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Lot-Borodine, Deification Dans L'eglise Grecque XIe Siecle 2.0
Lot-Borodine, Deification Dans L'eglise Grecque XIe Siecle 2.0
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La doctrine de la déification
r
dans l'Eglise grecque jusqu'au XIe siècle'
( Suite)
II
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526 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 527
1) Κλίμαξ (P. G. t. LXXXVIII), tel est le titre du célèbre traité de piété orien
tale, dû à la plume du moine Sinaïte Jean, surnommé le Climaque d'après son
œuvre maîtresse. 11 représente l'école de Palestine qui se développe parallèlement
à celle d'Égypte. 11 semble bien que toutes les saintes échelles du Moyen âge
dérivent de ce manuel de la vie contemplât ive qui exerça, par ailleurs, une influence
décisive sur les destinées de la spiritualité byzantine. L'Église grecque a cano
nisé le Climaque, comme elle l'a fait de tous ses grands ascètes-abbés, à l'excep
tion de l'origéniste Évagre, condamné par Ve Concile œcuménique.
~) Voir sur les origines et le développement de ce thème ésotérique dans l'anti
quité l'étude de W. Bousset, Die Himmelsreise der Seele, Archiv f. Religionswis
senschaft, t. III, 1900.
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528 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
parfait, άνήρ τέλειος, sera Dieu dans l'avenir et, dans le présent,
il s'assimile à Dieu, dans la mesure du possible. — Mais, avant
1} Clément a insisté le premier sur la nécessité, non pas de modérer, mais d'extir
per les passions (Slrom. VII, 10, II). Son rêve secret est de vi\re en esprit pur à
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 529"
l'imitation de Dieu, car l'impassibilité divine est pour cet une Hellène certitude.
Les héritiers de sa pensée, tantôt l'atténueront, tantôt, au contraire, la renforceront,
cela en rapport avec leur confiance plus au moins grande en l'humaine nature.
1 ) L'idée du Logos-éducateur, en germe dans le stoïcisme, a été développée déjà
par Philon. V. Bréhier, Philon d'Alexandrie, pp. 101 ss. Pour Clément ν. E. de Fave,
Clément d'Alexandrie, Paris, 1898. Le regretté historien y insiste par trop, à notre
avis, sur le peu d'originalité de la pensée de Clément. Son Logos est pourtant
autrement complet, vivant et fécondant que chez le précurseur juif. (V. surtout
Strom. VII, 5.) Et en mystique spéculative il a été le premier des maîtres.
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530 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
1) On sait que S. Bernard a bàii tout son Uiligeitdti Dca sur cette distinction
creusée en profondeur. Son αηιυ quia amu donne toute la mesure de cette théorie
du « pur amour » qui soulèvera plus tard, autour du quiélisnie, tant de discussions
ardentes. Elle restera toujours opposée à la conception hédoniste augustinienne
de Vtimur Dei « qui veut Dieu comme sa béatitude ». Quant à la division tripar
tite des chrétiens, celle-ci a été reprise, à l'intérieur d'une élite, chez tous les
spirituels byzantins, en commençant par Écagre du Pont et Diadoque de
Photikè. Maxime la mentionne et dans sa Mystagogia et dans les Ouest, ad
Thalas. (cap. quinq. I). (l'est d'après ce schéma qu'est construite l'échelle même
des vertus pragmatiques, théoriques et mystiques dans les Ambigua : la πρακτική,
θεωρία et θεολογία ou purification, illumination, et union d'après Denys. Partout
le nombre irais s'impose, en l'honneur de la Trinité, principe sacré.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 531
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532 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
tible, parce que idée de Dieu, parce que une de ses images,
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 533
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534 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 535
subi l'influence d'Évagre. Ne pas oublier que ce n'est pas seulement la gnose
alexandrine qui revit chez cet « origéniste impie », mais aussi la pensée cappado
cienne, puisqu'il a débuté dans la vie ecclésiastique à l'ombre des grandes
figures de S. Basile et de S. Grégoire, de Nazianze, sans parler des Grégoire de
Nysse, le grand spéculatif de toute l'école, chez qui nos Spirituels ont beaucoup
puisé. La doctrine c'est fixée d'assez bonne heure, ralliant tous les suffrages et
formant bloc. Chez Maxime déjà elle se cristallise.
