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Avril 2005_ u n m o n d e d e r e c h e r c h e

Au coeur
de la matière
Point de mire

Le défi
de l’hépatite C
Passionné de savoir

De Trois-Rivières
à Río Cuarto
Tour du monde

Dossier
Des déchets
porteurs d’avenir
_ÉDITO

L’INRS
à l’échelle de la Planète
L’INRS a 35 ans cette année ! Afin de souligner cet anniver-
saire, nous vous offrons cette première édition de Planète
INRS, une invitation à découvrir l’univers de l’Institut national
de la recherche scientifique (INRS) : des professeurs-
chercheurs aux expertises diversifiées, des étudiants passion-
Le magazine annuel Planète INRS est publié par nés, des infrastructures de pointe, des activités de recherche
le Service des communications.
aux retombées insoupçonnées…
Rédactrice en chef
Lise Roy

Rédaction
Si, de par sa mission, l’INRS participe au développement
Valérie Borde économique, social et culturel du Québec, sa recherche n’a
Révision linguistique et recherche photo plus de frontières et s’appuie sur des réseaux et des colla-
Stéphanie Bernard
Gisèle Bolduc
borations à l’échelle internationale. Les changements
climatiques, la lutte à la pauvreté, les maladies infectieuses,
Conception, réalisation, production
Bleu Outremer Communication / Design la gestion des ressources, l’optimisation des télécommuni-
Photographies cations… sont autant de préoccupations aux enjeux plané-
Jean-François Blais taires pour lesquelles l’INRS souhaite apporter des solutions concrètes.
Marc Couture
Pierre Francus
Marc Lajoie, MAPAQ
Michel Malo
À cet égard, Planète INRS fait le point sur des avancées novatrices orientées
Normand Perron vers le développement durable. Le dossier Des déchets porteurs d’avenir illustre
Renaud Quilbé
Pierre Rochon en effet les différentes technologies développées par les professeurs-chercheurs de
Nadine Trudeau l’Institut, pour tirer profit des boues d’épuration, des cendres volantes et autres
Mausam Verma
Bibliothèque nationale du Québec résidus en mettant au point des produits à haute valeur ajoutée.
Fonds Collection des cartes et plans

Illustrations Planète INRS vous propose également une incursion Au cœur de la matière ainsi
José Morin
qu’un tête-à-tête avec le professeur-chercheur Alain Lamarre, un spécialiste en
Impression
K2 Impressions immunovirologie qui tente de relever Le défi de l’hépatite C.
Les articles de Planète INRS peuvent être reproduits
avec notre accord et à la condition que la source Cap sur les innovations technologiques, la nouvelle vague de professeurs,
soit mentionnée. Pour information :
la recherche… d’une Planète INRS aux ressources inépuisables !
Planète INRS
Institut national de la recherche scientifique (INRS)
490, rue de la Couronne Bonne lecture !
Québec (Québec) G1K 9A9
Téléphone : (418) 654-2500
Télécopieur : (418) 654-2525
communications@adm.inrs.ca
www.inrs.ca

Directeur général de l’INRS


Pierre Lapointe
Lise Roy
Dépôt légal, 2e trimestre 2005 Rédactrice en chef, Planète INRS
Bibliothèque nationale du Québec
ISSN 1715-1074

Planète INRS_avril 2005


TABLE DES MATIÈRES_

Édito
01
03 En bref

Point de mire
_ Au cœur de la matière
08
10 Science en action
_ La téléconférence… comme si vous y étiez !
_ Le Saint-Laurent, une menace pour la fertilité ?
_ En route vers l’attoseconde
_ Comment freiner les métastases ?
_ GIBSI pour une gestion durable de l’eau
_ Les mystères du paléoclimat
_ Décrocheurs, et après ?
_ À l’ère de la métropole

Passionné de savoir
_ Le défi de l’hépatite C
18
20 Dossiers
_ Des déchets porteurs d’avenir
_ La nouvelle vague

30 Tour du monde
_ De Trois-Rivières à Río Cuarto

Passionnés d’apprendre
_ Les joies du doctorat
32
À lire
34

36 Tour d’horizon
03
_EN BREF

L’INRS arrive en seconde position dans le palmarès des universités

Joli
qui ont accueilli le plus de nouveaux étudiants à l’automne 2004 par
rapport à l’automne 2003, selon les derniers chiffres de la Conférence
des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ).
Les effectifs étudiants de l’INRS ont augmenté de 7,5 % durant

score…
cette période. C’est moins que l’Université du Québec en Abitibi-
Témiscamingue (8,5 %), mais plus que
toutes les autres universités québécoises.
En moyenne, au Québec, le nombre
d’étudiants inscrits à l’université s’est accru
de 1,8 % entre 2003 et 2004.

Appalaches,
Alpes et Pyrénées
Lors de la formation des montagnes, les mouvements du sous-sol ont parfois conduit à l’accumulation d’hydrocarbures
et de zones riches en métaux. Comment ? Où ? Michel Malo, professeur-chercheur au centre Eau, Terre et Environnement
de l’INRS, élabore actuellement un modèle de circulation des paléofluides en analysant certaines zones des Appalaches
québécoises, du massif de la Chartreuse dans les Alpes françaises et du sud des Pyrénées, à des fins d’exploration.

Pli de Sant Corneli. Région de Tremp, Pyrénées orientales, Espagne.

Planète INRS_avril 2005


EN BREF_

Un trésor sous le fleuve?


Que recèle le sous-sol du Saint-Laurent dans la zone comprise entre Matane,
Godbout et les Escoumins? Dans le cadre de l’Initiative géoscientifique ciblée
de la Commission géologique du Canada (CGC), qui vise à soutenir la
prospection minière et énergétique par des études scientifiques, des
chercheurs du centre Eau, Terre et Environnement de l’INRS ont entrepris de
dresser le portrait régional des couches du sous-sol datant de l’ère quaternaire,
au moyen d’un levé sismique. Après avoir placé des sismographes au sol,
les chercheurs génèrent des vibrations mécaniques et enregistrent les ondes
sismiques réfléchies par le sous-sol. La technique permettra à l’équipe du
professeur-chercheur Bernard Long, en collaboration avec Hydro-Québec et
la CGC, de repérer d’éventuels gisements de gaz naturel, qui pourraient
représenter une importante source de combustible fossile.

Un savoir

580 500 dollars


engagé
Nicolas Gignac, étudiant à la maîtrise en sciences
C’est le montant des bourses de Armand-Frappier, l’INRS et des de l’eau au centre Eau, Terre et Environnement, tra-
recherche distribuées cette année entreprises, 17 bourses de maîtrise, vaillera cette année comme coopérant en Jamaïque
par la Fondation Armand-Frappier. 16 bourses de doctorat et 5 bourses pour une organisation non gouvernementale (ONG)
Grâce au financement auquel par- postdoctorales ont été octroyées à canadienne, afin d’aider ce pays à intégrer la géo-
ticipent également les professeurs des étudiants-chercheurs du centre. matique comme outil de prise de décisions dans la
du centre de recherche INRS-Institut gestion des catastrophes naturelles. L’étudiant de
Québec est vice-président et cofondateur du Next-
Generation Technologies Club/Club de la prochaine
génération de technologies (NGTC-CPGT). Cet
organisme d’échange, d’acquisition et de diffusion
d’informations à l’intention des futurs experts en
observation de la Terre et en géomatique a été sélec-
tionné comme finaliste au Gala d’excellence Forces
Avenir 2004, qui reconnaît l’engagement des jeunes
dans le savoir. www.ngtc-cpgt.net

Planète INRS_avril 2005


05
_EN BREF

Le nouveau contrat
familial est arrivé!
Le partenariat Familles en mouvance et dynamiques intergénérationnelles a
adopté sa programmation de recherche pour 2004-2008, qui portera
sur le nouveau contrat familial. Comment les individus s’engagent-ils dans
la famille ? Quelle place la société et le monde du travail font-ils à la famille ?
Quel rôle les familles immigrantes jouent-elles dans la dynamique démo-
graphique québécoise ? Quelles sont les valeurs véhiculées au sein des
familles ? Comment se transmettent le patrimoine et l’identité culturelle ?
Comment s’expriment les solidarités ? Sous la codirection de Françoise-
Romaine Ouellette, professeure-chercheure au centre Urbanisation, Culture
et Société de l’INRS, et de Marie-Andrée Fortin, chercheure au ministère
de l’Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille du Québec, les membres
du partenariat analyseront les rapports familiaux et les investissements de la
société civile et de l’État dans le champ familial. Les réponses des chercheurs
serviront d’assise pour élaborer des programmes, des politiques et des
services adaptés aux réalités familiales d’aujourd’hui.
www.partenariat-familles.inrs-ucs.uquebec.ca

Peut-on imaginer les condi-

privé au public
tions d’hygiène et de salubrité
que subissaient les Montréalais
Du dans la première moitié du
Crédit : Fonds Collection des cartes et plans.

19e siècle? L’approvisionnement


en eau à Montréal, du privé au
public, 1796-1865, publié en novembre 2004 par Dany
Fougères, titulaire d’un doctorat en études urbaines à l’INRS
en 2002, retrace le quotidien des habitants de la métropole
avant la mise en place du service public d’eau potable en
1851. L’ouvrage est notamment basé sur ses travaux réalisés
sous la direction des professeurs-chercheurs Jean-Pierre Collin
Les bureaux de la Compagnie des Propriétaires des eaux de Montréal en 1840. et Mario Polèse.

Si Laval
m’était contée
En 1638, les
Jésuites prennent
possession d’une
grande île au nord
graphiques, sociaux, économiques, culturels et
politiques de la région qu’ont entrepris de
raconter Jean-Charles Fortin et Jacques Saint-
Pierre, chercheurs au centre Urbanisation,
de Montréal. Les Culture et Société, dans le cadre d’un vaste
cultures remplacent peu à peu la forêt primitive. projet de recherche sur les histoires régionales
Au début du 20e siècle, l’île Jésus s’urbanise et se du Québec piloté par l’INRS. L’Histoire de Laval
transforme au fil des ans en une cité moderne, sera la 21e synthèse publiée dans la collection
Laval, à la fois ville et région administrative. C’est Les régions du Québec.
cette histoire et celle des changements démo-

Planète INRS_avril 2005


EN BREF_

Dialogue avec les Autochtones


Carole Lévesque, professeure-chercheure au l’automne 2005. Le réseau Dialog regroupe
centre Urbanisation, Culture et Société et une trentaine de chercheurs de l’INRS,
spécialiste du monde autochtone, dirige le de l’Université du Québec à Montréal,
Réseau québécois d’échange sur les questions de l’Université du Québec à Chicoutimi, de
autochtones. Ce réseau, baptisé Dialog, a l’Université Concordia et de l’Université
pour vocation d’échanger et de diffuser les de Montréal. Il regroupe aussi des représen-
savoirs relatifs aux questions autochtones. tants de l’Assemblée des Premières Nations
Une table ronde, organisée à l’occasion de du Québec et du Labrador, de Femmes
son lancement, a permis de faire, en mars Autochtones du Québec inc., de la Société
2004, un premier bilan de la décennie Makivik, de la Société Recherches Amérin-

Photo : Nadine Trudeau


internationale des peuples autochtones 1994- diennes au Québec et de plusieurs autres
2004. Cette rencontre très réussie constituait instances autochtones. Le Réseau québécois d’échange sur les questions autochtones
le prélude à un important colloque qui réu- bâtit des ponts novateurs entre les sciences de la société
nira des chercheurs et des représentants et les sciences de la nature et rend accessible des savoirs
peu diffusés jusqu’ici.
autochtones de l’ensemble des Amériques à

L’invention
du magasinage
Crédit : Bibliothèque nationale du Québec 2002-2004

En 1850, les magasins sont rares. À part les boutiques spécia-


lisées de l’épicier, du cordonnier, du tailleur ou du droguiste,
seul le magasin général propose une variété de produits. Peu
à peu, dans le Vieux-Montréal, des marchands se lancent dans
le commerce de gros et de détail, important des produits de
Grande-Bretagne, de France et des États-Unis. De nouvelles pra-
tiques commerciales apparaissent : les prix s’affichent, on exige
que les clients paient comptant, la publicité apparaît dans les
journaux. Puis, à la fin du 19e siècle, naissent les premiers
« grands magasins », installés dans des édifices somptueux,
étalant leurs nombreux rayons sur plusieurs étages et attirant,
avec leurs grandes vitrines, les Montréalais sur la rue Sainte-Catherine. L’ère du magasinage
a commencé. C’est cette histoire passionnante, des grands magasins à Montréal de 1860
à nos jours, qu’ont entrepris de retracer Claire Poitras et Michèle Comeau, chercheures au
centre Urbanisation, Culture et Société de l’INRS.

En durcissant la surface de l’aluminium à l’aide d’un

L’aluminium plus dur que l’acier? procédé d’implantation d’oxygène par plasma,
Martin Bolduc, alors doctorant, et Bernard Terreault,
professeur-chercheur au centre Énergie, Matériaux
et Télécommunications de l’INRS, sont parvenus à fabriquer un oxyde d’aluminium plus dur que l’acier. Les résistances à la
friction et à l’usure obtenues grâce à ce nouveau procédé sont trois fois supérieures à celles de l’aluminium traditionnel.
Très prometteur pour les micro et les nanomécanismes !

