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CoMecsion den tudes 9 Aupusinicnnes “hie Aanignile ma Yvette DUVAL CHRETIENS D’ AFRIQUE A L-AUBE DE LA PAIX CONSTANTINIENNE Les premiers échos de la grande persécution Collection des Etudes Augustiniennes Série Antiquité - 164 Yvette DUVAL CHRETIENS D’AFRIQUE A L’AUBE DE LA PAIX CONSTANTINIENNE Les premiers échos de la grande persécution FC TIT. ARCHEOL. CRIST, -BIBLIOTEGA - Glora dings ah bs. 13) Scattale Kv 5 Piano N. a Ag Institut d’Etudes Augustiniennes PARIS 2000 Ouvrage publié avec le concours du Centre National du Livre ‘et de I' Université Paris XII-Val-de-Marne LES LIEUX CHRETIENS 40s de la situation a Abitina en 304 et a Cirta en 305 | évoquent I'existence dans ces villes de vastes lieux de réunion qui étaient probablement, vu le contexte dans les deux cas, des édifices cultuels secondaires, & c6té de I'église épisco- pale. Il en allait sans doute de méme dans les autres cités africaines qui abritaient une importante communauté chrétienne. 2 — LE MATERIEL LITURGIQUE DES EGLISES (vases, luminaire, livres) On connait en Afrique, pour la période étroite entre 303 et 305 (2) 2, trois trésors d'église attestés par nos sources, méme si, pour certains, ils ne sont évoqués qu'allusivement. L'inventaire des bien: js en 303 dans la basi- lique de Cirta donne une des rares listes détaillées pour l'Afrique de ce qui constituait le trésor des évéques destiné A faire vivre leur communauté, clergé compris. Celui de Cirta comprenait quelques objets destinés au culte proprement dit, de tres nombreux ustensiles liés & I'éclairage de la basilique et enfin une impressionnante quantité de vétements ainsi que probablement des denrées alimentaires conse dans les dolia et orcae découverts dans Ja salle A manger. De méme A Abthugni, d'aprés les allégations de son accu~ iteur, I'évéque Felix disposait en 303 a la fois de nourritures et de livres eux et saints : on ne possdde sur ce trésor que des allusions, non comme un inventaire ; néanmoins, pour étre crédibles, ces allusions se détre au moins vraisemblables. Enfin Optat évoque en quelques résor de l’église de Carthage au moment du départ et de la mort de irius, peu d’années aprés la persécution 3, yr laissé par Mensurius en quittant Carthage sor de Carthage laissé par I'évéque a la garde des Seniores, Jement qu'il comportait de tres nombreux « ornements » d'or et , 1, ex auro et argento ... plurima ornamenta). Cependant les dont s'accompagne le récit du départ de Mensurius, puis ‘martyrs ’Abitina devant le proconsul est datée du 12 février 304, ‘emonter & la fin de 303. Sur la date controversée de I'élection -« concile » de ses consécrateurs, voir supra, chapitre 3, § B, la note suivante. Seca chal 44, popes dot omc Felix d’Abthugni. La date de la succession de Mensurius 406 INSTALLATION MATERIELLE de sa succession, permettent d'évaluer ce trésor, D'une part Optat précise que le Carthaginois ne peut ni l'enterrer (pour le cacher sur place) ni l'emporter avec lui, ce qui dénote la taille importante des objets et surtout leur trés grand nombre qui est confirmé par le fait qu'il en dresse un inventaire confié a une vieille femme. Quant a la valeur et la richesse des piéces « ornées » qui composent le trésor, elles ressortent de la conduite des Seniores qui en étaient dépositaires : dans l'incapacité de le rendre, comme prévu, au succes- seur de Mensurius parce qu’ils l'avaient entre temps dilapidé 1, ils choisirent Ja solution de rompre la communion ayec I'Eglise. Méme si l'on peut douter que ce fat la seule cause (et la plus déterminante) de l'engagement des Seniores dans le schisme, il n'en reste pas moins que l’acte d'une extréme } gravité que représente cette rupture atteste en lui-méme 1'énormité de leur détournement, et donc I'insigne valeur du trésor. Au demeurant, cette tichesse en « ornements » de la communauté carthaginoise n'est pas pour surprendre quand on mesure celle de 