La maman
ef Ia patain
E film admirable est un événement comparable 4 ce qu’a
été en son temps L'AMOUR FOU, de Rivette, c’est-a-dire la
pointe la plus avancée de la tendance la plus constante et la
plus typique du cinéma frangais, celle de l'analyse psychologi-
que et de la spécul: mn morale, Pour en recevoir pleinement
la beauté et la profondeur, le spectateur doit faire la moitié du
chemin, accepter d'assister pendant plus de trois heures d’hor-
loge & une action quasiment inexistante charpentée par des dia-
logues ininterrompus, & un spectacle qui se nie tout en s'affir-
mant puisque les formes habituelles du film de consommation
courante y sont niées en méme temps que la magie qui s'y
dégage d'une souveraine utilisation du Verbe réintroduit la fas-
in du spectacle.France (1973).
Réalisation : Jean Eustache,
Scénario et dialogues : Jean Eusta-
che. Images : Pierre Lhomme. Mon-
tage : Jean Eustache et Denise de
Casabianca. Musique : Mozart, Otffen-
bach et chansons par Zarah Leander,
Damia,
Edith Piaf, Frehel, Marléne
Interprétation _: Bernadette Lafont
(Marie), Jean-Pierre Leaud (Alexan-
dre), Francoise Lebrun (Véronique),
Isabelle Weingarten (Gilberts), Jac:
ques Renard (I'ami), Jean-Noé! Picq,
Jessa Darrieux, Marinka Matuszewski,
Genevieve Mnich, Berthe Grandval.
210 minutes.
ENTRETIEN AVEC
JEAN EUSTACHE
— Au cours de votre conférence
de presse a Cannes vous avez dit
que le dialogue du film était entie-
rement écrit avant le tournage.
— Oui, Ie film était entiérement
écrit, au mot et a la virgule prés.
J'ai beaucoup coupé au tournage
et au montage, mais rien changé.
J'ai coupé une heure car j’al voulu
faire un film sortable; je ne vou-
lais pas aller jusqu’a cinq ou six
heures mais, si j’en avais eu be-
soin, je crois que le film aurait 66
meilleur, mals en méme temps
cela aurait été du suicide. J'al
coupé jusqu’au dernier moment
tout ce que je pouvais couper :
Vexpérience du montage m’
appris que si j'avais passé plus de
temps dessus, j’aurais peut-étre pu
gagner encore un quart d’heure,
‘vingt minutes, en gardant le film
tel que je le voulais. Mais quand
on enléve quelque chose dans un
film il ne faut pas Venlever soi-
méme, il faut que ce soit le film
qui le rejette peu a peu. SI on
passe assez de temps au montage,
le montage se fait tout seul...
— Est-ce que votre conception se
rapproche de celle de Rivette ?
— Crest trés différent. Le principe
de Rivette est fondé sur limprovi-
sation des acteurs. Mol je suls
trés_contre [improvisation Je le
dis & deux reprises dans le film
aucun mot n’appartient & l'acteur,
Ml respecte un texte, comme au
théatre, et la longueur chez moi
est la longueur de histoire. Sur
ce point je n’ai subi aucune
Influence et c'est méme pour aller
A Vencontre des expériences de
Miracle d'équilibre oU la plus minutieuse élaboration donne le
sentiment de la plus totale improvisation. Sur ces sommets ou
Eustache rejoint Bresson, la vraisemblance du détail se noie
dans une vérité plus haute, la justesse psychologique se dépas-
se dans l'authenticité de I'ceuvre d'art, dont la nécessité interne
devient soudain si lumineuse, si évidente qu'elle rejette impi-
toyablement toutes les critiques extérieures. Méme si le film,
tel que nous le voyons, n'est pas forcément la forme définitive
et unique qu’edt pu prendre I'ceuvre si sa gestation avait duré
plus longtemps (Eustache a, dans Ientretien ci-contre une éton-
nante formule sur le montage qui doit « se faire tout seul »,
comme un mirissement), force est bien d'admettre que le cri-
tique s'avére ici impuissant A émettre des jugements de cir-
constances et a justifier, si c’est le cas, son enthousiasme en
termes rationnels.
