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a ot MASTER SURISTE DAFFAIRES 2019/2020 Module; Techniques Conteactucttes Introduction Longtemps domiinante, ta théorie de 'autonomie de la volonté semble affaiblie face a la ‘montée en puissance cle ta théorie du solidarisme contractuelle, Cette théorie est basée sur le postulat que les contractants ne sont pas égaux entre eux. Il est vrai que depuis. quelques années, les relations contractuelles se sont considérablement modifiées. Il est certain que dans. ‘um contrat passé entre tin professionnel et win non professionnel, ce denier est foreément plus {ible car profane sur Vobjet du contrat! Le législateur est alors intervenu, notamment dans le cadre du droit de la consommation, du droit du travail, ceci affectant le droit des contrats, Cet interventionnisme flagrant de I'Etat n'est pas sans atteindre le principe de l'autonomie de la volonté. ‘Les contractants vont de phis en pliss souvent se voir opposer et opposer ens inéme Iéquitibre da contrat. Cette notion rappelle la difficile question de égalité des contractants. Sil est vrai qu'il est wlopique de penser que les contractants sont égaus, i Vest davantage de penser qu'un 4quelconque équilibre prisse s instaurer dans le contrat. Test essentiel de diminuer les inégalités mais reclercher un véritable équilibre reste un objectif difficile a atteindre. Le recul de I'mitonomice de la volonté a été également manqué par Jerle de plus en plus étendu du juge. En effet, sous empire de Pautonomie de la volonté, le jjuge se voyait opposer Ia force obligatoire du contrat. Avec I'affiiblissement de celle-c, il se voit la possibilité d’intervenir dans le contrat ‘Toutefois, s'il est possible que Vintangibilité du contrat soit atteinte par limmixtion du juge, ccelle-ci reste encadrée et limitée en raison cle la trop grande insécurité juridique qu'elle pourrait provoquer. Dans ce seus, le role du juge est assez parndoxal dans le contrat en raison des influences réciproques des dewx courauts de pensée, solidarisme et liberté contractuelle Le juge doit imterpréter, contréler, parfois modifier, mais ne jamais imposer. Le refus catégorique de la doctrine et de Ia jurisprudence daccepter V'introduction de la théorie de Vimprévision montre Ia difficulté de poser les limites entre intervention du juige et ingérence dtu juge dans le contrat”, * LEQUETTE Yes, Bilan des solidarismes contractuels, « Etudes en fhonneur de P. Didier, Economica 2008 2p273 Pauline Castelot« le juge fa¢e au contrats Mémoire de M2 Droit du niarché sous la ditection ‘de MELE. Isabelle Alvarez Année scolaie 2010 / 2011 Université de MONTEPELLIER centre du doit et de la consommation Il s’agit tantét pour le juge de faire respecter une liberté ou un droit fondamental, tantot d’assurer plus de souplesse dans les sanctions de la faute ou encore de faire régner un minimum d’équité dans les relations contractuelles. Sous langle économique, le traitement du contentieux consiste en fait a rédiger un nouveau contrat dans lequel la chose est la résolution consentie ou imposée du litige et le prix est la compensation consentie ou imposée des dommages infligés par la non-exécution du contrat initial. Ceci est dit, le juge peut intervenir dans les contrats de plusieurs maniéres : interpréter le contrat, annulation d’une clause ou diminution de ses effets, reduction des obligations d’une partie? , autorisation ou refus de l’exercice de la sanction d’une faute contractuelle et condamnation 4 des dommages-intéréts. D’une certaine maniére, ces grands pouvoirs affaiblissent la force obligatoire des contrats et la stabilité contractuelle et déjouent les attentes légitimes des parties. Toutefois, une nouvelle culture contractuelle conciliant ces valeurs opposées est en train de s'implanter. Or, L’intervention judiciaire dans le contrat est devenue une tendance lourde. Grace 4 elle, les sanctions du contrat comportent une heureuse souplesse, tandis que la défense de la justice contractuelle et des droits fondamentaux a fait des gains importants. Face au refus de son immixtion, le juge va parfois s’appuyer sur des concepts tel que l’equité, la loyauté contractuelle ou la bome foi’ pour pouvoir parfois imposer aux parties des obligations qui lui paraissent nécessaires. Ces différentes immixtions du juge dans le contrat peuvent se justifier par la satisfaction d’un ordre public économique. Le juge essaie de faire évoluer le droit des contrats, pour permettre * article 264 « Les dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée et le gain dont il a été privé, et qui sont la conséquence directe de |'inexécution de |'obligation. L'appréciation des circonstances spéciales de chaque espéce est remise a la prudence du tribunal : i! doit évaluer différemment la mesure des dammages- intéréts, selon qu'il s'agit de la faute du débiteur ou de son dol.Les parties contractantes peuvent convenir des dommages-intéréts dus au titre du préjudice que subirait le créancier en raison de I'inexécution totale ou partielle de l'obligation initiale ou en raison du retard apporté a son exécution.Le tribunal peut réduire le montant des dommages-intéréts convenu s'il est excessif ou augmenter sa valeur s'il est minoré comme il peut réduire le montant des dommages-intéréts convenu, compte tenu du profit que le créancier en aurait retiré du fait de l'exécution partielle de l'obligation.Toute clause contraire est réputée nulle » * article 231 « Tout engagement doit étre exécuté de bonne foi, et oblige, non seulement a ce qui y est exprimé, mais encore a toutes les suites que la loi, l'usage ou l'équité donnent a l'obligation d'aprés sa nature. » une meilleure exécution du contrat, pour que chacune des parties retrouve son intérét dans la relation contractuelle, économique. Ce n’est pas au jour de la conclusion du contrat qu’apparaissent les difficultés de V'interprétation, mais plus