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Quiviger 2595016061G TH
Quiviger 2595016061G TH
UNIVERSITÉ AIX-MARSEILLE
École Doctorale :
Sciences pour l’Ingénieur : Mécanique, Physique, Micro et Nanoélectronique
Spécialité :
Mécanique des solides
Audrey QUIVIGER
Composition du jury
Je tiens avant tout à remercier les principaux acteurs de cette thèse, Vincent,
Jean, et Joseph pour leur encadrement, leurs conseils avisés et critiques constructives
qui ont été des atouts majeurs pour la réalisation de ce travail. Je remercie
chaleureusement Gilles, qui m’a accueilli au sein du LCND.
Je remercie tout particulièrement Cédric et Jean François, sans qui cette thèse
n’aurait pas été la même. Merci à vous pour votre soutien et vos idées de génie.
Je remercie l’ensemble des équipes du LCND, de P1E et P1B, ainsi que du LANL
pour leur accueil chaleureux et leur bonne humeur. Merci à vous tous, permanents,
thésards, stagiaires, post-docs, ATER… Avec une pensée particulière pour Jean-
Philippe, Matthieu, Nicolas, Alice, Erwin, Naïm et Samir pour tous les moments de
convivialité que nous avons pu partager.
Introduction ............................................................................................................................. 1
1.2.1. Matériau...................................................................................................................... 10
3.2.2. Protocole..................................................................................................................... 85
4.3.4. Synthèse....................................................................................................................155
4.4.4. Synthèse....................................................................................................................170
4.5. Conclusion............................................................................................................171
Références ...........................................................................................................................181
Introduction
Introduction
Introduction
1
Introduction
Les méthodes issues de l’acoustique non linéaire présentent également un fort intérêt
dans le cadre de la caractérisation de fissure. Les paramètres issus de ces méthodes
montrent des dynamiques d’évolution très intéressantes pour des caractérisations de
fissure dans des matériaux homogènes, tels que certains aciers. Une transposition de ces
méthodes au cas du béton serait donc un atout précieux. Cependant, la forte
hétérogénéité du béton est également source de non linéarités acoustiques,
indépendamment de la présence de fissure. L’enjeu est donc de différencier ces deux
contributions.
Dès lors, l’objectif de cette thèse est de fournir des réponses sur la capacité de ces
méthodes à apporter des solutions à la caractérisation de fissure en tenant compte de son
état de fermeture. Cette étude doit permettre de conclure sur les possibilités, ainsi que
les limites associées à chacune des méthodes.
Dans un premier chapitre, nous menons l’étude du matériau, ainsi que son
endommagement. Les éléments entrant dans la composition du béton sont présentés,
ainsi que le mécanisme de prise. Les mécanismes à l’origine de l’endommagement sont
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Introduction
Dans un second chapitre, la propagation linéaire des ondes ultrasonores est étudiée.
Nous présentons les équations de base de la propagation des ondes en milieu homogène,
puis nous traitons plus particulièrement du béton, et des conséquences de son
hétérogénéité sur la propagation ultrasonore. L’interaction de l’onde avec une fissure est
également étudiée et permet de définir les conséquences de la fissuration sur la
propagation du champ acoustique. L’état de l’art de la caractérisation de fissure par
acoustique linéaire est développé. Nous examinons ensuite une méthode particulière
issue de l’acoustique linéaire : l’analyse de la diffusion de l’énergie, qui s’appuie sur
l’analyse du champ incohérent. Les équations relatives au transport de l’énergie sont
posées, ainsi que certaines solutions particulières associées à la géométrie des
structures. Enfin, un état de l’art est réalisé.
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Introduction
La conclusion générale permet de faire le point sur les différentes méthodes envisagées
et leur potentiel dans le cadre de la caractérisation in situ de fissures fermées. Les
perspectives scientifiques et industrielles sont dégagées avec le double objectif
d’améliorer la compréhension des interactions ondes ultrasonores – défauts dans les
bétons et de parvenir à terme à de nouveaux moyens de mesures ultrasonores
exploitables in situ.
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Chapitre I
En France, les chocs pétroliers de 1973 et 1974 ont conduit à des modifications de la
politique énergétique et au développement du programme nucléaire civil, privilégiant
ainsi ce type de production afin de réduire la dépendance énergétique du pays.
Aujourd’hui, 58 réacteurs, répartis sur 19 sites en France, permettent en moyenne la
production de 410 milliards de kWh par an.
La nature du combustible, ainsi que le retour d’expérience depuis soixante ans ont
conduit les exploitants, ainsi que les agences gouvernementales et civiles à faire de la
sureté de ces centrales une priorité absolue. La conception et la construction de ces
centrales sont soumises à des règles et des contrôles très stricts en matière de sécurité.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Cette structure de béton armé d’une épaisseur de 1,2 m (réacteur de type REP 1450
MWe) est bi-axialement précontrainte. Elle est dimensionnée pour résister à une
pression interne relative de 0.4 MPa à une température de 140°C, ce qui correspond à
l’accident de dimensionnement APRP (Accident par Perte de Réfrigérant Primaire). Si
l’on effectue un calcul simplifié des contraintes imposées à la structure lors d’un
incident APRP et celles apportées par la précontrainte, il est possible de constater que la
précontrainte permet de maintenir les sections du béton en compression lors d’un
APRP. Toutefois, ces calculs sont assez simplifiés en regard de la géométrie de
l’enceinte qui est en réalité localement complexe (présence de sas d’accès,
positionnement des câbles de précontrainte …). De plus, la température, en cas
d’incident, modifie le comportement de la structure et des efforts en jeu. Enfin, les
forces de précontrainte diminuent au cours du temps du fait du vieillissement du béton
et de l’acier. Il est nécessaire de prédire correctement cette évolution tout au long du
fonctionnement d’une centrale.
Dans le cadre d’un incident APRP, si les contraintes initiées sont de l’ordre des
contraintes apportées par la précontrainte, des fissures peuvent apparaître dans
l’enceinte.
Afin de vérifier que la structure de l’enceinte conserve ses propriétés initiales, des
épreuves d’enceintes décennales sont réalisées sur chaque réacteur. L’épreuve consiste
en une mise en surpression de l’enceinte à 0,4 MPa en air à température ambiante.
L’enceinte doit, à l’issue de ces tests, prouver sa capacité à assurer un taux de fuite
inférieur à 1,5% de la masse totale des fluides contenus par tranches de 24 heures.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Les agressions externes entraînent une dégradation prématurée du béton armé, qui sera
d’autant plus importante et rapide que le réseau de fissures est important, facilitant le
transport des agents agressifs au cœur de la structure. De plus, la présence de ces
fissures génère localement une augmentation des contraintes qui facilite leur
propagation.
Figure 2 : Fissure générée par la différence de coefficient d'expansion thermique entre une barre de
PMMA et du béton (Poursaee & Hansson 2008)
9
Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
1.2. Le béton
1.2.1. Matériau
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Il existe en réalité une très large gamme de bétons dont la composition évolue en
fonction des caractéristiques mécaniques souhaitées, ou encore selon l’environnement
du futur ouvrage. Certains adjuvants peuvent ainsi entrer dans la composition d’un
béton afin d’en modifier ses propriétés.
Les granulats utilisés dans les travaux de génie civil doivent répondre à des impératifs
de qualité et des caractéristiques spécifiques de chaque usage. Ils constituent le squelette
du béton et représentent dans les cas usuels, 70 à 80% de la masse totale du béton.
Les granulats sont définis par leur granularité : la distribution dimensionnelle des grains,
exprimée en pourcentage de masse passant au travers de tamis à mailles carrées. La
classe granulaire est ensuite déterminée en termes de dimension inférieure (d) et
supérieure (D) des tamis. Il existe trois classes de granulats : le sable (d=0 et D < 4
mm), le gravillon (d > 2mm et 4mm < D < 63mm) et le grave (D > 63mm). Il existe
également la notion de filler pour des grains inférieurs à 63µm. Pour plus
d’informations, il est possible de se référer aux normes en vigueur (AFNOR 2004b;
AFNOR 2004a; AFNOR 2002b; AFNOR 2003).
La distribution des granulats au sein du béton est réalisée de façon à être la plus
continue possible afin d’assurer la meilleure compacité possible. Ceci va contribuer à la
diminution des espaces entre grains, favorisant la réaction d’hydratation et améliorer les
propriétés mécaniques du béton.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
gypse. Le tout est ensuite porté à très haute température, et le mélange est corrigé si
nécessaire.
Le ciment ainsi obtenu peut également offrir une très grande variabilité, qui dépend de
la provenance des matériaux, des adjuvants utilisés au cours de la fabrication et des
dosages entre les différents constituants. Le produit final est conforme aux exigences du
cahier des charges qui est lui-même fonction des contraintes environnementales
auxquelles doivent faire face les différents ouvrages, ainsi que des normes de
construction en vigueur.
L’ouvrabilité du béton dépend de la quantité d’eau que l’on apporte au mélange. Ainsi,
plus le béton sera liquide, plus il sera facile à mettre en place. Cependant, un excès
d’eau diminuera la résistance du matériau. En effet, la résistance d’un béton dépend
directement du ratio entre les quantités massiques d’eau et de ciment (E/C) introduites
dans le mélange (Figure 4).
Dans les faits, pour un béton ayant un rapport E/C élevé, la distance entre grains de
ciment augmente et rend difficile la création de contacts entre les grains pendant la prise
du ciment. Le ciment possède au final une plus faible résistance et une porosité accrue.
A contrario, lorsque le rapport E/C diminue, les contacts entre grains augmentent,
conférant une résistance élevée au béton une fois durci.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 4 : Influence du rapport E/C sur les contacts lors de la prise du béton
L’eau commence par entourer chaque grain de ciment en formant un réseau capillaire.
Puis, les composés anhydres du ciment sont alors attaqués en surface par l’eau pour
produire des composés hydratés. Les silicates de calcium C3 S et C2 S présents dans le
ciment, se dissolvent pour former des silicates de calcium hydratés (C-S-H),
caractéristiques d’un gel, et de la portlandite. L’enchevêtrement du gel C-S-H donne sa
solidité au ciment : les C-S-H se développent à la surface des grains de ciment non
hydratés et comblent progressivement les interstices capillaires entre les grains.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Taylor 1997; Bentz & Stutzman 2006; Hanehara & Yamada 1999; Hewlett 2004). Il
existe également des simulations numériques en développement du modèle de prise afin
de mieux comprendre les phénomènes mis en jeu (Garboczi & Bentz 1991; Bentz et al.
1993).
1.2.1.3. Porosité
La porosité correspond au rapport entre le volume de gaz présent dans le matériau et le
volume total de ce dernier.
La porosité influe directement la résistance des structures ainsi que leur durabilité. Elle
est directement issue de la formulation du béton, et des réactions chimiques qui ont
ensuite lieu jusqu’à la formation du béton. La porosité mesurée comprend également les
microfissures induites par le mécanisme de prise du béton. La dimension des pores est
variable, et s’étend de 10 nm pour les pores capillaires, à 1 mm pour les vides d’air
occlus et les défauts de compaction.
Bentz et Stutzman (Bentz & Stutzman 2006) constatent ainsi que la concentration de
fumées de silices introduites dans la formulation du béton possède une influence directe
sur la porosité au sein du matériau. Ce composé est généralement utilisé dans la
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Il existe ainsi une région, d’une épaisseur de dix à cinquante micromètres, localisée
autour des agrégats, dans laquelle la porosité augmente à mesure que l’on se déplace
vers le granulat, atteignant un maximum à la frontière avec ce dernier (Scrivener
1989).Cette zone se nomme classiquement ITZ, pour Interfacial Transition Zone
(Figure 7). Ce fait est confirmé par simulation numérique. Garbozi et al. montrent en
effet que la compacité particulière au niveau de l’interface granulat/ciment, ainsi que
l’impossibilité d’un granulat, non réactif, de créer un réseau de C-H-C avec le ciment
conduisent à une augmentation locale de la porosité dans cette zone (Garboczi & Bentz
1991). Le module d’Young dans cette zone particulière est de l’ordre de 15 GPa selon
Li & al (Li et al. 1999), soit environ égal à 0.4 fois le module d’Young de la pâte de
ciment selon Lutz et al. (Lutz et al. 1997). Le coefficient de Poisson au niveau de l’ITZ
est estimé comme étant de l’ordre de 0.3 selon Simeonov et al. (Simeonov & Ahmad
1995)
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 7 : Image en rétrodiffusion d'une coupe de béton. L'agrégat est à gauche. Les lignes blanches
indiquent les distances à 20µm et 50µm de l'interface (Scrivener et al. 2004)
Figure 8: Illustration de la connectivité: à porosité égale, le transport des agents agressifs est facilité si la
connectivité est élevée
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Historiquement, les caractéristiques retenues pour désigner un béton sont ses résistances
mécaniques en compression et en traction. Des normes ont également été édictées au
regard du classement des bétons. La norme actuelle NF EN 201-6 (AFNOR 2002a)
retient cinq critères pour définir un béton : la classe d’exposition, la classe de résistance,
la classe de consistance, la dimension maximale des granulats et les classes de
chlorures. Seules ces grandeurs ont longtemps intéressé les professionnels du bâtiment.
On cherchait alors uniquement à connaître le comportement du matériau pour une
situation donnée, et non à le rattacher à des paramètres plus classiques comme les
modules d’Young ou Coefficient de Poisson.
Certains procédés expérimentaux sont destructifs : des essais mécaniques sont effectués
sur des échantillons provenant de la même gâchée que les ouvrages, ou encore
directement prélevés sur site par carottage. Certains procédés sont également non
destructifs, comme les mesures ultrasonores qui relient la vitesse des ondes aux
propriétés intrinsèques du matériau. Il existe actuellement des domaines de recherche
dont l’objectif à terme est de déterminer le module d’Young effectif du béton de façon
analytique en fonction de la formulation (Li et al. 1999). Ce modèle, basé sur un
principe d’homogénéisation de la structure, prend en compte différentes zones du
béton : agrégats, ITZ et matrice cimentaire. À partir des caractéristiques de
formulation, Li et al. (Li et al. 1999) déterminent le module d’Young du béton avec des
valeurs analytiques proches de la littérature (Stock et al. 1979).
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Les différents types d’endommagements, ainsi que leurs conséquences respectives sur le
béton sont donc présentés.
Puis, à partir d’une température d’environ 100°C, jusqu’à 600°C, les hydrates de gel
CSH se déshydratent, entraînant des pertes de masse importantes (Khoury et al. 2002).
Aux environs de 500°C, l’hydroxyde de calcium, se décompose en chaux et eau libre. A
700°C, les carbonates de calcium se décomposent à leur tour (Noumowé 1995).
Des tests de chargement sur des éprouvettes de béton haute performance exposées à une
très forte élévation de température sont présentés figure 9. Ils montrent les
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
La pénétration des chlorures au sein de la structure est également une très importante
source de dégradation de cette dernière dans le cas d’un béton armé. Les ions chlorures
pénètrent dans les pores ou par diffusion et provoquent, au-delà d’une certaine
concentration, une destruction locale du film de passivation au niveau des armatures.
Cette dépassivation permet par la suite un amorçage du processus de corrosion au
niveau des armatures en acier présentes dans le béton.
L’attaque sulfatique est la réaction entre les sulfates présents dans l’environnement et
les aluminates du béton. Cette réaction génère la formation d’une phase expansive au
sein du matériau qui se fissure comme indiqué figure 12 (Khelifa et al. 2008).
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 12 : Conséquences d'une exposition aux sulfates sur un échantillon de béton (Khelifa et al. 2008)
Chargement statique
Le béton possède un comportement mécanique fortement non linéaire comparativement
aux comportements des éléments qui le composent (granulats et ciment). Cette non
linéarité est présentée figure 13.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Cette non linéarité est supposée due à la présence de micro fissures qui se développent
au cœur de la matrice lors d’un chargement ou à la faible cohésion qui peut exister entre
le ciment et les granulats, dans cette zone communément nommée ITZ ou Interfacial
transition Zone.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Sur la figure 14, il est possible de constater les effets de la fatigue sur un béton conservé
à 20°C. Les fissures sont localisées dans la matrice et non dans la zone interfaciale de
transition. De plus, une déviation ou un arrêt des microfissures par les pores ainsi que
les granulats peut être observé. Selon Li et al. (W. Li et al. 2011), ceci démontre que la
fatigue sur le béton est principalement une source de génération de nouvelles
microfissures. Ceci s’explique par le fait que l’énergie requise pour propager une fissure
déjà existante est bien plus élevée que celle nécessaire à la génération de nouvelles
microfissures (Soroushian & Elzafraney 2004).
Cycles gel-dégels
L’exposition du béton à des cycles répétés de gel- dégels peut également entraîner un
vieillissement prématuré de la structure. En effet, suivant sa composition initiale, sa
capacité de résistance à de tels cycles peut évoluer de manière significative.
En cas d’exposition au gel, le risque d’endommagement augmente avec les degrés de
saturation en eau du béton ainsi que du réseau microporeux. Le volume de distribution,
le rayon, la taille de pores sont intrinsèquement liés à la température de gel du béton.
Lors d’une chute de la température suffisante, l’augmentation de volume de la glace
engendre une augmentation de la pression interne. Si la pression devient supérieure aux
capacités mécaniques de résistance du matériau, on assiste au développement de
fissures internes, généralement initiées au niveau de la porosité.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Li & al. (W. Li et al. 2011) présentent un béton soumis aux cycles gel-dégels, puis
soumis à des cycles de chargement. Cette étude permet de mettre en relief les
conséquences d’une exposition au gel sur la fissuration d’un béton par chargement
statique. Les auteurs mettent en évidence un renforcement du matériau par la présence
de gel qui solidifie les pores et diminuent ainsi la micro fissuration du béton aux
premiers stades du chargement. Pour un chargement plus important, la présence de
glace permet aux fissures initiées par la fatigue de se propager plus facilement,
accélérant ainsi la formation d’un réseau de macro-fissures.
1.2.3. Fissuration
Les modes de dégradation du béton après la prise sont nombreux, et peuvent avoir
plusieurs origines (Figure 15). Le principal point commun de tous ces types d’agression
du béton étant leur conséquence : la génération de microfissures dans le béton qui
peuvent par la suite se développer en macrofissures. Ces deux types de fissures
augmentent la porosité globale du matériau, ainsi que sa connectivité. A terme, elles
conduisent à une perte d’étanchéité du béton ainsi que de ses caractéristiques
mécaniques.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
(Newman & Choo 2003). Il est ainsi nécessaire de différencier les modes d’initiation
des fissures ainsi que leurs origines au niveau microscopique. Ces différents modes
génèrent ensuite des modes de propagation ainsi que des motifs de fissures différents.
Étape 1
Lorsque le béton est soumis à une faible contrainte, des fissures sont générées
localement au niveau microscopique aux endroits où les contraintes sont les plus
élevées et la résistance la plus faible. La redistribution des contraintes sur l’ensemble
de ces microfissures créé un état d’équilibre. A ce stade, les microfissures sont stables et
ne se propagent pas.
