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Francis Ponge, Le Parti pris des choses :

résumé et analyse

Francis Ponge publie Le Parti pris des choses, un recueil de poèmes en prose, dédiés à la
description de ces « choses » qui peuplent le quotidien. Son choix n’est pas anodin : il souhaite
rendre justice à la beauté de ces éléments du quotidien qui se distinguent par leur apparente
banalité. Pour ce faire, le poète compte largement sur les qualités du mot, tant physique que
linguistique. De plus, Francis Ponge inclut délibérément « Parti pris » dans le titre de l’œuvre en vue
d’annoncer préalablement son positionnement. Il se détourne de la perspective humaine pour se
focaliser sur l’objet. De ce fait, l’œuvre du poète tranche avec la tendance lyrique surréaliste de
l’époque. Francis Ponge semble chercher à se détacher du lyrisme et de la poésie à travers ce
recueil de poèmes en proses apoétiques, proches des définitions du dictionnaire.

RÉSUMÉ DE L’OEUVRE
Le Parti pris des choses de Francis Ponge s’apparente à un dictionnaire. Chaque poème qui y est
inscrit présente la définition d’un mot : un élément du quotidien. Pour chaque objet, le poète explore
deux facettes de l’analyse linguistique du mot. D’un côté, il étudie le signifiant à travers la sonorité ;
d’un autre côté, il explore le signifié, c’est-à-dire les sens que renferme le mot. En d’autres termes,
dans son recueil, Francis Ponge dissèque les objets du quotidien afin d’en livrer les caractéristiques
de la manière la plus objective possible. Les fruits de ses réflexions lui servent ensuite de fondement
pour ses « leçons de choses » qui ont pour objectif de questionner la poésie en elle-même.

L’œuvre se distingue également par la présence récurrente des aliments. Par exemple, on note
plusieurs poèmes portant sur les fruits aux saveurs intenses comme les mûres et l’orange. De plus,
au fil de la lecture, le penchant de l’auteur pour les mollusques et les fruits de mer se fait également
ressentir. Deux poèmes s’illustrent dans cette catégorie : « l’huître » ainsi que « la crevette ».

Comme les objets du quotidien sont souvent indissociables de leur environnement, le poète accorde
une attention particulière à la nature ainsi qu’aux éléments. Parmi les éléments naturels évoqués,
les éléments à l’état liquide comme la pluie, le bord de mer, ou encore l’eau, … se distinguent par
leur abondance. La fascination de l’auteur pour ces derniers n’en devient que plus évidente.

En ce qui concerne les objets banals et prosaïques, Francis Ponge leur rend leurs lettres de noblesse
à travers le procédé rhétorique de personnification. Par exemple, il se réfère à la cigarette comme à
« sa personne », tandis qu’il attribue le caractère hautement humain « sympathique » au cageot. De
plus, il place intelligemment ses poèmes dans son recueil. Tout est sens. Ainsi, « le pain » précède
« le feu » responsable de sa cuisson tandis que « la bougie » et la « cigarette » se placent à sa suite,
comme pour faire écho à leur résonance avec le feu. Les définitions de l’auteur incluent également
des portraits à la jonction entre élément, aliment et objet, à l’image de « l’escargot ».

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Néanmoins, ce serait une erreur de penser que Francis Ponge limite ses poèmes à la description
d’objets inanimés ou d’animaux. Le recueil renferme également des portraits caricaturaux de sa
vision de l’humanité. En outre, les poèmes se muent en satyre pour évoquer le stéréotype de
l’employé de bureau (C.F. « R.C Seine n° ») ou encore brosser le portrait d’un séducteur (C.F « le
gymnaste »).

LES PRINCIPAUX THÈMES ÉVOQUÉS DANS LE PARTI PRIS


DES CHOSES
Le Parti pris des choses constitue une œuvre majeure du vingtième siècle. Le recueil s’articule
autour de cinq thématiques principales, à savoir : une attention particulière au détail, la restitution
des liens entre le poème et le monde, le rejet d’un monde centré l’homme, le rejet du lyrisme, et une
réflexion sur la poésie.

