’audience dite de « rentrée judiciaire », la clôture
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de l’année achevée et l’ouverture de l’année nouvelle, les audiences de la Cour siégeant
ordinairement en Assemblée plénière, en Assemblée générale consultative ainsi que
celles des Assemblées intérieures. (articles 12.4 à 12.6).

2. Portée des décisions


Ici seront analysées les voies de recours (a) possibles contre les décisions de la Cour et
l’applicabilité de celles-ci (b).

a. Les voies de recours contre les décisions de la Cour


Il convient d’indiquer de toutes les décisions que peut rendre la Cour, les arrêts sont ceux
qui admettent des voies recours. Il y a la voie de recours ordinaire qui est l’opposition, et
les voies de recours extraordinaires que sont la tierce opposition, la révision et
l’interprétation. Tous ces recours sont présentés dans les mêmes formes que la requête
introductive d’instance.
L’opposition est formée contre un arrêt de défaut dans le mois de sa signification à la
partie défaillante. L’arrêt rendu sur opposition n’est pas susceptible d’une nouvelle
opposition.
La tierce opposition est la voie de recours ouverte à une personne non partie à une
instance devant la Cour et qui estime pourtant que l’arrêt rendu par la Cour lui fait grief.
Si la demande est fondée, la Cour modifie l’arrêt dans ses effets à l’égard du tiers
opposant. Le délai pour s’opposer est de deux mois et court à compter de la publication
de l’arrêt incriminé au bulletin officiel de l’UEMOA.
Quant à la demande en révision, elle n’est recevable devant la Cour que lorsque la partie
qui la sollicite justifie dans sa requête qu’il existe des faits nouveaux qui rendent cette
révision nécessaire.
En ce qui concerne enfin la demande en interprétation, elle consiste en la faculté qui est
reconnue à une partie de saisir la Cour pour solliciter une clarification du dispositif d’un
arrêt qu’elle trouve floue ou dont l’exécution ne peut être poursuivie sans équivoque.
Les arrêts rendus par la Cour sur ces différents recours sont annexés aux arrêts initiaux
qui y ont donné lieu. L’on retiendra pour finir que lorsque toutes les voies de recours
possibles ont été épuisées, les arrêts de la Cour doivent pouvoir s’appliquer.

b. De l’applicabilité des décisions de la Cour


En principe, les décisions de Cour de justice ont vocation à s’appliquer à l’espace
géographique de l’UEMOA. Toutefois, il y a des difficultés réelles constatées dans cette
application.
- Le principe de l’application des décisions de la Cour de justice à l’union
Le droit applicable à l’UEMOA s’appréhende comme un droit communautaire. En fait,
c’est l’ensemble des règles juridiques découlant d’un ou de plusieurs traités en vigueur
sur le territoire des États signataires desdits traités. Ainsi, Le Traité fondateur de cette
organisation sous régionale est le droit communautaire primaire et les organes qui s’y
rattachent constituent le droit communautaire dérivé. La cour de justice en est une
illustration. Ainsi compris, les décisions de cette cour qui concernent le respect du droit
relatif à l’interprétation et à l’application du traité de l’union devraient naturellement
s’appliquer aux États membres de l’union. A la vérité, cela est une évidence, car c’est
l’objectif recherché par le droit communautaire. C’est ce que nous constatons en ce qui
concerne la Cour de justice de l’Union européenne. En fait, les observations et décisions

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prises par cette cour sont suivies par l’ensemble des pays de l’Union dans une large
mesure. Cela est gage de la solidité et de la stabilité de l’union ; toute chose qui concourt
à la réalisation des objectifs de cette entité. Malheureusement, ce bon exemple n’est pas
toujours suivi dans les droits communautaires africains. Le respect de ce principe dans
les droits communautaires africains en général et ouest-africains en particulier connait
bien souvent, des écueils.
- Des difficultés relatives à l’application des décisions de la Cour de justice de
l’UEMOA
Ici, la question majeure est celle de l’efficacité du droit international, précisément du droit
communautaire. En fait, il s’agit de la capacité du droit communautaire à appliquer à un
État membre les décisions de justice. Ce problème demeure car généralement les accords
du droit communautaire s’attèlent seulement à définir la règle de droit applicable, quant
à la sanction l’on se réfère au droit interne de chaque État. En outre, même si une sanction
est émise contre un État, celui-ci décide de ne pas l’appliquer au nom du principe de la
souveraineté des États. Dans cette veine, « A quoi serviront les décisions de la Cour de
justice …… de l’UEMOA, si nos institutions et nos États ne les honorent ou ne les
appliquent pas eux-mêmes? »45
Le paradoxe, c’est que les traités et accords internationaux ont une suprématie sur les lois
internes des États et ce au regard des Constitutions des pays de l’union : « les traités ou
accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle
des lois. »46
Par ailleurs, la source de non application, en général, des décisions de justice de la cour
provient du fait que lesdites décisions « ne disposent pas de force exécutoire réelle. »47La
force exécutoire permet de faire exécuter l’acte, et au besoin une exécution forcée des
décisions.
Au surplus, le problème de l’application des décisions de justice de la cour tire sa source
des juges puristes qui n’ont pas souvent assez de connaissances sur les questions
d’intégration régionale ; ce qui fait qu’ils ne peuvent répondre favorablement aux attentes
des populations.

45
M. de Souza, Bulletin CEDEAO, D'une CEDEAO des États à une CEDEAO des peuples, publié le
21/05/2017.
46
Loi n°2019-886 du 8 novembre 2016 portant constitution de la République de Côte d’Ivoire, modifiée par la loi
constitutionnelle n° 2020-348 du 19 mars 2020, article 123 ;
47
J. S. Ebah-Touré, D'une CEDEAO des États à une CEDEAO des peuples, publié le 21/05/2017.

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CONCLUSION
En définitive, il faut retenir que pour améliorer les conditions de vie de leurs peuples, des
États de l’Afrique de l’Ouest s’unissent pour la mise en place d’institutions dans
différents domaines. La Cour de Justice de l’UEMOA épouse cet objectif, ayant été créée
pour régir les rapports juridico économiques entre pays partageant la même monnaie : le
Franc CFA.
L’organisation, le fonctionnement et la compétence de cette Cour de justice obéissent aux
dispositions du Traité ratifié à cet effet par les États membres. Puis ses missions se
confondent avec les attentes et les aspirations desdits États. Cependant, quand elle est
saisie régulièrement, les décisions de la Cour de justice de l’UEMOA connaissent des
difficultés pour s’appliquer bien souvent dans les États parties. Cela concourt à
l’affaiblissement de cette institution judiciaire. Des États parties, prétextant leur
souveraineté, tendent à s’opposer à l’application des décisions de cette Cour qui leur
porteraient griefs, en violant ainsi toutes les règles en matière de droit communautaire.
Dans ce cas, la mise en œuvre d’une diplomatie coercitive plutôt qu’incitative serait
salutaire pour dissuader les états parties contrevenant aux conventions qu’ils ont eux-
mêmes ratifiées. C’est dire que des mesures fermes doivent être prises en vue de redonner
de la force à ces juridictions supranationales qui œuvrent pour la réalisation des intérêts
communs des peuples ouest-africains. Toutefois, les Cours communautaires ne devraient
pas outrepasser leurs missions cardinales qui demeurent le bien-être des peuples.

