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Université Bordeaux II

Ecole Doctorale des Sciences de la Vie et de la Santé

Année 2012 N° 1990

THESE pour le
DOCTORAT DE L’UNIVERSITE BORDEAUX II

Mention : Sciences, Technologie, Santé


Option : Biologie Cellulaire et Physiopathologie

Présentée et soutenue publiquement le 21 Décembre 2012


Par Julie Dubois
Née le 25 Juin 1977, à Beauvais

Syndromes myélodysplasiques et leucémies aiguës de novo et


secondaires à un traitement anti-cancéreux : identification des
facteurs génétiques de susceptibilité individuelle

Membres du Jury

Mr. le Docteur Philippe Pourquier Président


Mme. le Professeur Patricia De Cremoux Rapporteur
Mr. le Professeur Jean Feuillard Rapporteur
Mr. le Professeur Jacques Robert Directeur de thèse
Mr. le Docteur Gabriel Etienne Invité
2
Université Bordeaux II

Ecole Doctorale des Sciences de la Vie et de la Santé

Année 2012 N° 1990

THESE pour le
DOCTORAT DE L’UNIVERSITE BORDEAUX II

Mention : Sciences, Technologie, Santé


Option : Biologie Cellulaire et Physiopathologie

Présentée et soutenue publiquement le 21 Décembre 2012


Par Julie Dubois
Née le 25 Juin 1977, à Beauvais

Syndromes myélodysplasiques et leucémies aiguës de novo et


secondaires à un traitement anti-cancéreux : identification des
facteurs génétiques de susceptibilité individuelle

Membres du Jury

Mr. le Docteur Philippe Pourquier Président


Mme. le Professeur Patricia De Cremoux Rapporteur
Mr. le Professeur Jean Feuillard Rapporteur
Mr. le Professeur Jacques Robert Directeur de thèse
Mr. le Docteur Gabriel Etienne Invité

3
Remerciements

Ce travail a été réalisé au sein du laboratoire Inserm U916 VINCO, Validation et

Identification de Nouvelles Cibles en Oncologie, à l’Institut Bergonié, Bordeaux, sous la

direction du Professeur Jacques ROBERT.

Je tiens à lui exprimer mes remerciements pour m’avoir accueillie dans son équipe de

recherche, en même temps qu’il m’accueillait dans le département de biologie médicale de

l’Institut. Je le remercie de son soutien, de sa confiance et de m’avoir enseignée un peu de son

savoir. Je lui exprime ma reconnaissance et mon profond respect.

Je remercie le Docteur Philippe POURQUIER de présider ce jury de thèse. Je le remercie de

ses conseils précieux, et de son soutien tout au long de ce parcours en recherche et lui exprime

ma sincère gratitude.

J’exprime au Professeur Patricia De CREMOUX toute ma reconnaissance pour avoir accepté

de juger ce travail de thèse en qualité de rapporteur.

Je remercie le Professeur Jean FEUILLARD d’avoir accepté de juger ce travail de thèse en

qualité de rapporteur.

Je remercie le Docteur Gabriel ETIENNE qui, sans hésiter, a soutenu ce projet qui n’aurait

pu voir le jour sans l’appui d’un clinicien et sans ses patients. Je le remercie de sa

disponibilité et de son aide.

Je remercie l’ensemble des membres et chercheurs de l’unité VINCO qui m’ont tous,

directement ou non, aidé dans ce parcours. Je remercie plus particulièrement pour leur aide

précieuse et leur amitié, Docteur Audrey Laroche, Docteur Lydia Lartigue et Docteur Charles

Dupin.

J’adresse de grands remerciements à tous mes collègues du Département de Biologie Médicale

de l’Institut pour les services qu’ils m’ont rendu et pour leur compréhension au cours de ces

années de thèse, au Docteur Françoise Durrieu, à Sylvie Huët, à l’ensemble des techniciens du

laboratoire et aux internes successifs, en particulier aux Docteurs Laurie Monnier et Olivia

Bossi.

Je remercie mes parents et amis qui m’ont permis, par leur soutien, de mener à bien ce travail.

4
Table des matières

Introduction 9

Première partie : Recherche de marqueurs de susceptibilité aux


syndromes myélodysplasiques 11

A. Identification de polymorphismes génétiques associés aux syndromes


myélodysplasiques 11

I. Les syndromes myélodysplasiques 11


I.1. Définition 11
I.2. Étiologies 11
I.3. Épidémiologie 12
I.3.1. Épidémiologie des SMD primaires 12
I.3.2. Épidémiologie des SMD/LA secondaires 13
I.4. Pathogénie des syndromes myélodysplasiques 14
I.4.1. Histoire naturelle 14
I.4.2. Anomalies chromosomiques et moléculaires 15
I.4.3. Régulation épigénétique 22
I.4.4. Microenvironnement et immunologie 23
I.5. Diagnostic 23
I.5.1. Clinique 23
I.5.2. Biologique 24
I.5.3. Classification diagnostique 29
I.6. Pronostic 31
I.7. Traitements 33
I.7.1. Traitements symptomatiques 34
I.7.2. Traitement des SMD de « haut risque » (IPSS intermédiaire 2 et élevé) chez les
patients non éligibles à l’allogreffe 35
I.7.3. Traitements des SMD de « bas risque » 36

5
II. Les polymorphismes génétiques : fonctions et associations dans les SMD 37
II.1. Les polymorphismes génétiques 37
II.2. Les single nucleotide polymorphisms (SNP) 38
II.3. SNP et syndromes myélodysplasiques 40

III. Objectifs de la première partie du travail 43

IV. Patients et méthodes 44


IV.1. Patients 44
IV.1.1. Sélection des patients 44
IV.1.2. Cancers primaires et traitements reçus 46
IV.1.3. Analyses cytogénétiques 47
IV.2. Identification des SNP à l’aide d’une puce de séquençage dédiée 47
IV.2.1. Échantillons 47
IV.2.2. Extraction de l’ADN 48
IV.2.3. Conception de la puce à façon SNP Chip 384 48
IV.2.4. Technologie de la puce BeadXpress® (Illumina) 49
IV.2.5. Interprétation des génotypes 52
IV.3. Analyse statistique des résultats de la SNP Chip 384 54
IV.4. Cohorte de validation 54
IV.4.1. Patients 54
IV.4.2. Génotypage des SNP par pyroséquençage 56
IV.4.3. Analyse statistique des génotypes de la cohorte de validation et vérification des
équilibres de Hardy-Weinberg 58

V. Résultats 59
V.1. Résultats des génotypages de la SNP Chip 384 sur la cohorte de 65 patients 59
V.2. Résultats des génotypages des SNP rs2308321 et rs2308327 sur la cohorte de
validation 61

B. Recherche de la valeur prédictive des polymorphismes identifiés pour le


risque de SMD/LA secondaire 62

I. Introduction 62

II. Objectif 64
6
III. Patientes, matériels et méthodes 65
III.1. Patientes 65
III.2. Matériels 66
III.3. Méthodes 66

IV. Résultats 66

V. Discussion de la première partie 67

Deuxième partie : analyse fonctionnelle des polymorphismes


identifiés 72

I. La MGMT : Méthyl Guanine Méthyl Transférase 72


I.1. Fonction 72
I.2. Expression 74
I.3. Structure 76
I.4. Dégradation de la MGMT 78
I.5. Polymorphismes génétiques de MGMT 78

II. Objectifs 80

III. Matériel et méthodes 81


III.1. Création des variants de MGMT par mutagenèse dirigée et sous-clonage des
plasmides 81
III.1.1. Matériels biologiques 81
III.1.2. Mutagenèse dirigée 83
III.1.3. Sous-clonages des plasmides mutés à destination du plasmide d’expression
lentiviral 85
III.1.4. Séquençage direct 87
III.2. Production des particules lentivirales 88
III.2.1. Principe 88
III.2.2. Protocole 89
III.3. Transduction lentivirale de la lignée cellulaire HEK293T 90
III.4. Méthode de quantification des protéines 91
III.4.1. Extraction et dosage des protéines 91

7
III.4.2. Western blot 91
III.5. PCR quantitative 92
III.6. Étude de la méthylation du promoteur de MGMT 93
III.7. Tests de cytotoxicité 94
III.7.1 Agents cytotoxiques testés 94
III.7.2. Tests d’inhibition de croissance au MTT par mesure de l’activité métabolique 95
III.7.3. Mesure de l’inhibition du pouvoir clonogène 95
III.8. Co-cultures des lignées WT et SNP1+2 et quantification d’allèles 96
III.9. Étude de la demi-vie de la protéine MGMT 97

IV. Résultats 97
IV.1. Analyses in silico 97
IV.1.1. Structure secondaire des ARNm 97
IV.1.2. Fréquence d’utilisation des codons 99
IV.1.3. Propriétés physico-chimiques des acides aminés substitués 99
IV.2. Génération des lignées isogéniques exprimant la MGMT sauvage ou variante 100
IV.2.1. Absence d’expression de la MGMT dans la lignée 293T 100
IV.2.2. Expression de la MGMT dans les lignées transduites 102
IV.3. Chimiosensibilité des lignées isogéniques 104
IV.3.1. Inhibition de croissance évaluée par tests au MTT 104
IV.3.2. Inhibition de l’efficacité de clonage 106
IV.4. Recherche d’un avantage prolifératif conféré par la variation étudiée 107
IV.5. Demi-vie des protéines MGMT commune et variante 109

V. Discussion 110

Conclusion générale 116

Références bibliographiques 118

8
Ce travail de thèse a été réalisé au sein de l’équipe de pharmacogénétique des agents anti-
cancéreux, sous la direction du Pr. Jacques Robert, dans l’unité INSERM U916 VINCO
(Validation et Identification de Nouvelles Cibles en Oncologie) dirigée par le Pr. Josy
Reiffers. Notre équipe étudie le rôle des polymorphismes génétiques dans la réponse aux
agents anti-cancéreux, dans des modèles cellulaires in vitro, et chez les patients, dans des
essais cliniques. Ces approches ouvrent la voie vers la possibilité de prédire la réponse à
différents traitements et ont pour objectif de parvenir à une thérapie anti-cancéreuse
personnalisée à chaque patient.

Nous nous sommes intéressés aux syndromes myélodysplasiques, qui sont un groupe
hétérogène de pathologies myéloïdes dont l’incidence est en augmentation en raison du
vieillissement de la population. Les formes secondaires de syndromes myélodysplasiques,
c’est-à-dire celles faisant suite à un traitement anti-cancéreux, ont un pronostic
particulièrement péjoratif et sont une préoccupation médicale importante dans le suivi à court
et à long terme des patients pris en charge par les oncologues et les radiothérapeutes pour un
cancer primitif. Ces formes de myélodysplasies liées au traitement sont en augmentation,
d’une part en raison de l’utilisation plus large des agents cytotoxiques, chimiothérapie et
radiothérapie, et d’autre part en raison de la survie prolongée des patients traités pour un
cancer primitif, laissant la possibilité du développement d’une leucémie secondaire.

L’identification de marqueurs génétiques individuels associés aux caractères cliniques de ces


syndromes constituerait un outil de prédiction précieux pour les oncologues, leur donnant les
possibilités d’adaptation des doses de chimiothérapie ou de changement d’une classe
thérapeutique par une autre, en fonction du risque de leucémie secondaire. Les
polymorphismes génétiques, constituants héréditaires de la variabilité entre les individus,
peuvent sélectionner certains patients à risque de développer une leucémie secondaire, tout
comme ils peuvent les sélectionner selon l’efficacité des chimiothérapies prescrites : dans les
deux cas, la variabilité des gènes impliqués dans le métabolisme, la détoxication, le transport
des xénobiotiques et la réparation des lésions de l’ADN est susceptible d’être impliquée. Un
outil de génotypage ciblant les polymorphismes d’intérêt impliqués dans ces voies a été
développé au sein de notre équipe ; nous avons utilisé cet outil pour rechercher des
associations entre les caractères cliniques des patients atteints de syndromes

9
myélodysplasiques et les génotypes de 384 polymorphismes de simple nucléotide (SNP,
Single Nucleotide Polymorphism).

Ce manuscrit de thèse expose notre étude en deux parties. La première partie est consacrée à
la recherche translationnelle effectuée depuis le recrutement prospectif des patients atteints de
cette pathologie, jusqu’au génotypage et à l’identification d’une association entre le caractère
secondaire des myélodysplasies et certains polymorphismes génétiques, complétée par une
étude épidémiologique pour rechercher la valeur prédictive de cette association. La deuxième
partie expose les études fonctionnelles réalisées in vitro sur l’impact biologique des
polymorphismes identifiés.

Enfin, ce travail a été effectué grâce à la collaboration des cliniciens hématologues,


particulièrement le Dr. Gabriel Etienne, pour le recrutement des patients ; et du Dr. Audrey
Laroche et de Mr. Sofiane Aitouferoukh pour l’interprétation et l’analyse statistique des
génotypes des patients. Une participation du Cancéropôle Grand Sud-Ouest a permis l’accès à
l’outil de génotypage. Enfin, une bourse interne de recherche clinique a été allouée à ce projet
de recherche par l’Institut Bergonié en 2010 et un soutien du GEFLUC Aquitaine a été obtenu
en 2011 et 2012.

10
A. Identification de polymorphismes génétiques associés aux
syndromes myélodysplasiques

I.1. Définition

Les syndromes myélodysplasiques (SMD) sont des hémopathies myéloïdes clonales


caractérisées par une insuffisance médullaire due à des anomalies de la maturation des
progéniteurs des trois lignées myéloïdes, responsable de cytopénies périphériques. Cette
pathologie chronique de l’hématopoïèse se caractérise par sa progression constante vers la
leucémie aiguë myéloïde, à la suite de l’apparition d’anomalies génétiques additionnelles.

I.2. Étiologies

Selon la définition de l’OMS, les SMD primaires ou de novo surviennent en dehors de tout
antécédent d’exposition à une chimiothérapie et/ou une radiothérapie pour un cancer antérieur
(1). De nombreux facteurs de risque interviennent dans la prédisposition aux SMD primaires,
parmi lesquels le tabagisme, l’exposition aux toxiques chimiques et aux solvants utilisés en
agriculture (fertilisants, herbicides, pesticides), l’exposition aux dérivés du benzène (industrie
pétrochimique, peintures) et des antécédents familiaux d’hémopathies (2, 3). Des hémopathies
congénitales telles que l’anémie de Fanconi, les syndromes de Diamond-Blackfan et
Shwachmann-Diamond, la dyskératose congénitale, sont associées à un risque augmenté de
SMD. Le risque de SMD et de leucémie aiguë (SMD/LA) à la suite de l’exposition aux
radiations ionisantes a été étudié chez les survivants de Nagasaki après l’explosion de la
bombe atomique, chez qui le taux de SMD croît de manière linéaire en réponse à la dose de
radiations ionisantes reçues, et ceci jusqu’à 40 à 60 ans après l’exposition (4).

11
Les SMD secondaires représentent 10 à 20 % des cas de SMD et surviennent à la suite d’une
chimiothérapie et/ou radiothérapie pour un cancer antérieur. Les agents cytotoxiques
impliqués sont représentés dans le Tableau I.

Tableau I. Agents thérapeutiques impliqués dans la survenue de SMD/LA secondaires.

Melphalan, cyclophosphamide, nitrosourés, chlorambucil, busulfan,


Agents alkylants carboplatine, cisplatine, dacarbazine, procarbazine, carmustine,
mitomycine C, thiotépa, lomustine, etc.
Radiothérapie en champs larges incluant la moelle osseuse (abdomen,
Radiations ionisantes
pelvis).
Agents inhibiteurs de Etoposide, doxorubicine, daunorubicine, mitoxantrone, amsacrine,
topoisomérase II dactinomycine.
Antimétabolites : fludarabine, thiopurines.
Autres agents
Poisons du fuseau et taxanes : vincristine, vinblastine, paclitaxel, docetaxel.

I.3. Épidémiologie

I.3.1. Épidémiologie des SMD primaires

Les SMD touchent principalement le sujet âgé avec un âge médian de 70 ans et une incidence
annuelle de 3 pour 100 000 habitants mais atteignant 20 pour 100 000 en incidence spécifique
à la tranche d’âge des plus de 70 ans (1, 5). Une étude épidémiologique, le projet
HAEMACARE (6), a répertorié les cas d’hémopathies de 2000 à 2002 à partir de 44 registres
européens de cancer. Le taux d’incidence standardisé à l’âge était de 24,5/100 000 pour les
hémopathies lymphoïdes et de 7,5/100 000 pour les hémopathies myéloïdes. Parmi les
hémopathies myéloïdes, les plus fréquentes étaient les leucémies aiguës, avec un taux
d’incidence standardisé (par référence à l’âge) de 2,96/100 000, les autres hémopathies
myéloprolifératives, de 1,76/100 000, puis les syndromes myélodysplasiques, de 1,24/100
000. Les taux d’incidence observés des SMD apparaissent plus faibles en Europe qu’aux
États-Unis, probablement en raison d’une sous-déclaration de ces pathologies dans les
registres de cancer, car elles ont été longtemps considérées comme non-malignes, jusqu’à
l’adoption de l’ICD-O-3, classification internationale des pathologies en oncologie (3e
édition), en 2000. Le groupe de travail sur la surveillance des cancers rares en Europe,
RARECARE, a publié récemment une étude des cas d’hémopathies myéloïdes enregistrés
entre 1995 et 2002 dans 64 registres européens de cancer (7). Ici encore, les plus fréquentes
sont les leucémies aiguës (taux d’incidence = 3,7) et autres hémopathies myéloprolifératives
(taux d’incidence = 3,1), puis venaient les SMD (taux d’incidence = 1,8), suivis des

12
pathologies histiocytaires et dendritiques (taux d’incidence = 1,1). Enfin, il existe une légère
prédominance masculine des SMD.

I.3.2. Épidémiologie des SMD/LA secondaires

L’incidence des SMD/LA secondaires augmente en raison de l’augmentation de l’utilisation


des chimiothérapies cytotoxiques et de la survie prolongée des patients traités. Chez l’adulte,
le risque de SMD/LA secondaire est le plus important à la suite des lymphomes hodgkiniens
et non-hodgkiniens et des cancers du sein. Chez l’enfant, les leucémies aiguës
lymphoblastiques et les tumeurs du système nerveux central sont les plus à risque (8).

Chez les patients traités pour un lymphome de Hodgkin, le risque de SMD/LA secondaire est
10 à 80 fois supérieur à celui de la population générale avec une incidence cumulée à 10 ans
comprise entre 1 % et 10 %. Brusamolino et al. (9) ont analysé une série de 1659 patients
traités pour lymphome de Hodgkin sur un suivi de 10 ans. Le risque leucémogène le plus
important concerne les patients traités par le protocole MOPP (méchloréthamine, vincristine,
procarbazine, prednisone) avec un risque cumulé à 10 ans de 2,2 %, plus important encore si
la radiothérapie a été associée (10,2 %). Le risque est quasi nul lorsque la méchloréthamine
est enlevée des protocoles et aucun cas de SMD/LA secondaire n’avait été observé parmi les
153 patients de cette étude traités par ABVD (adriamycine [doxorubicine], bléomycine,
vinblastine, dacarbazine), seul ou avec radiothérapie, protocole le plus largement utilisé
aujourd’hui.

Les patients atteints de lymphome non-hodgkinien sont à risque de SMD secondaire avec une
incidence cumulée globale de 10 %, chez les patients traités soit par chimiothérapie
conventionnelle, soit par chimiothérapie intensive suivie de greffe autologue de cellules
souches, dans les 10 ans suivant le traitement initial (10). D’une manière intéressante,
l’incidence des SMD/LA secondaires, considérés comme liés au traitement antérieur du
lymphome, est plus élevée après greffe autologue de cellules souches. La procédure elle-
même de la greffe pourrait être en cause avec les conditionnements par irradiation corporelle
totale et la prolifération cellulaire augmentée lors du recueil des cellules souches et pendant la
phase de greffe (11).

Chez l’enfant, les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) traitées et en rémission


présentent un risque majeur de cancers secondaires parmi lesquels les SMD/LA et les tumeurs
cérébrales. Le risque de SMD/LA secondaire est d’autant plus important que les doses
cumulées et la durée de la chimiothérapie par épipodophyllotoxines augmentent. Un facteur
de risque supplémentaire est l’utilisation de facteur de croissance granulocytaire G-CSF et

13
l’irradiation cérébrale. Pui et al. (12) ont suivi 827 patients traités et en première rémission de
LAL ; le risque de second cancer cumulé à dix ans était de 5,1% et le délai médian
d’apparition de ces cancers secondaires après la fin de traitement de la LAL était de 4,8 ans.

Il existe un risque augmenté de SMD/LA secondaire chez les patientes traitées par radio-
chimiothérapie pour un cancer du sein. Praga et al. (13) ont revu 19 essais randomisés de
patientes traitées par épirubicine et cyclophosphamide pour cancer du sein. Le risque cumulé
à 8 ans était de 0,55 %, mais avec une grande variabilité entre les patientes ayant reçu des
doses cumulées standard (0,37 %) ou élevées (4,97 %) d’épirubicine. Dans une large étude
cas-contrôles française (14), le risque de SMD/LA secondaire chez les femmes traitées pour
cancer du sein était supérieur chez celles ayant reçu une chimiothérapie à base de
mitoxantrone par rapport à celle à base d’anthracyclines, avec un risque relatif de 15,6 et 2,7
respectivement. Après ajustement des variables liées au type de traitement par analyse
multivariée, ce risque était encore augmenté en cas d’utilisation de facteur de croissance
granulocytaire G-CSF et chez les patientes ayant reçu en outre de la radiothérapie.

I.4. Pathogénie des syndromes myélodysplasiques

I.4.1. Histoire naturelle

Les syndromes myélodysplasiques sont un groupe hétérogène d’hémopathies clonales


affectant la cellule souche et les progéniteurs hématopoïétiques des lignées érythrocytaires,
mégacaryocytaire et granulocytaire. La preuve de la monoclonalité a été apportée par l’étude
de l’inactivation du chromosome X, non aléatoire dans les cellules médullaires des patientes
atteintes de SMD par analyse des fragments de restriction par RFLP des gènes liés à l’X,
l’hypoxanthine phosphoribosyl transférase (HPRT) et la phosphoglycérate kinase (PGK) (15).
Un modèle de leucémogenèse en plusieurs étapes s’applique bien aux SMD. La cellule souche
hématopoïétique normale acquiert successivement des anomalies génétiques aboutissant à la
transformation maligne et à l’expansion clonale. La mutation initiale de la cellule souche,
causée par des toxiques chimiques, des radiations ionisantes ou par mutation endogène
aléatoire, conduit à des anomalies de la différenciation des progéniteurs myéloïdes associées à
une augmentation de l’apoptose, ce qui se traduit par une insuffisance médullaire responsable
des cytopénies périphériques. Ce premier clone myélodysplasique peut ensuite acquérir
d’autres anomalies génétiques touchant le contrôle du cycle cellulaire ou des facteurs de
transcription affectant la prolifération des cellules myéloïdes et conduisant à l’expansion
clonale du contingent cellulaire anormal par avantage prolifératif. Enfin, l’instabilité
génétique du clone favorise l’apparition d’anomalies génétiques additionnelles précipitant

14
l’évolution vers la leucémie aiguë, avec un blocage de la différenciation cellulaire à un stade
précoce de maturation et cette fois une résistance à l’apoptose (16, 17).

Alors que des anomalies caryotypiques sont connues et associées aux SMD depuis des
décennies, des anomalies moléculaires de gènes intéressant de nombreuses voies cellulaires,
non visibles à l’examen cytogénétique classique, ont été récemment décrites, ainsi que des
anomalies de la régulation épigénétique de l’expression de certains gènes, ou encore un rôle
du micro-environnement médullaire ou du contexte immunitaire de l’hôte. Ce large spectre
d’anomalies génétiques et épigénétiques pourrait expliquer l’hétérogénéité du phénotype
clinique des SMD.

I.4.2. Anomalies chromosomiques et moléculaires

Des anomalies chromosomiques clonales sont observées dans la moelle osseuse de 30 à 50 %


des patients atteints de SMD primaires et chez 80 % des patients atteints de SMD secondaires.
Les anomalies prédominantes sont des délétions chromosomiques non aléatoires qui
suggérent un mécanisme pathogénique basé sur la perte de gènes suppresseurs de tumeurs ou
une haplo-insuffisance de gènes nécessaires à l’hématopoïèse normale. Il est à ce jour
incertain si la dysmyélopoïèse résulte de cette haplo-insuffisance associée à la délétion d’un
allèle, ou d’une inactivation homozygote par des mutations ponctuelles additionnelles ou des
microdélétions de l’allèle sauvage restant. Les anomalies cytogénétiques les plus fréquentes
des SMD incluent la perte totale ou partielle du chromosome 7 (monosomie 7, del(7q)), du
chromosome 5 (monosomie 5, del(5q)), les délétions del(20q) et del(11q), la trisomie 8 et la
perte du Y.

La cytogénétique et la biologie moléculaire des SMD/LA secondaires et des SMD de novo


sont impossibles à distinguer, il est donc légitime d’extrapoler le modèle de leucémogenèse
des SMD secondaires aux SMD primaires ; les voies génétiques altérées dans la
transformation leucémique étant mieux étudiées dans les leucémies induites par les
chimiothérapies génotoxiques (18). La biologie moléculaire des SMD secondaires diffère
selon leur étiologie et semble suivre des voies d’activation génétique spécifiques avec des
anomalies chromosomiques distinctes. Il est ainsi décrit plusieurs sous-types génétiques de
SMD, les deux principaux étant le sous-type lié aux agents alkylants et le sous-type lié aux
agents inhibiteurs de topoisomérase II (Tableau II).

15
a) Le sous-type « alkylant »

Le sous-type alkylant des SMD se présente avec des délétions ou pertes des chromosomes 5 et
7 et se déclarent en phase chronique précoce de SMD après une période de latence de 5 à 10
ans après le traitement alkylant. Les agents alkylants sont connus pour induire des ponts inter-
brins bloquant la transcription ou la réplication, des adduits sur les bases de l’ADN entrainant
des mutations et des lésions chromosomiques variées.

Parmi les patients avec anomalies du 7 et chromosome 5 normal, on observe souvent des
mutations du facteur de transcription AML1 (RUNX1) et des mutations associées des gènes
RAS (KRAS et NRAS). Une méthylation du promoteur de P15 (INK4B) est associé à la
progression de la maladie avec un excès de blastes et transformation en LAM. (19)

Les patients avec délétion partielle ou totale du 5, avec ou sans anomalie du 7, ont
classiquement un caryotype complexe (plus de trois anomalies cytogénétiques) et leur
pronostic est extrêmement sévère. Chez ces patients, on observe une association significative
de la délétion du 5 avec des mutations de TP53, et avec une perte d’hétérozygotie du gène
TP53 par une délétion 17p (20, 21). Cette perte de p53 est responsable d’une instabilité
génétique conduisant aux caryotypes complexes avec des réarrangements chromosomiques
importants, des amplifications ou duplications des bandes 11q23 et 21q22 concernant les
gènes MLL et AML1 respectivement (22). Chez ces patients atteints de SMD secondaires aux
agents alkylants, les mutations de TP53 et la perte d’hétérozygotie du gène muté sont associés
une survie globale significativement plus courte qu’en cas de TP53 non mutés.

Parmi les SMD/LA de novo, des délétions similaires des bras longs des chromosomes 5 et 7
peuvent être observées, bien que moins fréquentes que dans les SMD secondaires. Ces
leucémies primaires avec anomalies du 5 et du 7 montrent une évolution et un pronostic
similaires à ceux des SMD/LA secondaires et ont été associées à une exposition préalable aux
toxiques chimiques, solvants organiques et pesticides.

b) Le sous-type « inhibiteurs de topoisomérase II »

Les anthracyclines, épipodophyllotoxines et la mitoxantrone ont été impliqués dans la


leucémogenèse. Les leucémies compliquant les traitements par ces agents cytotoxiques se
présentent en phase de leucémie aiguë après une période de latence courte, 1 à 5 ans. Les
anomalies cytogénétiques retrouvées sont des translocations réciproques équilibrées
impliquant les bandes 11q23 (MLL), 21q22 (AML1 ou RUNX1), plus rarement l’inversion du
16 (inv(16)) ou la translocation t(15;17).

16
Les transcrits de fusion chimériques issus du réarrangement du gène MLL avec des partenaires
variés sont les plus fréquents et entraînent des LAM de type myélo-monocytaire, LAM 4 ou
LAM 5 de l’ancienne classification cytologique FAB (23). Des mutations coopératrices de
cette leucémogenèse sont retrouvées sur la voie de la protéine RAS avec des mutations
activatrices de RAS et de BRAF (24). Les mutations de RAS étaient également décrites dans
les LAM de novo avec réarrangement du gène MLL.

D’autres translocations récurrentes impliquent les bandes 21q22 ou 16q22 et conduisent à des
réarrangements chimériques entre les gènes du Core Binding Factor (AML1 ou RUNX1 et
CBF) et des partenaires multiples. Ces anomalies font suite le plus souvent au traitement par
anthracyclines. Comme dans les LAM de novo, les réarrangements des gènes du CBF
coopèrent avec des mutations de FLT3 et de KIT. Ces mutations ponctuelles de FLT3 ou la
duplication en tandem ITD-FLT3 sont également retrouvés associées aux cas de LA
secondaires avec réarrangements PML-RARA de la translocation t(15 ;17).

Les inhibiteurs de topoisomérase II inhibent la religation de la cassure double-brin de l’ADN


induite par la topoisomérase II. Ce mécanisme d’action augmente le risque de recombinaisons
chromosomiques illégitimes. Il a été montré que l’étoposide et la doxorubicine ont des sites
spécifiques de clivage dans les gènes MLL et AML1 (25). Ces SMD/LA secondaires avec
translocations équilibrées et gènes de fusion résultent donc d’un effet direct des inhibiteurs de
topoisomérase II.

c) Coopération entre les mutations de classe I et de classe II

Il existe une coopération dans la leucémogenèse entre des mutations des gènes de classe I qui
activent constitutionnellement les voies de signalisation des MAP kinases comme FLT3, KIT,
FMS, RAS et BRAF, et des mutations de classe II inactivant des facteurs de transcription
hématopoïétiques tels AML1, CBFB, MLL et RARA. Les mutations de classe I des voies des
récepteurs à activité tyrosine kinase et des molécules de transduction du signal en aval
semblent être mutuellement exclusives. Elles s’associent de manière significative aux
mutations de classe II, tels que RAS muté associé à AML1 réarrangé ou RAS muté avec les
réarrangements du gène MLL. (20) Cette coopération entraine une augmentation de la
prolifération et un blocage de la différenciation caractéristiques des phases de transformation
en LAM.