1. Une attention particulière au détail

Le travail de Francis Ponge s’illustre par son soin du détail. La fascination qu’exerce sur lui l’objet
de ses écrits se traduit par sa méticulosité et son attention particulière au moindre détail. Qu’il
s’agisse de la forme globale, évidente, ou bien des plus petits détails, quasiment imperceptibles, des
« choses », l’écrivain ne manque pas de les remarquer puis d’attirer vers eux l’attention des
lecteurs. Le style d’écriture du poète ambitionne de faire office de loupe. Il cherche à offrir une
vision panoramique des choses d’un côté ; et en révéler des détails intrinsèques ainsi que les
fonctions intimes, de l’autre côté.

2. La restitution des liens entre le poème et le monde

Francis Ponge est un amoureux de la nature. Son œuvre rappelle fortement les poèmes antiques
cosmiques, centrés sur la nature. Dans sa vision, le poème sert à mettre des mots sur la nature, qui
représente un texte en soi. En un sens, le poète se veut porte-parole de la nature. Bien que sa
démarche se veut objective, Francis Ponge revalorise et ajoute un soupçon de magie au monde à
travers diverses personnifications. De plus, ses descriptions comportent un aspect affectif flagrant :
il évoque des marques d’affection envers une « chose », témoigne d’une certaine envie de fusionner
avec la nature, ou encore décèle des sensualités insoupçonnées dans les objets de ses écrits.

3. Le rejet d’un monde centré l’homme

Francis Ponge rejette les normes de la poésie du vingtième siècle qu’il juge focalisée à outrance sur
l’homme et ses sentiments. Le titre Le parti pris des choses témoigne d’ailleurs de son
positionnement à l’opposé de cette tendance. Fortement influencé par le contexte d’entre-deux
guerres des années quarante, le poète argumente en faveur de la mise en retrait de l’homme. En
effet, il condamne les penchants de l’humanité pour la démesure.

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4. Le rejet du lyrisme

Le poète se lance dans une démarche apoétique, marquée par le rejet du lyrisme traditionnel. Par
exemple, il ridiculise ouvertement un des thèmes de prédilection du lyrisme, « l’automne ». Il
devient alors possible de conclure que les « définitions » de l’auteur comportent deux facettes.
D’une part, elles revalorisent les objets prosaïques et les font connaître du public sous un nouveau
jour ; d’autre part, il dépouille de certains objets le lyrisme et la poésie dont ils sont normalement
entourés.

Les poèmes de Francis Ponge cherchent à brosser le plus complet des portraits. Ainsi, il n’hésite pas
à révéler crûment la laideur qui se cache derrière des objets anodins, comme le sang versé derrière
chaque morceau de viande. De plus, il n’oublie pas de mentionner la force de destruction que
possède la nature. Force qu’il craint et respecte puisqu’il la place au-dessus de la poésie en elle-
même.

5. Une réflexion sur la poésie

Le Parti pris des choses apparaît comme la description d’objets prosaïques. Néanmoins, derrière ces
définitions se cache une réflexion poussée sur la poésie. A force d’efforts et de réflexions, il est
possible d’accéder à de nouvelles compréhensions sur le domaine de l’art poétique. En d’autres
termes, ce texte apoétique renferme un charme poétique décelable après un certain travail.

LES CARACTÉRISTIQUES DE L’ÉCRITURE DE FRANCIS


PONGE DANS LE PARTI PRIS DES CHOSES
Afin de maintenir une cohérence dans sa démarche, Francis Ponge adopte un style d’écriture
particulier.

1. Une écriture en faveur de l’ « objectivité »

Dans Le Parti pris des choses, l’auteur met au service de la littérature la démarche scientifique. Il
analyse méticuleusement chaque objet et met en évidence ses particularités. Afin de maintenir le
sentiment d’objectivité, il multiplie l’emploi des articles définis et favorise l’utilisation du présent de
vérité général. Cependant, il serait une erreur de penser que sa démarche scientifique se traduit par
une écriture dénuée de lyrisme. En effet, le poète met à contribution les vertus des mots pour
ajouter de la poésie à ses descriptions « objectives ».