1) Nous réservons, faute de compétence, tout jugement sur la Vita Anlonii
(P. G. t. LXXIII). Encore plus, sur le problème noué récemment autour de Macaire
et de Nil. On trouvera, pour le premier, tous les éléments d'une information dans
la controverse Villecourt-Stigmair à laquelle nous renvoyons. Il est certain
que Gennade (De viris illustr., 10, P.G., 68) ne cite comme appartenant au
Grand Macaire qu'une œuvre appelée Ep. ad Filios, bien que ce ne soit pas pré
cisément une lettre. Pour Nil le Sinaïte, consulter : P. Degenhart, Der ht. Nilus,
Milnster, 1915 et Neue Beilràge zur Nilusforschung, 1918: K. Mensi Das Nilus
problem, 1921. Quels que soient les résultats des discussions engagées, une chose
reste acquise : les affinités certaines entre Évagre, Nil et en partie Macaire. En
ce qui concerne la Vie du patriarche de la Thébaïde, l'énorme majorité des critiques
se rallie à l'authenticité de l'œuvre attribuée à S. Athanase, ami du grand ana
chórete. Reitzenstein, dans son étude, Des Athanasius Werk über das Leben des
—
Anlonius, 1914, ne s'occupe que des sources gnostiques populaires, d'après lui—
de cette Vita. Pour la discussion, voir Schiwitz, Das Morgenlandische Mônchlum.
L'auteur y cite, à l'appui de la thèse traditionnelle, Hase, Hilgenfeld, Keim,
J. Meyer et Eichhorn. Parmi les contemporains, tous les historiens catholiques se
rangent du même avis. Or la perfection pour Antoine, créateur de l'érémitisme
chrétien, c'est le retour à l'état préternaturel ; c'est par là que son enseignement,
où l'humilité tempère les excès de l'ascétisme et de la gnose révélée, se rattache
à la préoccupation dominante de toute la patristique. Et le nom d'Athanase,
qui brillait d'un tel éclat au iv® siècle, rehausse encore la valeur de l'exemple,
consacre définitivement l'orientation nouvelle des esprits. Ce n'est pas à l'acquisi
tion de tel ou tel charisme qu'il faut tendre (v. Vita, nc 38), mais à l'infusion
du Saint-Esprit dans l'âme, à son union plénière — par grâce — avec Dieu.
2) Clément d'Alex., qui a célébré déjà cet état de quiétude, l'appelait άνάπαυσις.
Mais les premières mentions d'adeptes de 1'ήσυχια sont anciennes. Nil dans ses
Lettres parle du grand hésychaste Rufin (P. G. T. 79, lib. IV, ep. 17) : les Acta SS.
au t. III mentionnent Jean de Scythopolis (dont nous avons des Apophtegmes),
lui-même hagiographe de Jean l'Hésychaste. V. J. Bois, Échos d'Orient, 1901.
Les pré-hésychastes sont, bien avant les disciples de Grégoire le Sinaïte, des contem
platifs ou mieux contemplants, non soumis cependant à l'exercice d'une méthode
unique. Le but reste le même toujours : la paix parfaite en Dieu par l'oraison.
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536 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 537
par la
concupiscence, ni ébranlée par aucune contrariété.
catholique. De son côté, Denys l'a prise dans Proclus et renchérit sur ce thème
(v. De divin, nomin., XXVI et XXVII). 11 y aurait lieu de rechercher, si c'est
vraiment à l'ancienne idée gnostique — contre toute la patristique a
laquelle
—·
réagi que doivent se rattacher certaines tendances qui mettent plus rigoureuse
ment l'accent sur la réalité du mal : Macaire ou le pseudo Macaire par ex. On
pourrait déjà les découvrir dans l'Évangile, ces tendances. Le monachisme, dont
la lutte contre l'Ennemi fut si ardente, n'a pu que développer cette tendance à faire
du mal une force réelle, cela en dehors de tout contact avec les hétérodoxes propres.
1 ) Se rappeler ce que dit et enseigne sur la vertu et la nature le saint Antoine de
la Vita athanasienne : Siquidem cum anima natura sua υίηι intelligendi habunl, hic
virlus consistit : Secundum naturam autem se habet anima cum ialis manel qualis est
facita véro est et bona et ad modam recta (20, col. 874).
2) Sur la théorie de ï'apatheia chez S. Maxime, v. l'article de E. Montmasson
(un peu sommaire), dans Échos d'Orient, 1911, et celui du P. Viller dans la H. d'Ascét.,
étude mainte fois citée de nous et où l'on trouve une notice bibliographique sur le
Confesseur. A ajouter : Straubinger, Die Christologie des ht. Maximus, Bonn, 1906
et S. Epiphanovitz (en russe), Saint Maxime et la théologie byzantine, Kief, 1915.