tard de son exécution voir aprés celle-ci. L’une des parties se plaignant des prestations ou du comportement de l’auttre, le litige se porte sur la portée réelle du contrat : a quoi chacun étai il précisément tenu et a- t-il satisfait ou non a ses obligations ? c’est done toujours a l’occasion d’un litige qui se pose la question de l’interprétation, laquelle va commander I’issue de litige. L’interprétation consiste 4 rechercher la volonté des parties. Mais il arrive que se présentent des cas imprévus que les parties n’ont pas envisagés : sous couvert d’interpréter le silence de contrat il s’agit alors en réalité de compléter la volonté des parties. Dés lors le questionnement qui se pose a nous est le suivant : si le juge peut interpréter un contrat dont les clauses sont claires ou s’il doit, a lV’inverse, se limite a@ clauses obscures @un contrat ? De méme, devant cette force obligatoire du contrat qui rend ce dernier la loi des parties, une probléme se pose en matiére de la relation entre le juge et le contrat et la distance de « sécurité » nécessaire que doit le juge respecter en phase de traitement du contrat, donc, est ce que le juge a le droit d’intervenir dans le contrat ? Est-ce qu’il a le droit de statuer indépendamment du contrat ? Est-ce qu’il a le droit d’interpréter le contrat ? Est ce qu’il peut remodeler les stipulations du contrat ? Nous tenterons de répondre a cette question dans la premiere partie de notre étude cherchant a préciser le r6le que le juge est amené a jouer dans la révision du contrat dans une deuxiéme partie. PARTIE L: Le Juge et ’interprétation du contrat L’interprétation est un hommage rendu 4 l’autonomie de la volonté tandis que la révision parait lui donner un démenti’, cette partie est consacrée a l’interprétation du contrat par le Juge. Ce sujet est toujours d’une grande importance en France et au Maroc, cette importance apparait notamment en cas de désaccord entre les parties sur le contenu de contrat et qu’elles ne parviement pas 4 dégager le sens des clauses contractuelles. En effet, les difficultés d’interprétation du contrat ne sont pas révélées au moment de la conclusion du contrat mais plus tard, lors de son exécution, voire aprés celle- ci. Il incombe au juge de les interpréter. Si l’interprétation du contrat se révéle nécessaire, les juges du fond disposent d’une grande liberté d’action. Souvent le juge est soupgonne par le législateur d’agir parfois selon sa propre guise »°. En effet, les juges exploitent l’opération de l’interprétation pour parvenir a s’immiscer dans le contrat et rendre la décision qu’ils estiment conforme a |’ équité. C’est pourquoi, la cour de cassation a enserré le pouvoir souverain des juges dans certaines limites, afin de mettre en évidence ces particularités, il importe d’évaluer dans un premier temps le pouvoir souverain des juges puis, dans second temps, les limites au pouvoir souverain des juges. CHAPITRE I: Du pouvoir souverain des juges de fond La cour de cassation reconnaisse aux juges du fond un pouvoir souverain dans |’opération dinterprétation du contrat. Apres avoir découvert qui fait l’interprétation, il faut s’intéresser au comment de |’interprétation. Deux méthodes d’interprétation s’opposent, on distingue la méthode objective et la méthode subjective. Selon la premiére, il faudrait se fixer sur interpretation de la déclaration de la volonté tandis que la seconde consiste a rechercher ce que les parties au contrat ont eu lintention de faire’. Il nous fait ici exposer, successivement, l’interprétation subjective (sectionl) et Vinterprétation objective (section 2) hi Carbonnier, les obligations, les biens vol, PUE, Coll. Quadrige Manuel » ®), Fischer, le pouvoir modérateur du juge en droit civil frangais. These de doctorat 7 Mohamed El HARTI le juge et la force obligatoire du contrat Etude comparative du droit frangais et du droit marocain sous Ja direction du monsieur Georges DECOCQ, SECTION 1 : Méthode d’interprétation subjective Dans sa pureté originelle, la méthode subjective impose au juge de rechercher, par tous moyens, la volonté réelle des parties au-dela des termes et des formules utilisés, aussi, le droit frangais connu par son attachement au systéme dit de la volonté interne imposé-t-il au juge de rechercher quelle a été la commune intention de parties contractantes plus de s’arréter au sens littéral des termes. Cette position est conforme au principe de l’autonomie de la volonté et fidéle au volontarisme juridique, en effet le contrat étant le produitde la rencontre de deux volontés, c’est d’aprés la commune intention des parties qu’il faut en apprécier les conséquences. L’interprétation subjective apparait ainsi comme un hommage rendu a l’autonomie de la volonté, dans cette perspective, ce qui compte c’est la volonté réelle, la volonté profonde inteme c'est-a-dire ce que les parties ont réellement voulu et non la maniére dont elles se sont exprimées. Ce qui est décisif ce n’est pas le sens habituel ou conventionnel ou apparent des dispositions du contrat mais le sens que les parties ont voulu leur donner. Des lors, ce qui est demandé au juge, c’est de rechercher avec le plus grand soin, l’intention véritable des parties par-dela les formules heureuses ou malheureuses qu’ elles ont pu trouver. Le juge devra donc veiller 4 ce que soit assurée la primauté de la volonté psychologique sur son expression matérielle méme si les termes du contrat paraissent clairs car le contrat le plus limpide ne pas refléter la volonté réelle des parties. Dés lors, il suffit pour qu’il y ait lieu a interprétation que les termes du contrat soient jugés équivoques par lune des parties et qu’il y ait contestation a ce sujet’. Le recours a la volonté interne n’a nullement été écarté par les rédacteurs du DOC. L’article 462 dispose que le contrat qui fait |’ objet d’interprétation est celui dont les termes ne sont pas clairs ou