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CHAPITRE III : COUR AFRICAINE DE JUSTICE ET DES DROITS DE L’HOMME
La déclaration universelle des droits de l’homme née en 1789 a bouleversé les sociétés
jusqu’à nos jours. Les droits de l’homme peuvent se définir comme un ensemble de droits
et libertés que l’état reconnait dans son ordre juridique interne et dans l’ordre juridique
international aux individus, et qu’il protège. Autrement dit, les droits de l’homme sont
des droits inaliénables, imprescriptibles, attachés à tout être humain. Cette notion a
toujours été un souci majeur en Afrique. Ainsi, l’Union Africaine depuis sa création n’a
de cesse de mettre un point d’honneur à la question de la justice et des droits de l’homme.
A cet égard elle draine dans son sillage plusieurs initiatives de haute portée tendant vers
cet idéal. C’est donc à juste titre que les 48 Etats membres ont à l’aube du 21ème siècle
créé la Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme qui pour certains est un
instrument phare susceptible de repositionner l’Afrique comme un continent soucieux de
la protection des droits humains. Comment peut-on appréhender cette institution ? Pour
faire la lumière sur cette préoccupation, il s’agira tout d’abord de présenter l’institution
(I) ensuite de parler de son fonctionnement (II) et pour finir de dresser un bilan de l’action
de la cour (III).

I. Présentation de la Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme

Il convient ici d’évoquer l’historique (A) avant de se pencher sur la composition à


proprement parler de la Cour (B)

A. HISTORIQUE

La Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme est née d'un processus qui révèle
la volonté manifeste des États Africains en général et les États membres de l'Union
Africaine en particulier de redorer leur blason en matière de justice et des droits de
l'homme qui constituent les indices essentiels des États de droit. Ainsi cet engagement
s'est d'abord traduit par la mise en place en 1998 à Ouagadougou de la Cour Africaine de
Droit de l’Homme et des Peuples. Cet organe est entré en vigueur en 2004. Cependant
pour pallier à certaines exigences visant à répondre aux différentes normes, elle sera
secondée par une autre institution en l'occurrence la Cour Africaine de Justice instituée
en 2003 à Maputo, qui est en réalité un adjuvant pour atteindre l'objectif auquel les
différents États parties s'étaient assignés. L'existence de ces 2 appareils de l'Union
Africaine impliquant malheureusement des charges et autres difficultés de
fonctionnement, les États membres pour garantir l'efficacité de ces instances clé ont le
01/07/2008 décidé de fusionner les différentes institutions à savoir la Cour Africaine des
Droits de l’Homme et des Peuples et la Cour Africaine de Justice pour créer la Cour
Africaine de Justice et des Droits de l’Homme qui hérite du siège des organes défunts à
Arusha ( Tanzanie ) . En un mot, la Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme
est fille de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des peuples et de la Cour Africaine
de Justice. De nouveaux objectifs sont dès lors fixés, avec un renforcement de son
armature pour répondre de manière idoine aux attentes des citoyens des États membres.

Qu’en est-il de sa composition ?

105
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B-Composition de la cour

La Cour Africaine de Justice et des Droits de l'homme est divisée en deux sections (article
17 de son Statut) : la Section des affaires générales et la Section des droits de l’Homme.
- La Cour est composée de 16 juges, 8 pour la Section des affaires générales et 8 pour la
Section des droits de l’Homme. Ils sont élus pour un mandat de 6 ans et sont rééligibles
une seule fois. Toutefois, le mandat de huit (8) juges, quatre (4) par Section, élus lors de
la première élection prendra fin au bout de quatre (4) ans. Les juges dont le mandat prend
fin au terme de la période initiale de quatre (4) ans sont tirés au sort par le Président de
la Conférence ou du Conseil exécutif, immédiatement après la première élection. Un juge
élu pour remplacer un autre dont le mandat n’est pas expiré achève le terme du mandat
de son prédécesseur.

Tous les juges, exceptés le Président et le vice-Président, exercent leurs fonctions à temps
partiel.
-Les seize (16) juges sont ressortissants des Etats parties. Sur recommandation de la Cour,
la Conférence pourra réviser le nombre de juges. La Cour ne peut, à aucun moment,
comprendre plus d’un juge ressortissant d'un même Etat.
Pour satisfaire une répartition géographique équitable des juges, l’article 3 du Statut de
la Cour unique prévoit le schéma idéal suivant :
– 4 juges de l’Afrique de l’Ouest
– 3 juges de l’Afrique du Nord
– 3 juges de l’Afrique de l’Est
– 3 juges de l’Afrique centrale
– 3 juges de l’Afrique australe
Les articles 5 et 7 du Statut de la Cour unique précisent qu’à l’occasion de la présentation
de candidatures par les Etats parties et de l’élection des juges par la Conférence, la
répartition équitable des sexes devra être assurée. Les juges doivent être élus parmi les
personnes connues pour leur impartialité et leur intégrité, jouissant de la plus haute
considération morale.

En ce qui concerne le greffe, la Cour nomme son Greffier et peut pourvoir à la nomination
de tels autres fonctionnaires qui seraient nécessaires. Le Président, le vice-Président ainsi
que le Greffier résident au lieu du siège de la Cour.
Les traitements et conditions de service du Greffier ainsi que des autres fonctionnaires de
la Cour, sont fixés par la Conférence, sur proposition de la Cour, par l’entremise du
Conseil exécutif. Un greffier est nommé par la Cour parmi des ressortissants des Etats
membres de l’UA (art. 24.1 du Protocole). Le Règlement Intérieur intérimaire de la Cour
précise (Titre 2) que les candidats au poste de greffier doivent jouir de la plus haute
autorité morale et posséder les connaissances juridiques, administratives et linguistiques
ainsi que l’expérience requises dans l’exercice de ses fonctions. Le greffier est nommé
pour un mandat de 5 ans, renouvelable. Les fonctions du greffier sont définies par l’article
25 du Règlement intérieur intérimaire de la Cour.
Elles sont notamment de :
 Tenir un rôle général de toutes les affaires

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 Servir d’intermédiaire pour les communications émanant de la Cour
 Transmettre aux parties copie de toutes les pièces de procédure
 Etablir sous sa responsabilité les procès-verbaux des séances de la Cour
 Assurer la traduction et l’interprétation dont la Cour a besoin
 Imprimer et publier les avis consultatifs, les arrêts et ordonnances de la Cour
 Préparer le budget annuel de la Cour
 Assurer les relations entre la Cour et les services de la Commission de l’Union
africaine et ceux des autres organes de l’UA.

A ce stade de notre réflexion, il convient de se poser la question de savoir comment


fonctionne cette institution.

II. Le fonctionnement de la Cour Africaine de Justice et Des droits de l’Homme

La Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme en tant qu’Institution se caractérise


par une compétence spécifique (A) ainsi que par une procédure (B) qui lui est propre.