Étape 2
Lorsque le niveau de contraintes internes augmente, les microfissures initialement
stables commencent à se propager, et formant des macro fissures. Selon l’orientation
des efforts, le mode de déformation à la pointe de la fissure et la direction de
propagation diffèrent (Figure 16).
La propagation des fissures se fait généralement le long des granulats, via la zone de
transition où les résistances mécaniques sont les plus faibles de par la microfissuration
déjà présente (Satoh et al. 2010; Rosselló & Elices 2004).
Durant cette seconde étape, le réseau de fissures augmente de façon lente et stable. Si le
chargement est stoppé et que l’état de contraintes reste constant, la propagation cesse.
Cependant, le degré de fissuration atteint éventuellement un point pour lequel les
modifications structurelles sont importantes. En effet, lors de la propagation d’une
fissure macroscopique, il se crée en front de rupture une zone dans laquelle les
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 17 : Modèle de fissure pour la modélisation de la fissuration dans le béton (Hillerborg et al. 1976).
La figure montre la présence d’une zone de microfissuration en pointe de fissure
Étape 3
La troisième et dernière étape de la fissuration intervient lorsque, sous l’application de
contraintes, le réseau de fissures s’est développé à un tel point qu’il en devient instable.
A cette étape, la concentration d’énergie générée par la fissuration au sein du système
est suffisante pour auto-entretenir leur propagation. Dès que la fissuration a atteint ce
stade, la fracture complète du béton est inévitable, indépendamment du chargement.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Dans le cas du béton armé, la présence de fissures entre la surface du béton et la nappe
de ferraillage induit une corrosion de l’acier dont les conséquences sont préjudiciables
aux propriétés mécaniques de l’ensemble de la structure.
Pour un béton sain, le ferraillage est protégé de la corrosion par le pH élevé du béton.
Au contact de ce pH, de l’ordre de 13, la corrosion est stoppée par le développement
d’une fine couche d’oxyde ferreux en surface du métal : la couche de passivation. Les
agressions chimiques du béton conduisent à un abaissement du PH et au développement
actif de la corrosion.
Les produits de la corrosion sont naturellement extensifs. La variation de volume qui est
ainsi produite au niveau de l’armature génère des contraintes internes au niveau du
ferraillage.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 18 : La corrosion induit une expansion volumique au sein de béton, induisant la fissuration
(American Galvanizers Association 2012)
Figure 19 : Evolution de l'indice de confiance des ponts, influence de la corrosion (Val et al. 1998). Cet
indice correspond à une probabilité annuelle de défaillance de l’ouvrage
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 20 : Morphologie de fissure réelle, fermée, débouchante en surface (Quiviger et al. 2011)
Figure 21 : Macro fissuration au sein du béton, notion de points de contact entre les lèvres de la fissure
(Bažant 1992)
La particularité d’une fissure réelle fermée réside dans les nombreux points de contact
qui existent entre les lèvres (Figure 21) et rend une description analytique et mécanique
difficile. La présence de ces points de contact modifie le comportement mécanique de la
fissure. Ces contacts permettent notamment une redistribution locale des contraintes
générées par la fissure dans le béton.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
- la détection est une première étape, elle consiste à pouvoir déterminer avec
certitude s’il y a présence, oui ou non, d’une macro-fissure dans la zone
contrôlée.
- La localisation de la fissure
- La caractérisation de la fissure.
o L’ouverture de la fissure ou distance entre les deux lèvres qui
conditionne la perméabilité du béton
o La hauteur de la fissure (partie ouverte et fermée)
o La longueur de la fissure, correspondant à la mesure de la distance entre
les deux extrémités de la projection de la fissure sur la surface externe du
béton (Figure 22).
La méthode la plus usitée dans le domaine industriel est l’inspection visuelle. Cette
méthode est relativement simple à mettre en œuvre mais possède de nombreuses
limitations. Ainsi, si elle permet de suivre la progression d’une fissure en surface
d’ouvrage, elle ne fournit aucune indication fiable sur la hauteur de la fissure. Il existe
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Une seconde méthode est également mise en pratique dans le cadre du contrôle des
enceintes de confinement de centrales nucléaires. Cette technique consiste à la mise en
surpression de l’enceinte. Le champ de contrainte ainsi généré favorise l’ouverture des
fissures. L’air en surpression va alors transiter par le réseau de fissures jusqu’à la
surface extérieure de l’enceinte. Celle-ci étant recouverte d’un liquide savonneux, un
ensemble de bulles va alors se former en surface, à l’extrémité des fissures, permettant
de les localiser. Lorsqu’un bullage significatif apparaît, les mesures de débit effectuées
localement peuvent ainsi permettre d’effectuer une estimation de l’ouverture de la
fissure en fonction de ce taux de fuite singulier. Cette méthode particulière permet à ce
jour de pouvoir détecter des fissures fermées dans du béton à la seule condition qu’elles
soient traversantes, c’est-à-dire que la fissure soit continue entre les deux parois
(intérieure et extérieure) de l’enceinte. De plus, les mesures de fuites ne sont pas
totalement cohérentes avec les variations de volume d’air : seule une partie du volume
est détectée en surface. Enfin, ce type de contrôle n’est possible que lors des arrêts de
tranches et ne permettent pas un suivi continu de la structure (Le Belego 2001).
Afin de trouver des alternatives, ou des compléments à ces deux principaux types
d’inspection, de nombreuses techniques ont été explorées durant ces dernières
décennies.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Cette méthode a été mise en œuvre par Tung et al. (Tung et al. 2008) afin de mettre en
évidence la fissuration d’un mur de brique sous chargement mécanique (Figure 23)
Figure 23 : Utilisation du DIC pour la détection de fissure dans un mur de briques (Tung et al. 2008)
Ils montrent ainsi que la fissure initiale peut être identifiée par le champ de
déformations. De plus, cet essai confirme les performances de cette technique de
traitement d’images pour la détection précoce de fissures au sein de matériaux
inhomogènes. Des essais ont également été réalisés pour caractériser les fissures et
ruptures de joints dans du béton (Helm 2008; Choi & S. P. Shah 1997; Corr et al. 2007)
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Plus récemment, des méthodes 3D ont fait jour, comme des reconstructions
tomographiques basées sur l’utilisation de rayons X, ou radiations synchrotron. La taille
maximum des spécimens est de l’ordre du centimètre pour une résolution correcte, et
rend ainsi impossible une utilisation in situ (Surendra P. Shah 1990). Ces méthodes de
laboratoire peuvent néanmoins permettre de recaler d’autres techniques de
caractérisation non destructive.
Des techniques optiques telles que l’interférométrie ou les fibres optiques (Figure 25)
sont également à l’étude pour caractériser les fissures présentes dans un ouvrage. Les
vitesses et modes de réflexion des ondes au sein des fibres optiques sont sensibles aux
contraintes, déformations, température ou encore teneur en eau des bétons. Ainsi, les
déplacements engendrés par une ouverture de fissure génèrent une extension locale de
la fibre qu’il est possible de mesurer.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 26 : Profils de déformations enregistrés par fibre optique pour différents taux de chargement
d’une poutre en béton (Henault et al. 2012)
Ces chargements, d’amplitude croissante génèrent de la fissuration que les auteurs sont
alors capables de détecter et de localiser par le biais de fibres optiques avant même
qu’elles ne deviennent visibles. Les auteurs souhaitent également parvenir
prochainement à l’obtention d’une relation directe entre la forme des pics obtenus et
l’ouverture des fissures.
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Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Des méthodes par thermographie infrarouge sont également à l’étude. Ainsi, Aggelis et
al (Aggelis et al. 2010) utilisent une caméra thermique pour parvenir à imager des
fissures sub-surfaciques, perpendiculaire à la surface. Leur ouverture est inférieure au
millimètre pour une hauteur de fissure de 89 à 96mm sur des éprouvettes de 100mm.
Les éprouvettes sont d’abord portées en température à 90°C puis, la thermographie est
réalisée pendant la période de refroidissement. Les échanges thermiques étant favorisés
localement par la présence de fissure, cette partie devient alors visible à la
thermographie. Les auteurs rapportent une détection des fissures localisées entre 4 et
8mm sous la surface et nécessitant une résolution thermique de l’appareil de mesure de
0,06°C à 30°C. La détection de fissures localisées à une distance supérieure à 11mm
sous la surface est plus complexe, puisque à une telle distance, les échanges thermiques
ne sont plus dominés par la fissure. Des essais supplémentaires ont également été
réalisés en n’élevant la température des éprouvettes qu’à 50°C afin de se rapprocher des
conditions in situ, sans succès pour le moment.
Des méthodes de caractérisation de fissures dans du béton, basées sur la propagation des
ondes mécaniques au sein du matériau, sont également largement étudiées actuellement
au vu de leur potentiel. En effet, les propriétés de propagation des ondes sont
directement liées aux matériaux dans lesquelles elles se propagent et permettent
d’obtenir des informations à différentes échelles suivant la longueur d’onde utilisée.
Il existe principalement deux méthodes : l’une est basée sur l’étude des ondes générées
par la fissure elle-même, il s’agit de l’émission acoustique. La seconde repose sur
l’analyse d’ondes générées dans le système et ayant interagi avec le milieu,
généralement des ultrasons.
L’émission acoustique résulte d’une libération d’énergie sous la forme d’ondes au sein
d’un matériau sous contrainte. En effet, sous contrainte, des éléments comme des
fissures, microfissures, vont émettre des ondes et jouer ainsi un rôle de source. Les
ondes sont alors détectables sous forme de déplacements en surface par des
36
Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 27 : Sources d'Émission Acoustique ainsi que les fissures observées à mesure des cycles de
chargement (Maji & S. P. Shah 1988)
37
Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
document précise les conditions d’application des méthodes ultrasonores sur site, en
précisant notamment une fréquence ultrasonore qui doit être comprise entre 20 kHz et
150 kHz. La vitesse moyenne des ondes ultrasonores de compression pour un béton se
situe autour de 4400 m.s-1, la longueur d’onde de travail dans le béton pour ces
fréquence est donc au moins supérieure à 3cm. Cette longueur d’onde peut se révéler
insuffisante pour la détection et la caractérisation de fissures fermées dans du béton. De
plus, la norme ISO 1920-7 ne mentionne que la mesure de temps de vol des ultrasons
dans le béton, négligeant les autres mesures ultrasonores comme par exemple la prise en
compte de l’atténuation, très complexe à analyser dans le béton.
La porosité présente dans le béton a une incidence sur la propagation des ondes.
L’augmentation de la porosité diminue ainsi les vitesses de propagation des ondes
ultrasonores dans du béton (Goueygou et al. 2009; Lafhaj et al. 2006; Benouis & Grini
2011; Lafhaj & Goueygou 2009; Vergara et al. 2001; Hernández et al. 2000; Wang &
Subramaniam 2011). Hernandez et al (Hernández et al. 2000) ont également créé un
modèle micromécanique permettant de prédire les valeurs de porosité en fonction de la
vitesse des ondes dans le béton. Les valeurs de porosité ainsi déterminées montrent une
erreur d’estimation inférieure à 11% de la porosité sur des échantillons de mortier.
La teneur en eau se rapporte au taux volumique d’eau libre présent dans le réseau de
pores du béton. Différentes études montrent que la vitesse de propagation est
proportionnelle au taux d’hydratation du béton (Ohdaira & Masuzawa 2000; Philippidis
& Aggelis 2003; Berriman et al. 2005; LMDC et al. 2009)
38
Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Figure 28 : Evolution des vitesses ultrasonores en fonction de la teneur en eau d'une pièce de béton
(Ohdaira & Masuzawa 2000)
Les ultrasons sont également utilisés en recherche pour permettre de caractériser divers
types d’endommagements chimiques à l’origine de microfissurations. Les différents
auteurs indiquent également des variations de vitesses qui diminuent globalement en
fonction du niveau d’endommagement, et une atténuation qui augmente. Ces variations
sont vraies quel que soit le type d’ondes considérées : ondes de compression, de
cisaillement ou encore de surface (Rivard & Saint-Pierre 2009; Ould Naffa et al. 2002;
Saint-Pierre et al. 2007; Chaix et al. 2003). Certaines études montrent également
l’influence de ce paramètre dans le domaine de l’acoustique non linéaire (X. J. Chen et
al. 2008; Lesnicki et al. 2011; Kodjo et al. 2011; Payan et al. 2007)
L’ensemble de ces études met en évidence les difficultés de contrôle du béton par
méthodes ultrasonores. La nature du matériau ainsi que la dépendance des ultrasons à
des nombreux facteurs nécessitent des conditions expérimentales maîtrisées et
complexifient une interprétation des résultats et le diagnostic du béton.
39
Chapitre 1. Evaluation non destructive du béton
Dans la suite de cette étude, nous nous attacherons dans un premier temps à la
description de la propagation des ondes ultrasonores dans du béton ainsi que son
interaction avec une fissure. La capacité de ces ondes à caractériser une fissure fermée
sera ensuite éprouvée expérimentalement et numériquement par l’étude de la diffusion
de l’énergie au sein du béton et à travers une fissure.
40
Chapitre II
Acoustique linéaire
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Dans le cadre de la caractérisation non destructive (CND), les ondes les plus
couramment utilisées sont les ondes de volume, telles les ondes de compression et
cisaillement, ou encore les ondes de surface comme l’onde de Rayleigh. Nous allons
nous intéresser plus particulièrement aux mécanismes de propagation de ces ondes. En
effet, pour notre objectif de caractérisation de fissure réelle dans du béton, ces ondes
sont susceptibles d’interagir avec les interfaces air/béton qui existent le long du profil
d’une fissure.
43
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Les ondes de compression sont caractérisées par un mouvement des particules parallèle
à la direction de propagation du front d’onde, qui progresse par séries successives de
compressions et de dilatations du volume.
Les équations de propagation de ces ondes reposent sur les équations générales
d’équilibre de la mécanique. Pour un milieu de masse volumique ρ, et pour un vecteur
déplacement , l’équation du mouvement s’écrit :
− =0
( 2.1 )
La loi de Hooke décrit une relation linéaire entre le tenseur des contraintes et le
tenseur des déformations ̿ pour un matériau élastique, homogène et isotrope.
1
= ̿+ 2 ̿ ù ̿= ( "+ #( ))
( 2.2 )
2
Avec % les coefficients de Lamé.
=( + ) ( )+ Δ
( 2.3 )
Par ailleurs, conformément au théorème de Poisson, tout vecteur peut s’écrire comme la
somme d’un gradient (champ scalaire ') et d’un rotationnel (champ vectoriel ( )
= '+ (
( 2.4 )
44
Chapitre 2. Acoustique linéaire
) '+ (*
=( + ) ) '+ (*"
( 2.5 )
+ Δ) '+ (*
²
) '+ (*
²
( 2.6 )
=( +2 ) (Δ') + (Δ()
Cette équation ne peut être vérifiée en tout point et en tout temps que si les deux
conditions suivantes sont obtenues :
²' ²(
= ( + 2 )Δ' % = Δ(
( 2.7 )
² ²
Il est alors possible de reconnaître les équations d’Alembert que l’on peut réécrire :
' (
Δ' − =0 % Δ( − =0
( 2.8 )
+2
/0 1
Ces relations permettent de définir deux vitesses de propagation : l’une ,- = .
2
1
pour le potentiel scalaire ', l’autre ,# = .2, pour le potentiel vecteur (.
Les coefficients de Lamé sont toujours positifs, il s’ensuit que la vitesse 34 est toujours
supérieure à 35 . Il est également possible de définir les vitesses de chaque type d’onde
45
Chapitre 2. Acoustique linéaire
6. (1 − 7) 6
,- = 8 % ,# = 8
. ( 1 + 7). (1 − 27) 2 . (1 + 7)
( 2.9 )
Les solutions harmoniques progressives les plus générales aux équations d’Alembert
( 2.8 ) s’écrivent :
(( , ) = (; % <(=#>?C∙B)
Où D est la pulsation d’onde, égale à 2EF, Fétant la fréquence, '; et (; les amplitudes
initiales, r et t les dépendances spatiales et temporelles. La pulsation d’onde est reliée
aux nombres d’ondes longitudinaux G- et transversaux G# en milieu homogène par les
relations de dispersion :
D
G- =
,-
( 2.11 )
D
G# =
,#
Les relations directes entre vitesse des ondes et les propriétés mécaniques des matériaux
dans lesquelles elles se propagent illustrent parfaitement l’utilité des ondes ultrasonores
dans le cadre de la caractérisation non destructive. Cependant, il est toutefois très
important de garder à l’esprit les hypothèses qui mènent à ces relations.
Pour des matériaux à comportement hétérogènes et/ou non linéaires, ces relations ne
sont plus qu’une approximation de la réalité et ne permettent donc pas une description
exacte de la propagation des ondes.
46
Chapitre 2. Acoustique linéaire
ainsi que les vibrations associées des particules sont d’une description plus complexe
que les ondes de volume. Les ondes de surfaces sont plus lentes que les ondes de
volume, mais présentent la particularité d’être plus énergétiques : l’onde n’est pas
dispersée dans la totalité du volume, mais dans une fraction de celui-ci, proche de la
surface. Il existe différents types d’ondes de surface, qui sont dépendantes de la
géométrie des milieux, ainsi que de la nature des interfaces.
Le type d’onde de surface le plus couramment utilisé en CND est l’onde de Rayleigh,
du nom du physicien Lord Rayleigh, qui en découvrit l’existence en 1885.
Ces ondes de surfaces sont très énergétiques : pour une génération d’onde par impact
présentée sur la figure 31, 67% de l’énergie est transmise sous forme d’ondes de
Rayleigh pour 7% sous forme d’ondes de compression et 26% d’ondes de cisaillement
(Graff 1975). Cette propriété les rend plus facilement détectables qu’aucun autre type
d’onde. De plus, comme elles se propagent essentiellement sur deux dimensions, leur
énergie ne se disperse pas aussi rapidement que celles associées à des ondes de volume.
Ainsi, leur amplitude est inversement proportionnelle à la racine carrée de la distance de
47
Chapitre 2. Acoustique linéaire
propagation alors que l’énergie associée à une onde longitudinale est inversement
proportionnelle à la distance (Owino & L. J Jacobs 1999).
Figure 31 : Distribution des ondes mécaniques dans un demi-espace homogène, isotrope, élastique pour
une source d’émission ponctuelle (Graff 1975)
La profondeur d’inspection de ces ondes n’est à ce jour pas encore strictement résolue.
Ainsi, si les auteurs s’accordent sur le fait que la profondeur de pénétration des ondes de
surface dépend de la fréquence de l’onde utilisée, il n’existe pas pour le moment de
valeur reconnue comme étant la profondeur d’auscultation d’une onde de surface. Al
Wardany et al. par exemple, définissent une profondeur égale à la longueur d’onde (Al
Wardany et al. 2004) lorsque des auteurs tel Checkroun affirment qu’elle ne dépasserait
pas la demi-longueur d’onde (Chekroun 2008).