expriment incomplétement la volonté de leur auteur ou celui dont les termes employés ne sont pas conciliables avec le but évident qu’on a eu vue, lors de la rédaction de Vacte. Le juge use d’un pouvoir souverain pour la recherche des questions relatives aux faits dans le domaine de l’interprétation du contrat. Il n’est pas soumis dans ce cas a la censure de la cour de cassation. ® Omar azziman Droit civil droit des obligations le contrat page : 249.250. Ces questions relatives au fait se limitent a la recherche par le juge de la commune intention des parties.Pour M. Azziman : l’interprétation du contrat est une question de fait. La signification et la portée de chaque contrat dépendent des circonstances intrinséques et extrinséques que seul le juge peut dégager, apprécier, et interpréter. C’est pourquoi Vinterprétation des clauses obscures ou ambigiies reléve de l’appréciation souveraine des jJuges et échappe au contrdle de la cour de cassation’. La cour de cassation dans un arrét de 7avril 1964 juge que l’interprétation des clauses ambigiies ou obscures dans les conventions des parties ne se soumet pas a la censure de la cour de cassation’?. La cour de cassation reconnaisse au juge du fond un pouvoir souverain dans |’interprétation des contrats ambigus toutefois, la cour de cassation exerce exceptionnellement un contrdle direct de l’interprétation d’un certain nombre de contrat. A. Cas des contrats de consommation. Selon Varticle 9 de la loi 31-08 sur la protection du consommateur En cas de doute sur le sens d'une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut'!. Pour MM.Malaurie, aynes et stoffel- MUnck, c’est ici que la législation protectrice des consommateurs s’écarte-le plus des régles d’interprétation fondés sur la recherche de la volonté des parties. Ces auteurs concluent : afin de permettre l’application de cette régle spéciale, l’appréciation du caractére ambigu d’une clause dans un contrat de consommation est contrdlée par la cour de cassation. B. Le cas des contrats types. Les contrats types reproduits 4 des centaines ou des milliers exemplaires sont, en principe, soumis au méme régime, c'est-a-dire qu’ils doivent étre interprétés et contrdles car Vunification est nécessaire, en effet les juges de la cour de cassation ont procédé, sous couvert de dénaturation, 4 une interprétation unificatrice des clauses reproduits 4 des millions d’exemplaires dans les contrats d’assurance ». ° Omar azziman le contrat page :256 édition le fennec * Mohammed El harti page :45 ™ article 9 de la loi 31-08 . Au Maroc, la cour de cassation est intervenue par plusieurs arréts pour étendre son contréle a Vinterprétation des clauses types, surtout dans les contrats d’assurance, « Attendu que la cour de cassation dressé de maniére légale est considéré la loi des parties en présence d’un engagement clair et sain de la police, cet engagement délimite directement le risque assuré, Varrét qui essaie d’interpréter la clause qui renferme les dimensions du risque se soumet 4 la . . 2 censure pour la dénaturation du contrat »?, Enfin toujours dans le méme sens, lorsque le juge ne peut pas découvrir ce que les parties ont réellement voulu. La loi invite a interpréter contre le créancier et en faveur du débiteur. Il ya la aussi une directive objective qui restreint la portée de la méthode subjective. SECTION 2 : Méthode d’interprétation objective La seconde méthode, qualifiée d’ objective, impose au juge de rechercher, par tous moyens la volonté réelle des parties au- dela des expressions utilisées, traditionnellement, c’est le droit allemand qui incame cette conception dite de la volonté déclarée, et qui sous ’action de la doctrine et de la jurisprudence a progressivement accordé a l’expression de la volonté la prééminence sur la volonté inteme. Cette conception ne s’inscrit plus dans la logique du volontarisme et de |’individualisme Juridique, le contrat n’est plus pergu comme un rapport entre deux individus mais comme une opération intéressant la société et donc les tiers. Dés lors l’interprétation doit faire prévaloir la signification a laquelle les tiers pouvaient accéder, ce que le juge devra done rechercher ce n’est pas une hypothétique volonté interne mais la volonté telle qu'elle a été exprimée. Nous nous étudierons dans premier paragraphe la méthode objective quant a |’interprétation des contrats clairs puis, dans un second paragraphe, la solution apportée par la jurisprudence. A. Méthode objective quant 4 l’interprétation des contrats clairs En ce qui concerne l’interprétation des contrats clairs, il faut prendre en considération l'article 461 du DOC. Le droit civil marocain dispose expressément qu’il ne faut pas rechercher la ® arrét de la cour de cassation 23 novembre 1965. ® art. 461 du DOC lorsque les termes de I’acte sont formels, il n’y pas lieu a rechercher quelle a été la volonté de son auteur ». volonté des parties tant que les termes sont clairs. En conséquence, lorsque les clauses du contrat ne sont pas obscures, la loi interdit au juge de rechercher la volonté des parties. B. Solutions de la jurisprudence marocaine La jurisprudence francaise et son homologue marocaine sont identiques, 4 cet effet, la cour de cassation juge : « s’il appartient aux juges de fond d’interpréter les conventions, ils ne peuvent sous prétexte d’interprétation dénaturer le sens et la portée des clauses claires et précises »'*. La cour de cassation a également utilisé cette méthode d’interprétation dans le domaine de Vassurance. Elle a précisé : « lorsqu’une police d’ assurance indique clairement que l’assureur garantit le paiement des sommes susceptibles d’étre mises 4 la charge de l’assuré par suits d’accidents du travail survenus au Maroc, le juge n’a pas a rechercher la commune intention des parties pour étendre la garantie 4 wn accident du travail survenu hors du Maroc »!?. La cour de cassation a encore