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Gestion active des eaux Paris, 12-13 juin 2007 “ssi 2008031 Face a la sécheresse et 4 la pénurie d’eau, quelles mesures pour ajuster la demande agricole a l’offre de ressource en eau ? How to fit agricultural demand to resource availability facing drought and irrigation water shortage ? PHILIPPE DEBAEKE INRA, UMR AGIR BP $2627, F - 31326 Castanet-Tolosan Tél, : +33 (0)5 61 28 50 16, e-mail : debacke@toulouse inra.f JEAN-PIERRE AMIGUES INRA, UMR LERNA Manufacture des Tabacs, 21 allée de Brienne, F - 31000 Toulouse TAL, : $33 (0)S 61 12 85 19, exmail : amigues@toulouse.inra.ft or hydrologic) with dramatic consequences on yield, irrigation water use and farmer's net income.To cope S ince 2003, Center-West and South-West of France are regularly affected by drought events (either edaphic with drought and irrigation water shortage, different strategies are available : (i) fiting water offer to agri- cultural demand through the mobilisation of new resources ; (ii) fitting water demand to resource offer by genetic, agronomic, regulatory, and socio-economic measures ; (ii) developing local and participative water management programs : (iv) compensating production o income losses through public subsidies or private insurance systems..n this communication, we present some conclusions drawn from the recent scientific joint expertise conducted by INRA on “Drought and Agriculture” in 2006. Case studies from Poitou-Charentes and Midi-Pyrénées regions were selected. I @ INTRODUCTION Les enjeux de la gestion quantitative de l'eau en agricul- ‘ure mobilisent les efforts de I'administration, des gestionnai- res de la ressource, des collectifs d’usagers et des chercheurs en agronomic, en hydraulique et en hydrologic (1, 2} Deux raisons & cela — La fréquence des épisodes de sécheresse s'est intensfiée Depuis 2003, les régions Sud-Ouest et Centre-Ouest de la France connaissent des épisodes récurrents de sécheresse Eduphique et bydrologique avee des impacts dramatiques sur la production quantitative (-10 a -25 % pour les cultures, -50 % pour les fourrages) et la mobilisation des ressources pour T'trigaton [3]. Les conséquences sont plus variables sur le revent net d’exploitation (maintien en 2003, baisse en 2005) selon les prix de vente. Au cours des 20 derniéres années, une baisse de 10 % de Ia pluviométrie estivale est signalée par Météo-France dans le Sud de la France, Parallélement a l'augmentation des températures, Tes seénarios de changement climatique a plus long terme indiqueraient une intensification de la sécheresse printaniére ct estivale, mais une pluviométrie hivernale plus abondaate, cn particulier dans les régions du Sud, — La tension sur les usages s'est renforeée au cours des vingt demiéres années. Aprés les sécheresses de 1976, puis de 1989-90 dans le Sud-Ouest, les surfaces irriguées ont augmenté réguliérement. En 2005, 1.7 millions dha ont &é irrigués, localisés principalement dans le grand Sué-Ouest, la Beauce, la Provence et Alsace. Le mais-grain est la principale culture iriguée (51 % de Ia sole irriguée en 2000) et son taux d'irrigation est de 45 % [4]. En Mi les volumes irrigation moyens pour le mais peuvent fluctuer dde maniére importante (100 mm a plus de 200 mm sur ta période 2001-2005) [5]. Ainsi en période estivale, besoins en eau potable, respect des débits d’étiage (salubrité) et irrigation du mais entrent en concurrence et les prélévements peuvent excéder les ressources renouvelables (80 % des consommations estivales sont dues & lirigation) [6] Crest pourquoi malgré une situation nationale relativersent favorable (seules 19 % des ressources en eau douce sont exploitées), des risques importants de pénurie d'eau existent de manitre locale et saisonniére, conduisant chaque année les préfets & prendre des arrétés de restriction d'usages dans ‘un département sur deux en moyenne, Face & a sécheresse et a la pénurie d'eau pour Mirrigation, plusieurs stratégies sont envisageables [2] (@ ajuster Voffre a Ia demande, par Ia exéation de ressour- ces supplémentaires ; Gi) ajuster Ia demande a loffre de ressources par des solutions génétiques, agronomiques, réglementaires, socio- économiques ; Gi) développer une gestion concertée locale entre acteurs autour du partage de la ressource en eau ; (iv) indemniser les pertes de