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L’ANALYSE SOCIOLOGIQUE

Les différentes méthodes d’analyse en sociologie peuvent être résumées en trois grands
blocs à savoir :

 L’analyse causale : elle se base, pour l’explication d’un objet ou phénomène sur la
relation de cause à effet ;
 L’individualisme méthodologique : les phénomènes sont décrits et expliqués à partir
des actions et comportements des individus et groupes d’individus et leurs
interactions réciproques.
 La rationalité cognitive : l’explication d’un phénomène part de point de vue des
individus, ces points de vue et opinions sont alors considérés par leurs auteurs
comme bons et rationnels.

Toutefois, l’analyse sociologique ne peut pas se faire à partir de points de vue personnels,
car il ne s’agit pas de traiter un sujet et de donner son opinion et où cette dernière n’a
qu’une valeur très relative restreinte au contexte de la discussion, mais plutôt de faire une
analyse dans le cadre d’une science sociale ayant ses propres fondements, ses propres
théories et ses outils d’analyse.

Cet état de fait nous pousse alors à chercher les principaux fondements de cette science afin
de se faire une idée aussi claire que possible sur les différentes approches théoriques en vue
de placer l’étude d’un tel ou tel phénomène dans son contexte scientifique.

Pour ce faire, nous allons, dans un premier temps, nous intéresser à deux grandes théories
de la sociologie en l’occurrence celle d’Emile DURKHEIM et Max WEBER qui sont considérés
comme les grands fondateurs de la sociologie.

→ Emile DURKHEIM 1858-1917 : Ce sociologue français considère que les éléments de la


compréhension des faits sociaux sont à chercher dans la société elle-même et non pas dans
les comportements individuels de chaque individu, et de ce fait l’individu subit l’influence de
la société et il est déterminé par elle d’où la notion de « déterminisme ». « Les causes
déterminantes d’un fait social doivent être cherchées parmi les faits sociaux et non pas être
comprises dans la conscience individuelle » E. Durkheim.

Les faits sociaux peuvent être définis comme l’ensemble de manières : de faire, de penser,
de se comporter et de voir les choses qui sont imposées, en quelques sortes, à l’individu.

Toutefois les déterminants des faits sociaux sont eux même multiples dont les plus
importants sont : les groupes sociaux, les pratiques sociales et les représentations
collectives.

INTRODUCTION A LA SOCIOLOGIE 1 Elaboré par N. ABDELJALIL/ ENAO


▪ Les groupes sociaux :

Un groupe social peut se définir comme un ensemble d’individus ayant des caractéristiques
communes ou/et des objectifs communs tout en développant une certaine conscience de
faire partie de ce groupe ; L’effet de cette appartenance se manifeste par les rencontres, les
rassemblements qui peuvent être réels ou virtuels. Ex : milieu social, âge, sexe…

Cependant il faut toujours distinguer les groupes sociaux des autres groupes ou
groupements (agrégat) qui se trouvent groupés par une circonstance passagère telle qu’une
file d’attente pour payer une facture ou prendre un ticket du cinéma…

On peut distinguer dans les différents groupes sociaux selon la nature des relations et le
type de lien au moins deux à savoir les groupes primaires, et les groupes secondaires.

- Les groupes primaires : ils sont généralement de petite taille et sont caractérisés par
une relation étroite et directe c’est le cas notamment de la famille, de l’amitié ou
encore du voisinage.
- Les groupes secondaires : ils sont caractérisés par des relations sociales qui ne sont
pas aussi étroites, telles que les relations qui peuvent exister au sein du travail dont
l’objectif est l’échange vertical ou horizontal ou alors dans une corporation de
métiers traitant de problèmes ou d’objets commun etc.

Les groupes sociaux présentent plusieurs caractéristiques que l’on peut résumer dans le
cadre du tableau ci-après :

Groupes Rôle Hiérarchie Cohésion


La famille Socialisation par l’éducation et Très faible Très forte
l’affection
L’école Socialisation par l’instruction et Assez forte Moyenne
l’éducation
L’entreprise Socialisation par le travail et le salaire Très forte Faible
Le syndicat Socialisation par la défense des droits Faible Forte
communs des travailleurs.