précisé : « si la police d’assurance exclut clairement de la garantie les sinistres causés par une personne dépourvue du permis de conduire, le juge ne peut pas écarter l'exception de non assurance soulevée par l’assureur au motif qu’une autre personne, titulaire du permis de conduire, se trouvait assise a cdté de celle qui tenait le volant assurant ainsi la conduite effective du véhicule »'*. La chambre commerciale de la cour de cassation a jugé en 2008 que lorsque les termes du contrat sont clairs, il n y a pas lieu a rechercher quelle a été la volonté de son auteur. De fagon générale, les juges ont décidé depuis longtemps, que le juge n’est en droit dinterpréter, et done de rechercher la commune intention des parties, que si les termes du contrat sont obscurs. Par contre, si les termes du contrat sont claires, le juge n’ a pas a interpréter et n’a pas a rechercher la commune intention des parties. En présence de clauses claires, le juge devra donc s’en tenir aux termes du contrat et s’interdit tout travail d’interprétation. La théorie jurisprudentielle des clauses claires et précises limite donc le domaine de |’interprétation et restreint les pouvoirs d’investigation du juge’’. * arrét de la cour de cassation 26 MARS 1964 * arrét de la cour de cassation 10 juillet 1962 * arrét de la cour de cassation 12 Avril 1960 ” Omar azziman p. 250 Chapitre II : les limites au pouvoir souverain des juges Si les juges jouissent d’un pouvoir souverain d’interprétation, le domaine de l’exercice de ce pouvoir est enfermé dans certaines limites : la cour de cassation a pris l’initiative de contrdler la dénaturation du contrat d’une part (Section 1), et d’autre part la Cour de cassation a arrogé le droit de renforcer le contenu obligatoire du contrat (section 2) SECTION 1 : le contréle de la cour de cassation Si la cour de cassation laisse aux juges un trés large pouvoir souverain en matiére d’interprétation du contrat, celui-ci n’est pas sans limite. La cour de cassation veille a ce que les juges n’interprétent pas une clause claire et précise. Lorsqu’une clause est claire et précise, c'est-a-dire susceptible d’un seul sens et dépourvue de la moindre ambigiiité, les juges doivent s’interdire tout travail d’interprétation et s’en tenir aux clauses du contrat. Méme si elle leur parait injuste, la clause claire et précise doit étre appliquée par les tribunaux. En présence d’un contrat clair le juge n’a pas d’alternative.il doit appliquer purement et simplement la loi des parties, sinon elle expose sa décision a la censure de la cour de cassation pour denaturation. La jurisprudence marocaine s’est fondée sur l’article 461 pour censurer la dénaturation. La violation de cet article conduit a la censure pour dénaturation. Cet article 461 du DOC. Est spécialement utilisé pour interdire au juge d’interpréter le contrat des lors que celui-ci est clair et précis. A titre d’illustration nous mentionnons ici quelques arréts de la cour de cassation. Le 10 juillet 1962, 1a cour de cassation a jugé que : « En application de l’article 461 du DOC les juges de fond ont le pouvoir d’interpréter les conventions exprimés par les parties, lorsque les termes du contrat sont clairs et conciliables avec le but évident du contrat »'°. La cour de cassation a retenu que : « si les juges de fond ont le pouvoir d’interpréter les conventions des parties, il ne leur est pas permis sous prétexte d’interprétation de dénaturer le sens et le contenu des clauses claires et précises »'?. * Arret de la cour de cassation 10 juillet 1962 » Arret de la cour de cassation 26 Mars 1964 Dans le méme sens il est possible de citer wn arrét du 2 mai 1992, par lequel la cour de cassation a estimé que : « l’interprétation par les juges du fond des termes clairs et formels du contrat et considérée comme une dénaturation des termes du contrat sur leur sens apparent et formel ». SECTION 2: le forgage du contrat En principe, Lorsqu’une convention est claire, le juge ne peut modifier sous prétexte d'interprétation, les stipulations qu’elle renferme : interpretatio cessat in claris les tribunaux se sont pourtant autorisés un pouvoir de réfaction d’un contrat clair, mais qui est ou qui devient défectueux : ils ont par exemple substitué un indice d’ indexation a celui choisi par les parties qui se révéle inexistant ou illicite. D’une maniére plus marquante encore, en se fondant sur la bonne foi et 1’ équité. La jurisprudence procéde parois 4 un forcage du contrat en découvrant des obligations en dehors de toute stipulation. Depuis le début du XX émet siécle les juges n’ont pas hésité a intervenir dans le contenu du contrat est imposant certaines obligations non voulues par les parties. On peut, donc, citer les obligations dégagées par le contrat dans le cadre du forgage du contrat. A. L’ obligation de sécurité Lobligation de sécurité « est une obligation en vertu de laquelle le débiteur ne doit pas causer de dommage corporel a son contractant par l’exécution du contrat »°°. L’obligation de sécurité est fondée sur les articles 1147, 1382 et 1384 du code civil, suivant les phases de transport, elle est selon le cas une obligation de résultat ou une obligation de moyen. « Dans le cas d’une obligation de résultat le débiteur ne peut s’exonérer qu’en démontrant un cas de force majeure, tandis qu’en présence d’une obligation de moyen, c’est a la victime de démontrer la faute du débiteur a l’origine de la survenance du dommage ». Le droit marocain est proche du droit frangais 4 propos de |’obligation de sécurité. Celle-ci a été dégagée par la jurisprudence. Dans tout contrat de transport, 1’équité et méme le simple bon sens veut que le transporteur conduise le voyageur a destination sain et sauf. En droit francais, cette obligation a été ajoutée par le juge a la charge du vendeur. Ensuite, cette obligation a été étendue a d’ autres professionnels. *® Mohamed EL Harti p: 105 