production ou de revenu par le fonds de calamité agricole ou I’assurance-récolte, lors- aque les mesures préeédentes n'ont pas permis d'ajustement acceptable. ‘Nous présenterons ici quelques analyses développées dans le cadre de la récente expertise scientifique collective «Sécheresse et Agriculture » conduite par l'TNRA en 2006 Face ala sécheresse eta la pénurie eau, quelles mesures pour ajuster la demande agricole Foire de ressource en eau ? [2]. Nous développerons plus spécialement les possiblités ‘ajustement de la demande en eau agricole & Vofire actuelle ct prévisible de ressources. IM MESURES AGRONOMIQUES La recherche 4’économies d'eau en agriculture en vue 4’ajuster la demande en irigation a des ressources limites, qu'il sagisse de sécheresse hydrologique aig ou de concur rence structurlle en période estvale, peut s'envisager de rmaniére graduelle. Sufitl de mieux utiliser V'eau disponible sans changer Vassolement irrigué (en conservant done une part importante de mais) ? Pet-on envisager des sysimes & hase de mais dont le besoin en eau serait réduit ? Comment s adapter parla stratégie d’irigation ow la conduite du mais 4 des restrietions prévisibles ? Comment esquiver Ia pénurie, séduie le besoin en eau etrépatir les risques par une diver sification de assolement et des caendtiersd'rigation ? @ 11 OPTIMISER LAPPORT D’EAU (A ASSOLEMENT CONSTANT) ILL Une limitation des pertes par evaporation ? En France, le mode d’itrigaton le plus répand reste I'as- persion (91 % des superficies irriguées). Bien adaptée aux cearactéristiques du climat, cette méthode apporte une cer- taine souplesse pour I’agriculteur, La recherche de efi cacité maximale des apports d'eau par aspersion améne & sTinteroger sur les pertes par évaporation selon les horaires @'arrosage, En conditions de forte demande climatique, les pertes seraient de Vordre de 15 % de la dose appliquée [7] ans ces conditions et dans un souci d'économie deau, il est recommandé d’'éviter d'irriguer durant la plage horaire 11-15 h (midi solaire), et de maniére générale lorsque la vitesse du vent atteint et dépasse le seuil admis pout le sys- téme d'itrigation utilisé. En conditions normales, ces pertes seraient largement inférieures 4 5-10 % pour des irrigations de 30-40 mm [8]. C'est pourquoi, une mesure d’interdic~ tion @irriguer invoquant le gaspillage Hié aux pertes par Evaporation ne sera justifiée que pour un nombre limits de situations. Si dans les situations extrémes, on peut conseiller a'éviter les heures chaudes de Ia journée, la généralisa- tion des arrosages de nuit ne permetirait pas de couvrir les boesoins des cultures, tout en ayant une faible efficacité pour la reduction des pertes. H.L2 Un meilleur usage des matériels ? En France, 50 % des surfaces sont arrosées par des canons ‘enrouleurs [9], dont les efficiences maximales d’irrigetion atteignent & peine 75 % en raison d'une forte hétérogenéité ‘application des doses (matériels mal réglés ou usagés, ‘conditions ventées). Un diagnostic réalisé par Dubalen en 1993 [10] pointait de mauvaises utilisations des enrouleurs (espacements inadaptés, vitesse irréguliére) et I'absence de ccontrble des doses réellement délivrées. Aujourd'hui, la plu- part des appareils sont équipés de régulations électroniques, {qui améliorent l'uniformité darrosage ot simplifient 'irri- gation, Les connaissances accumulées sur le fonctionnement des canons en conditions ventées ont permis de mettre au point le modéle Irriparc [11, 12] qui est utilisé aujourd'hui pour proposer des stratégies régionales, D'autres innovations techniques (brises jets, canons secteur programmable...) améliorent encore l'efficience d'irrigation Les autres matériels (pivots et rampes frontales, couver- ture G'asperseurs) permettent un pilotage plus fin de Piriga- tion mais constituent des solutions plus coditeuses et moins souples pour une irrigation de complément. La pratique de irrigation localisée permettrait de réduire les pertes par vaporation et de supprimer Jes pertes par dérive, pour une Economie d'eau de 15 & 20% [13]. Sous nos climats, en raison de son coli d’installation et de maintenance, la miero~ irrigation n'est utlisée qu’en maraichage et en arboriculture avec un objectif de couverture des besoins et non décono- ‘mies d'eau. Ainsi, de nombreux progrés ont été réalisés ces dernigres années sur les