Par ailleurs, il y a lieu de bien faire la distinction entre « catégorie sociale » et « groupe
social », en effet et comme il a été précisé précédemment, le groupe social est un
ensemble d’individus ayant des caractéristiques communes, une conscience d’appartenir
au groupe et des interactions plus ou moins étroites entre les individus du groupe, alors
qu’une catégorie sociale est une sorte de groupement qui peut avoir plusieurs
caractéristiques en commun tel que l’âge par exemple, sans pour autant, qu’il y ait de
conscience d’identification entre les éléments de ce groupement ni d’interactions
directes pour défendre un quelconque intérêt commun.

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▪ Les pratiques sociales :

En sociologie, on désigne par pratique sociale la manière de faire ou de pratiquer une


action tel que le travail, l’acquisition du savoir, le développement personnel, l’exercice
du sport, l’engagement pour la défense d’une cause, l’exécution d’un contrat etc.
Toutefois la sociologie ne se contente pas de faire une description des différentes
pratiques sociales mais va bien au-delà en conceptualisant le terme « pratiques
sociales » selon les différentes approches théoriques afin de lui donner une connotation
sociologique.

Ainsi, les pratiques sociales représentent le quotidien de la vie en société : la


consommation, le commerce, la pratique de la politique, la pratique de la religion, la
pratique de l’éducation, la pratique de l’apprentissage …

Cependant, l’analyse sociologique des pratiques sociales dépasse le stade de la


description superficielle pour s’intéresser au concept de la pratique en question, et à
titre d’exemples :

- La consommation : c’est un acte quotidien pratiqué par toutes les sociétés mais la
manière de consommer suscite une multitude de questions : les catégories de
produits de consommation ? (Alimentaire, électroménager, culturel, cosmétique
et esthétique, sport…), or à l’intérieur de chaque catégorie d’autres questions
surgissent : est-ce qu’on consomme pour satisfaire un besoin vital et dans quelles
proportion ? consommer pour consommer ? le concept de la société de
consommation ? le gaspillage ? le développement durable ? le recyclage ? le
comportement d’un groupe social ou catégorie sociale par rapport à ces
questions ?...
- La religion : elle ne se résume pas uniquement à la pratique des rituels religieux,
mais révèle une certaine identité au sein de la société qui peut apparaitre aussi
bien niveau vestimentaire qu’au niveau des relations socio-économiques par
exemple.

▪ Les représentations collectives :

Les représentations collectives s’inscrivent dans la même ligne de pensée du sociologue


Emile DURKHEIM qui qualifie ces représentations comme étant des perceptions
collectives bien distinctes des perceptions individuelles voire supérieures à ces dernières.
C’est donc une sorte de cadrage général de tous les sujets et phénomènes au sein d’une
société de telle sorte à ce que toutes les opinions individuelles s’inscrivent
nécessairement à l’intérieur de ce cadrage ex : les religions, les mythes, l’éthique ….
D’où les représentations collectives apparaissent comme l’œuvre de la société et non
pas celles des individus.

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Cependant ce fondement de la pensée en sociologie a été repris par un spécialiste
contemporain de la psychologie sociale Serge MOSCOVICI (1925-2014) et en a élaboré
toute une théorie à savoir la représentation sociale : « L’individu subit la contrainte des
représentations dominantes dans la société, et c’est dans leur cadre qu’il pense ou
exprime ses sentiments. »

Ainsi, la représentation sociale en tant que concept est définie par le : « Les
représentations sociales s'avèrent être des phénomènes complexes très présents dans la
vie sociale. Elles sont constituées de différents éléments qui ont longtemps été
appréhendés séparément : attitudes, opinions, croyances, valeurs, idéologies, etc. La
représentation qu'a un groupe social d'un objet s'appuie sur un ensemble d'informations,
d'opinions, de croyances, d'interprétations idéologiques, etc. relatives à cet objet. Elle
permet notamment au groupe social de comprendre et d'expliquer la réalité, de définir
son identité sociale, d'orienter son action en fonction du contexte et de justifier à
posteriori ses choix ou attitudes. » Définition du toupictionnaire.