B. L’ obligation d’information L’obligation de l’information est une obligation découverte par le juge ou imposée par la loi avant ou pendant l’exécution d’un contrat par laquelle une partie est tenue d’informer |’ autre partie des éléments qui lui permettent de conclure et d’exécuter le contrat en toute connaissance de cause. L’ obligation de l’information est celle qui implique de faire entrer une information dans le champ contractuel envisagé ou existant”'. Cc. L’ obligation de surveillance La surveillance nécessite « une observation destinée a prévenir le danger prévisible qu’oceasionne l’exécution de obligation de la prestation contractuelle, concrétement, Vexécution de la surveillance implique donc la présence d’un surveillant, pour cortiger les comportements hasardeux ou interdire la poursuite d’une activité dangereuse ». Cette obligation de surveillance été introduite par la jurisprudence francaise. Une société loue un salon dans hotel pour un séminaire. Le contrat prévoit également de mettre a la disposition dans "hotel d’une antichambre attenante au salon loué a usage de vestiaire et un a été commis dans le vestiaire. La lere chambre civile de la cour de cassation frangaise a approuvé la cour d’appel de Paris davoir mis a la charge de I’hételier une obligation de surveillance, qui est une suite nécessaire du contrat de location .Sa situation est proche de celle de la clinique qui« s’ oblige également 4 une obligation de prudence qui s’étend atx bijoux conservés par le patient »**. ” Mohamed EL Harti p: 108 ” Mohammed El harti « Le juge et la force obligatoire du contrat ». Etude comparative du droit francais et du droit marocain Thése de doctorat. PARTIE IT: Le juge et la révision du contrat Une fois conclus, les contrats soit d’une durée indéterminés ou de longue durée, ces demiers sont corrélés 4 des évenements parfois imprévisibles et irésistibles a la fois, cette faculté est souvent l’origine d’un déséquilibre notable entre les obligations des parties. En effet, dans certains cas de force majeur qui rend impossible l’exécution correcte du contrat, les parties peuvent procéder 4 une renégociation du contrat suit 4 ces événements imprévus lors de l’établissement du contrat. Par ailleurs, un événement imprévisible est ce qui ne pouvait étre prévu au moment de la formation du contrat, les parties auraient di en tenir compte : soit elles auraient di refuser de s’engager, soit elles ont accepté d’assumer le risque ; elles ne peuvent done s’exoneérer de leur responsabilité pour un événement qu’elles pouvaient prévoir. Cette révision suit 4 des imprévisions peut étre dirigé par le juge qui est, donc, devant Vobligation de rechercher si |’événement était prévisible ou non au jour de la conclusion du contrat. Devant une telle situation, une théorie vainement critiquée, celle de l’imprévision, a gagné de la place dans la toute récente réforme du code civil frangais (Chapitre I), cependant elle n’a pas toujours retrouvé une consécration légale au Maroc (Chapitre II), dont lequel, son application reste controversée. CHAPITRE I : Pimprévision en droit frangais, la jurisprudence francaise et la grande réforme de « l’ordonnance du 10 février 2016 » Compte tenu des controverses et contestations dont souffre la théorie de l’impreévision et la difficulté d’une application systématique de son contenu, la jurisprudence frangaise a essayer de trouver une issue en adoptant quelques solutions dont on doit souligner(A) ces derniéres qui étaient a l’origine de la réforme apportée par le législateur en 2016 et qu’on vas essayer d’analyser sa teneur (B) SECTION 1 : Une jurisprudence francaise plutét méfiante : Depuis le fameux arrét Canal de Craponne du 6 mars 1876~* (A), plusieurs arréts ont résisté a la théorie d’imprévision en admettant le sacro-saint principe d’intangibilité des conventions, * L’arrét Canal de Craponne du 6 mars 1876, mais en paralléle, la cour de cassation en tant que juridiction de droit, s’est vu proposé certaines conditions de recevabilité de cette théorie qui entrainera certains effets qu’il faudra preéciser(B) A. L’imprévision au sens du fameux arrét Canal de Craponne En l'espéce, il s'agissait d'un contrat du 16e siécle qui était encore en cours d'exécution a la fin du 19e sié¢cle. Dans ce contrat du 16e siecle, il etait préevu que le propriétaire du canal percevrait une certaine redevance pour l'entretien de celui-ci. Au 19e siécle, les héritiers du constructeur du canal, encore propriétaires de celui-ci, continuaient a assumer la charge d'entretien dudit canal. Cependant, la dépréciation monétaire entre le 16e et le 19e siécle avait rendu la redevance complétement dérisoire et inadaptée aux frais exposes par les propriétaires pour I'entretien du canal. L'écoulement du temps avait donc, en quelque sorte, déséquilibré le contrat puisque les parties n'avaient pas su, dés le début, anticiper le risque d'une érosion monetaire. La redevance fixée a l'époque de la construction du canal ne permettant donc plus de couvrir les frais d'entretien du canal, les propriétaires ont décidé de saisir les tribunaux afin de faire revaloriser la redevance. Les juges du fonds avaient fait droit a cette demande puisqu'ils avaient estimé que la redevance devait étre réévaluée proportionnellement a l'augmentation des charges que les propriétaires exposaient. 1. Question de droit : Est-il possible de porter atteinte aux prévisions contractuelles des parties dés lors que les circonstances économiques sous-tendant le contrat ont changé ? 