A-COMPETENCE
Cette compétence peut s’appréhender au niveau territorial, consultatif et matériel.
Pour ce qui est de la compétence territoriale, la cour est compétente exclusivement dans
les pays signataires du protocole instituant sa création. En outre la Cour n'est pas ouverte
aux Etats non membres de l’Union. Elle n’a pas non plus compétence pour connaître d’un
différend impliquant un Etat membre non partie au présent Statut.
En ce qui concerne la compétence consultative, il est dit aux termes de l’article 53 du
protocole que : « La Cour peut donner un avis consultatif sur toute question juridique, à
la demande de la Conférence, du Parlement, du Conseil exécutif, du Conseil de Paix et
de Sécurité, du Conseil économique, social et culturel (ECOSOCC), des institutions
financières ou de tout autre organe de l’Union autorisé par la Conférence. »
Enfin pour ce qui est de la compétence matérielle, l’article 28 nous informe que : « La
compétence de la Cour s'étend à toutes les affaires et à tous les différends d'ordre
juridique qui lui seront soumis conformément au présent Statut et ayant pour objet :
- l’interprétation et l’application de l’Acte Constitutif ;
- l’interprétation, l’application ou la validité des autres traités de l’Union et de tous les
instruments juridiques dérivés adoptés dans le cadre de l’Union ou de l'Organisation de
l'unité africaine ;
- l'interprétation et l'application de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples, de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, du Protocole à la
Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme ou
de tout autre instrument juridique relatif aux droits de l'homme, auxquels sont parties les
Etats concernés.
- toute question de droit international ;
- tous actes, décisions, règlements et directives des organes de l’Union ;
- toutes questions prévues dans tout autre accord que les Etats parties pourraient
conclure entre eux, ou avec l’Union et qui donne compétence à la Cour ;
- l’existence de tout fait qui, s’il est établi, constituerait la violation d’une obligation
envers un Etat partie ou l’Union ;
107
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- la nature ou l’étendue de la réparation due pour la rupture d’un engagement
international.
Par ailleurs, c’est le lieu de préciser que la cour fait recours à divers textes de loi lors des
examens des différentes affaires déférées par devant elle. Il s’agit notamment à la lecture
de l’article 31 :
 L’acte constitutif ;
 Les traités internationaux, généraux ou spéciaux auxquels sont parties les Etats en
litige ;
 La coutume internationale, comme preuve d’une pratique générale, acceptée comme
étant le droit ;
 Les principes généraux du droit reconnus universellement ou par les Etats africains ;
 Sous réserve des dispositions du paragraphe 1 de l’article 46 du présent statut, les
décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes
nations ainsi que les règlements, directives et décisions de l’Union comme moyen
auxiliaire de détermination des règles de droit ;
 Tout autre loi pertinente à la détermination de l’affaire.
Analysons désormais la procédure devant la cour.

b. La procédure devant la cour

La cour a défini de façon expresse en son article 29 et 30 les entités aptes à la saisir. Il s’agit
notamment :
 Les Etats parties au présent statut ;
 La conférence, le parlement et les autres organes de l’union autorisés par la
conférence ;
 Un membre du personnel de l’Union sur recours dans un litige et dans les limites
et conditions définies dans les statuts et règlements du personnel de l’union ;
 La commission africaine des droits de l’homme et des peuples ;
 Les institutions nationales des droits de l’Homme ;

Toute affaire relative à la violation d’un droit de l’homme par un Etat partie doit être
adressée, par requête écrite, au greffier de la Cour.
La requête doit indiquer :
– Les droits prétendument violés.
– Si possible, la ou les dispositions de la Charte africaine des droits de l’Homme et des
peuples, de la Charte africaine du bien-être et des droits de l’enfant, du Protocole
additionnel à la Charte africaine sur les droits des femmes en Afrique, ou de tout autre
instrument relatif aux droits de l’Homme ratifié par l’Etat partie concerné, sur laquelle
ou lesquelles elles se fondent.
Une fois la requête reçue, le greffier notifie immédiatement celle-ci à l’Etat partie
concerné, à toute autre partie susceptible d’intervenir dans l’affaire (la Commission ;
l’Etat dont le ressortissant est victime d’une violation des droits de l’Homme) et au
président de la Commission de l’Union africaine.
La procédure devant la Cour est contradictoire et suit une phase écrite et une éventuelle
phase orale qui sont les audiences qui peuvent être publique ou à huis clos. Les sessions
sont soit ordinaires soit extraordinaires. L’article 39 du protocole portant statut de la Cour
africaine de justice et des droits de l’homme précise que les audiences sont publiques, à
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moins que la Cour, de sa propre initiative ou sur requête des parties, décide que la session
se tienne à huis clos. Les individus et ONG habilités à saisir la Section des droits de
l’Homme peuvent se faire assister ou représenter par une personne de leur choix (article
36.5).
Pour être recevable par la Section des droits de l’Homme de la Cour unique, la requête
doit concerner la violation des droits de l’Homme commises par un Etat partie
postérieurement à la date d’entrée en vigueur du Statut à son égard. Si la requête est issue
d’un individu ou d’une ONG accréditée auprès de l’UA ou de ses organes, elle doit
concerner un Etat partie qui a fait la déclaration au titre de l’Article 8 du Protocole de la
Cour unique autorisant une telle saisine.
Comme pour la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, l’article 41 du Statut
de la Cour unique prévoit qu’au cas où une partie ne se présente pas ou s’abstient de faire
valoir ses moyens, la Cour examine l’affaire conformément à son Statut et rend son
jugement. Il est précisé dans ce cas que l’arrêt est susceptible d’opposition dans les 90
jours à compter de sa notification par la partie intéressée. Mais sauf, avis contraire de la
Cour, cette opposition ne suspend pas l’exécution de l’arrêt rendu par défaut.
Les décisions de la Cour sont prises à la majorité des juges présents ( 5 juges au niveau
des sessions , 9 lors des formations plénières) (art. 42 du Statut de la Cour unique). La
Cour rend son arrêt dans un délai de 90 jours à compter de la fin des audiences (art. 43).
Tous les arrêts de la Cour doivent être motivés. Les arrêts sont signifiés aux parties en
cause et transmis aux Etats membres et à la Commission et au Conseil exécutif de l’UA.
Les arrêts sont définitifs (art. 46.2 du Statut de la Cour unique) et sont obligatoire pour
les parties en cause (art. 46.1). Les parties doivent se conformer aux décisions de la Cour.
Elles doivent en assurer l’exécution dans le délai fixé par la Cour.
A ce stade de notre analyse il convient de faire un bilan de l’action de la cour.

CONCLUSION

A la lumière de tout ce qui précède, il est à retenir que la création d’une Cour africaine de
Justice et des droits de l’homme marque un tournant décisif dans la reconnaissance des
libertés individuelles sur le continent et spécifiquement dans les Etats signataires. De par
son organisation et son fonctionnement, la Cour peut se targuer d’être dotée d’une
structure forte et ambitieuse dans le combat noble de protection des droits de l’homme.
Elle peut aussi se vanter d’avoir contribué à une certaine mesure à faire reculer les
violations flagrantes des droits des individus dont les cas étaient légions. Cependant, ces
acquis ne sauraient occulter les difficultés voire les limites de cette Cour qui éprouve
toutes les peines du monde à rendre exécutoire ses arrêts. L’efficacité de la Cour et la
réalisation des objectifs à elle assignés devront passer par un effort collectif nécessitant la
synergie et la détermination de tous les Etats parties. C’est seulement à ce moment-là que
les millions d’hommes et de femmes composant les Etats signataires verront leurs droits
et libertés reconnus et suffisamment protégés. A défaut, la Cour aura échoué dans sa
mission, ce qui entrainera de facto sa mort prochaine et un retour en arrière pour toutes
ces personnes qu’elle est censée protéger.

109
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TITRE VIII : LES ORGANISMES A CARACTERE JURIDICTIONNEL
La constitution du 08 novembre 2016 de la république de Côte d’Ivoire dispose en son
article 143 que « la justice est rendue sur toute l’étendue du territoire national, au nom du peuple
ivoirien, par la cour de cassation, le conseil d’Etat, la cour des comptes, les cours d’appels, les
tribunaux de premières instance, les tribunaux administratifs et les chambres régionales des
comptes ». Toutefois à côté de ces juridictions ordinaires48, la loi reconnait à un certain
nombre d’organismes la faculté49 de rendre des décisions qui sont revêtues d’un caractère
juridictionnel50. Il s’agit des organismes à caractère juridictionnel. En clair, ce sont des
structures qui détiennent une portion de pouvoir pour règlementer51 et appliquer le droit
dans certains secteurs sensibles ou certaines professions spécifiques. En cela, il est
d’autant plus judicieux de relever ce que revêt la notion de juridiction. Au regard du
lexique des termes juridiques, le terme désigne la jurisdictio52, le pouvoir de dire le droit. Dans
un sens organique, et employé au singulier comme au pluriel, il désigne les organes qui sont dotés
de ce pouvoir. Les juridictions font l’objet de plusieurs classifications, selon l’ordre auquel elles
appartiennent (administratif, tels les tribunaux administratifs – ou judiciaire, tels les tribunaux
répressifs ou les tribunaux civils), selon leur nature (de droit commun ou d’exception) ou, enfin,
selon le degré qu’elles occupent dans la hiérarchie judiciaire (juridiction de première instance,
d’appel, de cassation)53.
L’objet de notre analyse présente un intérêt majeur, juridique en l’espèce en ce sens qu’il
nous permettra de lever le voile sur les attributions réelles de ces organismes quasi-
juridictionnels en matière de gestion de litiges et favorisera une meilleure compréhension
de l’exercice de leur pouvoir de trancher et de sanctionner54. Ainsi, au vu des prérogatives
qui leurs sont reconnues et qui pourraient prêter le flanc à les assimiler aux juridictions
ordinaires, il s’avère impérieux de se les emparer. Dès lors comment peut-on
appréhender les organismes à caractère juridictionnel ? L’on pourrait cerner au mieux ces
organismes à travers leurs présentations (I) ainsi qu’au regard de leur régime juridique
(II).