Planète INRS_avril 2005


07
_EN BREF

Pour la première fois, les sportifs

Plus vite, ont été pris de vitesse par les


spécialistes de la lutte au dopage :
les chercheurs ont identifié, proba-
Bactéries bipolaires
plus haut,
blement avant même qu’il ne soit
utilisé, un nouveau stéroïde ana- Comment l’homme et les animaux domestiques, tels
bolisant. L’équipe de Christiane que la volaille, le bétail et le porc, peuvent-ils être
Ayotte, directrice du laboratoire de infectés par le même pathogène? Si certaines souches

plus fort
contrôle du dopage au centre de de bactéries sont inoffensives, voire bénéfiques au
recherche INRS-Institut Armand- processus de la digestion, d’autres sont la source de
Frappier, et celle d’Olivier Rabin, bien des maux. Méningite, septicémie et infections
directeur scientifique de l’Agence urinaires sont des exemples de maladies infectieuses
mondiale antidopage (AMA) ont qui peuvent être induites par les salmonelles et E. coli.
été averties, en juillet 2004, qu’un échantillon, saisi six mois plus tôt par Pour contrer et prévenir les infections causées par
les douanes canadiennes, contenait un nouvel agent dopant mélangé ces organismes microscopiques, Charles Dozois,
à d’autres produits. Après analyse, l’équipe de Christiane Ayotte y a professeur-chercheur au centre de recherche INRS-
découvert de la désoxyméthyltestostérone (DMT), un stéroïde complexe Institut Armand-Frappier, étudie les interactions
dont la structure a été sciemment modifiée pour qu’il échappe aux hôte-pathogène. Quelles sont les souches de bactéries
contrôles antidopage. Aucune trace de ce stéroïde n’a cependant été virulentes? Que se passe-t-il lorsqu’une bactérie infecte
retrouvée dans les échantillons d’urine de sportifs conservés par l’AMA. son hôte? Comment réagit alors le système immu-
« On ne connaît pas encore les propriétés de la DMT, mais c’est certaine- nitaire ? Avec l’obtention, en 2004, de la chaire de
ment un produit très dangereux, car il est fabriqué spécifiquement pour recherche du Canada sur les maladies infectieuses bac-
le dopage, sans suivre aucune norme de bonne pratique de fabrication », tériennes, le professeur Dozois apportera des éléments
estime Christiane Ayotte. La DMT, dont la synthèse nécessite plusieurs de réponse qui permettront d’améliorer le diagnostic
étapes, pourrait notamment contenir des impuretés très toxiques comme des pathogènes et de développer des vaccins.
des résidus de solvants.

Photo : MAPAQ – Marc Lajoie

Planète INRS_avril 2005


POINT DE MIRE_

Au coeur de la matière
Le centre Énergie, Matériaux et Télécommunications de l’INRS est un des seuls centres au
monde où les chercheurs en sciences de la matière peuvent explorer de front l’infiniment
bref et l’infiniment petit. Avec à la clé, un monde de découvertes…

En combinant le laser aux nanotechnologies, d’infrastructures de pointe dans ces deux professeur Kieffer, également responsable du
les scientifiques de l’INRS se sont lancés sur domaines : le laboratoire international de projet ALLS. On a encore peine à imaginer le
une piste encore très peu explorée. « Jusqu’à source de rayonnement laser ultrarapide potentiel de ces nouvelles technologies (voir
présent, peu de chercheurs ont perçu (ALLS) et le laboratoire de micro et de tableau). « À moyen terme, des entreprises
l’intérêt de travailler à la fois sur l’infiniment nanofabrication (LMN). d’équipements biomédicaux pourraient par
bref et l’infiniment petit », explique le exemple être désireuses de commercialiser de
professeur-chercheur Jean-Claude Kieffer. En utilisant des sources laser produisant des nouvelles technologies d’imagerie, alors que
Pourtant, en physique, temps et espace impulsions ultracourtes et de forte puissance, les compagnies pharmaceutiques pourront
sont deux variables inséparables. Le centre les chercheurs pourront non seulement acquérir des outils plus performants pour la
Énergie, Matériaux et Télécommunications observer en temps réel ce qui se passe au recherche ou le design de nouveaux médica-
est un des seuls endroits au monde à disposer cœur de la matière, mais aussi commander et ments », ajoute le professeur-chercheur.
manipuler des nanosystèmes mis au point
grâce au LMN. « Nous pensons que cette
Les lasers ultrabrefs permettent de décor-
approche permettra de mieux comprendre
tiquer le mouvement à l’intérieur de la
la structure de molécules biologiques,
matière, à la manière d’un stroboscope qui
comme l’hémoglobine ou des protéines
décompose le mouvement des danseurs
membranaires, que les techniques actuelles
dans une discothèque.
ne permettent pas d’analyser », explique le

Planète INRS_avril 2005


09
_POINT DE MIRE

Cap sur l’infiniment bref de Grèce et du Japon. Physiciens, chimistes, de demain. Le laboratoire est aussi utilisé par
La technologie laser a fait des bonds informaticiens, biologistes, médecins et d’autres chercheurs qui tentent de mettre au
prodigieux au cours de la dernière décennie. biochimistes pourront tirer partie de la tech- point des nouveaux dispositifs pour des appli-
Le nouveau laser femtoseconde multifaisceau nologie des lasers pour sonder la matière et cations biomédicales, le transport intelligent
installé dans les locaux de l’INRS à Varennes observer des phénomènes de l’infiniment ou l’industrie aérospatiale. Le LMN représente
est extrêmement puissant. Cet équipement petit avec une très grande précision. un investissement de 15 millions de dollars
compact, de la taille d’une table, est capable financé par le gouvernement du Québec, la
d’aligner des molécules et de suivre les tran- Fondation canadienne pour l’innovation ainsi
Cap sur l’infiniment petit
sitions entre divers états se produisant que par l’INRS, l’Université de Sherbrooke et
Le centre Énergie, Matériaux et Télécommu-
au cours d’une réaction chimique ou encore le secteur privé. Il est, entre autres, équipé
nications dispose d’un autre équipement
de visualiser l’aspect tridimensionnel d’une d’un système de lithographie par faisceaux
majeur, le laboratoire de micro et de nano-
cellule. Il est unique en Amérique du Nord. d’électrons, qui permet de dessiner des motifs
fabrication (LMN), la pierre angulaire de la
ALLS, pour Advanced Laser Light Source, particuliers à l’échelle de l’atome, et de dis-
recherche dans ce domaine au Canada. Là,
ouvre la voie à de nouvelles applications positifs de gravure par plasma pour transférer
une cinquantaine de chercheurs provenant
médicales, électroniques, photoniques, ces motifs sur différents matériaux.
de l’INRS, mais aussi de sept autres univer-
environnementales, biologiques ainsi qu’en
sités canadiennes et d’une compagnie
sciences des matériaux. Avec ALLS et LMN, les chercheurs disposent
privée, élaborent des prototypes de divers
d’outils leur permettant d’explorer le monde
dispositifs conçus à l’échelle de quelques
à une autre échelle. Et si la réalité dépassait
La puissance d’un laser correspond à la milliardièmes de mètres destinés à des appli-
la fiction…
quantité d’énergie qu’il peut délivrer par cations variées. « En électronique, ces nano-
unité de temps. Dix terawatts correspon- structures permettront, par exemple, de
dent à plus de mille fois la puissance totale transporter de l’information beaucoup plus
rapidement et avec une précision bien Avant même le lancement de ALLS, l’INRS
des quatre centrales hydroélectriques du
supérieure à ce qu’autorisent les systèmes disposait déjà du laser femtoseconde
complexe La Grande.
actuels », croit Mohamed Chaker, professeur- le plus puissant au Canada, émettant
chercheur, directeur du centre et responsable un rayonnement d’une puissance de 10
du laboratoire. terrawatts pendant 60 femtosecondes,
Le projet bénéficie d’une subvention de
soit 60 millionièmes de milliardième de
21 millions de dollars de la Fondation
Grâce au LMN, Mohamed Chaker et ses seconde. La durée de chaque impulsion est
canadienne pour l’innovation et réunit
collègues disposent aujourd’hui des meilleurs donc à la minute ce que la minute est à
72 chercheurs de haut calibre provenant de
équipements de pointe pour concevoir des l’âge de l’univers…
17 institutions au Canada et de 16 grands
composants pour la microélectronique, l’élec-
laboratoires des États-Unis, de France,
tronique radio-fréquence et la photonique
d’Autriche, de Suède, d’Allemagne, d’Italie,

LES APPLICATIONS POTENTIELLES


DOMAINES D’APPLICATION EXEMPLES D’APPLICATION

IMAGERIE MÉDICALE • RADIOGRAPHIE DE TISSUS AVEC TRÈS HAUTE RÉSOLUTION (RAYONS X)


• DÉTECTION PLUS PRÉCOCE DU CANCER
• MICROSCOPIE OPTIQUE CELLULAIRE
• DIAGNOSTIC OPTIQUE
THÉRAPIE • PROTONTHÉRAPIE POUR LE TRAITEMENT DE TUMEURS
• CHIRURGIE OPTIQUE
PHOTONIQUE • CARACTÉRISATION ET FABRICATION DE MATÉRIAUX ET DE DISPOSITIFS
ET TÉLÉCOMMUNICATIONS • VALIDATION DES ÉQUIPEMENTS DE PRODUCTION POUR L’INDUSTRIE
DES SEMI-CONDUCTEURS ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
• OPTIMISATION DES COMMUNICATIONS OPTIQUES ET INTÉGRATION DE RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS
• MISE AU POINT DE SYSTÈMES INTELLIGENTS ET DE TECHNIQUES DE COMMUTATION ULTRARAPIDE

Planète INRS_avril 2005


SCIENCE EN ACTION_

La téléconférence…
comme si vous y étiez!
La téléconférence évite les déplacements inhérents
aux réunions, mais elle est loin d’être conviviale.
Comment en finir avec les sons parasites et autres
distorsions ?
Un vague brouhaha toutes parts, n’a rien de cristallin! Lors d’une conversation
dont émerge, par en personne, on ne prête guère attention au bruit de fond
instants, quelques incessant. Mais le son du ventilateur d’un disque dur, les
mots audibles qu’on cliquetis du chauffage ou un camion qui passe au loin sont
ne sait à qui attri- aussi sujets à l’écho et à la réverbération lors d’une télé-
buer. Voilà, pour le conférence. Ils viennent alors se mêler aux échanges qu’ils
moment, ce à quoi contribuent à rendre encore plus pénibles.
ressemble parfois
une conversation Professeur-chercheur au centre Énergie, Matériaux et Télé-
téléphonique ani- communications de l’INRS depuis mai 2003, après huit ans
mée entre plus de passés aux Bell Labs, la Mecque de la recherche en
deux interlocuteurs. télécommunications, Jacob Benesty est l’un des meilleurs
Illustration : José Morin Pour peu que les voix se ressemblent, il est souvent bien spécialistes des algorithmes de traitement des signaux
difficile de distinguer qui est qui. Quand elles se super- acoustiques. Déjà détenteur de quatorze brevets pour
posent, à l’occasion, il devient tout simplement impossible ses inventions, auteur de quatre livres sur les systèmes
de comprendre quoi que ce soit. de communications multimédias, il vient de recevoir une
subvention d’un demi-million de dollars de la Fondation
Ces problèmes techniques, en apparence bien anodins, canadienne pour l’innovation et du gouvernement du
représentent un véritable défi scientifique pour les spécialistes Québec. Celle-ci servira à installer à l’INRS un laboratoire
en acoustique comme Jacob Benesty. Lors d’une télé- unique au Canada, dédié à l’étude des signaux acoustiques
conférence, trois phénomènes acoustiques se combinent pour les systèmes de télécommunications multimédias.
pour brouiller les signaux sonores: l’écho, la réverbération et « De tels outils sont essentiels pour améliorer les systèmes
le bruit. L’écho se produit lorsque le micro installé dans une actuels et mettre au point les télécommunications du
pièce capte le son provenant du haut-parleur situé dans la futur », explique le jeune chercheur. Jacob Benesty étudie
même pièce, et le transmet à l’interlocuteur en même temps notamment des moyens de spatialiser le signal lors d’une
que la voix. L’interlocuteur entend alors sa propre voix téléconférence, de manière à ce que, par exemple, on
lorsqu’il parle, avec un léger décalage dû au temps de trans- entende à droite les personnes situées à droite, comme si
mission aller-retour. L’écho est amplifié lorsque micro et haut- tous les interlocuteurs étaient présents en un seul lieu.
parleur sont proches ou lorsque les micros sont très sensibles. « Lorsque le téléphone passera par l’ordinateur, le son
sortant des deux haut-parleurs sera ainsi plus conforme à
La réverbération est facile à expérimenter avec un simple ce qu’il est lors d’une conversation en personne », ajoute-
téléphone mains libres. Même lorsque l’interlocuteur fait t-il. Le laboratoire, en cours de montage, inclura entre
l’effort de parler haut et fort, sa voix est systématiquement autres des systèmes de localisation de personnes, en plus
déformée et brouillée dès qu’il s’éloigne du combiné. En d’une multitude de micros et d’antennes pour tester les
effet, le micro capte alors non seulement le signal sonore algorithmes créés par Jacob Benesty et son équipe.
principal, mais aussi toutes les réverbérations de l’onde
sonore sur les murs et les objets environnants. Le son BENESTY, J. et Y. HUANG. Audio Signal Processing for Next Generation Multimedia
Communication Systems, Kluwer Academic Publisher, Boston, 2004, 374 p.
transmis, mélange de la voix et de ces ondes réfléchies de

Planète INRS_avril 2005


11
_SCIENCE EN ACTION

Le Saint-Laurent,
une menace pour la fertilité?
Les mammifères, dont l’humain, pourraient-
ils être affectés par cette pollution ? Daniel
Cyr et ses collègues ont nourri des rats de
laboratoire avec des queues à tache noire
capturés dans le Saint-Laurent. « Nous
À quelques kilomètres de Montréal, dans recherche INRS-Institut Armand-Frappier, avons noté une baisse de la production de
le Saint-Laurent et la rivière des Outaouais, étudie l’effet des modulateurs endocriniens spermatozoïdes chez les rats mâles et une
les mâles de certaines espèces de poissons, sur la reproduction des poissons. Ces conta- réduction sensible de la motricité de leurs
comme le méné « queue à tache noire », minants chimiques qui reproduisent l’action spermatozoïdes », raconte le chercheur.
sont en train de changer de sexe, dans des hormones sont présents dans une multi- C’est la preuve que ces modulateurs
des proportions atteignant par endroits plus tude de résidus : des boues de papetières aux endocriniens peuvent être bioaccumulés et
de 30 %, voire 50 %. Ce phénomène décou- pesticides en passant par les effluents urbains. se transmettre le long de la chaîne alimen-
vert récemment par une équipe de l’INRS Les poissons mâles étudiés affichent notam- taire. « On ne peut pas en conclure que les
est plutôt inquiétant. Ces poissons sont ment des taux anormalement élevés de vitel- humains seront affectés, mais l’hypothèse
en effet victimes d’une importante conta- logénine, une protéine qui permet d’habi- doit être vérifiée ».
mination par des substances œstrogéniques, tude aux femelles de fabriquer le jaune des
ARAVINDAKSHAN, J., PAQUET, V., GREGORY, M., DUFRESNE, J.,
des résidus chimiques qui miment l’action œufs. Aux environs de l’île Verte et de l’île FOURNIER, M., MARCOGLIESE, D.-J. et D.G. CYR.
des œstrogènes. Beauregard, en aval de Montréal, près du tiers « Consequences of Xenoestrogen Exposure on Male
Reproductive Function in Spottail Shiners (Notropis hudsonius) »,
des queues à tache noire mâles présentent Toxicological Sciences, vol. 78, 2004, p. 156-165.
Depuis plusieurs années, l’équipe de Daniel des ovaires en formation. Dans d’autres sites,
Cyr, professeur-chercheur au centre de tous sont sexuellement immatures.

