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L e noir domina dans la cellule.

Alors que tout le monde était plongé

dans un sommeil de plomb, j'étais en proie à une insomnie, prisonnier aussi de mes
pensées obsédantes que de mon carcan à porte étroite. Ces pensées féroces
s’emparaient de mon esprit, me rendaient incapable de vivre, espérant le sommeil
eternel pour me délivrer de cet enfer. Voilà une semaine que j’habitais avec cette
souffrance, chaque jour, chaque heure, chaque minute, glacée de sa présence,
courbé sous son poids. J’essayai tout, même des exercices de zénitude que je lus
quelque fois dans un certain livre, ils ne m’exemptèrent de ma douleur que pour
quelques heures.

Dans un des rares moments où je pus dormir, j’étais toujours en proie à une
vive agitation, j’entendis des pas qui arrivaient, elles s’approchent, s’approchent, et
à chaque pas, mon cœur bat de plus en plus vite, tout à coup j’entendis le son des
clefs qui tournaient dans la serrure, la porte s’ouvra, c’étais le geôlier. Il avança
vers moi, avec des yeux pleins de cruauté, il m’attrapa et me traîna tout le long
d’un couloir, noir comme un tunnel qui me paraissait sans issue. À la fin du
couloir, avant qu’il n’ouvra la porte, je pensais que j’allais trouver mon bourreau
mais le geôlier retourna, mais quelle surprise ! Ce n’était pas lui, c’était un visage
familier -je ne m’y souviens pas- mais j'étais sur que j'avais déjà vue. Soudain, il
me jeta de toute sa force à travers une porte. Ah ! Quelle lumière ! J’aperçus la
lumière pour la première fois depuis plusieurs jours. Le soleil radieux dardait à
plomb ses rayons poudreux, si bien qu’un nuage épais enveloppa mes yeux et je
perdis la vision pour quelque temps, je ne distinguai que des fantômes placés de
part et d’autre sur mon trajet, je n’entendais que les rugissements de cette foule
acclamant : « ASSASSIN ! ASSASSIN », ces cris troublaient mon cœur et y
diffusèrent l’horreur. Au moment où mes yeux commencèrent à s’adapter à la
lumière j’aperçus des furieux, s’approcher, avec des visages couverts de sang,
tenant toutes sortes d’armes blanches. Je commençai à reconnaître ces visages,
c'étaient de mes victimes. À leur vue, je frissonnais de peur, je me sentais comme
un gibier entouré d’un groupe de chasseurs. L’un d’eux leva le bras pour me
poignarder, je n’arrivai même à crier. Brusquement, tous ces êtres disparaissent.
J’ouvris mes yeux, hors d’haleine. Mais, je n’eus jamais quitté ma cellule. Quel
horrible cauchemar !!! Je fermai mes yeux, mais, cette fois, pour voir tous les
événements de ma vie défiler devant mes yeux.

Me voici à la maison paternelle, un jeune adolescent plein d’espoirs, aimé de


tous. À l'âge de quinze ans, je n'étais qu'un étudiant comme tous les autres.
Pourtant, j'étais bien triste, ayant perdu mes parents à l'âge de quatre ans. J'étais
confié à mon oncle qui me donna tous les sentiments de tendresse et d'affection.
Hélas! Pourquoi cette vie paisible n'a-t-elle pas durée pour toujours ? Tout
commença le jour où mon oncle me demanda de venir dans sa chambre pour me
confier un secret. À ma surprise, il me raconta que mes parents étaient des
djihadistes tués par l'armée américaine en Irak. Il me raconta leurs prouesses et le
récit sanglants de leur mort, au point que je n'avais qu'un seul but : les rejoindre au
paradis. Cette vérité amère me choqua tellement et approfondit mes douleurs.
Aussi, il me donna, comme seul souvenir de ma mère, une écharpe de style
bédouin, un peu kitsch, et tachée de son sang. Je la serrai contre mon cœur et
décidai de la garder avec moi jusqu'au jour de vengeance. Chaque année que je
passai, sans les venger, me rendis un monstre, avec des sentiments d'amertume.

Un jour, en naviguant sur internet, je lis un article sur le massacre d'officiers


par un groupe terroriste. Les gens étaient très affectés de voir ces scènes
sanglantes. Quant à moi, j'étais indifférent, cela ne me fit ni chaud ni froid. Le
souvenir de mes parents massacrés par des militaires anima mon esprit de
vengeance et m'incita à approuver cet acte qu'on qualifia de "terroriste". Je décidai
de rassembler des informations qui se trouvaient sur Wiki à propos du groupe qui
avait commis cet acte pour les joindre et réaliser mon rêve de venger mes parents.
Finalement, je réussis à entrer en contact avec ces personnes et à les informer de
mon désir de les joindre. Deux semaines plus tard, je reçus, via courrier
électronique, l’ordre de partie pour l’Afghanistan.