48
Juridiction de droit commun et d’exception.
49
Le pouvoir, parfois dit juridictionnel ou disciplinaire.
50
Ce qui procède de la juridiction entendue comme entité habilité à dire le droit et à prononcer des sanctions.
51
Lorsqu’il s’agit des organismes de régulation ou certains ordres professionnels.
52
Terme latin désignant le pouvoir dont est investi le juge de dire le droit en répondant à une situation de fait dont il
est saisi, par une déclaration rendue selon les règles légales, la procédure prescrite et les preuves autorisées. L’acte
juridictionnel, à l’opposé de l’acte administratif, a pour spécificité le dessaisissement du juge, l’autorité de la chose
jugée et le caractère déclaratif du jugement. Si, d’ordinaire, l’acte de juridiction suppose un litige auquel il est mis fin
il n’en est pas toujours ainsi. On tend ainsi à admettre aujourd’hui que la procédure gracieuse relève de l’activité
juridictionnelle, alors même que celle-ci se déroule en l’absence de tout litige.
53
Lexique-des-termes-juridiques-2017-2018-Dalloz-Serge-Guinchard_-Thierry-Debard- p.1094.
54
Le pouvoir juridictionnel.
110
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I- PRÉSENTATION DES ORGANES FAISANT OFFICE DE JURIDICTION
Il s’agira pour nous au travers de cette présentation d’analyser d’abord les fondements
juridiques et les classifications des organismes quasi-juridictionnels (A) ensuite de
déterminer leurs modes d’organisations et de fonctionnement (B).
A-Fondement juridique et classification
Dans le cadre de cette analyse, il sera utile pour nous d’indiquer comment ces organismes
sont créés (1) d’une part et d’en faire leur classification (2) d’autre part.
1-Leur fondement juridique
Notons que divers textes fondent l’existence juridique de ces structures autres que les
juridictions, qui de prime à bord ne sont pas des juridictions mais qui sont dotés
d’organes compétents pour rendre des décisions. Ces textes peuvent être soient des lois,
des ordonnances. Aussi, pour d’autres organismes tels que les EPN, ils sont
essentiellement crées en vertu d’un décret. Il en est des Universités de Cocody, d’Abobo-
Adjamé et de Bouaké qui ont vu le jour à partir du décret n° 92-540 du 02 septembre 1992.
Ces EPN 55 cités disposent d’organes spéciaux dénommés conseil de discipline ou
commission de discipline.
Aussi, faut-il indiquer que parmi ces types d’organismes, certains procèdent
d’ordonnance et sont accompagnés de décret d’application. A titre d’illustration, nous
pouvons citer l’ordonnance n° 2012-293 du 19 septembre 2012 relative aux technologies
de l’information et de communication et le décret n° 2012-932 du 19 septembre 2012
portant organisation et fonctionnement de l’ARTCI. En sus pour d’autres par contre, en
occurrence les ordres professionnels, ils sont institués par des lois. Il en est ainsi de l’ordre
des médecins qui est institué par la loi n° 60-284 du 10 septembre 1960 et de l’ordre des
pharmaciens issu de la loi n° 60-272 du 02 septembre 1960.
Par ailleurs, il convient de pousser nos réflexions eu égard à certaines questions que
soulèvent ces organismes au regard de l'imprécision de leur attribution du pouvoir
juridictionnel.
S’il existe des juridictions administratives de droit commun – Conseil d’Etat56, cours
administratives d’appel, tribunaux administratifs57 – qui sont en principe compétentes
pour connaıtre de l’ensemble du contentieux administratif, il existe également des
juridictions administratives spéciales, dont le champ de compétence est plus restreint et
dont l’identification peut poser un certain nombre de difficultés. Ainsi, la reconnaissance
du statut de juridiction présente un intérêt majeur : elle implique le respect de toute
une série de garanties – respect des droits de la défense, publicité des débats,
caractère contradictoire de la procédure, etc. – qui sont moindres devant les autorités
administratives. La distinction entre les juridictions et les autres types d’institutions est
opérée par le législateur, ou elle résulte, en cas de carence, de l’application de critères
jurisprudentiels.
Conformément à la constitution c’est au législateur qu’il appartient de créer les cours et
tribunaux chargés d’appliquer la loi sur toute l’étendue du territoire ivoirien. A
contrario, la compétence reconnue au législateur implique qu’un acte administratif

55
Etablissement Public National.
56
Créé et fonctionnel, réorganisé récemment par l’adoption d’une nouvelle loi.
57
Les cours d’appel et les tribunaux administratifs ont été prévus par la constitution de 2016 modifiée par la loi de
révision de 2020 mais n’ont pas encore été mis en place.
111
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ne peut pas créer de juridiction, ce qui a été confirmé par le Conseil d’Etat français dans
son arrêt d’Assemblée du 2 mars 1962 Rubin de Servens.58
Toutefois, dans certains cas, la qualification de juridiction n’apparaıt pas dans le texte
de la loi, mais elle peut être facilement déduite ou au contraire exclue à partir d’éléments
que ce texte contient.
En l’absence donc de qualification opérée de façon directe ou indirecte par le
législateur, c’est le juge qui apprécie le caractère juridictionnel des organismes dont
le statut pose problème. S’il s’avère qu’un décret a créé une autorité qui, d’après les
critères dégagés par la jurisprudence, a un caractère juridictionnel, ce décret sera
illégal en raison de l’incompétence de son auteur en application de l’article 143 de
la Constitution.
Il faut souligner, au préalable, en application de ces critères, qu’une institution peut
être une juridiction pour une partie de ses attributions et une autorité administrative
pour une autre partie. C’est le cas notamment des ordres professionnels qui ont à la fois
des attributions administratives et des attributions juridictionnelles.
En somme, nous retenons que trois conditions cumulatives doivent être réunies pour
qu’un organisme soit qualifié de juridiction : l’organisme doit être doté d’un pouvoir de
décision ; il doit présenter un caractère collégial ; il doit exercer une mission similaire à
celle d’un tribunal59.

Quid de leur classification ?

