Psychoéducation du TDAH
Que dois-je dire aux parents de mon patient ?
Par Sébastien Henrard, psychologue spécialisé en neuropsychologie
D
ans le cadre d’une remise de résultats et du diagnostic
de TDAH chez l’enfant, la question que l’on me pose
souvent c’est :
« Quelles sont les informations que je peux / dois
leur transmettre sur le trouble ? »
Bonne nouvelle ! Les recommandations internationales de la
NICE nous donnent une trame de travail pour structurer notre
discours.
Après que le diagnostic de TDAH ait été posé, organisez une dis-
cussion structurée avec les parents (et leur famille ou aidants,
selon le cas) sur la façon dont le TDAH pourrait affecter leur
vie et celle de leur enfant. Cette discussion doit être séparée
de l’entretien diagnostic. En effet, les parents vont déjà devoir
encaisser et comprendre le trouble avant de pouvoir commencer
à intégrer des informations importantes pour la famille entière.
Cette discussion, qui peut s’étendre sur un ou deux ren-
dez-vous doit inclure :
# Les effets positifs de la réception d’un diagnostic, tels que :
- Améliorer la compréhension des symptômes et leur
impact dans la vie quotidienne. En effet, une meilleure
compréhension des symptômes du TDAH et de leur im-
pact au quotidien permet pour les parents de mieux iden-
tifier les points d’actions éventuels. Mieux comprendre
l’enfant fait partie de la stratégie globale d’action. Quand
les parents comprennent leur enfant, ils peuvent na-
turellement mieux accepter son fonctionnement et
adapter leur façon d’aborder les choses au quotidien.
- Identification et mise à profit des forces individuelles.
L’évaluation du TDAH permet à la fois d’identifier les
symptômes et leur impact mais surtout d’identifier les
ressources de l’enfant. Cela permet de ce fait de pouvoir
utiliser ces points forts pour mieux aménager le quotidien
aussi bien à la maison qu’à l’école. Il est toujours plus per-
tinent d’investir du temps dans l’amélioration des points
forts pour devenir « excellent » que d’essayer de com-
bler des faiblesses qui seront aux mieux « moyennes ».
- Améliorer l’accès aux services. En tant que profession-
nel, nous avons un rôle à jouer dans la réorientation des
parents. Si nous ne pouvons pas prendre en charge, ou
si nous n’avons pas les compétences nécessaires pour
prendre en charge, nous avons le devoir de trouver le
bon professionnel qui pourra accompagner les familles.
Cela permet d’éviter les errances médicales souvent trop
longues. La réorientation est un outil puissant et éthique
que nous ne devons pas négliger dans nos professions.
# Les effets négatifs de la réception d’un diagnostic, comme :
- La stigmatisation et l’étiquetage. En effet, poser le
terme TDAH n’est pas sans risque au regard de la so-
ciété dans laquelle nous vivons. Les parents doivent se
préparer à entendre beaucoup de choses : mauvaise
compréhension du trouble par l’entourage, effet de
mode, problème d’éducation … tout peut y passer. Notre
rôle est d’accompagner les parents, de leur expliquer le
pourquoi les gens pensent encore comme cela parfois et
de participer à l’effort de reconnaissance du trouble par
l’ensemble des gens.
 - Une plus grande tendance au comportement impul-
sif. Le TDAH est en effet caractérisé par trois grands
symptômes : la fluctuation attentionnelle, l’hyperactivité
et l’impulsivité. Ce dernier est souvent le symptôme le
plus impactant et pouvant, dans le temps, poser le plus
de problème. Avoir conscience de sa présence, l’accepter
à certains moments et travailler dessus à d’autres est un
point crucial à ne pas négliger.
# L’importance des modifications environnementales pour
réduire l’impact des symptômes du TDAH. En effet, la pre-
mière action préconisée par les recommandations interna-
tionales, en plus de la psychoéducation, est de travailler sur
l’hygiène de vie. Sports, alimentation, sommeil et temps
d’écran sont les quatre éléments à prendre en compte dès le
départ pour réduire l’impact des symptômes au quotidien.
Leur gestion ne permet pas de « soigner » le TDAH mais de
contrôler son intensité. Bons pour tout le monde, ces quatre
points sont essentiels dans l’accompagnement des patients
atteints de TDAH.
# Problèmes scolaires. Dans le cadre de difficultés scolaires
associées au TDAH, il est extrêmement important d’accom-
pagner les enseignants. En effet, au même titre que les
parents, les enseignants doivent comprendre le TDAH, ses
manifestations et être accompagnés tout au long de l’année
pour mieux gérer à la fois les comportements de l’enfant
mais également ses apprentissages. Au-delà de l’appel du
professionnel ou de la réunion annuelle, l’enseignant doit
se sentir soutenu dans la compréhension de son élève et la
mise en place des outils adaptés.
# Problèmes de relations sociales. L’impulsivité, le manque
d’écoute liés à l’attention et le besoin constant de bouger
peuvent également avoir un impact considérable sur les
relations sociales de l’enfant. Il est important de bien le
comprendre et l’anticiper pour pouvoir agir au plus vite et
aborder le sujet dans une discussion avec les interlocuteurs
concernés. De même, dans certains cas, les enfants peuvent
suivre un groupe de développement des habiletés sociales
afin de mieux comprendre les interactions de groupe.
# Les comorbidités. Ne jamais oublier qu’un diagnostic de
TDAH isolé est l’exception. Précisez cela aux parents afin de
ne pas passer à côté d’autres difficultés et troubles pouvant
venir aggraver la symptomatologie du TDAH (par exemple
une anxiété généralisée se surajoutant au TDAH crée d’im-
portantes fluctuations attentionnelles et une irritabilité très
problématiques). Préciser cela permet d’entamer des dé-
marches rapides pour s’assurer du plan thérapeutique adé-
quat et d’anticiper l’aggravation de l’état de l’enfant.
# Dans le temps et sans prise en charge, le risque est accru
d’abus de substances, d’automédication, de délinquance, de
problèmes de conduite, de problèmes de santé … En effet, si
les patients TDAH ne sont pas pris en charge, les difficultés
liées à l’impulsivité entrainant des abus et des addictions
sont bien présentes. En parler permet d’anticiper, d’être at-
tentif et de réagir au plus vite. De même, ce discours met
également en avant l’importance de la prise en charge
précoce pour éviter ces difficultés et le besoin d’impli-
cation des parents de manière active dans la prise en
charge de l’enfant.
En conclusion, cette discussion structurée doit éclairer les pa-
rents sur les points positifs et négatifs de ce diagnostic et per-
met de mettre en place le plan de traitement spécifique et adapté
à chaque famille.
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