On sait combien le fougueux S. .Jérôme s'est montré hostile au concept même
de l'impassibilité qui voulait « faire de l'homme une pierre ÍF.pist. 133 ad Ltesiph.) »
Le P. Viller remarque (dans l'art, cité, p. 178 en note) que ce reproche adressé,
très injustement à Évagre, atteindrait davantage Maxime. En effet, ce dernier
a poussé jusqu'à la pointe son idéal d'indifférence humaine, de même que le
fera Isaac de Ninive et, bien plus tard encore, le disciple de S. Syméon, Nicethas
Stéthatos, visiblement influencé par Maxime. La base de cet idéal reste toujours
alexandrine, niais la notion de ï'apatheia est assez élastique. S. Grégoire de
le maître préféré de M., désignera de son côté, la loi naturelle —
Nazianze,
— comme la conformité même de la nature avec la vie morale (Oral.
φυσικός νόμος
14, n. 14, 27). Et M., après lui, dire que la vertu est le fonctionnement normal
des forces-facultés humaines (De Char. Il, 83, PS). Dans les Cap. oecon. et
theol., 5, 51), sont énumérés quatre degrés d'apatheia dont le 4e est le dénuement
complet de l'esprit dans la contemplation. Nous y reviendrons encore dans la
seconde partie de la présente étude.
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538 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
1) Sur cette inclination au péché, qui en est comme l'avant-goùt, voir Évagre
Pracl. 3, 46 ; Dorothée, Doctrine XI, 4, Hesychius, Cap. temperantia, II, 19 (121);
enfin pour les Pères, Grég. de Nazianze (Oral. 32, n. 28) et Gr. de Nysse, Vita
Moilsi, chez Migne, t. XL IV, 2353 A. C'est dire combien ces idées, dirigeantes pour
l'ascèse pratique, étaient enracinées. Le Spirituel qui les a le mieux développées
en une théorie liée, est Marc l'Ermite (Praecepla saliilaris et De lege spirituali, P. G.
t. LXV). Maxime, toujours éclectique, s'en est, très probablement, inspiré dans
sa doctrine de l'ascèse, en lui donnant un fondement théologique solide.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 539
prendre racine
et de pousser rapidement, telles les ronces du
terrain ingrat dont parle Jésus. Les scolastiques diraient
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540 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 541
toujours. Voilà le credo des Pères du désert qui ont vécu, avec
une foi et une ardeur intactes, l'idéal de leur âge héroïque. Ce
robuste optimisme, où la liberté s'épanouit féconde, est à l'anti
pode du fatalisme stérilisant des gnostiques hétérodoxes. Mais
il s'oppose aussi à l'angoissante détresse de S. Augustin, qui a
marqué de son empreinte indélébile toute l'Europe chrétienne.
Devant une telle croyance, vraiment inconcevable à la
chrétienté augustinienne, on n'a pas hésité à parler de « semi
1) Voici un tableau chronologique (très succinct) des traités les plus repré
sentatifs, depuis la Vita Anlonii d'Athanase, et sans compter les grands recueils
de Rufin et de Pallade. Au ive siècle : les cinquante Homélies spirituelles attri
buées à Macaire l'Egyptien, sur la foi d'une longue tradition; l'œuvre, conservée en
grande partie, d'Ëvagre le Pontique, considéré comme le disciple du patriarche
de Scéthé, et qui perpétue la pensée alexandrine au désert. Les Lettres et opuscules
de S. Nil le Sinaïte ou ps. Nil, en particulier son De Oratione, manuel de la
prière spirituelle. Au ve s. : Jean Cassien (v. p. 435), Conférences et Institutions.
Marc l'Ermite, « difficile à situer dans l'espace », ainsi que le remarque le P. Viller :
Sentences, Dialogues, Avertissements ; œuvre ascético-mystique très intéressante
parce que ayant une physionomie à elle, et suivie de près par S. Maxime, dans
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542 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
ses Capila iheol. et oecon; Diadoque de Photike (Épire) : Centurie surta perfection
spirituelle dont les courts chapitres conçus, à la mode du temps, sous forme de pen
sées, portent des titres suggestifs chez leur traducteur latin (P. G. t. LXV).
Au vie siècle, Jean Glimaque, la Scala sancta, (traduite sous le nom A'Échelle du
paradis par Arnaut d'Andilly) ; les curieuses Lettres de Barsanuphe et Jean,
moines au couvent de Seridos (éditées par Nicodème l'Hagiorite, au xvme siècle).