Esquissée dans LES MAUVAISES FREQUENTATIONS et LE PERE
NOEL A LES YEUX BLEUS, poursuivie plus confusément dans
LA ROSIERE DE PESSAC et LE COCHON, la démarche de Jean
Eustache est faite essentiellement d'une approche rigoureu-
sement objective des individus (je veux dire que I'auteur cache
soigneusement ses sympathies éventuelles), d'une observation
menée en continuité (ici le découpage n'a aucune raison d'étre,
aucun sens), d'une accession a un naturel qui n’a rien a voir
ni avec la vérité propre des comédiens ni avec la vraisemblance
comprise comme valeur filmique sacro-sainte. Elle rejoint ainsi une
forme supérieure de cinéma vérité (récemment entrevue dans
UN COUPLE MARIE) ol la vérité psychologique au niveau de
l'ceuvre globale se moque (tout en la garantissant a posteriori,
en quelque sorte) de l'exactitude matérielle des détails.
Faisant table rase de tout un cinéma qu'il brocarde au passage,
affirmant son admiration pour Bresson sans pour autant nier
son respect pour les grands cinéastes romanesques américains,
Y'auteur balaie du méme coup toute une société de confort et
de consommation que ses personages, porte-parole partiels
et partiaux, refusent eux-méme. Mais en méme temps qu'il dé-
dramatise, Eustache dé-moralise, si je puis risquer ce jeu sur
le mot : il se défend de condamner et de juger, se comporte
comme un parfait anti-moraliste, mais tout a la fois il est mené,
consciemment ou non, vers une attitude a-morale qui débouche,
si on l'y tire quelque peu, sur le nihilisme et I'anarchisme ; du
moins se sent-il au bord d'un gouffre puisqu'il ne refuse pas une
perspective chrétienne a ses personnages dé-moralisés et qu'il
admet qu’alors se pose le probléme de la foi, au moins en
négatif, d
scandale par une truculence verbale qui évoque
Céline, par un hédonisme qui fait songer & Henry Miller : en
vérité le scandale est dans la téte des spectateurs qui se sen-
tent démasqués par ce film et ne comprennent pas combien
leeuvre refléte un désarroi, une angoisse qui ne sont sans doute
pas propres a l'auteur. Si ce film est choquant, c’est parce qu'il
s'en suit parfois un traumatisme moral. Et si le réalisateur dit
encore qu’« il vaut mieux parler sérieusement du cul que pas
sérieusement de la politique », ce n'est pas seulement en.ma-
niére d'ultime provocation mais aussi pour affirmer qu’a son
sens les problémes individuels sont les premiers et les derniers
et que la vie et la société n’aident guére a les résoudre. Du
moins son film aide-t-il & les comprendre, a travers des per-
sonnages qui doivent le meilleur d’eux-mémes a la vibration
intérieure de trés remarquables comédiens.
Marcel MARTIN
Rivette que j’al tout écrit Jusqu'au
moindre mot.
— Oui, mais cela, il faut le savoir;
le naturel de votre mise en scéne
peut donner l'impression de la plus
totale improvisation.
— Je ne crols pas. Je crols que
le naturel au cinéma ne peut squérir que par un travail de répé-
tition : je ne crois pas que le
naturel de l'improvisation soit le
méme. Dans improvisation, I'ac-
teur est toujours un peu’ entre
deux chaises, entre lui et son per-
sonnage. Moi j'aime un semblant
de naturel qui n'est pas du tout
le naturel mais qui est le résultat
d'un travail de répétition, de mise
en scéne, de mise en place qui
concerne tous les films. Le nombre
des prises a été variable, de une
& dix, les plans longs n’ont pas été
les plus difficiles a réussir, deux
ou trois prises, ainsi pour le long
monologue final de Frangoise
Lebrun, c'est la premiere qui a été
la meilieure. Le film comporte assez
peu de plans, 500 & 700 peut-étre,
mais moins de 200 au tournage.
— La qualité d'écriture du dialogue
fait penser a Rohmer...
— La qualité d’écriture 7 Beaucoup
de gens me disent que c'est de la
Vieille littérature, de la mauvaise
littérature, du naturalisme : cette
qualité est trés discutée. Rohmer ?