Lors de mon arrivée, deux membres du groupe se chargèrent de me fouiller


soigneusement afin de s’assurer que je n’étais pas un agent secret appartenant à
l’Interpol qui portait des dispositifs d'écoute. Dès qu’on termina, on me présenta à
un de leurs chefs. Je me trouvai face à un sexagénaire. Il avait un visage osseux
avec une expression sombre, son regard était perçant, ses cheveux blancs et
hirsutes, et sa barbe poivre et sel lui donnaient l’air d’un personnage sorti du conte
de Mille et Une Nuits. Il passa deux bonnes heures à me poser diverses questions
sur tous les détails de ma vie depuis mon enfance jusqu'à mon arrivée en
Afghanistan. Puis, il m’ordonna d’aller me reposer pour être prêt à ma première
journée de travail.

Le lendemain, on me présenta mes nouveaux "frères" ; je me trouvai au sein


d’un groupe hétérogène, un vrai amalgame de toutes les nationalités : il y avait des
arabes, des pakistanais, des français, des hindous, et même des Inuits. On nous
soumit à de durs exercices physiques et psychologiques pour nous entraîner aux
opérations militaires. Après deux mois d’entraînement, j’acquis une grande
expérience, j’appris à manier les armes et à tirer parfaitement si bien que je ne
manquais mes cibles que rarement. Malheureusement, ils profitèrent de mon
enthousiasme et de mon désir de vengeance afin d’animer en moi l’esprit fanatique
et la ferveur religieuse, de sorte qu’ils me convainquirent que c’était le seul moyen
pour moi d’entrer au Paradis et de venger mes parents en même temps. Grâce à
mes aptitudes et mes capacités militaires, j’étais choisi parmi el groupe charge
d’exécuter des attentats et des massacres en Afrique, en coopération avec nos
confrères Boko Haram.

En Niger, c’était notre première opération : le chef reçut les nouvelles de


l’arrestation de nos "frères" et leur détention dans la prison de Niamey. Après dix
jours de surveillance, nous pûmes grouper toutes les informations nécessaires à
notre attaque. À l’aube, nous partîmes, munis de mitrailleuses, de bombes et de
pistolets ; un de nos frères commença l’attaque en conduisant une voiture piégée
afin de nous ouvrir une voie qui nous permit d’entrer à la prison. Plusieurs dégâts
furent provoques, parmi les victimes : douze militaires et cinq citoyens.
Néanmoins, j’éprouvai pour un instant un peu de pitié pour ces cinq innocents.
Mais qu’importe ? Puisque mes frères furent libérés. Ne pouvant plus dompter mon
désir de vengeance, je décidai de poursuivre ma route, coûte que coûte.

Notre deuxième mission qui était plus. Une église eut été prise pour cible,
pendant une kermesse organisée à l’occasion de la fête de Noël. Motivés par notre
fanatisme religieux, nous plantâmes une bombe au milieu de la cour sur lequel
s’était réunie une centaine de personnes qui célèbrent le festival. Toutes ces
personnes endimanchées, étaient pleines de joie : sourires, bon mots, rires, cris des
enfants qui couraient ici et là, tout respirait l’air de la fête. Tout à coup, le bruit
retentissant de la bombe porte un coup fatal à cette fête. Ce ne fut que cris de
douleurs, vacarmes, pleurs des grands et des petits. Cette fois-ci les dégâts étaient
exorbitants de façon que le sang se répandait partout et les débris étaient éparpillés
ici et là. Ce qui me toucha le plus, c’était la scène du cadavre d’une petite fille, en
robe blanche, dont le visage était tout couvert de sang, tenant un grigri cassé, et qui
s'attachait au coup de sa mère, elle aussi morte. Cette scène ne cessa de me hanter
dans mes cauchemars. Milles questions tournaient dans ma tête, semant le doute
dans mon esprit, doute qui irait grandissant chaque jour. Pourtant le chef était très
content de notre groupe et de moi en particulier étant donné que mon habileté à
cibler les "ennemies" leur a coûté un grand nombre de victimes. « Un simple
bravo, dit le chef, ne suffit pas pour te récompenser ; dorénavant, tu seras qualifié
pour accomplir des missions en Europe ».