Au vne, sans parler du célèbre Pré spirituel de Jean Mosch, qui n'a pas pour nous
grand intérêt, l'œuvre magistrale, bien que contestée en partie, de S. Maxime le
Confesseur (P. G. t. XIC) ; puis les quatre Centuries de son ami, Thalassios, abbé
de Libye ; les catéchèses d'Isaac de Ninive dont la spiritualité est évagrienne, elle
aussi, mais ne manque pas d'accent personnel. A partir de ce moment, la litté
rature byzantine — ■— commence à décliner, tout le niveau des
postjustinienne
études subissant une baisse continue. Seule l'école sinaïte garde encore une cer
taine fécondité (Hesychius de Batos et Philothée). Au ixe siècle, avec le grand
moraliste-prédicateur Théodore le Studite, la sainteté ascétique domine la mys
tique pure. Au xe et xie siècles, un véritable prodige : 1'αγραματος, S. Syméùn
(949-1023), avec ses extraordinaires Hymnes de l'amour divin et ses « Discours »
(λόγοι), incomplètement traduits par Allatius (P. G., t. CXX) ; enfin l'hagio
graphe et disciple de Syméon, Nicétas Stéthas, un théologien spirituel de l'école de
S. Maxime, plus connu dans l'Histoire comme un des artisans de la séparation
des Eglises.
1) V. les critiques de Dom Pichery dans le commentaire de sa traduction des
Conférences de Cassien (t. II, p. 156 ss. et Vie spirituelle, 1921 ; celles, encore,
plus discrètes, de F. Cayré, dans son Précis de Patrologie, II, chap. XV.
L'étroite dépendance de Cassien d'Ëvagre, à qui il a fait maint emprunt,
a été indiquée par Reitzenstein, dans son Jlisl. Monachor. (v. p. 25, η. 1 du
présent art.). Ce moine scythe (?) du ve siècle, fondateur de l'abbaye de Saint
Victor en Provence, n'a été que l'écho fidèle, mais affaibli, des Pères d'Orient,
et fut, à son tour, suivi de l'Occident bénédictin, qui, discrètement, le corrigea.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 543
première et notre
déficience dernière. D'après les Pères, les
funestes de la chute -—- niée
conséquences jamais par eux,
—■ne
quoi qu'on ait dit peuvent qu'effacer, non détruire sur le
visage humain le sceau divin. La liberté, amoindrie parce
qu'intérieurement divisée
(S. Paul), la volonté n'est pas
complètement lite. Même avant la Rédemption, le désir du
bien subsiste, l'octroi même de la loi mosaïque et son main
tien dans une élite, suffisent à le prouver1. Le libre arbitre
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544 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
Spirituels byzantins. Marc l'Ermite dans son De baptismo, en réaction contre le fata
lisme pessimiste des Messaliens, prétendait même que la mort seule avait passé aux
descendants d'Ève, suite du péché d'origine, non le péché lui-même. Ce n'était là
qu'une exagération de polémiste. Seuls quelques représentants de l'école d'Antioche
(Théodore de Mopueste par ex.), ont incliné vers le pélagianisme. V. Kpiphanovitcz
S. Maxime ei la théologie byzantine (en russe) pp. 65-6 en note.
Le P. Boulgakof voit l'affirmation de cette liberté bonne dans le refus même
de son Église à reconnaître le dogme de l'Immaculée Conception. Pour le
révérend auteur, Marie incarne le libre élan vers Dieu de l'humanité, non-rédemp
tée encore. L'exemption du peccalum originis diminuerait, selon lui, le mérite per
sonnel de la Vierge-Mère, pure de tout péché actuel, car ainsi « elle ne serait qu'un
instrument passif entre les mains de Dieu ». Or, d'après le P. Boulgakof, la
Theolokos est le modèle idéal du genre humain, créé sous l'aspect «
sophial », celui
de la Sagesse divine identifiée avec le Saint-Esprit. On voit ici jusqu'à quelle
profondeur peut aller une divergence qui ne semble pas, de prime abord, intéres
ser la théologie dogmatique propre. V. La doctrine orthodoxe sur la dévotion à la
Mère de Dieu (en russe) Ymca-Press, Paris, 1926 et aussi Orthodoxie (Alean, 1932)
ch. VIII. Sur la conception orthodoxe de la grâce, moins précise qu'en Occident, il
n'existe, à notre connaissance, qu'un travail (en russe) de A.Katanskv, La grâce divine
dans l'œuvre des Pères. Kief, 1902, recueil d'articles sans
grande valeur théologique.