2- Leurs classifications
Au vu de la diversité de ces organismes, il convient d’effectuer leur classification. A ce
stade de notre investigation, compte tenu de la pluralité de ces organismes, il s’avère
impérieux d’opérer la distinction entre ceux qui sont d’ordre administratifs (AAI et EP)
de ceux qui relèvent d’organismes privés (les ordres professionnels). De plus il y a lieu
de signaler que hormis les EPN, les AAI et les ordres professionnels bénéficient d’une
autonomie et d’une indépendance vis à vis de l’exécutif. Aussi, convient-il de préciser
que l’organe60 faisant office de juridiction qui est issu de l’EPN est indépendant dans sa
fonction juridictionnelle. C’est bien évidemment le cas du conseil de l’université. Ce qui
leur garantit leur impartialité et la transparence des décisions qu’ils rendent. Ces organes
ne siège pas de manière permanente mais plutôt lorsqu’advient un litige relevant de leur
compétence.
A côté de cette série de classification, il est aussi important de les distinguer très
clairement des autres juridictions administratives quoi qu’ils puissent être dénommés
juridictions administratives spécialisées.
Ainsi, nous pouvons affirmer qu’il existe deux grandes catégories de juridictions
administratives. Il s’agit d’abord des juridictions administratives spéciales61 qui sont
compétentes dans des domaines particuliers (Conseil supérieur de la magistrature,
sections disciplinaires des ordres professionnels, organes de sanction des autorités
administratives indépendantes et les conseils d’administration des universités etc.…) et

58
http://www.revuegeneraledudroit.eu/blog/decisions/conseil-detat-assemblee-2-mars-1962-monsieur-x-requete-
numero-55049-publie-au-recueil/ (requête numéro 55049, requête numéro 55055, prec.).
59
Les principes d’indépendance, d’impartialité, du contradictoire.
60
Les organes disciplinaires de ces différents organismes sont des organes indépendants.
61
Les organismes quasi-juridictionnels
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dont les décisions peuvent être contestées en dernier ressort devant le Conseil d’Etat. Il
s’agit ensuite des juridictions administratives de droit commun qui exercent une
compétence de principe. Les juridictions administratives de droit commun sont de trois
ordres : les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et le Conseil d’Etat.
De plus, du point de vue de leur finalité, et en ce qu’elles ont pour mission de trancher
certains litiges 62 , il serait possible de classer les institutions arbitrales 63 dans le grand
ensemble des organismes à caractère juridictionnel. Mais cela reste à discuter en ce sens
quoique les parties à l’arbitrage64 confère le pouvoir de juger au juge privé qu’est l’arbitre
sa sentence65 étant naturellement dépourvue impérium et donc du caractère de l’autorité
de la chose jugée, si l’une des parties ne veut l’appliquer la partie la partie qui réclame
son exécution va saisi le juge étatique pour exéquaturer66 ladite sentence en vue de la
rendre exécutoire. Aussi, il est à remarquer que le tribunal arbitral dans son organisation
et son fonctionnement est encadré par les règles de la procédure civile.67 Ces critères ne
suffisent. C’est fort de cela que l’appréhension des institutions arbitrales comme organes
à caractère juridictionnel est difficile à admettre. Or les quasi-juridictions rendent des
décisions qui sont revêtues de l’autorité de la chose jugée et donc exécutoire ; leurs
décisions n’ont pas besoin d’être exéquaturée. Et obéissent aux voies de recours que nous
connaissons. Là se présente toute la différence.
Qu’en est-il de leurs modes d’organisation et de fonctionnement ?

B- ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT
Sous cette rubrique, il sera donné d’examiner l’organisation (1) et le fonctionnement des
quasi-juridictions (2).

1- Leur organisation
Pour une meilleure appréhension des quasi-juridictions, et au-delà de la classification
faite dans nos développements précédents, il est important de définir assez rapidement
les deux notions ci-après : l’ordre professionnel et les conseils de discipline.
Un ordre professionnel est un organisme désigné par la loi et auquel l’État délègue le
pouvoir d’encadrer l’accès et l’exercice d’une profession afin de garantir l’exécution
compétente et intègre des activités à risque qui la caractérisent68.
Le conseil de discipline quant à lui est l’organe quasi judiciaire de l’ordre professionnel;
c’est lui qui, à l’exclusion de tout autre tribunal, est chargé de décider si un membre, ou
une personne qui a cessé de l’être depuis, a commis une infraction aux lois et règlements
applicables et d’imposer la sanction qu’il considère appropriée, son choix allant de la
réprimande à l’amende et à la radiation permanente.69
Les juridictions administratives spécialisées ou organismes faisant office de juridiction
sont diverses dans leurs natures à telle enseigne qu’une classification a pu être élaborée

62
Certains litiges ne sont pas arbitrables. C’est le cas en ce qui concerne la matière répressive, l’état des personnes et
matières assimilées.
63
Il s’agit de la justice privé.
64
« Une institution par laquelle un tiers règle le différend qui oppose deux ou plusieurs parties, en exerçant la mission
juridictionnelle qui a été confiée par celles-ci ». Ch. JARROSSON, la notion d’arbitrage, JGDJ, 1987, n°785, p.372.
65
Décision arbitrale.
66
Le fait pour le juge étatique d’accorder la force exécutoire à la sentence arbitrale.
67
Notamment les principes de la collégialité, délais, contradictoire, droit de la défense.
68
Office des professions de Québec, Document d’information sur la mise en place d’un ordre professionnel, pp.34,
2010.
69
Idem, p.24
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pour mieux les cerner dans leur organisation administrative. Toutefois, ce qui nous
intéresse relève de leur organisation et de leur fonctionnement dans leur fonction de
juger.
En effet, nous retenons d’une manière transversale que ce qu’elles ont en commun c’est
de se distinguer70 des juridictions ordinaires ; c’est ce qui fait leur particularité. Alors que
les juridictions ordinaires comportent plusieurs juridictions en leur sein en vue d’obéir
au respect du principe de la séparation des fonctions de poursuite, d’instruction et de
jugement, ainsi que d’un greffe pour authentifier les décisions et traiter leurs et aussi
garantir la procédure, les organismes à caractère juridictionnel présentent une autre
réalité. C’est qui conduit certains auteurs 71 à contester mais en vain leur nature
juridictionnelle. Mais même si leurs organisations ne sont pas tout à fait la même que
celles des juridictions ordinaires il n’en demeure pas moins que les règles fondamentales
de procédures garantissant la bonne administration de la justice soient observées au
niveau des quasi-juridictions. Il s’agit des règles de saisines, des règles relatives aux délais
d’action et de recours, des principes du contradictoires et de la communication des pièces,
l’indépendance et l’impartialité de leurs juges ; du caractère oral ou écrit des procédures,
de l’assistance. En clair, elles s’investissent des outils légaux pour conduire leurs affaires
en toute transparence et pour rendre la justice. Toutefois, il convient de noter que dans
leur organisation interne, ces quasi-juridictions sont généralement dotées d’un secrétariat
qui fait office de greffe. Il reçoit les actes de procédures et assure les archivages, prépare
les décisions et s’assure de leurs notifications aux parties et aussi à la publication quand
cela est nécessaire.
Qu’en est-il de leur fonctionnement ?

2- Leur fonctionnement
Leur fonctionnement repose sur les mêmes principes généralement retenus pour les
juridictions. Ainsi, lorsque leur saisine est opérée soit par des plaideurs ou des entités
ayant qualités pour le faire ou par leur propre chef, la procédure est mise en mouvement.
Cela implique la mise en état du dossier. Il est à relever également que lorsqu’une
instruction est nécessaire une commission est généralement désignée si elle n’existe déjà
pour enquêter et instruire l’affaire. Laquelle commission adresse un rapport à l’instance
de jugement qui siège en collégialité dans la vue d’examiner l’affaire au regard des
dispositions légales et règlementaires applicables dans le domaine considéré dont elle a
compétence et entend nécessairement et obligatoirement le ou les mis en cause avant de
statuer en droit et en fait.
En sus, il convient d’indiquer que leur séance ou audience peuvent être publique, mais
pour la plupart du temps elles sont à huis clos étant donné que ces quasi-juridictions
interviennent dans des domaines très limité, corporatiste, et cela appelle la protection du
secret professionnel et principes assimilés.
Aussi, il convient d’indiquer que les membres siégeant dans ces quasi-juridictions sont
de divers horizons. Il est à compter les professionnels et experts du secteur considéré, des
magistrats et professionnels du droit assimilés et toute personne jugée apte en tenant
compte de son expertise nécessaire. Le nombre de membres composant ces organes
diffère d’un organe à un autre.