En route vers l’attoseconde


Un milliardième de milliardième de seconde, soit 10-18 seconde ou
encore une attoseconde, voilà la durée des impulsions laser que
espèrent pouvoir aller encore plus loin et observer le mouvement
des électrons liés aux atomes.
tente actuellement de produire Tsuneyuki Ozaki au centre Énergie,
Matériaux et Télécommunications de l’INRS. Le but du jeune pro- Les premiers lasers attosecondes mis au point ailleurs dans le monde
fesseur-chercheur n’est pas de battre un record, mais de mettre au ne sont pas encore assez puissants pour pouvoir être utilisés. En
point un premier outil de recherche en attosciences qui permettra collaboration avec le professeur-chercheur François Vidal, du même
peut-être de comprendre des phénomènes physiques, chimiques centre, Tsuneyuki Ozaki tentera de concevoir un laser unique
ou biologiques encore inexpliqués. à haute énergie, en utilisant des plasmas à surface solide. Avec
cet instrument, les deux chercheurs espèrent photographier
Le rayonnement laser est utilisé depuis longtemps pour observer ce des molécules biologiques complexes et capter des images holo-
qui se passe au cœur de la matière vivante ou inerte. Quand un laser graphiques tridimensionnelles des structures internes des cellules
émet une succession d’impulsions durant un temps donné, il per- vivantes. Tsuneyuki Ozaki, nommé professeur à l’INRS en 2003, a
met d’observer des processus se déroulant sur une échelle de temps obtenu des subventions de près de 900 000 dollars de la Fondation
comparable. Actuellement, les lasers les plus performants, comme canadienne pour l’innovation et de plus de 350 000 dollars du
ceux développés à l’INRS dans les années passées, peuvent émettre gouvernement du Québec pour installer un nouveau laboratoire
des impulsions de quelques femtosecondes, soit un millionième de pour la production de ces impulsions laser, à partir de la source
milliardième de seconde. Ils peuvent ainsi suivre le mouvement des laser femtoseconde du laboratoire international de source de rayon-
molécules lors d’une réaction chimique. Avec le laser attoseconde, nement laser ultrarapide (ALLS), également installé à l’INRS.
dont les impulsions sont mille fois plus brèves, les chercheurs
SCIENCE EN ACTION_

Comment freiner les


métastases ?
En 2003, 7 000 Canadiens ont appris
qu’ils étaient atteints d’un cancer des
tissus lymphoïdes. La plupart d’entre eux
souffrent d’un lymphome non hodgkinien.

Ce lymphome, dû à la transformation des globules blancs en cellules


malignes, est l’un des rares cancers pour lequel les nombres de nou-
veaux cas et de décès continuent d’augmenter année après année,
sans qu’on en connaisse la cause. L’incidence de cette maladie
a presque doublé depuis le début des années 1970. En 2004, 2 600
Canadiens en sont décédés.

Malgré les progrès dans le traitement, le lymphome reste difficile à


maîtriser, car les cellules malignes peuvent pénétrer dans des tissus
périphériques, comme ceux du foie, des reins ou de la rate, où elles
engendrent des métastases. Comment les lymphocytes malins
parviennent-ils à se faufiler dans ces organes ? Depuis près de
20 ans, Yves St-Pierre, professeur-chercheur au centre de recherche
INRS-Institut Armand-Frappier, étudie le mode d’action des lym-
phocytes. Au début des années 1990, il fit partie de l’équipe de
Timothy A. Springer, chercheur de Harvard et un des premiers à
démontrer le rôle crucial des molécules d’adhésion dans la réponse Première découverte : les souris dépourvues d’ICAM-1 ne dévelop-
immunitaire de l’organisme. Ainsi, pour qu’un lymphocyte puisse pent pas de métastases quand elles sont atteintes d’un lymphome,
être mobilisé, il doit d’abord s’accrocher au site d’inflammation alors que des souris normales présentent des tumeurs aux reins, au
par l’entremise de foie et à la rate en moins de deux mois. « Nous avons émis l’hypothèse
certaines molécules que lors d’un lymphome, la circulation des lymphocytes malins dans
Le lymphome reste difficile d’adhésion. Que se les vaisseaux sanguins est d’abord arrêtée par les molécules d’adhé-
à maîtriser, car les cellules passe-t-il quand le sion », explique Yves St-Pierre. « Nous pensions que les cellules
malignes pénètrent dans lymphocyte devient malignes pouvaient alors traverser l’endothélium, la paroi des vais-
des tissus périphériques. malin ? Au cours de seaux, pour pénétrer dans les tissus et donner rapidement naissance
son stage postdoc- à une tumeur ». Selon cette hypothèse, ICAM-1 constituerait
toral à Harvard, en quelque sorte la clé qui permet aux cellules cancéreuses de
Yves St-Pierre mit au point une lignée de souris génétiquement s’échapper des vaisseaux pour aller coloniser des tissus périphériques.
modifiées privées d’une molécule d’adhésion, baptisée ICAM-1,
qui s’est avérée particulièrement importante pour les lymphocytes Mais les expériences de laboratoire conduisent le professeur de
normaux. Nommé professeur à l’Institut Armand-Frappier en 1993, l’INRS à une toute autre conclusion : avec ou sans ICAM-1, les lym-
il établit une colonie de ces souris dans son laboratoire pour étudier phocytes cancéreux sont capables de migrer à travers la paroi des
le comportement des lymphocytes malins. vaisseaux sanguins. La molécule ICAM-1 n’est donc pas une simple
clé. Le processus identifié par Yves St-Pierre est plus complexe : en
se liant à un lymphocyte, la molécule d’adhésion active l’expression
de gènes pro-métastatiques présents dans le noyau du lymphocyte >

Planète INRS_avril 2005


13
_SCIENCE EN ACTION

> malin. Le lymphocyte secrète alors des enzymes, baptisées mmp, « Pourquoi ? Nous ne le savons pas encore, mais l’étude de la régu-
qui lui permettent de migrer à travers l’endothélium. La molécule lation des gènes nous apportera certainement des éléments de
d’adhésion ICAM-1 agit donc plus comme un mot de passe qui réponse », explique le chercheur.
donne accès au trousseau de clés constitué par ces enzymes.
MOISAN, S., DEMERS, M., MERCIER, J., MAGNALDO, T., POTWOROWSKI, E.-P. et Y. ST-PIERRE.
« Upregulation of galectin-7 in murine lymphoma cells is associated with progression toward
À ce jour, 26 enzymes de la famille des mmp ont été identifiées an aggressive phenotype », Leukemia, vol. 17(4), 2003, p. 751-759.
pour différents cancers. Pour le lymphome non hodgkinien, Yves ST-PIERRE, Y. « Organizing a tête-à-tête between cell adhesion molecules and extracellular
proteases: a risky business that could lead to the survival of tumor cells », Frontiers in Bioscience,
St-Pierre et son équipe ont montré l’importance du gène mmp9. vol. 10, 2005, p. 1040-1049.
Ce gène, qui s’exprime rarement dans les lymphocytes normaux,
est activé en permanence dans un lymphocyte cancéreux.

GIBSI pour une gestion durable de l’eau


L’eau douce a une valeur inestimable. Au
Québec, 4 500 rivières et un demi-million
sans compter les promo-
teurs, les groupes d’in-
de lacs recouvrent 10 % du territoire. L’eau térêts et les citoyens !
sculpte les paysages, nourrit, abrite et fait
vivre l’homme comme toutes les autres Dans ce contexte, le
espèces vivantes. Elle est aussi profondé- développement de nou-
ment ancrée dans notre culture. En 2002, le veaux outils de gestion
gouvernement du Québec a élaboré une s’avère crucial. Au cours
politique de l’eau qui vise à protéger et à des dernières années, une
gérer cette ressource fragilisée par la pollu- équipe de chercheurs de
tion, et qui n’est pas inépuisable. À la base l’INRS a mis au point un
de cette politique, le gouvernement a logiciel très performant
retenu le principe de la gestion de l’eau par d’aide à la gestion par
bassin versant préconisé depuis longtemps bassin versant, baptisé
par les chercheurs du centre Eau, Terre et GIBSI (gestion intégrée
Environnement de l’INRS. Les 430 bassins par bassin versant à l’aide
versants du Québec, répartis dans 13 d’un système informa-
régions hydrographiques, constituent tisé). Sous la gouverne
désormais l’écosystème à l’échelle duquel du professeur-chercheur
l’eau doit être gérée de manière intégrée et Alain Rousseau, six cher-
non plus de manière sectorielle comme cheurs universitaires et sept issus de diverses du bassin versant, plusieurs scénarios de ges-
auparavant. La transition vers la gestion par instances gouvernementales travaillent tion agricole. Le programme de recherche
bassin versant n’est pas une mince affaire : désormais à définir son protocole d’applica- actuellement en cours permettra de valider
actuellement, la responsabilité des usages tion en étroite collaboration avec des différentes fonctionnalités de GIBSI, en le tes-
de l’eau est partagée entre 12 ministères utilisateurs potentiels du ministère de tant sur le bassin de la rivière Chaudière.
provinciaux, 8 ministères fédéraux, plus de l’Environnement du Québec. GIBSI pourrait
1 000 municipalités, une centaine de MRC, notamment être utilisé pour tester, à l’échelle

Planète INRS_avril 2005


SCIENCE EN ACTION_

Retracer le climat arctique


Les mystères du
des siècles passés permettra
d’améliorer la fiabilité des
modèles de changements
climatiques.
L’Arctique canadien est déjà aux prises avec
certaines conséquences des changements
climatiques. Dans l’ouest de cette région, les
températures hivernales moyennes ont
augmenté de près de 4 °C au cours des
50 dernières années. La fonte du pergélisol
et de la glace de mer, la survenue d’orages
plus fréquents et l’érosion des côtes liée au
réchauffement menacent les villages, les
infrastructures de transport et la faune.
À Tuktoyaktuk, le principal port de l’ouest
de l’Arctique canadien, des sites culturels
et archéologiques sont sur le point de
disparaître, grugés par l’érosion. Une école
élémentaire, plusieurs logements et d’autres
bâtiments ont déjà dû être abandonnés.

La modélisation du climat permet de mieux


prévoir les impacts des changements clima-
tiques. Mais pour l’Arctique, les modèles sont
encore parcellaires, car on connaît très mal les Les carottes de sédiments prélevées dans le lac Sawtooth, sur l’île d’Ellesmere,
la plus septentrionale du Canada, ont permis au professeur-chercheur Francus
variations passées du climat dans cette de retracer les 2 550 dernières années de l’histoire climatique du Haut Arctique.
région. Dans cet immense territoire, seules
trois stations météorologiques ont servi à Ces sédiments, que l’on retrouve dans le conséquences possibles de la pollution ou
relever le temps des 50 dernières années ! fond de certains lacs de l’Arctique, ont la de la modification des bassins versants.
Pour compléter ces données et améliorer la particularité de marquer les saisons. Ils se
fiabilité des modèles, les scientifiques fouillent présentent sous la forme de couches super- Isabelle Larocque, une autre professeure-
l’Arctique à la recherche de traces du climat posées de particules tour à tour fines et chercheure au centre Eau, Terre et Environ-
des siècles passés. « Nous cherchons des grossières, déposées dans un lac par les nement, analyse, quant à elle, les restes de
archives naturelles qui peuvent nous donner rivières du bassin versant au moment de la certains moustiques fossilisés pris dans les sédi-
des indications de l’évolution du climat fonte des neiges et de la glace. Le pro- ments. Les populations de ces chironomes,
année après année », explique Pierre Francus, fesseur et son équipe cherchent d’abord à présents à l’époque de l’Holocène, il y a
professeur-chercheur au centre Eau, Terre et comprendre les processus qui conduisent à 10 000 ans, étaient très sensibles aux change-
Environnement de l’INRS. la formation du sédiment avant de pouvoir ments de température. Même si la méthode
en déduire les conditions environnemen- semble indirecte, elle est particulièrement
Plusieurs chercheurs étudient des carottes tales anciennes. Cette analyse permet aussi précise : en calibrant ses modèles avec des
de glace prélevées dans différentes zones de mieux estimer les risques naturels tels moustiques actuels analogues à ces espèces du
de l’Arctique. Pierre Francus, lui, s’est spé- que les crues ou les séismes, ainsi que les passé, la chercheure est parvenue à retracer les >
cialisé dans l’analyse des sédiments varvés.

Planète INRS_avril 2005


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_SCIENCE EN ACTION

paléoclimat > températures moyennes annuelles du passé avec une précision


de 1°C! En analysant d’autres éléments comme des pollens, le
zooplancton et les diatomées (des algues microscopiques), Isabelle
Larocque parvient ainsi à obtenir des informations sur la tempéra-
ture, le niveau d’eau, le pH, la végétation, les précipitations ou le taux
d’oxygénation de l’eau du lac par le passé.

Pour mener à bien leurs travaux, les deux professeurs-chercheurs


de l’INRS disposent depuis cette année d’un laboratoire unique
au monde. Le laboratoire d’analyses paléoclimatiques à haute
résolution (LAPAHR) représente un investissement de plus
d’un million de dollars. Financé en parts égales par la Fondation
canadienne pour l’innovation et le gouvernement du Québec,
il permet aux chercheurs de tirer le maximum d’informations
des échantillons qu’ils recueillent lors de leurs campagnes sur le
terrain dans l’Arctique.