17
Tableau II. Principales voies génétiques impliquées dans la pathogénie des SMD/LA.
Adapté de Pedersen-Bjergaard, Leukemia, 2006 (20)

d) Le syndrome 5q-

Des cas de SMD primaires avec délétion interstitielle du bras long du chromosome 5 comme
anomalie cytogénétique unique, associée à une anémie réfractaire sans excès de blastes,
représentent une entité clinico-biologique spécifique : le syndrome 5q-. Ces patients ont un
taux de plaquettes normal, voire augmenté, et un pronostic très favorable avec un risque très
faible de progression vers la LA. À la différence des anomalies du 5 associées à d’autres
anomalies, souvent des caryotypes complexes, où la région commune délétée est en 5q31, la

18
région délétée dans le syndrome 5q- est plus distale, en 5q33.1. Son étude a permis
l’identification d’un gène impliqué directement dans la genèse de ce syndrome. Ebert et al.
(26) ont identifié par stratégie d’ARN interférence le gène RPS14 dont l’haplo-insuffisance
est directement responsable du phénotype de la maladie. La perte de fonction de la sous-unité
ribosomale RPS14 dans des progéniteurs hématopoïétiques normaux reproduit la maladie et la
réexpression de cette protéine restaure le phénotype normal. D’autres protéines ribosomales
non fonctionnelles sont retrouvées dans l’anémie de Blackfan-Diamond, une hémopathie
congénitale qui se caractérise également par une altération de la différenciation érythrocytaire
et une anémie macrocytaire réfractaire. Une étude récente a montré que la délétion de deux
micro-ARN situés en 5q33, miR-145 et miR-146, coopère avec la délétion 5q33.1 du gène
RPS14, en donnant un avantage sélectif au clone 5q- (27).

e) Autres anomalies chromosomiques

La perte du chromosome Y et la délétion 20q, isolées, offrent un pronostic favorable de risque


identique à celui des caryotypes normaux chez les patients atteints de SMD. La perte du Y
n’apparaît pas avoir de rôle pathogénique, son incidence augmente avec l’âge chez les
hommes en dehors de toute pathologie myéloïde. La del(20q) est une anomalie commune des
syndromes myéloprolifératifs et des LAM. Ces deux anomalies peuvent être utiles pour
confirmer la présence d’une hématopoïèse clonale mais ils ne sont pas suffisants pour affirmer
un diagnostic de SMD (28).

Des translocations et inversions impliquant la bande 3q26 sont identifiées dans les SMD. Ces
anomalies activent l’expression du gène EVI1 qui à son tour dérégule l’activité de plusieurs
facteurs de transcription, tels MDS1-EVI1, GATA1, PU.1 et RUNX1, responsables d’un
défaut de l’hématopoïèse. L’hyperexpression de EVI1 est associée à un mauvais pronostic.
(29)

f) Autres anomalies moléculaires

Hormis les anomalies moléculaires précédemment décrites comme souvent associées à des
sous-types cytogénétiques particuliers (TP53, RAS, BRAF, FLT3, KIT), un large panel
d’anomalies moléculaires a été récemment décrit dans les SMD/LA et indique que de
multiples mécanismes moléculaires sont impliqués dans la pathogénie de ces leucémies. Elles
se rencontrent dans les gènes qui interviennent dans la régulation épigénétique de la
transcription, tels que TET2, ASXL1, DNMT3A, IDH1/2. De plus, une régulation épigénétique
aberrante pourrait entraîner la répression de gènes au rôle important dans l’arrêt du cycle

19
cellulaire et la différenciation, contribuant à la transformation maligne des cellules souches
hématopoïétiques normales.

– TET2 (Ten Eleven Translocation 2)

TET2 est le gène le plus fréquemment muté dans les SMD, chez près de 20 % des patients, et
sa mutation est également retrouvée dans les syndromes myéloprolifératifs (10 %), la
Leucémie MyéloMonocytaire Chronique (LMMC) (30 % à 50 %) et les LAM post-SMP et
post-SMD (25 %) (30). TET2, comme son homologue TET1, code une dioxygénase qui avec
l’-cétoglutarate permet la conversion des 5-méthyl-cytosine en 5-hydroxyméthyl-cytosine,
altérant ainsi l’empreinte épigénétique créée par les ADN méthyltransférases. Les mutations
de TET2 ne semblent pas entraîner de dysplasie, puisqu’on les retrouve dans les SMP, ni
d’accélération proliférative des SMD/LA puisqu’on les trouve également dans les SMD de
bas risque. TET2 muté pourrait faire acquérir une étape pathogénique commune aux
pathologies myéloïdes, comme l’augmentation de la dominance du clone pathologique. Les
mutations de TET2 sont de mauvais pronostic dans la LMMC et les LAM, leur rôle
pronostique est encore controversé dans les SMD.

– ASXL1 (Additional Sex-Comb Like1)

Des mutations d’ASXL1 ont été décrites dans 10 % des SMD et SMP, 17 % des LAM et plus
de 40 % des LMMC qui sont classées comme syndromes frontières entre SMD et SMP. La
fonction de la protéine codée par ASXL1 est peu connue mais c’est une protéine nucléaire
impliquée dans les modifications de la structure chromatinienne. La fréquence de ces
mutations dans les stades tardifs de SMD/LA font suggérer un rôle dans la progression de la
maladie (31).

– IDH1 et IDH2 (Isocitrate déshydrogénases 1 et 2)

Les mutations d’IDH1 et IDH2 ont d’abord été décrites dans les gliomes. IDH1 et IDH2 sont
des enzymes NADP+ dépendantes qui convertissent l’isocitrate en -cétoglutarate et se
localisent respectivement dans le cytoplasme et dans l’appareil mitochondrial. Les mutations
conduiraient à un gain de fonction de la protéine avec une augmentation du taux de 2-
hydroxyglutarate produit par les cellules. Les mutations d’IDH1 et IDH2 sont retrouvées dans
les cas de SMD (5 %), de syndromes frontières SMP/SMD (9 %) et de LAM post-SMP et
post-SMD (10 %) (32). Ces mutations semblent s’associer aux caryotypes normaux des LAM
de novo, NPM1 muté et sans duplication interne de FLT3 conférant un pronostic défavorable
dans ces cas (33). Les mutations d’IDH1 et IDH2 n’ont pas de valeur pronostique claire dans

20
les SMD et SMD/SMP mais leur présence dans les phases précoces de SMD, de SMP/SMD
chroniques et dans leur phase accélérée suggère un rôle dans le phénotype dysplasique.

– JAK2 (Janus kinase 2)

La mutation V617F du gène JAK2, faisant désormais partie des critères diagnostiques de la
maladie de Vaquez, de la myélofibrose primitive et de la thrombocythémie essentielle, a été
décrite dans les SMD. On la retrouve dans 5 % des cas « tout venant » de SMD où elle n’a pas
de valeur pronostique. Une forme particulière de SMD, l’anémie réfractaire avec
sidéroblastes en couronne (ARS, Anémie Réfractaire Sidéroblastique) et thrombocytose
(ARS-T), montre une association très fréquente avec cette mutation retrouvée dans 60 % des
cas d’ARS-T. La mutation activatrice de cette protéine à activité tyrosine kinase dans le
groupe des ARS avec thrombocytose, et son acquisition lors du passage des formes ARS à
ARS-T, font suggérer que cette forme clinique est en fait un syndrome frontière entre SMD et
SMP. (34)

– Anomalies du spliceosome

Récemment, les techniques de séquençage de nouvelle génération ont permis d’identifier des
mutations de facteurs d’épissage ayant un rôle important dans le système du spliceosome. Les
mécanismes de régulation de l’épissage sont une machinerie complexe faisant intervenir des
petites ribonucléoprotéines. Ils prennent en charge la maturation des pré-ARNm en ARNm et
contrôlent la diversité des variants d’épissage. Une mutation de la sous-unité de facteur
d’épissage SF3B1 a d’abord été décrite dans les SMD. SF3B1 muté est retrouvé dans 68 à 81
% des ARS et ARS-T et dans 7 % des cas de SMD et SMP/SMD sans sidéroblastose. Un rôle
de ce facteur d’épissage et de la régulation post-transcriptionnelle en général est évoqué dans
la pathogenèse de cette forme clinique avec anomalie de la répartition cellulaire du fer dans
les érythroblastes (35). La valeur clinique de cette mutation en termes de pronostic, de survie
et de taux de transformation en LAM, montre à ce jour encore des résultats discordants entre
un effet favorable de SF3B1 muté ou l’absence d’effet, probablement en raison de
l’hétérogénéité des cohortes cliniques étudiées. D’autres mutations de facteurs d’épissage
impliquent une régulation post-transcriptionnelle anormale comme mécanisme potentiel dans
la pathogénie des SMD. Ainsi U2AF1 présente une mutation faux-sens dans 8,7 % des cas de
SMD primaires et est associé à un risque augmenté de progression de la maladie vers la LAM
(36). Récemment une étude française a montré, à partir de 220 patients atteints de SMD, que
près de la moitié des patients présentaient des mutations de quatre gènes de la régulation de
l’épissage : SF3B1, SRSF2, ZRSR2, U2AF35 (37). Ces mutations apparaissent mutuellement

21
exclusives et chacune s’associe à d’autres gènes altérés dans les voies de régulation
épigénétique de la transcription. Ainsi, la moitié des patients avec DNMT3A mutés présentait
une mutation de SF3B1, les patients avec TET2 muté présentaient plus fréquemment les
mutations de SRSF2 et ZRSR2 et ceux avec ASXL1 muté s’associaient plus fréquemment à
l’altération de U2AF35. Ainsi, un lien entre ces deux voies moléculaires impliquées dans la
pathogénie des SMD est souligné. Enfin, leurs résultats montrent une association de ces
différentes mutations avec des phénotypes cliniques distincts de SMD au sein de cette
pathologie très hétérogène.

I.4.3. Régulation épigénétique

Des mécanismes de régulation épigénétique comme la méthylation des îlots CpG des
promoteurs des gènes ou des modifications de la structure des histones, régulent l’expression
des gènes. Les SMD présentent fréquemment des anomalies de la régulation épigénétique
avec des hyperméthylations de promoteurs de gènes impliqués dans la prolifération, comme
les régulateurs du cycle cellulaire CDKN2A, CDKN2B, l’adhésion cellulaire avec la E-
cadhérine (CDH1) et CTNNA1. (38) Ces anomalies épigénétiques fréquentes offrent des
possibilités thérapeutiques avec l’utilisation des agents déméthylants qui ont permis des
stabilisations prolongées des SMD (Voir chapitre I.7.2).

L’hyperméthylation du promoteur de CDKN2B (ou INK4B ou p15) a été très étudiée. C’est un
inhibiteur de CDK4 et CDK6 régulant ainsi l’entrée des cellules en phase G1. Son promoteur
est hyperméthylé dans 30 à 80 % des cas de SMD tous stades confondus, mais cette extinction
génique est associée à la progression de la maladie vers la LAM, au pourcentage de blastes
médullaires, aux délétions du 5 et du 7, au groupe des SMD/LA secondaires et à un pronostic
défavorable (39, 40). Le rôle fonctionnel de l’inactivation de CDKN2B a été établi dans un
modèle murin déficient où la formation des progéniteurs myéloïdes est augmentée
comparativement aux souris sauvages (41).

Une hyperméthylation globale du génome est associée à un pronostic défavorable des SMD
avec une progression plus rapide vers la LAM. Issa et al. (42) ont établi une signature de
méthylation prédictive de la survie globale et de la survie sans progression des SMD. Pour
cela, ils ont testé la méthylation d’îlots CpG des promoteurs d’un panel de 10 gènes (CDH1,
CDH13, ESR1, NOR1, NPM2, OLIG2, P15, PGRA, PGRB, RIL) et établi sa valeur
pronostique : la survie sans progression était de 6,4 mois chez les patients avec une
méthylation forte contre 14,9 mois chez ceux avec une méthylation faible (p = 0,01) sur 317
patients.

22
I.4.4. Microenvironnement et immunologie

De nombreuses cytokines inflammatoires sont augmentées dans les prélèvements médullaires


des patients atteints de SMD. Cette activation immunitaire réactionnelle au clone
hématopoïétique pathologique entraine des anomalies qui soutiennent la progression du clone.
Ainsi, il a été montré que les fibroblastes et macrophages médullaires des SMD présentent un
index apoptotique augmenté et produisent plus d’IL6 et de TNF que dans une moelle
normale. Il a été proposé que, dans les phases précoces de SMD, les cellules stromales et
hématopoïétiques clonales produisent des taux élevés de cytokines pro-apoptotiques, puis
qu’une résistance des cellules dysplasiques aux signaux du TNF se met en place avec le
temps, aboutissant à une résistance à l’apoptose avec prolifération augmentée et progression
du SMD vers la phase de LAM. Un rôle du VEGF et des métalloprotéinases MMP a été
suggéré, dans lequel leur production inappropriée, par les monocytes dérivés du clone
leucémique notamment, augmente l’auto-renouvellement des progéniteurs hématopoïétiques
et permettent l’expansion de ces cellules hors des niches hématopoïétiques. (43)

I.5. Diagnostic

Le phénotype clinique des patients atteints de SMD est hétérogène de par le nombre et la
profondeur des cytopénies, la cellularité et le taux de blastes médullaires.

I.5.1. Clinique

Dans la grande majorité des cas un SMD est découvert à l’occasion d’un hémogramme
systématique, parfois indiqué devant des symptômes non spécifiques liés à l’anémie : asthénie
et altération de l’état général.

L’interrogatoire et l’examen clinique évaluent le retentissement des cytopénies :

– Retentissement clinique de l’anémie par rapport au taux d’hémoglobine du patient, en


tenant compte de son âge et des comorbidités fréquentes à cet âge (atteinte vasculaire,
insuffisance cardiaque, insuffisance respiratoire).
– Antécédents infectieux et leur gravité en rapport avec la neutropénie.
– Antécédents et signes hémorragiques en rapport avec la thrombopénie.

On recherche également l’ancienneté des cytopénies pour apprécier l’évolutivité du SMD, des
agents étiologiques (radiothérapie, chimiothérapie, immunosuppresseurs, exposition
professionnelle au benzène et dérivés, cette dernière pouvant faire l’objet d’une déclaration
comme maladie professionnelle indemnisable). Enfin, on peut retrouver des signes de

23
pathologie dysimmunitaire associés, fréquents dans les SMD (arthropathie, polychondrite,
vascularite, etc.).

I.5.2. Biologique

Le diagnostic de SMD est avant tout cytologique et repose sur l’examen attentif des frottis de
sang et de moelle.

a) Cytopénies

Sur une numération sanguine avec taux de réticulocytes et formule sanguine avec frottis, on
établit :

– Une anémie, anomalie la plus fréquente (90 % des cas). Elle est typiquement
normochrome, normo- ou macrocytaire, arégénérative. Le seuil critique retenu en faveur
d’un SMD est une hémoglobinémie inférieure à 10 g/dL. On peut observer sur le frottis
des anomalies qualitatives des hématies : anisocytose, poïkilocytose, ponctuations
basophiles, érythroblastes circulants.

– Une neutropénie, qui est isolée ou associée à l’anémie dans 20 à 30 % des cas. Le seuil
critique retenu en faveur d’un SMD est inférieur à 1,8×109/L polynucléaires neutrophiles.
Ces derniers présentent souvent des anomalies morphologiques témoignant de la
dysgranulopoïèse : dégranulation, hyposegmentation nucléaire (aspect de type Pseudo-
Pelger), ou hypersegmentation.

– Une thrombopénie est observée dans 30 % des cas, souvent modérée (supérieur à
50×109/L plaquettes), isolée ou associée aux autres anomalies. Le seuil critique retenu en
faveur d’un SMD est inférieur à 100×109/L plaquettes. On recherche sur le frottis des
anomalies morphologiques : plaquettes géantes, microplaquettes, granulations anormales
ou absentes, présence de micromégacaryocytes, témoins de la dysmégacaryopoïèse.

b) Cytologie médullaire

Le myélogramme, après aspiration du suc médullaire par ponction sternale ou iliaque, est
l’élément essentiel du diagnostic. La biopsie ostéo-médullaire n’est pas indiquée devant une
suspicion de SMD sauf en cas d’hypocellularité du myélogramme rendant le diagnostic
différentiel difficile entre une aplasie médullaire ou une myélofibrose et un véritable SMD à
moelle pauvre.

24
Au myélogramme, trois constatations cytologiques sont essentielles au diagnostic de SMD :

– Une moelle de cellularité augmentée

Cette richesse médullaire contraste avec les cytopénies périphériques et est le témoin d’une
hématopoïèse inefficace (Photo 1).

– Des anomalies qualitatives touchant une ou plusieurs lignées


– La dysérythropoïèse est la dysplasie la plus fréquente mais est peu spécifique. On observe
des anomalies nucléaires : caryorrhexis (fragmentation nucléaire), corps de Jolly ; des
anomalies cytoplasmiques : aspect feuilleté du cytoplasme (anisochromie),
asynchronisme de maturation nucléo-cytoplasmique, ponctuations basophiles,
sidéroblastes en couronne mis en évidence par la coloration de Perls (Photo 2).
– La dysgranulopoïèse avec des anomalies nucléaires : hyposegmentation des
polynucléaires neutrophiles (PNN) de type Pseudo-Pelger ou PNN hypersegmentés ; et
des anomalies cytoplasmiques : hypogranulation de fin de lignée ou de la lignée dans son
ensemble, asynchronisme de maturation nucléo-cytoplasmique avec persistance de la
basophilie du cytoplasme des formes matures, corps de Döhle, présence de vacuoles
cytoplasmiques et parfois présence de corps d’Auer (Photo 3).
– La dysmégacaryopoïèse est souvent la plus informative pour un diagnostic de SMD. On
recherchera des micro-mégacaryocytes au noyau petit et non lobé avec chromatine
condensée, au cytoplasme réduit peu plaquettogène ; des mégacaryocytes à noyaux
multiples et séparés ; des mégacaryocytes de type 5q-, petits, au noyau arrondi non lobé
et excentré (Photo 4).

Ces signes de dysmyélopoïèse doivent être présents dans au moins 10 % des cellules d’une
lignée pour avoir une significativité.

– Un pourcentage de blastes médullaires variable

Elément fondamental dans la classification des SMD, le pourcentage de blastes médullaires,


déterminera les SMD sans excès de blastes (< 5 %), avec excès de blastes de type I (5 à 10
%), avec excès de blastes de type II (10 à 20 %). L’excès de blastes supérieur à 20 % signe
par définition la phase de leucémie aiguë. Les cellules blastiques des SMD sont typiquement
des petits myéloblastes peu granuleux, au rapport nucléo-cytoplasmique élevé, de forme ronde
(blaste type B1 de la classification FAB) (Photo 5).

25
Photo 1 : cellularité médullaire augmentée,
coloration MGG, grossissement 10x.

10x
10

Photos 2 : signes de dysérythropoïèse.


Gauche : anisochromie, ponctuations
basophiles des érythroblastes, MGG,
grossissement 60x. Droite : sidéroblaste
en couronne, coloration de Perls,
grossissement 100x.
60x 100x

Photo 3 : signes de dysgranulopoïèse,


dégranulation des PNN,
hyposegmentation, pseudo Pelger-Huët.
MGG, grossissement 60x.

60x

Photo 4 : signes de dysmégacaryopoïèse,


mégacaryocytes petits et hypolobés. MGG,
grossissement 60x.

60x

Photo 5 : cellules blastiques. MGG,


grossissement 60x.

60x

26
c) Anomalies cytogénétiques

La présence d’anomalies cytogénétiques du caryotype médullaire affirme l’existence d’un


clone pathologique. Le caryotype est effectué sur des cultures à court terme sans facteur de
croissance du prélèvement médullaire, selon les recommandations de l’ISCN (International
System for Human Cytogenetic Nomenclature) (44). Un minimum de 20 métaphases est
analysé. Le caryotype doit être systématique, sauf chez des sujets très âgés avec un diagnostic
de SMD certain et où le caryotype n’aurait aucune conséquence thérapeutique.

Les anomalies chromosomiques, déjà décrites au chapitre I.4.2., sont retrouvées dans 50 %
des cas de SMD primaire et dans 80 % des cas de SMD secondaire. La répartition et la
fréquence de ces anomalies dans les SMD au diagnostic sont décrites dans le tableau II. Dans
certains cas de diagnostic difficile, comme devant l’absence de critères morphologiques
suffisants au myélogramme, la présence d’une de ces anomalies chromosomiques récurrentes
est un argument présomptif pour établir le diagnostic de SMD devant des cytopénies d’origine
indéterminée. (45)

En cas d’échec du caryotype (nombre de mitoses insuffisant), il faut renouveler le


prélèvement médullaire et/ ou avoir recours à la FISH. (46) Le recours à la FISH est
également indiqué devant des cytopénies, chez un sujet jeune, pour éliminer une monosomie 7
qui représente un facteur de mauvais pronostic indépendant (47).

Tableau III. Fréquences des anomalies cytogénétiques décrites au diagnostic des SMD
Anomalies cytogénétiques SMD SMD secondaires
Non équilibrées
+8 10 %
-7 ou del(7q) 10 % 50 %
-5 ou del(5q) 10 % 40 %
del(20q) 5-8 %
-Y 5%
i(17q) ou t(17p) 3-5 %
-13 ou del(13q) 3%
del(11q) 3%
del(12p) ou t(12p) 3%
del(9q) 1-2 %
idic(X)(q13) 1-2 %

Équilibrées
t(11;16)(q23;p13.3) 3%
t(3;21)(q26.2;q22.1) 2%
t(1;3)(p36.3;q21.2) 1%
t(2;11)(p21;q13) 1%
inv(3)(q21q26.2) 1%
t(6;9)(p23;q34) 1%
 en dehors de ces trois anomalies, et en l’absence des critères morphologiques suffisants
au myélogramme devant des cytopénies chroniques d’origine indéterminée, les autres
anomalies cytogénétiques sont considérées comme des arguments en faveur du diagnostic
de SMD.

27
d) Autres examens biologiques

Parmi les examens obligatoires (48) :


– Le dosage sérique de l’EPO dans les SMD de faible risque ou intermédiaire 1 car il s’agit
d’un facteur pronostique important pour la réponse au traitement par EPO recombinante.
– La ferritinémie avant la mise en place d’un support transfusionnel chez les patients de
risque faible ou intermédiaire 1, pour évaluer et suivre l’hémosidérose transfusionnelle.
– À visée de diagnostic différentiel, dans les formes sans excès de blastes, il faut éliminer
une cause supplémentaire d’anémie par la sidérémie et la transferrinémie, le dosage des
folates sériques et érythrocytaires et de la vitamine B12 sérique, la créatininémie, le bilan
biologique hépatique, la recherche d’un syndrome inflammatoire, la bilirubinémie et
l’haptoglobulinémie, le dosage de la TSH et les sérologies VIH, hépatites B et C.
– Le phénotypage érythrocytaire est indispensable chez tous les patients.
– Le typage HLA du patient âgé de moins de 65 ans et de sa fratrie doit être systématique si
une allogreffe est une option thérapeutique envisagée à un moment ou un autre de
l’évolution des SMD.

Parmi les examens recommandés ou en cours d’évaluation :


– L’immunophénotypage du sang et de la moelle : devant une suspicion de SMD, avec
caryotype normal et signes dysplasiques médullaires faibles et avec absence d’excès de
blastes, la cytométrie en flux peut sensibiliser l’évaluation de la dysplasie par la mise en
évidence de modifications d’intensité des marqueurs de maturation granuleuse et
érythrocytaire (49) .
– La recherche d’un clone d’hémoglobinurie paroxystique nocturne est recommandée dans
les SMD hypoplasiques par l’étude en cytométrie en flux des marqueurs CD59 et CD55
sur les populations granulocytaires du sang et de la moelle (46).

Dans le cas de critères insuffisants pour le diagnostic de SMD : caryotype normal, dysplasie
médullaire inférieure à 10 % des cellules d’une lignée, cytopénies à la limite supérieure des
seuils et en dehors de toute autre cause de cytopénie ; on définit les ICUS (Idiopathic
Cytopenia of Undetermined Significance) ou en dehors de toute autre cause de dysplasie, les
IDUS (Idiopathic Dysplasia of Undetermined Significance) (50). Ces catégories « pré-
malignes » doivent être surveillées sur l’évolution de leur cytopénies et cytologie médullaire à
la recherche d’un SMD.

28
I.5.3. Classification diagnostique

La classification diagnostique actuellement utilisée est la 4e édition de la classification des


tumeurs hématopoïétique de l’OMS révisée en 2008 (1) (Tableau III).

a) SMD/LA primaires ou de novo :

La classification de l’OMS classe les patients selon :


– Une cytopénie sur une lignée, deux lignées ou une pancytopénie.
– Une dysplasie médullaire unilignée ou multilignée.
– Un pourcentage de blastes médullaires < 5 %, entre 5 et 10 %, entre 10 et 20 %.
– La présence de sidéroblastes en couronne supérieur à 15 % définissant l’ARS (Anémie
Réfractaire Sidéroblastique).
– La présence de la délétion del(5q) isolée au caryotype définissant une forme clinique
particulière le syndrome 5q-.
– Une catégorie de SMD inclassables où la dysplasie est non significative (< 10 % des
cellules d’une lignée) mais où l’on trouve au caryotype une anomalie cytogénétique
récurrente présomptive du diagnostic de SMD.

Quelques formes cliniques sont individualisables :

Le syndrome 5q- : il est définit par la présence de la del(5q) isolée au caryotype. Il prédomine
chez la femme et répond aux critères d’anémie réfractaire sans excès de blastes dans 75 % des
cas. Il comporte une anémie très macrocytaire, une érythroblastopénie, des mégacaryocytes
hypolobés et une thrombocytose. Son pronostic est favorable avec un risque de transformation
en LAM faible inférieur à 10 %. Enfin les patients avec le syndrome 5q- répondent au
traitement immunomodulateur par lénalidomide avec 67 % de réponse érythroïde majeure
(arrêt du besoin transfusionnel) et 45 % de rémission cytogénétique (51).

Les formes frontières SMD/SMP :


– les LMMC dont les leucocytes ne dépassent pas 13 G/L sont proches des autres SMD,
hormis la monocytose circulante, et sont généralement incluses dans les protocoles
thérapeutiques de SMD. Les formes plus hyperleucocytaires ou franchement
prolifératives avec splénomégalie sont par contre plus proches des SMP d’un point de vue
clinique.
– Les ARS avec thrombocytose présentent un composant myéloprolifératif avec la
mutation V617F de JAK2 dans 60 % des cas et sont classées parmi les syndromes
frontières SMD/SMP.

29
Tableau IV. Classification diagnostique des SMD selon l’OMS 2008 (1)

PATHOLOGIE SANG MOELLE


Cytopénie réfractaire avec – Cytopénie isolée ou – Dysplasie unilignée > 10 % des
dysplasie unilignée (CRDU) : bicytopénie cellules de la lignée touchée sont
– Anémie réfractaire – Absence ou rare blastes (< 1 %) dysplasiques
– Neutropénie réfractaire – < 5 % blastes
– Thrombopénie réfractaire – < 15 % sidéroblastes
Anémie réfractaire avec – Anémie isolée – Dysplasie érythroïde isolée
sidéroblastes en couronne – Pas de blastes – > 15 % de sidéroblastes en
couronne
(ARS) – < 5 % blastes
Cytopénies réfractaires avec – Cytopénies – Dysplasie > 10 % dans au moins
dysplasie multilignée – Absence ou rares blastes < 1 % deux lignées myéloïdes
– Absence de corps d’Auer – < 5 % blastes
(CRDM) – Monocytose < 1 G/L – Absence de corps d’Auer
– +/- sidéroblastes en couronne
Anémie réfractaire avec – Cytopénies – Dysplasie uni ou multilignée
excès de blastes de type I – < 5% blastes – 5 à 9 % de blastes
– Absence de corps d’Auer – pas corps d’Auer
(AREB I) – Monocytose < 1 G/L
Anémie réfractaire avec – Cytopénies – Dysplasie uni ou multilignée
excès de blastes de type II – 5 à 19 % blastes – 10 à 19 % de blastes
– +/- corps d’Auer – +/- corps d’Auer
(AREB II) – Monocytose < 1 G/L
Syndromes – Cytopénies – Pas de dysplasie évidente, < 10 %
myélodysplasiques – < 1 % blastes des cellules d’une lignée sont
dysplasiques, avec anomalie
inclassables cytogénétique évocatrice de
SMD
– < 5 % blastes
Syndromes – Anémie – Mégacaryocytes en nombre
myélodysplasiques avec – Taux de plaquettes normal ou normal ou augmenté, avec noyau
augmenté hypolobé
délétion 5q- isolée – Absence ou rares blastes < 1% – < 5 % blastes
– Anomalie cytogénétique isolée
del(5q)
– Pas de corps d’Auer

b) Les SMD/LA secondaires :

Les SMD et LA secondaires à un traitement par chimio- et/ou radiothérapie sont regroupés
sous la désignation de leucémies myéloïdes secondaires au traitement selon la définition de
l’OMS. On y retrouve les LAM secondaires, les SMD secondaires et les syndromes frontières
SMD/ syndrome myéloprolifératif secondaires, le plus souvent avec une composante de
leucémie myélomonocytaire chronique. Les agents étiologiques ont été décrits dans le tableau
I. Les SMD/LA secondaires comptent pour 10 à 20% des cas de SMD. On oppose les
SMD/LA secondaires dits « classiques », secondaires aux agents alkylants et aux radiations

30
ionisantes et les SMD/LA secondaires aux agents interférant avec la topoisomérase II qui
représentent 20 à 30% des cas de SMD secondaires. La première catégorie, faisant suite aux
agents alkylants, se déclare généralement entre 5 et 10 ans après le traitement, en phase
chronique de SMD, avec des signes dysplasiques médullaires, des cytopénies périphériques,
un excès de cellules blastiques mais moins fréquemment en phase de LA. Cette forme de
SMD secondaire est associée sur le plan cytogénétique à des pertes et délétions des
chromosomes 5 et/ou 7. A l’inverse, les LA secondaires aux agents inhibiteurs de
topoisomérases II se déclarent après une latence courte de 1 à 5 ans après le traitement, en
phase de leucémie aiguë d’emblée et s’associent à des translocations chromosomiques
équilibrées impliquant les gènes MLL (11q23) et RUNX1 (21q22). En pratique clinique, cette
distinction est théorique, les patients ayant le plus souvent reçu différentes lignes de
traitements avec ces deux classes d’agents cytotoxiques, mais elle souligne les différences des
voies moléculaires activées entre ces deux formes (voir I.4.2).

I.6. Pronostic

La cytogénétique des SMD est la variable indépendante qui a la plus grande valeur
pronostique. Greenberg et al. (52) ont ainsi établi en 1997 trois groupes de risque
cytogénétique :
– Risque favorable : caryotype normal, del(5q) isolée, del(20q) isolée et perte du Y.
– Risque défavorable : caryotype complexe (plus de trois anomalies) et anomalies du 7.
– Risque intermédiaire : autres anomalies.

Un score pronostique, le score IPSS (International Prognostic Scoring System) est déterminé
pour prédire la survie globale et le risque de transformation en LAM. Ce score IPSS est basé
sur trois variables : le nombre de cytopénies, le pourcentage de blastes médullaires et le
groupe de risque cytogénétique. Ce score permet de reconnaitre quatre groupes pronostiques:
risque faible, intermédiaire-1, intermédiaire-2, élevé (Tableau V).

