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SSO) ie), HORS - SOT Reo ABET SE este) 1). (6219) PO ia} US aut iec la vole Uta eT r q = FLORENCE, ia aN Rivales dans l'art Cla Ca NE OT a CUE ERODES MT z-lui un mo Ose teUZ Ce BV AR ea tas SECONDAIRE to Profitez de -15% supplémentaires directement via le QR code suivant ! LA GUERRE DE L’ART ‘est une exception de Thistoire Quand partout, en Ukraine, en Syrie, au Yemen, en Afghanistan, les conflits ont inexorablement dégrade le patrimoine historique et étouflé la création artistique, les rva- Iités entre cites-Btats aux XV" et XVIFsi¢cles en Ita le Font au contraite industralisée, comme on crée des usines darmement. Les familles régnantes de Naples et de Rome, les Borgia, Famése, Della Rovere, les Sforza’ Milan, les Médicis a Florence ont, pour faire brillerleurnom et leur cite finance les artistes de la Renaissance italienne, transformant pou toujours les idées, Tartetles sciences. Au moment méme olt Nicolas Machlavel €t- vait LArt de la guerre, cest une guerre de Tart que se menaient cenréalité les princes-mécénes En sarrachant es meilleurs artistes, {is leur ont permis de faire passer la peinture en tols dimensions, cencourageant la modernisation des styles, Paudace dans les constructions et les représentations. Botticelli et Brunelleschi Florence, Michel-Ange et Raphatl a Rome, Léonard de Vinei & Milan..,Tous beneficierent de ces largesses et contribuerent cette révolution, qui .appuyat sur humanisme, exhumé de TAntiquité Ils replacérent Fhomme au centre des aeuvres, y compris tel sieuses, en osant la laideur comme la perfection. Tout a coup, la ‘magle de la perspective a fait entrer le réel dans les représenta- tions. Dans un cadre trés contraint de travail sur commande pour les puissants, les artistes se sont octroyé une grande liberté din. terprétation, multipliant les audaces,clins del, références,quitte Se fare rattraper, parfois, parla patrouille Comme lorsque Léo- nard dut peindre une deuxiéme version de sa Vierge aux rochers, pour ramener le regard vers Fenfant Jésus que le commanditalre jugeait trop éclipsé. Dans ce hors-série, GEO Histoire revient sur ces deux siéces qui ont tout changé, et vous guide dans les ceuvres et les coulisses de la Renaissance itallenne. . -MYRTILLE DELAMARCHE, REDACTRICE EN CHEF EDITO ‘GpO HISTOIRE 5 SOMMAIRE CHRONOLOGIE CES SIECLES QUI ONT CHANGE LE VISAGE OU MONDE ‘Aux XV et XV siecle, ala été au cent de la perspective, qui ne se contente pas de montrer de facon diferente, depuis le seul ceil d'un seul individu, mais qui invite le spectateur & considérer le tableau comme une scene de thédtre qui seralt le monde, un monde en. fin ouvert aux actions et aux intéréts de Thomme, et dont celui-ci peut construire une vision de son point de vue propre. La représentation moderne est née. Pour autant, elle na pas surgi de la seule invention de la perspective par Brunelleschi et de sa théorisa- ‘on par Alberti. Une série d'évenements, providen. tels pour Cosme de Medicis, va procurer d autres ames Florence dans a conquéte desarts et des es Drits. ls feraient celle le berceau de Ia Renaissance. Pour étendre son hégémonie et installersa famille ‘comme future dynastie de Florence, Cosme de ‘Medicis attire dans la cité les plus grands maltres de son temps, convaincu que art était sa meilleure eee 42 GEOMISTORE LA GENESE 44 cpomisroRE ‘eve arme de propagande. Mais ia aussi cceur d'in- viter dans ses murs tous ceux que lépoque tenait pour influents, politiquement et économiquement. la cité de Ferrare vient de refuser lénorme delé- gation qui se déplace, en cet été 1437, depuls Constantinople jusqu’atalie,poury tenirle concile de réconciliation entre les Eglises grecque et latine. Parmi les 700 personnes qui ont pris place dans le cconvoi, ily fempereur byzantin Jean VIII Paléologue tt le pape Eugene IV. Cosme ouvre ses palais, ses coffres ses ables, et invite la prestigieuse cohorte de princes de nobles et de savantsa goiter aux charmes {de Florence, ainsi qu’a mesurer Técho de sa puissance. Au milieu dela cour byzantine, a titre de delégue lac de Byzance, se trouve le grand et vieux philosophe George Gemiste, dit Plethon (vers 1355-1452). Cet ar- dent défenseur de Platon séduit Cosme de Medicis et, ‘en quelques heures, le convaine delasuprematie de a philosophie