Pour mettre plus de lumière sur ce premier volet de l’analyse sociologique, il est
proposé aux étudiants de faire une lecture de l’article paru dans la revue santé publique
et d’en déduire les principales représentations sociales au sujet de la drogue d’une
manière globale et au sujet du cannabis en particulier : L'étude des représentations
sociales de la drogue et du cannabis : un enjeu pour la prévention. Suivez le lien :
https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2002-4-page-335.htm

Jusqu’ici, nous avons développé l’approche analytique de Durkheim considérant


l’explication des phénomènes sociaux à partir des causes déterminantes au sein des faits
sociaux eux-mêmes et non pas chez les individus qui subissent ces déterminants.
Cependant, un autre courant qui se trouve presque à l’opposé de cette approche
prônant une démarche explicative des phénomènes sociaux basée sur l’individu a été
développée chronologiquement par plusieurs sociologues.

Toutefois, et afin d’éviter toute controverse des différentes approches d’analyse, nous
considèrerons les approches compréhensive et individualiste développées par Max
weber d’abord (sociologie compréhensive) et Raymond Boudon ensuite (individualisme
méthodologique) comme étant parallèles et complémentaires à celles présentées
précédemment.

→ Max WEBER : 1864-1920 : pour ce sociologue et économiste allemand, la sociologie est


basée sur l’action sociale et que cette dernière n’est autre que l’ensemble des
comportements individuels ayant des sens respectifs pour les autres membres de la société
(autrui).

Ainsi, la sociologie compréhensive développée par Weber part du principe que la


compréhension d’un phénomène en sociologie passe nécessairement par l’analyse des

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actions individuelles qui le composent, autrement dit, cette approche met le sociologue à la
place des acteurs qui l’intéressent, afin de comprendre le sens des différentes actions
individuelles

L’action sociale peut alors avoir plusieurs origines ou déterminants, ils sont classés par
Weber en quatre catégories de la manière suivante :

▪ L’action traditionnelle : c’est une action rattachée généralement aux habitudes, aux us,
aux rituels, au culte…

▪ L’action affective : c’est à dire tout ce qui se rapporte à l’affect, à l’émotion, aux
sentiments…

▪ L’action relative aux valeurs : tout ce qui se rapporte à la vertu, à l’honnêteté à


l’appréciation, au rehaussement des qualités humaines, au mérite, au courage…

▪ L’action rationnelle : elle part du principe que tout individu est rationnel c’est-à-dire il
sait mesurer le pour et le contre dans une situation donnée et en déduire la meilleure
action cette dernière repose alors sur un calcul logique qui se manifeste notamment
dans le calcul économique.

Par ailleurs, et dans le même ordre d’idée, Raymond Boudon qui est un sociologue
français contemporain (né en 1934) voit que pour parvenir à l’explication d’un
phénomène social il est nécessaire de reconstruire toutes les motivations des individus
et en faire des agrégats ou des sommes ce qui débouche dans cette théorie à«
l’individualisme méthodologique ».

Cette théorie a pour objet de mettre en relief les causes individuelles qui expliquent les
phénomènes sociaux. C’est une sorte d’interactions entre les différentes actions des
individus

Ces deux approches sont donc plutôt complémentaires que contradictoires comme le
souligne d’ailleurs Jean Louis Loubet Del Bayle dans son ouvrage : Initiations aux
méthodes des sciences sociales « En fait, ces deux positions sont plus complémentaires
que contradictoires et Georges Gurvitch (1894-1965) n’avait peut-être pas tort de ranger
ce débat parmi "les faux problèmes de la sociologie du XIXe siècle". Il s’agit plutôt en
effet de deux approches différentes d’une même réalité, qui est à la fois faite de
collectivités structurées et organisées et de relations interindividuelles, l’importance
relative de ces deux aspects variant suivant les phénomènes étudiés.

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