2. Solution : La Cour de cassation répond par la négative a cette question et casse la décision des juges du fonds. En effet, la Cour de cassation estime qu'il n'appartient pas aux tribunaux de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles a celles qui ont été librement acceptées par les contractants. La Cour de cassation refuse donc que les juges du fond se fondent sur l'équité pour venir en aide aux parties imprévoyantes, et ce malgré le caractére exceptionnel des circonstances. La Cour de cassation fait ainsi prévaloir le principe de la force obligatoire du contrat de l'article 1134 (ancien) du Code civil qui disposait que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi a ceux qui les ont faites », et rejette donc l'idée de révision du contrat par le juge, méme en cas de changement profond des circonstances affectant l'équité du contrat. 3. Portée concréte de la décision La Cour de cassation, en refusant la révision pour imprévision quelque équitable que puisse paraitre un rééquilibrage, envoie un message clair a la fois au juge et aux parties. En effet, la Cour de cassation souligne le fait que la régle de l'article 1134 alinéa ler (ancien) du Code civil est une régle de discipline et que l'intangibilité des prévisions initiales s'impose non seulement aux parties, mais également au juge. Enfin, et surtout, la jurisprudence « Canal de Craponne » fait reposer le poids de la prévision contractuelle sur les parties elles-mémes. En effet, dans sa décision, la Cour de cassation n'a pas entendu interdire le principe de la révision pour imprévision des contrats de maniére générale ; elle a simplement entendu ne pas porter atteinte aux prévisions contractuelles des parties en empéchant le juge de réviser, lui-méme, pour imprévision un contrat. Ainsi, c'est aux parties, qui sont libres et si elles le veulent, qu'il revient de stipuler, dans leur contrat, des mécanismes permettant de le réviser comme des clauses d'indexation ou des clauses de sauvegarde (aussi appelées hardship) afin de prévenir le risque d'une érosion monetaire ou plus largement la survenue de circonstances économiques de nature a bouleverser l'équilibre contractuel initial. 4. Les critiques : Cet arrét pouvant paraitre trés inéquitable pour les propriétaires du canal, astreint 4 exposer des frais trés importants pour |'entretenir contre une redevance dérisoire, on comprend que de nombreux auteurs se sont élevés et s'élévent encore contre cette solution. En effet, ces derniers estiment notamment que cette solution ne prend pas suffisamment en compte la réalité économique du contrat, qu'elle est contraire a l'equité en ce qu'il n'est pas moralement juste de faire supporter a l'une des parties les conséquences de circonstances qu'elles n'ont jamais pu prévoir, et enfin, dans une certaine mesure, qu'elle est contraire a la volonté des parties puisque leur volonté aurait certamement été de tenir compte d'un changement de circonstances si elles avaient pu l'anticiper. B. Les conditions jurisprudentielles de l’imprévision et ses effets 1. Les conditions de Vimprévision La jurisprudence et a travers l’analyse de son évolution concernant la théorie d’imprévision exige certaines conditions pour l’application de la théorie de l’imprévision : e Premiére condition : Les événements affectant |’exécution du contrat doivent étre imprévisibles. Il peut s’agir des circonstances économiques, de phénomeénes naturels ou des mesures prises par les pouvoirs publics, mais dans tous les cas ils doivent déjouer les prévisions qui pouvaient raisonnablement étre faites lors de la conclusion du contrat”*. * Deuxiéme condition : les circonstances doivent étre extérieures aux parties : En particulier, si elles sont dues a l’administration contractante, c’est la théorie du fait du prince et non celle de l’imprévision qui jouera™. e Troisieme condition : Les événements affectant l’exécution du _ contrat doivententrainer un bouleversement de l’économie du contrat : Certes, ils ne doivent pas faire obstacle a l’exécution du contrat car ils seraient alors urésistibles et exonéreraient le cocontractant de ses obligations ; mais il ne doit pas s’agir d’un simple manque a gagner. 2. Effets de Vimprévision L’imprévision n’étant pas un cas de force majeure, le cocontractant doit poursuivre Vexécution du contrat, il commettrait une faute en interrompant ses prestations. En contrepartie, il a le droit d’étre indemnisé, sinon de la totalité, du moins de la plus grande partie de la charge extracontractuelle, c’est-a-dire du montant du déficit provoqué par Vexécution du contrat pendant la période au cours de laquelle il y a eu bouleversement par les circonstances impreévisibles. Deux cas de figure peuvent ensuite se produire : soit l’équilibre contractuel se rétablit, par disparition des circonstances imprévisibles ou du fait de nouveaux arrangements entre les patties soit le bouleversement de l’économie du contrat se révéle définitif, et ’imprévision se transforme alors en cas de force majeure justifiant la résiliation du contrat. * | 'arrét Huard du 3 novembre 1992, « La chambre commerciale considére que, en refusant de renégocier son contrat de distribution avec son distributeur alors que les circonstances économiques avaient changé de fagon imprévue, la société BP a manqué a son obligation de bonne foi durant |’exécution du contrat. » * Le fait du Prince, qui dans le langage courant désigne un acte arbitraire du gouvernement, désigne en droit administratif frangais, une mesure prise par l'administration qui a un impact sur un contrat auquel elle est partie. La théorie du fait du Prince prévoit que le cocontractant de |'administration a alors droit a une indemnisation intégrale des frais causés par cette mesure, si cette mesure a perturbé la réalisation des travaux prévus par le contrat. https://www.legavox.fr/blog/corentin-kerhuel/fait-prince-droit-prive-130,pdf Il est intéressant de constater que la théorie de l’imprévision a conduit l’administration et ses cocontractants 4 introduire dans leurs contrats des clauses de révision”® qui permettent une adaptation aux évolutions de la situation économique et financiére, conférant ainsi un caractére subsidiaire au jeu de l’imprévision. SECTION 2 : La consécration par le législateur