sgrecque. Aussitot, Cosme crée une Académie platonicienne, dont il confie la direction a Yérudit Mar- sile Fic (1433-1499). Puisilcom- mande la traduction des ceuvres de Platon, de Plotin, des poetes sg1ecs et romains néoplatoniciens. Il dépoussiere Homere et Ovide, ‘Virgile et Aulu-Gelle. Retrouve les, traités d'architecture de Vitrave {que traduira et commentera Al- berti, Ainsi, tes vite, dans Flo- rence ott dg, un siécle plus tt, ‘une chaire de grec a été instaurée, les étudiants affluent pour écou- ter les cours de Pléthon. Avec Iu, ils tudient cette nouvelle philosophie que la scolas- tique médiévale avait étouflée Malgré son age — lest alors octogenaire ~ Plethon reste suffisamment long ‘tempsa Florence pour former quelques élevesa Tart ‘deYenseignement.Ceux-cicontinueronta diffuserle platonisme bien aprés le départ du vieux maitre ur les bancs de Académie platonicienne de Florence se faconne ainsi homme de laRenaissance. Un individu ouvert d esprit, avide de connaissance, curiewx duu monde, libere des modeles de pensée imposes par Fglise et la scolastique. Jean Pic de la Mirandole (1463-1494), Laurent le Magnifique (1449-1492) et le poete Ange Politien (1454-1494) qui lance, du hhaut de ses vers, «C'est dans votre ville, 6 Floren- tins, que la culture, morte en Gréce, s'est réveillée>, ‘comptent parmi ces personnalités. Avec le direc- teur de Fécole, Marsile Fcin, ils élaborent ce que Ja posterité appellera le néoplatonisme médicéen, soltles concepts du beauet du sublime partir des écrits grecs. La se construit une vision hiérar- chique de 'univers, ot le sensible symbolise 'in- telligible. Lart, hier chrétien, devient apollinien fondé sur Nidée de beauté et de lois nées de Thar- monie naturelle. En toute logique, cette concep- ton fait de Vartiste un étre visité par la grace, qui DES HOMMES OUVERTS D’ESPRIT, CURIEUX DU MONDE, LIBERES DES CARCANS DE L’EGLISE... doit transformer sa vie en chef-<'ceuvre. Cette der- niere érotise le monde, le langage, la connaissance et tout Munivers. Cependant, soucieux dharmoniser plus que de ‘ompre, de renaitre plus que de révolutionner, les phi- Josophes humanistesflorentins ~ Marsile Ficin, tout ‘comme Pic dea Mirandole ~ entreprennent de fondre la pensée platonicienne dans le dogme chretien. Is pposent la théorie selon laquelle a beauté des choses decoule dela splendeur divine, abolissant les limites entre le sacré et le profane. Cette voix retentira aupres des artistes. Michel-Ange et Raphael méle- ront aux scenes bibliques celles de FOlympe. Le pieux Sandro Botticelli se décideraa peindrele premier nu feminin en pied de- Duis mille ans. En 1485, sa Nais- sance de Venus consacre le re- tour dAphrodite a Florence. (Quant la Flore de son Sacre duu printemps,elleexalte une beauté {éminine radieuse, ibérée du pé- ché dive et de saculpabilité, qui inspirera les peintres a venit. Cosme de Medicis quiest devent: Thomme le plus riche eEurope, ‘meurt en 1464, mais le mécénat attaché a son nom ne faiblit pas pour autant, ni avec Pierre I*, dite Goutteux (1464-1469), son fils ané et successeur,niavecson petit-fils Laurent, ditle Magni- fique (1469-1492). Avec ce demier, Florence atteint son apogée artistique. La flamboyance de sonartet de sa pensée entraine les cites italiennes dans une riva- lite sans pareille-Sienne, Rome, Pise, Lucques et en- fin Venise.Lartreste Tarme prvilégiée de leurs guerres influence ; i vaudra plus dun chef-f'aeuvre a Tita- lie,et a Fhumanité une généalogie fabuleuse artistes. “Michel-Ange, Léonard de Vinci, Raphael ou Titien, ces sénies nes du creusetflorentin, dont Giorgio Vasari (0511-1574) écrra Les Vieset pour qui ilinventa le mot «de Renaissance, continueront le prodige de nous éclat- rer en nous éblouissant. est quils portent avec eux Ja fameuse toscanita chere a Cosme de Medicis, qui ‘nous bouleverse parce quelle porte en elle Tamour {que Fhomme, avec Tart, déclare ala vie . ‘CHRISTIANE RANGE ‘Florence le quater de fonramo ate un trex, a ‘chapel Brancaea, dans ise Santa Mara del Carmine. Des resques que fon dota ‘eo mates deo Renaissanc, aslo, Massel, pus Lipo LINSPIRATION UN LIVRE SUBVERSIF SORTI DE L’OUBLI ‘est um trésor conservé parmi 11000 manus- crits rates la bibliotheque Laurentienne dt monastere San Lorenzo a Florence, congue par Michel-Ange pour les Medicis Un