La théorie de la propagation des ondes de Rayleigh repose sur les équations générales
de la mécanique décrites précédemment pour les ondes de volumes et présentées au
chapitre 2.1.1.1. Les conditions aux limites cependant changent : sur la surface libre du
matériau semi-infini, la contrainte est nulle.
La vitesse des ondes de Rayleigh ,B est donc une fonction des vitesses de compression
et de cisaillement Vl et Vt reliés par la relation (Royer & Dieulesaint 1999):
,B ,B ,B
H2 − I − 48H1 − I H1 − I = 0
( 2.12 )
,# ,- ,#
La vitesse de propagation des ondes de Rayleigh est donc fonction des vitesses des
ondes de volume et du coefficient de Poisson, quel que soit le matériau considéré. En
conséquence, il est possible de supposer que la présence ponctuelle d’interfaces au
niveau d’une fissure fermée modifie la propagation d’une onde de Rayleigh.
48
Chapitre 2. Acoustique linéaire
L’utilisation d’une telle onde pour caractériser une fissure débouchante en surface
présente également un intérêt puisque l’énergie de cette onde ne se propage que dans la
zone proche de la surface, limitant ainsi l’atténuation géométrique dans la zone
d’intérêt.
49
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 32 : Évolution de la vitesse et de l'atténuation des ondes ultrasonores au sein de deux bétons et
mortiers de composition différentes (Philippidis & Aggelis 2005)
M = 4E ²< >
( 2.13 )
B
L’expression précédente montre que l’intensité acoustique moyenne varie alors en 1/r²
pour une puissance donnée P de la source.
50
Chapitre 2. Acoustique linéaire
dans la même direction que l’onde incidente est donc diminuée. Cet effet dépend de la
longueur d’onde utilisée, de la densité des granulats, ainsi que des différences
d’impédances acoustiques entre l’hétérogénéité et le milieu continu. Il devient maximal
lorsque la longueur d’onde est comparable à la dimension du diffuseur.
D
G- N- ∗
,-
( 2.15 )
D
G# N# ∗
,#
Ces phases dispersées jouent le rôle de diffuseurs au sein du béton et conduisent à une
dispersion spatiale de l’onde incidente. La multiplicité des hétérogénéités va conduire à
51
Chapitre 2. Acoustique linéaire
l’apparition d’une diffusion à très grande échelle : la multidiffusion (Figure 34). Celle-ci
a plusieurs conséquences bien identifiables sur le signal de l’onde reçue.
Dans un premier temps, Il est possible d’observer une très nette diminution de
l’amplitude de la partie cohérente du signal reçu. La partie cohérente pouvant être
décrite comme la partie du signal ultrasonore résistant au moyennage spatial. Elles ont
alors conservé la phase par rapport au signal émis.
Figure 35 : Signal observé après transmission d'ondes ultrasonores dans du béton (fréquence de 500kHz)
52
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Les composants du béton présentent une étendue granulométrique répartie sur plusieurs
ordres de grandeur.
Sur la figure 36, il est possible de constater que toutes les tailles de diffuseurs sont
présentes dans le béton avec des granulats pouvant atteindre des diamètres de 5 cm.
Avec une vitesse des ondes de compression dans le béton autour de 4000m/s, pour des
fréquences de travail allant de 100 kHz à 1MHz, le régime de travail est dans le
domaine stochastique.
53
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Chaix (Chaix 2003) utilise la notion de milieu effectif pour déterminer le lien entre un
endommagement thermique et les vitesses de phase et l’atténuation des ondes
ultrasonores. Chekroun (Chekroun 2008) s’attache tout particulièrement à l’interaction
entre partie cohérente des ondes de Rayleigh et du béton.
Le champ incohérent décrit des ondes ayant parcouru des chemins extrêmement
complexes et sont souvent traités comme du bruit. Ce n’est qu’à partir de 1969 et les
travaux d’Aki (Aki 1969) que les géophysiciens commencent à s’intéresser à cette
partie du signal, qui sera alors renommée « coda », par analogie avec la musique. L’idée
est alors d’exploiter le signal reçu dans sa totalité afin de parvenir à en extraire le
maximum d’informations. C’est ainsi qu’en 1975, Aki et al (Aki & Chouet 1975)
montrent que l’énergie K de la coda obéit à une loi exponentielle en fonction du temps :
S~ >U
exp(−2EF ⁄VW )
( 2.16 )
La partie incohérente du signal peut être décrite par une approximation de régime de
diffusion, décrivant l’évolution temporelle de la densité d’énergie du signal reçu
(Weaver 1998; Anugonda et al. 2001). Cette partie du signal montre de fortes
variations spatiales de phase et d’amplitude. En conséquence, le champ diffus converge
vers zéro si le signal est moyenné spatialement. Cet effet est très largement mis à profit
lors de l’étude du champ cohérent, ou dans le cadre de l’étude d’un matériau homogène
équivalent (Chaix et al. 2003; Chekroun et al. 2009).
54
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Lorsqu’une fissure est « fermée », il existe de multiples points de contact dus aux
rugosités respectives des lèvres. Ces contacts permettent une redistribution des
contraintes normalement localisées en pointe de fissure. Dans le cas contraire, la fissure
est dite « ouverte »
Buck & al (Buck et al. 1984) présentent une revue des interactions présentes entre un
faisceau ultrasonore et une fissure générée par fatigue dans le cas de matériaux
métalliques.
Deux principaux modes d’interaction sont présentés : la diffraction des ondes au niveau
des contacts, ainsi que la variation des coefficients de transmission et de réflexion
induits par la présence de fissure dans l’acier.
Une première méthode consiste en l’analyse fréquentielle d’un signal transmis à travers
une fissure. Cette analyse permet d’obtenir des informations sur les aspérités des
contacts. De plus, les conversions de modes sur les aspérités conduisent à un effet de
diffraction (Figure 37) qui peut également apporter des informations relatives à la
fissure (Rehbein et al. 1985).
55
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 37: Diffraction en pointe de fissure pour un élément métallique (Rehbein et al. 1985)
Une autre méthode, basée sur la diffraction des ondes ultrasonores, est réalisée dans le
domaine temporel.
Lorsqu’un faisceau ultrasonore est dirigé avec un certain angle sur une fissure, de
l’ordre de 10-15°, un écho est généré par les pointes de fissures (Figure 38). Baby & al.
(Baby et al. 2003) analysent les temps de vols de ces échos en transmission ou réflexion
pour dimensionner une fissure dans un acier. Les auteurs parviennent ainsi à une
évaluation de la hauteur totale d’une fissure avec une résolution de ± 1mm.
Figure 38 : Caractérisation de fissure par temps de vol dans un acier (Baby et al. 2003)
56
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Enfin, la fissure doit être totalement ouverte, et posséder une hauteur totale supérieure
une longueur d’onde.
Figure 39 : Conversion de mode au contact d'une fissure dans les métaux (Baby et al. 2003)
,^
Z[\] ∗ ∆`[\]
( 2.17 )
,#
Ces différents modèles permettent une caractérisation de hauteur de fissure dans les
métaux sous certaines conditions mais peuvent difficilement être transposés à un milieu
tel que le béton. En effet, dans les métaux à grains fins, la multidiffusion n’est pas
présente, contrairement au béton dont la présence de granulats complexifie fortement la
propagation des ondes. De plus, l’interaction des ondes avec les granulats génère
57
Chapitre 2. Acoustique linéaire
également des conversions de modes, non discriminables de celles générées par une
fissure.
Enfin, les auteurs indiquent que la caractérisation de fissure dans les métaux par ces
méthodes est possible si la fissure est isolée, sans autre fissure à proximité. Se pose la
question de la possibilité de transfert des techniques métalliques sur le béton. En effet,
dans le béton, la fissure génère localement des concentrations de contraintes,
notamment à sa pointe , qui entraînent une forte microfissuration de la zone (Hillerborg
et al. 1976) . Ces microfissures peuvent à leur tour générer une fissuration plus
importante et créer de multiples branches sur la fissure principale, supprimant l’unicité
du défaut (Figure 24).
D’autre part, de nombreuses équipes de recherches (Van Hauwaert et al. 1998; Liou et
al. 2009…) ont également pris le parti de commencer leurs études sur des cas à
géométries simples et contrôlées, de type entaille, pour lesquels les lèvres de la fissure
ne seraient pas en contact. Il s’agit alors d’une volonté scientifique de mener la
recherche sur la caractérisation des fissures dans du béton en procédant par étapes, avec
la volonté de complexifier ultérieurement le modèle pour aboutir in fine à la
caractérisation de fissures réelles.
Enfin, la dispersion présente dans le béton engendre une forte atténuation du signal
acoustique et rend difficile la propagation des hautes fréquences. Cette atténuation est à
l’origine de la norme ISO 1920-7 qui précise une utilisation de fréquences comprises
entre 20 et 150kHz pour le contrôle des bétons par ultrasons. Or, pour un béton
classique, cette fréquence implique une longueur d’onde supérieure à 3cm, ce qui est
bien supérieur à la taille d’ouverture d’une fissure réelle, de l’ordre du dixième de
58
Chapitre 2. Acoustique linéaire
millimètre. Afin de pouvoir caractériser ce type de défaut, l’un des enjeux techniques de
l’utilisation des ultrasons est de pouvoir accéder aux informations contenues dans les
fréquences les plus hautes.
Dans une première étude, Van Hauwaert et al. procèdent à des essais de mesures
ultrasonores dans un béton entaillé sur différentes profondeurs (Van Hauwaert et al.
1998). Ces essais permettent une étude comparative de l’amplitude du signal
ultrasonore et de l’énergie de l’onde, obtenus par les capteurs en fonction de l’entaille,
mais également de la position des capteurs sur l’éprouvette.
Figure 40 :Temps d'arrivé, amplitude et énergie en fonction de la hauteur de l'entaille. Pour deux capteurs
de part et d’autre de l’entaille, a) sur des faces opposées, b) sur la même face (Van Hauwaert et al. 1998)
Ils mettent en évidence l’impossibilité de détecter une entaille si celle-ci n’est pas située
sur le trajet de l’onde, entre les deux capteurs. Ainsi, dans le cas a) de la figure 40,
l’entaille n’est pas détectée avant d’atteindre une hauteur de 40mm. Dans le cas b), les
capteurs sont de part et d’autre de l’entaille, placés sur la face où l’entaille débouche.
On voit alors que l’entaille est détectée dès les premières mesures pour de très faibles
hauteurs. En revanche, cette méthode b) n’est possible que si l’on connaît a priori la
59
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Van Hauwaert et al. effectuent les mêmes mesures sur une éprouvette placée sur un
banc de flexion trois points. La fissure est plus représentative d’une fissure réelle
puisque son tracé n’est pas plan, et suit bien l’évolution d’une fissure réelle. Par contre,
les contraintes sont appliquées de manière constante sur l’éprouvette ce qui limite les
contacts entre les lèvres de la fissure. Pour une fissure ouverte, les résultats sont donc
similaires à ceux obtenus pour une entaille.
Une expérience est également menée par Aggelis et al. , pour des fréquences de 200kHz
sur des fissures en flexion trois points, à la différence que le contrôle se fait sur la
surface opposée à l’ouverture de la fissure (Aggelis et al. 2010).
Figure 41 : a) profil de fissure dans le béton, b) vitesses de propagation des ondes pour un béton sain, et
fissuré (Aggelis et al. 2010)
Les résultats présentés sur la figure 41b) montrent une diminution de la vitesse
apparente des ondes en présence d’une fissure ouverte.
La quantité de fissure influe également sur les vitesses des ondes de compression et de
surface. Aggelis et Shiotani simulent des densités de fissures allant de 1% à 10% du
volume total d’une éprouvette de béton en y incorporant des carrés de vinyle de 15mm
60
Chapitre 2. Acoustique linéaire
de côté (Aggelis & Shiotani 2007a). Des mesures de vitesses montrent également une
relation linéaire entre le nombre de fissures et les vitesses des ondes de compression et
de Rayleigh (Figure 42). Il est également montré que cette diminution est plus
importante pour les ondes de surface que pour les ondes de volume et qu’elle est
dépendante de la fréquence.
Figure 42 : Vitesse de phase et atténuation apparentes en fonction du pourcentage de fissures incluse dans
le béton (Aggelis & Shiotani 2007a)
Une étude de caractérisation de fissures sur un ouvrage d’art a été faite par Bond et al.
(Bond et al. 2000) .Il s’agit de mesures faites sur le Barker Dam de l’Etat du Colorado
aux Etats-Unis. Le site a été retenu car il possède une série de fissures horizontales déjà
largement étudiées dans le passé. La méthode utilisée, la tomographie acoustique par
temps de vol (ATTT) utilise les informations portées par les ondes transmises pour
dresser une carte des vitesses sur une tranche de l’objet étudié et nécessite donc un
réseau de capteurs conséquent.
Les premiers résultats montrent une bonne concordance entre les localisations des
fissures par méthode ATTT et leurs positions réelles alors que la zone d’étude fait plus
de cinq mètres, et que la fréquence d’excitation est comprise entre 1 et 50kHz.
Cependant, aucune information n’est donnée sur l’état d’ouverture des fissures.
Enfin, Hévin et al. (Hévin et al. 1998) montrent de façon expérimentale et numérique
que la présence d’entailles, d’une ouverture de 5mm, induit la présence d’une fréquence
de coupure dans le domaine fréquentiel des ondes transmises. La fréquence de coupure
observée étant directement liée à la hauteur des entailles par le biais de la longueur
61
Chapitre 2. Acoustique linéaire
62
Chapitre 2. Acoustique linéaire
cette étude, nous nous attacherons donc plus particulièrement à l’analyse de la partie
incohérente du signal et des informations qu’elle transporte.
= 6; j(`)j(g)j(h)j( )
Où 〈6(`, g, h, )〉 représente la densité spectrale d’énergie pour une position et un temps
donné. Cette densité d’énergie est moyennée temporellement afin de tenir compte de
plusieurs réalisations du désordre. e est le coefficient de diffusion (ou diffusivité),
dépendant de la fréquence. est le coefficient de dissipation, dépendant de la fréquence
également. Enfin j représente ici le symbole de Kronecker.
Le matériau est supposé isotrope et les coefficients de diffusion ne dépendent donc pas
de la direction de propagation des ondes ultrasonores.
63
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Pour la condition temporelle initiale, il est logique de considérer que pour un temps
inférieur à zéro, aucune énergie n’est transmise dans le matériau, soit :
〈6!`, g, h, )〉 = 0 k ≤0
( 2.19 )
Pour les conditions aux limites, on considère qu’aucune énergie n’est transmise du
matériau à l’air environnant au vu de la grande différence d’impédance entre ces deux
milieux. Le gradient sur la surface est donc nul, impliquant qu’aucun flux ultrasonore
n’est dirigé vers l’extérieur. En considérant m la surface du matériau, nous avons donc :
∇〈6(`, g, h, )〉 = 0 ∀ `, g, h ∈ m
( 2.20 )
- Modèle 1D
Ce modèle s’applique pour un cylindre semi infini, dont l’épaisseur est négligée. Ainsi,
la distribution de l’énergie est supposée uniforme sur une section du cylindre.
64
Chapitre 2. Acoustique linéaire
q >]²v ( 2.21 )
〈6!`, )〉 = 6; % ut# % >w#
√st#
Cette solution est utilisée par Anugonda et al. (Anugonda et al. 2001) et Schubert et
Koehler (Schubert & Koehler 2004) pour caractériser des éprouvettes cylindriques de
béton dont le ratio longueur/diamètre est égal à 9.2.
- Modèle 2D
1 >(] x 0a x )v
〈6(`, g, )〉 = 6; % ut# % >w#
4Ee ( 2.22 )
1 >B²v
= 6; % ut# % >w#
4Ee
Ce modèle s’applique pour une géométrie plane, et se retrouve dans la littérature
(Punurai et al. 2007; Becker et al. 2003).
Ce modèle nous intéresse en particulier puisqu’il a été préalablement utilisé avec succès
par Ramamoorthy et al. (Ramamoorthy et al. 2004) pour caractériser une entaille dans
du béton avec une configuration de capteurs placés de part et d’autre de l’entaille. Cet
aspect est particulièrement important dans l’objectif de transfert de la méthode sur site,
où les deux faces de la structure à contrôler sont rarement accessibles. Dans ce cadre, ce
modèle est donc le plus adapté puisqu’il tient compte des conditions aux limites induites
par la surface sur laquelle sont posés les capteurs, et qui est donc la principale source de
modification du champ diffus. De plus, avec cette étude, il nous est possible de valider
un protocole expérimental sur des entailles avant un transfert sur fissures réelles.
- Modèle 3D infini
1 >B²v
〈6( , )〉 = 6; % % >w#
( 2.23 )
ut#
z
8 √Ee
Ce modèle est notamment utilisé par Weaver et Deroo (Weaver & Sachse 1995; Deroo
et al. 2010). Il ne tient compte d’aucune condition aux limites, et ignore donc de fait
l’influence des surfaces extérieures sur la diffusion de l’énergie. Ce modèle est plus
approprié sur de larges structures, dont l’atténuation est suffisamment importante pour
limiter les interactions avec les surfaces.
65
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Cette solution à l’équation de diffusion est établie par le biais de séries de Fourier et
s’écrit comme suit :
〈6 (`, g, h, )〉 = 6; % >w# }1
+ ~ (`, `; ; ) (g, g; ; {) (h, h; ; |)€
+ ~ (`, `; ; ) + (g, g; ; {) + (h, h; ; |)€ ( 2.24 )
+ ~ (`, `; ; ) (g, g; ; {)
+ (`, `; ; ) (h, h; ; |)
+ (g, g; ; {) (h, h; ; |)ۥ
Avec
•
ˆ E‚ ˆ E‚; >t Š
Us x
Œ #
(‚, ‚; ; () = 2 ƒ cos ‡ ‰ cos ‡ ‰ %
( 2.25 )
‹
( (
UŽq
Pour cette solution, (`, g, h) est la position spatiale du récepteur ultrasonore (`; , g; , h; )
est la position de la source.
Cette solution pourrait être la solution idéale pour toute éprouvette de forme
parallélépipédique et de dimension finie, cependant, la prise en compte de toutes les
conditions aux limites génère une solution relativement complexe à mettre en œuvre.
- Géométrie complexe
66
Chapitre 2. Acoustique linéaire
de dissipation pour les deux modèles. De plus, selon les auteurs, le modèle infini
présente une plus grande robustesse en raison de sa simplicité.
Weaver (Weaver 1998) utilise la diffusion pour caractériser la porosité d’une mousse
d’aluminium. Les échantillons sont rectangulaires, d’épaisseur 18 mm et de largeur
38mm. Pour la première fois également à notre connaissance, les capteurs ultrasonores
pour l’émission et la réception de l’onde sont placés sur la même face du matériau, à
côté l’un de l’autre et non en vis-à-vis. Cette disposition permet alors d’entrevoir
l’utilisation de cette méthode acoustique pour la caractérisation de matériaux dont
67
Chapitre 2. Acoustique linéaire
l’accessibilité est limitée (sur site par exemple dans un contexte industriel). Cette étude
met également l’accent sur l’influence de la porosité sur la diffusivité de l’onde.