31
Tableau V. Score pronostique IPSS (International Prognostic Scoring System) : faible (0
point), intermédiaire-1 (0,5 à 1 point), intermédiaire-2 (1,5 à 2 points), élevé (plus de 2 ,5
points) et études de survie (A) et de risque de transformation en LAM (B) sur 816 patients,
établis par Greenberg et al. 1997 (52)

Valeur
Variable pronostique 0 0,5 1 1,5 2
Blastes médullaires <5% 5 à 10 % - 11 à 20 % 21 à 30 %
Caryotype Bon Intermédiaire Défavorable
Cytopénies  0à1 2à3 -
 Cytopénies : Hb < 10 g/dL, PNN < 1 800/mm3, Plaquettes < 100 000/mm3.

Score IPSS Survie


médiane
Faible 5,7 ans

Int-1 3,5 ans

Int-2 1,2 an

Elevé 0,4 an

Score IPSS 25% LAM


Faible 9,4 ans

Int-1 3,3 ans

Int-2 1,1 an

Elevé 0,2 an

Sur 816 patients, Greenberg et al. (52) ont établi que la survie médiane était de 5,7 ans pour le
groupe de risque faible et de 0,4 an pour le groupe de risque élevé, avec un risque de 25 %
d’évolution en LAM de 9,4 ans pour les risques faibles et de 0,2 an pour le groupe de risque
élevé. Ce score est toujours celui utilisé en pratique clinique aujourd’hui et généralement on
regroupe les risques faible et intermédiaire-1 en groupe à « bas risque » et les risques
intermédiaire-2 et élevé en « haut risque ».
32
Cependant le score IPSS prenait en compte en 1997 les SMD avec 20 à 30 % de blastes,
classées depuis 2002 en LAM par l’OMS. On sait également que les catégories
morphologiques de la dernière classification de l’OMS ont une valeur pronostique, par
exemple une dysplasie érythroïde isolée est de meilleur pronostic qu’une dysplasie
multilignée chez des patients classés dans le même groupe IPSS. Aussi, ce score est basé sur
les anomalies présentes au diagnostic et ne prend pas en compte l’évolution dans le temps des
cytopénies et l’aggravation du score. En 2007, Malcovati et al. (53) ont défini un score
pronostique basé sur la classe morphologique OMS, la cytogénétique et la dépendance
transfusionnelle des patients, le score WPSS (WHO classification-based Prognostic Scoring
System). Avec ce score, ils ont établis un système dynamique pour mieux prédire la survie et
le taux de progression en LAM, particulièrement pour les SMD de bas risque où la distinction
morphologique et la dépendance transfusionnelle et ses conséquences modifient le pronostic.
Greenberg et al. ont révisé le score IPSS à partir de 7012 patients, au lieu de 816 pour l’IPSS
(Greenberg et al., Revised International Prognostic Scoring System for Myelodysplastic
Syndromes, Blood 2012 120 :2454-2465). L’IPSS révisé a permis de déterminer cinq groupes
cytogénétiques de pronostic différent. Ainsi sont désormais prises en compte les anomalies du
chromosome 3 comme étant de mauvais pronostic, la nouvelle catégorie de très bon pronostic
inclut la perte du chromosome Y, et celle de très mauvais pronostic les caryotypes complexes
avec strictement plus que trois anomalies. Egalement, la distinction des pourcentages de
blastes médullaires entre < 2 % et 2 à 5%, ainsi que la profondeur des cytopénies, permet au
final de définir cinq scores pronostiques corrélés à la survie médiane et au taux de
transformation en LAM, au lieu des quatre de l’IPSS.

Le pronostic des SMD/LA secondaires, qui présentent plus fréquemment des anomalies
cytogénétiques de risque défavorable, est le plus péjoratif avec une survie médiane de 8 mois
et une survie à 5 ans inférieure à 10 % pour les SMD secondaires de type « alkylants » (1).
Les SMD/LA secondaires aux agents inhibiteurs de topoisomérases II, avec translocations
équilibrées, sont de meilleur pronostic mais présentent toutefois des survies médianes plus
faibles que leurs équivalents de novo avec les mêmes translocations équilibrées.

I.7. Traitements

La classification des patients atteints de SMD en groupe pronostique de bas risque (IPSS
faible et intermédiaire-1) et de haut risque (IPSS intermédiaire-2 et élevé) guide les

33
indications thérapeutiques. Les traitements symptomatiques restent fondamentaux et sont
indiqués quel que soit le stade de la maladie.

Seule l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est à ce jour potentiellement curative


dans les SMD. Cependant, l’âge souvent avancé des patients, les comorbidités associées et la
recherche d’un donneur, apparenté ou non, rendent cette option peu souvent envisageable.
Chez tout patient avec un SMD de haut risque, et si l’âge et l’état général le permettent,
l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques doit être envisagée.

I.7.1. Traitements symptomatiques

a) Transfusions érythrocytaires

Elles sont à envisager de manière chronique. Le seuil d’hémoglobine (Hb) pour des
transfusions érythrocytaires se situe à 8 g/dL ; cependant chez cette population âgée il
convient de privilégier une qualité de vie optimale avec le maintien en ambulatoire le plus
possible, et le seuil transfusionnel sera individualisé autant que possible. Il est nécessaire de
maintenir un taux d’Hb > 8 g/dL dans toutes les circonstances qui augmentent la
consommation d’oxygène : infections sévères, complications pulmonaires, insuffisance
cardiaque, etc. Les culots globulaires doivent être phénotypés en système Rhésus et Kell.

b) Transfusions plaquettaires

Compte tenu de la nécessité d’envisager ce traitement au long terme avec les risques
d’inefficacité rapide par allo-immunisation, il faut en réduire les indications en dehors d’un
geste opératoire, d’un syndrome hémorragique ou d’un taux de plaquettes inférieur à
10×109/L.

c) Traitement des infections

Il est identique à celui des infections survenant chez les patients neutropéniques post-
chimiothérapie, ceux atteints de SMD présentent en plus un déficit fonctionnel des PNN qui
accroit le risque infectieux. Il est recommandé aux patients atteints de SMD avec neutropénie
de disposer à l’avance d’antibiotiques à large spectre à débuter au moindre signe infectieux :
par exemple, l’association amoxicilline - acide clavulanique 3 g/j + ciprofloxacine 1 g/j.

d) Traitement chélateur du fer

La ferritine sérique est un bon marqueur de la surcharge en fer dans les SMD. Les IRM
hépatique et cardiaque sont également indiquées selon des protocoles d’examens bien définis.

34
Le Groupe Français des Myélodysplasies (46) suggère, chez les patients régulièrement
transfusés, de suivre le taux de ferritine sérique tous les trois mois et de débuter un traitement
chélateur du fer pour une ferritinémie supérieure à 1000-1500 ng/mL et chez les patients
ayant reçu plus de 20 concentrés érythrocytaires. Le traitement chélateur peut être effectué
soit par voie parentérale par la deferoxamine (Desféral®), soit par voie orale par le deferiprone
(Ferriprox®) ou le déférasirox (Exjade®).

I.7.2. Traitement des SMD de « haut risque » (IPSS intermédiaire 2 et élevé) chez les
patients non éligibles à l’allogreffe

a) Les agents déméthylants

L’azacytidine (Vidaza®) a été approuvé par la FDA (Food and Drug Administration) à la suite
d’un essai randomisé de phase III comparant l’efficacité de l’azacytidine aux traitements
symptomatiques (transfusions, antibiotiques) chez des patients souffrant de SMD de toute
catégorie IPSS et OMS (54). En Europe, l’autorisation de mise sur le marché du Vidaza® a été
obtenue en 2009 à la suite d’un second essai de phase III randomisant les patients avec SMD
de risque intermédiaire-2 ou élevé selon l’IPSS, entre l’azacytidine et les traitements
conventionnels choisis avant la randomisation (traitements symptomatiques ou cytarabine à
faible dose ou chimiothérapie d’induction standard) (55). La survie globale était de 24,5 mois
dans le bras azacytidine contre 15 mois chez les patients des bras « traitements
conventionnels ». La survie à deux ans a été de 50,8 % chez les patients sous azacytidine
contre 26,2 % chez les patients sous « traitements conventionnels » (p < 0,0001). Le
traitement par azacytidine a montré un temps de progression en LAM de 13,0 mois contre
7,6 mois chez les patients sous traitement conventionnel (p = 0,0025). L’analyse des
différents sous-groupes a retrouvé des résultats similaires en termes de survie globale quelle
que soit la tranche d’âge ou le groupe de risque cytogénétique IPSS, et d’une manière
intéressante la réponse à l’azacytidine était la plus favorable dans le groupe avec anomalies du
7 (délétions ou monosomie).

La décitabine (Dacogen®) a été approuvée par la FDA pour les patients de risque
intermédiaire 1, 2, et élevé à la suite de l’essai de phase III randomisant ces patients entre un
bras décitabine et un bras « traitements symptomatiques » : les patients sous décitabine
présentaient un taux de réponse globale (réponse complète et réponse partielle) significatif (17
% contre 0 % pour les traitements symptomatiques, p < 0,001) ; ces réponses étaient durables
et permettaient une indépendance transfusionnelle (56). En France la décitabine est disponible
en ATU nominative (Autorisation Temporaire d’Utilisation) (48).
35
b) Chimiothérapie intensive

L’association recommandée contient anthracyclines et cytarabine. Elle donne des rémissions


complètes dans 40 à 60 % des cas, mais de très courte durée (10 à 12 mois), et avec une
toxicité importante liée aux cytopénies prolongées qu’elle entraîne dans les SMD. Les critères
de réponse utilisés sont ceux de l’IWG (International Working Group). (57)

c) Cytarabine à faible dose

À la dose de 20 mg/m2/jour en une ou deux fois, et deux semaines par mois, la cytarabine à
faible dose permet des rémissions complètes ou partielles de courte durée mais où les
cytopénies induites sont compatibles avec une prise en charge ambulatoire.

I.7.3. Traitements des SMD de « bas risque »

a) Les agents stimulant l’érythropoïèse

Un traitement par EPO recombinante est recommandé chez les patients ayant moins de 9 à 10
g/dL d’Hb et une mauvaise tolérance clinique après vérification du taux sérique d’EPO qui
doit être inférieur à 200 UI/mL pour espérer un taux de réponse satisfaisant. Il est
recommandé de débuter le traitement en utilisant des posologies de 40 000 à 60 000 unités
pour l’érythropoïétine alpha et de 300 g/semaine pour la darbépoïétine alpha.

b) Traitement de la neutropénie

L’utilisation de G-CSF ou GM-CSF n’est pas recommandée. Elle peut permettre de diminuer
la fréquence des épisodes infectieux mais n’entraîne aucune amélioration de survie. De plus
son innocuité en termes de risque de transformation leucémique est incertaine.

c) Traitement de la thrombopénie

Les androgènes comme le danazol (Danatrol®) donnent environ 30 % de réponses mais


nécessitent une surveillance particulière de l’état hépatique et prostatique chez l’homme.

Les agonistes du récepteur de la thrombopoïétine (romiplostim, Nplate®) montrent des


corrections durables de la thrombopénie, mais associées à un risque d’augmentation de la
blastose et sont prescrits uniquement dans le cadre d’essais thérapeutiques.

d) Le lénalidomide (Revlimid®)

Le bénéfice du lénalidomide a été démontré pour le traitement de l’anémie des patients


présentant un SMD de bas risque avec délétion isolée del(5q).

36
Un essai clinique mené chez 148 patients suivis pour un syndrome 5q- et dépendance
transfusionnelle a montré une amélioration du taux d’hémoglobine chez 76 % des patients, et
une indépendance transfusionnelle chez 67 %. Une réponse cytogénétique était également
observée pour 67 % des patients (51). Le lénalidomide a donc été approuvé dans cette
indication aux États-Unis par la FDA, mais en Europe, en raison d’un doute quant à une
majoration du risque d’évolution leucémique chez les patients traités par lénalidomide,
l’Agence européenne du médicament n’a pas accordé l’AMM dans cette indication.

L’utilisation du lénalidomide est admise par l’HAS pour les SMD de faible risque, avec
del(5q) et dépendance transfusionnelle, et ne répondant pas à l’érythropoïétine. Son
mécanisme d’action dans les SMD est incertain, on retient ses rôles anti-angiogénique, anti-
inflammatoire et immunomodulateur.

II.1. Les polymorphismes génétiques

Des variations fréquentes de la séquence des gènes sont rencontrées tout au long du génome
et sont responsables de la grande diversité de l’espèce humaine : ce sont les polymorphismes
génétiques. Leur fréquence varie d’un gène à l’autre, elle est plus élevée dans les introns que
dans les exons. Les polymorphismes génétiques sont le support de variations phénotypiques
mineures mais peuvent aussi expliquer les différences entre les individus dans la
prédisposition héréditaire à certaines pathologies ou la sensibilité à certains médicaments.
Parmi les polymorphismes génétiques, on distingue les séquences répétées où le motif répété
et le nombre de répétition permet de regrouper les micosatellites avec la répétition de un à
cinq nucléotides, et particulièrement les CA repeat où le dinucléotide CA est répété souvent
dans les introns des gènes, les minisatellites avec quelques dizaines de nucléotides répétés et
les satellites avec des centaines de nucléotides répétés un très grand nombre de fois. Parmi les
satellites, on distingue les éléments dispersés et transposables SINE (short interspersed
elements) et LINE (long interspersed elements), ces derniers dériveraient d’une
rétrotranscriptase virale qui se serait réinsérée dans le génome et existent à raison de 500000
copies dans le génome où ils peuvent inactiver certains gènes. Les polymorphismes de
séquence sur un nucléotide unique (SNP single nucleotide polymorphism) sont
biochimiquement identiques aux mutations par substitution mais sont des évènements

37
fréquents avec au moins 10% de fréquence allélique, soit 1% d’homozygotes variants, et non
délétères à la différence des mutations rares et délétères.

II.2. Les single nucleotide polymorphisms (SNP)

Les SNP sont des polymorphismes génétiques de séquence sur un nucléotide unique. C’est la
source la plus importante de variabilité interindividuelle transmissible et leur fréquence est
importante, d’au moins un SNP tous les 1000 nucléotides environ. Ces polymorphismes
ponctuels peuvent être des transitions par remplacement d’une base purique par une autre base
purique ou d’une base pyrimidique par une autre base pyrimidique, ou des transversions
lorsqu’une base purique est remplacée par une base pyrimidique ou inversement.

Les SNP ont des fonctions potentielles perturbant l’information génétique et peuvent entraîner
des modifications de la structure, de l’expression, de la stabilité, de l’activité de la protéine
codée. Lorsqu’il est situé en région codante des gènes, le SNP peut être silencieux ou
synonyme s’il ne modifie pas l’acide aminé codé par le codon ; il peut être non-synonyme et
faux-sens si le codon modifié entraîne une substitution d’un acide aminé par un autre ; enfin il
peut être non-synonyme et non-sens s’il conduit à la formation d’un codon stop ou à
l’altération d’un site d’épissage entraînant la troncation de la séquence protéique. Même
synonymes, les SNP peuvent avoir des conséquences fonctionnelles, qui sont liées à la
modification du niveau de traduction de la protéine en raison par exemple, d’une différence
dans la disponibilité en ARN de transfert (certains codons, d’utilisation rare, correspondent à
des ARN de transfert synthétisés en faible quantité) ; ou bien d’une modification de la
stabilité de l’ARN messager liée à des différences de structure secondaire. Par ailleurs, s’ils
sont situés en régions non-codantes (introns, régions 5’ et 3’ UTR) et sur les séquences
régulatrices (promoteurs, silencers et enhancers, sites de liaison de micro-ARN, gènes codant
des micro-ARN), ils peuvent avoir des conséquences sur le phénotype en modifiant par
exemple le niveau de transcription du gène par une perturbation de l’interaction entre les
facteurs de transcription et la région promotrice ou régulatrice.

Le séquençage du génome humain et les progrès des techniques de biologie moléculaire ont
permis ces deux dernières décennies de répertorier plus de 10 millions de SNP ainsi que
l’essor d’une nouvelle discipline, la pharmacogénétique. L’étude de SNP intéressant des
gènes impliqués dans le métabolisme, le transport ou la détoxication des xénobiotiques a
permis de montrer leur association avec l’efficacité ou la toxicité d’une chimiothérapie. La
pharmacogénétique peut apporter des informations précieuses en oncologie en permettant de
prédire la réponse à une chimiothérapie ou sa toxicité afin de proposer une prescription

38
individualisée des médicaments (58). Par exemple, la thymidylate synthase (TS) est la cible
du 5-fluoro-uracile (5-FU) qui inhibe la conversion du dUMP en dTMP catalysée par cette
enzyme ; le niveau d’expression du gène TS dans les tumeurs est corrélé à l’efficacité du 5-
FU. Le gène de la TS présente un polymorphisme de répétition en région non codante, sur la
séquence promotrice : l’allèle sauvage montre trois répétitions en tandem, l’allèle variant deux
seulement. Il a été montré que la double répétition s’accompagnait d’un niveau d’expression
plus faible de la TS par rapport à la triple répétition et était associée à un gain de survie chez
les patients traités par 5-FU pour cancer colorectal (59).

Les polymorphismes génétiques sont ainsi responsables d’une variabilité individuelle dans la
réponse aux chimiothérapies mais également d’une susceptibilité individuelle différente au
risque de cancer face à l’exposition aux carcinogènes de l’environnement. Dans les deux cas,
les mêmes gènes sont impliqués dans les voies de métabolisme et de transport des
xénobiotiques, ainsi que de réparation des lésions de l’ADN, voies qui sont utilisées pour
détoxiquer les xénobiotiques de l’environnement et moduler ainsi le risque de cancer chez le
sujet exposé et pour prendre en charge les médicaments et moduler leur efficacité et leur
toxicité. L’épidémiologie moléculaire est apparue ainsi comme une nouvelle discipline durant
ces deux dernières décennies et de nombreux SNP ont été identifiés comme marqueurs de
susceptibilité au cancer. L’identification de SNP associés à certains cancers est d’une grande
difficulté, en raison du nombre potentiel de SNP candidats et des problèmes liés à
l’identification d’une interaction faible entre un génotype et un phénotype. Les progrès
techniques permettent d’explorer en une seule analyse plusieurs millions de SNP dans un
échantillon d’ADN par les SNP arrays.

L’épidémiologie moléculaire procède ainsi au génotypage de millions de SNP chez quelques


milliers d’individus atteints d’une maladie donnée et autant de sujets contrôles, pour
rechercher, dans le génome entier, des associations entre des SNP et l’existence de cette
pathologie. C’est ce que l’on appelle les études GWAS (Genome-wide association studies).
En pharmacogénétique, il n’est pas possible de disposer de telles populations de patients
traités. Pour des raisons statistiques, il est donc risqué d’utiliser le GWAS et il est nécessaire
de diminuer le nombre de tests d’associations réalisés si l’on veut conserver la possibilité d’en
identifier quelques-uns de façon significative en diminuant le risque d’erreur dû au hasard .
Par ailleurs, les SNP présents sur ces « puces » ne sont pas connus comme fonctionnels : ce
sont des étiquettes (tags), c’est-à-dire des SNP le plus souvent introniques dont la
fonctionnalité est inconnue et qui ne font que « représenter » des polymorphismes

39
fonctionnels parce qu’ils leur sont associés dans le même haplotype. Leur utilisation éloigne
donc de la réalité physiopathologique de l’association identifiée.

Une possibilité plus « raisonnable » que le GWAS est de rechercher un nombre restreint de
polymorphismes fonctionnels présents sur des gènes dont le rôle dans la détoxication des
xénobiotiques est connu ou supposé : gènes de métabolisme, de transport, de réparation de
l’ADN, gènes codant pour les protéines cibles des médicaments ou pour des protéines
impliquées dans l’oncogenèse ou la signalisation, etc. Il est possible de réaliser ainsi des
études « multiplexées » en génotypant un certain nombre de polymorphismes situés dans des
gènes candidats. Les préférences vont souvent aux gènes impliqués dans les voies de
l’oncogenèse et à ceux dont la variabilité et le rôle ont déjà été étudiés dans les cancers (60).
Par exemple, des gènes de réparation de l’ADN du mécanisme du NER (Nucleotide Excision
Repair) comme XPD (Xeroderma Pigmentosum group D) ont été étudiés, ainsi que les effets
des polymorphismes de ce gène sur la réparation des adduits de l’ADN causés par les
carcinogènes de la fumée de cigarette. Les différentes études cas-témoins analysant les SNP
de ce gène et le risque de cancer du poumon ont montré des résultats discordants ou des
associations faibles entre les SNP de ce gène et le risque de cancer du poumon (61). Par
contre, la combinaison de différents polymorphismes au sein du même gène ainsi que
l’association de différents SNP de différents gènes d’une même voie moléculaire, comme
celle de la réparation de l’ADN, pourrait montrer des associations plus fortes avec le risque de
développer un cancer.

II.3. SNP et syndromes myélodysplasiques

En hématologie, les études pharmacogénétiques ont surtout été faites dans la leucémie aiguë
lymphoblastique de l’enfant, et ont recherché des associations entre la réponse à l’étoposide et
les polymorphismes des gènes de métabolisme CYP3A5 et GSTP1 et de transport MDR1.
Dans les syndromes myélodysplasiques (SMD) peu d’études ont été réalisées en raison de la
faible utilisation à la chimiothérapie dans son traitement.

Par contre, la recherche d’une prédisposition aux SMD/LA et plus particulièrement aux
SMD/LA secondaires aux chimiothérapies et/ou radiothérapie est d’un intérêt grandissant ces
dernières années. Comprendre les facteurs de susceptibilité individuelle permettrait
d’identifier les patients à risque de SMD secondaire et d’adapter la chimiothérapie du cancer
primaire en conséquence, mais également de mieux expliquer les différents processus
moléculaires de la leucémogenèse. Ainsi, il existe une interaction entre les effets
génotoxiques des xénobiotiques et les caractéristiques individuelles du sujet exposé qui est

40
influencée par des polymorphismes génétiques des voies de métabolisme et de réparation de
l’ADN propres à chaque individu (8).

Les enzymes de métabolisme de phase I représentées par la famille des cytochromes P450
transforment les xénobiotiques en espèces réactives intermédiaires, le plus souvent par l’ajout
d’un groupement hydroxyle. Ces composés sont ensuite pris en charge par les enzymes de
phase II, enzymes de conjugaison qui les transforment en composés plus hydrophiles pour
permettre leur élimination. Ces enzymes de phase II sont représentées par des transférases
telles que l’UDP-glucuronosyl-transférase, la sulfotransférase, la NAD(P)H-quinone
oxidoréductase (NQO), la glutathion S-transférase (GST). L’étoposide, le cyclophosphamide
et d’autres composés sont des substrats du cytochrome CYP3A4. Un variant polymorphique
dans la région promotrice du gène CYP3A4 affecte la production du métabolite catéchol de
l’étoposide, qui est un précurseur des dérivés quinoniques fortement génotoxiques. Felix et al.
ont étudié la fréquence de ce variant dans 99 cas de leucémies de novo et 30 cas de LA
secondaires : ils ont observé que le variant est présent dans 19 % des cas de LA de novo
contre 3 % seulement des cas de LA secondaires (p = 0,026) (62). Ces données suggèrent que
le génotype sauvage du CYP3A4 de ce SNP entraîne une augmentation de la production des
espèces réactives intermédiaires génotoxiques et est associé à un risque augmenté de
leucémies secondaires.

L’exposition au benzène représente un bon modèle de leucémogenèse induite. Ses dérivés


génotoxiques, les hydroquinones, sont métabolisés par NQO1 en métabolites moins toxiques.
Larson et al. ont étudié un SNP au codon 187 du gène, entraînant la substitution d’une proline
par une sérine ; le génotype homozygote variant est associé à une perte complète d’activité de
l’enzyme (63). Dans la population générale la fréquence des homozygotes variants est de 4 à
5 %. Sur 56 cas de LA secondaires qu’ils ont génotypés, ils ont observé 11 % d’homozygotes
variants, contre 4 % parmi les 9 cas de LA de novo. Cette proportion de l’allèle variant est
encore plus importante dans les cas de LA avec anomalies clonales du chromosome 5 et/ou 7,
avec 16 % d’homozygotes variants, et parmi les patients ayant reçu un traitement de leur
tumeur primaire par un agent alkylant. Le génotypage de NQO1 montrait dans cette étude une
proportion identique à celle de la population générale pour les cas de LA avec d’autres
anomalies cytogénétiques comme les translocations équilibrées impliquant 11q23, 21q22,
inv(16), et t(15 ;17). Ces constations soulignent encore un mécanisme de leucémogenèse
différent entre ces types de leucémies myéloïdes.

Un autre polymorphisme prédisposant aux LA avec anomalies du 5 et/ou du 7 est situé sur le
gène de réparation ERCC2 (XPD) appartenant au mécanisme du Nucleotide Excision Repair

41
(NER). Sur une cohorte de 927 patients atteints de LAM, le polymorphisme de substitution
Lys/Gln au codon 751 du gène ERCC2 a été recherché. L’allèle variant codant pour la
glutamine était significativement associé au risque de développer une LA avec délétion 5q ou
7q, mais pas avec les autres anomalies cytogénétiques (64). Il a été montré in vitro que les
dérivés hydroquinone du benzène provoquaient des délétions des chromosomes 5 et 7 sur les
progéniteurs hématopoïétiques (65). Ces différentes études suggèrent un rôle prédisposant des
polymorphismes de NQO1 Pro/Ser et ERCC2 Lys/Gln pour le risque de développer une LA
avec anomalies du 5 et/ou du 7 face à l’exposition professionnelle au benzène ou aux
traitements alkylants.

Enfin, une hypothèse prometteuse est que les espèces réactives échappant à la détoxication
complète par les enzymes de phase II, ou produites en excès à cause de polymorphismes des
gènes de métabolisme de phase I, provoquent des lésions sur l’ADN qui sont insuffisamment
réparées en raison de polymorphismes des gènes de réparation de l’ADN, affectant leur
capacité à réparer. Ainsi une combinaison entre des polymorphismes de différentes voies
moléculaires pourrait aboutir à des lésions significatives et au risque associé de LA. C’est
l’exemple des cas de LAM portant la combinaison de deux SNP au niveau de deux gènes de
réparation de l’ADN, RAD51-G135C et XRCC3-Thr241Met, qui est associée à un risque 3,77
fois plus élevé de développer une LAM par rapport aux cas contrôles sans pathologie (OR =
3,77, p = 0,009). L’association de ce double variant à un troisième polymorphisme d’un gène
de métabolisme (délétion de GSTM1) augmente d’un facteur 15 le risque de développer une
LAM par rapport aux sujets contrôles témoins (OR = 15,3, p = 0,01) (66).

42
Nous avons vu que les syndromes myélodysplasiques étaient un groupe hétérogène de
leucémies, sur le plan de la cytogénétique et des formes cliniques, avec des entités clinico-
biologiques distinctes (syndrome 5q-, ARS), ainsi que sur le plan du pronostic, avec des
évolutions lentes et favorables ou au contraire agressives ; les LA post-SMD sont de très
mauvais pronostic et les formes de SMD/LA secondaires, à la cytogénétique plus souvent
altérée, ont le pronostic le plus défavorable.

Nous savons que des polymorphismes génétiques de type SNP peuvent influencer
l’interaction entre les toxiques carcinogènes de l’environnement ou des chimiothérapies et
l’individu exposé, par sélection des sujets les plus à risque en raison de variations dans les
capacités des systèmes de métabolisation, de détoxication, de transport des xénobiotiques, ou
encore des voies de réparation des lésions de l’ADN. En particulier, seule une partie des
patients traités pour un cancer primitif vont développer un SMD/LA secondaire : il existe
donc des facteurs individuels qui influencent cette susceptibilité et ces facteurs peuvent être
recherchés dans la variabilité individuelle déterminée par les polymorphismes génétiques.

Les objectifs de ce travail sont d’identifier des polymorphismes génétiques associés à des
caractères cliniques et biologiques des SMD, avec en particulier :
– Les formes cytogénétiques : caryotype normal, caryotype complexe, anomalies du 7.
– Les formes cliniques particulières : syndrome 5q-, ARS.
– Les formes pronostiques : IPSS bas ou élevé.
– Les formes de novo ou secondaires de SMD/LA.

Pour cela, nous avons génotypé 384 polymorphismes de type SNP, à l’aide d’un système
multiplexé dédié, chez 65 patients atteints de SMD sélectionnés de manière prospective. Les
SNP ont été choisis au sein du laboratoire selon une approche gène-candidat et SNP-candidat,
et la réalisation de l’outil a été confiée à la société Illumina. Cela nous a permis de déterminer,
sur notre population, le génotype de 384 SNP au sein de 217 gènes d’intérêt impliqués dans
les voies de métabolisme, détoxication, transport des xénobiotiques, de réparation des lésions
de l’ADN et plus généralement dans l’oncogenèse.

43
IV.1. Patients

IV.1.1. Sélection des patients

La population étudiée est représentée par une première cohorte composée de 65 patients
sélectionnés sur des critères diagnostiques : SMD et LAM avec dysplasie multi-lignée,
primaires ou secondaires, au diagnostic ou en cours de suivi, traités ou non. Le diagnostic de
SMD et LAM a été réalisé selon la classification diagnostique de l’OMS révisée en 2008 (1).
(Tableau IV) Par définition, les SMD et LAM secondaires étaient des SMD et LAM avec
antécédent de chimiothérapie et/ou radiothérapie pour un cancer antérieur.

Soixante-cinq patients ont été sélectionnés de manière prospective entre septembre 2009 et
janvier 2011, ils ont été informés de cette étude et ont donné leur accord à l’utilisation des
échantillons biologiques à une fin de recherche, selon les réglementations en vigueur : article
1211-2, alinéa 2 du Code de la Santé Publique «… l’utilisation d’éléments ou de produits du
corps humain à une fin médicale ou scientifique autre que celle pour laquelle ils ont été
prélevés ou collectés, est possible, sauf opposition exprimée par la personne sur laquelle a été
opéré ce prélèvement ou cette collecte, dûment informée au préalable de cette autre fin… » .
En raison du caractère non identifiant des polymorphismes recherchés dans notre étude, le
consentement exprès du patient, obligatoire pour les examens de génétique constitutionnelle
(article 16-10 du Code Civil), n’a pas été retenu, comme cela a été proposé dans le rapport de
l’HAS, Septembre 2009, Service des bonnes pratiques professionnelles « Cryopréservation de
tissus, cellules et liquides biologiques issus du soin » (67).

Parmi ces 65 patients, 49 étaient pris en charge à l’Institut Bergonié, Bordeaux, 13 au CHU
de Bordeaux (Hôpital du Haut-Lévêque et hôpital Saint-André), et 3 au CH de Dax. Les
caractères cliniques et biologiques de ces patients sont décrits dans le tableau VI où l’on
observe un sex ratio légèrement en faveur des hommes, des populations SMD primaires et
secondaires assez équilibrées avec cependant une proportion plus importante de LAM, de
cytogénétique anormale et complexe et de score IPSS élevé dans le groupe des SMD
secondaires.