matériels irrigation, leurs reglages ct la formation des utilisateurs. Aussi, de nouvelles écono- ‘mies d'eau apparaissentlimitées par cette voie. ILL3 Les avertissements & Virrigation Le conseil de masse (ou avertissement itrigation) existe dans la quasi-totalité des départements oi Pirrigation est significative et il est porté par les Chambres d°Agriculture dans la majorité des cas [14]. Fondé sur le bilan hydrique, il donne a l'agriculteur un cadre général pour le pilotage des inrigations des cultures ‘Ainsi, par exemple, en Haute-Garonne, un bulletin est ‘envoyé chaque semaine & plus de 1000 irsigants [15]. Le conseil global s’appuie sur le suivi de 20 parcelles de réfe- ‘ences (mais et soja) situées chez Ie irigants et sur les rele~ vvés météorologiques de 10 stations Météo-France. Le BHYP (bilan hydrique prévisionnel) se présente sous la forme d'un ‘eraphique que T'rrigant compléte jour aprés jour en notant Tes pluies et les irrigations. Chague message hebdomadaire rappelle la consommation en eau des cultures, indique la marche & suivre pour la semaine en cours, rend compte des événements relatifs & Pétat et & Pévolution de la ressouree en cau et fournit les données pour le positionnement de cha- due irrigant. (Que font les agriculteurs de ces conseils ? Il semble que Pavertissement soit plutét un cadre global pour conforter des décisions qu'une recommandation qui serait appliquée 8 la parcelle. Une enguéte menée en 2001 en Aquitaine [3] mon- trait que 18 % des irrigants utlisient des outils de pilotage individuels et que 15 % « suivaient » les avertssements col- lectifs. Les autres irrigants se réparissaient en 2 catégories ‘ceux qui pratiquent une simple observation de leurs parcelles, (40 %), et ceux qui arrosent de maniére systématique selon tun schéma peu variable d'une année sur autre (27 %), ces derniers étant aussi ceux qui consomment Messentiel de Tea irrigation allouée au mais grain (44 %). En théorie, le suivi des avertissements permet une iriga- tion plus rationnelle, mieux valorisée sur le plan économique, réduisant les risques environnementaux et les gaspillages. En ppermettant un comportement plus rationnel des irrigants, ce type de conseil ne conduit pas pour autant & des économies «eau substantielles car certains irrigants n'apportaient pas on,” HOUNLE BLANCHE 03-2008 assez d'eau, Par ailleurs, Ie parcours irrigation proposé est toujours celui d’une bonne couverture des besoins. HLA Les outils d'aide a la décision Depuis les sécheresses 1989-90, plusieurs types doutils ‘nt 6té développés par ARVALIS et l'INRA afin d’élairer la <écision des irrigants notamment pour des ressources en eau Limitées: () sur le plan stratégique : proposer ex ane avant Ja campagne ¢'irrigation) les meilleurs choix d’assolement et Tes programmes Wirrigation ad hoe ; (ji) sur le plan tacti- aque : meftte en ceuvre et adapter les programmes @itrigation prévisionnels, Alnsi la méthode IRRINOV® [15, 16] qui couple Ie suv des stades phénologiques de Ia culture et le relevé régulier de la tension de [eau du sol (sondes Watermark®) indique 4 Vagricultour le meilleur couple dose-fréquence qitvigation 4 appliquer pour couvrir les besoins en eau de la culture 8 années sur 10 dans Te cas de ressources non restrctves. La ‘méthode est régionalisée et concerne le mals, les céréales & paille, le pois et la pomme de terre. Des méthodes analogues sont disponibles pour le tournesol et le soja (wwrw.cetiom fi) Depuis sa diffusion en 2000, la méthode a été adoptée par cenviron 800 irrigants de grandes cultures. Des logiciels informatiques ont ét@ congus pour aider les techniciens et indirectement les agriculteurs & optimiser leur choix dassolement et leur stratégie irrigation (16). Ainsi LORA est un instrument d'aide & la déeision pour Ie choix de l'assolement sur le périmétre irrigable de l'exploitation agricole [17] qui est actuellement utilisé dans plusieurs régions (Aquitaine, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes...) pour Gtudier avec les irrigants les évolutions possibles des sys- ‘mes irvigués lors de changements importants de contexte (@écouplage BAC en 2006, Loi sur I"Eau 2006, nouvelle tarification EDF...)