Je partis pour la France pour ma mission suivante qui fut la dernière. Il fallait
attaquer un journal français qui eut publié des caricatures se moquant de la religion
musulmane et du prophète. Pour plus de sécurité, je reçus les ordres de partir seul
et de joindre mes deux confrère -qu'on ne m'a pas nommés- à un endroit et à un
moment précis. Je les reconnaîtrais grâce à des indices particuliers. Arrivé là-bas,
je découvris, à ma grande surprise, que mes deux confrères n'étaient que deux
cousins Chérif et Saïd. Pour bien élaborer notre plan, nous surveillâmes le journal
nuit et jour pendant une semaine. Comme c'était ma première mission en Europe,
malgré mon habileté, le chef décida que mes deux copains se chargeraient de
l'attaque, alors que je resterais en voiture pour surveiller la route au cas où la police
interviendrait.

Au jour prévu, nous arrivâmes au siège du journal satirique. Chérif et Saïd


montèrent au deuxième étage, et se dirigèrent vers la salle, où se trouvait réunie la
rédaction du journal. Brusquement, ils ouvrirent le feu. Deux policiers et huit
journalistes étaient victimes de ce carnage. Ils se sauvèrent en toute hâte de
l'immeuble et prirent la fuite dans la voiture que j'étais chargé de conduire. Notre
plan était d'aller nous refugier dans une maison isolée où nous devions changer nos
habits. Mais, avant d'y arriver, nous remarquâmes une voiture de police qui nous
suivait ; vite, mes deux cousins se déshabillent en hâte et nous décidâmes de quitter
la voiture et de nous séparer, et pour plus de sureté, nous ne contacterions plus les
jours suivants. Je les quittai pour aller me cacher dans un hôtel.
Le lendemain, tous les journaux parlaient de notre acte, le qualifiant de "crime
abominable" et d' "acte terroriste". Pour le comble de mon malheur, les policiers
qui nous suivaient la veille avec leur voiture, pûmes trouver la nôtre, et en la
foulant, ils découvrirent les cartes d'identités de mes cousins. Cette découverte
serait saluée par les journaux comme s'il s'agissait d'une sérendipité. Quant à moi,
toutes mes idées étaient bouleversées. La peur me saisit, je craignais même de
garder par la fenêtre. Enfermé dans ma chambre, j'étais attentif au moindre bruit. Je
m'attendais, chaque minute, à l'arrivée de la police, je me voyais conduit par eux,
au milieu des sifflements de gens, de leurs injures. Tous brandissaient leurs armes,
me qualifiant de "terroriste" et de "bête cruelle". Je regardais la télévision pour
savoir les dernières nouvelles ; par malheur, j'appris que mes cousins eut été tués
lors d'une attaque de la police. Mais, serait-ce mon sort, moi aussi ? De plus, on ne
cessait de présenter les photos des victimes, de raconter leur vie et d'interviewer
leurs parents et leurs amis, tout souffrant à cause de leur décès et maudissait leurs
meurtriers. À la vue de ces scènes, je frissonnais, je commençais à reconsidérer
tout mon passé, toutes mes convictions ; mon désir de vengeance s'évanouit, cédant
la place à une peur bleue. Dans un moment de lucidité, je pris la seule décision qui
parut raisonnable : me livrer à la police. Je me hâtai de m'habiller pour descendre
avant que je ne change d'avis. Je courus dans la rue, j'arrivai à la station de police,
tout en sueur. Je fouillai mes poches pour trouver un mouchoir, mais ma main
tomba sur l'écharpe de ma mère. Je la tins avec tendresse et l'embrassai, et à pas
ferme, je montai l'escalier et demandai de parler à un officier. Sans hésiter, je lui
racontai tout ; je me déchargeai d'un lourd fardeau.

Maintenant, je suis ici, dans ma cellule obscure, seul, attendant la mort à


chaque instant. J'entends des pas arrivés, la porte s'ouvre -mais cette fois-ci je ne
rêve pas-, c'est le geôlier lui-même. Mon cœur bat très fort, mais je sens que je suis
sur le point d'être délivrer de tous mes chagrins. Le geôlier m'emmène au bourreau.
On me place au pied du mur, les soldats s'apprêtent à fusiller. Une larme chaude de
mes yeux, je ne trouve que ma chère écharpe pour l'essuyer. "À bientôt, ma mère,
nous n'allons pas tarder de nous rencontrer".

NB : toutes les opérations sont réelles

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