Décrocheurs, et après?
Qu’advient-il des jeunes décrocheurs ? Armée tenues en 2001, que 30 des 47 décrocheurs du
des tableaux de données statistiques du ministère de secondaire de 1996 étaient… diplômés du secondaire!
l’Éducation du Québec et d’une longue expérience Et parmi les 51 décrocheurs du collègial, 5 avaient un
en sociologie de la jeunesse, Madeleine Gauthier diplôme universitaire.
a mené l’enquête. Après d’innombrables appels
téléphoniques, la professeure-chercheure et son La situation professionnelle de ces jeunes adultes n’est
équipe ont retracé et rencontré 99 jeunes Québécois pas toujours dramatique. Ainsi, 34 des 47 décrocheurs
francophones (47 filles et 52 garçons) des régions du secondaire occupaient un emploi, stable pour
de Montréal, de Québec et de Gatineau, qui avaient 23 d’entre eux. Seuls six vivaient des situations vrai-
quitté l’école ou le collège pendant l’année 1996-1997 ment difficiles, surtout liées à des problèmes de santé
sans avoir obtenu leur diplôme. « On stigmatise physique ou mentale. Leur jeune âge – 21 ans en
souvent ces jeunes, car ils moyenne – laissait espérer des améliorations possibles.
La situation professionnelle présentent le plus haut Madeleine Gauthier et ses collègues ont aussi constaté
de ces jeunes adultes n’est taux de chômage de leur que moins du tiers des décrocheurs rencontrés avaient
pas toujours dramatique. génération, les plus bas bénéficié de mesures d’insertion, le plus souvent
niveaux de salaire et la parce qu’ils en ignoraient l’existence. L’analyse des
plus grande proportion d’assistés sociaux, mais tous nombreuses données recueillies lors des entrevues,
n’ont pas le même profil », explique la chercheure qui ont duré près d’une heure et demie chacune, se
du centre Urbanisation, Culture et Société, égale- poursuivra pendant les prochains mois.
ment directrice de l’Observatoire Jeunes et Société.
GAUTHIER, M. et autres. L’insertion professionnelle et le rapport au travail des
Les raisons du décrochage sont multiples et souvent
jeunes qui ont interrompu leurs études secondaires ou collégiales en 1996-1997 :
plus complexes que le simple échec scolaire. D’ailleurs, étude rétrospective, Centre Urbanisation, Culture et Société de l’INRS, 2004,
les chercheurs ont découvert lors de rencontres, 257 p., www.inrs-ucs.uquebec.ca/pdf/rap2004_07.pdf

Planète INRS_avril 2005


SCIENCE EN ACTION_

Les grandes villes du monde prennent


À l’ère de
L’équipe de Jean-Pierre Collin est la seule au Canada à participer
aux travaux de l’Observatoire international des métropoles
plus d’importance que jamais. (OIM), un organisme créé en 2002 pour analyser la probléma-
tique des métropoles au niveau mondial. Cette équipe dressera
Sur le plan économique, elles entrent directement en concur- un portrait détaillé de la situation dans 17 métropoles cana-
rence les unes avec les autres, souvent plus que les États. diennes (voir tableau) à partir d’une grille d’analyse développée
La qualité de vie qu’elles offrent aux citoyens influence leur par les chercheurs de l’OIM. « Pour Montréal, par exemple, nous
compétitivité. Sur les plans social et politique, elles assument avons découpé la ville en 50 zones que nous caractérisons selon
un nombre croissant de responsabilités, qui prennent d’autant un certain nombre de critères, tels que la densité de la popula-
plus d’importance qu’elles concentrent désormais la grande tion, le taux de chômage, la criminalité, le revenu par habitant,
majorité de la population mondiale. Au Canada, par exemple, l’âge des bâtiments, etc. », raconte Jean-Pierre Collin.
les deux tiers de la population vivent dans l’une ou l’autre
des 17 villes de plus de Par la suite, les chercheurs tenteront d’établir des liens entre
De nombreuses métropoles 200 000 habitants que ces différents types de milieux et le comportement politique
compte le pays.
ressentent le besoin de des citoyens. « En analysant les résultats des votes aux élections
renouveler leurs institutions provinciales et municipales, entre autres, nous pourrons mieux
L’environnement, les comprendre l’écologie politique des villes », ajoute le spécia-
et leurs manières de gouverner. transports, l’aménage- liste. Les banlieues sont-elles conservatrices et les villes centres
ment du territoire, l’aide progressistes, comme on le dit souvent ? Les élus sont-ils
aux plus démunis… sont de plus en plus souvent gérés à l’échelle représentatifs des populations ? Qu’implique la revitalisation
locale. Or, les instances municipales ne disposent pas toujours des des quartiers centraux ? Les travaux des chercheurs permet-
moyens financiers ou humains. «Pour s’adapter à ces nouvelles tront d’éclairer de nombreuses questions.
réalités, de nombreuses métropoles
ressentent le besoin de renouveler
leurs institutions et leurs manières de LES 17 MÉTROPOLES DU CANADA
gérer et de gouverner », explique
Jean-Pierre Collin, professeur-
Métropole Province Population (2001)
chercheur au centre Urbanisation,
Culture et Société et responsable Saskatoon Saskatchewan 225 927
du réseau Villes Régions Monde, Oshawa Ontario 296 298
Windsor Ontario 307 877
financé par Valorisation-Recherche
Victoria Colombie-Britannique 311 902
Québec et le Fonds québécois de
Halifax Nouvelle-Écosse 359 183
recherche sur la société et la culture. St. Catharines – Niagara Ontario 377 009
Kitchener Ontario 414 284
London Ontario 432 451
Hamilton Ontario 662 401
Winnipeg Manitoba 671 274
Québec Québec 682 757
Edmonton Alberta 937 845
Calgary Alberta 951 395
Ottawa – Hull Ontario / Québec 1 063 664
Vancouver Colombie-Britannique 1 986 965
Montréal Québec 3 426 350
Toronto Ontario 4 682 897

Planète INRS_avril 2005


17
_SCIENCE EN ACTION

la métropole
En parallèle, Jean-Pierre Collin et son
équipe bâtissent un tableau de bord
de la dynamique et de la gouvernance
métropolitaine pour mieux suivre
l’évolution de la situation dans les
17 métropoles canadiennes. Cet outil
rassemblera de nombreux indicateurs
statistiques, concernant par exemple
la démographie, la qualité de vie,
l’économie ou l’environnement, ainsi
que des fiches synthèses répertoriant
les modes de gestion en vigueur en
matière de transport en commun, de
fiscalité, de gestion de l’eau potable
ou de développement économique.
Pour construire cet outil de première
importance, le chercheur s’est associé
aux équipes de Pierre J. Hamel et de
Gilles Sénécal, également professeurs-
chercheurs au centre Urbanisation,
Culture et Société. Trois étudiants et
trois assistants de recherche par-
ticipent également aux travaux.
www.vrm.ca

Illustration : José Morin

L’Observatoire international des métropoles (OIM) réunit 17 équipes de recherche en


études urbaines réparties dans autant de pays, de la Chine à la Pologne en passant
par Israël et l’Afrique du Sud. Les études menées dans ce cadre permettront de mieux
connaître la dynamique des villes, d’imaginer de nouveaux modes de fonction-
nement mieux adaptés au contexte actuel et de déterminer dans quelle mesure
certaines expériences réussies pourraient être transférées d’une ville à l’autre.

Planète INRS_avril 2005


PASSIONNÉ DE SAVOIR_

Dans le monde, plus de


170 millions de personnes
sont contaminées par l’hépatite C.
Ce virus, contre lequel il n’existe
aucun vaccin, est particulièrement
difficile à étudier. Alain Lamarre
s’est attaqué au sujet.

Alain Lamarre
Titulaire de la chaire Jeanne et J.-Louis Lévesque en immunovirologie
Le défi
Pourquoi certaines personnes restent-elles insensibles au virus de l’hépatite C,
alors que d’autres développeront cirrhoses et cancers du foie ? En cherchant à
répondre à cette question, Alain Lamarre espère mieux comprendre le mode
d’action de ce terrible virus qui finit souvent par tuer ses victimes. Professeur-
chercheur au centre de recherche INRS-Institut Armand-Frappier depuis
septembre 2002, il est aussi titulaire de la chaire Jeanne et J.-Louis Lévesque
en immunovirologie, dotée d’un fonds de trois millions de dollars provenant
du fonds Jeanne et J.-Louis Lévesque de la Fondation Armand-Frappier.
Son équipe compte déjà cinq étudiants et un assistant de recherche.

Malgré son jeune âge, Alain Lamarre possède une solide expérience en
immunovirologie. Originaire de Laval, il fit son entrée à l’Institut Armand-
Frappier en 1988, comme stagiaire pendant son baccalauréat à l’Université de
Montréal. En quelques semaines, l’étudiant s’y découvrit une véritable passion
pour la recherche et publia son premier article scientifique dès la fin de son
stage ! Après une maîtrise et un doctorat au sein de l’équipe du professeur-
chercheur Pierre Talbot, Alain Lamarre passera cinq ans à Zürich dans le labora-
toire de Rolf Zinkernagel, prix Nobel de médecine 1996 pour ses travaux en
immunologie, avant de revenir à l’INRS.

Planète INRS_avril 2005


19
_PASSIONNÉ DE SAVOIR

Pourquoi avez-vous choisi


d’étudier le virus de l’hépatite C ?
À Zürich, j’ai travaillé sur un virus de souris qui ressemble beaucoup
à l’hépatite C dans sa façon d’induire une réponse immunitaire. J’ai
maintenant suffisamment d’expérience pour m’attaquer à ce virus
humain réputé difficile à étudier. En effet, même si l’hépatite C Comment vérifier cette hypothèse ?
touche de nombreuses personnes dans le monde – dont 1 % de la Nous collaborons avec les hépatologues de l’hôpital Saint-Luc, le
population canadienne – le virus est encore très mal connu, pour plus grand centre de référence au Canada pour l’hépatite C. C’est là
plusieurs raisons. D’abord, il est presque impossible à cultiver in que sont suivies des cohortes de porteurs chroniques de la maladie
vitro, ce qui complique beaucoup la recherche. Les études in vivo et qu’on surveille aussi les populations à risque, principalement les
sont aussi limitées, puisque la plupart des animaux modèles sont utilisateurs de drogues injectables. Dès que les médecins diagnos-
insensibles au virus. Seul le chimpanzé pourrait servir de modèle tiquent une nouvelle infection, nous prélevons immédiatement au
pour les infections chez l’humain, ce qui peut difficilement être patient un échantillon de sérum qui nous permet de détecter quels
envisagé pour des questions d’éthique et de coût. De plus, la anticorps sont présents lors de la réponse innée à l’infection. Pour
pathologie induite par le virus de l’hépatite C est plutôt inhabituelle. des analyses in vitro, nous utilisons aussi des pseudo-virus que nous
Ainsi, on sait que 20 % des personnes infectées n’auront jamais fabriquons en combinant le cœur d’un virus bien connu avec les
aucun symptôme et se débarrasseront du virus sans même s’en protéines de surface de l’hépatite C. En parallèle, nous validons aussi
rendre compte. Les 80 % restant n’auront souvent pas de symp- nos hypothèses sur des virus de souris.

de l’hépatite C
tômes au moment de l’infection, mais n’élimineront jamais le virus.
L’hépatite C chronique est une maladie très grave, car le virus L’hépatite C chronique
détruit graduellement les cellules du foie. Dix à trente ans après est une maladie très grave,
l’infection, les malades développent une cirrhose ou un cancer du
car le virus détruit graduellement
foie. La greffe est alors la seule issue, et encore, car le virus s’en
prend aussi au foie transplanté. Les seuls traitements disponibles à les cellules du foie.
ce jour, l’interféron et la ribavirine, se montrent peu efficaces.
Croyez-vous qu’on pourra bientôt
Quelle approche privilégiez-vous ? se prémunir contre cette maladie ?
Mes travaux précédents m’ont amené à émettre l’hypothèse que la Les études sur l’hépatite C sont encore très fondamentales. À court
différence de réponse immunitaire entre les personnes qui résistent ou moyen terme, on peut espérer que des compagnies pharmaceu-
parfaitement au virus et celles qui ne parviennent pas à l’éliminer tiques trouvent des médicaments antiviraux plus efficaces contre
provient avant tout de différences dans le répertoire des anticorps l’hépatite C, comme on l’a fait pour le VIH dans les dernières années.
produits lors de la toute première réaction de l’organisme. Mais il faudra de nombreuses années avant qu’on puisse produire un
Habituellement, cette hypothèse n’a pas la faveur des immunoviro- vaccin, car le mode d’action du virus est encore très mystérieux.
logues, qui croient plutôt à une différence au niveau des cellules T
qui se montreraient capables ou non de tuer les cellules infectées
par le virus. Je crois pourtant qu’on ne peut négliger le rôle des
anticorps, qui pourraient, chez certaines personnes, rediriger le
virus vers les cellules de la rate où il serait éliminé, plutôt que de
le laisser s’en prendre au foie.

Planète INRS_avril 2005


DOSSIER_DES DÉCHETS PORTEURS D’AVENIR

Des déchets
Que faire des millions
de tonnes de boues
d’épuration, du lisier
et des résidus industriels ?
Des chercheurs de l’INRS
explorent plusieurs pistes
pour améliorer la gestion
de ces déchets de plus
en plus encombrants.
Voire les transformer
en produits à haute
valeur ajoutée.