Figure 44 : Diffusivité et absorptivité en fonction de la quantité d'air occlus : 10 et 20 pores par pouce
(inch), dans la matrice d’aluminium. (Weaver 1998). Les valeurs de diffusivité déterminées par l’auteur
sont mises en évidence
La figure 44, issue de l’étude de Weaver (Weaver 1998) montre ainsi les évolutions de
la diffusivité et de l’absorptivité en fonction de la quantité de porosité incluse dans une
mousse d’aluminium : 10 et 20 pores par pouce (inches). L’auteur utilise le terme
absorptivité dans son étude en lieu et place du terme dissipation que nous utilisons. Ces
deux dénominations se rapportent à la même observable σ. L’auteur montre ainsi que
l’augmentation du nombre de pores induit peu de variation de la dissipation mais que la
diffusivité décroît lorsque le nombre de pores augmente.
68
Chapitre 2. Acoustique linéaire
kHz. Ils laissent ainsi entrevoir un grand nombre de possibilités de caractérisation non
destructive d’endommagements microstructuraux du béton. Les valeurs de diffusivité et
de dissipation sont déterminées expérimentalement pour des éprouvettes de béton
cylindriques par l’utilisation de la solution 1D de l’équation de diffusion (équation (
2.21 ) ). Les résultats de diffusivité sont ensuite comparés aux valeurs théoriques issues
du modèle de propagation d’onde développé par les auteurs pour des matériaux bi-
phasiques tels que le béton. Ils sont présentés sur la figure 45.
Figure 45 : Diffusivité en fonction de la fréquence pour le béton. Les symboles correspondent aux valeurs
expérimentales, le trait plein correspond à l'estimation théorique (Anugonda et al. 2001)
La figure 45 montre un bon accord entre les valeurs théoriques de la diffusivité et les
valeurs expérimentales. Les auteurs envisagent néanmoins de perfectionner leur analyse
théorique afin de tenir compte des multiples échelles associées aux différentes tailles de
granulats. Selon Anugonda et al. (Anugonda et al. 2001) , l’endommagement réel de la
microstructure possède une grande influence sur la propagation de l’énergie au travers
du béton. Ainsi, selon ces mêmes auteurs, la distribution de microfissures au sein du
béton engendre une diminution de la diffusivité. Le fait que le temps de transport de
l’énergie augmente pour une distribution de fissures plus importante est également
cohérent avec les résultats d’Aggelis et al. (Aggelis & Shiotani 2007a). Ces derniers
avaient montré que la vitesse des ondes de Rayleigh diminue lorsque le nombre de
fissures artificielles augmente.
Deux ans plus tard, Becker et al. (Becker et al. 2003) étudient l’évolution des
paramètres de diffusion en fonction des diamètres des granulats, qui sont ici représentés
69
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 46 : Diffusivité eet dissipation pour un mortier comprenant des billes de verres de différents
diamètres, 1 et 3mm. (Becker et al. 2003)
Schubert et Koehler (Schubert & Koehler 2004) effectuent une simulation numérique
des travaux d’Anugonda et al.(Anugonda et al. 2001). La simulation numérique est
effectuée dans le domaine temporel, en appliquant la technique d’intégration élasto-
dynamique finie (EFIT) (D. O. Thompson & Chimenti 1995) et intégrant le modèle
viscoélastique de Kelvin-Voigt (Figure 47).
70
Chapitre 2. Acoustique linéaire
71
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 48 : Évolution fréquentielle de la diffusivité pour deux éprouvettes de ciments, sans adjuvant, et
avec adjuvant entraineur d'air (Punurai et al. 2007)
La figure 48 montre que la présence d’air entraîné dans du ciment diminue la diffusivité
de l’énergie ultrasonore. Ceci est consistant avec une augmentation du nombre de
diffuseurs qui accentue le phénomène de multidiffusion. Il est possible également de
noter une similitude avec les travaux de Becker et al. (Becker et al. 2003) présentés
précédemment. En effet, l’utilisation d’adjuvant entraîneur d’air dans un ciment génère
des pores de diamètres plus importants que ceux présents dans un ciment classique. De
façon analogue aux billes de verres de Becker et al., l’augmentation de la taille des
pores peut expliquer la diminution de la diffusivité. De plus, pour les deux études
((Becker et al. 2003; Punurai et al. 2007), il est possible de noter que les valeurs de la
diffusivité sont presque identiques pour les fréquences les plus hautes. Par contre, une
variation notable prend place dans les fréquences les plus basses : les valeurs de
diffusivité décroissent en fonction du diamètre de l’inclusion, qu’elle soit constituée
d’air ou de verre.
La dissipation est également étudiée en fonction de l’ajout, on non, d’air entraîné dans
la matrice (Figure 49).
72
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 49 : Évolution fréquentielle de la dissipation pour deux éprouvettes de ciments, sans adjuvant, et
avec adjuvant entraineur d'air (Punurai et al. 2007)
La figure 49 montre que l’éprouvette contenant l’air entraîné présente une dissipation
inférieure de près de 7% par rapport au spécimen de ciment. Les auteurs supposent que
la diminution de la dissipation est proportionnelle à la fraction volumique d’air entraîné.
En effet, des analyses effectuées sur les éprouvettes montrent une différence d’air
occlus de l’ordre de 8%.
Punurai et al. suggèrent également que si la dissipation est une mesure représentative
des propriétés viscoélastiques au niveau de la pâte de ciment, une analyse
dimensionnelle laisse supposer que la dissipation est liée au coefficient d’atténuation
intrinsèque par absorption par le biais de l’équation ( 2.26 ).
N∗ = ( 2.26 )
,
73
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 50 : Comparaison des valeurs d'atténuation par absorption déterminées par mesure directe et
déterminées par la mesure de la dissipation (Punurai et al. 2007)
Les résultats (Figure 50) suggèrent que la dissipation peut être utilisée comme une
mesure équivalente de l’atténuation intrinsèque.
Figure 51 : Diffusivité et Dissipation des bétons endommagés par alcali-réaction pour deux modèles de
résolution de l’équation de diffusion. a) modèle 3D infini, b) modèle cuboïde fini (Deroo et al. 2010)
74
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 52 : Diffusivité et Dissipation des bétons endommagés thermiquement (Deroo et al. 2010)
75
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Figure 53 : Décalage temporel de l'énergie diffusée en fonction de la hauteur d'une entaille dans du béton
(Ramamoorthy et al. 2004)
De plus, les résultats de cette étude mettent également en évidence la corrélation entre la
profondeur de ce type d’entaille et le décalage temporel de l’énergie diffusée.
76
Chapitre 2. Acoustique linéaire
2.3. Conclusion
L’analyse des seules ondes cohérentes présente un fort potentiel pour la caractérisation
de fissure ouverte, lorsque les lèvres de fissures ne sont pas en contact. Cependant, la
sensibilité de ces ondes à de nombreux paramètres, comme la formulation du béton, la
teneur en eau, ou encore la température rend l’analyse complexe. Cette partie du signal
ne permet pas, à ce jour, la caractérisation d’une fissure fermée dans du béton.
Afin de parvenir à caractériser une fissure fermée, une analyse de la partie incohérente
est donc nécessaire. Cette partie du signal présente en effet la particularité de décrire
parfaitement le milieu, en tenant compte de la position de chaque diffuseur présent sur
le trajet de l’onde. Ses multiples interactions avec la fissure fermée génèrent des
informations, contenues dans le signal, et qu’il est nécessaire de pouvoir extraire. Une
mesure de la vitesse des ondes, ou encore de l’atténuation, utilisée lors de l’analyse de
la partie cohérente n’est pas adaptée à l’analyse de la partie incohérente. Afin de traiter
la totalité des informations du signal, une méthode consiste à étudier le transport de
l’énergie entre deux capteurs ultrasonores.
Deux des paramètres clefs de l’analyse de la diffusion de l’énergie ultrasonore sont ici
présentés : La diffusivité e, et la dissipation .
Des premières études sur les polycristaux (Weaver 1990), un empilement des billes de
verre immergées (Weaver & Sachse 1995) ou une mousse d’aluminium (Weaver 1998)
constituent les prémices de ce type d’analyse. Elles mettent en évidence le
comportement diffusif de l’énergie ultrasonore au sein d’un milieu multidiffusant.
77
Chapitre 2. Acoustique linéaire
Enfin, il est également montré qu’un endommagement local, la présence d’une entaille,
modifie également les propriétés de diffusion de l’onde, permettant une caractérisation
de la hauteur de l’entaille.
Les interactions des ondes diffusées avec une fissure réelle n’ont cependant jamais été
établies, en particulier au regard de l’influence des contacts partiels sur la propagation
de l’énergie.
Nous étudierons donc ces interactions dans le chapitre suivant pour valider
expérimentalement la modification du champ diffus par une fissure ouverte. La capacité
de l’utilisation de cette méthode en vue de la caractérisation de fissures fermées sera
ensuite testée expérimentalement.
78
Chapitre III
Dans un premier temps, une étude de l’évolution du champ diffus et son interaction
avec une entaille ouverte est réalisée. Cette première étude permet de valider la méthode
sur nos éprouvettes de béton.
Puis la capacité de cette méthode à caractériser des fissures fermées est éprouvée
expérimentalement sur des éprouvettes de béton fissurées.
81
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Ces éprouvettes proviennent de la même gâchée, et ont suivi une période de cure de 28
jours en eau. Chaque éprouvette possède une entaille, réalisée en plaçant un film
plastique, de la dimension souhaitée pendant la mise en œuvre du béton. Le film
plastique est ensuite retiré. Ces éprouvettes sont de dimensions 15x10x60cm3, et
possèdent respectivement des entailles de 0, 1, 2, 3 et 5cm de profondeur et de 1mm
d’ouverture.
Ces éprouvettes proviennent d’une même gâchée dont la composition est présentée dans
les tableaux 3 et 4. Cette composition est identique à celle utilisée dans le cadre du
projet de l’ANR SENSO (Stratégie d’Évaluation Non Destructive pour la Surveillance
des Ouvrages en Béton).
Granulats Siliceux
D max 12,5 mm
Forme des granulats roulés
Tableau 4: Données sur les granulats
Le béton réalisé est ensuite coffré dans un moule aux dimensions. Les moules utilisés
pour la fabrication de ces éprouvettes présentent également une particularité
supplémentaire, qui est la présence d’une baguette de dimensions 150x10x2 mm placée
82
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
sur une paroi, pour ainsi créer une entaille de 1cm de hauteur (Figure 54). Cette entaille
permettra ensuite d’amorcer la fissuration réelle de l’éprouvette.
Figure 54 : Eprouvette de béton comprenant une entaille de 1cm de hauteur, sans fissure
Les éprouvettes sont ensuite conservées dans l’eau durant 28 jours afin de les stabiliser.
Au terme de cette période, les éprouvettes possèdent les caractéristiques suivantes :
Les valeurs présentées dans le tableau 5 sont directement issues des données du projet
SENSO. Ce sont les moyennes des valeurs mesurées pour différentes gâchées de béton
de composition identique à celle de nos éprouvettes.
La fissuration est effectuée par flexion trois points. Un effort mécanique est appliqué et
permet d’induire une concentration de contraintes en pointe de l’entaille et d’amorcer
ainsi la fissuration. Afin de contrôler la profondeur de la fissure ainsi générée, le
système est asservi par un système de transducteurs LVDT (Linear Variable Differential
Transformer) mesurant l’ouverture de la fissure en surface. L’ouverture de la fissure
étant liée à sa profondeur, cela permet d’arrêter les sollicitations mécaniques une fois la
profondeur de fissure désirée atteinte.
83
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
84
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
3.2.2. Protocole
Pour chaque éprouvette des jeux entaillés et fissurés, les constantes de diffusion sont
déterminées. Le protocole expérimental est chaque fois identique.
Les capteurs ultrasons sont placés au contact sur la surface supérieure de l’éprouvette,
de part et d’autre de la fissure (Figure 56). Le couplant utilisé est de type SWC
(Sofranel). Les caractéristiques des deux capteurs utilisés sont présentées dans le
tableau 7.
L’utilisation d’un capteur d’émission acoustique en réception est tout d’abord motivée
par la possibilité d’avoir une bonne réponse du capteur dans une large gamme de
fréquences autour de la fréquence d’émission. Le choix de ce capteur est également
motivé par son faible diamètre. En effet, en réponse aux fluctuations rapides en
amplitude ainsi qu’en phase, le champ diffus converge vers une valeur nulle si le signal
est moyenné en surface. Ce phénomène est appelé annulation de phase (Page et al.
1995). L’annulation de phase est implicitement effectuée par des capteurs dont la
surface est supérieure à la longueur d’onde, et il est donc nécessaire d'utiliser des
transducteurs ayant une petite surface lors de la mesure du champ diffus (Ramamoorthy
et al. 2004; Anugonda et al. 2001; Punurai et al. 2007). La longueur d’onde dans le
béton étant de l’ordre de 9 mm pour une fréquence de travail de 500kHz, un capteur de
diamètre 5mm est utilisé.
85
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Pour cela, il a été réalisé une cale en téflon (Figure 57) qui permet de positionner les
capteurs pour que la distance entre ces deux derniers soit égale à 60 mm, et que le point
d’ouverture de la fissure/entaille soit systématiquement à équidistance des centres des
éléments actifs de chaque transducteur.
La distance de 60mm est égale à six longueurs d’ondes. Elle permet de se placer en
régime de diffusion. Elle est également suffisamment courte pour éviter de perdre la
quasi-totalité de l’énergie par atténuation dans le volume de l’éprouvette et ainsi
conserver un caractère local à la mesure.
Le montage expérimental diffère donc de la norme ISO régissant les contrôles non
destructifs par ultrasons sur du béton et présentée tableau 8. Le choix d’une fréquence
de travail plus élevée nous permettant de gagner en résolution et de nous placer dans le
régime stochastique.
Norme ISO
Montage expérimental
1920-7 (2004)
Fréquence
20-200 kHz 500 kHz (gain en résolution)
ultrasonore
60mm pour 500kHz (6λ)
Distance entre 50mm pour (plusieurs λ : cadre de diffusion
capteur 200kHz (2λ) Mais < à 10cm : conservation du caractère local de
la mesure, et signal reçu suffisamment énergétique)
Diamètre des 5 mm (objectif : s’affranchir d’un moyennage
Non spécifié
transducteurs spatial de l’onde)
Tableau 8 : Présentation des paramètres de mesure préconisées par la norme, et paramètres expérimentaux
86
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
De plus, pour chaque mesure, il faut veiller à placer les capteurs suffisamment au centre
de l’éprouvette pour ne pas être soumis, autant que possible, aux effets de bord.
Le signal reçu est amplifié de 20dB, et aucun filtrage fréquentiel n’est effectué au
moment de l’amplification. En revanche, le signal est moyenné temporellement cent
fois afin de limiter le bruit électronique.
1 >B²
% vut# % >w#
( 3.1 )
〈6! , )〉 = 6;
4Dπt
Si l’on prend le logarithme :
1 >B²
ln〈6( , )〉 = ln 6; + ln % vut# + ln % >w#
4Dπt ( 3.2 )
1 ²
ln〈6( , )〉 = ln 6; − –
4Dπt 4e
87
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
L’ATME, de dimension [s] correspond au temps mis par l’énergie pour atteindre sa
valeur maximale après l’impulsion source. Il s’agit d’une variable analogue à celle
proposée par Ramamoorthy et al. (Ramamoorthy et al. 2004) pour mettre en évidence la
relation entre le temps de transport de l’énergie et la hauteur d’une entaille sur un
échantillon de béton.
Une analyse de l’équation de diffusion 2D ( 3.2 ) permet de constater que les valeurs
des paramètres D et du temps d’arrivée du maximum d’énergie sont liées à la première
partie du signal. Le paramètre de dissipation, quant à lui, domine très largement la
dernière partie du signal (Figure 58).
88
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Signal Temporel
1.5
0.5
amplitude
-0.5
-1
-1.5
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450
temps [ µ s]
Figure 59 : Signal temporel obtenu après une propagation des ondes ultrasonores dans du béton et
présentation du principe de fenêtrage temporel utilisé lors du traitement de l’information
Une analyse temps-fréquence est effectuée sur le signal temporel (Figure 59) afin de
déterminer la densité spectrale d’énergie en fonction du temps pour différentes
fréquences. Le processus est strictement identique pour chaque mesure.
- Chaque signal temporel est divisé en plusieurs fenêtres de temps ∆t. Chaque
fenêtre ayant un taux de recouvrement de 90% avec la précédente (Deroo et al.
2010). Dans le cas présent, ∆t = 50 µs, ce qui correspond à 100 points du signal
d’origine.
- Un fenêtrage de Hamming est ensuite appliqué à chacune des fenêtres
temporelles. Ceci permet de donner plus de poids aux points du signal situés au
centre de la fenêtre et de ne pas induire d’artefacts lors du traitement temps-
fréquence. Ce fenêtrage induit donc une diminution de l’information au niveau
des extrémités de la fenêtre temporelle. Le taux de recouvrement appliqué lors
de l’étape précédente permet de s’assurer que la totalité du domaine temporel du
signal est analysé.
- La transformée de Fourier discrète de chaque fenêtre temporelle est ensuite
effectuée, puis élevée au carré.
89
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Emission Réception
Distance
Auteur entre ∆t ∆f
fréquence diamètre fréquence diamètre
capteurs
500 kHz
Anugonda et 25.4 60
(400- 2.5 mm 23.6µs
al. 2001 mm kHz
600)
Ramamoorthy 500 kHz
25.4
et al. 2004 (400- 2.5 mm 60 mm
mm
600)
Punurai et al. 12.5 250
5 MHz 2 MHz 1 mm 40 mm 60µs
2007 mm kHz
25.4 79
Quiviger 500 kHz 200-700 5 mm 60 mm 50 µs
mm kHz
Tableau 9 : Données expérimentales utilisées par les différents auteurs pour la mesure de diffusion
Ce traitement effectué, il est alors possible de tracer 〈6! $〉 en fonction du temps, pour
enfin déterminer les valeurs des coefficients de diffusivité, de dissipation et du temps
d’arrivée du maximum de l’énergie en accord avec l’équation ( 3.1 ).
Le logarithme de l’énergie est ensuite tracé (Figure 60) en fonction du temps afin de
permettre la régression, conformément à l’équation ( 3.2).