Je ne sais pas, je ne suis pas tout
& fait d’accord. C'est une langue
parlée plus qu’écrite, dans la me-
sure oi il y a deux personnages
au moins qui ont le godt person.
nel de la parole, du verbe. C'est
Pourquoi je me’ suis efforcé de
créer pour chacun des personna-
ges une facon de parler particu-
liere, chacun avec ses mots, sa
syntaxe. J'ai beaucoup aimé
Rohmer il y a une dizaine d’années
mais depuis, que ce soit avec lul
ou avec la nouvelle vague, j'ai pris
beaucoup de distance. J’ai subi
des influences, reconnues ou non :
c’était le Rozier d'ADIEU PHILIP.
PINE et le Chabrol des BONNES
FEMMES pour mon premier film,
mais pour celui-ci, je n’en recon-
nais aucune (méme si elles exis-
tent) surtout pas Rohmer, méme
si c'est a lui qu’on me ‘attache
le plus.
— Et Bresson ?
— J'ai choisi Bresson comme par-
rain, en prenant Isabelle Weingar-
ten, la seule comédienne que je ne
connaissais pas, et en citant son
nom dans le film. C'est un des
cinéastes que je préfére, un de
ceux qui m’ont le plus influencé,
surtout PICKPOCKET, jusqu’a PICK-
POCKET.
— Jean-Pierre Léaud joue-til ici
Raturellement ou lui avez-vous indi-
qué son jeu. qui semble totale-
ment non réaliste ?
— J'ai écrit le film entiérement en
Pensant a lui et je n’imagine pas
que quelqu'un d’autre auralt pu le
Jouer. L'absence de naturel ne me
géne pas du tout au cinéma. Quant
au manque de naturel de Jean-
Pierre Léaud, notion qu'il faudrait
définir, il oblige les spectateurs &
Prendre une certaine distance par
Fapport a ce qu'il dit, a ce qu'il
fait, par rapport a son jeu, a son
personnage : cela permet de mieux
le voir puisqu’on ne se perd pas,
qu’on ne se tranquillise pas dans
ce naturel qui vous emporte. Ce
qu'on reproche a Jean-Pierre est
pour moi un éloge, car c’est ce
que j'ai voulu obtenir de tui. Je
crois que les gens tombent dans
un piége en reprochant 4 Léaud
son manque de naturel, ils ne
comprennent pas que tout est dans
ses soi-disant faiblesses et mal
dresses, que c'est ce qui permet
de faire comprendre [histoire que
Je raconte. En ce qui concerne
Frangoise Lebrun, je Tal prise
Parce que je la connaissais bien
et parce que je cherchais a éviter
toute identification entre elle et
son personage. Quant a Berna-
dette Lafont, le role a été trés dur
jouer pour elle: je ne voulais pas
qu'elle fasse son numéro habituel,
je pensais qu’on pouvait faire autre
chose avec elle.
— Peut-on considérer que l'un des
personages est plus directement
votre porte-parole ?
— Non, tous mes personnages, st
vous voulez, sont mes porte-parole,
mais comme tout est fait de con-
tradictions, ce sont les miennes que
je répartis, parce que si l'un des
Personnages était. mon _porte-
Parole, les autres auraient tort et
je ne sais pas si j'arriverais & étre
objectif : chacun d’eux porte quel-
que chose de mol.
— A la fin, pourtant, il semble que
vous donniez raison aux femmes.
— Oul, pendant la derniére heure.
Je voulais passer de la premiére
personne a la troisiéme personne.
Au début Jean-Plerre Léaud parle
@ la premiére personne et il est le
Personnage principal ; puls, insen-
siblement, j'ai voulu que la parole
Passe au personage de Francoise
Lebrun, alors que Jean-Pierre
Léaud ‘ne dit presque plus rien;
mais si on revoit le film, on peut
se dire que c'est Bernadette La-
font qui est le personnage princl-
pal d'un bout a l'autre, méme st
ce n'est pas elle qu'on voit le plus.
C'est un film qui n’a pas de per-
sonnage principal, je crois.