Planète INRS_avril 2005


21
_DOSSIER

porteurs d’avenir
La salubrité de l’eau coûte cher. Chaque s’accroît inexorablement. En 1986, le
année, dans le monde, 50 000 stations d’épu- professeur-chercheur Guy Mercier
ration d’eaux usées municipales génèrent n’est encore qu’étudiant à la maîtrise
la bagatelle somme de 50 millions de tonnes * lorsqu’il commence à travailler sur le Récupérer des
de boues, des résidus pâteux contenant
un mélange de matière organique, de
procédé Metix, une technologie mise
au point à l’INRS pour transformer
terrains contaminés
minéraux et de micro-organismes. L’eau les boues en résidus inoffensifs. Le Jusque dans le centre de Montréal, des friches
rejetée après le traitement est généralement principe est simple : si les boues ne industrielles laissées à l’abandon ont un sol
de bonne qualité, mais les boues, elles, s’ac- peuvent pas être valorisées à cause tellement pollué que les promoteurs immo-
cumulent. Au Québec seulement, près de des métaux et des pathogènes biliers hésitent à y investir, malgré le manque
200 000 tonnes de boues municipales ont qu’elles renferment, enlevons-les ! d’espaces disponibles pour de nouveaux
été incinérées ou enfouies en 2002, soit « Plusieurs études ont démontré que développements. Plusieurs équipes de l’INRS
31 % de plus qu’en 2000. Seules 23 000 30 % à 80 % des boues d’épuration mettent au point des procédés de décontami-
tonnes ont été récupérées et utilisées produites dans le monde contiennent nation susceptibles de redonner vie à ces
comme compost horticole ou agricole, un des quantités de métaux supérieures terrains vagues. Au centre Eau, Terre et
volume en stagnation depuis 10 ans. Que aux normes prescrites pour leur utili- Environnement, par exemple, l’équipe de
faire de ces déchets ? La valorisation agricole sation comme fertilisants, explique Mario Bergeron a adapté des procédés issus
a ses limites, car les boues contiennent le chercheur. Pourtant, à l’heure de l’industrie minière pour décontaminer des
souvent des métaux toxiques et des micro- actuelle, 30 % à 40 % de ces boues remblais hétérogènes, contenant à la fois des
organismes pathogènes. Le cuivre, le nickel sont épandues dans les champs. » Si polluants organiques et des métaux toxiques,
et le zinc, par exemple, sont phytotoxiques cette pratique persiste, les boues de manière à réduire de 90 % le volume de
et peuvent diminuer le rendement des seront certainement à l’origine de déchets dangereux qui doivent être enfouis.
récoltes. D’autres métaux, comme l’arsenic, sérieux problèmes de santé publique. Avec la compagnie Dragage Verreault, le
le cadmium, le mercure ou le plomb, peu- professeur-chercheur a conçu une unité mobile
vent aussi s’accumuler dans l’écosystème et clés en main pour le traitement des remblais et
Des boues propres des sédiments contaminés. Elle sillonnera bien-
se transmettre dans la chaîne alimentaire.
Au fil des ans, l’équipe de Guy tôt l’île de Montréal, où un million de mètres
Mercier, en étroite collaboration avec cubes de remblais attendent d’être traités.
Depuis près de 20 ans, plusieurs équipes du
celles des professeurs-chercheurs
centre Eau, Terre et Environnement de
Jean-François Blais et Rajeshwar Dayal
l’INRS cherchent des moyens de gérer plus
Tyagi, a mis au point une série de
efficacement ces déchets, dont le volume
quatre procédés biologiques et chi-
miques (Metix-BS, -BF, -AC et -BC)
Les énormes quantités capables de retirer métaux, virus et bactéries qu’ils ont contribué à populariser, intéresse
de bactéries contenues pathogènes de tous les types de boues de plus en plus de municipalités. « Les
dans les boues d’épuration municipales produites dans le monde. Les procédés Metix sont les seules technologies
pourraient aussi servir chercheurs de l’INRS se sont associés à un économiques et efficaces permettant d’en-
partenaire privé, la compagnie Biolix, désor- lever les métaux toxiques, tout en conservant
à fabriquer des produits
mais une filiale de la multinationale française les propriétés fertilisantes des boues, et ce,
biodégradables. Sita, et ont développé les procédés jusqu’au à un coût égal ou inférieur aux autres
stade pilote. Le concept de boues propres, méthodes de disposition », rappelle Guy
* : Par convention, les quantités de boues sont toujours
exprimées en tonnes de boues sèches.

Planète INRS_avril 2005


DOSSIER_DES DÉCHETS PORTEURS D’AVENIR

Mercier. L’expertise acquise lors de l’élabora- tion en produits à haute valeur ajoutée. Le faire l’affaire, à un coût moindre et avec
tion de Metix a permis aux chercheurs de professeur Tyagi ne manque pas d’idées un bilan environnemental bien meilleur »,
l’INRS de mettre au point plusieurs autres pour valoriser ces déchets. explique le chercheur de l’INRS, qui prépare
technologies de décontamination de divers la construction d’une usine pilote pour faire la
résidus, du lisier de porc aux cendres d’inci- preuve de son procédé à plus grande échelle.
Une seconde vie pour les déchets
nérateurs en passant par les sols pollués et
En collaboration avec le Centre de foresterie
les déchets industriels (voir encadrés). Les eaux usées des industries agroalimen-
des Laurentides, un laboratoire fédéral,
taires, particulièrement celles générées par
Rajeshwar Dayal Tyagi a montré que les
Une fois débarrassées des métaux et des les fromageries, pourraient quant à elles être
boues d’épuration constituent, par exemple,
micro-organismes pathogènes, les boues utilisées comme milieu de culture pour
un excellent milieu de culture pour le Bacillus
pourraient même constituer une formidable la production d’espèces de Trichoderma.
thuringiensis (Bt). Cette bactérie, cham-
ressource, selon Rajeshwar Dayal Tyagi. Ce champignon microscopique, vendu
pionne toute catégorie de la lutte biologique,
Depuis son arrivée à l’INRS en 1984, le pro- en poudre dans les jardineries pour favoriser
est notamment utilisée pour contrer la
fesseur-chercheur originaire de New Delhi a la croissance et l’enracinement des plantes,
tordeuse du bourgeon de l’épinette, la pyrale
adopté une démarche défiant les grands est aussi utilisé comme biofongicide dans
du maïs et les moustiques vecteurs du virus
courants scientifiques mondiaux, en consi- la production à grande échelle de fraises
du Nil. Elle représente un marché mondial de
dérant les boues non comme des déchets, ou de pommes de terre. « En cultivant le
250 millions de dollars américains. « Chaque
mais comme une matière première utile. En Trichoderma dans des eaux usées, nous avons
année, on produit 5 à 10 millions de litres de
juin 2004, le professeur a obtenu une chaire obtenu au laboratoire des concentrations de
Bt en utilisant une solution de farine de soja
de recherche du Canada sur la bioconver- spores mille fois supérieures à ce que don-
comme milieu de culture. Une fois stérilisées,
sion des eaux usées et des boues d’épura- nent les milieux de culture synthétiques »,
les boues d’épuration pourraient très bien

Trichoderma sp. en sporulation.

Planète INRS_avril 2005


23
_DOSSIER

Des ressources dans


les déchets industriels
Les professeurs-chercheurs Guy Mercier et Jean-François Blais s’intéressent
de près à certains déchets industriels, tels que les boues rouges produites
par les alumineries, qui renferment notamment d’énormes quantités
de fer. Les deux chercheurs tentent d’extraire de ces déchets un agent
coagulant qui pourrait être utilisé dans le traitement des eaux usées.
Le procédé économique mis au point à l’échelle du laboratoire doit encore
faire ses preuves au stade pilote. Ils explorent aussi les monticules
de résidus d’amiante de la région de Thetford Mines, qui renferment
d’importantes quantités de sels de magnésium, de nickel et de chrome
que leurs procédés pourraient permettre de valoriser.

affirme le professeur Tyagi. Le procédé sem- former nos déchets en


ble d’autant plus intéressant qu’à l’échelle savon à lessive n’a rien de
industrielle, le milieu de culture représente farfelu, bien au contraire!
de 30 % à 60 % du coût de production de
ce champignon ! Les énormes quantités de
bactéries contenues dans
Les boues des stations d’épuration pourraient les boues d’épuration
même servir à fabriquer… du savon à lessive ! pourraient aussi servir à
Chaque année, au Canada, on utilise fabriquer des produits
quelque 150 000 tonnes de protéases alca- biodégradables, selon le
lines thermostables, des enzymes qui entrent professeur Tyagi. Depuis
dans la composition de la plupart des déter- plusieurs années, on
gents domestiques et qui servent dans utilise certaines bactéries
plusieurs grands procédés industriels. « Nos pour produire des bio-
premiers essais en laboratoire montrent qu’il plastiques capables de
est possible de produire ces enzymes dans les remplacer les plastiques
boues d’épuration, à un coût de 60 % à 80 % conventionnels, dont la
inférieur à celui des techniques de produc- production à partir de
tion actuelles », explique Rajeshwar Dayal pétrole et l’élimination
Tyagi. Grâce à une subvention de 360 000 causent de nombreux problèmes environ- tifiques ont osé relever leurs manches pour
dollars du Conseil de recherches en sciences nementaux. Certains bioplastiques, comme fouiller le contenu des boues à la recherche
naturelles et en génie du Canada (CRSNG), les polyhydroxybutyrates (PHB) ou poly- de bactéries intéressantes… « Au laboratoire,
le chercheur peaufine actuellement son hydroxyalcanoates (PHA), des polyesters, nous avons démontré que la culture de divers
procédé qu’il espère transférer au stade sont déjà utilisés à l’échelle industrielle, micro-organismes comme le Rhizobium ou
pilote d’ici trois ans. « Si cela fonctionne, on notamment pour fabriquer des sacs pour les le Bt dans des boues issues du traitement
risque de manquer de boues, car le marché perfusions. Mais leur production est encore secondaire des eaux permet d’accumuler de
mondial des protéases alcalines thermo- coûteuse. « Pour améliorer la fabrication de bonnes quantités de PHB, explique-t-il. Cette
stables frôle les trois milliards de dollars bioplastiques, les chercheurs se tournent approche peut abaisser le coût du traitement
américains », annonce-t-il, le sourire aux surtout vers la génétique ou la découverte des eaux ou de disposition des boues et
lèvres. Autant du point de vue environ- de nouvelles souches de bactéries », raconte simultanément réduire le coût de production
nemental qu’économique, l’idée de trans- le professeur Tyagi. Mais bien peu de scien- des PHB. »

Planète INRS_avril 2005


DOSSIER_DES DÉCHETS PORTEURS D’AVENIR

L’idée de transformer
nos déchets en savon
à lessive n’a rien de farfelu.

Pour mener à bien tous ces projets, le et d’entreprises. Les équipes de Claude
professeur Tyagi mettra sur pied à l’INRS un Guertin et Claude Dupont, deux professeurs
laboratoire dédié à la R-D sur la production du centre INRS-Institut Armand-Frappier,
de produits à haute valeur ajoutée utilisant les sont aussi impliquées, tout comme celles de
rejets urbains, industriels et agricoles comme
substrat de base. Le coût total du projet est
Jean-François Blais et de Joseph Valéro,
du centre Eau, Terre et Environnement.
Cendres volantes
évalué à environ 10 millions de dollars,
provenant de la Fondation canadienne pour
Le nouveau laboratoire, unique au Canada,
permettra de développer des procédés et
inoffensives
l’innovation, du gouvernement du Québec de les tester à l’échelle pilote grâce à des Les cendres récupérées dans les filtres à
et de différents autres partenaires. En plus de réacteurs de 15, 150 et 2000 litres et à une air des incinérateurs municipaux contien-
l’équipe du professeur-chercheur Tyagi, panoplie d’équipements complémentaires. nent souvent du plomb, du cadmium ou
responsable de cette infrastructure, huit Plusieurs étudiants en bénéficieront lors de du mercure. Elles sont considérées comme
universités du Canada, des États-Unis et de leurs travaux. des déchets dangereux. En collaboration
France sont associées au projet, aux côtés avec la compagnie Alex Environnement,
de plusieurs organismes gouvernementaux les professeurs-chercheurs Jean-François
Blais et Guy Mercier ont mis au point un
procédé de décontamination qui permet
de les transformer en déchets moins
nocifs et d’en extraire les métaux. La
technique, qu’ils ont brevetée au Canada
et aux États-Unis, est déjà implantée
à l’incinérateur de Québec pour traiter
12 000 tonnes de cendres par an. Deux
étudiantes au doctorat, Béatrice Levasseur
et Fatima Hammy, cherchent actuelle-
ment à optimiser le procédé pour élargir
ses applications potentielles.