90
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Cette régression 2D nous permet donc d’obtenir les paramètres D et σ apparents, ainsi
que le temps d’arrivée du maximum de l’énergie, soit le temps qui correspond à la
valeur maximale de la régression (Figure 60). La valeur de l’énergie mesurée fluctue
autour de sa valeur moyenne proportionnellement au produit ∆t par ∆f (Weaver 1998)
selon l’équation :
1
6 6[b•–Béb ± ‡ ‰ 6[b•–Béb
( 3.3 )
√Δt ∗ Δf
0
mesuré
-2 régression non linéaire
L o g (E n erg ie) [n o rm alisé]
-4
-6
-8
-10
-12
-14
-16
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450
Temps [µ s]
91
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
10
2
1/0 1/1 1/3 1/5,5
Figure 61 : Évolution de la dissipation en fonction de la hauteur d'une fissure ouverte (rouge) ou fermée
(bleu)
La figure 61 présente les moyennes des 25 valeurs de dissipation obtenues lors des 25
mesures indépendantes ainsi que la dispersion de ces mesures, pondérées par le biais du
coefficient de Student pour les éprouvettes entaillées (partie ouverte de la fissure, en
rouge) et fissurées (fissure fermée, en bleu sur la figure). Les échelles respectives de
chacun des types de fissures sont placées en haut et bas de figure. Elles indiquent la
hauteur de la partie ouverte de la fissure, suivie de la hauteur de la partie fermée, en
centimètres.
Elles sont en accord avec les valeurs relevées dans la littérature pour le béton. Ainsi, des
valeurs comprises entre 4 et 12 ms-1 sont comparables à celles observées par Punurai et
al. (10 ms-1), Becker et al. (Entre 10 et 30 ms-1), ou encore Anugonda et al. (Entre 10 et
25 ms-1).
Les valeurs moyennes de dissipation pour les deux séries d’éprouvettes sont bien
distinctes. Cette écart provient du fait que deux ciments de types différents ont été
92
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
18
Diffusivity [m .s ]
-1
2
16
14
12
10
93
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
55
ATME [µ s]
50
45
40
35
1/0 1/1 1/3 1/5,5
94
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
3.2.5. Synthèse
Il a été montré que l’ATME est un bon indicateur pour la caractérisation d’une fissure
ouverte. Cependant, au vu de la dispersion des valeurs il semble difficile d’extraire une
information sur la hauteur de fissure fermée. Nous faisons l’hypothèse que la dispersion
ainsi que la faible variation de l’ATME en fonction d’une fissure réelle sont dues à la
présence de zones partiellement ouvertes entre les lèvres qui modifient le transport de
l’énergie.
95
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Il convient toutefois de rappeler que la simulation numérique n’est pas une réponse
absolue, mais qu’elle peut permettre d’apporter certains éléments de réponse sur les
phénomènes physiques étudiés. C’est dans ce sens qu’elle est de nos jours de plus en
plus utilisée dans le cadre de la recherche scientifique.
96
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
97
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Le mode de calcul retenu est la méthode des différences finies en 2D, implémentée sous
Matlab. Le choix de cette méthode est principalement justifié par sa facilité de mise en
œuvre pour une simulation de diffusion en fonction du temps. Le choix du 2D est
motivé par la symétrie de nos éprouvettes ainsi que par le gain en temps de calcul.
Le béton, dans lequel l’onde diffuse se propage, possède des valeurs de dissipation et de
diffusivité fixes, La géométrie, la position des émetteurs et récepteurs ainsi que les
conditions aux limites du modèle sont fixées également afin de correspondre aux
conditions de l’expérience. Le maillage utilisé dans l’étude suivante est un maillage
rectangulaire, de résolution horizontale 2 mm et de résolution verticale 1mm. Le choix
des résolutions sur les deux axes est lié à un compromis entre la maximisation de la
résolution dans l’axe de la fissure, et une résolution plus faible pour l’axe
perpendiculaire à la fissure, permettant ainsi d’optimiser le temps de calcul.
La diffusion de l’énergie est initiée par le spectre en énergie d’un capteur de 500kHz,
obtenu expérimentalement. Pour ce faire, deux capteurs de 500kHz ont été placés en
vis-à-vis dans une cuve en eau. Un premier capteur génère une impulsion qui se propage
au second capteur. Le signal enregistré présenté sur la figure 64 est ensuite analysé afin
d’en déterminer le spectre en énergie qui est ensuite utilisé comme source.
0.4
0.3
0.2
0.1
Amplitude
-0.1
-0.2
-0.3
-0.4
-2 0 2 4 6 8
temps [µ s]
Figure 64 : Signal temporel expérimental pour un capteur de 500kHz, de diamètre 1’’, utilisé comme
source de propagation pour la simulation numérique
98
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Afin d’optimiser les temps de calcul, seule une partie de la pièce de béton est modélisé
de dimensions 100x300 mm, autour de la fissure (Figure 65). Les conditions aux limites
du modèle sont donc choisies en conséquence : des conditions d’absorption aux
interfaces béton-béton (en vert sur la figure), des conditions de réflexion à l’interface
béton-air (indiquée en rouge).
Transducteurs
3
Entaille
4
y [cm]
10
-15 -10 -5 0 5 10 15
x [cm]
Figure 65 : Section de béton modélisée de dimensions 10x30 cm. Une entaille (1cm) est placée à
l’origine. Les deux transducteurs sont indiqués en blanc, de part et d’autre de la fissure (à +3 et -3 cm)
Les fissures ouvertes ainsi modélisées peuvent présenter différentes hauteurs dans la
simulation (Figure 66), afin de correspondre aux éprouvettes réelles auxquelles les
résultats numériques seront comparés.
99
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
0 0
1 1
2 2
y [cm]
y [cm]
3 3
4 4
5 5
0 0
x [cm] x [cm]
0 0
1 1
2 2
y [cm]
y [cm]
3 3
4 4
5 5
0 0
x [cm] x [cm]
Figure 67 : Implémentation de points de contacts entre les lèvres de fissure. 2 et 8 points de contacts pour
une hauteur totale de fissure de 5 cm
100
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Dans un premier temps, l’énergie reçue par le capteur en réception est déterminée pour
chaque hauteur de fissure ouverte. Ces distributions d’énergie en fonction du temps sont
présentées sur la figure 68.
-4
x 10
ATME
2 Hauteur de l'entaille: 0 cm
1 cm
2 cm
3 cm
4 cm
Amplitude
5 cm
6 cm
1
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4
Temps [ms]
Figure 68 : Amplitude de l'énergie ultrasonore pour plusieurs entailles, assimilées à des fissures ouvertes,
et de hauteur variable
101
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Sur la figure 68, il est également possible de constater une augmentation du temps
d’arrivée du maximum de l’énergie (ATME) en fonction de la hauteur d’une fissure
ouverte. Cette évolution est en accord avec le fait que, pour ce type de fissure, l’onde
diffusée ne peut pas se propager au travers de la fissure, rallongeant d’autant la distance
à parcourir d’un capteur à l’autre.
Afin de pouvoir comparer les résultats numériques avec ceux provenant de l’expérience,
les paramètres de diffusion, de diffusivité, ainsi que l’ATME (temps d’arrivée du
maximum de l’énergie) doivent être déterminés. Deux méthodes de détermination
différentes sont utilisées.
Il est possible de visualiser la validité de cette régression 2D pour un milieu simulé sans
entaille, présentée sur la figure 69 a), alors que ce type de régression est moins adapté
pour une géométrie présentant une entaille de cinq centimètres (Figure 69 b)).
102
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
5 5
Simulation numérique Simulation numérique
0 Fit avec solution 2D 0 Fit avec solution 2D
-5 -5
Amplitude : Log (Energie)
-15 -15
-20 -20
-25 -25
-30 -30
-35 a) -35 b)
-40 -40
0 1 2 3 4 5 6 0 1 2 3 4 5 6
-4 -4
Temps [ms] x 10 Temps [ms] x 10
Figure 69 : Logarithme de l'énergie en fonction du temps ainsi que la régression 2D associée pour une
simulation : a) sans entaille, b) avec une entaille de 5 cm, afin de se replacer dans les conditions de
l’expérience.
Nous choisissons donc d’étudier l’influence de la hauteur d’une entaille sur ces
différents paramètres, déterminés par le biais des 3 méthodes décrites précédemment.
Les paramètres directement implémentés dans la simulation sont signalés par : e pour la
diffusivité, pour la dissipation. L’ATME pour le Temps d’Arrivée du Maximum de
l’Énergie est directement issu de la simulation.
Ces paramètres issus de l’Expérience et ceux issus de la Simulation sont suivis des
indices E et S respectivement.
103
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
24
DE*
22
DS *
20
Diffusivité D [m².s-1]
18
16
14
12
10
8
0 1 2 3 4 5 6
Hauteur entaille [cm]
15
σ *
E
14
σ *
S
13
Dissipation σ [ 1/(ms)]
12
11
10
7
0 1 2 3 4 5 6
Hauteur entaille [cm]
104
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Les résultats numériques nous montrent également que l’évolution de ces paramètres
apparents, en fonction de la hauteur d’une fissure ouverte, se trouve dans le domaine
d’incertitude des valeurs expérimentales, excepté pour la valeur de dissipation obtenue
pour une entaille de 2cm.
140
ATME
130
ATMEE*
120
ATMES *
110
100
ATME [µs]
90
80
70
60
50
40
30
0 1 2 3 4 5 6
Hauteur entaille [cm]
Figure 72 : Évolution du paramètre de l’ATME en fonction de la hauteur d'une fissure ouverte. L’ATME
est directement issu de la simulation numérique, l’ATMEE* ainsi que l’ATMES*sont obtenus par
régression mathématique sur les signaux Expérimentaux et Simulées
105
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Il existe donc bien un lien entre la hauteur d’une fissure ouverte et l’ATME, mais ce
dernier est alors sous-estimé à mesure que l’entaille augmente dans le cas où nous
utilisons une résolution à partir de la solution 2D.
Ce modèle est donc ensuite utilisé afin d’étudier l’effet de zones de contacts partiels
entre les lèvres de fissure sur la diffusion de l’onde ultrasonore en tenant compte de la
variation en densité et en répartition de ces contacts sur l’axe de la fissure.
Afin de vérifier cette hypothèse, deux études distinctes de simulation numérique sont
réalisées. Dans un premier temps, nous étudions l’influence du nombre de points de
contact sur la diffusion. Enfin, nous étudions l’influence de la position d’un point de
contact le long de la fissure.
106
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
y [cm]
3
0
x [cm]
Les résultats de cette simulation mettent en évidence l’influence directe des points de
contact sur l’estimation de la hauteur d’une fissure par méthode de diffusion. Il apparaît
sur la figure 74 que les temps d’arrivée des maxima d’énergie diminuent à mesure que
la densité de points de contact augmente. Lorsque l’on considère l’ATME directement
issu de la simulation, nous constatons que les variations de temps sont importantes.
Pour une fissure numérique de 5 cm, l’ATME varie de plus de 70 microsecondes
suivant que la fissure possède de 1 à 24 points de contacts.
107
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
140
ATME
130
ATMES *
120
110
100
ATME [µs]
90
80
70
60
50
40
30
0 5 10 15 20 25
Nombre de points de contact
Figure 74 : ATME en fonction du nombre de points de contact distribués linéairement sur une hauteur
totale de fissure de 5 cm
En revanche, au-delà d’un certain nombre de contacts entre les lèvres de fissure, les
valeurs absolues de l’ATMES* et de l’ATME se stabilisent. A partir d’environ 15 points
de contact dans le cadre de notre simulation, la densité des points de contact n’influe
plus sur la valeur mesurée de l’ATME.
Enfin, nous constatons que les valeurs d’ATME déterminées par ces deux méthodes
sont très différentes en présence de peu de contacts, mais se rejoignent pour des
108
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
nombres de contacts élevés. Ces évolutions montrent que l’utilisation d’une régression
mathématique suivant l’approximation 2D est applicable à la géométrie de fissure
fermée, à partir de douze contacts entre les lèvres de fissure dans notre étude.
0 0
1 1
2 2
y [cm]
y [cm]
3 3
4 4
5 5
0 0
x [cm] x [cm]
Figure 75 : Position variable d'un point de contact unique le long d'une fissure de 5 cm
109
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
140
ATME
130
ATMES *
120
110
100
ATME [µs]
90
80
70
60
50
40
30
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50
Distance entre un point de contact et la surface [mm]
Figure 76 : Variation de l'ATME en fonction de la distance à la surface d'un point de contact ponctuel
entre les lèvres de fissure.
Les résultats (Figure 76) montrent bien que la position des points de contact, et en
particulier leur distance à la surface influencent directement la propagation de l’onde
diffuse au travers d’une fissure. Plus le point de contact est éloigné de la surface, plus le
temps d’arrivée du maximum de l’énergie est grand. Cette observation, bien que
logique, nous permet surtout de quantifier ces délais en fonction de la position du
contact. On constate ainsi que, pour une fissure de hauteur égale, la différence de
position d’un point unique de contact engendre une variation de l’ATME de l’ordre de
10 µs.
110
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
Dans un premier temps, l’entaille d’un centimètre présente au droit des fissures, au
niveau de la surface, est décrite dans le modèle. Nous considérons donc qu’au niveau de
cette zone, l’énergie ne peut traverser l’entaille.
Puis les différentes tailles de fissures sont représentées. Comme les éprouvettes de
l’étude expérimentale, nous plaçons donc à la suite de l’entaille des fissures de tailles
respectives : 1, 3 et 5,5 centimètres.
0 0 0 0
1 1 1 1
2 2 2 2
3 3 3 3
y [cm]
y [cm]
y [cm]
y [cm]
4 4 4 4
5 5 5 5
6 6 6 6
0 0 0 0
x [cm] x [cm] x [cm] x [cm]
111
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
l’équation de diffusion. Les résultats sont présentés en figure 78. Les résultats
expérimentaux sont également reportés sur cette même figure pour comparaison.
1.25
ATMEE *
1.2
ATMES *
ATME [normalisée]
1.15
1.1
1.05
0.95
0 1 2 3 4 5 6 7
hauteur totale : entaille +fissure
Les résultats de la simulation numérique montrent dans un premier temps que les
évolutions des résultats simulés et expérimentaux sont du même ordre pour une
configuration de la fissure fermée où 6.5% de la hauteur totale de la fissure fermée sont
des points de contact, par lesquels l’onde diffusée peut transiter.
112
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
3.5.4. Synthèse
La simulation du processus de diffusion au travers d’une fissure ouverte est effectuée et
validée.
Dans le cas d’une fissure fermée, les résultats expérimentaux montrent une variation
plus faible de cette ATME, et rend difficile une discrimination fiable des différentes
hauteurs de fissures. Cette faible variation était alors supposée provenir de la présence
locale de points de contacts entre les lèvres de fissure.
113
Chapitre 3. Diffusion appliquée à la caractérisation d’une fissure : Expérience et
simulation numérique
3.6. Conclusion
Le potentiel de l’étude du champ ultrasonore diffus pour caractériser une fissure est
expérimentalement démontré et vérifié numériquement.
Les valeurs des paramètres de diffusion en présence d’une entaille sont en accord avec
la littérature, validant le protocole expérimental ainsi que le modèle numérique
développé pour l’étude des contacts partiels.
Cette étude montre qu’en présence de la partie supérieure ouverte d’une fissure,
assimilable à une entaille, le Temps d’Arrivée du Maximum de l’Énergie déterminé par
régression mathématique sur la base de la solution 2D de l’équation de diffusion varie
quasi-linéairement avec la hauteur de l’entaille.
Afin d’étudier les zones fermées, nous proposons par la suite d’induire au sein du
matériau des sollicitations de compression et de traction au niveau de la fissure afin de
faire évoluer dynamiquement ces contacts.
L’objectif est dans un premier temps de pouvoir se replacer dans le contexte d’une
fissure sans contact et ainsi accéder à l’information sur la hauteur de la fissure, mais
également, éventuellement, d’obtenir une signature propre à ces derniers, dépendante de
la hauteur totale de la fissure fermée. Cette nouvelle approche dynamique de la
diffusion fera donc l’objet du prochain chapitre.
114
Chapitre IV
S
( 4.1 )
En première approche, il est possible de traduire cette non linéarité en supposant que le
module élastique dépend dorénavant de l’état de déformation. Le module élastique est
alors exprimé à l’ordre deux en déformation tel que:
S! $ S; !1 ™ $
( 4.2 )
La vitesse de propagation des ondes devient une fonction du paramètre non linéaire
classique ™:
,! $ ,; !1 + ™ $
( 4.3 )
117
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Ainsi, il est possible d’accéder aux paramètres non linéaires par la relation:
∆,! $
™∆
( 4.4 )
,;
Figure 79 : Déformation locale de l'onde acoustique se propageant dans un matériau non linéaire (P. N. J.
Rasolofosaon et al. 1997)
La figure 79 représente la déformation locale au sein d’un matériau non linéaire dans le
cas de faible amplitude (en gras) ainsi que pour une forte amplitude de l’onde
(pointillés).
Lorsque l’amplitude de l’onde est faible, la non linéarité s’exprime peu. L’onde se
propage sans se déformer, ce qui permet de trouver en sortie du système une onde
totalement similaire à celle qui y a été introduite (fréquence, amplitude et longueur
d’onde identiques).
Si l’amplitude de l’onde est importante, la non linéarité du matériau est mise en œuvre.
Le module élastique étant alors fonction de la déformation du matériau, la vitesse varie
donc en fonction de l’amplitude. Dans les zones en compression, et suivant le signe de
béta, la vitesse augmente. Dans les zones en traction, elle diminue. Les ondes se
propageant dans les zones en compression rattrapent celles des zones en traction, créant
une distorsion de l’onde. Lorsque les secondes rattrapent les premières, l’unicité de la
solution est perdue et l’on atteint la génération d’ondes de choc.
118
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Différentes valeurs du coefficient β ont pu être déterminées par les auteurs afin de
caractériser les matériaux et sont présentées tableau 10 :
Les valeurs de β présentent une grande disparité de signe et de valeur absolue. Plus la
valeur absolue de β est élevée, plus la non linéarité est importante.
De nombreux auteurs ont également étudié l’évolution de la non linéarité dans les
matériaux en fonction de l’endommagement. Zumpano et al. (Zumpano & Meo 2008)
étudient l’évolution de paramètres non linéaires afin de détecter des endommagements
sur des pièces composites. Nagy (Nagy 1998) étudie l’évolution non linéaire face à un
endommagement progressif par fatigue pour de nombreux matériaux, tels que des
plastiques, métaux, composites ou adhésifs.
119
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
roches, les bétons, ainsi que tous les matériaux présentant des points de contact
distribués à l’échelle mésoscopique, tel qu’une fissure.
La non linéarité non classique est avant tout une description phénoménologique des
phénomènes d’hystérésis que l’approche par développement du modèle classique ne
pouvait pas représenter. Elle est décrite par la relation (Van Den Abeele et al. 2001) :
Le paramètre non linéaire non classique , permet de rendre compte des phénomènes
d’hystérésis observés dans les matériaux hétérogènes.
Les effets non linéaires contenus dans la relation contrainte/déformation sont mis en
évidence en soumettant l’éprouvette à un protocole de chargement quasi-statique et en
étudiant sa réponse en déformation (Figure 80).