ouvrage 21a couverture de culr rouge patinée par les sigclesetincrustée de metal, que les experts, historiens ou philologues ne sont autorisés _feuilleter qutavecdes gants de latex. Ce livre ‘urait pourtant pu étre perdu a jamais, et Thistoire de Fhumanitésulvre un autre cours. iver 1417. Poggio Bracciolini, dit le Pogge, frappe a la porte d'un monastére, quelque part dans le sud de FAllemagne, ala recherche de manuscrits rares. Frée, le visage glabre, vétu sim- pplementet seulement escorté d'un compagnon, rien ne laisse deviner sa condition de notable florentin. Deux ans plus tot, en mat 1415, cet ancien secrétaire apostolique a Rome sest soudainement retrouve sans ‘empl, lorsque son «patrons, Jean XXIIL, en raison desa vie avecla Vierge. Latt permetait cela. Lidée rest pas née avec ce remuant et ambitieux Quattrocento (le XV" sidcle). -Le mécenat artistique était deja une pra- tique répandue en Italie & la fin du Moyen Age», LE CONTEXTE rappelle Thierry Crépin-Leblond, directeur du musée national de la ‘de guere, ls artvalent au pouvott apres Jes Visconti, une famille noble qulavatt LUN GRAND PEINTRE Renaissance a Ecouen. Giotto diBon- -POURMAGNIFIERLA —_‘Fegné cent soixante-ix ans surla ville. done, le maitre dela pré-Renaissance, GLOIRE DUN PETIT DUC_—_Les nouveaux venus prolongérent ainsi ‘décora des chapelles pour des banguiets a Padoue et Florence, et travailla 2 Pour faire exstr la petite cté ‘des chantiers amoroes parle clan précé- dent, comme la cathedrale de Milan et [Naples pourle rot Robert Anjou. Mals Urbino surla carte de tae, 'e Ia chartreuse de Pavie. Dans cette der- au XV" sitcle la chose prt un tour plus systématique et personnalisé A Florence, ville marchande et lettrée out le mécé- ‘duc Frédéric de Montefetro ‘igea.en centre intelectuelet_ —-montre méme le patriarche Gian atistgue, Ce chef de querte iére, une fresque du peintreBergognone Galeazz0 Visconti et des Sforza offrant la natetaitdejabienimplanté,unefamille _féoce futaussi un mécéne act, chartreuse la Vinge dans un élan com- de banquiers les Médics,en fitun allio attantles talents sitéressant_ mun complétement artficiel:Tannéede Indispensable de Faction politique. divers domaines (ivres,tapis- la mort de Gian Galeazzo (1402), le pre- ‘Cosme, le patrarche, son fils Pierre dit Je Goutteux, et son pett-fls Laurent le Magnifiqueseservirent de Tart poursim- poser, d'autant plus qu'ls étaient des “princes sans couronnes: is régnaient ‘sans ttre officiel, sous couvert institu- tons républicaines. Pour Cosme, a for- ‘tune quill consacrait aux arts devait étre ‘immense, a Timage de son emprise sur la cite. Tout était bon pour faire briller Florence, et. travers elle lenom des Medicis :construc- ton etrénovation fédifices civil et religieux (le palais familial, le couvent San Marco) entretien dune écu- te artistes parm! lesquels le sculpteur Donatello et Tarchitecte Brunelleschi, mais aussi mise en scene du ‘lan dans des ceuvres, dont cete fastueuse fresque dut Cortege des Mages, peinte vers 1460 par Benozzo Gozzoli at palais Medicis. Aux cOtes de Cosme et de Pierre surleurs chevaux, ony vot Laurent, alorsa peine adolescent, alnst que d'autres Médicis des dignitaies pproches dela famille et des hotesillustres du puissant ‘banquier. En une peinture, le patriarche célébrait son importance, flatait ses soutiens et annongait Tave- rnement de sa dynastie la téte de a ville. ‘Les Médicis furent donc les premiers fainedumécé- ‘nat un outil indispensable de leur politique. Mats ils ‘talent loin d ételes seuls Aentretenir ces liens toubles entre fastes de Fart soif de domination. Les dages et les confréries de Venise, ainsi que les ois cle Naples surent mobiliser leur profit talent des artistes. es ‘ducs de Milan aussi, notamment les Sforza, qui sen servirent pour se forger une légtimité Simples chefs 52 GHOHISTOIRE seri, architecture. Son artist fiche était un peintretoscan brant prise des ‘cours italennes, Per dela Francesca. Prewe de celien priviégi, le peintre dédia son premier trait ‘de perspective 8 son méctne. rier des Sforza qui devrait régner plus ‘ard sur Milan lava encore que Lan! Les seigneurs des petites villes étaient pasen este Le plus frenétique était sans doute Frédéric III de Montefeltr, duc de la modeste Urbino.

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