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Meyerhold, élève génial de Stanislavski, exécuté par Staline en 1940, fut peut-être l’un des inventeurs de
la mise en scène théâtrale. Son étude de l’espace scénique, du corps et de l’interprétation compte parmi
les plus importantes recherches théâtrales de ce siècle.
Le rêve de Graig : un artiste théâtral complet et autonome, se réalise dans la personne de Vsevolod
Meyerhold. Pédagogue accompli, comédien, metteur en scène, il explore dans ses recherches et ses
créations toutes les formes de l’art dramatique. On peut aujourd’hui le considérer comme l’un des plus
importants théoriciens du théâtre de notre temps.
Vachtangov dira d’ailleurs des mises en scène de Meyerhold que chacune d’elles représente une nouvelle
tendance de l’art théâtral contemporain... Stanislavski lui-même affirmera : « le seul metteur en scène que
je connaisse, c’est Meyerhold ».
Dès les années vingt, ce créateur devient une personnalité artistique dominante ; son pouvoir sur le public
grandit de plus en plus. Malheureusement, ses actions sont contestées par l’état soviétique jusqu'à la
fermeture de son théâtre, son arrestation puis son exécution sans procès en 1940.
Autant que celle de Stanislavski, l’oeuvre de Meyerhold a marqué la scène russe et soviétique.
Profondément lié aux événements d’une histoire nationale, aux avant-gardes russes et aux particularités
de la culture slave, Meyerhold ne peut cependant être séparé de l’histoire du théâtre européen, de
l’ensemble de ce que D. Bablet nomme « les révolutions scéniques du XXe siècle ».
La rupture de Meyerhold avec le naturalisme russe a lieu en 1905, l’année de la première révolution. Entré
au Parti Communiste en 1918, Meyerhold cherche en 1921 à porter à la scène le ferment d’Octobre, et
déclare la guerre civile sur « le front théâtral ». En suivant l’oeuvre meyerholdienne, c’est donc toute
l’histoire concentrée du théâtre russe et soviétique que l’on peut saisir, de 1898 - date de naissance du
Théâtre Artistique de Moscou dont il sera un des acteurs leaders. Une décennie plus tard, cette proximité
du créateur et de l’histoire se mue en tragédie : son théâtre est fermé en 1938, il est arrêté en juin 1939,
jugé et fusillé le 2 février 1940. Le stalinisme fait disparaître jusqu’à son nom. Les archives du Maître sont
préservées, par le premier de ses éleves, S. Eisenstein.
Le théâtre de la Convention
La Biomécanique
En 1913, Meyerhold découvre les principes du mouvement scénique. En cette époque où le corps est
magnifié par une passion renaissante pour le sport et les grandes compétitions olympiques, l’acteur voit
son statut transformé. Ce n’est pas le moindre des paradoxes du théâtre qui se cherche que d’incarner
son idée d’un théâtre de l’Esprit, non pas dans le visage qui peut disparaître sous le masque, mais dans le
corps où s’opère la conjonction des moyens d’expression extra-linguistique ( lignes, mouvements,
rythmes, couleurs).
Ici deux concept s’opposent : et peuvent interférer : l’une qui est retour à la liberté d’un corps naturel, aux
« instincts primitifs », aux courbes sinueuses, fluides, continues, débarrassé des entraves d’une instruction
restrictive et mutilante, sorte de résurrection de la beauté grecque. L’autre, qui est volonté de construire un
corps artificiel, libre, mais parce qu’organisé par une pensée et une discipline musculaire qui domine le
chaos du geste naturel.
Dans l’utopie meyerholdienne d’un théâtre à supports scientifiques viennent se croiser cette idéologie
productiviste de l’efficacité technique, de l’utilité sociale et du travail sur le matériau, les outils logiques
empruntés aux sciences humaines et les bases solides mises à jour dans les recherches théâtrales
entreprises depuis 1913.
Pour rationaliser le comportement scénique de l’acteur, Meyerhold se tourne en priorité vers la
psychologie américaine, la théorie périphérique des émotions de W. James et la réflexologie soviétique
pavlovienne. Il tente de régler ses comptes avec l’âme, en rompant avec la psychologie françaises sur
laquelle s’appuient le psycho-naturalisme et le système stanislavskien. Dans la première approche de la
biomécanique qu’il donne en avril de 1921, Meyerhold relie avec aisance la théâtralité traditionnelle avec
ses jeux et danses et la biomécanique.
Meyerhold oppose au système de Stanislavski basé sur des prémisses idéalistes, sur l’illusion de la boîte
obscure et sur une sorte de doping psychologique.
La biomécanique meyerholdienne évacue le psychologisme au profit des réflexes et de l’étude de la
mécanique du corps. Même si Meyerhold construit le mouvement scénique sur le modèle du mouvement
parfait de l’ouvrier au travail (économie d’énergie, rythme, équilibre, précision), il n’utilise ni
comportements ni situations du travail et de la vie quotidienne, mais ceux du jeu, qui est le travail du
théâtre.
LA BIOMECANIQUE - MONOGRAPHIE
Dès 1905 - et non dès 1910 ou 1913 comme l'indique Picon Vallin, Meyerhold entreprend une série de
recherches sur la technique des mouvements scéniques.
Il s'inspire notamment de la Comédia dell'arte, du théâtre de foire, ou du théâtre ludique - entendons par là
folklorique.
Il fonde les premières bases de la biomécanique - nom utilisé plus tardivement. Sous le nom de Docteur
Dapertutto, il les énonce ainsi dans les 16 études du mouvement scénique :
A - la façon de se mouvoir dans l'espace
B - les rapports du comédien à l'espace
C - les relations entre les comédiens lors de leurs mouvements
D - les problèmes de jeu, ou plutôt du type de jeu : comédiens - bouffons - cabotins jeu exagéré :
grotesque ou bouffonnerie, etc.
E - l'influence du décor sur le comédien et le spectateur.
Il reprend en 1921 ses recherches, après des travaux menés en 1918-19 avec son élève, sur la pratique
de la gymnastique. Non pas pour un développement de la force musculaire pour un développement de la
souplesse et l'habilité.
Il met en pratique ces recherches lors de représentations du Cocu Magnifique (avril 1922) et en présentant
ces exercices au public...
Biomécanique, entraînement