'Eglise de Cirta au méme moment (voir infra). b - Le trésor d'Abthugni Ona vu ci-dessus (chapitres 6, § C et 7, § A), a propos d'Abthugni, que le diacre Ingentius, au moment od s'ouvre T'enquéte sur la traditio de Felix, rendit visite 4 Caecilianus, ancien duumvir de la ville en 303, pour obtenir de : Jui une lettre qui permettrait d'accuser I'évéque de traditio lors de Ja persé- cution. Le vieux magistrat devait répondre a une soi-disant requéte de Felix qui était censé demander a son ami Caecilianus de lui adresser une lettre qui Texonére, en prétextant qu'ils avaient été brdlés en 303, d'avoir a rendre onze codices « précieux et divins » qu'il détient et ne veut pas restituer a leur propriétaire, lequel ne peut étre que I'Eglise d'Abthugni (... codices accepi praetiosos deificos XI quifa]que me nunc convenit ut illos restituam, dic quod anno magistratus tui eos exus[s|eris, ne reddam illos, 1. 108-109). Mais dans la lettre qu'il consent a dicter, comme diailleurs dans sa déposition devant la curie de Carthage, I'ancien duumvir se contente de rapporter les saisies qu'il a réellement effectuées en 303, et il ne cite que des epistoli salutatoriae, en plus de la cathedra de la basilique. Sa lettre ne permet donc pas de confondre I'évéque, aussi fut-clle « complétée » par Ingentit 1 Ibid., 1, 18, 2, faucibus avaritiae commendatam ebiberant praedam : le verbe est doute une image destinée a dépeindre l'avidité assoiffée des Seniores. eS LIEUX CHRETIENS 407 dans cette interpolation qui Tapporte un faux di " dialog ili i ex aves Felix jste avant ls sasis de 308, nest ereer gee des onze codices praetiosos deificos qui auraient &é Geauencse eve depuis la persécution et qu'évoque sa Evan E = prétendue requ faussaire énumére, parmi les écrits con; quéte. En revanche, le u servés dans I'église que Felis i accepté de livrer aux paiens en 303, des libri placés aie ta due Pics codices supra lapidem, et de son c6té, le donatiste Maximus évoque devant la curie de Carthage les scripturae apportées par Galatius 1, La machination ourdie par les schismatiques est centrée sur la livraison des Ecritures saintes parce que c'est en effet I'argument le plus important & leurs yeux pour disqualifier l'évéque d'Abthugni en tant que consécrateur de Caecilianus de Carthage. Cependant, pour étre crédible au moment od seengage l'enquéte sur Felix, la description faite par Ingentius des instal- lations et des livres contenus dans la basilique en 303 reflétait certainement la réalité encore connue des témoins quelque dix ans apres les faits, faute de quoi le faussaire efit été contredit et démasqué. De méme, les onze codices urs précieux évoqués dans la prétendue missive de Felix & son ami devaient étre a tout le moins vraisemblables pour convaincre Caecilianus d'aider soi- disant I'évéque A les voler, méme si ce larcin est une pure invention du faussaire qui ne trompe d'ailleurs pas le vieux duumvir. On doit en déduire que le trésor d'Abthugni contenait donc au moins plusieurs codices précieux, en plus de la chaire ; toutefois les allégations du faussaire ne signifient pas que l’équipement liturgique de cette église se limitait & quelques livres saints. On pourrait d'abord envisager que d'autres objets de prix aient été livrés en 303 sans I’aval de Felix, d’od le silence de ses accusateurs ; mais il est surtout probable que le magistrat paien, appliquant édit impérial oe ma Testrictive par bienveillance envers lévéque, a volontairement limité sa saisic aux livres 2: en effet, quoi qu'il en soit de la réalité que seal Vexpression epistolae salutatoriae, il est certain que ces « 1 & a ase ont été tirées de Ia basilique et que le persécuteur Jes a Fegtek © Ot comme « écrits saints », comme les Ecritures, en soplleatien an impérial, Ainsi les accusations fondées ou inventées co! ee : Jes « lettres de 1. Voir supra, chapitres 6 (§ B, 2) et surtout 7 (§ A; 2, ©) 60 rate somatic salut jar renrgsentent peutéte le live liturgigue Comm) #9 MONS ga valet ee adre, on ne peut savoi nportée pot ees cua eto Ye Tautonité, ou encore & cea oe arn 2 Surtes Hens entre Coccilianus et Felix et pus largement les Abthugni avec les paiens, voir chapitre 7, § B, 2. 