Planète INRS_avril 2005


25
_DOSSIER

La décontamination / valorisation des déchets à l’INRS


Le lisier, un rebut envahissant Professeur-chercheur Expertises
CENTRE EAU, TERRE ET ENVIRONNEMENT
Chaque année, les porcheries québécoises rejettent 10 milliards Mario Bergeron Restauration environnementale, hydrométallurgie
de litres de lisier qui, épandu aux alentours, a fini par saturer et géochimie des éléments traces.
les sols en phosphates et en nitrates dans certaines régions, Jean-François Blais Procédés hydrométallurgiques pour la décontamination
de sols, de cendres d’incinérateurs et de rejets
générant ainsi de graves problèmes de pollution. Depuis 2000, industriels. Procédés chimiques, électrochimiques
les équipes des professeurs-chercheurs Jean-François Blais et Guy et biologiques de stabilisation et de traitement
Mercier ont participé au développement d’un nouveau procédé des boues et du lisier.
René Lefebvre Environnements miniers et restauration
de traitement du lisier, baptisé Lisox, qui permet de séparer des aquifères contaminés.
directement à la ferme les fractions solide et liquide du lisier. Seule Richard Martel Restauration in situ des eaux souterraines
la phase solide, qui contient la grande majorité des nitrates et et des sols contaminés.
des phosphates, doit être transportée hors de zones de surplus, Guy Mercier Technologies d’enlèvement des métaux et des
HAP dans les sédiments, les boues d’épuration,
ce qui permet de substantielles économies. Depuis juillet 2004, les cendres d’incinérateurs et les résidus dangereux.
un prototype a été installé dans une porcherie de Saint-Isidore- Traitement du lisier.
de-Beauce, pour traiter 4,5 millions de litres de lisier par an. Normand Tassé Interactions eaux-particules dans les sédiments
et les roches sédimentaires et applications aux
La compagnie HET et l’Institut de recherche et de développement sédiments contaminés et résidus miniers.
en agroenvironnement (IRDA) sont partenaires du projet. Rajeshwar Dayal Tyagi Extraction des métaux lourds des boues municipales
et des déchets industriels ; conception, analyse et
développement des bioréacteurs ; procédés
Au centre INRS-Institut Armand-Frappier, d’autres chercheurs
microbiologiques industriels. Bioconversion et valorisation
s’intéressent au lisier de porc. Les membres du Groupe de de résidus en produits à haute valeur ajoutée.
recherche en microbiologie appliquée, dirigé par le professeur- CENTRE INRS – INSTITUT ARMAND-FRAPPIER
chercheur Richard Villemur, ont mis au point un procédé de Réjean Beaudet Microbiologie et biochimie de la biodégradation
de polluants organiques dans les sols et les
traitement biologique thermophile qui permet d’éliminer en
eaux usées. Dégradation aérobie et anaérobie
deux à trois jours les odeurs et les micro-organismes patho- du PCP et autres solvants chlorés.
gènes, tout en réduisant fortement la charge organique du lisier, Pierre Juteau Bioprocédés pour le traitement des eaux usées,
l’azote ammoniacale, le phosphore et l’azote. Les professeurs- des sols contaminés et des émissions atmosphériques.
Écologie et systématique microbienne.
chercheurs Réjean Beaudet et Pierre Juteau ont conçu un modèle François Lépine Biodégradation d’agents antimicrobiens.
de bioréacteur robuste, implantable à l’échelle d’une ferme. Ils Richard Villemur Écologie microbienne de bioprocédés de dépollution
continuent actuellement leurs travaux, en collaboration avec et valorisation de la biomasse. Génétique
de micro-organismes impliqués dans la dégradation
l’IRDA, pour optimiser le procédé et le coupler à d’autres techno-
de polluants organiques. Identification de nouvelles
logies lorsqu’un traitement plus complet est nécessaire. espèces bactériennes. Développement de sondes
d’ADN pour les traitements de biorestauration.
DOSSIER_LA NOUVELLE VAGUE

La nouvelle
À l’INRS, un professeur sur quatre a moins de
trois ans d’ancienneté. Place aux jeunes…
vague
n’est pas une mince affaire. « Lors d’un récent concours, pour
embaucher cinq professeurs-chercheurs au centre Énergie, Matériaux
et Télécommunications, nous avons analysé les dossiers de plus de
150 candidats, dont certains provenaient de l’étranger ou avaient
reçu d’autres offres », raconte Sinh LeQuoc.

Pourquoi ces jeunes talents ont-ils choisi l’INRS plutôt que d’autres
universités ou centres de recherche, parfois beaucoup plus imposants?
La première raison invoquée tient à la qualité des infrastructures mises
à leur disposition dès leur arrivée. Veronika von Messling, par exem-
ple, n’a pas hésité à quitter la prestigieuse Mayo Clinic, à Rochester,
pour joindre le centre INRS-Institut Armand-Frappier. Cette jeune
virologue originaire de la Forêt noire, en Allemagne, a été séduite par
l’ambiance de travail moins impersonnelle que dans une grosse struc-
ture, mais surtout par les équipements de recherche des laboratoires
de Laval. «L’INRS dispose notamment d’une animalerie extraordinaire,
raconte la professeure. Elle me permet de garder en permanence une
vingtaine de furets pour étudier la maladie de Carré, une pathologie
Veronika von Messling
virale proche de la rougeole.» En choisissant d’investir massivement
dans des équipements de recherche uniques au monde, l’INRS a ainsi
Ils sont le plus souvent dans le début de la trentaine. Ils viennent du
créé un environnement de travail très compétitif, susceptible d’attirer
Québec et du Canada, mais aussi d’Algérie, de France, de Chine,
les meilleurs spécialistes. «Depuis trois ans, nos professeurs ont obtenu
d’Ukraine, d’Allemagne, d’Italie, du Japon, du Vietnam, d’Australie,
de Roumanie, de Suisse ou des États-Unis. Ils sont tous titulaires
d’un doctorat et la plupart ont acquis quelques années d’expérience
lors de postdoctorats menés aux quatre coins du monde. Ils, ce sont
les 42 nouveaux professeures et professeurs de l’INRS entrés en
fonction depuis 2002, de jeunes talents qui représentent la relève
professorale et qui témoignent du dynamisme de l’institution.

Partout dans le monde, à l’heure où les baby-boomers atteignent


l’âge de la retraite, les universités se livrent une guerre sans merci
pour le recrutement des jeunes chercheurs les plus brillants. Dans
cette bataille planétaire, l’INRS tire bien son épingle du jeu. « Même
si le quart de nos 154 professeurs-chercheurs sont encore en tout
début de carrière, notre université reste parmi les trois premières au
Canada pour la moyenne des octrois de recherche par professeur,
selon le classement de Re$earch Money », signale Sinh LeQuoc,
directeur scientifique de l’INRS. Globalement, les octrois de
recherche des professeurs-chercheurs de l’INRS ont plus que doublé
en cinq ans, passant de 26,8 millions de dollars en 1999 à 57 millions
Claire Poitras
de dollars en 2004. Mais recruter autant de nouveaux chercheurs

Planète INRS_avril 2005


27
_DOSSIER

D’ici trois à cinq ans, l’INRS compte


encore recruter une quarantaine
de nouveaux professeurs-chercheurs.

Matériaux et Télécommunications depuis mai 2002. Recruté par le


biais d’une annonce dans une revue scientifique, le titulaire de la
chaire de recherche du Canada en matériaux nanostructurés
organiques et inorganiques ne s’attendait pas à un début de
carrière aussi fulgurant. Collaborations internationales, recrutement
d’étudiants de cycles supérieurs… tout est allé très vite. « Les jeunes
chercheurs sont aussi très encouragés par les professeurs seniors
et par le directeur du centre, Mohamed Chaker, toujours enthou-
siaste », raconte le scientifique originaire de Rome. Le mal du pays ?
Comme beaucoup de chercheurs étrangers, Federico Rosei se plaît
au Québec… même s’il aime retourner à l’occasion en Italie ! Et si
les salaires proposés à l’INRS sont, comme partout au Québec,
Federico Rosei
inférieurs à ceux des universités européennes ou américaines,
le coût de la vie moindre et surtout l’excellente qualité de vie à
des subventions d’infrastructures dépassant les 110 millions de dollars.
Québec comme à Montréal séduisent les jeunes professeurs.
Une part importante de ce soutien, accordé par la Fondation cana-
dienne pour l’innovation et le ministère de l’Éducation, a été consacrée
D’ici trois à cinq ans, l’INRS compte encore recruter une quarantaine
à l’acquisition d’équipements qui n’existent nulle part ailleurs»,
de nouveaux professeurs. « Au plan stratégique, nous avons identifié
explique Sinh LeQuoc.
trois grands domaines de recherche à développer dans les prochaines
années pour répondre aux défis socioéconomiques du Québec de
En entrant à l’INRS, les jeunes chercheurs ont aussi rapidement le
demain », explique Sinh LeQuoc. Quinze nouveaux professeurs seront
sentiment de faire partie d’une équipe. Quand Anne-Catherine
ainsi engagés pour se consacrer aux changements climatiques, quinze
Favre a quitté l’Université de Neuchâtel, en Suisse, pour le centre
aux nanobiotechnologies et dix à la gestion intégrée du territoire.
Eau, Terre et Environnement de l’INRS, elle est devenue dès son
Et pour garder tous ces nouveaux talents, l’INRS s’est doté d’une poli-
arrivée un des piliers du Groupe de recherche en hydrologie statis-
tique de prime à la performance très stimulante visant à encourager
tique. Depuis 2004, elle est en effet cotitulaire agrégée, avec le
les très bonnes performances en matière de recherche, de formation
professeur Taha Ouarda, de la chaire industrielle en Hydrologie
et de services à l’institution et à la collectivité.
statistique Hydro-Québec / CRSNG, qui a obtenu en septembre
dernier un nouveau financement du CRSNG et d’Hydro-Québec
pour la période 2004-2009. « C’est une excellente opportunité pour
une jeune chercheure », explique Anne-Catherine Favre, ravie de
pouvoir travailler au sein d’une équipe multidisciplinaire, avec des
chercheurs d’expérience, et de collaborer avec des partenaires indus-
triels. Au centre Urbanisation, Culture et Société, Claire Poitras
apprécie elle aussi le fonctionnement en équipes pluridisciplinaires.
Entrée à l’INRS comme stagiaire postdoctorale en 1996 et nommée
professeure en novembre 2001, cette spécialiste en histoire urbaine
et en aménagement participe activement aux travaux du réseau
interuniversitaire Villes Régions Monde. « Notre centre est le meilleur
au Canada pour les études urbaines, ce qui nous permet de travailler
très souvent en équipe », dit-elle. La masse critique de chercheurs
dans différents domaines permet ainsi aux jeunes professeurs d’être
soutenus à leurs débuts et d’obtenir rapidement des subventions.

Un autre avantage clé de l’INRS aux yeux des recrues, c’est l’envi-
ronnement unique de formation de 2e et de 3e cycle qui permet de
consacrer beaucoup plus de temps à la recherche. « Pouvoir investir
autant dans la recherche en début de carrière est très intéressant »,
croit Federico Rosei, professeur-chercheur au centre Énergie, Anne-Catherine Favre

Planète INRS_avril 2005


DOSSIER_LA NOUVELLE VAGUE

CENTRE EAU, TERRE ET ENVIRONNEMENT


Nom Formation Intérêts de recherche
Couture, Patrice Ph. D. en biologie, Université de Montréal, Écotoxicologie, biologie des organismes aquatiques :
Canada, 1986 effets des métaux et autres facteurs de stress sur les poissons
Favre, Anne-Catherine Ph. D. en hydrologie statistique, Hydrologie statistique, analyse et modélisation
École polytechnique fédérale de Lausanne, de séries chronologiques
Suisse, 2000
Fortin, Claude Ph. D. en sciences de l’eau, Biogéochimie des métaux en milieu aquatique,
INRS, Canada, 2000 écotoxicologie et radioécologie
Francus, Pierre Ph. D. en géologie, Limnogéologie, analyse d’images, changements climatiques,
Université catholique de Louvain, reconstitution des paléoclimats et des paléoenvironnements,
Belgique, 1997 estimation des risques environnementaux
Gobeil, Charles Ph. D. en océanographie, Géochimie aquatique : cycle des éléments traces, eutrophisation
UQAR, Canada, 1993 des zones côtières, bioamplification des métaux, etc.
Harris, Lyal Ph. D. en géologie, Institut de géologie, Télédétection, géophysique, modélisation physique
Université de Rennes I, France, 1984
Larocque, Isabelle Ph. D. en sciences de l’environnement, Paléoclimatologie et paléoenvironnements
UQAM, Canada, 1999
Laurion, Isabelle Ph. D. en biologie, Université Laval, Écologie aquatique, effets des changements climatiques
Canada, 1997 dont les conséquences de la fonte du pergélisol
Mailhot, Alain Ph. D. en physique, Université Hydrologie urbaine, modélisation des infrastructures urbaines,
de Sherbrooke, Canada, 1992 analyse d’incertitudes, impacts des changements climatiques
en milieux urbains
Mercier, Guy Ph. D. en sciences de la terre, Technologies environnementales : décontamination des sols
Université Laval, Canada, 2000 et des résidus, assainissement agricole, municipal et industriel
Panacioni, Claudio Ph. D. en ingénierie civile et opération, Hydrogéologie et modélisation mathématique,
Université de Princeton, États-Unis, 1991 hydrologie des bassins versants, télédétection
Rousseau, Alain Ph. D. en génie rural et biologie, Gestion intégrée de l’eau par bassin versant,
Cornell, États-Unis, 1995 pollution agricole, modélisation des processus hydrologiques
St-Hilaire, André Ph. D. en sciences de l’eau, Hydrologie statistique et environnementale, modélisation
INRS, Canada, 2000 stochastique, études d’impact et suivis environnementaux

CENTRE ÉNERGIE, MATÉRIAUX ET TÉLÉCOMMUNICATIONS


Nom Formation Intérêts de recherche
Azana, José Ph. D. en ingénierie de la télécommunication, Photonique ultrarapide, télécommunications
Université de Madrid, Espagne, 2001 par fibre optique, imagerie biomédicale
Benesty, Jacob Ph. D. en traitement du signal, Systèmes de communication multimédia
Université d’Orsay, France, 1991 (téléconférence, cellulaire mains libres, etc.)
Denidni, Tayeb A. Ph. D. en génie électrique, Communications sans fil, systèmes radiofréquences,
Université Laval, Canada, 1994 antennes et circuits micro-ondes
Mohamedi, Mohamed Ph. D. en électrochimie, Piles à combustible : conception, fabrication et évaluation
Université de Grenoble, France, 1995 de performance de micro-piles
Morandotti, Roberto Ph. D. en ingénierie électrique, Micro et nanofabrication de structures, photonique
Université de Glasow, Ukraine, 1998
Ozaki, Tsuneyuki Ph. D. en physique, Interaction laser-plasma, impulsions attosecondes,
Université de Tokyo, Japon, 1998 impulsions laser, imagerie holographique
Perepichka, Dmitrii F. Ph. D. en chimie organique, Institut de physique Molécules organiques, polymères, nanotubes de carbone
et chimie organique de l’Académie nationale
de sciences, Ukraine, 1998
Pignolet, Alain Ph. D. en physique, École polytechnique Nouveaux matériaux, nanostructures,
fédérale de Lausanne, Suisse, 1992 micro et nanoélectronique (couches minces)
Rosei, Federico Ph. D. en physique, Nanostructures, semi-conducteurs,
Université de Rome, Italie, 2001 nanoélectronique et optoélectronique
Vidal, François Ph. D. en physique, Modélisation numérique des plasmas,
Université de Montréal, Canada, 1988 modélisation des plasmas de décharge