44
Tableau VI. Caractéristiques cliniques et biologiques des 65 patients atteints de SMD/LA
primaires (n=44) et secondaires (n=21).
Total Primaires Secondaires
n=65 (%) n=44 (%) n=21 (%)
Age au diagnostic
Age médian 67 67 66
(amplitude) (25 – 85) (25 – 85) (36 – 83)
Sexe
Homme 37 (57) 27 (61) 10 (48)
Femme 28 (43) 17 (39) 11 (52)
Diagnostic
CRDU 8 (12) 5 (11) 3 (14)
CRDM 15 (23) 9 (20) 6 (29)
AREB I 9 (14) 7 (16) 2 (10)
AREB II 8 (12) 7 (16) 2 (10)
LAM 15 (23) 7 (16) 8 (38)
Syndrome 5q- 5 (11) 5 (11) 0
ARS 4 (6) 4 (9) 0
LMMC (forme frontière SMD) 1 (2) 1 (2) 0
Cytogénétique
Favorable 35 (63) 28 (67) 7 (50)
Normal 28 (50) 22 (52) 6 (43)
del (5q) isolée 5 (9) 5 (12) 0
del (20q) 1 (2) 0 1 (7)
Y- 1 (2) 1 (2) 0
Défavorable 12 (21) 6 (14) 6 (43)
Anomalies du 7 7 (13) 4 (10) 3 (21)
Complexe 9 (16) 5 (12) 4 (29)
Intermédiaire 9 (16) 8 (19) 1 (7)
Score IPSS
Bas risque 31 (49) 23 (55) 8 (38)
Faible 9 (14) 7 (17) 2 (10)
Intermédiaire 1 22 (35) 16 (38) 6 (29)
Haut risque 32 (51) 19 (45) 13 (62)
Intermédiaire 2 14 (22) 11 (26) 3 (14)
Elevé 18 (29) 8 (19) 10 (48)

CRDU : Cytopénie Réfractaire avec Dysplasie Unilignée, CRDM : Cytopénies Réfractaires avec Dysplasie
Multilignée, AREB I : Anémie Réfractaire avec Excès de Blastes de type I (5 à 10%), AREB II : Anémie Réfractaire
avec Excès de Blastes de type II (10 à 20%), LAM : Leucémie Aigüe Myéloïde, ARS : Anémie Réfractaire avec
Sidéroblastes. Score IPSS : International Prognostic Scoring System, selon Greenberg et al. Blood, 1997 (52). 
Les patients appartenant à plusieurs catégories sont comptabilisés plusieurs fois, certains patients n’ont pas eu
d’examen cytogénétique.

45
IV.1.2. Cancers primaires et traitements reçus

Parmi les 65 patients de cette première cohorte, 21 (32 %) étaient des SMD/ LAM
secondaires. Les cancers primitifs de ces 21 patients sont présentés dans le Tableau VII.

Tableau VII. Cancers primitifs des 21 cas de SMD/LA secondaires de la première cohorte.

Cancer primitif Nombre n=21


Lymphome Non Hodgkinien B (LNHB) 6
Maladie de Waldenström 2
Leucémie Lymphoïde Chronique (LLC) 1
Myélome 1
Leucémie Aiguë Myéloïde LAM3 1
Sarcomes 4
Cancer de la prostate 2
Cancer gastrique 1
Cancer du rectum 1
Cancer du pancréas 1
Cancer du sein 1

Le délai moyen de survenue des SMD/ LA secondaires était de 5,3 ans et variait de 1 à 19 ans
entre la date de la première chimiothérapie reçue et la date du diagnostic du SMD/ LA
secondaire. La majorité des patients ont bénéficié d’une polychimiothérapie et 29% ont reçu
en plus de la radiothérapie. Ces patients ont reçu en moyenne trois classes d’agents
cytotoxiques différents, y compris ceux avec plusieurs lignes de traitements, et au maximum
sept classes d’agents cytotoxiques différents. La répartition des différentes classes de
traitements cytotoxiques parmi les 21 patients est présentée dans le Tableau VIII.

Tableau VIII. Fréquence des différentes classes de traitement anti-cancéreux


parmi les 21 cas de SMD/LA secondaires de la première cohorte.
Classe de traitement cytotoxique reçu Nombre de patients n=21 (%)
Agents alkylants 14 (67)
Agents inhibiteurs de topoisomérases II 9 (43)
Dérivés du platine 7 (33)
Poisons du fuseau 6 (29)
Anti-métabolites 12 (57)
Radiothérapie 6 (29)
 Les patients ayant reçu plus d’une classe thérapeutique sont comptabilisés
plusieurs fois.

46
IV.1.3. Analyses cytogénétiques

Les caryotypes médullaires ont été réalisés pour la majorité des patients au Laboratoire
d’Hématologie du CHU de Bordeaux, hôpital du Haut-Lévêque. Un minimum de 20
métaphases ont été analysées. Les groupes de risque cytogénétique suivent la dernière
classification en vigueur à ce jour, celle du score IPSS définit par Greenberg et al. en 1997
(52).

Parmi les 44 cas de SMD primaires de notre cohorte de 65 patients, on retrouve (Tableau VI)
– Cytogénétique de pronostic favorable (caryotype normal, perte du Y, del (5q) isolée, del
(20q)) : 28 patients dont 5 avec délétion 5q isolée.
– Cytogénétique défavorable (caryotype complexe ( 3 anomalies), anomalies du 7) : 6
patients dont 4 avec anomalies du 7.
– Cytogénétique intermédiaire (autres anomalies du caryotype) : 8 patients.
– Deux patients n’ont pas eu de caryotype réalisé au diagnostic.

Parmi les 21 patients atteints de SMD/ LA secondaires, l’analyse cytogénétique a montré :


– Cytogénétique de pronostic favorable : 7 patients.
– Cytogénétique de pronostic défavorable: 6 patients.
– Cytogénétique de pronostic intermédiaire: 1 patient.
– Sept patients n’ont pas eu de caryotype réalisé au diagnostic.

IV.2. Identification des SNP à l’aide d’une puce de séquençage dédiée

IV.2.1. Échantillons

Les échantillons biologiques nécessaires ont consisté en un prélèvement sanguin et/ou


médullaire sur tube EDTA, et/ou un prélèvement de muqueuse jugale par frottis à
l’écouvillon. En première intention, les échantillons recueillis étaient les écouvillons de
muqueuse jugale afin de s’affranchir de la part de génétique tumorale circulante chez ces
patients souffrant d’une hémopathie. Les cinquante premiers résultats de génotypage ayant
montré une concordance parfaite entre les génotypes effectués sur l’ADN extrait à partir du
prélèvement sanguin et ceux réalisés à partir du prélèvement jugal, les échantillons recueillis
pour les 15 patients suivants de la première cohorte ainsi que ceux de la cohorte de validation
ont été des prélèvements sanguins, qui étaient réalisés pour le suivi médical de ces patients.

47
IV.2.2. Extraction de l’ADN

L’extraction d’ADN à partir des frottis de muqueuse jugale par écouvillon a été réalisée avec
le kit QIAamp® DNA Investigator Kit (Qiagen) selon les instructions du fournisseur. Ces
extractions ont permis de recueillir en moyenne 1 µg d’ADN total et de bonne qualité par
écouvillon.

L’extraction d’ADN à partir des prélèvements sanguins sur EDTA a été réalisée avec le kit
QIAamp® DNA Blood Mini Kit (Qiagen) selon les instructions du fournisseur. Ces
extractions ont permis de recueillir en moyenne 14 µg d’ADN total et de bonne qualité, à
partir de 200 L de sang total, avec de grandes variations de rendement liées à l’existence
d’une leucopénie, fréquente chez ces patients, ou au contraire d’une hyperleucocytose.

IV.2.3. Conception de la puce à façon SNP Chip 384

Le génotypage des SNP a été réalisé sur une puce à façon utilisant la technologie
BeadXpress®, Illumina et que nous avons nommé SNP Chip 384. La conception de cette puce
a été réalisée au sein de l’équipe de pharmacogénétique du laboratoire INSERM U916
VINCO par le Pr Jacques Robert selon une approche SNP candidats et gènes candidats.
L’approche gènes candidats a orienté la sélection vers 214 gènes impliqués dans les voies de
métabolisme, de détoxication et de transport des xénobiotiques, dans la réparation des lésions
de l’ADN ou encore des gènes ayant un rôle important dans les voies de l’oncogenèse et la
signalisation cellulaire. Pour la sélection des 384 SNP, la préférence a été donnée à ceux
situés en région codante, ou déjà connus pour être impliqués dans la réponse aux
médicaments ou dans la survenue de cancer ; enfin les SNP dont la fréquence de l’allèle
mineur était inférieure à 10 % ont été exclus. Nous avons choisi une puce SNP candidats
plutôt qu’une approche génome entier (GWAS, Genome-Wild Association Studies) car, pour
des raisons statistiques, il est nécessaire de diminuer le nombre de tests d’associations réalisés
si l’on veut conserver la possibilité d’en identifier quelques-uns de façon significative en
diminuant le risque d’erreur dû au hasard . Cette puce personnalisée, dédiée au génotypage
de polymorphismes d’intérêt pour les études de pharmacogénétique, permet alors de cibler
des SNP d’intérêt et d’identifier des associations significatives entre 384 SNP et les critères
cliniques étudiés.

Les informations sur les SNP ont été récoltées à partir de la dernière base de données au jour
de la conception, soit Human Genome Build 36 et dbSNP version 127. Les séquences des
SNP sont validées par un score, le SNP Score de 0 à 1 qui reflète la capacité à concevoir un
test valide en tenant compte de la MAF (Minor Allele Frequency) du SNP et de la faisabilité

48
de détection du variant par la technologie Golden Gate® (voir ci-dessous). La MAF utilisée
est celle de la base de données HapMap-CEU pour les Caucasiens. Des SNP déjà validés par
Illumina ont le score maximal avec les oligonucléotides originaux validés pour la technologie
Golden Gate®.

Les causes d’échec de design sont nombreuses. Celui-ci est rendu impossible par des
séquences encadrantes du SNP trop courtes, une faible complexité de séquence ne permettant
pas de déterminer le brin complémentaire, des allèles multiples de SNP (tri ou tétra-allélique),
des polymorphismes d’insertion ou de délétion. Le design est à prendre avec précaution pour
les SNP en région dupliquée ou avec des séquences répétées, un Tm hors limite, la présence
d’un autre SNP dans la région à moins de 60 nucléotides.

Finalement, le fichier de conception de la puce, portant les séquences des SNP et


oligonucléotides designés pour un test valide (SNP Score) par la plateforme Illumina, est filtré
par notre équipe de recherche selon nos critères d’études : ciblage des SNP candidats et gènes
candidats décrits plus haut. 384 SNP sont ainsi retenus et validés par Illumina.

La première version de la puce SNP Chip 384, établie en 2009, a permis la réalisation de 1200
génotypages au total répartis sur dix études françaises. La concordance des génotypes a été
testée par comparaison aux génotypes obtenus par les techniques classiques de RFLP ou par
pyroséquençage et retrouvait plus de 95 % de concordance sur des lignées cancéreuses du
panel NCI-60 (National Cancer Institute) et du panel JFCR-45 (Japanese Foundation for
Cancer Research). La seconde version de la SNP Chip 384 en 2010, que nous avons utilisé
pour cette étude, a permis le génotypages de 2400 échantillons répartis en quinze études
françaises.

IV.2.4. Technologie de la puce BeadXpress® (Illumina)

Le génotypage BeadXpress® d’Illumina a été réalisé à la plateforme Génome Transcriptome


du Centre de Génomique Fonctionnelle de l’université Bordeaux Segalen sous la supervision
du Dr Christophe Hubert, responsable du secteur séquençage de la plateforme. Ce génotypage
permet la détection de 384 SNP de manière multiplexée dans un puits d’une plaque de 96
puits. Il utilise deux technologies : Golden Gate® pour la réaction de génotypage et
Veracode® pour l’identification du SNP.

La réaction de génotypage Golden Gate® repose sur une extension d’oligonucléotide


spécifique d’allèle suivie d’une réaction de ligation. L’ADN génomique extrait est utilisé
comme matrice, la technique est optimisée pour une quantité minimale de 250 ng d’ADN par
échantillon. Pour chaque SNP, il existe deux oligonucléotides spécifiques d’allèles (ASO,

49
Allele Specific Oligonucleotide) complémentaires des deux allèles possibles, sauvage ou
variant, du SNP ; un troisième oligonucléotide, complémentaire d’une région située de 1 à 19
bases du SNP, permet l’identification du locus du SNP (LSO, Locus Specific Oligonucleotide)
(Figure 1).

Les étapes de la réaction débutent par un marquage de l’ADN matrice par la biotine. Puis,
vient l’hybridation de l’ASO complémentaire de la séquence précédent le SNP et qui possède
la base spécifique du génotype du SNP pour cet échantillon. Le LSO s’hybride par sa zone
complémentaire de la séquence suivant le SNP, il porte une séquence nommée Illumicode qui
permettra l’identification du locus du SNP. Puis, une polymérase et une ligase effectuent
l’extension de l’allèle spécifique et la ligation au LSO. Enfin, une étape d’amplification des
fragments générés est réalisée avec des amorces universelles complémentaires des régions
non spécifiques des ASO et LSO. Les amorces universelles complémentaires des ASO sont
marqués par des fluorochromes, cyanine 3 ou cyanine 5 et sont identiques pour tous les SNP :
par exemple, une amorce marquée par la cyanine 3, complémentaire des ASO portant la base
sauvage des SNP, et une amorce marquée par la cyanine 5, complémentaire des ASO portant
la base variante des SNP. La détection du SNP intervient donc avant l’étape d’amplification.

La technologie Veracode® permet l’identification des SNP parmi les génotypages multiplexés
de plusieurs loci simultanément. Cette technologie repose sur l’utilisation de micro-cylindres
de silice possédant une surface en verre qui portent des éléments codants par phénomène de
diffraction holographique. Sur ces cylindres sont fixés des oligonucléotides complémentaires
de chacun des Illumicode des 384 SNP, eux-mêmes apportés par les LSO. Les fragments
d’ADN double-brin marqués par la cyanine 3 ou 5 et amplifiés à l’étape précédente, sont
transférés dans une chambre de lecture, par une liaison biotine/ streptavidine -bille
paramagnétique, et hybridés aux différents micro-cylindres alignés sur une plaque (VBP,
Veracode Bead Plate) (Figure 2). Les signaux de fluorescence des cyanines à la surface des
cylindres sont lus par une caméra CCD et le signal électrique sortant est associé au locus du
SNP par le codage holographique de chaque micro-cylindre. Il existe 30 cylindres pour un
LSO, donc pour un SNP. Ainsi chaque locus est testé plusieurs fois, en moyenne 15 à 18 fois,
et cette redondance optimise le rapport signal sur bruit. La taille microscopique et le codage
holographique de ces cylindres permettent virtuellement un multiplexage illimité.

50
Figure 1. Etapes de la réaction de séquençage par hybridation spécifique d’allèle suivie d’une
extension et ligation puis d’une amplification avec marquage par fluorochrome.

Figure 2. Technologie VeraCode® permettant la lecture et le codage des génotypes


(signal fluorescent) pour chaque SNP dont l’identification est elle-même codée sur un
micro-cylindre de silice.

51
Il existe de nombreux contrôles de la qualité des différentes étapes du séquençage
BeadXpress®. Ces différents contrôles vérifient l’absence d’hybridation aspécifique des
oligonucléotides, le rendement de la PCR en fonction du pourcentage de GC, l’absence
d’interférence liée au sexe du patient. Un contrôle teste la réaction d’extension-ligation sur la
distance entre l’ASO et le LSO sur 15 pb, un autre vérifie l’hybridation des amorces ayant le
Tm le plus élevé. Enfin, il existe des contrôles de l’hybridation des produits amplifiés sur les
micro-cylindres, de la lecture des signaux cyanine 3 et cyanine 5 et de la lecture du code barre
holographique des micro-cylindres.

IV.2.5. Interprétation des génotypes

Le traitement des informations issues des génotypages a été réalisé à l’aide du logiciel
Genome Studio®, Illumina. Ce logiciel permet l’association des différentes données (Figure 3)
:

– Le codage holographique des micro-cylindres et l’identification du SNP par son numéro


rs de la base dbSNP du NCBI.
– Les signaux de fluorescence Cy3/Cy5 et les génotypes correspondants homozygote
commun, hétérozygote ou homozygote variant.
– L’identification des patients pour chaque puits de la plaque de 96 puits.

Ce traitement des données a été réalisé par un ingénieur de notre équipe, M. Sofiane
Aitouferoukh. Sur la population de nos 65 échantillons de patients, qui présentent trois
génotypes possibles, le logiciel Genome Studio® va automatiquement déterminer trois
clusters de population selon leur génotype. Un score de qualité est calculé pour chaque
génotype, donnant la mesure de la plus ou moins bonne répartition d’un génotype donné au
sein des trois clusters, c’est le score GenCall variant de 0 à 1. Si le GenCall est inférieur à
0,15 le génotype est exclu car considéré trop éloigné du centre du cluster. Une évaluation de
la qualité des échantillons d’ADN est faite par le CallRate qui définit le pourcentage de SNP
pour un échantillon donné qui ont obtenu un score GenCall supérieur à la limite acceptable (>
0,15). En théorie le CallRate attendu pour des échantillons d’ADN humain de bonne qualité
est supérieur à 99 %. Le CallRate peut être diminué en cas de perte d’hétérozygotie ou de
variation du nombre de copies de l’échantillon d’ADN génomique. Sur notre population
génotypée, en excluant 10 SNP qui ne donnent aucun résultat quel que soit l’échantillon, le
CallRate est de 97.4 %, pour les 374 SNP restants, c’est à dire qu’ils ont tous eu un GenCall
supérieur à la limite acceptable, c’est à dire que leur répartition en trois clusters a été complète

52
(Figure 4). Enfin, le score CallFrequency détermine pour chaque SNP, le pourcentage
d’échantillons donnant un résultat valide.

Figure 3. Analyse des génotypes avec le logiciel Genome Studio permettant


l’association des données : génotypes, identification des patients,
identification des SNP.

Figure 4. Exemple de répartition des trois génotypes possibles d’un SNP


(rs2308321) pour les 65 patients génotypés.

53
IV.3. Analyse statistique des résultats de la SNP Chip 384

L’analyse statistique a eu pour but de rechercher une différence de distribution des génotypes
des 384 SNP entre les différentes catégories clinico-biologiques des 65 patients. Le test exact
de Fisher a été utilisé pour comparer deux à deux ces groupes cliniques à la recherche du rejet
de l’hypothèse d’indépendance dans la répartition des génotypes :
– SMD primaires versus SMD secondaires
– Score pronostique IPSS élevé versus IPSS bas
– Cytogénétique normale versus cytogénétique anormale
– Caryotype complexe versus non complexe
– Anomalies du chromosome 7 versus autres caryotypes
– Délétion 5q isolée versus autres caryotypes
– Excès de cellules blastiques au diagnostic versus absence d’excès
– LAM versus SMD
– SMD de type ARS versus autres diagnostics

Pour effectuer ce test de Fisher 384 fois pour les 65 patients répartis entre ces neuf catégories,
un algorithme codé en langage bioinformatique R a été développé par un chercheur de notre
équipe, le Dr Audrey Laroche. Les significativités obtenues par les p-value dérivées de ces
tests multiples ont été ajustées par la correction de Benjamini et Hochberg afin de corriger le
taux de faux positifs, FDR (False Discovery Rate), pour chaque SNP (68). Un risque α de 5%
après correction a été retenu comme seuil de significativité.

IV.4. Cohorte de validation

IV.4.1. Patients

Une deuxième cohorte de patients, représentant le set de validation, a été sélectionnée selon
les mêmes critères d’inclusion que pour la première cohorte. Cette cohorte de validation
compte 45 patients à ce jour, 33 pris en charge à l’Institut Bergonié, Bordeaux, 5 ayant
consulté à l’Institut Gustave Roussy, Villejuif, et 7 pris en charge au CHU de Bordeaux
(Hôpital du Haut-Lévêque). Cette seconde population de 45 patients se répartit en 22 patients
avec SMD primaires et 23 avec SMD/LA secondaires et leur caractères clinico-biologiques
sont décrits dans le tableau IX.

54
Tableau IX. Caractéristiques cliniques et biologiques des 45 patients
de la cohorte de validation (SMD primaires n=22 et secondaires n=23).

Total n=45 Primaires Secondaires


(%) n=22 (%) n=23 (%)
Age au diagnostic
Age médian 71 73 69
(amplitude) (48 – 89) (48 – 61) (55 – 89)
Sexe
Homme 24 (47) 11 (50) 13 (57)
Femme 21 (53) 11 (50) 10 (43)
Diagnostic
CRDU/ CRDM 15 (33) 8 (36) 7 (30)
AREB I 8 (18) 4 (18) 4 (17)
AREB II 8 (18) 3 (14) 5 (22)
LAM 9 (20) 2 (9) 7 (30)
Syndrome 5q- 1 (2) 1 (4) 0
ARS 2 (4) 2 (9) 0
LMMC (forme frontière SMD) 2 (4) 2 (9) 0
Cytogénétique
Favorable 22 (59) 14 (88) 8 (38)
Normal 17 (46) 11 (67) 6 (29)
del (5q) isolée 1 (3) 1 (6) 0
del (20q) 1 (3) 1 (6) 0
Y- 3 (8) 1 (6) 2 (10)
Défavorable 10 (27) 0 10 (48)
Anomalies du 7 3 (8) 0 3 (14)
Complexe 7 (19) 0 7 (33)
Intermédiaire 5 (14) 2 (12) 3 (14)
Score IPSS
Bas risque 24 (56) 15 (75) 9 (39)
Faible 16 (37) 12 (60) 4 (17)
Intermédiaire 1 8 (19) 3 (15) 5 (22)
Haut risque 19 (44) 5 (25) 14 (61)
Intermédiaire 2 8 (19) 3 (15) 5 (22)
Elevé 11 (26) 2 (10) 9 (39)
CRDU : Cytopénie Réfractaire avec Dysplasie Unilignée, CRDM : Cytopénies Réfractaires avec Dysplasie
Multilignée, AREB I : Anémie Réfractaire avec Excès de Blastes de type I (5 à 10%), AREB II : Anémie Réfractaire
avec Excès de Blastes de type II (10 à 20%), LAM : Leucémie Aigüe Myéloïde, ARS : Anémie Réfractaire avec
Sidéroblastes. Score IPSS : International Prognostic Scoring System, selon Greenberg et al. Blood, 1997 (52). 
Les patients appartenant à plusieurs catégories sont comptabilisés plusieurs fois, certains patients n’ont pas eu
d’examen cytogénétique.

55
Parmi les 23 SMD/LA secondaires, les cancers primitifs sont les suivants (Tableau X) :

Tableau X. Cancers primitifs des 23 cas de SMD/LA secondaires de la seconde cohorte.


Cancers primitifs Nombre n=23
Lymphome non Hodgkinien B (LNHB) 7
Maladie de Hodgkin 1
Leucémie Lymphoïde Chronique (LLC) 3
Cancer du sein 2
Adénocarcinome hépatique 1
Adénocarcinome colique 2
Cancer bronchique à petites cellules 1
Sarcomes (léïomyosarcome, sarcome indifférencié et 3
liposarcome)
Cancers épidermoïdes (langue et origine indéterminée) 2
Mélanome 1

Le délai moyen de survenue du SMD après le début du traitement par radio- et/ou
chimiothérapie était de 5 ans et variait de 4 mois à 16 ans. La majorité des patients ont
bénéficié d’une polychimiothérapie et 43% ont reçu en plus de la radiothérapie. Ces patients
ont reçu en moyenne trois classes d’agents cytotoxiques différents, y compris ceux avec
plusieurs lignes de traitements, et au maximum cinq classes d’agents cytotoxiques différents.
La répartition des différentes classes de traitements cytotoxiques parmi les 21 patients est la
suivante (Tableau XI) :

Tableau XI. Fréquences des différentes classes de traitements cytotoxiques reçus parmi les
23 cas de SMD/LA secondaires de la deuxième cohorte.
Classe de traitement cytotoxique reçu Nombre de patients, n=23 (%)
Agents alkylants 15 (65)
Agents Inhibiteurs de topoisomérases II 13 (57)
Dérivés du platine 3 (13)
Poisons du fuseau 8 (35)
Anti-métabolites 6 (26)
Radiothérapie 10 (43)
Radio-isotope anti-CD20 3 (13)
Taxanes 1 (4)
 Les patients ayant reçu plus d’une classe thérapeutique sont comptabilisés
plusieurs fois.

IV.4.2. Génotypage des SNP par pyroséquençage

Les deux SNP identifiés sur la première cohorte ont été retenus et recherchés par
pyroséquençage sur les échantillons du set de validation (deuxième cohorte de patients). Nous

56
les nommerons SNP 1 et SNP 2. Le pyroséquençage a été réalisé au sein de notre laboratoire
sur l’appareil Pyromark® Q96 ID de Qiagen.

La technologie du pyroséquençage repose sur le principe d’un séquençage par synthèse. La


matrice génomique utilisée est un ADN simple brin. Pour cela une réaction de PCR amplifiant
la zone d’intérêt est réalisée avec un couple d’amorces dont une est biotinylée. La séparation
des fragments est ensuite effectuée sur la station Pyromark Q96 Vacuum Workstation par des
bains de dénaturation et lavage du brin d’ADN amplifié et capturé par une solution de billes
recouvertes de streptavidine.

Les amorces utilisées pour le pyroséquençage des SNP 1 et SNP 2 du gène d’intérêt sont :

- SNP1 sens CCCCCTGTCTTCCAGGTCC


- SNP1 antisens GCTGCTGCAGACCACTCTGTG
- SNP2 sens TTGACCCCAAAGACCTCGTTGT
- SNP2 antisens CCCTGCCAGACCTGAGCT

La réaction de pyroséquençage utilise un primer de séquence qui s’hybride à l’ADN simple


brin à séquencer. Une incubation avec les enzymes, ADN polymérase, ATP sulfurylase,
luciférase et apyrase et les substrats, APS (Adénosine 5’-Phosphosulfate) et luciférine
s’ensuit. Un premier dNTP est ajouté à la réaction. S’il est complémentaire à la matrice ADN,
l’ADN polymérase catalyse son incorporation à la suite du primer de séquençage, libérant un
pyrophosphate PPi. Chaque incorporation de dNTP s’accompagne d’une libération en
quantité équimolaire de PPi (Figure 5). En présence d’APS, l’ATP sulfurylase convertit
chaque PPi en ATP. Cet ATP est utilisé par la luciférase pour convertir la luciférine en
oxyluciférine qui émet un signal lumineux proportionnel au taux d’ATP utilisé. La lumière
émise est détectée par une caméra CCD et transcrite en un pic sur le tracé du pyrogramme. La
hauteur de chaque pic est ainsi proportionnelle au nombre de nucléotides incorporés.
L’apyrase quant à elle dégrade continuellement les dNTP non incorporés et l’ATP. Quand la
dégradation est terminée, un second dNTP est ajoutée à la réaction. L’addition des dNTP est
ainsi réalisée de manière séquentielle, dans un ordre déterminée par la séquence à analyser. Le
brin d’ADN complémentaire de la matrice est ainsi synthétiser et la séquence nucléotidique,
portant la variation de séquence SNP, déterminée sur les signaux de pics du tracé du
pyrogramme.

57
Figure 5. Réaction de pyroséquençage et interprétation d’un pyrogramme.

IV.4.3. Analyse statistique des génotypes de la cohorte de validation et vérification


des équilibres de Hardy-Weinberg

L’analyse de la distribution des génotypes obtenus par pyroséquençage dans la population de


45 patients du set de validation a été réalisée par un test exact de Fisher entre les groupes
primaire et secondaire de SMD, à l’aide du logiciel en ligne GraphPad et son application
QuickCalcs.

La vérification du respect de l’équilibre de Hardy Weinberg pour s’affranchir d’une déviation


dans la distribution du polymorphisme au sein de chaque population étudiée a été réalisé par
le calculateur de Michael H. Court’s, Tufts university, disponible en ligne :
http://www.tufts.edu/~mcourt01/Documents/Court lab - HW calculator.xls.

58
V.1. Résultats des génotypages de la SNP Chip 384 sur la cohorte de 65
patients

Les 65 échantillons des patients ont été génotypés avec succès pour 374 SNP sur les 384
testés. L’analyse d’associations par les tests exacts de Fisher retrouve une répartition
dépendante du caractère primaire ou secondaire des SMD pour deux polymorphismes:
rs2308321 et rs2308327 du gène de réparation MGMT (MéthylGuanine MéthylTransférase).
Ces deux SNP sont en effet associés de manière très significative au groupe de patients
atteints de SMD secondaire par rapport au groupe SMD primaire, après un test exact de Fisher
montrant une significativité p = 4,77.10-5. Après correction des tests multiples effectués 384
fois et en conservant un taux de faux positifs (FDR) de 5 %, la correction de Benjamini et
Hochberg a montré une significativité de cette association avec p = 0,009. La répartition des
allèles communs et variants des SNP respectent l’équilibre de Hardy-Weinberg dans les deux
groupes primaire et secondaire de SMD. Ces deux SNP sont en parfait déséquilibre de liaison,
c’est à dire qu’ils sont liés dans leur génotype et s’expriment conjointement : homozygote
commun AA/AA, hétérozygote AG/AG, homozygote variant GG/GG. La fréquence de
l’allèle mineur (MAF, Minor Allele Frequency) dans la population générale est 0,159 obtenue
à partir de la base HapMap européenne CEU accessible dans la base dbSNP du NCBI
(http://www.ncbi.nlm.nih.gov/projects/SNP/snp_ref.cgi?rs=2308321). La distribution
attendue des génotypes dans la population générale est alors : 0,690 d’homozygotes
communs, 0,301 d’hétérozygotes et 0,009 d’homozygotes variants. La distribution des
génotypes dans nos deux populations de SMD primaire et secondaire est la suivante (Figure
6) :

50

5
Nombre de patients

génotype homozygote
variant GG
25
génotype
39 1
hétérozygote AG
12
génotype homozygote
8 commun AA
0
SMD/LA primaire SMD/LA secondaire

Figure 6. Distribution des génotypes variants (AG + GG) et communs (AA) dans la
première cohorte de 44 patients avec SMD primaires et 21 avec SMD secondaires.