1) V. E. de Paye, Origène, t. III, chap. XIII, p. 178 : « Le libre arbitre est la
pierre angulaire du système tout entier d'Origène. » Ce qui est évident, c'est le
désir des grands Alexandrins de s'opposer au fatalisme annihilant
gnostique
toute liberté humaine, au profit de forces occultes et Il semble qu
irresponsables.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 545
le correctif, apporté par les Pères à la doctrine trop rationaliste sur ce point
d'Origène, tienne en grande partie à l'élaboration d'une théologie pneumatique
plus complète. Car la grâce est l'œuvre mystérieuse immédiate du Saint-Esprit,
par qui l'Église vit éternellement. Et cette notion précise du rôle ministériel de
la troisième hypostase manque encore au subordinisme d'Origène.
1) S. Thomas, moins pessimiste en ce qui touche à la corruption originelle
de notre nature, adoptera cependant la même thèse augustinienne, en dernière
Il reconnaît — même le —
instance. que l'homme païen peut, par son propre
vouloir accomplir des actions moralement bonnes ; seulement ces actions ne sont
pas salutaires, ne pourront, autrement dit, assurer notre salut. Ainsi d'une main
on retire ce qui a été donné de l'autre. Dans toute cette doctrine de la grâce où
la christologie n'intervient guère, nulle différence réelle ne semble faite entre la
pre-rédemption et la posf-rédemption. Le fait que le chrétien, en sortant des fonts
baptismaux, est déjà participant à l'énergie divine, n'entre pas en considération ici.
Fait primordial pour l'Orient orthodoxe. D'après Diadoque, ce sacrement renouvelle
en nous Yimage divine ternie par le péché, en attendant que le libre assentiment
de la volonté permette à la grâce de recréer la similitude latente. (Comparaison
avec le portrait fait par un peintre, cap. LXXXIX.) Pensée, confirmée et amplifiée
par S. Jean Damascène. Nouvelle application du principe synergiste qui n'a rien
de rationnel. La pensée des Byzantins n'a pas varié là encore : la grâce n'est
certes pas un dû, mais un don ; seulement ce don doit être sollicité par les âmes
ferventes, auxquelles jamais il ne sera refusé. S. Nil insiste sur la nécessité de
demander inlassablement, de mériter par la foi et les œuvres spirituelles la
connaissance — Violenli coelum rapiunl. Quant à l'importance que la
parfaite.
Rédemption a eue pour la pleine libération de la volonté, celui qui l'a le mieux
analysée est S. Maxime dans son étude sur les deux natures dans le Verbe.. Toute
sa christologie tourne autour de ce pivot, entraînant l'homme l'immergeant dans
la divine liberté, comme dans son élément naturel car il est l'image du verbè.
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546 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
ronge et le remède
tout-puissant, unique, contre ce mal. La
guérison, la vie éternelle ou athanasie, est à la portée de sa
main. Elle débute avec la nostalgie de cette vie, puis le désir de
vaincre cette mort, coûte que coûte, désir déjà opérant. Enfin,
bien au-dessus des ressources humaines propres, voici l'iné
puisable réservoir de la grâce sanctifiante : tantôt rituelle
dans les sacrements, viatiques de
l'incorruptibilité, tantôt
grâce qui la délivre d'un coup d'aile ultime. Mais son destin
surnaturellement naturel, c'est bien l'âme, encore une fois, qui
l'a demandé, initiée par le baptême. Et selon son désir il lui
sera fait, ce désir de la créature étant le vœu profond du
Créateur lui-même.
Ce qu'a voulu le Dieu vivant de la Genèse, c'est, en
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 547
1) Rappelons que la source du mal pour les Grecs est l'erreur, le faux juge
ment, par obnubilation de l'esprit ; la volonté n'y est atteinte qu'en second. L'Incar
nation, où Dieu devient homme pour que l'homme soit Dieu, rétablit virtuellement
l'état préternaturel : le chrétien éclairé, illuminé, reconnaît l'erreur avec le péché ;
il puise dans le Christ, se communicant à lui par la grâce de l'Esprit sanctifiant,
la force qui manque à l'efficacité de son désir du bien. On voit comment la chris
tologie, pour ainsi dire expérimentale, est à la base de toute la doctrine du salut
grecque. Le reproche qu'elle adresse communément à l'augustinisme est de n'avoir
considéré dans le Verbe incarné que l'Immolé volontaire, ayant seulement réparé
la faute de l'homme. Le sacrifice du Christ y est toujours le « secours surnaturel »,
sans plus. V. Ét. Gilson l'Introduction à S. Augustin, p. 200. Ni dans son Liber de
perf. jusl. hominis, ni dans le De libero arbitrio, Augustin ne met en rapport immé
diat l'Incarnation-Rédemption avec le rétablissement de notre libre arbitre,
confondu lui-même avec la liberté (Gilson, l. c., p. 198). Le rôle de J.-Christ ne
cesse jamais d'être celui du médiateur, insuffisant aux yeux de la patristique grecque,
■qui réclame une réparation plus éclatante de l'humaine espèce vraiment rénovée.