[18] Une fois Passolement éabli, MODERATO simule les statégies de conduite de V'trigation du mais on contexte deau limitée ou non [19]. Ces outils peuvent alder & éeonomiser T'eau en proposant des ajuste- ‘ments optimaux en conditions de ressource restrctves © 112 DIMINUER LE BESOIN EN EAU D'IRRIGATION DU MAis (A ASSOLEMENT CONSTANT) 112.1 Des conduites plus restrictives en eau Selon lorigine de la restriction en eau, il est possible aujourd'hui de proposer différentes strategies de réduetion des apports eau, en particulier sur le mats [20] — volume limité : c'est le cas (i) dun lac collinaire individuel ou colleetif moins rempli qu’a la normale ou bien associé 4 une surface &irriguer importante sans que le débit soit limitant; (i) de la restriction ’un quota de volume dans le cadre de la gestion collective dun volume limitant ; (il) d'une gestion volumétrique sur une nappe déficitare. Pour optimiser l'utilisation du volume disponible, il est intressant d’établir un calendrier prévisionnel en privilégiant les périodes les plus sensibles de Ia culture et notamment Ja montaison, la période encadrant la floraison et le début du remplissage des grains, Pour réparir les risques, mieux CofE eda thao once heuer el se ULL eAO Oe vvaut préférer les doses unitaires modérées. Ce calendrier prévisionnel doit ensuite Gre adapté en cours de campagne en fonction des stades et de la pluviométrie, Le premier indicateur de pilotage est le volume disponible restant en fonction du stade de la culture. Une estimation satisfuisante des volumes est alors indispensable : contrOle par compteur, vérification des réglages du matériel, réduetion du débit ou du volume d°irrigation une certaine date : cette situation est la conséquence d'une baisse du niveau de la ressource en eau (debit des riviéres ou des nappes), souvent accompagnée de mesures réglementares (réduction d'un volume alloue & la semaine ou la d&cade, interdiction d'isriguer certains jours de Ia semaine ‘ou une parte de Ia journée). Ces mesures réglementaires sont souvent peévues avant la campagne d'itrigation (arrété cadre) rmoyennant des indicateurs mesurés : déhits des rividres ou niveau des nappes, Ces limitations de débit se produisent le plus souvent en fin de période d'irrigation (au mois d'aodt), Ia ressource ayant été fortement mise & contribution les semaines précédentes, C'est dans cette situation hyéraulique ue Ia diversification de la sole de mais avec une stratégie Pesquive peut étte intéressante, Implanter tt des variétes plus précoces que la pratique régionale normale permet de raccoureir Ia période d'irrigation et de mieux échapper aux restrictions de fin de cycle. Les irigations trop précoces et trop élevées qui auraient un effet négatif sur la ressource sont évitées, $'il reste de l'eau pour irriguer, il est important de bien raisonner 'arrét des irigations. Dans ce contexte, le stade repére « humidité du grain 50 % » (21) sera atteint tt et la réserve en cau du sol aura été fortement mise & contribution, — une surface irriguée trop élevée par rapport au débit de Vinstallation d'irrigation : dans cette situation Pobjectif n'est pas dobtenir le rendement potentiel du mais tous les ans. On accepte un rendement réduit en année séche & tes séche mais on souhaite obtenir un bon rendement en année 4 déficit hydrique modéré, Pour que les besoins en eau en période de pointe (juillet) soient satisfaits, les irrigations doivent commencer t6t en juin bien avant que le mais ne manque réellement d'eau. Tei la capacité d'irrigation de VPinstallation étent réduite par augmentation de Ia surface itriguée, cette anticipation des apports d'eau par rapport ‘aux besoins devra étre encore plus importante et durer plus longtemps. Dans cette situation, il convient d’irriguer tt dis que la dose d'zrigation peut &tre stockée dans le sol, de diminuer le temps de pause apres une pluie, dutilser des doses drrigation modérées et de maintenir la fréquence de 1.22 Des stratégies d'esquive Dans un contexte de dates d'arrét és précoces de 'itriga- tion de fin de cycle et d’épuisement progressif de la réserve hydrique, la stratégie d’esquive du stress par avancée des stades les plus sensibles du mais est une adaptation souvent Evoquée [22]. En Poitou-Charentes (sol de groies), une étude 1 &té conduite par ARVALIS en 2005 pour tester cette straté- gie dans un contexte climatique trés propice & lesquive (23). Lutilisation de variétés demi-précoces (au Liew de variétés,

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