Figure 80 : Réponse non linéaire (b)) d'un cylindre de grès soumis à un protocole de chargement quasi-
statique (a)). C) Mémoire discrète (Ostrovsky & P. A. Johnson 2001)
120
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
121
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Selon ces mêmes auteurs, le comportement non linéaire non classique n’est pas le
résultat d’effets microscopiques (à l’origine des comportements non linéaires
classiques), mais mésoscopiques. Ainsi la source principale de cette forme de non
linéarité se trouve au niveau des joints de grains ou des microfissures. Les contacts entre
ces grains constituent alors une gamme d’éléments élastiques qui contrôlent le
comportement des matériaux lorsque ceux-ci sont soumis à une sollicitation suffisante
pour activer les non linéarités. Cette sollicitation doit induire une déformation de l’ordre
de 10-7 afin d’activer les non linéarités du système (TenCate et al. 2000). La figure 82
présente l’évolution de la fréquence de résonnance d’une roche en fonction de la
déformation. Le décalage de la résonance est caractéristique de la non linéarité.
122
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Les phénomènes non linéaires observés, tels que l’hystérésis, la mémoire discrète ou
encore la dynamique lente pourraient provenir de différents processus (Figure 83):
rupture et recouvrement des propriétés cohésives des joints (stick-slip), contacts
rugueux entre les grains, ouverture et fermeture de fissures (clapping).
Figure 83 : Contacts entre grain, générateurs de non linéarité (Ostrovsky & P. A. Johnson 2001)
Un autre élément important est la présence dans ces matériaux de fissures (micro ou
macro). Il a été montré expérimentalement que la présence de fissure augmentait
considérablement la non linéarité du matériau. Les exemples sont nombreux, mais nous
retiendrons dans le cas du béton les travaux concernant la microfissuration dans le cas
d’éprouvettes endommagées thermiquement (Payan et al. 2010) ainsi que ceux sur la
macro-fissuration (Zardan et al. 2010; Donskoy et al. 2001; Van Den Abeele & De
Visscher 2000; Antonaci et al. 2010)
123
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Des contacts totalement clos génèrent une impédance acoustique linéaire continue à
travers un contact fermé, supprimant une éventuelle réflexion sur l’inhomogénéité.
Cependant, une sollicitation mécanique de forte amplitude génère des mouvements
d’ouverture et de fermeture de la fissure. De plus la rugosité des surfaces en contact crée
les conditions propices au développement d’un modèle de contact Hertzien et une
concentration des contraintes mécaniques. Le comportement à l’interface devient alors
non linéaire de par la Non linéarité Acoustique de Contact (CAN) (Solodov 1998).
Le niveau de saturation en eau est également à prendre en compte. Van Den Abeele et
al (Van Den Abeele et al. 2002) étudient ainsi l’évolution du module élastique et du
paramètre non linéaire non classique α en fonction du taux de saturation de roches
(Figure 84).
Figure 84 : Evolution du paramètre non linéaire non classique alpha en fonction de la saturation en eau
pour les roches meule et berea (K. E. A. Van Den Abeele et al. 2002)
Il en résulte que les réponses linéaires et non linéaires sont extrêmement sensibles à la
saturation en eau, en particulier pour des taux compris entre dix et vingt pour cent. Ce
phénomène trouverait son origine au sein des forces misent en jeu au niveau
microscopique comme les forces de tension ou de capillarité (Figure 85).
124
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Ainsi, si l’on considère la non linéarité quadratique, la réponse non linéaire associée à
un signal d’entrée S est de l’ordre de S².
125
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
m! $ (› ˆ!D $
( 4.6 )
( ( 4.7 )
m ! $ ( › ˆ !D $ !1 cos!2D $$
2
Il apparaît alors un terme indépendant du temps, un second terme de pulsation qui est le
double de celui injecté dans le système.
Figure 86 : Spectre fréquentiel d'une onde se propageant dans un milieu à la non linéarité quadratique
( 4.8 )
( ™ (q ²
126
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
mq ! $ (q cos!Dq $ % m ! $ ( cos!D $
( 4.9 )
Chacune de ces ondes vont générer leurs propres harmoniques. De plus, l’interaction
non linéaire de ces deux ondes crée deux nouvelles composantes fréquentielles : l’une
est proportionnelle à la somme des pulsations des ondes sources, la seconde à leur
différence. Ces deux ondes sont nommées bandes latérales (Figure 87).
Figure 87 : Spectre fréquentiel de l’interaction de deux ondes se propageant dans un milieu à la non
linéarité quadratique
127
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
( ±q
™ ∝ S;
( 4.10 )
(q (
La méthode a été adaptée par Abeele et al. (Van Den Abeele & De Visscher 2000) au
paramètre non linéaire hystérétique. Nous avons dans ce cas une expression du
paramètre non linéaire hystérétique s’appuyant sur une description énergétique de la
transformée de Fourrier. Le paramètre non linéaire hystérétique est proportionnel au
rapport des énergies des bandes latérales de hautes fréquences avec l’énergie des basses
fréquences :
6 ±q ( 4.11 )
N ∝ S;
6q 6
128
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 88 : Montage NRUS classique et courbe de résonance (P. A. Johnson et al. 2004)
F; F
N∆
( 4.12 )
F;
Où F est la fréquence de résonance, ∆ la variation d’amplitude de la déformation et F;
est la fréquence de résonance linéaire, obtenue pour de très faibles amplitudes de
déformation.
129
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 89 : Accélération en fonction de la fréquence pour 9 niveaux d'excitation d’un échantillon de roche
de Fontainebleau. Le domaine fréquentiel des signaux correspondant à deux niveaux d’excitation sont
également présentés (Johnson & Rasolofosaon 1996)
130
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Un exemple de mesure SDD pour l’acier est présenté figure 90. L’acier intact ne montre
aucune variation de la fréquence de résonance. L’acier endommagé présente une
variation initiale de la fréquence de résonance induite par le conditionnement de
l’échantillon ainsi que le retour progressif à ses propriétés initiales. L’auteur montre que
dans le cas de cet acier endommagé, l’échantillon nécessite près d’une heure pour
recouvrer ses propriétés.
La figure 91 illustre les comportements en dynamique lente pour les roches, ainsi que
pour deux échantillons de béton, l’un endommagé alors que l’autre ne l’est pas.
Figure 91 : Illustration de la dynamique lente pour différentes classes de matériaux, dont le béton
(TenCate et al. 2000)
131
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Une impulsion ultrasonore est transmise au milieu par l’émetteur. L’onde ultrasonore se
propage alors jusqu’au récepteur. Le signal acoustique reçu est enregistré, retourné
temporellement, puis réémis dans le matériau. L’onde acoustique (TR) qui en résulte se
propage donc dans le matériau et se refocalise sur la source selon le principe du
retournement temporel.
La particularité du TR NEWS tient du fait que le signal TR reçu est filtré en fréquence
avant d’être retourné afin d’analyser uniquement la réponse non linéaire du matériau
pour chacune de ses harmoniques.
Figure 92 : Contributions non linéaires le long d'une fissure (Ulrich et al. 2007)
132
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Le principe est le suivant : Une onde pompe, de forte amplitude et de basse fréquence
est injectée dans le système. Cette onde est injectée sur plusieurs périodes afin de créer
au sein de l’éprouvette des mouvements de traction et de compression qui vont
engendrer une activation des non linéarités au niveau du béton et de la fissure.
Ensuite, une onde de plus haute fréquence et de faible amplitude est transmise au sein
de la zone à caractériser afin de « sonder » le béton. Dans la pratique, ce n’est pas une
impulsion qui est simplement transmise, mais une succession d’impulsions, avec une
fréquence de récurrence choisie afin de pouvoir sonder la pièce pour différents niveaux
de déformation.
Figure 93 : Illustration de l'effet acousto-élastique. Les phases de compression et de traction induites par
la basse fréquence modifie le temps de propagation des ondes hautes fréquence ainsi que l'énergie
transmise et reflètent ainsi la non linéarité du milieu (Renaud 2008)
133
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Considérons un milieu dont les dimensions sont très grandes devant la longueur d’onde
des ultrasons et avec L la distance entre les deux capteurs. Il existe une relation entre la
variation de temps de vol et la déformation :
¢ ( 4.13 )
žŸ ¡ ~™ + N(∆ + › ˆ( )š)€
2,;
Dans le cadre de cette relation prenant en compte la non linéarité non classique, la
variation du temps de vol ne dépend plus uniquement de la déformation, mais
également du signe de la vitesse de déformation.
La variation de temps de vol est utilisée par Renaud (Renaud 2008) pour caractériser la
présence de fissures dans du pyrex (Figure 94). Cette figure montre une évolution du
comportement de l’onde ultrasonore en présence ou non de fissures dans le matériau.
Figure 94 : TOFM en fonction de la pression pour un pyrex non fissuré, et fissuré (Renaud 2008)
En utilisant cette méthode, La Roca et al. (La Rocca et al. 2010) déterminent le
paramètre non linéaire quadratique d’un joint de colle (Figure 95) comme étant la pente
moyenne de la relation entre la variation de vitesse et la contrainte.
134
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 95 : Évolution de la vitesse de propagation des ondes en fonction des contraintes dans un joint de
colle (La Rocca et al. 2010)
4.1.5.1. Porosité
La porosité et le réseau de microfissures sont une source de non linéarité,
indépendamment de tout autre endommagement. Cette non linéarité est mise en
évidence par Payan et al. (Payan et al. 2010) qui étudient son évolution en fonction du
ratio eau/ciment de cinq éprouvettes de béton pour un taux de saturation de 0 et 100%.
Ce ratio E/C est directement lié à la porosité du matériau, dans le sens ou son
augmentation génère une augmentation du nombre de pores (Gagné & Aïtcin 1993). Les
auteurs effectuent une analyse NWMS de la réponse acoustique des bétons. Ils montrent
ainsi que la non linéarité évolue très peu pour des bétons secs dont le ratio E/C est
compris entre 0.3 et 0.65 mais diminue de près de 30% pour un ratio de 0.8.
Figure 96 : Paramètre non linéaire en fonction du ratio eau/ciment, pour deux états de saturation: sec et
saturé (Payan et al. 2010)
135
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Selon les auteurs, la porosité n’a donc que peu d’incidence sur la réponse non linéaire
du béton pour des taux de vide compris entre 12,5 et 16%.
Figure 97 : Décalage de la fréquence de résonance pour des éprouvettes de béton endommagées par ASR
(Leśnicki et al. 2011)
La non linéarité globale induite par la microfissuration et les délaminages induits par la
réaction alcali-silice dans le béton sont également confirmés par Chen et al (X. J. Chen
et al. 2008). Les auteurs privilégient une mesure par NWMS selon la méthode introduite
par Abeele (Van Den Abeele et al. 2001) et présentée en chapitre 4.1.4.2. La figure 98
montre en effet l’évolution de la non linéarité de quatre échantillons de béton en
fonction du degré d’endommagement par ASR. Sur cette figure, deux groupes
d’éprouvettes se distinguent : T et S. Ces deux groupes sont constitués d’éprouvettes de
béton de formulation identique, mais dont l’âge avant leur exposition à un
environnement propice au développement de l’ASR diffère. Ces résultats mettent en
évidence une variabilité de la réponse non linéaire du béton à l’ASR en fonction de
l’histoire du matériau.
136
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 98 : Évolution du paramètre non linéaire mesuré par NWMS en fonction de l’expansion de la
réaction alcali- silice (X. J. Chen et al. 2008)
Enfin, Kodjo et al. (Kodjo et al. 2011) s’intéressent plus particulièrement à l’impact de
l’ASR sur la dynamique lente de bétons. Certains bétons étudiés présentent un
endommagement par ASR, alors que les seconds sont fissurés. Ils mettent ainsi en
évidence le recouvrement des propriétés initiales des bétons, qui est réalisé suivant une
loi logarithmique (Figure 99). Ils montrent également que si le temps de recouvrement
est identique pour les deux types d’endommagement, l’ASR entraîne une chute plus
importante des propriétés mécaniques globales du béton que la présence d’une fissure.
La vitesse de recouvrement est donc également plus importante, ce qui permet de
discriminer les deux types d’endommagement.
Figure 99 : Evolution en dynamique lente de bétons atteint d’ASR ou comportant des fissures (Kodjo et
al. 2011)
4.1.5.3. Carbonatation
La méthode NRUS est utilisée par Bouchaala & al. (Bouchaala et al. 2011) pour
caractériser la carbonatation de pièces de béton. Les auteurs montrent une diminution de
la non linéarité des échantillons carbonatés dont ils attribuent l’origine à la
137
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 100 : NRUS sur éprouvettes saine et carbonatée, mesures expérimentales réalisées au LANL
138
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 101 : Évolution relative du paramètre non linéaire (traits) et de la variation relative de vitesse
(points) en fonction de la température d’exposition (Payan et al. 2007)
Figure 102 : Evolution des paramètres linéaires et non linéaires du métal lors d’essais en fatigue
139
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
& Yost 2001; Hurley et al. 1998; Morris et al. 1979; Cantrell & Yost 1994; Frouin et al.
1999; Palit Sagar et al. 2006). Cette méthode mesure la non linéarité globale du
système. Elle permet une détection de l’endommagement, mais ne permet pas sa
localisation précise. De plus, le NRUS ne peut permettre une discrimination entre
différents types d’endommagement, dont l’endommagement par macrofissuration.
D’autres auteurs, comme Donskoy & al. (Donskoy et al. 2001) utilisent les propriétés
non linéaires d’interaction de deux ondes monochromatiques au sein du matériau à
contrôler.
La méthode NWMS, utilisée afin de caractériser la hauteur d’une fissure dans l’acier
par Donskoy & al. (Donskoy et al. 2001) montre que le paramètre non linéaire ainsi
déterminé est proportionnel à la hauteur de fissure pour une dimension de fissure
inférieure à 50% de l’épaisseur totale de la barre d’acier. Les auteurs supposent que la
non linéarité observée pour des hauteurs de fissure plus importantes est liée à une
ouverture partielle de la fissure lorsqu’elle est sollicitée.
Figure 103 : Paramètre non linéaire en fonction de la hauteur d'une fissure dans l'acier
(Donskoy et al. 2001)
La localisation spatiale d’une fissure dans l’acier est néanmoins réalisée par Kazakov et
al (Kazakov 2006). Les auteurs, par modulation d’ondes (NWMS) effectuent l’imagerie
acoustique d’une pièce d’acier présentant une fissure, ainsi que celle d’un trou placé
devant celle-ci. Le montage expérimental utilisé est présenté figure 104. Le trou,
diffuseur linéaire, est placé entre la fissure et le capteur ultrasonore. Cette configuration
a pour effet de masquer la fissure, donc la non linéarité dans les signaux analysés. En
effet, les résultats présentés figure 104d) montrent que la mesure de vitesse des ondes
140
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
ultrasonores permet une localisation du trou, mais que l’amplitude des ondes réfléchies
par la fissure est très faible et que la localisation de la fissure manque de résolution. Au
contraire, la mesure de la non linéarité présente permet de minimiser les effets induits
par le trou, qui possède une réponse essentiellement linéaire, et met en évidence le
caractère non linéaire de la fissure comme présenté figure 104c).
Figure 104 : Imagerie non linéaire de fissure dans l'acier par méthode NWMS (Kazakov 2006)
La caractérisation de fissure par méthode non linéaire est également éprouvée sur le
verre. Les auteurs (Ulrich et al. 2006) parviennent à la caractérisation d’une
macrofissure dans un bloc de verre par retournement temporel non linéaire (TR NEWS).
Les auteurs analysent le premier et second harmonique du signal acoustique propagé
dans le matériau après retournement temporel et détecté le long de la surface.
141
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
La figure 105 présente les résultats obtenus. Sur les parties a) et b), il est possible de
visualiser les signaux TR filtrés dans la gamme du second harmonique et détectés au
droit de la fissure, ainsi qu’à 3 cm de celle-ci. A une distance de 3cm de la fissure,
presqu’aucun signal non linéaire n’est détecté, confirmant le fait que le signal du second
harmonique est directement lié à la présence de la fissure. Sur les parties c) et d), sont
présentées les distributions spatiales des amplitudes des premiers (linéaire) et seconds
(non linéaire) harmoniques. Expérimentalement, la fissure est placée au point 0 de l’axe
des abscisses. Les deux harmoniques parviennent donc à localiser la fissure. Pour le
dimensionnement de la fissure, il est possible de voir que la réponse du premier
harmonique s’étend sur 8 mm autour de la fissure. Le second harmonique offre une
réponse sur une distance de 2mm autour du centre de la fissure, or, la fissure fait 2 mm
d’ouverture. L’analyse de la réponse non linéaire du second harmonique après
retournement temporel (TR NEWS) montre donc une excellente capacité à détecter,
localiser, et surtout dimensionner une fissure fermée dans un matériau linéaire.
A travers toutes ces études, nous avons donc pu constater la capacité de l’acoustique
non linéaire à caractériser une fissure au sein d’un matériau linéaire. Dans ce type de
matériau, la non linéarité mesurée est alors totalement induite par la présence de fissure.
142
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Quelle est alors la capacité de l’acoustique non linéaire à caractériser une fissure
présente dans un matériau fortement non linéaire comme le béton ? Un transfert de ces
méthodes est-il possible ?
4.2.2. Béton
La caractérisation de fissure dans du béton par méthodes acoustiques non linéaires est
complexe. En effet, à la non linéarité déjà présente dans le matériau viennent s’ajouter
les non linéarités induites par la fissure. Le béton est un matériau composite et possède
intrinsèquement des sources de non linéarité dont les origines sont présentes à toutes les
échelles, comme nous avons pu le voir précédemment. Les origines sont
microscopiques avec les joints de grains, ou mésoscopiques, induites par la porosité
ainsi que le réseau de microfissures, naturellement présents dans le matériau. Une non
linéarité est également induite par l’humidité dans les capillaires du béton, et qui évolue
en fonction de l’environnement de la pièce. Des études (Van Den Abeele & De Visscher
2000; Zardan et al. 2010; Kodjo et al. 2011…) ont néanmoins permis une avancée vers
la résolution de ce problème complexe.
La méthode NRUS est employée par Van Den Abeele & al. pour la caractérisation de
microfissures et de fissures dans du béton (Van Den Abeele & De Visscher 2000). Dans
le cadre de leur étude, les auteurs font subir à des poutres de béton des chargements
successifs en flexion trois points. Ces chargements, de plus en plus importants,
induisent au fur et à mesure de la microfissuration pour les premiers chargements, puis
de la macrofissuration (en particulier pour le dernier chargement).
Figure 106 : Évolution de la fréquence de résonance d'une poutre en béton pour différents pas de
chargement (Van Den Abeele & De Visscher 2000)
143
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Zardan et al. (Zardan et al. 2010) appliquent la méthode NWMS sur quatre éprouvettes
possédant chacune une fissure fermée de hauteur différente. Ces éprouvettes sont celles
qui sont étudiées dans le cadre de cette thèse. Cette méthode présente l’intérêt de sonder
plus spécifiquement la zone présentant la fissure.