408 L'INSTALLATION MATERIELLE d'Abthugni ne nous éclairent que partiellement sur le trésor de cette petite ville de Proconsulaire. c¢ — Le trésor de Cirta En fait I'Eglise de Cirta est la seule dont I'équipement liturgique en 303 est connu en détail : les objets sacrés et de grand prix constituant son trésor sont en effet dénombrés dans les Gesta du procés de Silvanus en 320, a la fois dans l'inventaire des saisies dressé par Munatius Felix lors de la persé- cution et dans les dépositions des témoins au procés qui précisent les livrai- sons dont l'évéque alors sous-diacre s'était rendu coupable. On a vu au chapitre 2 que les saisies opérées par le curator rei publicae en 303 se déroulent en deux temps, d'abord dans la « cathédrale », puis dans les maisons des lecteurs oii se trouvent pour la plupart les livres saints. Au total, la partie du trésor directement liée aux célébrations | comprend d'une part tous les objets proprement liturgiques, parmi lesquels 4 la fois des vases précieux et les Ecritures, et d'autre part des ustensiles divers et nombreux destinés a I'éclairage de 1'édifice cultuel. L'inventaire de 303 commence par l'énumération de ces deux séries d'objets liés aux cérémonies dans l'église : . contra scribente Victore Aufidi in brevi sic : calices duo aurei, item alices sex argentei, urceola sex argentea, cuccumellum argenteum, cernas argenteas septem, cereofala duo, candelas breves aeneas cum ‘ernis suis septem, item lucernas aeneas undecim cum catenis suis 2. LEglise cirtéenne possédait huit calices, deux d'or et six d'argent, ainsi que six aiguiéres et un cucumellum, tous également d'argent, Ce matériel liturgique apparait certes modeste comparé aux trésors des églises romaines dotées par Constantin quelques décennies plus tard 3 ; cependant a la fois le nombre des objets et les métaux précieux qui les constituent prouvent que calices et aiguiéres représentent bien un trésor et pas seulement un équipe- ment utilitaire, ce qui est également le cas du trésor de Carthage laissé par Mensurius 4 la méme époque. Les calices et urceola sont des piéces bien documentées dont on connait plusieurs mentions et dont on posséde de nom- 1 Hormis done les biens de consommation courante également saisis et inventoriés : en effet, outre les objets liturgiques, l'inventaire énumére, provenant sans doute des salles annexes de I'église, des vétements d'usage destinés, vu leur nombre, aux distributions, et des jartes qui devaient contenir des denrées alimentaires : je reviens au § suivant sur ces biens purement matériels nécessaires tant & la vie du clergé qu’a celle de 1a communauté. 2 Ziwsa, p. 187, 1. 4-8. L’énumération des vétements suit, 1. 8-10. 3 Voir PreTRI, Roma christiana, t. 1, p. 77sq., surtout p. 84-86. ES LIEUX CHRETIENS 409 preux exemplaires tant d'or que d' Ja seule occurrence du rae Bio ah Ree les Gesta sont en effet retrouvé dans les trésors des petits récipients ronds en ee oe a en argent : certains apparaissent comme de simples chaudrons de aaa réduites tandis que d'autres, en plus grand nombre, sont dotés d'un lon manche souvent décoré (fig. 4) 2. Au demeurant il est probable que. as Téglise, ces ustensiles (avec ou sans manche) servaient a la présentation et non A la cuisson des ingrédients qu'ils contenaient, c'est pourquoi on pourrait traduire le mot cucumellum par « cassolette » 3 Quant aux différentes pices du luminaire, il s'agit de suspensions avec leurs chaines, de lampes avec leurs supports et de candélabres, toutes piéces dont on a retrouvé de nombreux éléments dans les trésors qui nous sont parvenus. L'inventaire de 303 annonce d'abord sept /ucernae d'argent aux- quelles s'ajoute une huitisme du méme métal que Silvanus