59
Ce tableau de contingence montre les fréquences génotypiques des populations SMD primaire
et secondaire et les fréquences attendues dans la population générale (Tableau XII) :

Tableau XII. Tableau de contingence des fréquences génotypiques des


SNP1 et 2 dans la première cohorte.
Homozygote Hétérozygote Homozygote
commun AA (%) AG (%) variant GG
SMD primaires 39 5
0 p brut = 4,7. 10-5
n = 44 (89%) (11%)
SMD secondaires 8 12 p corrigé = 0,009
1
n = 21 (38%) (62%)
Population générale
69% 30,1% 0,9%
(%)

Ces deux polymorphismes de MGMT sont deux transitions où une adénine est remplacée par
une guanine ; non synonymes, ils entrainent la substitution d’un acide aminé en région
codante du cinquième exon du gène (voir Deuxième partie de la thèse) :

– rs2308321 A/G : Ile147Val

– rs2308327 A/G : Lys178Arg

L’association entre ces SNP et le caractère secondaire des SMD est la seule relation
significative retrouvée avec les SMD secondaires. Aucune autre association significative n’a
non plus été retrouvée par les analyses statistiques de distribution des 384 génotypes des 65
patients entre :

– Score pronostique IPSS élevé versus IPSS bas


– Cytogénétique normale versus cytogénétique anormale
– Caryotype complexe versus non complexe
– Anomalies du chromosome 7 versus autres caryotypes
– Délétion 5q isolée versus autres caryotypes
– Excès de cellules blastiques au diagnostic versus absence d’excès
– LAM versus SMD
– SMD de type ARS versus autres diagnostics

Enfin, la concordance de 100 % des génotypes entre les échantillons d’ADN constitutionnel
par frottis jugal d’ADN et d’ADN supposé « tumoral » par extraction du sang, pour les 50
premiers patients de cette cohorte, indique soit une très faible proportion de cellules tumorales

60
circulantes dans le sang, soit l’absence de perte d’hétérozygotie aux loci des SNP testés. Cette
concordance montre en outre une bonne reproductibilité des résultats de la SNIP Chip 384.

V.2. Résultats des génotypages des SNP rs2308321 et rs2308327 sur la


cohorte de validation

Les deux SNP, que nous nommerons désormais SNP1 pour rs2308321 et SNP2 pour
rs2308327 pour plus de simplicité, ont été recherchés par pyroséquençage pour génotyper les
45 patients de la deuxième cohorte afin de valider cette association avec le caractère
secondaire des SMD.

La répartition des génotypes des deux SNP de MGMT est la suivante (Figure 7) :

30
Nombre de patients

génotype homozygote
2 variant GG
20 7
génotype
hétérozygote AG
10 20
16
génotype homozygote
commun AA
0
SMD/LA primaire SMD/LA secondaire

Figure 7. Distribution des génotypes variants (AG + GG) et communs


(AA) dans la seconde cohorte de 22 patients avec SMD primaires et 23
avec SMD secondaires.

L’analyse du tableau de contingence par un test exact de Fisher montre une association non
significative, p = 0,1346 entre le génotype variant AG des SNP et le caractère secondaire des
SMD (Tableau XIII).

Tableau XIII. Tableau de contingence des fréquences génotypiques des


SNP1 et 2 dans la seconde cohorte.
Homozygote Hétérozygote Homozygote
commun AA (%) AG (%) variant GG
SMD primaires 20 2
0
n = 22 (91%) (9%) p = 0,1346
SMD secondaires 16 7
0
n = 23 (70%) (30%)
Population générale
69% 30,1% 0,9%
(%)

61
La fréquence de l’allèle variant, bien que trois fois supérieure dans le groupe des SMD
secondaires par rapport au groupe des SMD primaires, ne s’écarte pas significativement de
celle attendue dans la population générale. Ces distributions respectent l’équilibre de Hardy-
Weinberg.

L’intégrité du génome est constamment compromise par des lésions de l’ADN d’origine
endogène (perte spontanée d’une base créant un site abasique, attaques de radicaux oxygénés
créant la 8-oxoguanine, désaminations, mésappariements par erreur de l’ADN polymérase
lors de la réplication, méthylations accidentelles) et d’origine exogène (dimères de
pyrimidines à la suite de radiations ultraviolettes, adduits d’hydrocarbures aromatiques tel le
benzopyrène, adduits en N7 et en O6 de la guanine ou en N3 de l’adénine par les agents
alkylants et les platines, cassures double brin par les radiations ionisantes ou les inhibiteurs de
topoisomérase) (69). L’ensemble des mécanismes de réparation intervient constamment pour
maintenir cette intégrité.

Malgré leur hétérogénéité, les SMD présentent des caractères communs tels que leur
incidence chez les sujets âgés, leurs anomalies chromosomiques et, pour les formes
secondaires, leur association avec les agents ciblant l’ADN. Cette association avec
l’endommagement de l’ADN pourrait être le point de départ de la pathogénie des SMD
apparaissant par génotoxicité cumulative et augmentation des besoins en réparation de l’ADN
avec l’âge. Les défauts des systèmes de réparation de l’ADN ont souvent été impliqués dans
les SMD. Maciejewski et al. (70) ont mesuré chez les patients atteints de SMD des taux élevés
de 8-oxoguanine, faisant supposer la formation de lésions oxydatives importantes ou un
défaut de réparation de ces lésions. Ces auteurs ont montré une prévalence significative du
polymorphisme Ser326Cys du gène OGG1 chez les patients myélodysplasiques par rapport à
des sujets témoins et cette association était la plus significative avec les stades avancés de
SMD et chez ceux avec anomalies chromosomiques. L’insuffisance de réparation et la
tolérance des lésions définissant l’instabilité génétique que l’on rencontre dans les SMD

62
résulterait en partie ici d’une dysfonction du BER (Base Excision Repair), mécanisme de
réparation par excision de base qui prend en charge les lésions d’oxydation à l’origine de la 8-
oxoguanine. Mais des dysfonctions d’autres mécanismes de réparation sont à l’origine de
dommages, depuis les cassures simple-brin résultant d’une réparation incomplète générant des
cassures double-brin à la mitose suivante puis les aberrations chromosomiques caractérisant
les SMD. D’autres études impliquent le NER (Nucleotide Excision Repair) dans la
progression des SMD, en montrant notamment une réduction de l’expression des gènes du
NER (ERCC1, ERCC3, ERCC5) dans les phases avancées de SMD et une augmentation de la
radiosensibilité aux rayons X par rapport aux individus témoins (71).

MGMT est le seul gène intervenant dans le mécanisme de réparation par réversion directe. Il
code une transférase qui prend en charge la réparation des adduits méthylés sur l’O6 de la
guanine (Voir Deuxième partie de la thèse : Généralités). La lésion O6-meG est fréquente et
induite de manière endogène ou de manière exogène par les carcinogènes méthylants de
l’environnement et les cytotoxiques alkylants. Une réparation insuffisante des guanines
méthylées peut induire une activation oncogénique par des mutations G>A, des cassures
chromosomiques et des réarrangements, conduisant normalement à l’apoptose de la cellule. Il
a été montré que les tumeurs n’exprimant pas la MGMT présentaient des taux élevés de
mutations G>A des gènes RAS et TP53 conduisant à l’oncogenèse (72, 73). Un autre
argument en faveur du rôle oncogénique de la suppression de l’activité de la MGMT est que
plus de 30 % des tumeurs colorectales, cérébrales et de la sphère ORL présentent une
extinction épigénétique de l’expression de la MGMT par hyperméthylation de son promoteur
(74). Ces cassures offrent les possibilités de recombinaisons homologues et d’échanges de
chromatide aboutissant aux remaniements chromosomiques (75, 76). Ces altérations peuvent
dépasser les capacités réparatrices des systèmes de réparation de l’ADN, spécialement s’il
existe une faiblesse intrinsèque de ces systèmes et/ou une augmentation des besoins en
réparation. Des changements minimes dans la capacité de réparation par la MGMT pourraient
être associés à un risque augmenté de SMD/LA, particulièrement suite à une exposition à des
carcinogènes. L’association identifiée entre les deux variants polymorphiques du gène
MGMT et le groupe de SMD/LA secondaires appuie cette hypothèse.

Des études cas/témoins ont recherché le risque de cancer associé aux différents
polymorphismes de MGMT. De par le rôle de la MGMT dans la réparation de l’ADN et la
protection contre les événements oncogéniques, de nombreuses études ont recherché des
variations de l’incidence des cancers en fonction de l’expression ou des polymorphismes de
MGMT. Kaur et al. (77) ont montré chez 139 sujets caucasiens porteurs d’un cancer du

63
poumon, toutes histologies confondues, et un nombre de sujets contrôles identique, une
association faiblement significative entre le variant Ile143Val du gène MGMT chez les
patients atteints d’un cancer du poumon (OR = 2,1, IC95% = 1,01-4,7, p = 0,047) ; ce risque
n’était pas retrouvé lorsque l’analyse portait uniquement sur les sujets fumeurs. Bigler et al.
(78) ont recherché un rôle éventuel des polymorphismes Ile143Val et Leu84Phe (rs12917)
dans la cancérogenèse colorectale en génotypant 694 patients porteurs de polypes colorectaux
et 601 sujets contrôles ; ils n’ont pas observé d’association significative. De nombreuses
autres études ont porté sur le risque de cancer de l’endomètre, de cancer du sein, de carcinome
épidermoïde buccal, de cancer gastrique, de mélanome, de gliome et n’ont pas retrouvé de
lien significatif entre ces polymorphismes de la MGMT et l’augmentation du risque de cancer
(79). Aucune étude n’a été publiée sur le risque de leucémie et SMD secondaire en fonction
des génotypes variants de la MGMT.

L’objectif de ce volet de l’étude, complémentaire à l’identification d’un marqueur génétique


associé aux syndromes myélodysplasiques secondaires, a été de rechercher la valeur
prédictive associée à la présence des allèles variants de MGMT pour déterminer le risque
relatif de SMD/LA secondaires. Pour cela, il était nécessaire de comparer la fréquence de
l’allèle variant chez des patients ayant reçu le même traitement cytotoxique et ayant
développé ou non un SMD/LA secondaire, réalisant une étude cas - témoins rétrospective.

La possibilité de prédire le risque de leucémie secondaire serait un atout majeur dans la prise
en charge des patients devant recevoir une chimiothérapie ciblant l’ADN et pourrait
améliorer le rapport bénéfice / risque des chimiothérapies prescrites pour le cancer primitif.
Nous nous sommes intéressés aux patientes traitées pour cancer du sein parce qu’il s’agit d’un
cancer fréquent, que les patientes présentent des survies prolongées permettant le
développement de LA secondaires, que les protocoles de chimiothérapie ciblant l’ADN sont
standardisés, et qu’il existe une alternative thérapeutique aux anthracyclines par une réduction
de leur dose et/ou leur remplacement par un taxane.

Si, parmi les patientes traitées pour cancer du sein avec LA secondaire, la fréquence de
l’allèle variant suivait la distribution observée dans le groupe SMD/LA secondaires de la
première cohorte de 65 patients, à savoir 60 % de génotypes variants ; et si une centaine de
patientes traitées pour cancer du sein sans LA secondaire présentaient une distribution

64
génotypique identique à celle de la population générale, alors le risque relatif calculé serait
significativement en faveur du caractère prédictif du polymorphisme comme facteur de risque
de développer une LA secondaire. Ces résultats attendus sont représentés dans le tableau XIV,
et le risque relatif calculé serait alors de 5,31, rapport des taux de la maladie chez les
individus exposés et non exposés.

Tableau XIV. Résultats attendus des génotypages des deux polymorphismes pour les 6
patientes traitées pour un cancer du sein et ayant développé ou non une LA secondaire
Homozygote Homozygote
Hétérozygote
commun variant
Cohorte étudiée de 65
39 5 0 p = 4,7.10-5
patients : SMD/LA primaires
SMD/LA secondaires 8 12 1 p = 0,009 (corrigé)
Cohorte Sein avec LA : 6 cas
2 4
génotypes attendus : p attendu = 0,04
Cohorte Sein sans LA : 100
75 25
cas génotypes attendus :

III.1. Patientes

Dans l’essai de phase III PACS01 de la FNCLCC randomisant les patientes traitées pour un
cancer du sein opérable, avec envahissement ganglionnaire, entre chimiothérapie adjuvante
par six cycles de FEC (5-fluoro-uracile, épirubicine, cyclophosphamide) ou trois cycles de
FEC suivis de trois cycles de docétaxel, six cas de LA secondaires ont été enregistrés sur un
suivi de 8 ans à ce jour (80). Quatre cas sont survenus dans le bras des 995 patientes ayant
reçu six cycles de FEC et deux cas parmi les 1001 patientes ayant reçu 3 cycles de FEC et 3
cycles de docétaxel. La réduction de la dose cumulée d’épirubicine (600 mg/m2 à 300 mg/m2)
pourrait avoir ainsi réduit le risque de LA.

Dans le cadre d’un appel à projets de recherche pour la valorisation des bases PACS par le
groupe Unicancer, anciennement FNCLCC, nous avons proposé de génotyper les six patientes
ayant développé une LA de l’essai PACS01 pour les deux polymorphismes de MGMT
identifiés dans notre cohorte de 65 patients SMD. Un avis consultatif a été demandé au
Comité de Protection des Personnes Sud-Ouest et Outre-Mer III au sujet de l’extension de la
recherche utilisant les échantillons biologiques conservés des 1999 patientes atteintes de
cancer du sein incluses entre 1997 et 2000. L’avis du CPP (référence CPP N°2012/04) a

65
autorisé l’utilisation de ces échantillons devant l’absence de changement de finalité de cette
extension de recherche et son absence de conséquence sur la prise en charge ultérieure des six
patientes, dont 4 sont décédées à ce jour. En retour le groupe de travail de valorisation des
bases PACS a accepté notre projet.

Le groupe de patientes n’ayant pas développé de LA secondaire était constitué d’une cohorte
indépendante de l’essai PACS01 de 188 patientes dont le génotypage avait déjà été réalisé sur
la puce SNP Chip 384, traitées pour cancer du sein dans l’essai de l’EORTC 10994. Un avis
favorable du CPP Sud-Ouest avait été obtenu concernant l’utilisation des prélèvements
biologiques (référence CPP N°2011/08) de ces patientes.

III.2. Matériels

Pour cinq patientes sur les six ayant développé une LA de l’essai PACS01, du matériel
biopsique a été récupéré. Il s’agissait de biopsies tumorales ou saines, du tissu mammaire ou
ganglionnaire, conservées en paraffine. Les blocs de paraffine ont été reçus du centre Paul
Papin (Angers), de la clinique Saint-Luc (Bruxelles), du CH de Bourg-en-Bresse, du CHU de
Nantes et du CH de Liège (Belgique).

L’extraction de l’ADN a été réalisée à partir de 8 à 10 copeaux des zones cerclées des blocs
en zone tumorale et/ou saine. Le déparaffinage a été fait par lavages au toluène et à l’éthanol
absolu. L’extraction d’ADN a été réalisée selon les indications du kit QIAGEN® QIAamp
DNA FFPE Tissue. Ces extractions ont permis de recueillir 10 µg d’ADN de bonne qualité
pour 8 à 10 copeaux par bloc.

III.3. Méthodes

Le génotypage des deux SNP rs2308321 (SNP1) et rs2308327 (SNP2) a été réalisé par
pyroséquençage avec les amorces d’amplification et selon la technique décrite précédemment
(voir Première partie A : IV.4.2.).

Le génotypage des deux polymorphismes retrouve un génotype homozygote commun AA


pour les deux SNP pour les cinq patientes, que ce soit sur ADN tumoral ou ADN sain. Nous
n’avons donc pas retrouvé d’association du génotype variant avec le développement d’une LA
secondaire.

66
L’identification de deux polymorphismes d’un gène de réparation de l’ADN associés très
significativement (p = 0,009 après correction pour tests multiples) au caractère secondaire des
myélodysplasies est intéressante en raison des interrogations mécanistiques quant à la
leucémogenèse de ces pathologies qu’elle soulève. En effet, une réparation insuffisante des
guanines méthylées par la MGMT peut induire une activation oncogénique par des mutations
G>A, des cassures chromosomiques et des réarrangements, conduisant normalement à
l’apoptose de la cellule (73, 81). Les deux polymorphismes identifiés lors de cette étude sont
situés en région codante du gène, sur le cinquième et dernier exon, et sont non-synonymes,
entraînant une substitution d’acide aminé. Ainsi, ces variations pourraient avoir un effet sur la
fonction de la protéine MGMT. Il est légitime de supposer qu’une variation de séquence de
cette transférase puisse entraîner une dysfonction, même minime, dans la réparation des
adduits en O6G et conduire à la persistance d’anomalies génétiques et à la création de
remaniements chromosomiques secondaires dont les délétions et les pertes chromosomiques
qui sont très fréquemment retrouvées dans les syndromes myélodysplasiques.

Cependant, cette association unique et significative parmi les 384 SNP génotypés n’a pas été
confirmée de manière significative sur la deuxième cohorte de patients, bien que l’on observe
une tendance vers cette association avec 30 % de génotypes variants parmi les SMD
secondaires contre 9 % parmi les SMD primaires. Alors même que les tailles des deux
cohortes sont du même ordre de grandeur (65 et 45), avec 21 cas de SMD secondaires dans la
première et 23 cas dans la seconde, l’association très significative retrouvée dans la première
cohorte (p = 0 ,009) aurait dû être mise en évidence dans la seconde. La sélection des patients
a été réalisée de manière identique, SMD primaires ou secondaires, au diagnostic ou dans le
suivi ; les centres hospitaliers participants sont les mêmes à l’exception de l’Institut Gustave-
Roussy pour cinq patients dans la deuxième cohorte. Enfin, l’extraction d’ADN a été réalisée
dans les mêmes conditions, et aucun problème technique n’est survenu dans l’étape de
pyroséquençage pour la deuxième cohorte. Le respect de l’équilibre de Hardy-Weinberg dans
la répartition des génotypes a permis d’éliminer un biais dans la sélection des patients, la
qualité de l’échantillon d’ADN ou le séquençage lui-même.

Une explication possible à cette absence du résultat attendu est à rechercher dans
l’hétérogénéité possible des deux populations, les SMD étant à l’origine un groupe hétérogène
d’hémopathies sur les plans clinique et biologique. Si l’on se penche sur les différents sous-
types de la classification diagnostique des SMD (Figure 8), on n’observe pas d’écart

67
distinguant les deux populations. Les formes sans excès de blastes (RCMD et RCUD)
représentent la même proportion de patients, de même que les AREB I et II et les phases
aiguës de LAM. Les entités particulières, ARS et syndrome 5q-, de même que les formes
frontières LMMC, sont également représentées dans les mêmes proportions.

LMMC 4
2

ARS 4
6

Synd. 5q- 2
8

LAM 20
23

AREB II 18
12

AREB I 18 2ème cohorte (n=45)


14

CRDU/CRDM 33 1ere cohorte (n=65)


35

0 5 10 15 20 25 30 35 40
Fréquence des sous-types de SMD
dans les deux populations (%)

Figure 8. Répartition et fréquence des sous-types diagnostiques de SMD dans les


deux cohortes étudiées.

En distinguant les différents traitements cytotoxiques reçus par les patients avec SMD
secondaires dans les deux populations (Figure 9), alors même que chaque patient a reçu
plusieurs classes de chimiothérapie différente et souvent plusieurs lignes de traitement, les
fréquences des patients ayant reçus des agents alkylants, des inhibiteurs de topoisomérase II
ou des poisons du fuseau sont équivalentes dans les deux groupes. Par contre, les patients
ayant reçus des dérivés du platine sont deux fois plus fréquents dans la première cohorte que
dans la deuxième. Cela pourrait être une explication possible à la différence de distribution
des génotypes, la MGMT pouvant être impliquée dans la réparation des adduits de platine.
Cependant, le détail des génotypes de ces patients, que ce soit ceux ayant reçu un platine ou
ceux ayant reçu anthracycline, alkylant ou poison du fuseau, montre une distribution du
génotype variant identique à celle observée dans les deux groupes de SMD secondaires, à
savoir environ 60 % de génotypes variants dans les SMD secondaires de la première cohorte
et 30 % chez ceux de la seconde cohorte, quel que soit le traitement reçu. Cette différence
dans la fréquence des traitements aux dérivés du platine ne semble donc pas suffisante pour

68
expliquer la non-significativité de la présence du polymorphisme variant dans les SMD
secondaires de la deuxième cohorte.

taxanes 4
0
radioisotope 13
0
radiothérapie 43
29
anti-métabolite 26
57
dérivés du platine 13
38
poison du fuseau 35 2eme cohorte (n=23)
29
inh. topoisomérase II 57
43
65 1ere cohorte (n=21)
alkylant 67
0 20 40 60 80
Fréquence des traitements cytotoxiques
antérieurs des SMD secondaires¹ (%)

Figure 9. Répartition et fréquence des traitements reçus par les patients avec SMD
secondaire dans les deux cohortes étudiées. ¹ Les patients appartenant à plusieurs
catégories sont comptabilisés plusieurs fois.

Enfin, si l’on compare les résultats des caryotypes médullaires dans les deux cohortes, on
n’observe pas d’hétérogénéité dans la fréquence des anomalies cytogénétiques observées au
diagnostic (Figures 10 et 11).

normal 49
49

anomalies du 7 11 SMD primaires


12
et secondaires
complexe 20
16
2ème cohorte (n=35
del 5q isolée 3 caryotypes réalisés)
9

autres 20 1ère cohorte (n=15


16
caryotypes réalisés)
0 20 40 60
Fréquences des anomalies cytogénétiques
des deux populations¹ (%)

Figure 10. Répartition et fréquence des anomalies cytogénétiques au


diagnostic dans les deux cohortes étudiées. ¹ Les patients appartenant à
plusieurs catégories sont comptabilisés plusieurs fois.

69
normal 30
47
anomalies du 5 et/ou 30
7 33
SMD secondaires
complexe 35
27
2ème cohorte (n=20
tranlocations / 25 caryotypes réalisés)
inversions 27

autres 5 1ère cohorte (n=15


7 caryotypes réalisés)
0 20 40 60
Fréquences des anomalies cytogénétiques
des SMD secondaires des deux populations¹ (%)

Figure 11. Répartition et fréquence des anomalies cytogénétiques au diagnostic


dans les groupes de SMD secondaires des deux cohortes étudiées. ¹ Les patients
appartenant à plusieurs catégories sont comptabilisés plusieurs fois.

Cette association très significative d’un variant polymorphique du gène MGMT avec les SMD
secondaires (p = 0,009) sans aucune autre association retrouvée, ni avec les caractéristiques
cytogénétiques, ni avec les formes cliniques et biologiques de SMD, est à retenir mais reste à
confirmer sur une deuxième population dont le recrutement des patients continue à ce jour. Il
est possible qu’une association de plusieurs polymorphismes aurait une valeur significative
plus forte, comme cela a été montré dans des profils associant des polymorphismes de
plusieurs gènes de réparation (voir II.2. et (66)) ou de plusieurs gènes du métabolisme des
xénobiotiques (82), ce qui soulève des mécanismes possibles d’accumulation des différents
variants aux conséquences fonctionnelles suffisantes pour augmenter le risque de SMD
secondaire. Cela est d’autant plus vrai que les polymorphismes, à la différence des mutations
inactivatrices, peuvent entraîner une réduction uniquement faible de la capacité fonctionnelle
de la protéine issue du gène variant.

L’étude épidémiologique recherchant la valeur prédictive des polymorphismes identifiés n’a


pas permis d’établir un risque relatif lié à la présence des SNP. On peut supposer que le rôle
de MGMT dans la réparation des lésions alkylées de l’ADN rend son implication plus forte
dans les SMD secondaires de présentation et de génétique appartenant au sous-type
« alkylant » que dans les LA secondaires du sous-type « inhibiteurs de topoisomérase II » ;
même si cette distinction reste théorique, les patientes ayant en effet reçu les deux classes
d’agents cytotoxiques. Cependant, chez les cinq patientes avec cancer du sein ayant
développé une leucémie aiguë et non un SMD, à la suite d’un traitement par FEC ou FEC plus
docétaxel, la responsabilité des anthracyclines pourrait être plus grande que celle du

70
cyclophosphamide, même si les doses cumulées de chacune des deux classes augmente le
risque de LA secondaire (13).

Ici encore, la pénétrance de ces leucémies secondaires serait déterminée par des modifications
génétiques additionnelles, par une combinaison entre différents variants alléliques de
différents gènes et non pas uniquement par la variation allélique d’un seul gène. Il serait
intéressant d’identifier d’autres polymorphismes significativement associés aux SMD/LA
secondaires en se focalisant, à l’intérieur même du panel des 384 SNP génotypés, sur les
polymorphismes touchant uniquement les 73 gènes de réparation présents sur la SNIP Chip
384. La susceptibilité aux cancers et leucémies apparaît plus comme un trait polygénique avec
des interactions complexes entre variations génétiques et exposition environnementale ou
endogène (83). En outre, il serait intéressant d’étudier la combinaison d’un variant allélique
avec d’autres facteurs de risque non génétiques, tels que l’utilisation de facteurs de croissance
granulocytaire, la dose cumulée d’épirubicine, l’âge.

La susceptibilité individuelle à développer un cancer varie largement entre les individus et


repose sur l’ensemble des contributions de nombreuses variations ayant des conséquences
fonctionnelles, et présentes dans différentes voies moléculaires, parmi lesquelles la réparation
de l’ADN. À la différence des mutations inactivatrices, l’impact d’une variation
polymorphique d’un gène sur le risque de cancer est faible. Ce risque peut être augmenté en
cas d’altération de la capacité fonctionnelle d’une voie moléculaire, telle que la réparation de
l’ADN, reposant sur l’accumulation des impacts fonctionnels de l’ensemble des variants
génétiques impliqués dans cette voie. L’impact fonctionnel des deux polymorphismes
identifiés est étudié dans la seconde partie de la thèse. Il faut cependant savoir qu’un seul type
d’exposition produit différents types de lésions à l’ADN, que certaines de ces lésions sont
reconnues par plusieurs mécanismes de réparation de l’ADN et enfin que plusieurs protéines
de réparation interviennent dans chaque type de mécanisme de réparation.

71
I.1. Fonction

La MGMT est l’unique acteur du mécanisme de réparation par réversion directe. C’est une
transférase qui prend en charge les adduits méthyles sur l’oxygène en position 6 de la
guanine, en transférant de manière covalente ce groupement méthyle sur un résidu interne, la
cystéine 145 de MGMT (Figure 12). Cette réaction est stœchiométrique, une molécule de
MGMT prenant en charge une lésion O6-meG. La MGMT n’agit qu’une fois, sa forme alkylée
est ensuite dégradée par le système du protéasome.

Figure 12. Réaction de réparation directe d’une lésion de l’ADN par la MGMT,
qui transfère le groupement méthyle de l’O6-meG sur la fonction thiol d’un
résidu cystéine interne, restituant une guanine non méthylée (69).

L’oxygène en position 6 de la guanine est le point d’attaque de nombreux carcinogènes et


agents alkylants, comme le témozolomide, qui forme une O6-méthylguanine et les nitroso-
urées comme la carmustine (BCNU), qui forment une O6-chloroéthylguanine. Les agents
alkylants sont des composés électrophiles qui réagissent avec les groupements nucléophiles
de l’ADN en leur attachant de manière covalente un groupement alkyle (méthyle ou éthyle).
Cette alkylation est directement responsable de l’effet cytotoxique de ces agents car elle
interfère avec la division cellulaire en empêchant la réplication et la transcription. Les bases
de l’ADN présentent des sites préférentiels d’alkylation qui dépendent du caractère
nucléophile du groupement alkylé et de l’agent alkylant (84). Le site d’alkylation le plus
fréquent est situé en N7 de l’adénine (60 à 80 % des cas) puis viennent les sites en O6 et N1 de

72
la guanine (10% des cas), N3, N7, N1, N6 de l’adénine et enfin, moins fréquemment, O2 et O4
de la thymine et N2 et N4 de la cytosine.

L’adduit O6-meG n’est donc pas l’un des adduits les plus abondants mais fait partie des plus
importants en terme des conséquences fonctionnelles qu’il entraîne sur la réplication et la
division cellulaire. L’alkylation en O6G génère des adduits chimiquement stables ; cette lésion
est très mutagène par mésappariement de la guanine méthylée ; elle est de plus cytotoxique
par les conséquences d’une mauvaise réparation par le système MMR (Mismatch Repair). En
effet, la persistance de la lésion O6-meG conduit à un mésappariement O6-meG:Thymine puis
à la réplication suivante, à la mutation par transition G>A. Le mésappariement O6-meG:T est
également responsable du recrutement du système de réparation MMR qui, activé de manière
inefficace contre cette lésion, réalise des cycles futiles de réparation en remplaçant la thymine
par une autre thymine pour finalement engendrer des cassures simples brins par la création de
sites abasiques. Ces cassures sont source de phénomènes d’échanges et de recombinaisons
homologues aboutissant à des remaniements chromosomiques et à l’apoptose. L’exploitation
des lésions O6-alkylguanine par les chimiothérapies à base d’agents méthylants passe donc
par une toxicité secondaire à l’intervention du MMR post-réplicatif (76). La lésion O6-
chloroéthylguanine va, elle, réaliser un pont inter-brin avec la cytosine opposée, bloquant la
réplication. La MGMT a également la capacité, mais de manière moins efficace, à réparer une
variété d’autres lésions alkylées en O6-guanine comme les adduits butyle, benzyle,
chloroéthyle, et pyridyloxobutyle ainsi que les lésions O4-méthyl-thymine (85).

La lésion O6me-G est donc une lésion mutagène et carcinogène et son rôle dans l’oncogenèse
a été démontré. Ainsi, in vivo, les souris transgéniques knock out pour le gène MGMT ont une
susceptibilité augmentée au développement de tumeurs en réponse aux carcinogènes et aux
effets toxiques des agents alkylants anti-tumoraux (86). À l’inverse, les souris transgéniques
surexprimant le gène MGMT montrent une résistance à la carcinogenèse induite par les agents
alkylants et une réduction du développement des tumeurs spontanées (87). Chez l’homme, il a
été montré que les tumeurs n’exprimant pas la MGMT présentaient des taux élevés de
mutations G>A des gènes RAS et TP53 conduisant à l’oncogenèse (72, 73). Un autre
argument en faveur du rôle oncogénique de la suppression de l’activité MGMT est que plus
de 30 % des tumeurs colorectales, cérébrales et de la sphère ORL présentent une extinction
épigénétique de l’expression MGMT par hyperméthylation de son promoteur (74).

73
I.2. Expression

La réversion directe des lésions de l’ADN par la MGMT, souvent qualifiée de « réaction
suicide », n’agit qu’une fois, son activité est donc très dépendante de la disponibilité cellulaire
en MGMT, c’est à dire du niveau de transcription du gène et de la dégradation de la protéine.

L’expression de la MGMT est ubiquitaire dans les tissus mais son niveau d’expression est très
variable d’un tissu à l’autre ; on désigne ainsi les phénotypes Mer- et Mer+ selon la faible ou
la forte expression de MGMT respectivement. L’activité de MGMT varie beaucoup entre les
différents tissus sains d’un même individu, entre les mêmes tissus de différents individus et
entre les cellules d’un même tissu. Son expression est la plus élevée dans le foie, suivi du
côlon et du poumon ; elle est relativement très faible dans les tissus nerveux et myéloïde (88).
Cette expression est principalement régulée par la méthylation des sites CpG de son
promoteur. L’îlot CpG sur MGMT s’étend sur 777 pb avec 97 sites CpG et inclut la séquence
promotrice du gène qui ne possède pas de boîte TATA ni CAAT, et une séquence régulatrice
enhancer de 59 pb située à la jonction entre le premier exon et le premier intron (72, 89)
(Figure 13).