francais de la théorie de l’imprévision : En réaction au vif débat suscité par la théorie de l’imprévision qui, depuis plus d’un siécle, a tant agité la doctrine, le législateur a profité de la réforme des obligations pour clarifier les choses et calmer les esprits. Ainsi, selon ’ordonnance du 10 février 2016 et particulierement |’article 11957’ dans le Code civil, les principes régissant désormais la théorie d’imprévision seront d’une part, la possibilité pour le juge de réviser le contrat au cours de son exécution en cas de changement des circonstances n’est pas sans conditions (1) et d’autre part, en raison de latteinte portée a la force obligatoire du contrat, le législateur a entendu encadrer strictement le processus de révision du contrat(2). A. Les conditions de la théorie de ’imprévision Les conditions d’application de la théorie de |’ imprévision sont désormais au nombre de trois e Premiére condition: Le changement de circonstances est imprévisible lors de la conclusion du contrat. Le législateur n’a donné aucune definition, ni critéres d’appréciation, aussi, appartiendra-t-il a la jurisprudence de se prononcer sur cette question. Dans cette attente, deux approches de la notion sont envisageables : * La clause hardship « Dans les contrats dont l'exécution s'étale sur un espace temporel de plusieurs années ou sur une période d'une durée indéterminée, cette clause insérée dans une convention, permet 4 l'une comme a l'autre des parties signataires d'exiger que s'ouvre une nouvelle négociation lorsque la survenance d'un événement de nature économique ou technologique, bouleverse gravement l'équilibre des prestations prévues au contrat. » https://www.dictionnaire-juridique. com/definition/clause-de-hardship php ” Trarticle 1195 du Code civil : « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat 4 son cocontractant. Elle continue a exécuter ses obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de 1a résolution du contrat, a la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder a son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, a la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, a la date et aux conditions qu’il fixe. » Selon une approche objective le changement de circonstances imprévisibles est celui qui n’aurait pas pu étre envisagé par une personne raisonnable placée dans la méme situation que les parties, Le juge se livrera ainsi a une appréciation in abstracto des circonstances qui ont porte atteinte a l’équilibre contractuel ; Selon une approche subjective cette fois, le changement de circonstances imprévisibles est celui que les parties n’avaient pas prévu, d’ot l’absence de clause dans le contrat anticipant cet aléa, l’imprévision sera alors appréciée dans cette hypothése in concreto, ce qui supposera pour le juge de ne se focaliser que sur la commune intention des parties. Au fond, d’un cété, si l’on retient approche objective, on ne devrait tenir compte que des circonstances que les parties n’ont pas pu prévoir. D’un autre cété, si l’on opte pour Vapproche subjective seules les circonstances que les parties n’ont pas prévues devraient étre prises en compte. Il ressort de cette comparaison que l’approche subjective conférerait 4 la théorie de Vimprévision un champ d’application bien plus étendu que ne le ferait l’approche objective. En contrepartie, il en résulterait néanmoins une atteinte plus forte a la force obligatoire du contrat. Alors quelle approche sera retenue in fine par la Cour de cassation ? Il n’est pas a exclure que le choix de cette derniére soit guidé par l’article 1218 du Code civil, lequel porte sur une notion qui n’est pas trés éloignée de celle que |’on cherche a définir : la force majeure’®. Ainsi le méme article semble lier la force majeure a la faculté de contrdle du débiteur, Rapportée 4 l’imprévision, cette définition pourrait laisser a penser que l’approche subjective l’emporterait. Ensuite l’exigence d’un événement raisonnablement imprévisible, ce qui serait tout autant de nature a justifier l’adoption de l’approche objective. Au total, difficile 4 dire sur quelle approche le choix de la Cour de cassation portera. © Deuxiéme condition ; Le changement de circonstances rend excessivement onéreuse l’exécution du contrat. Contrairement 4 la force majeure, il n’est pas nécessaire que le changement de circonstances rende impossible l’exécution du contrat, le Code civil, ainsi réformé, exige seulement que *8 Lrarticle 1218 du Code civil « lorsqu’un événement échappant au contrdle du débiteur, qui ne pouvait étre raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent étre évités par des mesures appropriées, empéche Lexécution de son obligation par le débiteur. »» celui-ci la rende excessivement onéreuse. C’est la la grande différence entre l’imprévision et la force majeure”’. Pour étre caractérisée, l’imprévision doit donc seulement porter atteinte 4 l’équilibre du contrat. Cette atteinte aussi préjudiciable soit-elle pour l’une des parties ne fait toutefois pas obstacle a l’exécution de ses obligations. Le Code civil précise, par ailleurs, que, en plus de l’établissement d’un bouleversement de l’économie du contrat, il faut démontrer que ce bouleversement est grave, sans quoi 1 n’ouvtira pas droit 4 révision. Aussi, les petits déséquilibres contractuels devront-ils étre entiérement assumeés par les parties au nom de la force obligatoire du contrat. * Troisiéme condition: « Aucune des patties ne doit pas avoir accepté d’assumer les risques de l’imprévision »Derniére condition d’application de la théorie de Vimprévision, les parties ne doivent pas avoir accepté d’assumer les risques de Vimprévision. En d’autres termes, dés lors que l’aléa a été envisagé par les contractants, il ne reléverait plus de l’imprévision, si, dans ces conditions, les parties souhaitent confiner 4 la portion congue le champ d’application de la théorie de l’imprévision, elles auront tout intérét a soigner la rédaction de la clause d’acceptation des risques. Il ne faudrait pas, toutefois, que cette clause soit trop large, sous peine d’encourir une requalification en clause abusive, dans cette perspective, il appartiendra au juge de toujours rechercher si le changement de circonstances invoqué par les parties n’était pas entré dans le champ contractuel. En s’abstenant de procéder a cette recherche, il s’exposerait 4 une censure de la Cour de cassation pour défaut de base légale. B. Le processus de révision du contrat Le processus de révision du contrat comporte plusieurs étapes partant de la formulation de la demande de révision, passant ensuite révision ou résolution amiable pour enfin déboucher a une résolution oui révision judicaire. 