— Et I'ami de Léaud, ce person-
nage @ la fois fascinant et inquié-
tant, comment le situez-vous ?
— Clest un personnage auquel je
tenais beaucoup, mais que j'ai da
sacrifier en grande partie au mon-
tage. Il est le but @ atteindre pour
le personnage de Léaud. Il était
plus explicite avant. Je le quali-
ierais de véritable _aristocrate,
clest-a-dire assez dégoaté de la
société bourgeoise, donc ayant
pris ses distances, sans compromis
avec les gens, et restant au-dela
des autres, pas au-dessus, au-
dela...
— Vous faites dire A Léaud : « Je
n'ai pas la vocation de la vie. »
— Oui, j'ai été tras étonné d'avoir
écrit cette phrase : je me suls
demandé a qui j'avais pu la pl-
quer! Tout simplement, il s'aper-
gcit que la vie est trés difficile,
qu'il n’arrive pas a trouver une
Place confortable parce qu'll
refuse de jouer un certain jeu, de
faire semblant.
— Est-ce que c'est une clé pour
vous aussi, cette phrase ?
— Oul, c'est un truc que j'ai été
trés étonné de trouver sous ma
plume ! ¢a doit étre important
Parce que je Iai écrit sans y pen-
ser,
— Vous avez dit que ce film est un
peu le bilan de vos déceptions.
— Oui, depuis que j'aimais le
cinéma ‘et que je voulais en faire,
j'ai quand méme subi une dizaine
dannées de difficultés et de dé-
ceptions et j'ai essayé de renver
ser ce bilan, en faisant ce film sur
Vensemble de ce que j'avais res-
senti, aimé depuis dix ans : au
lieu de m'enfoncer dans mes pro-
blémes, j'ai essayé de m’en sortir
en faisant un film la-dessus.
— Alors que vos personnages de
femmes sont solides et saines, les
deux garcons semblent marqués
par une certaine impuissance psy-
chologique et morale devant la vie.
Est-ce exact ?
— lls sont peut-étre plus cons-
cients, tout simplement, que les
femmes. D’ailleurs Marie est plus
fragile qu'elle ne le laisse paraitre
et Véronika est plus forte qu'elle
ne le laisse paraitre dans la comé-
die qu'elle joue aux autres et
quielle se joue.
— Vos personnages de femmes
sont nettement plus attachants que
les hommes.
— Et pourtant on m’accuse d'avolr
fait un film misogyne !
— A la fin, Véronika semble reve-
nir A une’ conception plus bour-
geoise, plus traditionnelie en tout
cas, de l'amour.
— Chrétienne, si vous voulez, mals
pas bourgeoise traditionnelle.
Enfin, je crois, c'est ce qu'on m’a
dit. Mais cette scéne n'est pas la
fin : c'est la mise au jour d'un tas
de problémes cachés, une fagon
lyrique, pour Véronika, de faire le
point, encore que je ne la croie
Pas totalement sincére : elle est
trés consciente de la provocation
qu'elle fait. J'ai mes idées sur ce
point, elles ne sont en général pas
partagées par les spectateurs a la
premiere vision. A mon avis, Véro-
nika joue une comédie pour démo-
lir Jean-Pierre Léaud et Bernadette
Lafont ; c'est le personnage le
moins sincére qui solt, et c’est
Pourquoi j'ai voulu lui donner les
accents les plus sincéres, afin que
le public, comme les personnages,
se laisse « avoir » par elle. C'est
ce qui arrive d'ailleurs puisqu’on
écrit’ que c'est le personage le
plus émouvant alors qu’a chaque
instant sa dureté jalllit’ vraiment
tres visible c'est pourquoi
Alexandre est fasciné par elle et
se laisse avoir.
— Vous ne refuseriez pas _une
interprétation chrétienne du film ?