Figure 13. Carte génomique de la région 5’ de MGMT montrant le site d’initiation de la


transcription, les sites de fixation du facteur de transcription Sp1 et l’ilôt CpG avec ses
97 sites CpG. Tiré de Weller et al., Nat Rev Neurol 2010 (90).

Esteller et al. (74) ont évalué l’hyperméthylation du promoteur de MGMT dans plus de 500
tumeurs primaires en comparaison avec leur équivalent tissulaire sain par une technique de
PCR spécifique de séquence méthylée (MSP, Methylation Specific PCR) et montré sa
corrélation avec la perte d’expression de la protéine MGMT, de son ARNm et de son activité
catalytique. Ils ont observé que l’extinction génique par hyperméthylation était fréquente dans
les gliomes, les tumeurs coliques, les lymphomes, les tumeurs ORL et les cancers du poumon
non à petites cellules (Figure 14). L’hyperméthylation du promoteur de MGMT serait un
événement précoce de l’oncogenèse car elle a été observée dans des petits adénomes coliques.

74
Figure 14. Pourcentage de tumeurs cancéreuses primaires de 23 types cellulaires
différents présentant une hyperméthylation du promoteur de MGMT. n = nombre
d’échantillons analysés. Tiré de Esteller et al. Oncogene 2004 (72).

Enfin, la méthylation du promoteur de MGMT, et donc son expression et son activité dans les
tissus tumoraux, permet de prédire la réponse aux agents alkylants. Dans les glioblastomes,
l’hyperméthylation du promoteur de MGMT est corrélée à une augmentation de la survie sans
progression et de la survie globale chez les patients traités par témozolomide et/ou
radiothérapie (91). Une autre implication possible de MGMT en clinique est la possibilité de
potentialiser l’action des traitements alkylants par l’O6-benzylguanine (O6BG). En effet, cette
dernière est structuralement proche de l’O6-méthylguanine et détourne l’activité transférase de
MGMT en réalisant un leurre ; le taux résiduel de MGMT disponible pour réparer les adduits
sur l’ADN s’en trouve alors diminué. Des stratégies de protection contre la cytotoxicité
médullaire des agents méthylants (témozolomide) ou chloroéthylants (BCNU) ont été testées
in vivo par thérapie génique. Le transfert du gène MGMT muté (P140K) sur un résidu rendant
la transférase insensible à l’action de l’O6BG dans des progéniteurs hématopoïétiques permet
de diminuer la toxicité des alkylants sur ce compartiment médullaire tout en conservant une
sensibilité accrue du compartiment tumoral aux alkylants lors de l’ajout de l’inhibiteur O6BG
(92).

L’expression de MGMT a ainsi une double responsabilité en oncogenèse, d’une part parce
qu’elle prévient la carcinogenèse en réparant les lésions mutagènes et cytotoxiques de l’ADN,
et d’autre part en thérapie anti-cancéreuse puisqu’elle limite l’efficacité des chimiothérapies
alkylantes.

75
I.3. Structure

Le gène MGMT (ID NCBI : 4255) est situé en 10q26.3 et s’étend sur plus de 170 kb d’ADN
génomique. Il contient cinq exons, les quatre derniers seulement étant codants. La séquence
promotrice s’étend sur 1,2 kb à l’extrémité 5’ du gène et inclut le premier exon et une partie
du premier intron. Elle ne présente pas de boîte TATA ni CAAT et contient des régions riches
en GC. Elle présente un promoteur minimal de 88 pb et une séquence enhancer de 59 pb
localisée à la jonction exon/intron du premier exon. Elle comporte les sites de fixation aux
facteurs de transcription Sp1 et AP-1 et également des éléments de réponse aux
glucocorticoïdes.

L’ARN messager (NM_002412.3) compte 717 nucléotides, il ne possède pas de variant


d’épissage et il est traduit en une séquence protéique de 238 acides aminés (ID
UniProtKB/Swiss-Prot : P16455). Deux codons start AUG existent sur cette séquence CCDS
(Consensus Coding Sequence), le deuxième possédant un séquence de Kozak plus forte.
L’initiation de la traduction à partir du deuxième codon start conduit à une protéine plus
courte de 31 acides aminés, soit 207 acides aminés, forme protéique la plus couramment
répertoriée.

La MGMT appartient à la superfamille des alkyl transférases qui sont très répandues dans les
espèces animales. Les analyses cristallographiques comparatives des différentes espèces du
vivant ont permis d’identifier des motifs structuraux conservés impliqués dans la
reconnaissance et la liaison à l’ADN, la reconnaissance du substrat, le mécanisme de transfert
du groupe alkyle et le détachement de l’ADN de la MGMT alkylée. Le domaine C-terminal
de la protéine (résidus 86 à 207) contient le site actif de l’activité alkyl transférase avec le
motif conservé PCHR où la Cys145 est le site accepteur d’alkyle, et le domaine de liaison à
l’ADN avec son motif HTH (helix-turn-helix) (Figure 15). La MGMT utilise le motif HTH, la
deuxième hélice ayant un rôle de reconnaissance de l’ADN, pour se lier au sillon mineur de
l’ADN. Une charnière d’asparagine (Asn-hinge) lie les domaines fonctionnels HTH et PCHR
entre eux et les stabilise par la formation de deux surenroulements serrés (Figure 16). Cette
charnière joue un rôle dans le changement conformationnel de la protéine alkylée pour son
détachement de l’ADN (93). Ce domaine C-terminal contient donc les éléments nécessaires à
la liaison à l’ADN et au transfert du groupement alkyle, la fonction du domaine N-terminal
est encore inconnue. Ce domaine N-terminal (résidus 1 à 85) possède un site de liaison pour
un atome de zinc, co-activateur de la réaction catalytique, et la suppression du domaine N-
terminal abolit l’activité du domaine C-terminal suggérant un rôle structural important du

76
domaine N-terminal dans l’orientation adéquate du domaine C-terminal pour réaliser son
activité catalytique.

Figure 15. Alignement des séquences primaires, structure secondaire (bleu : hélice α, rouge :
feuillet ), et motifs conservés de MGMT dans trois espèces (homme, bactérie E. coli et
archéobactérie P. kodakaraensis). Le site actif Cys145 est en blanc, les résidus conservés
sont marqués par un astérisque, les résidus non conservés mais similaires sont en lettres
capitales. La charnière d’asparagine fait le lien entre le motif HTH possédant les sites de
liaison à l’ADN et le site catalytique accepteur d’alkyl PCHR. Les deux encadrés rouges
signalent la position des deux SNP de notre étude : Ile143Val et Lys178Arg. Adapté de
Daniels et al., Mutat Res 2000 (94).

Figure 16. Structure cristallographique aux rayons X de MGMT. A. MGMT avant réaction. Le
domaine N-terminal est en vert, le C-terminal en jaune, le motif HTH en bleu. C145 : site actif
catalytique, N137 : début de l’Asn-Hinge, charnière de liaison entre HTH et site actif. B.
MGMT lié à l’ADN par la reconnaissance par la deuxième hélice du motif HTH du sillon
mineur de l’ADN. Tiré de Tubbs et al., DNA Repair 2007 (93).

77
I.4. Dégradation de la MGMT

La protéine MGMT ayant accepté le groupement alkyle sur un résidu interne, la cystéine 145,
est adressée par ubiquitinylation au protéasome. Il a été montré dans des lignées cellulaires
que l’ubiquitinylation de MGMT formait des complexes liant de manière covalente deux,
trois ou neuf molécules d’ubiquitine de 8,5 kDa à la protéine MGMT (22-25 kDa), signal
d’adressage au complexe protéique de dégradation, le protéasome (95). Il a été montré
également que des mutations substituant la cys145 par une phénylalanine (C145F) ou d’autres
résidus de grande taille entraînaient une altération stérique du site actif avec pour conséquence
une augmentation de l’ubiquitinylation et de la dégradation de MGMT, indépendamment du
traitement par l’O6BG (96). Un changement conformationnel de la protéine MGMT alkylée
serait le signal d’adressage à l’ubiquitinylation en augmentant la capacité de l’alkyl-MGMT à
servir de substrat à l’ubiquitine ligase. Les études cristallographiques par rayons X de la
forme alkylée et non alkylée de MGMT ont montré que la Cys145 réalise un réseau de
liaisons hydrogène fonctionnellement important entre des résidus proches : Tyr158, His146 et
Ile141. Ce réseau hydrogène est indispensable à la stabilité et à l’activité de la protéine. La
liaison de l’adduit alkyle sur la fonction thiol de la Cys145 entraîne une rupture de ce réseau
de liaisons hydrogène et un changement conformationnel résultant en l’ouverture d’une
charnière d’asparagine formée par les résidus Asn137 à Pro144 (97). Cette ouverture permet
la dissociation entre l’alkyl-MGMT et la double hélice d’ADN, et augmente sa
reconnaissance par l’ubiquitine ligase E3.

Le résidu Ile143 est adjacent au site actif Cys145 accepteur de groupement alkyle et le
polymorphisme Ile143Val pourrait affecter la fonction de MGMT. Il pourrait notamment
interférer avec sa stabilité ou sa dégradation car il prend part à la charnière asparagine qui
joue un rôle important dans le changement conformationnel, signal de l’adressage de la forme
alkylée de MGMT à l’ubiquitinylation puis à la dégradation par le protéasome. De plus, des
contacts hydrophobes qui stabilisent l’interface entre la charnière asparagine et le domaine N-
terminal de la protéine sont réalisés par les résidus Val139, Ile141, Leu142 et Ile143, ce
dernier étant le siège du polymorphisme Ile143Val (SNP1) de notre étude (97).

I.5. Polymorphismes génétiques de MGMT

Parmi les centaines de SNP identifiés dans le gène MGMT, 19 sont des SNP non synonymes
avec substitution d’acide aminé en région codante, accessibles depuis la base dbSNP du
NCBI. Parmi eux, les trois plus fréquents sont :

78
Nucléotide variant SNP ID Exon Acide aminé MAF
C2740214T rs12917 3 Leu84Phe 0,125
A2798995G rs2308321 5 Ile143Val 0,159
A2799101G rs2308327 5 Lys178Arg 0,159

MAF : Fréquence de l’allèle mineur (Minor Allele Frequency) extraite de la base


HapMap CEU de la population caucasienne. Les deux derniers SNP sont en complet
déséquilibre de liaison et exprimés conjointement.

Un résidu acide aminé est d’autant plus important pour la structure et la fonction d’une
protéine s’il est dans ou proche d’une séquence conservée au cours de l’évolution, c’est-à-dire
une séquence essentielle à la fonction de la protéine. Les variations polymorphiques situées
dans un domaine fonctionnel ont donc d’autant plus de chances d’entrainer des conséquences
sur la capacité de réparation de MGMT. La localisation de quelques SNP, dont les deux qui
nous intéressent, est représentée dans la structure tertiaire de la protéine sur la figure 17. Le
polymorphisme Ile143Val est adjacent au site actif Cys145 et à sa séquence conservée PCHR,
et il est situé sur la charnière Asn-hinge faisant jonction entre le site actif et les deux hélices
du motif HTH de liaison à l’ADN. Le polymorphisme Lys178Arg pourrait ne pas avoir de
conséquence fonctionnelle sur l’activité de MGMT car celle-ci est maintenue lorsque la
protéine est tronquée à partir du résidu 176 (98).

Figure 17. Représentation de la structure tertiaire de la protéine


MGMT avec localisation de quelques SNP dont Ile143Val et Lys178Arg.
Tiré de Bugni et al., DNA Repair 2007 (79).

79
L’implication de ces deux polymorphismes Ile143Val et Lys178Arg dans les études
d’épidémiologie moléculaire ne sera pas rediscutée ici (voir Première partie, B. Etude
épidémiologique, Introduction). Plusieurs équipes ont recherché l’impact fonctionnel de ces
variants sur les capacités de réparation de MGMT. Ma et al. (99) ont étudié des souches
bactériennes d’E. coli transfectées par le gène MGMT sauvage, variant ou double variant. À
partir d’extraits protéiques des souches bactériennes et en présence d’un oligomère d’ADN
méthylé avec des lésions O6-meG sur un site de restriction et marqué au 32
P, ils n’ont pas
observé de différence d’activité de la protéine MGMT. En outre, la survie bactérienne en
réponse au traitement alkylant par MNNG (N-méthyl-N’-nitro-N-nitrosoguanidine) était
identique avec les différentes souches sauvage et variant. Margison et al. (100) ont obtenu les
mêmes résultats sur les protéines recombinées MGMT sauvage et variantes agissant sur un
substrat d’ADN méthylé marqué au tritium. Ils n’observent pas de différence sur la cinétique
de transfert des groupements méthylés, ni sur la stabilité thermique des protéines. Par contre,
l’inactivation de MGMT par addition de PaTrin-2 (O6-4-bromothényl-guanine), un pseudo-
substrat de MGMT équivalent à l’O6BG, montre une inhibition moindre de la forme variante
Val143 par rapport à la forme commune Ile143. Dans cette même étude, les auteurs ont
également déterminé que le niveau d’expression des deux allèles, commun ou variant, chez
les patients hétérozygotes et à partir des cellules mononucléées sanguines, n’est pas le même
et présente un déséquilibre d’expression allélique parfois en faveur de l’allèle commun et
parfois en faveur de l’allèle variant. Cela supposerait que la grande variation interindividuelle
de l’activité MGMT pourrait reposer sur cette différence du taux d’ARN messager déterminée
génétiquement par le SNP. Ce déséquilibre d’expression allélique avait déjà été observé sur
du tissu pulmonaire sain où le taux d’expression de la protéine MGMT variait largement entre
les individus en liaison avec les deux allèles d’un SNP silencieux du troisième exon
(rs1803965) (101).

Les objectifs de cette seconde partie de l’étude ont été de caractériser les relations
fonctionnelles possibles entre génotype et phénotype, c’est-à-dire de rechercher les
conséquences fonctionnelles des SNP Ile143Val (SNP1) et Lys178Arg (SNP2) du gène
MGMT, identifiés dans la première partie de l’étude comme associés au caractère secondaire
des SMD/LA afin d’identifier un lien biologique explicatif entre la présence des génotypes
variants et le développement de leucémies secondaires.

80
Ces conséquences sont à rechercher au niveau :

– Structural : la présence des polymorphismes entraîne-t-elle des modifications des


structures secondaire de l’ARNm, secondaire et tertiaire de la protéine ?
– Fonctionnel : par la création de lignées stables isogéniques exprimant soit la forme
commune, soit la forme variante ou double variante de MGMT, et en recherchant des
différences au niveau de :
 La sensibilité des lignées en réponse à des agents cytotoxiques ;
 La prolifération à long terme de cultures mixtes à la recherche d’un avantage
prolifératif d’un allèle sur l’autre ;
 La stabilité des protéines commune et variantes et leur taux de dégradation
sous traitement alkylant.

III.1. Création des variants de MGMT par mutagenèse dirigée et sous-clonage


des plasmides

III.1.1. Matériels biologiques

a) Plasmide codant le gène MGMT

Un plasmide contenant l’ADNc du gène MGMT, clone IMAGE Id : 6649931, numéro


GenBank : BU859113.1 a été obtenu de ThermoFisher Scientific, Open Biosystems®. Ce
plasmide nommé pOTB7-MGMT porte le gène de résistance au chloramphénicol et les 835
bases de l’ADNc de MGMT entre les sites de restriction EcoRI et XhoI (Figure 18). Cette
séquence de 835pb inclut l’ORF (Open Reading Frame) depuis le deuxième codon start
jusqu’au codon stop et l’alignement de séquence sur la séquence codante CCDS est complet.

81
SP6 53...70
attB1 85...109
165 EcoRI (1)

Chlor R 1965...2623

ORF MGMT 259...881


cDNA MGMT 171...1005

pOTB7_cDNAmgmt
2636 bp

1006 XhoI (1)


attB2 1074...1098
T7 1132...1113
Figure 18. Plasmide pOTB7 portant la séquence codante ADNc de MGMT entre deux sites
d’intégration attB1 et attB2. Deux sites uniques de restriction, EcoRI et XhoI, permettent
la vérification du plasmide après digestion de l’extrait d’ADN par ces enzymes.

b) Souches et cultures bactériennes

Différentes souches d’E. coli sont utilisées pour l’amplification des plasmides par culture
bactérienne :

– Le plasmide pOTB7 a été obtenu à partir d’un culot de culture de DH10B dont le
génotype est : F- endA1 recA1 galE15 galK16 nupG rpsL ΔlacX74 Φ80lacZΔM15
araD139 Δ(ara,leu)7697 mcrA Δ(mrr-hsdRMS-mcrBC) λ- ;
– Les transformations des produits de mutagenèse dirigée ont été réalisées avec des
bactéries XL1-Blue dont le génotype est : endA1 gyrA96(nalR) thi-1 recA1 relA1 lac
glnV44 F'[ ::Tn10 proAB+ lacIq Δ(lacZ)M15] hsdR17(rK- mK+) ;
– L’étape de sous-clonage de la réaction entre attB et attP (réaction BP) a été réalisée
avec des TOP10 dont le génotype est : F- mcrA Δ(mrr-hsdRMS-mcrBC)
φ80lacZΔM15 ΔlacX74 nupG recA1 araD139 Δ(ara-leu)7697 galE15 galK16
rpsL(StrR) endA1 λ- ;
– L’étape finale de sous-clonage dans le plasmide d’expression lentiviral possédant les
séquences LTR, séquences instables, a été réalisée avec les bactéries STBL3 dont le
gène RecA13 élimine les recombinaisons homologues des séquences instables. Leur
génotype est: F- glnV44 recA13 mcrB mrr hsdS20(rB-, mB-) ara-14 galK2 lacY1
proA2 rpsL20 xyl-5 leu mtl-1.

82
Les cultures bactériennes sont réalisées dans du milieu LB liquide (Luria Broth) stérilisé par
autoclavage (120°C, 20 min), à 37°C, sous agitation à 250 rpm. Les cultures en milieu solide
sont réalisées avec du milieu LB additionné de 2 % d’agar avant stérilisation.

La transformation des bactéries soit électrocompétentes, soit chimiocompétentes, par les


produits plasmidiques des différentes réactions, a été réalisée soit par électroporation à 1800
V (électroporateur Bio-Rad), soit par choc thermique, respectivement. Les bactéries
transformées sont ensuite remises en suspension rapidement dans 200 µL de milieu nutritif
SOC (tryptone 2 %, extrait de levure 0,5 %, NaCl 10 mM, KCl 2,5 mM, MgCl210mM,
MgSO4 10 mM, glucose 20 mM) et incubées à 37°C pendant une heure pour permettre
l’expression du gène de résistance à l’antibiotique avant leur ensemencement sur boite de
Pétri ou mise en culture liquide en Erlenmeyer dans du LB avec l’antibiotique adapté.

Les antibiotiques utilisés pour la sélection positive des colonies transformées sont :

– Le chloramphénicol à la concentration de 25 µg/mL pour les plasmides pOTB7 ;


– La kanamycine à la concentration de 50 µg/mL pour les plasmides intermédiaires du
sous-clonage (plasmide d’entrée résultant de la réaction BP) ;
– L’ampicilline à la concentration de 100 µg/mL pour les plasmides d’expression
lentiviraux pSD_MGMT résultant de la réaction LR.

c) Extraction des ADN plasmidiques et digestion enzymatique

L’extraction d’ADN à partir des cultures bactériennes est réalisée avec les kits Plasmid Mini®
et Plasmid Maxi®, Qiagen en fonction des volumes des cultures et selon les recommandations
du fournisseur. La digestion par les enzymes de restriction choisies à partir de chaque carte de
restriction des plasmides permet de vérifier les différentes étapes du clonage, notamment la
présence complète de l’insert MGMT et son orientation, par la migration des produits de
digestion sur gel d’agarose et analyse des fragments obtenus.

III.1.2. Mutagenèse dirigée

La mutagenèse dirigée a été réalisée avec le kit QuickChange II Site-Directed Mutagenesis®


(Agilent Technologies). La réaction repose sur une amplification double brin du plasmide à
partir de couples d’amorces portant la mutation au site désiré, soit A>G pour le SNP1 et pour
le SNP2 (Tableau XV). Avec une ADN polymérase de haute fidélité, l’amplification du
plasmide reproduit cette variation, la matrice restante des plasmides parentaux non amplifiée
est digérée par une enzyme de restriction spécifique des sites méthylés DpnI (Figure 19).
L’amplification est réalisée à partir d’une gamme d’ADN matrice du pOTB7 de 5 à 50 ng et

83
avec 125 ng de chacune des amorces sens et anti-sens. Un tampon 10×, des dNTP et l’ADN
polymérase Pfu Ultra sont ajoutés dans un volume final de 50 L. Les cycles d’amplification
sont : une dénaturation 30 secondes à 95°C, puis 16 cycles de 30 secondes 95°C, 1 minute à
55°C, 5 minutes à 68°C. Les trois types de variants ont été créés : SNP1, SNP2 et SNP1+2.
Cette amplification a été réalisée avec le thermocycleur Veriti®, Applied Biosystems.
Chacune de leurs séquences a été ensuite vérifiée par séquençage direct.

Tableau XV. Séquences des amorces de mutagenèse dirigée pour l’amplification de la


matrice ADNc WT (Wild Type) au niveau des loci du SNP1 et du SNP2 surlignés.
Matrice ADNc WT du 5’ TGTCCCCATCCCTCATCCCGTGCCACAGAGT 3’
plasmide au locus SNP1
Amorce de mutagenèse Sens : 5’ TGTCCCCATCCCTCGTCCCGTGCCACAGAGT 3’
SNP1 Anti-sens : 5’ ACTCTGTGGCACGGGACGAGGATGGGGACA 3’
Matrice ADNc WT du 5’ CACCGGTTGGGGAAGCCAGGCTTGGGAGGG 3’
plasmide au locus SNP2
Amorce de mutagenèse Sens : 5’ CACCGGTTGGGGAGGCCAGGCTTGGGAGGG 3’
SNP2 Anti-sens : 5’ CCCTCCCAAGCCTGGCCTCCCCAACCGGTG 3’

Synthèse du brin muté:


Réalisation de cycles d’amplification par :
– Dénaturation des brins du plasmide
– Hybridation des amorces mutées
– Extension des amorces par l’ADN
polymérase Pfu Ultra

Digestion des plasmides parentaux méthylés


ou hémiméthylés restants par l’enzyme de
restriction DpnI.

Transformation des bactéries compétentes


par le plasmide muté.

Figure 19. Différentes étapes de la réaction de mutagenèse dirigée.

84
III.1.3. Sous-clonages des plasmides mutés à destination du plasmide d’expression
lentiviral

La technologie Gateway® (Life Technologies) a été utilisée pour sous-cloner le gène MGMT
du plasmide pOTB7 dans le vecteur final d’expression destiné à la production lentivirale, en
réalisant deux étapes de sous-clonage. Cette technologie permet le transfert de séquences
d’ADN encadrées par des sites spécifiques de recombinaison en maintenant le cadre de
lecture et l’orientation de l’ADNc.

Le premier sous-clonage a été réalisé par une réaction BP et permet la recombinaison du


plasmide pOTB7 portant le gène codant flanqué des séquences attB1 et attB2 avec un
plasmide donneur (pDONR) acceptant cette séquence entre les sites de recombinaisons attP1
et attP2. Le plasmide d’entrée résultant de cette réaction porte l’ADNc de MGMT entre les
sites attL1 et attL2.

Le deuxième sous-clonage, la réaction LR, a utilisé ce plasmide d’entrée pour réaliser une
seconde recombinaison site-spécifique avec le plasmide de destination (pSD69) portant les
sites attR1 et attR2. Le plasmide résultant de cette réaction est pSD69-MGMT où l’ADNc de
MGMT est compris entre les sites attB1 et attB2. Les enzymes et protéines nécessaires à ces
réactions sont l’intégrase, l’IHF (Integration Host Factor) et l’excisionase (Figure 20).

Les plasmides non clonés pDONR et pSD69 ont été fournis par une autre équipe de notre
unité INSERM (Dr Élodie Richard).

Le plasmide d’expression lentiviral (pSD69-MGMT) ainsi créé permet de placer l’ADNc de


MGMT sous le contrôle du promoteur hPGK (human Phospho Glycerate Kinase) qui est un
promoteur d’expression ubiquitaire. Ce plasmide d’expression lentiviral possède les éléments
nécessaires à la production des particules lentivirales avec ses séquences LTR (Long Terminal
Repeat) et les éléments WPRE (Woodchuck Hepatitis virus post-transcriptional regulatory
element) et cPPT (central PolyPurine Tract) (Figure 21). Les quatre types de plasmides
d’expression (WT, SNP1, SNP2, SNP1+2) ont été créés et les séquences d’ADNc du gène
MGMT vérifiées par séquençage direct.

85
Figure 20. Réactions de recombinaison site-spécifique de la technologie Gateway®.
Les produits clonés sont sélectionnés par leur gène de résistance à différents
antibiotiques. Les produits non clonés sont détruits par l’effet létal pour les bactéries
E. coli du gène codé par ccdB. Tiré de www.lifetech.com Life Technologies, Gateway®
Recombination Cloning Technology.

86
puroR (pac) 8129...8728 HIV SIN LTR U3*RU5 1...234
8111 PstI (3) SV40 ORI 435...641
murine PGK promoter 7600...8108 F1 ORI 802...1260

WPRE 6990...7588
attB2 6956...6980 ampR (bla) 1392...2252

pSD69_mgmt
6587 PstI (3) 8844 bp
cDNA MGMT 6053...6887
6256 PstI (3)
pUC ORI 2397...3070
attB1 5967...5991
human PGK promoter 5439...5954
5427 EcoRV (1)
cPPT 5276...5399 RSV LTR U3 3476...3707
RRE 4551...4792 HIV LTR RU5 3708...3889

Figure 21. Plasmide d’expression lentiviral obtenu après les deux réactions de sous-clonage.
Il code pour l’ADNc de MGMT sous la dépendance du promoteur hPGK. On retrouve les
séquences lentivirales LTR et SIN-LTR, WPRE et cPPT. Les sites de restriction PstI et EcoRV
ont permis la vérification des plasmides après digestion par ces enzymes.

III.1.4. Séquençage direct


Les plasmides issus des réactions de mutagenèse dirigée et ceux issus des sous-clonages en
plasmide d’expression lentiviral ont été séquencés afin de vérifier l’intégrité de l’ADNc de
MGMT et la présence de la variation G>A pour les variants SNP1, SNP2 et SNP1+2. Les
amorces de séquençage sont les amorces universelles Sp6 et T7 pour les plasmides pOTB7 et
attB1, attB2 pour les plasmides d’expression pSD69-MGMT. Les réactions de séquence se
font à l’aide du kit de séquençage Bigdye Terminator 1.1® (Applied Biosystems) à partir de
50 ng de matrice plasmidique et selon les cycles suivants : 5 minutes à 95°C, puis 30 cycles :
30 secondes à 95°C, 10 secondes à 50°C et 4 minutes à 60°C, enfin 4°C à l’infini. Les
fragments d’ADN ont ensuite été purifiés par une précipitation à l’éthanol à 100 %, EDTA
125 mM, acétate de sodium 3 M, puis centrifugés à 14000 rpm 15 minutes, enfin lavés à
l’éthanol à 70 % et séchés à l’abri de la lumière. Le séquençage a été effectué à la plateforme
Génome Transcriptome de l’université Bordeaux Segalen.

87
III.2. Production des particules lentivirales

III.2.1. Principe

La production des particules virales infectieuses, mais défectives pour la réplication, a été
réalisée par une co-transfection transitoire des cellules HEK293T (cellules humaines
embryonnaires de rein, immortalisées par les protéines E1A et E1B de l’adénovirus) avec une
combinaison de trois plasmides en présence de phosphate de calcium (Figure 22).

Plasmide de transfert: Plasmide d’empaquetage:


génome lentiviral. Protéines structurales.
LTR Prom Transgène LTR CMV GAG POL Poly A

Plasmide d’enveloppe
RSV VSV-G Poly A

Cotransfection

RSV VSV-G Poly A


Cellules productrice
LTR Prom Transgène LTR
293T
CMV GAG POL Poly A

Gag
Pol

Particules lentivirales
recombinantes
Figure 22. Principe de la production des vecteurs lentiviraux. La co-transfection de
trois plasmides dans des cellules 293T permet leur expression et la recombinaison
en particules lentivirales qui sont récoltées dans le surnageant cellulaire.

a) Le plasmide d’empaquetage PAX

Ce plasmide contient le promoteur du cytomégalovirus (CMV) qui va diriger l’expression de


toutes les protéines virales nécessaires en trans. Ce plasmide est défectif pour la protéine
d’enveloppe et pour les protéines accessoires, facteurs de virulence, Vpu, Vif, Vpr et nef.
Cette construction contient les éléments en cis nécessaires à l’empaquetage, la transcription
inverse et l’intégration des transcrits.

b) Le plasmide d’enveloppe pSD11

Il code pour une protéine d’enveloppe hétérologue : la glycoprotéine G du virus de la


stomatite vésiculaire (VSV-G) sous contrôle du promoteur CMV. Cela permet d’élargir le

88
tropisme du vecteur car la reconnaissance sur la membrane de la cellule cible ne semble pas
faire intervenir de récepteurs protéiques spécifiques, mais des phospholipides membranaires.
Les plasmides PAX et pSD11 ont été fournis par une autre équipe de notre unité INSERM (Dr
Élodie Richard).

c) Le plasmide de transfert pSD69-MGMT

Le plasmide d’expression de MGMT issu des sous-clonages précédents dérive du virus de


l’immunodéficience humaine (VIH) qui code pour l’ARN viral contenant en cis les éléments
nécessaires à l’encapsidation et à l’intégration. Les séquences codant pour la polymérase
(pol), pour la protéine d’enveloppe (env) et celles codant pour les protéines accessoires,
présentes dans le provirus sauvage, ont été supprimées. La séquence gag n’est que
partiellement délétée mais aucune protéine n’est produite. Ces plasmides lentiviraux sont non
réplicatifs car la séquence U3 du LTR-3’, contenant le promoteur endogène viral, est
partiellement délétée (∆U3), on les dit alors « SIN » (self-inactivating). Ainsi, après
rétrotranscription et intégration dans l’ADN de la cellule, les LTR du provirus ont une
structure de type ∆U3-R-U5, sans activité sur le contrôle de l’expression du ou des gènes
contenus dans le provirus. La séquence WPRE a un rôle dans l’export nucléaire des ARN
viraux, la séquence cPPT dans l’import nucléaire du complexe de pré-intégration.