Planète INRS_avril 2005


29
_DOSSIER

CENTRE INRS – INSTITUT ARMAND-FRAPPIER


Nom Formation Intérêts de recherche
Lamarre, Alain Ph. D. en virologie et immunologie, Maladies infectieuses et immunitaires, hépatites,
Institut Armand-Frappier, Canada, 1996 infections virales, étude de la diversification du répertoire
des lymphocytes B antiviraux
Devine, Patrick J. Ph. D. en toxicologie, Physiologie du système reproducteur féminin, dommages
Université du Maryland, États-Unis, 1999 ovariens causés par des agents chimiques, pharmaceutiques
et environnementaux
Labonté, Patrick Ph. D. en microbiologie et immunologie, Réplication du virus de l’hépatite C
Université de Montréal, Canada, 2001
Pearson, Angela Ph. D. en génétique moléculaire et médicale, Biologie moléculaire du virus de l’herpès simplex
Université de Toronto, Canada, 1998
Ramassamy, Charles Ph. D. en neuropharmacologie, Centre national Maladies neurodégénératives (maladie de Parkinson, Alzheimer),
de la recherche scientifique, France, 1993 stress oxydatif, neurotoxicité et neuroprotection, neurochimie
Von Messling, Veronika Ph. D. en virologie vétérinaire, Caractérisation des mécanismes pathogéniques des Morbillivirus
École vétérinaire de Hannover, Allemagne, 1998
Rousseau, Marie-Claude Ph. D. en épidémiologie et biostatistique, Épidémiologie du cancer : expositions professionnelles
Université McGill, Canada, 2003 et environnementales, vaccination et infections infantiles
Juteau, Pierre Ph. D. en génie chimique, Modulateurs endocriniens, microbiologie des bioprocédés
Université Laval, Canada, 1997 d’assainissement, traitement du lisier de porc
Déziel, Éric Ph. D. en génie de l’environnement, Biologie et écologie des micro-organismes, biofilms,
École Polytechnique de Montréal, Canada, 2001 biotechnologies environnementales

CENTRE URBANISATION, CULTURE ET SOCIÉTÉ


Nom Formation Intérêts de recherche
Apparicio, Philippe Ph. D. en géographie sociale, Analyse spatiale, logement social, pauvreté urbaine,
Université du Maine, France, 2002 ségrégation et qualité de vie
Bellavance, Guy Ph. D. en sociologie, Politiques des arts et des lettres, conditions de travail,
Université de Montréal, Canada, 1992 politiques de l’État, identité sociale de l’artiste ou de l’écrivain
Belleau, Hélène Ph. D. en sociologie, Université de Montréal, Famille, rapports intergénérationnels, transmission et mémoire
Canada, 1996
Guend, Abdelhani Ph. D. en sociologie, Université du Wisconsin, Vieillissement des populations, mortalité, santé des populations,
État-Unis, 2004 services de santé, transition de la fécondité, démographie
Leloup, Xavier Ph. D. en sociologie, Université de Louvain, Gestion de la diversité ethnique et religieuse, transformation
Belgique, 2002 des espaces résidentiels, coexistence multiculturelle,
racisme et discrimination
Perron, Normand Ph. D. en histoire, Université Laval, Histoires régionales
Canada, 2002
Poitras, Claire Ph. D. en aménagement, Développement des nouvelles technologies et des réseaux
Université de Montréal, Canada, 1997 techniques urbains, images de la ville, rôle des acteurs
publics et privés dans l’aménagement
Saint-Pierre, Diane Ph. D. en administration publique, Gouvernance et politiques culturelles, gestion publique
ENAP, Canada, 2000 des politiques culturelles, action des pouvoirs publiques
en matière de culture
Vultur, Mircea Ph. D. en sociologie, Université Laval, Intégration professionnelle des jeunes, les jeunes et la
Canada, 2001 mondialisation, dynamique des transformations sociales
Zhu, Nong Ph. D. en siences économiques, Mobilité spatiale et professionnelle, migration et urbanisation,
Université d’Auvergne, France, 2002 démographie, économétrie

Planète INRS_avril 2005


TOUR DU MONDE_

De Trois-Rivières
à Río Cuarto
Coup d’œil sur les mutations du travail et
de la protection sociale dans le monde,
avec les globe-trotters de Transpol, un
groupe de recherche du centre Urbani-
sation, Culture et Société.
Partout sur la planète, la mondialisation a profondément bouleversé le rager à demeurer en emploi plus longtemps ? Les États-Unis, où de
monde du travail. Dans les sociétés industrialisées, le modèle du salarié nombreux retraités travaillent, ont déjà un certain recul face à ces
employé à temps plein pour une durée indéterminée tend à se réduire. questions. En collaboration avec Julie Beausoleil, une chercheure de
L’État providence aussi, lui qui assumait retraite, chômage, formation l’Université d’Austin, au Texas, l’équipe de Frédéric Lesemann a donc
continue et autres assurances des salariés. Le travail autonome prend élaboré une synthèse des expériences américaines, en collaboration
de l’ampleur, et le fardeau du financement des protections sociales avec la Caisse nationale d’assurance vieillesse de France. Les résultats
incombe de plus en plus souvent aux individus. En parallèle, le de ces travaux ont fait l’objet d’un numéro spécial de la revue
vieillissement de la population remet en cause le modèle traditionnel française Retraite et Société à l’été 2004.
de la retraite. Dans ce contexte, la lutte contre la pauvreté pose sans
cesse de nouveaux défis, même dans les sociétés les mieux portantes. Avec deux étudiants au doctorat, Frédéric Lesemann s’est aussi
engagé dans un projet que lui a confié la Commission des partenaires
Comment le Québec tire-t-il son épingle du jeu ? Le « modèle du marché du travail, un organisme relevant d’Emploi Québec. Le
québécois », né au lendemain de la Révolution tranquille, a-t-il fait chercheur est chargé d’analyser les dispositifs de qualification profes-
son temps, comme certains le prétendent ? « Certainement pas, et sionnelle en entreprise mis en œuvre dans cinq pays européens ainsi
ce qui se fait ici est souvent connu et reconnu à l’étranger », affirme qu’aux États-Unis et au Mexique. « On sait que la productivité d’une
Frédéric Lesemann, professeur-chercheur au centre Urbanisation, entreprise est directement corrélée à la qualité de la formation profes-
Culture et Société, et directeur du groupe de recherche Transpol sur sionnelle de ses employés », explique le professeur Lesemann. Mais
les transformations du travail, des âges et des politiques sociales. la formation reçue au sein d’une entreprise est rarement reconnue à
« Le Québec fait la preuve que, dans une société libérale, l’économie l’extérieur, ce qui n’encourage pas les employés à s’en prévaloir. Peut-
et la protection sociale ne sont pas incompatibles ». on supprimer ce frein à la mobilité des travailleurs en mettant sur pied
un système de diplômes indépendant du système scolaire ? Le
Pour mieux comprendre ce qui se passe ici, le professeur et les dix chercheur s’est rendu en Italie, en Suisse et en Espagne où certaines
étudiants membres de son groupe parcourent le monde pour régions ont entrepris une démarche en ce sens. « La situation du
observer ce qui se passe ailleurs, puisque la mondialisation a partout Québec, qui jouit d’une grande autonomie politique, est comparable
engendré des effets comparables. Au fil des ans, l’équipe de à celle de certaines régions européennes qui se voient attribuer
Transpol a ainsi développé des relations privilégiées avec plusieurs de plus en plus de responsabilités », précise Frédéric Lesemann. Les
groupes de recherche d’Europe et des Amériques, mais aussi avec échanges entre le professeur québécois et des chercheurs et orga-
des organismes gouvernementaux et de nombreux acteurs sociaux, nismes de la région de Bologne, en Italie, du Pays basque espagnol et
ONG, associations de retraités ou de travailleurs indépendants. du canton de Genève se déroulent sur un pied d’égalité, et permet-
tent à chacun de tirer profit des expériences des autres et de juger de
Plusieurs projets actuellement en cours illustrent les bénéfices d’une leur bien-fondé dans le contexte du Québec. « Nous regardons
approche comparative. La question des retraites et du travail des notamment s’il est plus pertinent de baser la reconnaissance de la
personnes de plus de 65 ans, par exemple, est universelle. Devrait-on formation professionnelle à l’échelle d’un territoire, comme c’est
repousser l’âge de la retraite pour s’adapter au vieillissement démo- le cas dans certaines régions d’Italie ou d’Espagne, ou en fonction du
graphique ? Faut-il permettre à des travailleurs âgés qui souhaitent secteur d’activité des entreprises ».
encore travailler de toucher leur pension plus tard ; faut-il les encou-

Planète INRS_avril 2005


31
_TOUR DU MONDE

Lutter contre la pauvreté… comment?


Depuis cinq ans, l’équipe de Frédéric Lesemann est parti-
culièrement active en Argentine, dans le cadre d’une
entente quadripartite entre l’INRS, l’Université nationale
de Cordoba, le ministère de l’Emploi, de la Solidarité
sociale et de la Famille du Québec et le ministère argentin
du Développement social. Le chercheur québécois et ses
collègues argentins analysent différentes stratégies de lutte
contre la pauvreté basées sur l’insertion en emploi. Ils ont
notamment mis sur pied un projet de recherche appliquée
qui vise à comprendre comment une ville peut se relever
d’une situation économique très difficile en misant sur une
série de mesures sociales, économiques et politiques.

Le cas de Trois-Rivières, parvenue à sortir du marasme économique du début des années 1990, est comparé à celui
de Río Cuarto. Dans cette ville de 160 000 habitants de la province de Cordoba, au centre de l’Argentine, 40 % de la
population vit officiellement en dessous du seuil de pauvreté. « À la suite de la crise économique qui a secoué le pays dans
les dernières années, les villes argentines ont hérité de nombreuses responsabilités en matière de lutte à la pauvreté, mais
elles n’ont que peu de moyens et surtout pas de gestionnaires bien formés pour les appliquer », explique Frédéric
Lesemann. En étroite collaboration avec les chercheurs argentins, Frédéric Lesemann et son équipe ont mis sur pied des
outils de formation pour professionnaliser les pratiques des gestionnaires municipaux. Mais ils n’entendent pas se poser
en donneurs de leçons. « Ce sont nos collègues argentins qui forment les gestionnaires, et nous organisons avec eux des
circuits de formation sous forme de stages dans des organismes et ministères
Le Québec fait la preuve que, québécois », précise le professeur Lesemann. L’expérience, qui permet
dans une société libérale, d’introduire des processus démocratiques dans une société minée par les
l’économie et la protection sociale pratiques partisanes, fera peut-être des petits : en avril 2005, les chercheurs
de Transpol organiseront avec leurs collègues argentins un colloque sur
ne sont pas incompatibles.
le sujet qui réunira à Cordoba des chercheurs et des formateurs du Québec,
d’Argentine et d’autres pays latino-américains.

Planète INRS_avril 2005


PASSIONNÉS D’APPRENDRE_

Les joies du doctorat À quelques mois de la fin de son doctorat


À l’INRS, 242 étudiants poursuivaient
des études de 3e cycle à l’automne 2004.
Portrait de quatre étudiants heureux…

De l’Arctique à au centre Eau, Terre et Environnement,


Maxime Aubert a déjà un carnet de route

l’Australie
bien rempli. Et son parcours est pour le
moins original. Après un baccalauréat en
archéologie et anthropologie à l’Université
Laval, le jeune homme obtient une
maîtrise en géochimie à l’INRS avant d’y poursuivre ses études doctorales sous
la direction du professeur-chercheur Marc Richer-LaFlèche. Sa spécialité ? L’étude
de l’art rupestre, des œuvres préhistoriques peintes ou gravées dans la pierre, au
moyen de techniques originales. Dans les dernières années, Maxime Aubert s’est
déjà rendu deux fois dans l’Arctique québécois, à la demande de l’Institut culturel
Avataq, pour étudier un site menacé de l’île de Qajartalik, dans le détroit d’Hudson.
À cet endroit, la pollution atmosphérique et le réchauffement climatique sont
en train de faire disparaître des visages millénaires gravés dans la stéatite. En 2003,
le jeune chercheur de l’INRS a également participé à la conservation des pétro-
glyphes de Three Canyons, dans l’Utah. Plus récemment, Maxime Aubert a
collaboré étroitement avec des chercheurs de l’Université nationale d’Australie, où
il vient de passer un an pour mettre au point un nouveau prototype de spec-
tromètre à haute résolution. La technique qu’il a développée permet de dater des
œuvres rupestres recouvertes par des enduits minéraux sans les endommager.
Maxime a été récemment invité à se rendre au Timor Leste (l’ancien Timor orien-
tal), en Birmanie et à Bornéo. On lui a également offert un poste à l’Université
Maxime Aubert, sciences de la terre
nationale d’Australie, à partir de 2006.

Rencontres urbaines
Qu’est-ce qui peut bien amener une jeune anthropologue anglaise à quitter la
prestigieuse London School of Economics pour débuter un doctorat en études
urbaines au centre Urbanisation, Culture et Société? « L’interdisciplinarité et la
vitalité du centre, la directrice de recherche et la ville de Montréal ! », répond
sans hésiter Martha Radice, dans un parfait français à peine mâtiné d’un accent
britannique. Déjà, en 1997, l’anthropologue originaire de Brighton avait
franchi l’Atlantique pour étudier la vie des Anglo-Montréalais dans le cadre de
sa maîtrise à l’Université Laval. Son travail de recherche avait alors donné lieu
à un livre, intitulé « Feeling comfortable? » Les Anglo-Montréalais et leur ville, très
remarqué lors de sa sortie en l’an 2000. Après trois ans passés au Département
de criminologie de la London Scool of Economics, Martha Radice a joint, en
mai 2004, l’équipe de la professeure-chercheure Annick Germain à l’INRS, où
son doctorat porte sur les relations sociales dans les artères commerçantes
Martha Radice, études urbaines des quartiers multiethniques de Montréal. « L’INRS regroupe des chercheurs de
toutes disciplines pour étudier la ville sous différents angles, et les échanges
sont passionnants », explique-t-elle. « Juste parmi les autres étudiants au doctorat, il y a des spécialistes en architecture, en politique, en
urbanisme, en génie civil, en comptabilité… c’est très enrichissant ! ». Déjà, l’été dernier, Martha Radice cosignait un nouveau chapitre de
livre avec Annick Germain. Gageons que ce ne sera pas le dernier…

RADICE, M. « Feeling comfortable? » Les Anglo-Montréalais et leur ville, Les Presses de l’Université Laval, 2000, 186 p.
GERMAIN, A. et M. RADICE. « Cosmopolitanism by default: Public sociability in Montreal », Cosmopolitan Urbanism, London, Routledge, 2005.