70
Cette distinction n’est pas étanche.
71
L. Duguit
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Outre cela, en ce qui concerne leurs procédures il convient de relever que chaque entité à
ses règles de procédures propres à elle. Leurs audiences sont tenues dans leurs locaux.
Parfois, la procédure devant elles est contradictoire et non publique. Les parties peuvent
demander à être entendues et à se faire représenter ou assister.

Le pouvoir de dire et d’appliquer le droit72 par un organisme autre que les juridictions
ordinaires, habituelles a été confirmé dans les lignes qui précèdent. Ainsi, à côté de ces
juridictions subsistent des organes qui ne sont pas des juridictions de par leur nature
intrinsèque mais qui font office de juridiction. Toutefois, pour s’en convaincre davantage
de l’exercice de leur pouvoir juridictionnel, il convient d’examiner leur régime juridique.

II- REGIME JURIDIQUE DES ORGANES FAISANT OFFICE DE JURIDICTION


Parler du régime juridique des quasi-juridictions n’est pas d’emblée aisée eu égard à la
diversité de leurs natures qui a aboutie à une classification. Cependant, leur point
commun qui nous intéresse résident dans leur fonction juridictionnel. Cela laisse
entrevoir les différents modes par lesquels elles sont saisies pour connaitre des affaires et
l’indication des décisions qu’elles rendent (A) d’une part et les effets que revêtent leurs
décisions ainsi que les différentes voie de recours pour leurs contestations (B).

A- MODE DE SAISINE ET NATURE DE LEURS DECISIONS


Dans cette série de modalité, nous indiquerons comment les quasi-juridictions sont
saisies des affaires dont elles doivent connaitre (1) et à quoi s’identifie leur décision (2).

1- Les modes de saisine


La saisine est la formalité par laquelle un plaideur porte son différend devant une
juridiction ou un organe ayant pouvoir juridictionnel afin que celle-ci ou celui-ci examine
la recevabilité et le caractère fondé de ses prétentions. En clair, c’est le mécanisme par
lequel un organe est saisi pour connaitre d’une affaire. Les modes de saisines des
organismes à caractère juridictionnel sont divers et variés. Parfois, leur saisine procède
d’une plainte écrite de toute personne intéressée adressée à l’organe conformément à ses
règles de procédures. Ils peuvent également être saisis par requête adressée à son organe
compétent ou ces organismes eux-mêmes peuvent s’autosaisir. Aussi, convient-il de noter
qu’ils peuvent être saisis par voie de déclaration73. Avec l’ère du numérique, les requêtes
et plaintes peuvent être transmises par voie électronique.
Outre cela, il convient d’indiquer particulièrement qu’au niveau des ordres
professionnels, leurs modes de saisine sont les mêmes. Toutefois, pour certains,
notamment dans les juridictions disciplinaires médicales 74 , la saisine peut être
directement exercée par des acteurs bien définis ou indirectement en portant les plaintes
reçues75. Ainsi, il est à noter que le Conseil Départemental de l’Ordre des médecins de

72
« Les institutions juridictionnelles désignent ainsi les organes que les règles d’organisation, de composition et de
procédures autorisent à rendre des décisions de justice dotées de l’autorité de la chose jugée », Cours d’institutions
juridictionnelles dispensé à l’Institut National de la Formation Judiciaire par Maître KOFFI Kan Charles,
Administrateur des Greffes et parquets, p.4, septembre 2020.
73
Ordre des médecins par exemple.
74
Ordre des médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes et sages-femmes.
75
Par toute personne.
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Côte d’Ivoire peut être saisi comme juridiction disciplinaire 76 par le Conseil National ou
les syndicats de médecins (ceux-ci peuvent agir de leur propre chef ou à la suite de
plaintes reçues), par le Ministre de la Santé, par le Directeur Départemental de la Santé,
par le Préfet, par le Procureur de la République ou par le Juge de section ainsi que par
tout médecin inscrit au Tableau de l’Ordre des Médecins.

2- La nature de leurs décisions


D’entrée de jeu, il faut faire observer qu’une décision est un acte émanant d’une autorité77
indiquant une information qui a un caractère de fermeté. Elle peut être administrative ou
juridictionnelle. À ce sujet, il convient de faire une distinction entre un acte administratif
et une décision de justice. Cette distinction est fondée sur un critère matériel puisque pour
qu’il y ait une décision de justice il faut que l’autorité qui l’ait rendue ait eu pour mission
de trancher un litige. C’est ce qui transpire de l’Arrêt d’assemblée du 12 décembre 1953
« De Bayo ». Dans cette espèce, il était contestée par le requérant une décision
d’inscription d’un concurrent au tableau de l’Ordre des vétérinaires de la région de Paris.
Le Conseil d’Etat a décidé que les ordres professionnels rendent des décisions de justice
lorsqu’ils statuent sur des poursuites disciplinaires. En revanche, ils n’ont pas le caractère de
juridiction lorsqu’ils statuent sur des recours qui visent à régler des litiges qui ont pour origine
des décisions qui n’ont pas le caractère d’une sanction. Il en résulte que ces décisions peuvent
faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, et non pas d’une procédure d’appel
ou de cassation, puisqu’il s’agit d’actes administratifs et non pas de jugements.
Le conseil a cependant pris le soins d’apporter une précision assez intéressante pour
l’avenir du contentieux géré par les ordres professionnels en indiquant qu’une décision
abrogeant une précédente décision d’inscription d’un praticien au tableau de l’ordre des
chirurgiens-dentistes doit faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, et non d’un recours
en cassation puisqu’elle met en cause la mise en œuvre d’une attribution administrative et
non juridictionnelle de l’ordre.
Selon le docteur DOSSO KARIM, par principe les actes des autorités administratives sont
des actes administratifs. Toutefois, certains éléments peuvent déroger à ce principe. C’est
le cas des actes émanant des organismes administratifs faisant office de juridiction, tel que les
organismes disciplinaires. Ces actes revêtent la nature, non pas de décision administrative mais de
décision juridictionnelle insusceptible d’être déféré à la censure du juge de l’excès de pouvoir.
(CSCA 28 avril 1976 arrêt François Xavier SANTUCCI).78
Par ailleurs, il faut souligner que les décisions rendues par les organismes administratifs
ou de droit privé79 faisant office de juridiction sont des décisions juridictionnelles. Elles
n’ont pas de dénominations particulières à l’instar de celles résultant des juridictions de
droit commun et d’exception qui s’identifient en des ordonnance 80, jugement et arrêt.
Elles sont simplement appelée décision. Lorsqu’elles proviennent des juridictions
disciplinaires elles sont qualifiées de décisions disciplinaires81. Toutefois, étant donné

76
Les juridictions disciplinaires sont compétentes pour connaître de tous les manquements aux devoirs professionnels
commis par un médecin inscrit au Tableau de l’Ordre.
77
Administrative ou judiciaire
78
Cours de droit administratif, dispensé par Le Doyen Honoraire et docteur DOSSO Karim, Enseignant-chercheur à
l’université Alassane Ouattara de Bouaké ; 2014.
79
En référence aux ordres professionnels, quoiqu’organisés par la loi, leurs membres et leur secteur d’activité
relèvent du droit privé (professionnels libéraux).
80
Décision rendue par un seul juge ou un collège de juge (en matière d’instruction).
81
Article 36 de la loi n° 60-284 du 10 septembre 1960 relative à l’ordre national des médecins de Côte d’Ivoire.
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qu’elles statuent en formation de jugement en première instance et en appel pour
certaines d’entre elles, l’on peut valablement retenir au regard du parallélisme des formes
les dénominations de jugement, d’arrêt en ce qui concerne leurs décisions. Cela est
discutable jusqu’à ce la loi l’indique très clairement ou que la jurisprudence et la doctrine
viennent dissiper ce flou.
En sus, il convient de noter que les décisions rendues par les quasi-juridictions sont
motivées en ce qu’elles arborent le caractère juridictionnel et doivent être portée à la
connaissance des parties prenantes à l’instance82 et leurs conditions de délivrances sont
plus ou moins aisées.
Ce précédent parcours analytique a permis d’appréhender la saisine des quasi-
juridictions et nature que revêt leur décision. Cependant, il appert de noter que
conformément aux principes qui garantissent la bonne marche de la justice et le respect
des droits de la défense, les décisions qui sont rendues par les quasi- juridictions font
l’objet de recours.