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548 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 549
pour eux un tourment immense, par impossibilité, pour ainsi dire organique,
de s'unir à Dieu : une connaissance exempte de grâce, privative, παράχάριν,
le mal lui-même ad 82, LIX, LXIII, Ambigua, P. G. t. XCI,
comme (Ouaest.
1252 B, 1392, Ep. 1). Sur l'apocatastase dans Maxime, v. l'article de E. Michaud
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δδΟ REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 551
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552 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 553
dant, par Jean Cassien1. Les voici : « Prima est qua corpo
1) Déjà Reitzenstein, dans son Hisl. monach. u, Hist. Laus., avait signalé,
parmi les emprunts faits par Cassien à Évagre, les fameux « trois renoncements ».
lit le P. Yiller rappelle qu' « au moment ou Pallade et Cassien parcouraient les
principaux centres du monachisme en Basse-Égypte, Évagre en était la personnalité
la plus marquante » (art. cité, p. 264). A son, tour le révérend auteur nous apprend
que cette doctrine des « perfections » avait passé dans la règle de S. Colomban
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554 REV Γ υ de l'histoire des religions
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 555
est ? S. Augustin, par contre, l'entend dans le sens d'unité, monas, à la lumière
du psaume 132: Esse quam bonum... est habitare fratres in unam. Mais l'évêque
d'IIippone ne pouvait appliquer une telle glose qu'aux cénobites et non aux ermites,
ainsi que l'observa justement Schiwitz. Or l'idée même du monachisme, à sa
naissance, est une idée de la solitude comme sola béatitude. Enfin pour Cassien,
il s'agirait là d'abstinence du mariage (Coll. 135), ce qui ne paraît guère probable.
L'ancien nom, qui rappelle l'hermétisme pythagoricien, était, on le sait, thérapeute
et l'Aréopagite s'en sert encore dans ses écrits.
veut, à tout prix, découvrir « das neu
1) Dans la Vita Antonii où Reitzenstein
pythagoreische Idealbild » (1. c., p. 1), cette hantise de la mort imminente apparaît
le solitaire
déjà en pleine lumière : la pensce de la brièveté même de la vie y incite
à rechercher le seul bien impérissable, car « la terre est minuscule en comparaison
du ciel immense »...
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556 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
de l'impureté, de la bassesse
humaine, Spirituels ont nos
fait une vertu, fertile en dons bénis : la componction. C'est « une
douleur intime, en même temps qu'un doux rafraîchissement
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 557
appelé par tous les vœux en Orient et plus tard dans l'Occi
dent bénédictin1. Mais on n'arrive à la joie plénière que par la
voie étroite de la souffrance pénitente, de la souffrance-épreuve
volontairement subie,
joyeusement acceptée.
La
pénitence est le grand mât où toutes les voiles s'atta
chent sur ce vaisseau qui vogue, vaisseau de l'âme solitaire
dont les amarres avec la terre ferme ont été coupées. Et la brise
1) Il y aurait toute une élude à faire sur les divers aspects des larmes, sur la
définition même de ce « don », que la critique moderne interprète arbitrairement,
en l'appliquant toujours au Moyen âge franciscain. Or, il faut distinguer les larmes
d'attendrissement, versées par les cœurs sensibles sur la Passion rédemptrice,
de celles qui seules comptaient pour l'antiquité chrétienne et qui étaient des larmes
« spirituelles ». Le P. Hausherr remarque avec justesse (dans sa Vita de S. Syméon,
ont connu une véritable « théologie des
Introduction, p. xxxi) que les Byzantins
larmes ». Ajoutons que celle-ci était l'expression la plus haute de toute cette pneu
matisation des sens dont nous venons de toucher un mot. Celui qui a le mieux
senti, vécu, interprété le donum lacrymarum en Orient c'est, avec Isaac de Ninive,
S. Syméon, le « Nouveau théologien », instruit par son pater pneumáticos et homo
nyme, Syméon le Studite. Le premier qui en parle est, semble-t-il, Diadogue.
