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Preuve de La Filiation
Preuve de La Filiation
Jean Pineau
Les Cahiers de droit, vol. 22, n° 2, 1981, p. 337-346.
URI: http://id.erudit.org/iderudit/042439ar
DOI: 10.7202/042439ar
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Jean PINEAU *
In adopting Bill 89, the National Assembly, while retaining most of the
wording of the rules proposed by the Civil Code Revision Office, has changed
their order and arrangement. This may entail substantive alterations.
The first part of this paper shows that, on a first reading at least, the new
provisions display some consistency.
The new provisions also purport to abandon the concept of legitimacy. This,
it might be claimed, entails the abandonment of marriage itself. Yet, not only
does the new Code preserve marriage, but it also denies recognition to the union
de fait. Neither have the presumption as to the husband's paternity, or the
disavowal of children, been eradicated from the new provisions.
The paper concludes by foreseeing many difficulties in the application of
the new rules as to the proof of paternal filiation.
Pages
La législation nouvelle présente une apparente cohérence 339
1.1. Preuves extra judiciaires 340
1.2. Preuves judiciaires 342
La législation nouvelle présente une certaine incohérence 344
2.1. « La filiation tant parternelle que maternelle se prouve... » d'une seule et même
manière 344
2.2. Le concept de légitimité implique que la maternité légitime et la paternité
légitime soient indivisibles et suppose donc que l'enfant ait été conçu par le
mari. D'où la nécessité de la présomption pater is est 346
Dans le court laps de temps qui nous est accordé pour traiter de la
filiation, seules quelques idées générales peuvent être dégagées et seules
quelques questions peuvent être posées. Et il est à peu près certain que les
réponses seront incertaines.
Tout d'abord, il est assez remarquable que le texte de la Loi 89 quant à
la filiation est tout à fait semblable — d'une façon générale — à celui du
Projet présenté par l'O.R.C.C. À l'égard de ce dernier projet, nous
bénéficions des commentaires de l'Office qui l'accompagnent. Pour ce qui est
de la loi, nous « bénéficions » uniquement du discours politique que nous
trouvons dans le Journal des Débats, tenu dans le cadre de la Commission
permanente de la Justice, le lundi 15 décembre 1980: il était environ 21h 15
lorsque le sujet fut abordé et 23h lorsqu'il fut épuisé : sans doute est-ce la
raison pour laquelle le débat nous éclaire assez peu.
J. PINEAU Loi 89 339
3. Art. 579 : « La seule reconnaissance de maternité ou de paternité ne lie que son auteur ».
J. PINEAU Loi 89 343
C.c.Q.) : cette disposition nous paraît bien théorique, car pour réclamer un
état autre que celui qu'on possède déjà, il est évident qu'on ne peut pas éviter
de devoir détruire l'apparence.
Nous avons donc une législation cohérente, tout au moins apparemment.
L'est-elle réellement?
C'est dire que lorsque le titre de naissance indique que tel enfant a pour
mère telle femme mariée et pour père son mari, la présomption de l'article
574 C.c.Q. ne sert strictement à rien : le mari n'est pas le père présumé, il est
le père. Si donc nous devions être cohérent, nous devrions dire que les
articles 581 C.c.Q. et suivants relatifs au désaveu sont inapplicables puisqu'ils
concernent le « père présumé » visé par l'article 574 C.c.Q.. Il est évident que
cela n'a aucun bon sens puisque l'action en désaveu est conçue d'abord pour
le mari, même si aujourd'hui la mère peut également l'exercer.
Nous devons donc dire que le « père présumé » de l'article 581 est celui
qu'indique le titre et celui qu'indique la présomption de l'article 574 C.c.Q.
Mais si nous disons cela, qu'advient-il lorsque le titre indique pour mère
une femme mariée et pour père un homme autre que le mari? Cet homme
étranger à la famille pourrait-il être le «père présumé» auquel l'article 581
C.c.Q. accorde une action en désaveu? La cohérence l'exigerait. Et pourtant
le père présumé visé dans cet article 581 est vraisemblablement le mari de la
mère, celui-là même qui est également visé dans l'article 574 C.c.Q. Cela est
d'autant plus probable que l'article 588 C.c.Q. permet à toute personne, y
compris le père, de contester la filiation s'il n'y a pas conformité entre titre et
possession d'état ; s'il n'en était pas ainsi, ce « père » serait curieusement
armé de deux actions !