B- PORTEE ET RECOURS POSSIBLES CONTRE LEURS DECISIONS


A ce niveau, avant de relever les voies de recours que le plaideur peut exercer contre une
décision d’un organisme quasi-juridictionnel (2) il convient d’examiner la portée desdites
décisions (1).
1-La portée de leurs décisions
La portée d’une décision de justice est l’effet attaché à celle-ci et ses corollaires qui font sa
particularité. En effet, trois principaux effets sont attribués à l’acte juridictionnel,
notamment la force exécutoire, le dessaisissement du juge et l’autorité de la chose jugée.
Le pouvoir juridictionnel provenant de l’autorité publique, la décision rendue est fait au
nom du peuple ivoirien83 de sorte que si l’une des parties se refusait à son exécution elle
pourrait être contrainte par la force publique. La force exécutoire procède du caractère
définitif de la décision, c’est-à-dire qu’elle ne doit plus être susceptible de voie de recours.
Le dessaisissement indique que l’autorité qui l’a prononcé est dessaisie du litige qui vient
de trancher. L’expression de chose jugée désigne ce qui est décidée par une sentence
judiciaire de sorte que l’autorité attachée à la sentence rend impossible la remise en cause
de ce qui a été décidé.
Ainsi, la décision rendue par les organismes à caractère juridictionnel présente les mêmes
caractéristiques que celle des juridictions ordinaires.

2-Les voies de recours


Notons que pour une décision de justice les recours sont les voies d’appel ou de
cassation. 84 Pour les actes administratifs c’est le recours pour excès de pouvoir. Les
décisions des organismes à caractère juridictionnel subissent les mêmes sorts, et ce, dans
le respect des principes de l’administration de la justice. Ainsi, il est à relever qu’en
considération de leur diversité, certaines décisions sont attaquées devant des juridictions
de droit commun au premier85, second degré et au degré supérieur. Mais pour d’autres

82
Notification par voie administrative avec accusé de réception ou par acte de commissaire de justice.
83
A la différence de la procédure arbitrale où la sentence est rendue au nom des parties.
84
Sans préjudice des autres voies : opposition, tierce opposition.
85
Les décisions de refus d’inscription d’un candidat, conformément aux articles 16 et suivant du décret n°2010-235
du 26 Août 2010 fixant les modalités d’application de la loi n°96-672 du 29 Août 1996 règlementant la profession de
conseil juridique agréé et publié au JORCI numéro spécial 2 du 30 janvier 2012, p.35, indique que la décision de la
chambre doit être déférée devant le tribunal de Première Instance compétent ; et la décision du TPI peut faire l’objet
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par contre, ils ont en leur sein des organes qui interviennent en qualité de juridiction
d’appel86 avant de saisir en dernier ressort les juridictions supérieures selon la nature du
litige ; c’est le propre des juridictions disciplinaires médicales. Ces décisions peuvent être
frappées d’un appel87 devant la Section Disciplinaire du Conseil National par le médecin
dans un délai de trente (30) jours à partir de la notification à la résidence professionnelle
lorsque la décision a été rendue sans qu’il ait comparu ou se soit fait représenter. Dans
les mêmes circonstances, ce délai est de cinq (5) jours si la notification lui a été faite en
personne par lettre recommandé ou par voie d’huissier. Cet appel est fait au Conseil
National par simple déclaration qui en donne un récépissé. En un mot, nous pouvons
retenir que les décisions disciplinaires du Conseil Départemental de l’Ordre peuvent faire
l’objet d’appel devant la Section Disciplinaire du Conseil National de l’Ordre des
Médecins. Les décisions de celle-ci peuvent être contestées devant la Chambre
administrative de la Cour suprême.
Pour renchérir sur nos propos, le Docteur DOSSO KARIM, qualifie les organismes à
caractère juridictionnel de juridictions spécialisées. Il indique à cet effet qu’elles sont
diverses et se différencient des tribunaux et cours ordinaires par leurs compositions et
leurs modes de fonctionnement.
Leurs décisions sont soumises au cours d’appel par voie d’appel et au Conseil d’état par
voie de cassation 88 . Il s’agit essentiellement entre autre des organismes de répression
disciplinaire comme ceux de l’université et des ordres professionnels. Dans l’affaire
François Xavier SANTUCCI, la Cour Suprême a jugé que la décision prise par le conseil
de l’université siégeant en formation disciplinaire constitue une décision juridictionnelle
insusceptible de recours pour excès de pouvoir mais de recours en cassation. La cour se
reconnait également comme juridiction de cassation à l’égard des décisions prises par la
chambre nationale de l’ordre des pharmaciens89.

d’appel en dernier ressort c’est ce qu’indique l’article 23 alinéa 3. Par en matière disciplinaire, les jugements rendus
par le Conseil de discipline de la Chambre Nationale des Conseils Juridiques Agréés de Côte d’Ivoire conformément
aux articles 49 et 50 de leurs règlements intérieurs, sont déférées en appel devant la cours d’appel.
86
Commission permanentes des enseignements Supérieurs de Côte d’Ivoire.
87
Article 40 de la loi n°60-284 du 10 septembre 1960 portant création d’un ordre national des médecins de la
république de Côte d’Ivoire dispose que : «
- L’exercice de l’action disciplinaire ne met obstacle :
1°) Ni aux poursuites que le ministère public ou les particuliers peuvent intenter devant les tribunaux répressifs dans
les termes du droit commun ;
2°) Ni aux actions civiles en réparation d’un délit ou d’un quasi-délit ;
3°) Ni à l’action disciplinaire devant l’Administration dont dépend le médecin fonctionnaire ;
4°) Ni aux instances qui peuvent être engagées contre les médecins en raison des abus qui leur seraient reprochés
dans leur participation aux soins médicaux prévus par les lois sociales. »

88
Article 48 de la loi n°2018-978 du 27 décembre 2018 déterminant les attributions, la composition, l’organisation et
le fonctionnement du Conseil d’Etat indique que : « En cas de cassation des décisions à caractère juridictionnel des
organismes administratifs ou des ordres professionnels, le Conseil d’Etat évoque la cause et statue à nouveau ».
89
Arrêt du 26 mai 2004 Conseil national de l’ordre des pharmaciens contre DOUMBIA MOHAMED. Arrêt du 25 juin
2008 VEI BERNARD contre le Conseil national des pharmaciens.

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CONCLUSION
L’étude des organismes à caractère juridictionnel est assez intéressante et aussi donne
d’identifier la nature juridique de ces structures. Encore appelés quasi-juridiction, les
organismes faisant office de juridiction revêtent d’une grande utilité dans
l’administration de la justice. Elles interviennent dans des secteurs sensibles et aussi pour
lesquels la confidentialité des informations corporatistes est de mise. 90 Ce qui exige une
structuration particulière sans que cela ne déroge aux grands principes qui animent la
fonction de trancher et de sanctionner. Toutefois, la détermination de leur nature est
quelques fois difficile en raison de l’imprécision des textes de sorte qu’il faut rechercher
des faisceaux d’indices et se rapprocher de la doctrine et de la jurisprudence.
Pour notre part, nous relevons que ces organismes quasi-juridictionnels sont méconnus
des citoyens alors qu’elles rendent leurs décisions au nom du peuple ivoirien. Aussi, il
serait assez intéressant de parvenir à la maîtrise de leur régime juridique 91 en les
organisant d’une manière claire au moyen d’une loi, quoique chacune d’elles s’organise
en interne suivant la spécificité de son secteur.