a trouvée dans la piblioth@que et qu'il livre de ses mains (cf. supra, chapitre 2, § A) : il s'agit de précieuses lampes & huile 4 un ou plusieurs becs destinées a étre posées sur un meuble ou sur un support spécifique. Les cereofala sont, comme le nom l'indique, des porte-cierge terminés par une pointe sur laquelle se fixait le cierge : certains sont de grands flambeaux en pied reposant sur le sol, mais fl s'agit plus souvent de candélabres qui pouvaient étre, par paire comme ici, disposés sur I'autel (fig. 7). Le manuscrit évoque ensuite sept candelae breves aeneae cum lucernis suis dont la description surprend. Le mot candelae qui désigne habituellement des chandelles, stemploie aussi pour un ertain type de lampes constituées en fait d'un vase en feuille de métal dans Tequel on plagait un bol de verre contenant I'huile 4. A Cirta cependant, aise, s. v. ; mais on en connait deux occurrences féminin, cucumella (cf. TALL, s. v ; it avec deux c dans le manuscrit de Cormery. Pest tabla! san né a ces bols manches est plutot celui de patdres: fautit en uire que le terme cucumella (ou Tum) s‘applique plut6t & des petits chaudrons 2 Les i ine permettent pas d'etre plus précis. Soph oe pet toca TA Pe xamonow.o0, Les ustensites déciairage on mesa! 2 Vépoque paléobyzantine, ue A Université Paris I, en cours de publication dans la Bibliotheque de Ta mot avec cette signification se reouve dans le ferme empranté au a injra. Dane le bole de vere large onveres posés dans la a : ‘ieu de la surface de V'huile par une stallique, la méche était maintenue au mi meétal reposant sur les bords du bol. “phS LIBUX. CHRETIENS 409 ux exemplaires tant dor que dar, : Bent (fig. 5). Au contraire, les o 3 , les poule occurrence du nom cucumelium; le mot est u Ai a ae p simples chaudrons de dimensions yéduites tandis que d'autres, en plus grand nombre, sont dotés d'un long Manche souvent décoré (fig. 4) 2. Au demeurant il est probable que, dans Téglise, ces ustensiles (avec ou sans manche) servaient a la présentation et non Ala cuisson des ingrédients qu’ils contenaient, c'est pourquoi on pourrait traduire le mot cucumellum par « cassolette » 3, Quant aux différentes pigces du luminaire, il s'agit de suspensions avec Jeurs chaines, de lampes avec leurs supports et de candélabres, toutes piéces ‘dont On a retrouvé de nombreux éléments dans les trésors qui nous sont parvenus, L'inventaire de 303 annonce d'abord sept Iucernae d'argent aux- "quelles s'ajoute une huitiéme du méme métal que Silvanus a trouvée dans la Dibliotheque et qu'il livre de ses mains (cf. supra, chapitre 2, § A) : il s'agit de précieuses lampes & huile A un ou plusieurs becs destinées a étre posées ir un meuble ou sur un support spécifique. Les cereofala sont, comme le n l'indique, des porte-cierge terminés par une pointe sur laquelle se fixait ¢ : certains sont de grands flambeaux en pied reposant sur le sol, mais jit plus souvent de candélabres qui pouvaient étre, par paire comme ici, sur I'autel (fig. 7). Le manuscrit évoque ensuite sept candelae “sy aeneae cum lucernis suis dont la description surprend. Le mot lae qui désigne habituellement des chandelles, semploie aussi pour un ype de lampes constituées en fait dun vase en feuille de métal dans on plagait un bol de verre contenant Vhuile 4, A Cirta cependant, Thais on en connatt deux occurrences au féminin, cucumella (cf. THLL, s. v.) dans le manuscrit de Cormery. t Sail MGomné a ces bols A manches est plutOt celui de patdres :fautil en Pie terme cucumella (08 lum) s'applique plutOt & des petits chaudrons ? Les is ‘tent pas d’étre plus précis. f i a ogra TM) aes oU, Les ustensiles d’éclairage en métal @l'époque paléobyzantine, a !Université Paris I, en cours de publication dans 1a Bibliotheque de TLe mot avec cette signification se retrouve dans le terme cemprunté au ‘large ouverture posés dans a de 1a surface de Ihuile par une +t voir infra. Dans les bols de verre a L'INSTALIATION