Les auteurs utilisent l’interaction de deux ondes, l’une haute fréquence de 49kHz et la
seconde étant générée par le lâcher d’une bille dans le but d’exister le premier mode de
flexion de l’éprouvette (Figure 107). Le paramètre hystérétique N est ensuite déterminé
selon la méthode introduite par Abeele et al. (Van Den Abeele et al. 2001)
Figure 107 : Caractérisation de fissures réelles par méthode NWMS (Zardan et al. 2010)
Les résultats présentés figure 107 montrent une évolution quasi-linéaire du paramètre
non linéaire en fonction de la hauteur de fissure dans cette configuration.
Dans la suite de cette étude, nous utiliserons donc les propriétés de l’acoustique non
linéaire afin de caractériser une fissure fermée dans du béton dans une optique de
transfert in situ de la méthode.
144
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
béton. Ce type de méthode est alors employé pour détecter l’endommagement par
macrofissuration.
Une seconde méthode, locale, est ensuite choisie pour parvenir à la caractérisation de la
fissure. La méthode NWMS utilisée par Zardan et al. a mis en évidence la capacité à
visualiser une non linéarité propre à la fissure dans le béton. La méthode de diffusion
modulée, méthode locale que nous développons dans la suite de cette étude, a pour
objectif d’aboutir à la caractérisation de la fissure, indépendamment du couplage
Dans la suite de cette étude, nous allons donc appliquer cette méthode de résonance non
linéaire sur des éprouvettes de béton fissurées. Ces travaux nous permettrons de vérifier
s’il est possible d’observer les contributions non linéaires de la fissure,
indépendamment des contributions du béton, avec cette méthode d’analyse globale des
non linéarités.
145
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Pour travailler en flexion, les éprouvettes sont donc placées en équilibre sur deux appuis
linéiques.
Pour chaque éprouvette, au droit de la fissure, mais sur le côté opposé, nous fixons un
cylindre métallique de section hexagonale percée d’un trou en son centre. Cette pièce
permet de lier l’éprouvette au pot vibrant de type B&K 4809 qui assure la mise en
résonance de chaque poutre. Elle remplit deux fonctions : tout d’abord, elle fixe le pot
vibrant à l’éprouvette. Ensuite, elle permet une répartition des efforts du pot vibrant sur
la largeur totale de l’éprouvette et favorise le mode de flexion.
Il est totalement exclu de percer le béton au droit de la fissure afin d’y visser le pot
vibrant puisqu’une telle action génère de la microfissuration, ou suffisamment de
contraintes locales pour propager les fissures déjà présentes. Le choix a donc été fait de
coller la pièce au béton, et l’utilisation de la pièce intermédiaire permet de répartir les
efforts sur la colle.
146
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
De nombreux essais ont été réalisés afin de déterminer la colle adéquate. Ils montrent
que les colles du commerce de type glue ne sont pas adaptées à ce type de montage. En
effet, la glue pénètre dans le béton par l’intermédiaire des pores présents. Sous l’effet de
sollicitations mécaniques importantes, la rupture n’intervient alors pas au niveau du
joint de colle, mais au niveau du béton, dégradant sa surface. De plus, cette pénétration
de la colle la rend impossible à dissoudre sans endommager l’éprouvette. Il est donc
impossible de repositionner la fixation métallique si nécessaire.
Notre choix s’est donc porté vers l’utilisation de Phenyl salicilate, ou Salol. Le Salol se
présente sous la forme d’une poudre cristalline qui se liquéfie pour des températures
supérieures à 42°C. Sa recristallisation lorsque la température diminue permet une
fixation rigide de la tige au béton. Les propriétés de ce composé chimique ont motivé
notre choix. Dans un premier temps, le Salol assure une cohésion grâce à une formation
cristalline alors que les glues classiques sont relativement visqueuses et induisent une
non linéarité supplémentaire à la mesure. De plus, ce matériau est plus fragile que le
béton de peau. Lors des expérimentations, lorsque les efforts appliqués par le pot
vibrant sont trop importants, le joint de Salol cède avant le béton de peau préservant
ainsi la pièce expérimentale.
Une fois tous ces préparatifs effectués, le pot vibrant est placé sous la pièce de béton et
fixé. Enfin, un accéléromètre triaxial (B&K) est fixé, toujours au Salol, au bord de
l’entaille, sur la face supérieure de l’éprouvette. L’instrumentation finale de l’éprouvette
est présentée figure 109.
147
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Le montage de la figure 109 est ensuite modélisé sur RDM Le Mans, afin de déterminer
numériquement les modes propres de l’éprouvette. Cette procédure nous permet
d’estimer la fréquence du premier mode de flexion d’une éprouvette non entaillée ni
fissurée. Ce mode existe pour une fréquence de 1,4kHz. Pour les autres éprouvettes,
comportant entaille et fissure, la résonance doit être déterminée expérimentalement,
mais se situe également autour de 1,4kHz.
Maintenant que la fréquence de résonance est connue, la méthode NRUS est employée
afin de déterminer le paramètre non linéaire hystérétique de chaque éprouvette, pour
différentes hauteurs de fissure.
148
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
béton, il cède relativement vite, n’offrant pas une excellente résistance en traction. Dans
ce dernier cas, le remontage entier de l’expérience est à effectuer.
Une fois l’expérience mise en place, un premier balayage en fréquence est d’abord
effectué autour de 1,4 kHz. Ce balayage nous permet de déterminer expérimentalement
la fréquence de résonance de chaque éprouvette pour une amplitude de déformation la
plus faible possible.
149
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
1.5 1.5
1 1
0.5 0.5
A m p litu d e
A m p litu d e
0 0
-0.5 -0.5
-1 -1
-1.5 -1.5
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 0 5 10 15 20 25 30 35 40
temps [s] temps [s]
Figure 111 : Accélération enregistrée par Figure 112 : Division du signal final en fonction
l'accéléromètre fixé à l'éprouvette des fréquences d'excitation
150
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Chaque bande fréquentielle est isolée (Figure 112) et analysée de façon identique. Le
signal temporel est converti dans le domaine fréquentiel pour lequel l’amplitude
maximale ainsi que la fréquence correspondante sont relevées. L’accélération est
ensuite convertie en déplacement dans le domaine fréquentiel en utilisant la relation
suivante :
(¤k£ % FF ∗ | £ { % | ˆ ˆˆ%
( 4.14 )
ék£ |%¤%ˆ
(2 E F)
L’utilisation de la relation ( 4.14 ) n’est possible que dans le cadre d’une sollicitation
sinusoïdale.
1.4
fissure 5.5 cm
1.2
1
Déplacement [µm]
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0.98 0.985 0.99 0.995 1 1.005 1.01 1.015
F/F0
Figure 113 : Courbe NRUS normalisée d'une éprouvette de béton possédant une entaille de 1 cm et une
fissure de 5.5 cm
Les courbes NRUS des différentes éprouvettes sont dans un premier temps représentées
sur le même graphique et présentées figure 114.
151
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
1.8 fissure 0 cm
fissure 1 cm
1.6
fissure 3 cm
1.4 fissure 5.5 cm
déplacement [µm]
1.2
0.8
0.6
0.4
0.2
0
1330 1340 1350 1360 1370 1380 1390 1400 1410 1420
F [Hz]
Figure 114 : Courbes NRUS non normalisées des différentes éprouvettes de béton
Nous pouvons constater sur la figure 114 que les fréquences de résonance diffèrent pour
chaque éprouvette. Cette différence est attribuée au fait que les éprouvettes ne sont pas
strictement identiques, ce qui est inhérent à leur fabrication. En effet, deux bétons, pour
un mélange et des granulats identiques ne seront jamais exactement les mêmes, de par
les arrangements des granulats dans le matrice. De plus, la présence de fissure de tailles
différentes pour chaque éprouvette modifie la géométrie de la pièce.
Les courbes NRUS sont ensuite normalisées par rapport à leur fréquence respective de
résonance, et le décalage relatif de la fréquence de résonance en fonction de son
l’amplitude est déterminé. Ces décalages sont présentés figure 115.
1.6 fissure 0 cm
fissure 1 cm
1.4 fissure 3 cm
fissure 5.5 cm
1.2
déplacement [µm]
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0.99 0.995 1 1.005
F/F0 [Hz]
152
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Sur la figure 115, il est possible de constater que chaque éprouvette testée possède un
décalage en fréquence distinct des autres. De plus, ce décalage est corrélé avec la
hauteur de fissure : Plus la hauteur de fissure est importante, plus la pente est faible.
-3
x 10
1.8
fissure 0 cm
1.6 fissure 1 cm
fissure 3 cm
1.4
fissure 5.5 cm
déplacement [µm]
1.2
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0.99 0.995 1 1.005
F/F0 [Hz]
La très faible amplitude de ce second harmonique implique qu’il est partiellement noyé
dans le bruit électronique, ce qui complexifie l’exploitation des signaux et induit des
incertitudes supplémentaires. De plus, la présence d’autres modes d’excitation peut
générer de la modulation et perturber la réponse fréquentielle.
153
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
6000
5000
4500
4000
3500
3000
2500
-1 0 1 2 3 4 5 6
Hauteur de fissure [cm]
Figure 117 : Évolution du paramètre non linéaire en fonction de la hauteur de fissure dans du béton par
méthode NRUS
Payan & al. (Payan et al. 2007) ont appliqué la méthode NRUS afin de caractériser des
bétons endommagés thermiquement et montrent une évolution du paramètre non
linéaire de 230% pour un fort endommagement. De même, Bouchaala & al. (Bouchaala
et al. 2011) constatent une évolution de 290% de ce paramètre en appliquant le NRUS
afin de caractériser la carbonatation du béton.
Nous constatons donc que l’évolution du paramètre non linéaire en présence de fissure
est moins importante que celles obtenues par d’autres auteurs pour des
endommagements diffus. Ceci trouve son origine dans nombre de contacts présents sur
la hauteur d’une fissure qui entraîne une modification de la non linéarité. En revanche,
lors d’endommagements thermiques ou chimiques, une partie bien plus importante ou la
totalité de la pièce est affectée par ces endommagements diffus et génère ainsi une non
linéarité globale.
Les résultats sont également en accord avec ceux obtenus par Zardan et al (Zardan et al.
2010) et présentés figure 118.
154
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Normalized parameters
4
0
0 10 20 30 40 50 60
Crack depth (mm)
Figure 118 : Evolution du paramètre non linéaire en fonction de la hauteur de fissure dans du béton par
méthode NWMS (Zardan et al. 2010) Les éprouvettes sont celles utilisées ensuite pour notre
caractérisation NRUS
La non linéarité globale, mesurée par méthode NRUS augmente de 110% en présence
d’une fissure de 5cm. Pour une méthode de mesure locale de la non linéarité, telle que
réalisée par NWMS, elle augmente de 600% pour les mêmes éprouvettes. Ces résultats
montrent l’importance de procéder à une mesure de type local pour parvenir à une
meilleure caractérisation de la fissure.
4.3.4. Synthèse
Nous venons de montrer dans ce chapitre la grande sensibilité du paramètre non linéaire
non classique à la présence d’une fissure fermée et débouchante dans du béton. Nous
avons étudié les possibilités d’extraction de l’information pour la fondamentale du
premier mode de flexion, ainsi que sa deuxième harmonique. Les résultats sont
concluants pour la fondamentale, montrant une relation linéaire entre la pente NRUS et
la hauteur de fissure réelle. L’analyse du second harmonique reste très complexe à
effectuer et ne permet pas à ce jour de d’extraire une information fiable de la hauteur de
fissure fermée. Nous avons choisi d’étudier le premier mode de flexion des éprouvettes,
Les fissures n’ont donc pu travailler qu’en mode d’ouverture et fermeture (clapping).
Afin d’obtenir une autre analyse, il serait intéressant de pouvoir travailler sur un mode
de torsion au niveau de la fissure, afin de connaître les effets non linéaires induits par le
cisaillement entre les lèvres de fissure et ainsi parvenir à une meilleure caractérisation
de celle-ci.
L’utilisation d’une méthode acoustique décrivant la non linéarité à une échelle plus
globale permet d’extraire des informations sur une source de non linéarité très localisée
155
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
dans le matériau. Cette étude met ainsi en évidence la présence d’une non linéarité
induite par la fissure, indépendamment de la non linéarité intrinsèque du béton et qui
peut être appréciée globalement avec une faible sensibilité. Cependant, l’évolution du
paramètre non linéaire ne constitue pas à lui seul une signature spécifique à la présence
de fissure. En effet, d’autres types d’endommagements (chimiques, thermiques)
modifient également la non linéarité globale du système. Ainsi, si la méthode NRUS
nous permet de visualiser un endommagement quelconque d’une pièce de béton, elle
n’apporte en réalité que très peu d’information sur la nature de celui-ci et ne permet pas
de discrimination entre un endommagement local ou diffus.
156
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
0.04
0.02
-0.02
-0.04
-0.06
-0.08
-0.1
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2
Contraintes dans la colle (MPa)
Figure 119 : Essais DAET sur des joints de colle. A gauche, la réponse pour un collage sans bulle. A
droite, la même réponse, en présence de bulles d’air dans le joint d’epoxy (La Rocca et al. 2010)
4.4.1. Motivation
La méthode DAET semble donc pouvoir fournir une signature spécifique pour un
endommagement déterminé. Afin de vérifier cette hypothèse, nous avons réalisé un
premier montage expérimental afin d’étudier le potentiel de la méthode pour la
caractérisation de fissures fermées.
Les essais effectués sur les éprouvettes fissurées ne se sont pas avérés concluants. En
effet, afin d’effectuer une mesure la plus locale possible autour de la fissure, il est
nécessaire de placer les capteurs, à plat, de part et d’autre de la fissure. Dans cette
configuration, la première onde longitudinale, sur laquelle est basée l’analyse DAET est
de très faible amplitude, parfois noyée dans le bruit électronique puisque le récepteur
n’est pas dans l’axe de l’émetteur. La variation de temps de vol de cette première onde
n’est donc pas simple à déterminer avec justesse.
157
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
pour pouvoir être mesurée. Les incertitudes de mesures sont alors très élevées, d’un
ordre généralement dix fois supérieur aux grandeurs que l’on souhaite mesurer.
En nous basant toutefois sur le protocole expérimental développé par Renaud (Renaud
et al. 2008), une nouvelle expérience est réalisée. Notre objectif est de définir une
signature acoustique spécifique à la fissure fermée, en ne se basant pas uniquement sur
la première onde directe, mais sur la totalité du signal par une analyse de la diffusion de
l’énergie ultrasonore telle que vu précédemment, et sous sollicitation dynamique.
Figure 120 : Une onde monochromatique basse fréquence modifie la nature des contacts. Les ondes
ultrasonores sont diffusées au travers de la fissure pour sonder le matériau à différents états de contraintes
de la fissure
158
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Cette nouvelle méthode présente, de plus, la possibilité d’effectuer une mesure locale
montrée précédemment comme étant très sensible à la non linéarité de la fissure.
Enfin, les capteurs ultrasonores sont placés de part et d’autre de la fissure, toujours de
façon identique au montage réalisé pour l’étude des propriétés de diffusion dans le
domaine linéaire. L’émission est réalisée par un capteur de 500kHz, la réception est
assurée par le capteur pico, capteur large bande, de diamètre 5mm (Chapitre III).
159
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Trigger
Oscilloscope
Amplificateur
Emetteur Récepteur
Générateur de
fonction arbitraire
Accéléromètre
Une impulsion ultrasonore est transmise à travers le milieu entre les deux capteurs.
Cette mesure nous permet de déterminer que pour ce montage, la durée du signal
ultrasonore reçu, coda comprise, s’éteint au bout de 8ms après l’impulsion de départ.
La mesure effectuée, il est alors possible de fixer la fréquence de récurrence des ondes
ultrasonores. En effet, afin de sonder le matériau pour plusieurs états de déformation de
la fissure, des impulsions ultrasonores sont générées successivement. Chaque onde
diffusée verra donc un milieu sensiblement différent suivant que les contacts entre
lèvres de fissure sont ouverts ou fermés et que l’état de contrainte est différent. Afin que
les ondes ultrasonores successives ne se recouvrent pas et n’interagissent pas entre elles,
la fréquence de récurrence doit être supérieure à la durée d’une onde transmise, soit
8ms. Arbitrairement, il est donc choisi une fréquence de récurrence de 100Hz. La
génération d’impulsion est répétée 100 fois afin d’obtenir un signal total d’une durée
d’une seconde.
160
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
L’oscillation de la poutre, que nous appellerons « onde pompe », est induite par le pot
vibrant. C’est cette onde pompe qui, en faisant travailler l’éprouvette en flexion, va
modifier la nature et la densité des contacts de la fissure.
Nous avons choisi d’utiliser une fréquence de l’onde pompe inférieure. Nous avons
choisi d’utiliser une fréquence d’oscillation de 137Hz, qui représente une période de
7ms, pour un signal ultrasonore analysé de 1ms. Cette fréquence se situe dans la limite
basse de ce que peut produire le pot vibrant pour induire un déplacement sur une
éprouvette pesant 40kg. De plus, cette fréquence est choisie de façon à ne pas être un
multiple de la fréquence de récurrence des ultrasons, ce qui nous permet donc
d’inspecter de multiples états de déformation.
161
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Figure 122 : Signal ultrasonore (bleu) et déplacement de la poutre (rouge). Les deux signaux ont été
normalisés pour plus de visibilité
Sur la figure 122, nous pouvons voir les deux ondes intervenant dans le montage. Les
ultrasons sont présentés en bleu, le déplacement de l’éprouvette en rouge. Cette figure
nous permet de constater que la partie du signal ultrasonore analysé (indiqué par un
rectangle bleu) correspond à une variation plus faible de la déformation de l’éprouvette
pour 137Hz qu’elle ne l’aurait été pour une mise en résonance de la poutre à 1,4kHz.
Le premier signal provient de la réception des ultrasons utilisés pour sonder le matériau.
Ce signal global est constitué des réponses en transmission des 100 impulsions initiales.
Une analyse de diffusion est faite. Pour chacun des signaux ultrasonores, la première
milliseconde du signal est isolée. L’analyse de diffusion, analogue à celle présentée au
162
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
chapitre III, est réalisée sur cette première milliseconde du signal ultrasonore transmis
(indiquée en bleu sur la figure 122).
Aucun filtrage n’est appliqué sur ces signaux. En effet, la fréquence de la porteuse est
extrêmement basse ce qui limite sa détection par le capteur Pico, dont la fréquence de
travail est plus élevée (200-700 kHz). De plus, lors du traitement temps-fréquence
utilisé pour extraire les paramètres de diffusion, nous utilisons la fonction
spectrogramm de matlab. Cette fonction nous permet de sélectionner directement la
bande fréquentielle qui nous intéresse, située entre 240 et 300kHz, ainsi que nous
l’avions fait lors de l’analyse de la diffusion en statique, chapitre III. Cette manipulation
nous permet de limiter les contributions de la porteuse de 137Hz sur les résultats finaux.