III.2.2. Protocole

Cette production a été réalisée au laboratoire de niveau de sécurité P2, tout comme l’infection
lentivirale jusqu’au J14 post-transduction.

Le 1er jour, 5,5×106 cellules 293T cultivées dans du milieu Dulbecco’s Modified Eagle’s
Medium (DMEM 1× ; Gibco BRL) supplémenté avec 10 % de sérum de veau fœtal (SVF ;
Gibco BRL) décomplémenté (1h à 56°C), sont ensemencées par boîte de Pétri de 10 cm
préalablement recouverte de poly-L-lysine (0,001%), et incubée à 37°C sous 5 % de CO2.

Le 2e jour, le milieu de culture est remplacé par 5 mL de milieu DMEM, SVF 10 %. Les
cellules sont co-transfectées avec les trois plasmides. Le mélange est composé de 10 g de
plasmide d’empaquetage, 15 g de plasmide de transfert et 4 µg de plasmide d’enveloppe
dans un volume final de 450 l (filtré à 0,22 µm). Puis 50 l de CaCl2 2,5 M sont ajoutés et
cette solution est mise en suspension goutte à goutte dans 500 l d’HBS 2× (pH 7,12 : NaCl
280 mM, Na2HPO4 1,5 mM, HEPES 100 mM) pour précipiter l’ADN par la formation de
complexes ADN/ CaCl2/ Phosphate. Après 3 à 5 min d’incubation à température ambiante,

89
cette suspension est répartie sur les cellules 293T. Les cellules sont ensuite incubées 6 h à
37°C sous 5 % de CO2.

Six heures après, les cellules sont lavées une fois avec du milieu DMEM sans sérum puis
incubées avec 7 mL de milieu OPTIMEM 1× (Gibco BRL®) + HEPES 20 mM à 37°C, 5 %
CO2.

Trente-six heures après, les surnageants de culture sont prélevés, centrifugés à 2500 rpm
pendant 10 min à 4°C et filtrés à 0,22 m pour éliminer les débris cellulaires en suspension.
Cette production lentivirale est effectuée pour les quatre différents plasmides d’expression :
WT, SNP1, SNP2 et SNP1+2. Les particules virales sont aliquotées et conservées à –80°C.

III.3. Transduction lentivirale de la lignée cellulaire HEK293T

La lignée HEK293T (ou 293T), une lignée non tumorale humaine embryonnaire de rein, a été
choisie pour construire le modèle d’expression isogénique des différentes formes commune et
variantes de la MGMT, car cette lignée n’exprime pas le gène MGMT et ne porte pas de
mutation de TP53 (TP53 sauvage). En effet, l’induction du promoteur du gène MGMT et donc
le taux d’expression de l’ARNm et de la protéine semblent dépendants du statut sauvage de
TP53 en réponse aux dommages à l’ADN par des radiations ionisantes (102). Cette lignée
était disponible au laboratoire et se cultive en DMEM additionné de 10 % de SVF à 37°C et
sous 5 % de CO2.

L’infection lentivirale a été effectuée au laboratoire P2 sur les cellules 293T ensemencées la
veille en plaque 12 puits à raison de 105 cellules/puits. La transduction a été réalisée pendant
une nuit, selon une gamme de dilution des vecteurs WT, SNP1, SNP2 et SNP1+2 : 2 L, 5
L, 10 L, 50 L et 200 L ont été répartis sur les cellules à demi-confluence dans un
volume final de 500 L de DMEM + 10 % SVF. Après 12 h, le surnageant a été enlevé, le
tapis cellulaire lavé délicatement au PBS et remis en culture avec du DMEM + 10 % SVF.
Des puits contrôles non transduits et transduits avec un vecteur lentiviral contrôle (pER15),
n’exprimant pas la MGMT, ont été réalisés dans le même temps.

A 48 h après transduction, la sélection des cellules transduites a été réalisée par addition de
puromycine à la concentration de 2,5 g/mL dans le milieu de culture, les cellules ayant
intégré le transgène expriment le gène de résistance à la puromycine. Cette sélection opère dès
24 h et s’effectue sur deux à trois jours.

Dès 24 h, la puromycine entraine la mort de 100 % des cellules non transduites et l’évaluation
approximative du titre lentiviral peut se faire par l’observation du pourcentage de mort

90
cellulaire des différents puits transduits selon la gamme de dilution des vecteurs. Le nombre
de cellules ensemencées, divisé par la plus forte dilution de la gamme de vecteurs où on
observe une survie des cellules transduites, permet d’évaluer le titre infectieux de ces
vecteurs. Pour les conditions d’infection avec les vecteurs WT, SNP1, SNP1+2, 50 L de
vecteur ont permis la résistance des cellules transduites à la puromycine. Pour le vecteur
SNP2, le pouvoir infectieux est plus fort avec une résistance dès 10 L de particules virales.
Le titre viral exprimé en TU/mL (Transforming Unit/mL) est alors de 2×106 TU/mL pour les
vecteurs WT, SNP1, SNP1+2 et de 1×107 TU/mL pour le vecteur SNP2. Les MOI
(Multiplicity Of Infection), correspondant au nombre de particules virales divisé par le nombre
de cellules transduites, calculées à posteriori ici, sont alors de 1 avec 50 L de virus et de 4
avec 200 L de virus WT, SNP1 et SNP1+2. Elles sont de 1 avec 10 L et 5 avec 50 L de
virus SNP2.

Après 14 jours de culture et plusieurs passages des cellules transduites, le risque infectieux
pour le manipulateur est faible et les cultures cellulaires peuvent se faire dans une pièce de
culture classique P1.

III.4. Méthode de quantification des protéines

III.4.1. Extraction et dosage des protéines

Un culot cellulaire des lignées a été lavé au PBS froid et centrifugé à 900 rpm 10 minutes à
4°C. Le culot a été repris dans un tampon de lyse FT Lysis Buffer (Freeze-Thaw lysis buffer :
KCl 0,6 M, Tris-Cl pH 7,8 20 mM, glycérol 20 %) auquel a été ajouté un cocktail
d’inhibiteurs de protéases (Protease Inhibitor Cocktail EDTA free®, Merck Millipore).
L’extraction a été réalisée par choc thermique dans l’azote liquide avec trois cycles de
congélation/décongélation des lysats cellulaires, puis centrifugé à 13 000 rpm, à 4°C pendant
15 min. Le surnageant de protéines solubles a été récupéré et traité par 1 L de benzonase,
une endonucléase, pour éliminer les traces d’ADN. Les extraits ont été immédiatement
congelés en aliquotes à –80°C.

Le dosage des protéines a été réalisé avec le kit DC Protein Assay® (BioRad) par une réaction
colorimétrique et la réalisation d’une gamme d’étalonnage de BSA (Bovine Serum Albumine),
selon les recommandations du fournisseur.

III.4.2. Western blot

La protéine MGMT a une masse moléculaire de 22 à 25 kDa. La migration des extraits


protéiques sur un gel à 12 % de polyacrylamide convient à sa détection. Les extraits
91
protéiques ont été déposés, à raison de 80 g, avec du tampon de charge sur un gel de
polyacrylamide dénaturant à 12 %. La séparation des protéines se fait uniquement en fonction
de leur masse moléculaire, la structure étant rendue homogène par le détergent anionique
ajouté (SDS). Le gel était constitué de deux parties : un gel de concentration à 5 %
d’acrylamide et un gel de séparation à 12 % d’acrylamide. Ces gels ont été fabriqués
extemporanément avec de l’acrylamide bis-acrylamide (solution à 30%, Euromedex), du
tampon Tris-HCl 1,5 M, pH 8,8 (gel de séparation), Tris-HCl 1 M, pH 6,8 (gel de
concentration), SDS 20 % (solution à 20%, Euromedex), Ammonium Persulfate 10 %, Temed
(Amresco®). La migration est réalisée à 80 V pendant 90 min dans du tampon de Laemmli
1× : Tris base pH 8,3, 25mM, Glycine 0,25 M, SDS 0,1 %. Un marqueur de poids moléculaire
(Precision Plus Protein®, Biorad) permet d’identifier la bonne position de migration des
protéines.

Le transfert des protéines du gel sur une membrane PVDF (polyvinylidene fluoride) a été
réalisé par un système de transfert sec, l’iBlot 7-minutes Blotting system® (Invitrogen) selon
les recommandations du fournisseur. Puis la membrane a été saturée pendant une heure sous
agitation avec une solution de blocage contenant du PBS-Tween (PBS 0,1 % Tween-20
(Sigma)) et 5 % de lait en poudre. Le marquage par l’anticorps primaire monoclonal de souris
anti-MGMT (MT3.1, sc-56157, Santa Cruz®) a été effectué dans une solution PBS-Tween 2,5
% + lait en poudre, et à la dilution 1/200e de l’anticorps, sous agitation à 4°C une nuit. Le
lendemain, la membrane a été lavée trois fois par du PBS-Tween puis incubée avec
l’anticorps secondaire, anti-IgG de souris, pour l’immunodétection de MGMT, au 1/10 000e
dans une solution de PBS-Tween +2,5 % lait en poudre pendant une heure. A nouveau trois
lavages en PBS-Tween ont été réalisés.

La révélation a est réalisée par exposition au réactif de chimioluminescence ECL(Millipore


Immobilon). La visualisation des bandes a été faite avec un système d’acquisition d’images
pour la capture des signaux chimioluminescents, FUSION SL® (Vilber Lourmat).

Les autres immunodétections réalisées sont celles de l’actine avec l’anticorps primaire de
lapin anti-actine polyclonal (AV40173, Sigma®) à la dilution 1/1000e et l’anticorps secondaire
correspondant; et celle de IB avec l’anticorps primaire de lapin anti-IB polyclonal (sc847,
Santa Cruz®) à la dilution 1/1000e et l’anticorps secondaire correspondant.

III.5. PCR quantitative

L’extraction d’ARN à partir des lignées cellulaires MCF7 (contrôle positif d’expression de la
MGMT) et 293T a été réalisée avec le kit RNeasy Mini® (Qiagen), selon les
92
recommandations du fournisseur. Les amorces choisies pour la RT-PCR quantitative de
MGMT ont été alignées sur la jonction exon 2/exon 3 de l’ARNm de MGMT pour s’affranchir
d’une contamination par l’ADN génomique. Leur spécificité a été vérifiée par alignement de
séquence sur la séquence de référence ARN NM_002412.3.

Les amorces sont :


– Sens : CCACACTGGACAGCCCTTTGGG
– Anti-sens : CACGGCATCAGCTGCAGACGTC

La réaction de transcription inverse est réalisée avec le kit Superscript VILO cDNA
Synthesis® (Invitrogen), selon les recommandations du fournisseur et à partir de 1 g d’ARN.
La réaction a été réalisée sur le thermocycleur 9700 GeneAmp® (Applied Biosystems) selon
les cycles suivants : 10 min à 25°C, 60 min à 42° C, 5 min à 85°C. L’ADNc obtenu a servi de
matrice à la PCR quantitative de MGMT et de deux gènes de ménage, GAPDH et la sous-
unité ribosomale 18S, contrôles positifs de la réaction car de niveau d’expression équivalent
quelles que soient les lignées cellulaires. Cette PCR quantitative utilise l’agent intercalant
fluorescent SYBR Green avec le kit Express SYBR Green ER qPCR SuperMixes ®
(Invitrogen). Cette amplification a été réalisée sur le thermocycleur Rotor Gene® (Qiagen),
selon les cycles : dénaturation de 2 min à 95°C, 40 cycles de 15 s à 95°C, 60 s à 60°C, 30 s à
72°C.

III.6. Étude de la méthylation du promoteur de MGMT

L’îlot CpG du promoteur du gène MGMT s’étend sur 777 pb et comporte 97 sites CpG. Des
amorces ont été choisies pour amplifier et séquencer un fragment de 103 pb contenant 10 sites
CpG par pyroséquençage afin d’effectuer une mesure quantitative de la méthylation de ces
sites. Une conversion au bisulfite des ADN, issus des lignées ou des échantillons de patients,
a permis la conversion des cytosines non méthylées en uracile, laissant les cytosines
méthylées inchangées. On obtient ainsi des séquences différentes selon que les sites CpG sont
méthylés ou non. L’étape la plus critique d’une évaluation de la méthylation est donc
l’obtention d’une conversion complète des cytosines non méthylées par une incubation de
l’ADN avec des concentrations élevées de sels de bisulfite à haute température. Cette
conversion a été effectuée avec le kit EpiTect Bisulfite® (Qiagen) sur le thermocycleur Veriti®
(Applied Biosystems) selon des cycles de dénaturation et d’incubation permettant la
sulfonation et la désamination des cytosines : 5 min à 95°C, 25 min à 60°C, 5 min à 95°C, 85
min à 60°C, 5 min à 95°C, 175 min à 60°C. La purification des ADN convertis se fait sur les

93
colonnes de purification du kit par des étapes de désulfonation, lavages et précipitation. Un
contrôle de conversion (ADN non méthylé) a été traité selon les mêmes étapes.

Les amorces de pyroséquençage choisies sont :


– Amorce sens : GTTTAGGATATGTTGGGATAGT
– Amorce anti-sens biotinylée : CCCAAACACTCACCAAAT
– Amorce de séquençage : GGATATGTTGGGATAGTT

La technologie de pyroséquençage a été décrite précédemment (Première partie, IV.4.2). La


mesure quantitative du taux de méthylation des dix sites CpG génotypés est rendue possible
par cette technique, la hauteur du pic lue au pyrogramme au niveau du site CpG (C si méthylé
et T si non méthylé suite à la conversion) correspondant à la mesure quantitative du
nucléotide intégré et donc au pourcentage de méthylation de ce site dans l’échantillon. Le
pyroséquenceur utilisé est le Pyromark® Q96 ID, Qiagen. Deux contrôles de niveau de
méthylation, un ADN converti non méthylé et un hyperméthylé, ont été amplifiés et
séquencés en même temps que les échantillons.

III.7. Tests de cytotoxicité

Deux tests ont été utilisés pour évaluer la cytotoxicité des agents anti-cancéreux. La
cytotoxicité d’un agent peut s’exprimer par la concentration de médicament induisant 50 %
d’inhibition de croissance ou par celle induisant 50 % d’inhibition d’efficacité de clonage. Le
premier est un test comparant la croissance d’une population cellulaire traitée à celle d’une
population non traitée, c’est un test de viabilité par une mesure de l’activité métabolique des
cellules à un instant t. Le deuxième test interroge la survie cellulaire d’une population traitée
par rapport à une non traitée en mesurant la capacité des cellules viables restantes à former
des colonies cellulaires.

III.7.1 Agents cytotoxiques testés

Les différents agents cytotoxiques utilisés dans cette étude sont :

– Témozolomide, CAS 85622-93-1(Sigma), soluble dans le DMSO à la concentration de


20 mg/mL, solution préparée extemporanément pour chaque traitement.
– BCNU, carmustine (1,3-Bis(2-chloroéthyl)-1-nitrosourea), CAS 154-93-8 (Sigma),
soluble dans l’éthanol à la concentration de 20 mg/mL, solution stock conservée à –
20°C.
– Melphalan, CAS 148-82-3 (Sigma), soluble dans l’éthanol à la concentration de 50
mg/mL et avec ajout de 10 L d’HCl 6 N, solution stock conservée à –20°C.

94
– Cisplatine, solution à 1 mg/mL, Merck®, ajouté dans le milieu DMEM, solution stock
conservée à température ambiante.

III.7.2. Tests d’inhibition de croissance au MTT par mesure de l’activité métabolique

Ces tests utilisent la réduction d’un sel de tétrazolium (le bromure de 3,4,5-diméthylthiazol-
2,5-diphényl tétrazolium ou MTT) en formazan par les déshydrogénases mitochondriales des
cellules viables. Il évalue donc l’activité métabolique mitochondriale des cellules. Le MTT-
formazan forme des cristaux violets solubles dans le DMSO et dont on peut évaluer la
concentration par spectrophotométrie à la longueur d’onde de 530 nm. Les cellules
ensemencées en plaque à 96 puits doivent rester en phase exponentielle de croissance
jusqu’au moment de la mesure. Les cellules des lignées modifiées 293T ont été ensemencées
à raison de 700 cellules par puits dans 100 L de volume final la veille du début du
traitement. L’agent cytotoxique testé est ajouté le lendemain selon une gamme de
concentrations adéquates, les dilutions de la solution stock du médicament dans le milieu de
culture DMEM +10 % SVF étant effectuées extemporanément. Le temps de contact des
cellules avec l’agent cytotoxique a été de 72 h pour toutes les expériences. Après incubation,
la quantité de cellules métaboliquement actives est mesurée par coloration au MTT (Thiazolyl
Blue Tetrazolium Bromide, CAS 293-93-1, Sigma) à la dose de 0,5 mg/mL en 200 L
DMEM final par puits pendant 4 h. Puis les cristaux de formazan ont été solubilisés par
addition de DMSO et les plaques ont été lues au spectrophotomètre à 570 nm. Chaque
condition (traitée et non traitée) est réalisée en triplicat interne. Les expériences sont
reproduites indépendamment 3 à 4 fois pour obtenir des triplicats inter-expériences et des
écart-types.

III.7.3. Mesure de l’inhibition du pouvoir clonogène

Ces essais évaluent la capacité d’une cellule viable à donner naissance à une colonie
cellulaire. L’évaluation de la viabilité cellulaire par essai de clonogénicité élimine donc les
cellules en quiescence cellulaire et celles avec mort cellulaire différée, donnant une mesure
plus juste de la viabilité. Différentes mises au point des conditions de réalisation de cette
expérience ont été testées. La procédure retenue a été réalisée en plaque 6 puits avec un
ensemencement (sans agar) à très faible densité cellulaire. Les cellules des différentes lignées
293T ont d’abord été traitées pendant 72 h avec l’agent cytotoxique choisi selon une gamme
de concentrations, des contrôles non traités étant réalisés en parallèle. À 72 h, les cellules ont
été comptées de façon précise et ensemencées en conditions clonogéniques à raison de 500
cellules par puits dans un volume final de 2,5 mL de DMEM +SVF 10 %, puis incubées à
95
37°C sous 5 % de CO2 pendant 7 jours. Au 7e jour, l’observation au microscope inversé de
colonies cellulaires de taille suffisante, c’est-à-dire supérieure à 50 cellules par colonie, a
déterminé l’arrêt de la culture. Les colonies ont été fixées à l’éthanol à 70 % pendant 15 min,
rincées au PBS et colorées au crystal violet (solution à 2,3%, Sigma) pendant 10 min, puis
rincées à l’eau et séchées. Un comptage visuel des colonies a été effectué. L’efficacité de
clonage des témoins est le nombre de colonies divisé par le nombre de cellules ensemencées,
sans traitement. De même, les résultats obtenus pour chaque concentration de médicament
sont exprimés en pourcentage de survie par rapport au contrôle non traité et (nombre de
colonies divisé par le nombre de cellules ensemencées, que multiplie l’efficacité de clonage).
Chaque condition est réalisée en triplicat interne et l’expérience est reproduite trois fois
indépendamment pour obtenir un triplicat inter-expériences et des écart-types.

III.8. Co-cultures des lignées WT et SNP1+2 et quantification d’allèles

Les co-cultures ont été effectuées en mélangeant des nombres égaux de cellules des lignées
293T-WT et 293T-SNP1+2. Ces cultures en flacons ont été réalisées en triplicat avec et sans
traitement par une dose infra-toxique de BCNU, celle correspondant à 10 % d’inhibition de
croissance en MTT, soit 1 M. Ces co-cultures ont été cultivées à long terme pendant 91
jours. Une extraction d’ADN est réalisée tous les 7 jours (Blood and Cell culture DNA
Minikit®, Qiagen).

Une gamme de mélange des ADN de chacune des lignées 293T-WT et 293T-SNP1+2 extraits
au J0 a été réalisée pour étalonner la mesure des quantités de chaque allèle présent selon les
proportions : WT/SNP1+2 = 100/0, 90/10, 80/20, 70/30, 60/40, 50/50, 40/60, 30/70, 20/80,
10/90, 0/100.

La technique de pyroséquençage permet de génotyper les loci variants mais aussi de quantifier
le taux relatif d’allèle commun ou variant présent dans l’échantillon, la hauteur du pic du
pyrogramme correspondant à la mesure quantitative du nucléotide détecté. Des amorces de
pyroséquençage ont été élaborées pour génotyper les deux loci des SNP, elles sont différentes
de celles utilisées pour le séquençage des ADN des patients, le gène MGMT apporté dans les
lignées correspondant uniquement à la séquence codante (ADNc) et non à l’ADN génomique.
Les amorces utilisées sont :
SNP1 : amorce sens : TTTTCCAGCAAGAGTCGTTCAC
amorce anti-sens biotinylée : TCATGGGCCAGAAGCCATT
amorce de séquençage : CCTGTCCCCATCCTC
SNP2 : amorce sens : AGGACTGGCCGTGAAGGAA

96
amorce anti-sens : CCCTGCCAGACCTGAGCT
amorce de séquençage : GGCCACCGGTTGGGG

III.9. Étude de la demi-vie de la protéine MGMT

Les western blots anti-IB et anti-MGMT ont été réalisés comme décrits précédemment. La
cinétique de décroissance de la protéine IB a été réalisée sous stimulus par le TNF à la
concentration de 10 ng/mL final (Shenandoah Biotechnology Inc., référence 100-111, aliquots
stock à 100 µg/mL en PBS 0,1% BSA), et les extraits protéiques ont été réalisés à 15 min, 30
min, 1 h et 2 h après addition de TNF. L’inhibiteur du protéasome MG132 (CAS 133407-
82-6, Sigma) a été utilisé à la concentration de 10 M pendant 4 h de préincubation des
cellules. La cinétique de décroissance de MGMT a été réalisée sous le stimulus par l’O6BG
(CAS 19916-73-5, Sigma, soluble dans le méthanol à 20 mg/mL) à la concentration de 80
M. Les protéines ont été extraites 2 h, 4 h, 6 h, 8 h et 10 h après addition d’O6BG. Le
cycloheximide (CAS 66-81-9, Sigma) a été utilisé à la concentration de 100 M pour inhiber
la synthèse protéique durant cette période.

Nous avons recherché des différences fonctionnelles entre les protéines MGMT commune et
variantes à l’aide de plusieurs approches. Nous avons d’abord tenté de savoir quelles
pouvaient être a priori les conséquences structurales des changements liés au polymorphisme,
au niveau des ARN messagers et au niveau des protéines. Nous avons ensuite comparé
expérimentalement des lignées isogéniques que nous avons générées, ne différant que par le
remplacement des acides aminés du double polymorphisme Ile147Val et Lys178Arg, (1) en
évaluant leur sensibilité différentielle aux agents cytotoxiques mettant en jeu une réparation
utilisant ou non la MGMT ; (2) en recherchant si le polymorphisme conférait un avantage
prolifératif aux cellules exprimant la MGMT variante ; (3) en analysant la stabilité des
protéines commune et variante vis-à-vis de la destruction protéasomale.

IV.1. Analyses in silico

IV.1.1. Structure secondaire des ARNm

La structure secondaire des ARNm de MGMT dans leur forme commune ou variante a été
analysée par un logiciel de l’université de Vienne accessible en ligne (RNA fold) à partir du

97
serveur http://rna.tbi.univie.ac.at/cgi-bin/RNAfold.cgi. Cet outil permet de prédire la structure
secondaire d’énergie libre minimale sur le plan thermodynamique en se basant sur la
probabilité d’appariement des nucléotides des séquences. On recherche ainsi une différence
dans la structure des tiges et des boucles en épingle à cheveux qui pourrait être causée par la
transition G>A des SNP1 et SNP2. La figure 23 montre ces structures et la valeur de leur
énergie libre minimale. Nous n’avons pas observé de différence dans les structures
secondaires des différentes séquences ARNm commune et variantes, ni dans l’énergie
minimale libre de leur structure.

ARNm WT: –371,45 kcal/mol ARNm SNP1: –373,10 kcal/mol

ARNm SNP2: –371,30 kcal/mol ARNm SNP1+2: –372,93 kcal/mol

Figure 23. Structures secondaires des séquences des ARNm des gènes commun (WT) et
variants (SNP1, SNP2 et SNP1+2). Les couleurs correspondent à la probabilité d’appariement
des nucléotides entre eux de la plus faible (bleu) à la plus forte (rouge). Les flèches indiquent
la position des deux SNP. L’énergie libre minimale des structures est exprimée en kcal/mol.
98
IV.1.2. Fréquence d’utilisation des codons

La dégénérescence du code génétique, donnant la possibilité de coder un même acide aminé à


partir de différents codons, est responsable d’une variabilité dans la fréquence d’utilisation
des codons dans l’espèce humaine. Le tableau des fréquences relatives de l’utilisation des
codons est accessible sur le serveur internet de Bioinformatics and Biological Computing,
Weizmann Institute of Science, http://bioinformatics.weizmann.ac.il/. L’existence de SNP,
même s’ils sont synonymes, peut ainsi s’accompagner de variations quantitatives de la
biosynthèse d’une protéine en raison de l’utilisation préférentielle d’un ARN de transfert par
rapport à un autre. En ce qui concerne le SNP Ile143Val, la fréquence d’utilisation du codon
AUC pour ajouter une isoleucine à la séquence protéique est de 52 % alors que celle
d’utilisation du codon GUC pour ajouter une valine est de 25 %. Pour le SNP Lys178Arg, le
codon sauvage AAG codant la lysine est utilisé à la fréquence de 60 % alors qu’elle est de 22
% pour le codon variant AGG codant l’arginine. Il peut donc en résulter une différence du
processus de traduction lié à une moindre disponibilité des ARN de transfert nécessaires à la
biosynthèse de la protéine commune et de la protéine variante.

IV.1.3. Propriétés physico-chimiques des acides aminés substitués

La substitution d’acides aminés aux propriétés physico-chimiques différentes aura plus


d’impact sur la structure ou la fonction de la MGMT que s’ils ont des propriétés voisines. Les
propriétés physico-chimiques comparées de l’isoleucine et de la valine d’une part, et de la
lysine et de l’arginine d’autre part, sont similaires avec :

– Un pH isoélectrique équivalent : Ile : 5,94 ; Val : 5,96 et Lys : 9,59 ; Arg : 11,15.
– Une hydrophobie voisine selon l’échelle de Kite et Doolittle : Ile et Val sont
hydrophobes, Lys et Arg hydrophiles.
– Une chaîne latérale aliphatique pour Ile et Val, basique pour Lys et Arg.
– À pH neutre, non chargés ou apolaires pour Ile et Val, basiques pour Lys et Arg.

Il n’existe donc pas a priori de différence structurale majeure entre les deux protéines, ce qui
ne peut exclure une différence fonctionnelle si la remplacement des acides aminés se situe eu
niveau du centre actif de l’enzyme.

99
IV.2. Génération des lignées isogéniques exprimant la MGMT sauvage ou
variante

IV.2.1. Absence d’expression de la MGMT dans la lignée 293T

a) Expression protéique

L’absence d’expression de la MGMT par les cellules de la lignée 293T a été vérifiée par
western blot (Figure 24) avec, comme contrôle positif d’expression, les extraits protéiques
d’une lignée connue pour son expression (MCF7).

Figure 24. Western blot anti-MGMT réalisé sur des extraits protéiques
des lignées MCF7 (témoin positif) et 293T.

d) Expression du transcrit

L’analyse de l’expression du transcrit du gène MGMT par RT-PCR quantitative montre un


niveau de transcription correct des gènes de contrôles GAPDH et 18S pour les deux lignées
293T et MCF7 et une expression réduite de l’ARNm de MGMT de la lignée 293T (Figure 25).
Par analyse comparative des concentrations, on trouve que le taux du transcrit de MGMT dans
la lignée 293T est de 4 % de celui de la lignée contrôle MCF7 à partir de ces amplifications
réalisées en triplicat.

100
Figure 25. Courbes d’amplification des gènes 18S, GAPDH et MGMT réalisées en triplicat à
partir de l’ADNc issu des transcriptions inverses des ARNm des lignées MCF7 et 293T.

e) Méthylation du promoteur de MGMT

Afin de déterminer la cause de l’absence d’expression de la MGMT par la lignée 293T, une
mesure de la méthylation des sites CpG du promoteur du gène MGMT a été mise au point par
technique de pyroséquençage. Après conversion au bisulfite des cytosines non méthylées, un
fragment de 103 pb a été amplifié et séquencé sur dix sites CpG. Les ADN contrôles du
fournisseur Qiagen présentent un taux de méthylation des dix sites CpG de 5 % en moyenne
pour le contrôle non méthylé et de 86 % en moyenne pour le contrôle hyperméthylé. L’ADN
extrait de la lignée 293T, converti au bisulfite, amplifié et séquencé, présente une
hyperméthylation des dix sites CpG analysés avec une moyenne de 85,5 % (Figure 26). La
lignée 293T n’exprime donc pas la protéine MGMT en raison de l’hyperméthylation de son
promoteur.

100
de méthylation des 10 sites
Moyenne des poucentages

80

60
CpG

40

20

0
contrôle non contrôle 293T
méthylé hyperméthylé

Figure 26. Moyenne de méthylation des sites CpG analysés du


promoteur de MGMT sur les ADN contrôles non méthylé et
hyperméthylé, et l’ADN extrait de la lignée 293T.
101
IV.2.2. Expression de la MGMT dans les lignées transduites

L’infection lentivirale de la lignée 293T a été réalisée par les quatre types de vecteurs
exprimant soit la forme commune de la MGMT soit les formes variantes : SNP1, SNP2 et
SNP1+2, selon une MOI (multiplicity of infection) de 1 et de 4. Après sélection des cellules
transduites par la puromycine, les lysats protéiques ont été utilisés pour mesurer l’expression
de la protéine MGMT par western blot. L’immunodétection permet d’observer son expression
dans les lignées transduites WT, SNP1, SNP2 et SNP1+2, d’intensité plus forte à MOI 4 qu’à
MOI 1, et une absence d’expression dans la lignée transduite avec le vecteur vide (pER15)
(Figure 27).

Figure 27. Western blot anti-MGMT des lignées transduites par les différents
vecteurs lentiviraux exprimant la MGMT (WT, SNP1, SNP2, SNP1+2) et vide (pER15) à
différentes concentrations virales (MOI 1 et 4). 293T NT (non transduit) et MCF7:
contrôles négatif et positif respectivement d’expression de la MGMT.

La mesure du rapport des intensités des bandes détectées de la MGMT et de l’actine permet
de comparer les intensités d’expression entre les différentes lignées (Figure 28). Les lignées
d’expression équivalente ont été choisies pour la suite des expériences : 293T-WT (MOI 4),
293T-SNP1 (MOI 4), 293T-SNP2 (MOI 1) et 293T-SNP1+2 (MOI 4).

0.2
Rapport eds densités
MGMT/ actine

0.1

0.1

0.0

Figure 28. Rapport des intensités d’expression MGMT/actine


des différentes lignées transduites à MOI 1 et 4.