2. Une écriture mettant l’accent sur l’étymologie

Dans la poésie lyrique du vingtième siècle, les poètes ont plus tendance à jouer sur les connotations
des mots. Francis Ponge se démarque de ses pairs par son intérêt pour l’étymologie des mots. En
faisant appel au sens étymologique, le poète fait émerger des polysémies qui ouvrent sur des
métaphores inattendues. Cette approche entoure les textes de l’auteur d’un halo lyrique différent.

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3. Une écriture comique et spirituelle

Le Parti pris des choses est également considéré comme une poésie comique et spirituelle. En effet,
le poète redonne la parole au monde à travers des jeux de sonorités. Par exemple, il juxtapose des
paronymes (mots aux sonorités similaires) et des onomatopées pour imiter le langage de la nature.
Cette démarche dénote d’une certaine spiritualité. De plus, il démontre d’un talent pour le
néologisme en vue de lier langage et réalité. (C.F. « amphibiguité »). Il se sert également des outils
de la poésie normées telles que la rime afin d’accentuer l’effet comique qu’il désire donner à son
texte. Par exemple dans « tous les cœurs il dévaste mais se doit d’être chaste et son juron est
BASTE ! »

ANALYSE : LE PARTI PRIS DES CHOSES


Dans Le Parti pris des choses, Francis Ponge cherche à redonner aux objets du quotidien leur réelle
valeur. Il utilise de nombreuses images, obtenues à travers les métaphores et comparaisons
inattendues, pour restituer l’originalité des « choses ». Il ôte la composante lyrique de certains
objets afin de faire connaître les autres vertus, plus prosaïques, de certains éléments comme la fleur.
Il surprend les lecteurs grâce à ses images peu orthodoxes, fruits de son érudition lexicale, en vue
d’offrir une nouvelle perception de la réalité.

Tantôt éloignés des expressions idiomatiques stéréotypées, tantôt pourvus d’un lyrisme certain, les
poèmes de Ponge souhaitent élargir les horizons du lecteur en le libérant des contraintes des
perceptions usuelles. Par exemple, de son point de vue, « le papillon » est à la fois « une tasse mal
lavée » et « un minuscule voilier des airs malmené par le vent ». L’écrivain pose alors de nouveaux
repères poétiques. Pour se faire, il met à profit ses connaissances linguistiques pour créer une
poésie paradoxale, une poésie des objets de consommation, une poésie de la nature sous le sigle
d’une vision plus terre-à-terre… La particularité de l’auteur étant d’arracher les objets de sa prose
aux stéréotypes qui les accompagnent habituellement. D’ailleurs, le titre indique qu’il prend le parti,
non de l’humanité, mais des « choses ».

Le recours au néologisme se traduisant principalement par la contraction de deux mots (par exemple
« objeu » résulte de la contraction de « objet » et « jeu ») caractérise l’œuvre de Francis Ponge. Ce
procédé lui permet à la fois de s’affranchir des chaînes du langage d’une part ; et d’ajouter un
soupçon de comique dans ses descriptions quasi scientifiques.

L’œuvre de Francis Ponge se révèle paradoxale. D’une part, elle témoigne d’une objectivité sans
conteste : le poète se focalise sur les qualités de l’objet au détriment des acceptations subjectives
léguées dans l’imaginaire collectif. D’autre part, cette vision de l’auteur, éloignée de la perception
usuelle du monde dans les années quarante, relève d’une vision subjective du poète. Ce dernier se
sert de sa décomposition méticuleuse des éléments de la réalité pour supporter son argumentation
en faveur des « choses », objets anodins du quotidien. Il réalise ainsi une nouvelle expression
poétique, empreinte d’un lyrisme impersonnel, qui lui est personnel.

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