2) D'après Climaque, l'obéissance précède la pénitence (grad. IV), la première
étant l'épreuve décisive « des victimes qui se sont sacrifiées elles-mêmes en holo
causte ». Nous citons toujours d'après la savoureuse traduction de 1698.
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558 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
lequel nous
agissons sans discernement ». Et par ces fines
observations, le Sinaïte, enraciné dans la tradition ascétique
de son époque, montre combien cette tradition est psychologi
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 559
satisfaction même des besoins les plus légitimes, tels que la faim,
la soif, le repos et le sommeil. Les Pères étaient persuadés que
le corps vit aux dépens de l'âme qui languit, impuissante, dans
la léthargie de ses forces les plus hautes, parce que asservie à
la chair de concupiscence. En la mortifiant, on redonne de la
1) Tous les miracles qui abondent dans les premiers recueils des Pères sont
conçus dans cet esprit, dès la Vita Antonii où les prodiges se multiplient. Le rêve
de la chair transfigurée y parait en pleine lumière. (V. 14, col. 866.) L'idéal n'est
pas de tuer, ni même simplement de mortifier le corps, mais d'en faire l'ins
trument docile de l'âme, elle même « cithare de Dieu ». Nous avons déjà
indiqué, en passant, cette spiritualisation de toute chair, à la fin de notre premier
article. Reitzenstein parlera, à propos de l'ascèse hermétique, de véritable méta
morphose de l'être, tendant à devenir angélique. Mais ici intervient chez les ascètes
orthodoxes la grâce vivante des sacrements, inexistante dans les hérésies mys
tiques (par ex. chez les messaliens). Les charismes, ou dons gratuits de l'Esprit,
ne sont pas nécessairement requis pour atteindre la perfection, Antoine l'affirmait
déjà. Pour bien situer la pensée des « Spirituels » sur la justice corporelle, il faut
se rappeler cette parole profonde de Grégoire de Nysse : « L'âme est au corps ce
que Dieu est à l'âme. » Consulter, mais avec prudence, sur l'état angélique anticipé
chez les ascètes, Reitzenstein, dans la conclusion du chap. X (p. 210) intitulé :
Gnosliker u. Pneumaliker, de son Hist. monach. u. Hist. Laus.
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560 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
nature déchue.
Aux impérieuses sollicitations de cette nature
déformée et dépravée, il faut opposer un refus catégorique,
aussi complet que possible. Jeûnes et abstinences, coucher
sur la terre dure, veilles, de nuit et fatigues de toutes
travail
1 ) V. le beau livre, non traduit encore, de G. Fédntof : les Saints île Vancienne
Bussie, Paris (Ymca Press), 1931, particulièrement le dernier chapitre.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 561
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562 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
parfaitement lucide.
Acquiescement de la volonté, puissance
appétitive, cette morale strictement religieuse est commandée
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 563
l'ensemble, le nombre désormais fixe des péchés capitaux s'est trouvé porté à
sept. L'ordre en est le suivant : superlia, avaritia, luxuria, invidia, gala, ira, acedía.
Tout le Moyen Age s'en est pénétré, Dante last not least.
1) Pour la définition du péché comme contraire à la nature, voir aussi la Vila
Anlonii : contra vero cam declinavit, ai que a natura deflexit, — id dicilur animi
vilium (20, col. 874).
2) En réunissant les initiales, cela forme le mot gtatiavs, ou bien glaitavs —,
en suivant Nil et Cassien, qui intervertissent l'ordre des péchés de l'irascible
(ira, tristitia, acedía). Pour les Latins, le vocable des abréviations sera : saligia,
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564 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
méditation et la prière. La
stratégie meilleure
pour vaincre,
c'est, encore et toujours,
de prendre l'offensive. Non pas extir
per les vices péniblement ou en se défendant contre eux, pied
à pied. — Cela est insuffisant et prouvé inopérant, car il s'agit
d'abattre non des entités, mais des puissances vivantes,
dynamiques, les démons des vices, λογισμοί δαιμονίου II faut
donc exorciser le mal en vivant le bien. Et voici pourquoi
l'auteur de VAnlirrhelicos
déroule, face à son octave maudite,
là guirlande fleurie des vertus. Vertus purement chrétiennes,
ou christianisées à tel point qu'elles ont pris figure nouvelle2.
1 ) D'après Maxime, si ia nature humaine a été « guérie », une fois pour toutes,
par le Christ, la volonté doit se sauver individuellement par l'exercice des vertus
actives.