1. Premiére étape : la formulation d’une demande de révision du contrat * Voir l'article 1195 du Code civil susmentionné. © Objet de la demande La partie pour laquelle l’exécution de ses obligations est devenue excessivement onéreuse en raison d’un changement des circonstances est fondée a solliciter une renégociation du contrat aupres de son cocontractant. e Absence d’obligation de renégocier Tout autant que les parties sont libres de solliciter une révision de la convention, elles sont libres de refuser de renégocier. Ainsi, le législateur n’a-t-il pas entendu mettre 4 la charge des parties une obligation de renégociation du contrat contrairement 4 ce qui avait pu étre suggéré par certains auteurs. Cette solution s’ inscrit, par ailleurs, en opposition 4 une certaine jurisprudence qui, sur le fondement de la bonne foi contractuelle30 ou de l’exigence de cause, avait estime que les parties étaient tenues, a minima, de collaborer en cas de changement des circonstances économiques. ¢ Obligation de poursuivre l’exécution du contrat : Les rédacteurs de l’ordonnance du 10 février 2016 ont pris le soin de préciser que la demande de révision du contrat ne dispense pas son auteur de poursuivre l’exécution de ses obligations. S’il suspendait la fourniture de sa prestation, sa responsabilité contractuelle pourrait étre engagée. L’exécution du contrat devra en conséquence nécessairement se poursuivre jusqu’a ce que le juge se prononce. 2. Deuxiéme étape: résolution ou révision amiable :L’alinéa 2 de I’ article 1195*! du Code civil prévoit que, en cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties disposent de deux options soit elles peuvent convenir de la résolution du contrat, a la date et aux conditions qu’elles déterminent Cela suppose done qu’elles expriment un mutus dissensus, 4 défaut, la voie de la résolution amiable leur demeurera fermée, Soit, elles peuvent demander d’un commun accord au juge de procéder a l’adaptation du contrat aux nouvelles circonstances. dans cette hypothése, les parties peuvent saisir le juge aux fins de constater leur accord amiable. Immeédiatement, la question alors se pose de l’intérét pratique de cette saisine du juge, dans la mesure ot elle ne peut intervenir que si les parties se sont au préalable entendues. Or si tel est le cas, pourquoi saisir le juge pour réviser un contrat qu’elles pourraient d’un commun accord modifier elles-mémes ? * arrét Huard du 3 novembre 1992, voir supra. 3} «Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat 4 son cocontractant. Elle continue 4 exécuter ses obligations durant la renégociation. En cas de refs ou d’échec de la renégociation, Jes parties peuvent convenir de la résolution du contrat, 4 la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder 4 son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, a la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, a la date et aux conditions quiil fixe » 3. Troisieme étape : résolution ou révision judiciaire : C’est le veritable apport de l’article 1195 du Code civil, a défaut d’accord dans un délai taisonnable, le juge peut, a la demande d’une partie ainsi qu’a la date et aux conditions qu’il fixe soit réviser le contrat, soit y mettre fin, il ressort toutefois de l'économie de cette disposition que cette possibilité pour le juge de résilier ou de réviser judiciairement le contrat est envisagée comme une mesure ultime. C’est ala condition exclusive qu’aucun« accord dans un délai raisonnable» ne puisse étre trouvé entre les parties que le juge pourra leur imposer sa propre volonté. En pratique, il est toutefois fort peu probable que le juge soit saisi lorsque les parties auront trouvé un point d’accord. Le juge ne sera dés lors sollicité que lorsque la voie de la renégociation amiable sera sans issue. CHAPITRE II : la réceptivité de la théorie de ’imprévision en droit marocain, quelle perspective ? Si la révision des contrats pour imprévision, est expressément admise dans certains régimes Juridiques comme c’est le cas de I’Italie, la Gréce ou actuellement en France, soit par la jurisprudence tel que la Suisse, la Grande Bretagne ou |’Allemagne. La position du droit marocain ne l’admet pas, que d’une maniére générale, ainsi il n y a pas une possibilité de révision du contrat pour imprévision (Section 1). Cependant cette position de principe comporte des exceptions (section 2). SECTION 1 : le principe de l’impossibilité de révision du contrat pour imprévision La jurisprudence marocaine considére que le principe de la force obligatoire du contrat interdit la révision pour cause d’imprévision. Ainsi le juge ne peut pour cause d’imprévision, réviser le contrat valablement formé, quelles qu’en soient les conséquences pour le contractant dont les charges se trouvent alourdies. Dans ce sens, « La décision fondée sur le pouvoir discrétionnaire du tribunal, pour l’'amendement d’une clause sans le consentement d’une des parties est considérée sans aucun fondement juridique »*”. * Arrét de la cour supréme en date du 16-04-98 sous le numéro 304.

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