MATERIELLE Vépithete breves appliquée a ce type de lampe n'a guére de raison d'étre dans Je contexte. C'est pourquoi je pense que, dans le manuscrit des Gesta, on doit lire les deux termes candelas breves comme une déformation graphique du mot candelabra , le glissement du dernier a au wu de breves expliquant l'avatar final de ce mot, au prix de quelques rares lettres ajoutées pour faire sens 1, La phrase décrit clairement ici non pas des lampes « courtes » ni d'ailleurs des lustres (comme traduit Blaise), mais des supports de bronze sur lesquels on posait une ou méme plusieurs lampes : dod Ja précision qui suit le nom, cum lucernis suis, et qui atteste qu'il s'agit bien ici de sept pieds de lampes, ustensiles bien représentés dans Jes trésors (fig. 7). Enfin Tinventaire dénombre onze lucernae aeneae cum catenis suis ; une telle expression pourrait désigner deux types de lucernaires qui sont l'un et l'autre bien documentés. On connait de simples lampes souvent assez grandes qui sont dotées de chaines, généralement trois, car elles sont destinées a étre suspendues dans l'église, et non posées sur un meuble ou un support (fig. 6). Mais on pourrait aussi penser a des polycandela, plaques de bronze circulaires ou parfois rectangulaires, tres largement évidées par des découpes décoratives, dont les bords ou la couronne extérieure étaient percés de trous réguligrement espacés dans lesquels on disposait des godets de verre prolongés a leur base par un long appendice que l'on engageait dans. les trous du polycandelon pour maintenir en place les lumignons. Or l'ensemble — la plaque de bronze garnie des godets de verre remplis d'huile — était suspendu par des chaines, constituant ainsi un véritable lustre (fig. 8). En vérité le ‘and nombre des Jucernae a chaines saisies 4 Cirta, onze, fait plutét penser ie la description concerne des lampes suspendues dans basilique et peut- tre aussi dans les salles annexes ; mais s'il s'agit de onze polycandela, on Pourrait en inférer que les locaux cultuels de la capitale numide étaient de yastes dimensions. Il faut ajouter A ce trésor la piéce d'argent que Silvanus est accusé en 320 d'avoir personnellement recherchée pour la livrer, en méme temps qu'une lampe. On a vu (supra, chapitre 2) que la nature de cet objet fait probleme car il est nommé, selon les interventions consignées dans les Gesta, tantot capitulata, tant0t tabula ; j'ai tenté de montrer qu'il ne peut en tout état de cause pas s'agir d'un ou plusieurs petits chapiteaux d'argent, et que le terme Loy Dans Ie méme sens, mais sans rectifier la lecture, le TALL, s. v., col. 232, commente ce “np passage des Gesta candela ponitur pro candelabro. UX CHRETIENS au 5 lata est sans doute une déformation de capsulata ; le mot, qui est un aad Pa de capsa, désignerait un petit coffret d'argent comme les . tees tc # ae plusieurs ; mais, vu l'autre nom de tabula qui est ireciasune ren v , il s' agirait plus pre isément d'une boite ts plate : on Rercen fut ieee Bou un livre saint, d'autant plus que la capsulata Bee plusieurs ee le Thour €véque dans la bibliotheque !, B. Bischoff Bee une Be lices (qu'il dit is antiques et paléochrétiens ») revétus de pees i ites de plaques d'ivoire, ma si de métaux précieux ‘or et argent, ornés de gemmes, perles mées ; l'auteur précise que « ces reliures étaient exclusivement réservé aux livres liturgiques les plus solennels », mais les exemples chrétiens qu'il en donne sont tardifs, au- cun ne date de l'époque de la grande persécution 2. D'od l'importance de cette mention des Gesta si mon interprétation (fondée uniquement sur le nom de tabula donné Ala capsulata) s'avérait exacte. Cet éventuel étui précieux pour un livre renvoie a la deuxitme compo- sante du matériel liturgique de Cirta, les divers écrits nécessaires aux célé- brations. Or les livres saints saisis par les hommes de Munatius Felix en 303 sont remarquablement nombreux, et ils attestent 4 nouveau la