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~ La folie n’est pas un fait objectif. En témoigne l'évolution de la place du fou dans la société, mais aussi la difficulté a définr la folie, * De 'Antiquité au Moyen Age, le fou est considéré comme un possédé. Il inspire tantot crainte et répulsion, tantdt res- pect et fascination selon quil est considéré comme la proie du démon ou le messager des dieux. Lage classique opére lun renversement : la folie est définie comme privation de la raison, Elle est appréhen trouble intérieur du corps. Au xa siécle, la psychiatrie et la ‘neurologie tentent de fonder une remédiation & partir d'une connaissance objective et scientifique de la folie, Aucune attention n'est portée a la subjectivité sens que la maladie prend pour elles. Les romanciers réa- rationnellement comme un Personnes, au ites comme Zola et Galzac s'appuient sur a lecture des Adsphe Willan Boveurtaa, Oe rnp Istes comme Zola et Balzac s‘appuient sur le lecture d ‘es Pures, 1862 hue sur tole 231.1 x 278. Psychiatres pour créer des personages atteints de folie, en ‘use Chyler Norfolk ‘adéquation avec les progrés de la science, 2. La difficile compréhension du fou * Toutefois, certains médecins comme Antoine Emile Blanche commencent & pe voir la folie différemment; en ascent an une mason de santé un ast gui fonconne comme une pansion de fone here ee halen Ont sloures dont Maupassant van Gogh ou Nerval queledocter anche ince beer ok hollucnations, Ces auteur font ect leurs troubles dans des rit comme Le Hera ou roan + Ala meme époque, Freud fonde la psychanalyse, Pourtant, sa cure ne Concere que les névross,conscients de leurs troubles psychiques, Son effort pour comprendre la psychopathologiesarréte aux fronvitres da Ce aul nomme la ¢psychose», Le fou est din comme un mol pour lequel la réaité a perdu son sens et son évidence. Isolé de ul me souffrant de son étrangeté, il est incapable de communiquer, produisant Uunlscousdérant et coupé duréel. C'est pour cette rason qu'un yeux de Freud le traitement psychanalytique ne peut pas sadresser 8 la * Au début du oe sitcte,des approchesscentfiques mals ausi exp mentalesradcalerent opposées se développent.D'un cot, es meledes Imentaux sublsent des therapies vilents (bains slacks, électrochocs, \obotomie, etc), sans précautions médicales. Le cinéma et la littérature Interogent ces pratiques brutales, par exemple Stanley Kubrick dane Orange mécanique, adapté du roman d’Anthony Burgess. De l'autre, cer- tains psychiatestentent de comprende le processus ¢'élaboraton des actions des malades. Avec eux ils cherchent&reconsturesens que Johann Heinrich Possts. La Folie ‘ecouvrent les délies hallucinations et autres manifestations de la folie, Kate, 1806-1807, hulle sur tae (918x715 Définir la frontiére entre le normal et le pathologique, Ancet Comment apprécier, sinon du dedans, ce que peuvent étre une vie normale et une vie Pa thologique ? Lorsque Temple Grandin déerit son antisme dans un livre autobiographique [Grandin 1986}, il apparait comme autre forme d’existence, ‘non comme une pathologie. Inversement, dans les comporte- ‘ments courant, la limite entre normalité et pathologie reste ‘énue : quelle est par exemple la différence entre une intuition géniale et une idée délirante; entre un travail absorbant et une tendance obsessionnelle au travail? Il faudrait pouvoir recon- naitre comme pathologique ce qui est source de souffrance pour un individu ou pour son entourage, et non ce qui est considéré comme déviant par les codes sociaux. Mais on agit ‘trop souvent ce faisant comme si ’entourage et l'individu lui- ‘méme n’avaient pas intégré au plus profond d’eux-mémes les échelles de valeur sociales, les interdits et les devoirs. D’od la difficulté d’une évaluation subjective de la santé, notamment dans une démarche d’innovation et de création. Empruntons pour le montrer un exemple & l'art contemporain : depuis 1965, Roman Opalka a entrepris de peindre la suite des nombres entiers & partir de 1 jusqu’a Vinf- ni, poursuivant cette série de toile en toile (il dot s'approcher actuellement du nombre eS 6000000). Peignant d’abord en blanc sur fond nofr, il a depuis 1972 progressivement Gelairci ses fonds pour ne plus peindre que blanc sur blanc. Quelle différence entre une tele entreprise et une activité obsessionnelle? La différence ne tient pas & la nature de cette activité, mais au sens qu’Opalka donne & sa démarche peindre les nombres signe pour Iui peindre le temps [...]