— Non, non, pas du tout. Il y a
beaucoup d’interprétations. Je nesais pas comment dire : la pré-
sence d'un dieu... Il y a l'idée du
bien et du mal, simplement, dont
Alexandre et Véronika sont tres
conscients : ils sont trés prison-
niers de cette morale ; Marie essaie
de ne pas en tenir compte, mais
elle arrive a fa subir quand mém
Je me suis rendu compte ai
depuis plusieurs années la pensée
va dans une direction tres tran-
quillisante, méme du coté des
oppositions et contestations, et j'ai
voulu faire table rase, revenir au
degré zéro de la conscience,
comme s’il n’y avait pas eu d’évo-
lution, et essayer de refaire tout
le chemin trés rapidement.
— Le film ne débouche-t-il pas sur
une morale aristocratique ?
— Non, non. Cela, c'est ce que
désirent certains personnages, peut-
étre. Le film débouche sur le
dégoat, c'est cela le bilan du film
et de la vie. Qu’on ne me parle
pas de « note d'espoir » a la fin :
Pour moi le monologue de Véro-
nika est une imposture. La vérité,
ce serait Marie seule sur son lit
et complétement usée et éteinte,
quant aux deux autres, ils contl-
nuent leur comédie grotesque avec
cette demande en mariage ridicule.
Cela explique le film... Il y a trois
grands films : J'Al LE DROIT DE
VIVRE, LES AMANTS DE LA NUIT
et A BOUT DE SOUFFLE, qui ra-
content la méme histoire : des
amants qui sont poursuivis et
assassinés par la société. Mais
mon film se situe dans un contexte
quotidien, et je ne pouvais pas
faire tuer mes personages par |
fics : ils sont prisonniers d’ew
memes et méme, socialement, ils
sont déja suicidés, surtout Alexan-
dre, qui entraine’ dans sa chute
Veronika, laquelle entraine Marie
la seule’ qui s’en tire, c'est l'ex-
amie d'Alexandre qui est partie &
temps en entrant dans la vie petite-
bourgeoise, & tort ou a raison,
mais c'est’ une vie dans laquelle
on survit, Les autres, ceux qui
veulent un peu plus, vont vers
leur chute. Ils ne songent pas &
partir ailleurs, a entreprendre un
voyage quelconque, ils _restent
dans leur chambre, comme Kafka.
Cette vie dans les bistrots est
banale, mais vraie.
— Vous condamnez la société
petite-bourgeoise incarnée par Gil-
berte 7
— Je ne condamne pas, je montre
que c'est une voie, pas trés bril-
lante, mais les autres personnages
Re vont pas non plus vers la lu-
migre : je constate deux fagons
d'échouer.
— Vous débouchez sur un certain
nihilisme...
— Qu'est-ce que ca veut dire,
nihilisme. « Le voyage au bout de
la nuit », ¢a n'est pas tres gai!
‘Avec ce que sont mes personnages
et ce quils font, il n'y a pas de
sortie pour eux, en effet. Mais
'aimerais qu'on ‘se rende compte
que dans Ia civilisation actuelle, Il
n'y a de sortie pour personne. On
peut faire semblant. Je |'ai fait dire
un grand nombre de fois dans le
film : ily a ceux qui vivent et ceux
qui font semblant.
— Peut-on voir une clé freudienne
dans votre titre ?
— Non, car jfaurais dit la mere.
J'ai plusieurs explications, mais je
‘ai pas a les dire... Ce sont les
deux péles de la condition de la
femme, Dans un sens plus large,
c'est aussi la terre sur laquelle on
vit.
— Vous avez dit qu’« il vaut mieux
parler sérieusement du cul que pas
sérieusement de politique
— Oui, c'est d'une fagon délibérée
que je n’ai pas voulu faire un film
& sujet politique : j'ai voulu faire
un film politique sans parler de
politique. Parler de sexe, ca fait
partie des provocations...
— Ge que vous faites dire sur Sar-
tre est plutét désagréable...
— Oui, mais ¢a n'est pas sérieux,
comme ce qui est dit au début sur
le M.LF. : plus tard, Véronika
exprime ‘des revendications qui
sont tout a fait M.LF. et qui ne
sont pas tournées en dérision. Ce
sont des piéges pour les specta-
teurs qui prendraient le film au
premier degré : c’est tant pis pour
eux. Le film juge les spectateurs
autant qu'il peut étre jugé par eux.
Propos recueillis au magnétophone
par Marcel Martin