90
Le cas de l’ordre des médecins.
91
En dépit du fait qu’elles se soumettent aux principes de la bonne administration de la justice.
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ANNEXES

ANNEXE 1 : QUELQUES

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ORGANISMES A CARACTERE JURIDICTIONNEL
DE TYPE AUTORITE ADMINISTRATIVE INDEPENDANTE
DENOMINATION DOMAINES DE TEXTES DE CREATION ET DE
STATUTS
S COMPETENCES FONCTIONNEMENT
De Commission nationale de la presse (CNP),
Elle est une Autorité
ANP elle est passée à Conseil national de la presse
administrative indépendante dotée
(Autorité Elle a pour mission de pour devenir aujourd’hui Autorité nationale da
de la personnalité juridique et
Nationale de la réguler le secteur de la la presse (ANP) en vertu de l’article 105 de la loi
jouissante d’une autonomie
Presse) presse écrite. n°2017-867 du 27 décembre 2017 portant régime
financière.
juridique de la presse
CAIDP Elle veille au respect et à
(Commission l’application par les
d’Accès à organismes publics, des Elle est une Autorité
Créée par la loi n°2013-867 du 23 décembre 2013
l’Information dispositions de la loi administrative indépendante dotée
relative à l’accès à l’information d’intérêt public
d’intérêt public et relative à l’accès à d’une autonomie financière.
aux Documents l’information d’intérêt
Publics) public.
Selon l’article 72 de Aux termes du décret n°2012-932 Structure étatique chargée de la gestion du
l’ordonnance n°2012-293 du du 19 septembre 2012 portant secteur des télécommunications et des
ARTCI 21 mars 2012 relative aux organisation et fonctionnement de technologies de l’information et de la
(Autorité de télécommunications et aux l’ARTCI, l’ARTCI est une autorité communication en Côte d’ivoire. Elle fonctionne
Régulation des technologies de administrative dotée de la sous l’empire de l’ordonnance n°2012-293 du 21
Télécommunicatio l’information et de la personnalité juridique et de mars 2012 relative aux technologies de
ns de Côte communication, l’ARTCI est l’autonomie financière l’information et de la communication
d’Ivoire) chargée d’assurer la
fonction de régulation pour
le compte de l’Etat

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Organisation judiciaire de Côte d’Ivoire - formation des élèves de l’INFJ - promotion 2023-2024
L’ANRMP a connu plusieurs
statuts, allant de celui d’organisme
spécial indépendant (OSI) rattaché
au ministre en charge des marchés Elle tire son fondement de plusieurs textes
publics (Art. 2 du Décret n°2009- juridiques dont le plus ancien remontant à sa
260 du 6 août 2009 portant création date de 2009 avec le décret n°2009-259
ANRMP
L’ANRMP est l’organe de organisation et fonctionnement de du 6 août 2009.
Autorité Nationale
régulation des marchés l’ANRMP), à celui d’‹‹Autorité Depuis cette date, les textes régissant l’ANRMP
de Régulation des
publics administrative indépendante, ont été modifiés jusqu’à l’adoption en 2018 de
Marchés Publics)
dotée de la personnalité morale et l’ordonnance n°2018-564 du 27 juin 2018 portant
de l’autonomie financière, (…) création, organisation et fonctionnement de
rattachée institutionnellement à la l’ANRMP
Présidence de la République›› (Art.
1 de l’ordonnance n°2018-564 du
27 juin 2018)

La création de l’ARRE remonte à 2015.


La loi n°2015-538 du 20 juillet 2015 portant
réglementation du système de récépissés
ARRE
d’entreposage, fait mention en son Article 3
(Autorité de
L’ARRE est l’organe de qu’‹‹Il est créé un organe de régulation du
Régulation du
régulation du système de système de récépissés d’entreposage…››
système de
récépissés d’entreposage En 2016, un décret pris en Conseil des ministres
Récépissés
fixe la nomination, les attributions, la
d’Entreposage)
composition et le fonctionnement de l’organe de
régulation du système de récépissés
d’entreposage

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La législation ivoirienne relative à l’électricité (loi
n°85-583 du 29 juillet 1985) attribue le monopole
du transport, de la distribution, de l’exportation
et de l’importation de l’énergie électrique à l’Etat.
En décembre 1998, l’Etat a procédé à une réforme
Pour un contrôle plus efficace des institutionnelle afin de mieux maitriser ses
opérateurs et une meilleure attributions. L’Energie électrique de Côte
ANARE- CI
protection des consommateurs d’ivoire (EECI) a été liquidé et trois (3) nouvelles
(Autorité Nationale
L’ANARE-CI est l’organe d’électricité. La loi n°2014-132 de sociétés de l’Etat ont créées dont l’ANARE.
de Régulation du
de régulation du secteur de mars 2014 portant code de Pour un contrôle plus efficace des opérateurs et
secteur de
l’électricité l’électricité prévoit la création d’un une meilleure protection des consommateurs
l’Electricité de Côte
organe de régulation indépendant, d’électricité, la loi n°2014-132 de mars 2014
d’Ivoire)
doté de la personnalité juridique et portant code de l’électricité prévoit la création
de l’autonomie financière d’un organe de régulation indépendant.
Le 12 octobre 2016, le décret n°2016-785 portant
organisation et fonctionnement de l’Autorité
Nationale de régulation du secteur de l’électricité
de côte d’ivoire crée l’ANARE-CI suite à la
dissolution de l’ANARE

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ANNEXE 2: QUELQUES ORDRES PROFESSIONNELS

EXISTENCE DOMAINE D’INTERVENTION


DENOMINATION JURIDIQUE

Loi n°70- -assure la surveillance des textes qui régissent la profession.


ORDRE DES
488 du 03 -assure la défense des intérêts matériels et gère les biens aux respect des lois et dispositions
ARCHITECTES
aout 1970 règlementaires. veille à la discipline au sein de la profession.
Veille au maintien des principes moralité, de probités et de dévouements indispensables à l’exercice
Loi n°60-
de la profession
ORDRE DES 284 du 10
Veille à l’observation des devoirs, des règles édictées par le code de déontologie assure la défense,
MEDECINS septembre
l’honneur et l Independence de la profession. accomplir la mission d’intermédiaire entre les conseils
1960
départementaux et conseil national de l’ordre.3
Loi n° Assurer le respect des devoirs des professionnels, la défense de l’honneur et de l’indépendance de la
2015-535 profession.
ORDRE DES
du 20 Veille à la formation professionnelle continue et évaluation. Contribue à la promotion de la santé
PHARMACIENS
juillet publique.
2015
Elaboration des documents d urbanismes ; dans la rédaction des plans directeurs locaux ; des plans
Loi n°94-
programme d’équipements .participe aux études et expertises aux problèmes fonciers. Veille à
ORDRE DES 619 du 18
l’application des lois et réglementations de la profession. réalisation d’étude et le suivi des travaux
URBANISTES novembre
.élaboration des grands projets régionaux.
1994
ORDRE DES Loi Veiller au respect de principes de moralité, de probité et du dévouement indispensable à l’exercice de
SAGES- n°2014-133 la profession. veiller au respect des lois et règlement régissant la profession. Organisation et la mise
FEMMES ET DU 24 en œuvre de l’entraide à visée sociale au bénéfice de ses membres et leurs ayants droits
MAIEUTICIENS mars 2014

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Table des matières

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