. Le peintre ajoute que Pune des difficultés principales rencontrée fut ’incompréhension de l'entourage : «[...] C'est temible de résister moralement quand tout le monde vous prend pour tn idiot ou pour un fou!» [Opalka 1998, 95-98] De la tendance obsessionnelle pouvant conduire & la pathologie, on peut faire quelque chose, ce qui ne signifie pas que disparaisse I'obsession, mais la souffrance qui I'accom- ogrphie, p10 Roman OPALKA, Détail 135327, tempera sur toile, Muzeum Stuld w Lodi. Quelle est votre impres- sion face cette toile? En quoi cette oeuvre se distingue-t-elle d'une ceuvre dart dassique figurative ou abstrite? 3, Peindre des chiffres & Vinfini de toile en toile peut-il@tre un projet atis- tique? pagne. Pierre ANCET, «La santé dans la différence», Philosophia Scientize, février 2008. Er 1. La pathologie peut-elle se défini, selon Ancet, en fonc- tion d'un critere objectif et universel? Ans Relever les antithéses par lesquelles auteur oppose la vie normale et la vie pathologique. 2. Pourquoi le critere proposé par Ancet pour distinguer exemple du peintre Opalka peut-i éte associé ala vie normale ou &la vie pathologique? peut-on considérer le peintre Opalka comme un mono- ane (voir question 3 : Texte Balzac p. 160)? Quels intéréts un écrivain peut-il ter des personages obsessionnels? lenormal et le pathologique esti difficile & adopter ? 3.En quoi ceuvre du peintre Opalka est-elle déroutante pour son entourage comme pour le public? Viens us Bac interprétation. Comment lauteur renouvelle- il tout au long de son argumentation la conception ordi- naire de lexpérience de la folie? Lexpérience de la folie| 161 . 5 Interroger l’idéal de la santé, Nietzs Nero : ah santé de Ime, ~ La populaire formule médicale de morale (auteur en est Ariston de Phiosophestocen ec Chios’) «la vertu esta santé de ame » ~ devrait au moins, pour re utlisable, re mo oe Gifée de la maniére suivante: «ta vertu esta santé de ton me ». Cariln'y pas de santé en soi, et tous les essais pour définir ce type de choses ont échoué tisérablement. C’est de ton but, de ton horizon, de tes pulsions, de tes erreurs et en particulier des idéaux et fantasmes de ton &me que <épend la détermination de ce que doit signifier Ia santé méme pour ton corps. Il existe done d’innombrables santés du corps; et plus on permet & nouveau a Iindividuel et incomparable de lever Ia t8te, plus on se défait du dogme de I'«égalité des hommes», et plus il fant aussi que nos médecins se débarrassent du concept de santé normale, eten outre de régime normal, de cours normal de la maladie. Et alors seulement, le temps sera peut-étre venu de réfléchir & la santé et & la maladie de I’fme et de placer la vertu propre de chacun dans la santé de celle-ci ; laquelle pourrait certes apparaitre chez l'un comme le contraire de la santé pour un autre. Enfin, la grande question demeu- rerait encore ouverte : celle de savoir si nous pourrions nous passer de la maladie, méme pour le développement de notre vertu, et si en particulier notre soif de connaissance et de connaissance de nous- mémes n’aurait pas tout autant besoin de ’ame malade que de I'éme saine : bref, sila volonté exclusive de santé ne serait pas un préjugé, ‘une licheté et peut-étre un reste de barbarie et de mentalité arriérée des plus raffinées. Friedrich NieTascHe, Le Gai Savoir (1882), Jéréme Bosch, Extraction trad. P, Wotling, Flammarion, 2007. Ge la pierre de folie, hulle Sur panneat (48x35 cn) Orerew vers 1494, musée du Prado, faa fads nnmen pans ver8

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