102
La stabilité dans le temps de cette expression a été vérifiée par des western blots effectués à
distance de l’infection lentivirale. La figure 29 est le western blot anti-MGMT réalisé trois
mois après transduction des lignées. Il montre une stabilité de l’expression de la MGMT dans
les lignées 293T-WT, 293T-SNP1, 293T-SNP2 et 293T-SNP1+2.

Figure 29. Western blot anti-MGMT des lignées 293T-WT, 293T-SNP1,


293T-SNP2 et 293T-SNP1+2, trois mois après l’infection lentivirale.

L’induction de la transcription du gène MGMT étant dépendante des lésions causées à l’ADN
(103), nous avons vérifié l’absence de réexpression du gène MGMT endogène des cellules
293T non transduites sous traitement cytotoxique. Pour cela, la lignée 293T a été traitée par
0,6 M de cisplatine et 800 M de témozolomide pendant 72 h avant extraction des protéines.
L’immunodétection de la MGMT montre une absence d’expression dans ces lignées traitées,
les lignées transduites étant utilisées comme contrôles positifs d’expression (Figure 30).

Figure 30. Western blot anti-MGMT de la lignée 293T non transduite (NT)
traitée pendant 72 h par du cisplatine ou du témozolomide.

103
IV.3. Chimiosensibilité des lignées isogéniques

IV.3.1. Inhibition de croissance évaluée par tests au MTT

Les tests d’inhibition de croissance au MTT ont été réalisés avec un temps de contact de 72 h
des cellules avec l’agent cytotoxique, sauf pour l’inhibition de croissance induite par le
témozolomide qui a nécessité 96 h de traitement avant mesure. Chaque test a été réalisé en
triplicat interne et a été répété trois fois indépendamment, les barres d’erreur Y représentant
les erreurs standards de la moyenne (SEM ou SE).

Sur les courbes d’inhibition de croissance par le BCNU (carmustine) (Figure 31), nous avons
observé comme attendu une moindre sensibilité des cellules exprimant la MGMT par rapport
aux cellules non transduites, avec une IC50 (dose inhibant la croissance de 50 % par rapport
aux cellules non traitées) de 30 M pour les lignées transduites et une IC50 de 7 M dans les
lignées non transduite et transduite avec le vecteur vide. Nous n’avons pas observé de
différence significative entre les différentes formes de la MGMT, commune ou variantes.

150
par rapport au contrôle non traité
% de prolifération cellulaire

125

100 293T NT
293T pER15
75
293T WT
50
293T SNP1
25 293T SNP2

0 293T SNP1+2
0,1 1 10 100 1000
BCNU (µM)

Figure 31. Inhibition de croissance des lignées transduites et non transduite (NT)
par une gamme de concentration de BCNU : 5, 25, 50, 100, 250 et 500 M.

Sur les courbes d’inhibition de croissance par le témozolomide, nous avons observé une
résistance encore plus forte des cellules transduites, avec une IC50 de 700 M par rapport aux
cellules non transduites pour lesquelles l’IC50 est de 300 M (Figure 32). Les différences
observées entre les différents allèles exprimés de la MGMT ne sont pas significatives.

104
150

par rapport au contrôle non traité


% de prolifération cellulaire
125
293T NT
100 293T pER15
75 293T WT

50 293T SNP1
293T SNP2
25
293T SNP1+2
0
10 100 1000
Témozolomide (µM)

Figure 32. Inhibition de croissance des différentes lignées transduites et non


transduite (NT) par une gamme de témozolomide : 100, 250, 500, 750 et 1000 M.

Les figures 33 et 34 montrent les courbes d’inhibition de croissance par le cisplatine et le


melphalan. Pour ces deux agents alkylants, nous n’avons pas observé d’effet de l’expression
de la MGMT sur la sensibilité des cellules à ces cytotoxiques.

125
par rapport au contrôle non traité
% de prolifération cellulaire

100

75 293T NT

293 pER15
50
293 WT
25
293 SNP1
0
0,1 1 10 100
Cisplatine (µM)

Figure 33. Inhibition de croissance des différentes lignées transduites et non


transduite (NT) par une gamme de cisplatine: 0,3, 0,6, 3, 6, 15 et 30 M.

105
100

par rapport au contrôle non traité


% de prolifération cellulaire 75
293T NT
50 293T pER15
293T WT
25 293T SNP1
293T SNP2
0 293T SNP1+2
0,1 1 10 100
Melphalan (µM)

Figure 34. Inhibition de croissance des différentes lignées transduites et non transduite
(NT) par une gamme de melphalan : 0,5, 1, 5, 10, 50 et 100 M.

IV.3.2. Inhibition de l’efficacité de clonage

Afin de sensibiliser la mise en évidence d’une différence de chimiosensibilité des cellules


portant les différents allèles de la MGMT, nous avons évalué l’inhibition du pouvoir
clonogène des lignées en présence de BCNU. Le nombre de colonies formées à partir des
cellules survivantes à un traitement au BCNU pendant 72 h et selon une gamme de
concentrations a été mesuré au 7e jour de culture. Nous avons observé une décroissance des
capacités clonogènes des deux lignées en fonction de la concentration en BCNU, mais la
différence observée entre les deux allèles WT et SNP1+2 de la MGMT n’est pas significative
sur les trois expériences indépendantes réalisées (Figure 35).

1
rapport au contrôle non traité
Fraction survivante par

0,75

0,5

0,25
293T SNP1+2
0 293T WT
0,1 1 10 100
BCNU (µM)

Figure 35. Inhibition de l’efficacité de clonage des lignées exprimant les allèles WT et SNP1+2
de la MGMT par le BCNU utilisé aux concentrations de 5, 10, 25, 50 et 100 M. Les barres
d’erreur Y représentent l’erreur standard de la moyenne.

106
IV.4. Recherche d’un avantage prolifératif conféré par la variation étudiée

Afin d’objectiver des différences faibles dans la survie ou la prolifération des cellules portant
des allèles différents de la MGMT, nous avons réalisé une quantification allélique sur des
cultures mixtes à long terme. Pour cela, nous avons réalisé des co-cultures (50 – 50) de
cellules 293T-WT et 293T-SNP1+2, sans traitement ou soumises à une pression de sélection
par le BCNU, co-cultures que nous avons laissé évoluer sur le long terme (3 mois) avant de
quantifier une éventuelle différence dans leurs proportions respectives. La quantification
allélique par pyroséquençage a été calibrée grâce à une gamme de dilution de l’ADN 293T-
WT par l’ADN 293T-SNP1+2. La figure 36 montre cette gamme d’étalonnage de la mesure
quantitative de l’allèle variant par rapport au commun. Il existe une excellente corrélation
entre la fraction de l’allèle variant de la gamme de dilution et sa quantification par la mesure
de la hauteur du pic G (variant) au pyrogramme.

y = 0,9986x + 7,8591
R² = 0,97959
100% SNP
120
Rapport des hauteurs de pic

100

80 40% WT
(G/A)

60 60% SNP

40
90% WT
20
10% SNP
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
QA pyro
Fraction relative d’ADN SNP 1+2 (%) Linéaire (QA pyro)

Figure 36. Gamme d’étalonnage de la quantification des allèles variant ou commun de


MGMT par mesure de la hauteur du pic G (variant) ou A (commun) sur les pyrogrammes.

Les co-cultures ont été traitées par une dose infra-toxique de BCNU (1 M, correspondant à
l’IC10 pour les cellules 293T-SNP1+2 en test au MTT) pendant 91 jours et des co-cultures non
traitées ont été cultivées en parallèle. La mesure quantitative des taux d’allèles présents est
représentée en pourcentage relatif de l’un par rapport à l’autre en fonction du temps de culture
et sur trois échantillons de co-cultures indépendantes (Figure 37).

107
60

Fréquence allèlique SNP 1+2 (%)


50

40

30

20
Non traité
10 1µM BCNU

0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
Jours

Figure 37. Fréquence relative de l’allèle variant par rapport au commun dans les co-
cultures traitées et non traitées. Les barres d’erreur Y représentent les écart-types sur
trois co-cultures indépendantes.

Nous avons observé une diminution de la fraction de cellules 293T-SNP1+2 dans les
mélanges au profit des cellules 293T-WT au cours du temps, sans traitement comme en
présence constante de BCNU. La représentation relative de chaque allèle dans les co-cultures
non traitées est montrée sur la figure 38. On observe un avantage prolifératif de l’allèle WT
sur l’allèle SNP1+2, avec et sans sélection par le BCNU.

100%
90%
Fréquences relatives des allèles

80%
70%
WT et SNP 1+2

60%
50%
40%
WT
30%
20%
SNP 1+2
10%
0%
3 7 14 21 28 35 42 56 64 78 84 91
Jours

Figure 38. Fréquences relatives des allèles WT et SNP1+2 dans les co-
cultures non traitées cultivées sur 91 jours.

108
IV.5. Demi-vie des protéines MGMT commune et variante

La protéine MGMT est connue pour être dégradée par le système du protéasome après
ubiquitinylation, dès qu’elle a transféré le groupement alkyle sur son résidu interne Cys145.
Afin d’étudier la demi-vie des protéines exprimées par les lignées 293T-WT et 293T-
SNP1+2, nous avons d’abord testé l’activité protéasomale de ces deux lignées transduites afin
d’exclure une différence qui serait due à des capacités de dégradation différentes. Pour cela, la
dégradation d’une protéine connue pour être prise en charge par le protéasome a été mesurée :
il s’agit de IB qui, sous stimulation par le TNF, est dégradée rapidement, libérant ainsi le
facteur de transcription NFB. L’expression de IB a été mesurée par western blot sur des
extraits protéiques de chaque lignée, avec une cinétique de traitement par le TNF. La figure
39 montre une décroissance du taux de IB proportionnelle au temps d’exposition au TNF,
cette décroissance étant équivalente dans les deux lignées.

1
Rapport IKB/ actine

0,75

0,5

0,25
293T SNP1+2
293T WT
0
TNF 0 TNF 15' TNF 30' TNF 1H
Figure 39. Cinétique de décroissance de l’expression de la protéine IB
sous traitement par TNF mesurée par western blot.

L’analyse de l’expression de la MGMT par les lignées 293T-WT et 293T-SNP1+2, sous


inhibition de la synthèse protéique de novo par le cycloheximide, et traitées ou non par le
pseudo-substrat de la MGMT, l’O6BG, permet d’observer une stabilité de cette expression sur
une période de 8 à 10 h pour les deux lignées. L’addition d’O6BG convertissant la MGMT en
benzyl-MGMT entraine une décroissance de la quantité de protéine MGMT avec un taux
résiduel inférieur à 10 % à 8 h (Figure 40). La dégradation de la MGMT est plus précoce pour
la forme variante SNP1+2 par rapport à la forme commune WT, la première montrant une
demi-vie de 2 h et la deuxième une demi-vie d’environ 5 h.

109
100

Expression MGMT/actine
par rapport au t0 (%)
75

50
SNP1+2
25 SNP1+2 + O6BG
WT
0 WT + O6BG
0 2 4 6 8 10
Heures

Figure 40. Cinétique de décroissance de l’expression de la MGMT dans les deux lignées
293T-WT et 293T-SNP1+2 sous traitement par l’O6BG, mesurée par western blot.

Les analyses fonctionnelles réalisées à la recherche d’une différence entre les protéines
MGMT commune et variantes nous ont conduits à plusieurs observations. Tout d’abord, au
niveau structural, les deux polymorphismes étudiés entraînent des substitutions d’acides
aminés ayant des propriétés physico-chimiques similaires et la structure secondaire du
transcrit de MGMT n’est pas modifiée par la variation étudiée. Cependant, la fréquence des
codons utilisés pour la traduction du transcrit en protéine diffère, et il existe une disponibilité
moindre des ARN de transfert utilisés dans la traduction de la protéine variante par rapport à
ceux utilisés pour traduire la forme commune. L’utilisation d’un codon plus rare est
susceptible d’affecter l’efficacité de la synthèse de la protéine comme cela a été suggéré pour
des SNP synonymes du gène MDR1 où les codons variants, utilisés moins fréquemment que
les codons communs, entraînaient une traduction moins efficace de la glycoprotéine P, avec
des modifications de la conformation et de l’insertion du complexe transmembranaire et des
conséquences fonctionnelles sur la spécificité de substrat de la P-gp (104).

Au niveau fonctionnel, l’étude de la variation du gène MGMT a été rendue possible par la
création d’un modèle cellulaire isogénique d’expression stable des protéines MGMT
commune et variantes. La chimiosensibilité de ces cellules a été testée vis-à-vis de différents
agents alkylants. Les tests d’inhibition de croissance par le BCNU ont montré des sensibilités
différentes selon que la forme commune ou la (les) forme(s) variante(s) de la MGMT est
110
(sont) exprimée(s) et, bien que ces différences ne soient pas significatives, la MGMT portant
la double variation est apparue plus sensible au BCNU que la forme commune, sur trois
expériences indépendantes. La même constatation a été faite pour l’inhibition de croissance
entraînée par le témozolomide. En revanche, aucun effet de l’expression de la MGMT n’a été
observé lors des tests d’inhibition de croissance induite par le melphalan ou le cisplatine.

Les nitrosourées, tel que le BCNU, forment des mono-adduits chloroéthyles en O6G, et le
témozolomide, appartenant comme la dacarbazine à la famille des alkylants triazènes et
hydrazines, est un agent méthylant en O6G, N7G et N3A, la lésion O6MeG étant la plus
mutagène et cytotoxique. L’action de la MGMT permet de réparer directement ces lésions
alkylées en O6G. Le melphalan, lui, appartient à la famille des moutardes azotées et est un
alkylant bi-fonctionnel qui forme des adduits bis-chloroéthyles en N7G entraînant des
mésappariements N7G:T et des pontages inter- et intra-brins N7G:N7G, à la suite d’une
deuxième alkylation. Ces pontages sont également les lésions formées par les dérivés du
platine où les pontages intra-brins N7G:N7G représentent 95 % des pontages réalisés (84). Les
lésions par N-alkylation sont principalement réparées par le système du Base Excision Repair
(BER) qui reconnaît la lésion méthylée, l’excise par une N-méthyl ADN glycosylase en créant
un site abasique ; une endonucléase et une ligase permettent ensuite le remplacement du
nucléotide et le rétablissement de continuité du brin d’ADN. Les pontages inter- et intra-brins
sont, eux, préférentiellement pris en charge par le Nucleotide Excision Repair (NER) qui
incise le brin lésé et retire le nucléotide alkylé, conduisant à des cassures double-brin qui
donnent lieu à des recombinaisons par les systèmes de recombinaison homologue et non
homologue (HR, homologous recombination et NHEJ, non homologous end joining). La
réversion directe par la MGMT n’a donc pas de rôle direct sur la réparation des N-alkylations
et des pontages secondaires aux moutardes azotées et aux dérivés du platine, et nos résultats
sont en accord avec ces conceptions. Cependant, les agents chloro-éthylants eux-mêmes, tels
le BCNU, peuvent engendrer, après formation d’un mono-adduit chloro-éthyle obtenu par une
première alkylation, une lésion secondaire résultant en un pontage inter-brins (O6G:N1C le
plus souvent) qui est pris en charge par le système du NER et les recombinaisons HR et
NHEJ. Ainsi les lésions causées par les agents alkylants sont complexes et mettent en jeu
différents mécanismes de réparation. De nombreux facteurs influencent le choix des voies
moléculaires de réparation qui prennent en charge ces lésions ; ils sont dépendants de l’agent
alkylant, du type cellulaire et du statut de prolifération cellulaire (105).

Afin d’objectiver des différences fonctionnelles a priori faibles entre les cellules exprimant
les formes commune ou variantes de la MGMT, différents tests ont été réalisés avec un temps

111
d’observation croissant, depuis les tests métaboliques au MTT sur 72 h, les tests de survie
cellulaire par clonogénicité sur 7 jours et enfin la quantification allélique sur trois mois. Seul
ce dernier a révélé une différence significative dans la prolifération des cellules avec un
avantage de la forme commune de la MGMT par rapport à la forme variante dans des co-
cultures réalisées au long cours. Cet avantage prolifératif conféré aux cellules exprimant la
MGMT commune suggère que celle-ci serait plus efficace sur les lésions alkylées en O6G,
entraînant moins de mort cellulaire que la protéine MGMT variante. Cependant, cet avantage
de prolifération, observé en absence de traitement alkylant et donc dans une situation dans
laquelle la MGMT répare les lésions O6-alkylguanine endogènes, n’est pas potentialisé par
l’addition d’un traitement alkylant à faible dose. On peut supposer que cette dose infratoxique
de BCNU est trop faible pour exercer une pression de sélection sur la fonction de réparation
de la MGMT. Nous aurions pu réaliser des expériences complémentaires pour quantifier les
allèles commun et variant après un traitement bref des co-cultures, mais à des doses fortement
cytotoxiques de BCNU, et avec un réensemencement des cellules survivantes. Enfin, on ne
peut exclure une différence de prolifération entre des cellules issues de deux clones différents,
indépendante de la fonction de la MGMT, dans ce modèle cellulaire où l’intégration
lentivirale peut entraîner des phénomènes de mutagenèse insertionnelle et/ou d’activation de
gènes impliqués dans les voies de prolifération ou de survie cellulaire selon le site d’insertion
de la structure provirale.

La question posée sur une différence apportée par la double variation Ile143Val/Lys178Arg
sur la fonction de la MGMT a été étudiée par Ma et al. (99) qui n’ont pas observé de
différence entre les variants à partir des tests de survie des souches d’E. coli transfectées avec
les différents gènes variants de la MGMT. Mijal et al. (106) n’ont pas montré de différence de
prise en charge de différents substrats (O6 -benzyl, -butyl, 4-oxo-4-(3-pyridyl)-butylguanine)
par les MGMT commune et variantes. Margison et al. (100) ont observé une résistance plus
grande de la forme variante 143Val au pseudo-substrat PaTrin2, ce qui suggère que le site
actif de la MGMT pourrait être affecté par la variation, ce qui entraînerait un impact
fonctionnel sur la prise en charge de certains groupements alkylés par la MGMT. Nos
résultats sur les demi-vies des protéines MGMT commune et variantes, sous traitement par le
pseudo-substrat O6BG, montrent une moindre stabilité de la protéine MGMT double-variante
avec une demi-vie réduite de moitié par rapport à celle de la protéine commune. Ce résultat,
qui est en cours de confirmation, suggère une dégradation plus rapide de la forme variante.

La raison de cette dégradation plus précoce, qu’elle soit secondaire à une meilleure prise en
charge des groupements O6-benzyl-guanine ou à une modification autre du site actif ou de la

112
conformation protéique, déclenchant un signal d’ubiquitinylation et l’adressage au
protéasome, reste à déterminer. La différence observée des demi-vies protéiques ne peut donc
présager d’une capacité de réparation différente apportée par la variation, cette dernière ne
pouvant être objectivée que par un test in vitro mesurant l’activité catalytique des protéines
recombinantes MGMT sur un substrat d’ADN méthylé.

Finalement, les lésions O6-meG et N-méthyl purine (N-meG et N-meA) sont des lésions aux
conséquences importantes dans la carcinogenèse par les réarrangements chromosomiques
qu’elles sont susceptibles d’entraîner. La lésion O6-meG est à la fois mutagène par le
mésappariement O6-meG:T qu’elle entraîne et génotoxique en raison de la reconnaissance de
ce mésappariement par le système MMR et l’induction de cycles futiles de réparation pouvant
générer les cassures double-brin cytotoxiques. Ce mésappariement est donc à haut risque de
recombinaison car il induit des échanges entre les chromatides (SCE, sister chromatide
exchange) ; la génotoxicité de l’O6-meG est dépendante de la réplication qui génère le
mésappariement lui-même, et du système MMR pour sa conversion en cassures simple- et
double-brin. En effet, l’inactivation du système MMR dans des cellules Mer– (n’exprimant
pas la MGMT) entraîne une résistance de ces cellules à l’effet cytotoxique des agents
alkylants mais pas à leur effet mutagène (105).

Des systèmes de tolérance peuvent intervenir également. En effet, la lésion génotoxique


secondaire à l’intervention du MMR sur le mésappariement O6-meG:T est une lésion non
informative qui peut être contournée par les systèmes de tolérance : la synthèse
translésionnelle (translesion replication bypass) et la recombinaison bypass. La lésion
générée par l’O6-meG:T à la suite de l’intervention du MMR pourrait ne pas être prise en
charge par les ADN polymérases de basse fidélité du système de réplication translésionnelle,
et provoquer ainsi un blocage sévère de la fourche de réplication et la création de cassures
double-brin (107). Le système de tolérance préférentiel serait la recombinaison bypass qui
contourne ce blocage de la réplication en induisant des recombinaisons : les SCE. La
probabilité de conversion d’une lésion O6-meG en SCE est plus grande que celle de
conversion en aberration chromosomique ; ces probabilités ont été évaluées à un événement
SCE pour 30 lésions O6-meG et à une aberration chromosomique pour plus de 10 000 lésions
O6-meG. Ainsi le système de recombinaison bypass aurait un rôle important dans la tolérance
des lésions en O6G créant des échanges de matériel de type SCE ; ce serait seulement la
saturation de ce système par les lésions qui entraînerait un blocage sévère de la réplication et
la formation de cassures double-brin qui sont l’élément déclencheur final des aberrations

113
chromosomiques (107). Enfin, les cassures double-brin peuvent être réparées par les systèmes
de recombinaison homologue (HR) et non homologue (NHEJ).

La MGMT n’est donc pas le seul rempart contre l’effet génotoxique des lésions O6-alkylG :
en particulier, les protéines du système MMR (MSH2 et MSH6 pour la reconnaissance du
mésappariement, MLH1 et PMS2 pour l’excision de la thymine et son remplacement) et
celles impliquées dans la recombinaison bypass pourraient influencer le devenir de ces
lésions. Des modifications de fonction et/ou de structure de ces voies pourraient être associées
à la variation de la MGMT et avoir un impact sur le taux de création des SCE, des cassures et
des aberrations chromosomiques potentiellement leucémogènes. Un schéma représentant
l’intervention de ces différentes voies dans la prise en charge des lésions O6-alkylguanines est
présenté sur la figure 41.

114
Figure 41. Voies de réparation impliquées dans la prise en charge des lésions O6-
alkylguanines depuis l’action de la MGMT jusqu’à la formation des SCE, des cassures
double-brin et des réarrangements chromosomiques potentiellement leucémogènes.

115
Cette étude s’est intéressée aux syndromes myélodysplasiques et a permis la constitution
d’une cohorte de 65 patients souffrant de cette hémopathie, ainsi que le recueil de leur ADN
constitutionnel. Nous avons étudié la répartition, chez ces patients, des génotypes de 384 SNP
impliqués dans la réparation de l’ADN, le métabolisme, le transport et la détoxication des
xénobiotiques. Les différents critères cliniques analysés (stade OMS, anomalies
cytogénétiques, stade IPSS, etc.) ont montré une association préférentielle du génotype
variant de deux SNP d’un gène de réparation de l’ADN, le gène MGMT, avec le caractère
secondaire de ces hémopathies, et aucune autre association n’a été observée en ce qui
concerne les 374 polymorphismes analysables. L’identification d’une association avec le
caractère secondaire des SMD en particulier est intéressante par la possibilité d’établir sa
valeur en tant que marqueur génétique de risque de SMD secondaire, ce qui représenterait un
outil de prédiction précieux car les SMD secondaires ont un pronostic très péjoratif, alors
même qu’ils peuvent être en rémission de leur cancer antérieur traités par chimio- et/ou
radiothérapie. L’implication du gène MGMT dans cette association est également intéressante
car la transférase MGMT est l’unique enzyme responsable de la prise en charge des adduits
O6-alkylguanine sur l’ADN, qui sont les lésions mutagènes et cytotoxiques créées par les
agents alkylants. Cette association très significative entre le génotype variant du gène MGMT
et les SMD secondaires est à confirmer sur une deuxième cohorte comptant 45 patients à ce
jour et dont le recrutement se poursuit.

L’étude épidémiologique de la recherche de la valeur prédictive de ce marqueur génétique


pour le risque de SMD/LA secondaire n’a pas permis de lui associer un risque relatif. Cela
soulève la difficulté de l’identification d’un marqueur de susceptibilité individuelle comme
facteur de risque de cancer et de leucémie, le lien causal existant entre le groupe à risque
exposé au polymorphisme et le développement du SMD secondaire pouvant être très faible et
reposer sur une combinaison d’autres polymorphismes associés à celui de cette voie.

Les études fonctionnelles réalisées sur les polymorphismes du gène MGMT ont montré en
effet que la présence seule de la variation identifiée n’entraîne pas de modification importante
de la chimiosensibilité des cellules. Des tests plus sensibles comme celui de la quantification
allélique sur des co-cultures à long terme permettent en revanche de suspecter une différence
de prolifération à long terme. Des explorations fonctionnelles complémentaires sont
nécessaires pour évaluer clairement l’impact de ces polymorphismes sur la fonction de
réparation de la MGMT.
116
En conclusion, la susceptibilité individuelle face au risque de SMD secondaires pourrait être
liée à des modifications de la capacité de réparation des dommages à l’ADN, en partie à la
réparation des lésions alkylées par la MGMT, et en partie selon d’autres mécanismes de
réparation. Les lésions O6-alkylguanine sont en effet responsables de l’apparition de lésions
secondaires elles-mêmes prises en charge par d’autres mécanismes de réparation. En outre,
des variations impliquant les voies de métabolisme et détoxication des xénobiotiques
pourraient s’y associer.

117
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126
Liste des abréviations

AREB : anémie réfractaire avec excès de blastes


ARS : anémie réfractaire sidéoblastique
BER : base excision repair
CCDS : consensus coding sequence
CPP : comité de protection des personnes
CRDM : cytopénies réfractaires avec dysplasie multi-lignées
CRDU : cytopénie réfractaire avec dysplasie unilignée
DMEM : dulbecco’s modified Eagle medium
EPO : érythropoïétine
FAB : classification franco-américano-britannique des hémopathies
FDA : food and drug administration
FISH : fluorescent in situ hybridization
GWAS : genome wide association studies
HAS : haute autorité de santé
HR : homologous recombination
ICD-O : international classification of diseases for oncology
IPSS : international prognostic scoring system
LA/ LAM : leucémie aigue, leucémie aigue myéloïde
LLC : leucémie lymphoîde chronique
LMMC : leucémie myélo-monocytaire chronique
LNHB : lymphome non hodgkinien B
MAF : minor allele frequency
MMR : mismatch repair
MOI : multiplicity of infection
NCBI : national center for biotechnology information
NER : nucleotide excision repair
NHEJ : non homologous end joining recombination
OMS : organisation mondiale de la santé
ORF : open reading frame
PCR : polymerase chain reaction
SMD : syndrome myélodysplasique
SNP : single nucleotide polymorphism
SVF : sérum de veau fœtal

127
128
Titre : Syndromes myélodysplasiques de novo et secondaires à un traitement anti-cancéreux :
recherche de marqueurs génétiques de susceptibilité individuelle.
Résumé: Les syndromes myélodysplasiques (SMD) sont des hémopathies myéloïdes clonales
évoluant vers une leucémie aiguë (LA). Les SMD et LA secondaires, survenant après traitement par
chimiothérapie et/ou radiothérapie, ont un pronostic très péjoratif. Cependant seule une partie des
sujets exposés aux traitements cytotoxiques développent un SMD secondaire, ce qui suggère une
composante génétique dans la susceptibilité individuelle au risque de développer un SMD secondaire.
Les objectifs de ce travail ont été d’identifier des polymorphismes génétiques de type SNP (Single
Nucleotide Polymorphism) significativement associés à des caractères cliniques et biologiques des
SMD tel leur caractère secondaire. Une « puce » à façon a sélectionné 384 SNP de fréquence allélique
supérieure à 10 % impliqués dans la réparation de l’ADN, le métabolisme, le transport et la
détoxication des xénobiotiques. L’ADN constitutionnel de 65 patients atteints de SMD primaire et
secondaire a été recueilli et génotypé pour ces 384 SNP. La seule association significative par test
exact de Fisher (p = 0,009 après correction de Benjamini-Hochberg) a été observée pour le caractère
secondaire des SMD et la présence de l’allèle variant de MGMT (MéthylGuanine MéthylTransférase)
sur deux SNP en déséquilibre de liaison, rs2308321 (Ile143Val) et rs2308327 (Lys178Arg). Nous
avons recherché le caractère prédictif de la présence de l’allèle variant de MGMT pour le risque de
SMD/LA secondaire chez des patientes ayant reçu un traitement cytotoxique pour un cancer du sein, et
ayant développé une LA secondaire. Enfin, nous avons construit des lignées cellulaires stables,
isogéniques, exprimant soit la forme sauvage soit la forme variante de MGMT. Les études
fonctionnelles par tests de cytotoxicité, co-cultures à long terme et étude des demi-vies des protéines,
sous traitement alkylant, montrent respectivement des différences de sensibilité, de prolifération ou de
dégradation entre les formes variante et sauvage de MGMT.
Mots clés : SMD/LA secondaires, polymorphismes génétiques SNP, puce « à façon » de génotypage.
Laboratoire: Inserm U916 VINCO (Validation et Identification de Nouvelles Cibles en Oncologie),
229, cours de l’Argonne, 33076 Bordeaux cedex.

Title: Therapy-related myelodysplastic syndromes: identification of genetic markers of


individual susceptibility.
Abstract: Myelodysplastic syndromes (MDS) are clonal hematopoietic disorders evolving toward
acute myeloid leukaemia (AML). Therapy-related MDS and AML occur after chemo- and/or
radiotherapy for previous cancer and have a very poor outcome. However, only a minimal proportion
of patients exposed to anticancer drugs develop secondary MDS, suggesting a genetic component in
individual susceptibility. The aim of our study was to identify gene polymorphisms significantly
associated with MDS in patients. We have selected 384 SNPs (single nucleotide polymorphisms) with
allele frequency >10% in genes involved in DNA repair and drug metabolism and transport. DNA
extracts were obtained from blood and cheek samples from a population of 65 MDS patients, and the
384 SNPs were genotyped. We analysed the associations existing between each genotype and several
pathological features, especially the treatment-related character of MDS. The Fisher exact test with
Benjamini-Hochberg correction for multiple testing was applied for statistical analysis. The only
significant association (p = 0.009 after correction) was observed for the treatment-related character of
MDS and the presence of a variant allele in MGMT (methylguanine methyltransferase, a gene
involved in DNA repair), characterised by two SNPs in complete linkage disequilibrium: rs2308321
(Ile143Val) and rs2308327 (Lys178Arg). An epidemiological study was performed to assess the
predictive value of the variant allele in MGMT for the development of secondary acute leukaemia
among patients treated for breast cancer. We have constructed isogenic stable cell lines expressing
either the wild-type or the variant allele of MGMT. Functional studies (analysis of response to
alkylating agents, allele quantification of mixed cultures of wild-type and variant cells and half-lives
study of the proteins) show differences in sensitivity to DNA-damaging agents, proliferative capacity
and MGMT rate of degradation between the wild-type and the variant MGMT.
Key words: Therapy-related MDS/AML, Single Nucleotide Polymorphisms (SNP), Custom-made
SNP array.

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