2) Déjà Antoine plaçait, au-dessus des quatre vertus cardinales et de l'intel
ligenliam-charilalem, pauperum amorem, fidem in Chrislum, mansaeludinem et hos
pilalilalum. Mais aucune hiérarchie, à l'inverse de Clément, n'est indiquée dans sa
Vita, à peu près contemporaine des premières Euagrianes.
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 565
vant, une
grâce correspondante. Il en résulte parfois une
apparence de confusion. Ainsi chez Évagre, et plus encore chez
Maxime ou même Climaque, on parlera tantôt de la πίστις
et de Γάγάπη, comme de vertus naturelles ; tantôt on les iso
lera à part, les auréolant d'un même nimbe de lumière. Car,
ainsi que le déclare l'auteur du κλίμαξ, la foi et la charité
ne sont, avec l'espérance, « qu'une même splendeur et une
même clarté » (XXX, Grod.). Cela est vrai même de cette vic
toire « pratique » définitive, l'impassibilité,
qu'est puisqu'il y a
—
l'apatheia acquise et l'apatheia infuse, perfection inacces
sible à nos puissances naturelles. Mais tout ce qui est acquis
ne le sera qu'en vue de ce qui est infus. L'assise même
des vertus qui forment, elles aussi,
premières une échelle,
l'échelle du
paradis, c'est la foi, vraie base de toute vie
sainte. En effet, bien que trônant avec ses deux sœurs dans la
constellation des vertus théologales, la foi occupe sa place
d'initiatrice, sans doute pour bien marquer l'origine mystique
de toute la lignée qui en descend. C'est l'invisible racine de
la plante visible, aux mille fleurs épanouies. Les Alexan
drins déjà appelaient la πίστις, « mère des vertus », et
l'on sait l'exceptionnelle importance qu'elle a dans le système
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566 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
qui domine ses passions supporte les afflictions ; celui qui sup
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 567
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568 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 569
l'âme des
passions qui la souillent. Évagre et Maxime, tous
deux, l'affirment : l'humilité est une libératrice parce qu'elle
est cathartique, essentiellement. Or nous savons que la purifi
cation simplifiant l'être (le « Soyez comme les enfants » de
Jésus sera toujours ainsi compris par nos mystiques) c'est
d'abord le détachement parfait du cœur converti à Dieu.
Ainsi entendues,la pureté et l'humilité sont déjà les
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570 REVUE DE l'histoire DES RELIGIONS
ascétique, est la
surnature,
déjà informée par l'Esprit qui
sanctifie. Tout
entière, la βίος πρακτικός se trouve enclose dans
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 571
1 ) Voir dans l'anthologie des frères Bremond le joli florilège au chap. intitulé
Charité, ainsi que dans Viller, Spiritualité des premiers siècles chrétiens.
2) S. Maxime a dit : <t Heureux celui qui aime également tous les hommes. »
(De Charil., I, 17.) Et ce vœu, il le formule mainte fois dans ses œuvres. Sa parole
la plus forte sur ce thème sera : « Aimer tous les hommes, c'est n'aimer rien
d'humain. » {De Char., III, 37.) Et l'on connaît la profonde méfiance, et de lui
— — considérée comme une des plus
et d'Évagre, pour l'amitié humaine φιλαντία
dangereuses perversions. (V. Viller, t. c., p. 241.) Cela se comprend à la lumière de
toute cette psychologie apathétique, puisque là oii il y a préférence, désir, l'impul
sion passionnelle intervient. Or, il ne faut désirer vraiment que Dieu, tout en sou
haitant et faisant le bien à tous, en particulier à ceux qui vous ont fait du mal.
Diadoque, Marc l'Ermite, Isaac de Ninive, l'affirment également, car telle est
la loi évangélique. Mais on aime son prochain comme frère en Dieu, donc d'une
manière très différente de celle que le monde entend : ce qu'on lui souhaite,
avant tout, c'est d'être sauvé. Ici, on pourrait distinguer entre deux tendances
au sein de la même charité monastique : celle des premiers siècles, — du désert si
l'on veut — et celle de l'âge suivant, à Byzance même. Il nous paraît que la cha
rité des Pères l'emporte, humainement parlant, sur l'autre. Mais on n'ose conclure,
car tout ici est en nuances parfois extrêmement subtiles.
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572 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
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DOCTRINE DE LA DÉIFICATION DANS L'ÉGLISE GRECQUE 573
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574 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
(A suivre.)
M. Lot-Borodine.
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