richesse et le développement de I'Eglise cirtéenne 3. Or les écrits livrés 4 Cirta sont tous désignés, 4 une exception prés, par le nom de codices qui en effet domine & cette €poque od le codex constitué de cahiers de feuilles pliées est devenu « Ja forme habituelle du livre » 4. De la basilique méme, les clercs livrent un seul ouvrage, mais trés volumineux : le format des codices est en effet variable et dépend du contenu et de la destination des manuscrits 5, On ne 1 Pour la discussion de ces diverses hypothéses sur la nature de Yobjet, cf. supra, au chapitre 2, § A, 1 et surtout 2. : 2 en Serene de VAntiquité romaine et du Moyen Age occidental, p. 33 et 38. ‘Lanteur soutigne povttan tqpe@ii- api quel ciliusicpides livzes otis eas (0 plus anciens exemplaires proviennent en Occident ditalie et d'Afrique dy Nox) zest a 1'6poque de Diocletien, et qu'un siécle plus tard, saint Jéréme s'indigne a a a 3. Sur cet aspect de la gaisie de 303, en aut le role des sons-diacses et des lectew i i it etc. at : an ogee aa aon ea toreReLLE, Vocabulaire comes, Répee u » op. cil. P- z Des a méthodique caer francais relatifs aux manuscrits, P iain tai ee «livre formé de feuilles pliées en deux et assemblées en 2 ee aussi supra, chapite 7, § As 2, ete: SPP be Bas ‘codices sont les Bibles en un B. BIscHoFr, op. cit., p. 31-32, précise que Jes plus gré pene anciens qui seul volume’: Pauteur cite les deux exemplaires 1es plus 412 L'INSTALLATION MATERIELLE sait pas ce que représente le gros codex cirtéen conservé dans 1'église, mais c'est sans doute en raison de sa taille, et donc de son poids, qu'il n'avait pas été transporté dans la maison d'un des lecteurs, comme le furent tous les autres livres qui appartenaient A 1a communauté 1. Sept de ces maisons furent visitées, parmi lesquelles six renfermaient des codices ; Eugenius en « apporta » (protulit) aux fonctionnaires paiens quatre, Felix cing, Victorinus huit, Proiectus cing grands et deux petits, et la femme de Coddeo six ; quant a Victor le grammairien, il livra deux codices et quatre quiniones. Le terme quinio désigne un cahier composé de cing bifeuillets, soit dix feuilles ou vingt pages 2: en l'occurrence, ce nom indique que Victor détenait quatre livres saints plus petits que les codices puisque constitués d'un seul cahier. Linventaire ne précise évidemment pas ce qui fait la différence entre ces types d'ouvrages, et il est impossible de définir avec certitude le contenu des uns et des autres. Cependant on sait qu'il existait, par exemple en Irlande, des petits « évangiles de poche » tenant dans un cahier unique 3 ; d'autre part, si la Bible était « habituellement copiée dans des volumes de format grand folio quand elle est entiére », elle pouvait I'étre « livre par livre, en tomes de format in 4° » 4. Au total, I'Eglise de Cirta possédait donc, outre ces quiniones, un ensemble de vingt-six codices, dont un trés gros, ce qui ne constitue certes pas une riche bibliothéque, mais représente un important matériel liturgique destiné aux lectures lors des célébrations. On peut dailleurs penser que ces livres saints étaient habituellement disposés dans les armoires de la bibliothéque puisque les Gesta soulignent que le curateur, lors de sa perquisition, a trouvé ces derniéres vides 5 ; le coffe, arca, disposé 320mm et 505 x 340mm. Mais il n'est pas assuré que l'église de Cirta en 303 ait possédé ce type d'ouvrage. 1 Z1wSA, p. 187, 1. 24-29. Pour le récit des visites aux maisons des lecteurs, ibid., p. 188, 1. 3.30. 2 MUZERELLE, op. cit., p. 95. Ces « quinions » portent aussi les noms de quinternions ou quinquennions. 3 BISCHOFF, op. cit., p. 27. L'auteur souligne d'autre part que la plupart des manuscrits irlandais sont constitués de cahiers de cing doubles feuilles, tandis que dans les autres manuscrits, le quaternio , cahier 4 quatre doubles feuilles, est le plus répandu. A noter que le lecteur Proiectus détenait des codices de deux formats (maiores et minores). 