L’analyse des signaux ultrasonores nous permet donc d’accéder aux valeurs de
dissipation, de diffusivité, ainsi que de Temps d’Arrivée du Maximum de l’Énergie
(ATME) propres à chacun.
La moyenne de l’amplitude de l’onde pompe est faite entre le temps t=0 correspondant
à l’impulsion ultrasonore et le temps t=ATME, déterminé précédemment. En effet, suite
aux observations réalisées dans le chapitre III concernant l’évolution de ce paramètre en
fonction de la présence de fissure ou d’entaille, nous choisissons de nous intéresser
uniquement aux conséquences de la modulation sur l’ATME. La moyenne entre t=0 et
t=ATME permet de tenir compte de la totalité des états de déformation « vus » par
l’onde ultrasonore entre les deux capteurs.
Nous verrons ultérieurement que les valeurs de l’ATME ainsi obtenues sont de l’ordre
de 50µs. Cet ordre de grandeur a contribué à notre choix de sollicitation de l’éprouvette
163
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
60
fissure 0 cm
58 fissure 1 cm
fissure 3 cm
56
fissure 5.5 cm
54
ATME [µs]
52
50
48
46
44 traction compression
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
déplacement [µm]
Figure 123 : Évolution de l'ATME en fonction du déplacement pour les fissures 0, 1, 3, et 5,5 cm. Les
croix correspondent à l’ouverture de la fissure, les points à sa fermeture
Cette figure 123 nous permet dans un premier temps de visualiser le comportement du
paramètre ATME lors d’une sollicitation dynamique, détaillé ultérieurement.
Nous nous intéressons aux valeurs absolues de l’ATME. Afin de pouvoir comparer les
résultats obtenus sous sollicitation dynamique avec les résultats obtenus par la méthode
classique et présentés chapitre III. Les valeurs de l’ATME dynamique sont moyennées
pour tous les états de déformation. Les résultats sont présentés figure 124.
164
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
56
ATME linéaire
54 ATME modulé
52
ATME [µ s] 50
48
46
44
42
0 1 2 3 4 5 6 7
hauteur totale : entaille +fissure
Figure 124 : Évolution de l'ATME. Les résultats expérimentaux obtenus par méthode linéaire (Ch. III)
sont rappelés. Les valeurs de l’ATME obtenus sous sollicitation dynamique sont moyennées pour
l’ensemble des déformations
Nous constatons que ces valeurs sont très proches : l’ATME modulé s’inscrivant dans le
domaine d’incertitude de l’ATME statique.
Nous confirmons ainsi le fait qu’un sondage pour plusieurs niveaux de sollicitation
moyennés de l’éprouvette est du même ordre de grandeur que la mesure statique. Les
valeurs d’ATME obtenues sous sollicitations dynamiques sont supérieures aux valeurs
d’ATME statiques d’un temps allant de 0.2µs à 2µs. Nous supposons que les valeurs
supérieures de l’ATME dynamique par rapport à celles de l’ATME statique sont
principalement dues à une évolution des éprouvettes au cours du temps.
165
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
51
fissure 0 cm
50
49
48
ATME [µs]
47
46
45
44
43 pente = -2,8
42
41
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
déplacement [µm]
57
fissure 1 cm
56
55
54
ATME [µs]
53
52
51
50
49
48 pente = -5
47
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
déplacement [µm]
166
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
58
fissure 3 cm
57
56
55
ATME [µs]
54
53
52
51
50
49 pente = -11,1
48
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
déplacement [µm]
58
fissure 5,5 cm
57
56
54
53
52 pente = -3,3
51
50
49
48
-0.25 -0.2 -0.15 -0.1 -0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
déplacement [µm]
Figure 125 : Évolution de l'ATME dynamique pour différentes hauteurs de fissure réelle. La pente ainsi
que le sens de rotation sont indiqués
167
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Pour une fissure de 3cm, l’hystérésis disparaît, et la pente, de -11.1µs/µm, est multipliée
par 4 par rapport à une éprouvette ne comportant pas de fissure.
Enfin, pour une fissure réelle de 5.5cm, la pente diminue jusqu’à presque revenir à son
niveau initial sans fissure, avec une pente de -3.3 µs/µm. L’hystérésis est de nouveau
présent. Cette hystérésis est important par rapport aux autres éprouvettes. Nous notons
également que les valeurs maximales de l’ATME ne coïncident pas avec le maximum
de déplacement en traction. La signature acoustique, complètement différente pour cette
hauteur de fissure nous laisse penser qu’un changement particulier s’est produit au
niveau de la fissure, comparativement aux hauteurs moins importantes. Pour une telle
hauteur, le ligament du béton est moins important, ce qui diminue les contraintes en
compression de la fissure, et facilite donc son ouverture sous sollicitation. Une telle
signature peut également être caractéristique de l’ouverture partielle du haut de la
fissure.
Analyse
Pour chacun des résultats présentés figure 125, nous constatons que l’ATME diminue
dans les phases de compression de la fissure, et augmente dans les phases de traction.
168
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
A ce jour, nous pouvons faire des hypothèses sur les phénomènes à l’origine de ces
différents comportements.
La pente moyenne est dans un premier temps déterminée entre les extrema de
déplacement. Ce procédé nous permet d’étudier la dynamique générale de variation du
temps maximum de l’arrivée d’énergie.
Plus la hauteur de la fissure est importante, plus la longueur de fissure est grande. Le
nombre de contacts susceptibles d’être modifié par la sollicitation augmente donc
également : Ainsi, la variation de l’ATME entre les deux états de traction et de
compression de la fissure sera d’autant plus importante que la hauteur de fissure est
élevée.
L’hystérésis est plus complexe à analyser. Elle constitue une partie de la signature de
chaque hauteur de fissure. Un hystérésis est observé pour le béton sans fissure, ainsi que
pour une hauteur de 1cm. mais disparaît pour une hauteur de 3cm. Enfin, nous
constatons une signature particulière pour une hauteur de 5.5cm.
169
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
Dans ce cadre, le contact n’est alors plus soumis à aucune contrainte en compression, et
peut donc être modifié par la vibration. La signature particulière présente pour la fissure
de 5.5cm pourrait donc être liée à une redistribution des contacts entre les lèvres induite
par la rupture totale en phase de traction. Lorsque la fissure est ensuite soumise à la
compression, les contraintes différentes mises en jeux peuvent ensuite s’avérer
suffisante pour recréer des contacts.
4.4.4. Synthèse
La modulation de la diffusion nous permet d’obtenir des signatures acoustiques
particulières (moyenne de l’ATME, hystérésis, pente de l’ATME), propres à chaque
fissure, sous condition de chargement dynamique en lien avec l’évolution des contacts
le long de la fissure.
Les variations de l’ATME suggèrent que la surface des contacts entre les lèvres de
fissure évolue sous sollicitation dynamique. En effet, l’évolution de ce paramètre en
fonction de la contrainte appliquée sur la fissure concorde avec les simulations
numériques effectuées au chapitre III.
Une étude similaire, réalisée dans des conditions de chargement quasi-statique peut
nous permettre de relier la pente de l’ATME au déplacement, à un état d’ouverture, à un
170
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
état de contact entre les lèvres de la fissure, ainsi qu’à la hauteur de celle-ci. Elle peut
nous permettre également de déterminer l’effort nécessaire à l’ouverture complète de la
fissure.
4.5. Conclusion
L’acoustique non linéaire présente un fort potentiel pour la caractérisation de fissure
fermée dans du béton, lorsque les lèvres sont en contact, et ce à plusieurs échelles
d’auscultation.
De plus, nous avons pu constater une corrélation entre la hauteur de fissure fermée et le
paramètre non linéaire déterminé par cette méthode. Cependant, le NRUS est également
sensible à toutes les sources de non linéarités existantes dans le béton. Ceci rend plus
complexe une discrimination entre la présence d’un endommagement diffus, tel que
l’endommagement chimique ou thermique, et celle d’une fissure locale. Afin
d’améliorer la caractérisation de la fissure fermée, nous proposons et mettons en œuvre
une méthode locale.
Une seconde méthode originale est donc mise en œuvre afin de caractériser la fissure :
la modulation de la diffusion.
171
Chapitre 4. Acoustique non linéaire et diffusion sous sollicitation dynamique
172
Conclusion générale
Conclusion générale
Afin de pouvoir assurer le suivi des ouvrages et prévenir toute perte d’étanchéité, il est
donc nécessaire de parvenir à une caractérisation des fissures pour procéder au plus tôt
aux réparations nécessaires et conserver l’intégrité de l’ouvrage.
Afin de caractériser une fissure réelle dans du béton, une première étape fut d’étudier le
matériau ausculté, le béton, ainsi que la macrofissuration que l’on souhaite caractériser.
Ainsi, les fissures réelles sont décrites par la présence d’une partie ouverte, ainsi que
d’une partie fermée constituée de deux lèvres possédant de nombreux points de contact.
La caractérisation de la fissure nécessite la détermination de plusieurs paramètres : son
ouverture, sa hauteur, ainsi que sa longueur.
Une étude bibliographique réalisée dans le chapitre I présente les différentes techniques
de contrôle non destructif actuellement mis en œuvre sur site, ou encore à l’étude en
laboratoire. Cette étude montre que la caractérisation exacte de fissure réelle et fermée
n’est à ce jour pas réalisée. Parmi les moyens mis en œuvre, les méthodes ultrasonores
semblent prometteuses : Leurs propriétés de propagation sont directement liées au
matériau dans lequel elles se propagent, et permettent d’obtenir des informations à
différentes échelles, suivant la longueur d’onde utilisée.
Nous avons donc choisi d’utiliser les méthodes ultrasonores pour parvenir à la
caractérisation d’une fissure réelle dans le béton. Deux voies différentes de l’acoustique
sont utilisées : l’acoustique linéaire et non linéaire. Notre choix s’est également porté
sur l’utilisation conjointe de deux approches de caractérisation : une approche globale
ainsi qu’une approche locale.
175
Conclusion générale
Dans le second chapitre, l’accent est mis sur la difficulté induite par le matériau sur la
propagation des ondes ultrasonores. Les équations générales de propagation sont
présentées dans le cas de matériaux idéaux. Pour le milieu réel, la présence de
viscoélasticité, de porosité et de granulats génèrent de l’atténuation, de la dispersion
ainsi que de la multidiffusion qui complexifient le signal ultrasonore et son analyse.
L’étude bibliographique montre également qu’à ce jour, seules des fissures ouvertes
sont caractérisées par les méthodes ultrasonores basées sur l’analyse du champ cohérent
de l’onde. Pour aboutir à une caractérisation de fissures fermées dans du béton, il est
donc nécessaire d’analyser l’ensemble de la réponse ultrasonore en tirant parti du
champ incohérent. L’analyse est faite en étudiant le transport de l’énergie au sein du
matériau multidiffusant, ainsi que son interaction avec la fissure. L’équation de
diffusion, régissant cette première méthode de caractérisation est donc présentée, ainsi
que les paramètres de diffusivité e et de dissipation qui lui sont associés. Le potentiel
de cette méthode au regard de la fissuration est montré dans le cas de la caractérisation
d’une entaille dans du béton.
L’étude du transport de l’énergie dans le domaine statique est ensuite mise en œuvre de
façon expérimentale sur des éprouvettes de béton fissurées. Les résultats montrent que
l’un des paramètres de diffusion, la dissipation, est sensible au caractère viscoélastique
de la pâte de ciment. Pour la caractérisation d’une macrofissure, un nouveau paramètre
est introduit : l’ATME (le Temps d’Arrivée du Maximum de l’Energie) qui se révèle
sensible à la partie ouverte de la fissure par rapport à la partie fermée.
Nous développons une étude paramétrique sur la base d’une simulation par différences
finies pour faire le lien entre une description numérique simplifiée d’une fissure et le
transport d’énergie.
176
Conclusion générale
La méthode développée présente une simplicité de mise en œuvre sur site, et possède
l’avantage d’être indépendante du couplage utilisé, puisque l’analyse ne porte pas sur un
temps de vol, ni sur une mesure d’amplitude, mais sur une évolution de l’énergie portée
par le signal et induite par le caractère diffusif du matériau et de la fissure.
Dans le quatrième chapitre, l’acoustique non linéaire est présentée et mise en œuvre
pour caractériser une fissure à différentes échelles.
Une première méthode, globale est tout d’abord mise en œuvre pour permettre la
détection de la fissure. La méthode NRUS est sensible à la présence, ainsi qu’à la
hauteur de fissure réelle dans le béton. Cette méthode nécessite de pouvoir faire
travailler la structure inspectée sur un mode propre de résonance, ce qui implique une
étude préalable détaillée du comportement de la structure.
Après la détection, nous proposons la mise en œuvre d’une seconde méthode, locale.
Cette nouvelle approche est fondée sur la modulation de la diffusion de façon
dynamique. Elle permet d’accéder à de nouvelles informations sur la morphologie de la
partie fermée de la fissure agissant sur les contacts présents entre les lèvres, dont la
nature et la densité évoluent avec la sollicitation. De nouvelles observables sont
analysées, comme la pente et l’hystérésis de l’ATME. Cette dernière méthode permet en
particulier de proposer l’étude d’une signature propre à chaque morphologie de fissure.
177
Conclusion générale
Industriellement, notre étude montre une méthodologie pour accéder à des informations
sur une fissure dans du béton par l’utilisation d’une démarche multi-échelle.
Une première étape consiste en une mesure globale de la non linéarité du milieu, afin de
mettre en évidence la présence de l’endommagement par macrofissuration. Cette étape
est réalisée par méthode NRUS en sollicitant la structure sur un mode propre de
résonance. Elle nécessite une maîtrise de l’énergie nécessaire à la génération de la non
linéarité, ainsi que la définition de l’instrumentation, comme l’utilisation d’un balayage
laser en réception.
Différentes méthodes peuvent ensuite être mises en œuvre au niveau local comme la
mesure par diffusion de l’énergie ultrasonore La mesure statique permet alors
d’identifier la partie ouverte de la fissure, puis la mesure sous sollicitation dynamique
conduit à la caractérisation de la partie fermée.
178
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Ultrasons diffus pour la caractérisation d'une fissure dans le béton : Approche linéaire et non linéaire
Les différents processus de dégradation des structures de génie civil induisent une micro, puis macro- fissuration du béton. Celle-ci génère
alors une réduction des propriétés mécaniques de l’ouvrage et, à terme, sa perte d’étanchéité. Il est donc nécessaire de fournir des
informations quant à la présence et à la taille de fissures pour procéder aux réparations nécessaires et conserver l’intégrité de l’ouvrage.
Dans un premier temps, le contrôle du béton ainsi que la morphologie de la fissure réelle sont présentés. La notion de contacts entre ses
lèvres est introduite pour définir la problématique de sa caractérisation. La bibliographie montre que les méthodes acoustiques standards
ne sont pas adaptées à la caractérisation d’une fissure dans le béton. Deux pistes sont alors identifiées : les ultrasons diffus et l’acoustique
non linéaire.
Nous présentons dans un second temps la caractérisation de la fissure par analyse du transport de l’énergie suivant une équation de
diffusion. Les paramètres associés (diffusivité et dissipation) sont déterminés expérimentalement sur des éprouvettes fissurées sur
différentes profondeurs. Nous introduisons et définissons le temps d’arrivée du maximum de l’énergie (ATME) qui s’avère être le
paramètre le plus sensible à la partie ouverte d’une fissure. Son évolution au regard des incertitudes de mesure ne permet toutefois pas de
caractériser totalement la partie fermée. Une simulation numérique en différences finies est réalisée. Elle met en évidence le rôle des
contacts au sein de la partie fermée de la fissure et confirme les observations expérimentales.
Nous présentons ensuite l’acoustique non linéaire et les méthodes associées appliquées au béton. Nous montrons expérimentalement que
le décalage fréquentiel de la fréquence de résonance en fonction de l’amplitude de sollicitation (NRUS) est lié à la hauteur de la fissure
fermée dans le béton. Cette méthode globale d’auscultation met en évidence que la non linéarité induite par la fissure est séparable de la
non linéarité « intrinsèque » du matériau.
Nous avons ensuite développé une méthode de diffusion sous sollicitation dynamique portant sur la modification du transport de l’énergie
associée à la modification dynamique de la morphologie de la fissure. L’analyse montre alors que l’évolution de l’ATME en fonction de
chaque fissure génère une signature qui lui est propre.
Nous concluons sur le potentiel de l’analyse de la diffusion ultrasonore pour la caractérisation de fissures dans du béton. Nous dégageons
les perspectives, tant du point de vue du comportement acoustique lié à la connaissance fine de la morphologie des contacts de la fissure
que du point de vue des applications industrielles potentielles.
Mots-clés : Caractérisation non destructive, Fissure, Béton, Ultrasons diffus, Acoustique non linéaire
Diffuse ultrasound for the characterization of a crack in concrete: Linear and nonlinear approach
The various processes of deterioration of the building structures lead to a micro and macro-cracking of the concrete. Consequently, the
mechanical properties of the structure are reduced and, eventually, the building is no longer airtight. It is therefore necessary to supply
information regarding the presence and size of cracks to carry out the necessary repairs and keep the integrity of the structure.
First, the control of concrete as well as the morphology of the actual crack are presented. The notion of contacts between its lips is
introduced to define the problem of its characterization. The bibliography shows that the standard acoustic methods are not adapted for
characterizing of a crack in concrete. Two tracks are then identified: the diffuse ultrasound and the nonlinear acoustics.
Subsequently, we present the characterization of the crack by analyzing the transport of the energy with a diffusion equation. The
associated parameters (diffusivity and dissipation) are experimentally determined on test tubes cracked at different depths. We introduce
and define the arrival time of the maximum energy (ATME), which turns out to be the most sensitive parameter to the open part of a crack.
Its evolution with regard to the measurement uncertainties does not allow a full characterization of the closed part. A digital modeling in
finite differences is performed. It highlights the role of the contacts within the closed part of the crack and confirms the experimental
observations.
Then, we present the nonlinear acoustics and the associated methods applied to concrete. We show experimentally that the frequency
shift of the resonance frequency depending on the amplitude of stress (NRUS) is tied to the height of the closed crack in the concrete. This
method of auscultation highlights the fact that the nonlinearity resulting from the crack is separable from the” intrinsic” non-linearity of
the material.
Finally, we developed a diffusion process under dynamic pressure concerning the modification of the transport of the energy led by the
dynamic change of the morphology of the crack. The analysis then shows that the evolution of ATME depending on each crack generates its
own signature.
We conclude with the potential of the analysis of the ultrasonic diffusion for the characterization of cracks in concrete. We draw out
perspectives, concerning both the acoustic behavior related to the detailed knowledge of the morphology of the crack and the possible
industrial applications.
Keywords : Non destructive characterization, Crack, Concrete, diffuse ultrasound, Nonlinear acoustics
LMA
Laboratoire de Caractérisation Non Destructive EDF R&D
IUT Aix en Provence STEP – Groupe P1E
413 avenue Gaston Berger 6 quai Watier
13625 Aix en Provence Cedex 78401 CHATOU Cedex