4 BISCHOFF, op. cit., 33. On pourrait aussi envisager que le gros codex conservé dans la basilique ait été une Bible entitre, les quiniones représentant des parties du Livre saint. Mais ces petits ouvrages en un cahier pouvaient avoir bien d'autres contenus. 5 ZiwsA, p. 187, 1.15-16. Sur le coffre derriére lequel Silvanus a trouvé deux pieces d'argent quiil a livrées, cf. plus haut et supra, chapitre 2, § A, 2. LES LIEUX CHRETIENS 413 dans l'une des salles de la bibliotha que servait peut-étre A enfermer | _yolumes les plus précieux. Au début de la persécution, les livres nec ae is en sfireté dans les maisons des lect al trop impor eur ee Nae ITs, sauf le gros codex, trop impor- iS BIENS DE CONSOMMATION Dans un q F des bens des Elses qui provi eon a ae remplir les devoirs du clergé envers k aa pecs con estinéels Liauteur définit l'origine de ces dons eee d qui constituent certes une sorte de tré- Sor (arcae genus est), mais ne sont pas le produit d'une taxe — qui serait par exemple prélevée sur les futurs baptisés Pour leur entrée dans la religion chrétienne : les dons sont volontaires et libres, jamais imposés avec un montant et une date de paiement fixés comme une honoraria summa ; de ce fait ils représentent de la part des donateurs un « dépét de piété ». Quant & Tutilisation de ce trésor (qui n'inclut pas I'équipement liturgique), Tertullien précise qu'il n'est destiné ni a des banquets ni A des beuveries entre fidéles, mais qu'il sert A nourrir et ensevelir les pauvres parmi lesquels il énumére les enfants sans biens ni parents, les vieux serviteurs sans travail, les naufragés, les condamnés envoyés aux mines ou dans les fles, et les prisonniers dans les gedles. Ce traité de Tertullien datant de 197-198 atteste que les églises afticaines géraient dés cette époque des biens monnayables, et il avertit que Jes denrées alimentaires et les sommes d'argent qui les constituent ne doivent pas étre détournées de leur destination qui est de permettre 'évéque de remplir le r6le social et caritatif de 1'Eglise envers les plus démunis. a — Les denrées alimentaires Or un siécle plus tard, nos sources Jiées A la persécution évoquent quelques-uns de ces biens qui sont aux mains de Le: caren ace les bAtiments ecclésiastiques. On a wu plus haut que la lettre de = Btiam si quod arcae genus est, non de 0 See fediccmn inusquisquestipem ; it apponit, Nam nemo ‘Quippe non epulis inde dis humandisque et ibus iam otiosis, item 1 Apologeticum, 39, 5-6 (DEKKERS, oe - honoraria summa quasi redemptae religion ‘menstrua die vel cum velit a aoe i ipl copie a dee nec potacilis ree vie arentibus desta Fiamgue] sonst ey TABLE DES MATIERES 5323 Chapitre 8. « Les liewx oit les chrétiens s'assemblent > . A) L'EGLISE EPISCOPALE ET SES ANNEXES .. 1 —L'ensemble épiscopal ... 2.-Les dénominations de I'église épiscopale a—Les périphrases officielles, « lieu de réunion », « lieu des pritres » b—Les noms utilisés par les chrétiens : basilica, domus ... 3 —Le probléme particulier de la « cathédrale » de Cirta ... a—Un édifice sGrement épiscopal désigné comme Casa maior b —S'agit-il de la « cathédrale » initiale ou de la basilique provisoire ? c—La Casa maior et le lieu de la réunion du concile de Citta .. B) MEUBLES ET AMENAGEMENTS INTERIEURS DE LA BASILIQUE ... 1—Le congestus cleri .. 2-La cathédre, le synthronos 3 —Un pulpitum ou une table de pierre (super lapidem codices) C) LES TRESORS ET LES BIENS DES EGLISES ... 1 —Les lieux de culte secondaires, les églises funéraires, les domus ... 2.—Le matériel liturgique des églises (vases, luminaire, livres) a—Le trésor laissé par Mensurius en quittant Carthage b—Le trésor d’Abthugni c—Le trésor de Cirta 3—Les biens de consommation .. a—Les denrées alimentaires b—Les vétements ... c—Les sommes d'argent CONCLUSION .. Fig. 4 — Patéres manches Fig. 5 — Calice et aiguitre Fig. 6 — Lampes a suspendre

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