Planète INRS_avril 2005


33
_PASSIONNÉS D’APPRENDRE

Prélude à l’industrie
Depuis l’âge de 12 ans, Stéphane Boivin sait qu’il veut travailler en
santé. C’est à l’INRS qu’il se découvre une véritable passion pour
la recherche. Pendant son baccalauréat en biochimie à l’UQAM, il fait
un stage au centre INRS-Institut Armand-Frappier, qu’il choisira pour sa
maîtrise et son doctorat. «L’INRS est un pôle incontournable dans la
recherche en biologie fondamentale et expérimentale», raconte-t-il,
séduit tout à la fois par l’encadrement, les sujets d’études et l’esprit
d’équipe. Au cours de sa maîtrise, il débute une collaboration avec un
laboratoire français, qui le conduit à réaliser son doctorat en cotutelle
au sein du laboratoire d’études moléculaires et pharmacologiques
des peptides du professeur-chercheur Alain Fournier, à l’INRS, et du
laboratoire de chimie organique et biologie structurale du professeur-
chercheur Daniel Davoust, à l’Université de Rouen. Son sujet
Stéphane Boivin, biologie
de recherche ? L’étude des récepteurs couplés aux protéines G
(les GPCRs) et de leurs ligands qui intéressent de plus en plus les
compagnies pharmaceutiques. Ces récepteurs transmembranaires pourraient constituer les cibles de 50 % à 70 % des nouveaux médicaments
en développement. L’an prochain, le jeune chercheur, déjà auteur de plusieurs publications, devrait obtenir un double diplôme de doctorat
en biologie de l’INRS et en chimie de l’Université de Rouen. Plus tard, Stéphane Boivin souhaite travailler en recherche en santé dans le secteur
privé. Déjà, en juin prochain, il ira présenter ses travaux à la compagnie biopharmaceutique suisse Actelion, à Bâle.

Daniel Brassard est étudiant au baccalau-

La passion de réat en génie physique à l’École Poly-


technique lorsqu’il effectue son premier

la recherche
stage à l’INRS, en 2000. Convaincu d’y
trouver un environnement de recherche de
qualité, il s’inscrit à la maîtrise en 2002 et,
pour son doctorat, choisit d’étudier de
nouveaux matériaux pour l’électronique de demain, sous la direction du professeur-
chercheur My Ali El Khakani. « L’INRS encourage fortement les étudiants tant à
publier leurs travaux de recherche dans des revues de réputation internationale
qu’à participer à des conférences », explique-t-il pour justifier son choix. « De plus,
le fait que l’Institut se concentre sur les études supérieures amène les professeurs
à participer de façon beaucoup plus proactive aux travaux des étudiants, ce qui
permet de bénéficier d’un encadrement supérieur à ce qui se fait ailleurs. »

Le jeune chercheur s’intéresse particulièrement à la croissance et aux propriétés élec-


triques de couches minces de silicate de titane. «L’étude de ce nouveau matériau par
deux méthodes complémentaires, soit l’ablation laser et la pulvérisation magnéton,
est originale en soi et permettra d’acquérir de nouvelles connaissances non seule-
ment sur le mode de croissance de ce matériau, mais également sur la corrélation
existant entre ses propriétés électriques et sa microstructure», confie Daniel Brassard.
Les propriétés électriques des silicates de titane ont été très peu étudiées par le passé,
mais les résultats obtenus jusqu’à maintenant démontrent un potentiel très promet-
teur pour des applications liées à l’industrie de la microélectronique. En plus d’avoir
donné lieu à la rédaction de plusieurs articles dans des publications scientifiques,
les travaux du jeune chercheur lui ont valu, en 2004, le Prix Desjardins d’excellence
Daniel Brassard, sciences de l’énergie et des matériaux
de l’Acfas, remis annuellement à un seul étudiant-chercheur au doctorat, toutes
disciplines confondues.

Planète INRS_avril 2005


À LIRE_

Regards sur la jeunesse


«Jeter un regard sur la jeunesse constitue une voie efficace pour
l’observation du changement dans une société», déclarait Madeleine
Gauthier*, responsable de l’Observatoire Jeunes et Société, lors du
lancement en septembre dernier de la collection Regards sur la
jeunesse du monde. Cette collection, dont la sociologue assume
la direction, réunit des ouvrages sur les jeunes et les recherches
dont ils font l’objet dans le monde. Quels sont les itinéraires socio-
professionnels des jeunes? Quels rapports entretiennent-ils avec
les études, la religion, la sexualité? Quelles valeurs et croyances
privilégient-ils? Que penser de leurs modes de vie? La collection
fait le point sur toutes ces questions et bien d’autres. Dans Regard
sur… La jeunesse au Québec, Madeleine Gauthier a réuni une série
de textes qui présentent un portrait vivant de la jeunesse québécoise
dans toute sa diversité. Car tous les jeunes ne traversent pas la
période des études ou de l’insertion professionnelle et résidentielle
au même rythme et avec les mêmes difficultés. La jeunesse se vit
de manière de plus en plus individualisée, selon les auteurs.
Témoins et acteurs de premier plan des mutations sociales en cours,
les jeunes contribuent à la redéfinition des valeurs qui annoncent
une nouvelle culture. Mircea Vultur*, lui, a supervisé un livre où des
spécialistes de la jeunesse, travaillant en Europe centrale et orientale
ou originaires de ces régions explorent la participation civique, la
formation scolaire, le rapport à la religion, les politiques d’emploi
et les itinéraires socioprofessionnels des jeunes dans ces pays.
À travers leurs portraits, les auteurs décodent les rapports sociaux,
économiques et politiques dans cette région après l’effondrement
du communisme. Un autre ouvrage, sur la jeunesse du Mexique,
est également paru cette année.
GAUTHIER, Madeleine et autres. Regard sur… La jeunesse au Québec, Québec, Les Éditions de
l’IQRC/Les Presses de l’Université Laval, 2003, 156 p. (Coll. « Regards sur la jeunesse du monde »).
VULTUR, Mircea et autres. Regard sur… Les jeunes en Europe centrale et orientale, Québec, Les Éditions
de l’IQRC/Les Presses de l’Université Laval, 2004, 144 p. (Coll. « Regards sur la jeunesse du monde »).
PÉREZ ISLAS, José Antonio et Monica VALDEZ GONZALES. Regard sur… La jeunesse au Mexique,
Québec, Les Éditions de l’IQRC/Les Presses de l’Université Laval, 2004, 224 p. (Coll. « Regards
sur la jeunesse du monde »).

Des vertus des bibliothèques


Les bibliothèques publiques sont les institutions culturelles les plus
fréquentées. Environ un Québécois sur trois y est abonné. Que
savons-nous des rapports entre ces institutions et leurs usagers ?
Quelle vision en ont les pouvoirs publics ? Pour la première fois
au Québec, un ouvrage fait le point sur ces questions et examine
le rôle des bibliothèques dans la transmission de la culture.
Le livre présente les actes d’un colloque tenu en 2003 à l’occasion
du 20e anniversaire de la Bibliothèque Gabrielle-Roy et du
30e anniversaire de l’Association pour l’avancement des sciences
et des technologies de la documentation (ASTED).
BAILLARGEON, Jean-Paul** et autres. Bibliothèques publiques et transmission de la culture à l’orée
du XXIe siècle, Les Éditions de l’IQRC et Les Éditions de l’ASTED, 2004, 227 p.
(Coll. « Chaire Fernand-Dumont sur la culture »).

Planète INRS_avril 2005


35
_À LIRE

Les dessous de la politique culturelle De la pauvreté à la solidarité


Pourquoi la politique culturelle du Québec n’a-t-elle été adoptée Pourquoi et surtout comment lutter contre la pauvreté ?
par l’Assemblée nationale qu’en 1992 ? Était-il utile ou nécessaire Les auteurs dressent le bilan des actions et pratiques québécoises
de redéfinir la mission du ministère, de modifier ses pouvoirs et des 20 dernières années et lancent des pistes de réflexion.
ses responsabilités et de créer un conseil des arts et des lettres ? Leur description du contexte, des politiques et des programmes qui
Diane Saint-Pierre*, professeure-chercheure et membre de la se sont succédé, leur analyse des lois et des mesures prises mettent
chaire Fernand-Dumont sur la culture, livre son analyse. en lumière les visions, les philosophies et le rôle des acteurs clés,
SAINT-PIERRE, Diane. La Politique culturelle du Québec de 1992 : continuité ou changement, gouvernements, groupes sociaux ou individus. Leur analyse
Les acteurs, les coalitions et les enjeux, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2004, 344 p. est claire : la crise de l’intégration sociale appelle à repenser la
(Coll. « Management public et gouvernance »).
solidarité, surtout en termes d’accès à l’emploi, de protection contre
les risques sociaux et de droits fondamentaux de citoyenneté.
Les défis des mères adolescentes ULYSSE, Pierre Joseph et Frédéric LESEMANN*. Citoyenneté et pauvreté. Politiques, pratiques
Johanne Charbonneau* a recueilli les témoignages d’une trentaine et stratégies d’insertion en emploi et de lutte contre la pauvreté, Québec, Presses de l’Université
du Québec, 2004,330 p. (Coll. « Problèmes sociaux et interventions sociales »).
de mères adolescentes de la Montérégie. Sans fard, elles racontent
les relations avec leur famille, leur conjoint, leurs amis et les représen-
tants des services publics et communautaires. Leurs récits, souvent L’histoire de nos régions
poignants, mettent en lumière les difficultés à concilier le rôle de Le vaste chantier des
mère avec les autres exigences de l’adolescence et du passage à l’âge Histoires régionales,
adulte. Être mère à l’adolescence, c’est aussi redéfinir ses rêves. amorcé en 1980, a
CHARBONNEAU, Johanne. Adolescentes et mères. Histoire de maternité précoce et soutien du réseau pour but de produire
social, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2004, 278 p. (Coll. « Sociétés, cultures et santé »). une synthèse
historique de chacune
Couscous, soccer et identité des régions du
Québec. De la préhis-
Comment la diversité culturelle s’exprime-t-elle au quotidien? Les
enfants s’intègrent-ils davantage en improvisant une partie de soccer toire jusqu’à nos jours,
en bas de l’immeuble ou en s’inscrivant à une association sportive de chaque ouvrage
quartier? Qui fait la cuisine dans les couples culturellement mixtes? aborde les thèmes
Selon quelles préférences alimentaires? Et quelle influence ont relatifs à l’économie, à
ces plats sur l’identité culturelle de la famille? La redécouverte des la société, à la culture
produits du terroir est-elle une forme de métissage qui ne dit pas et aux institutions,
son nom? Le politicologue Daniel Latouche* a réuni les textes écrits d’une manière
par une vingtaine de chercheurs lyonnais et montréalais autour des accessible au grand
questions de diversité culturelle et d’identité, textes présentés lors public tout en
d’un colloque tenu à Montréal dans le cadre des Entretiens Jacques respectant les critères
Cartier. Sport, bouffe et culture alimentent les discussions. de la recherche scientifique. Le professeur-chercheur Normand
Perron* assume la direction du projet des Histoires régionales.
LATOUCHE, Daniel et autres. Voulez-vous manger avec moi ?, Montréal, Fides, 2003, 284 p.
Deux nouveaux ouvrages sont parus cette année dans la collection
Les régions du Québec.
Productivité et criminalité COURVILLE, Serge et autres. Histoire de Beauce-Amiante-Etchemin, Québec, Les Éditions
En enquêtant dans les villes de Belo Horizonte (Brésil), de Puebla de l’IQRC/Les Presses de l’Université Laval, 2003, 1056 p. (Coll. « Les régions du Québec »).
(Mexique), de San José (Costa-Rica), de San Salvador (El Salvador) HARDY, René et Normand SÉGUIN. Histoire de la Mauricie, Québec, Les Éditions de l’IQRC/
et de Montréal, les auteurs ont examiné l’impact des services Les Presses de l’Université Laval, 2004, 1144 p. (Coll. « Les régions du Québec »).

publics locaux sur l’économie des villes. Ils constatent que la FORTIN, Jean-Charles**. Les Îles de la Madeleine, Québec, Les Éditions de l’IQRC/Les Presses
de l’Université Laval, 2004, 192 p. (Coll. « Les régions du Québec… histoire en Bref »).
qualité de ces services influence significativement la productivité (Également en version anglaise)
d’une ville et de ses entreprises, en termes de coût mais aussi MIMEAULT, Mario. La Gaspésie, Québec, Les Éditions de l’IQRC/Les Presses de l’Université Laval,
2004,192 p. (Coll. « Les régions du Québec… histoire en Bref »).
de capacité à générer de la richesse. Leur étude démontre
notamment que la productivité des entreprises est d’autant plus
faible qu’elles sont installées dans des endroits où la criminalité
est élevée, et où les transports en commun font défaut.
FREIRE, Mila et Mario POLÈSE*, avec la collaboration de Pamela Echeverria. Connecting Cities with * : professeur-chercheur au centre Urbanisation, Culture et Société de l’INRS
macroeconomic concerns: the Missing Link, Banque mondiale, 124 p. ** : chercheur au centre Urbanisation, Culture et Société de l’INRS

Planète INRS_avril 2005


TOUR D’HORIZON_

Le mandat de M. Pierre Lapointe à titre sation administrative. De plus, il a Le directeur général poursuivra le

Bis! de directeur général de l’INRS a été


renouvelé pour une période de cinq
ans. Son premier mandat a été mar-
qué par le regroupement stratégique
des centres de l’INRS et une réorgani-
obtenu du ministère de l’Éducation la
modification de la formule de finance-
ment de l’INRS ainsi que des mesures
visant à faciliter la réussite étudiante et
le renouvellement du corps professoral.
développement amorcé et consolidera
des initiatives majeures au sein du
réseau de l’INRS.

Pignon sur rue


L’administration générale de l’INRS, l’équipe de Québec du centre Urbanisation,
Culture et Société, le centre Eau, Terre et Environnement et son partenaire,
la Commission géologique du Canada, division de Québec, occupent depuis
l’automne 2004 un tout nouvel édifice dans le quartier Saint-Roch, au centre-ville
de Québec. L’adresse : 490, rue de la Couronne, Québec (Québec) G1K 9A9.

Dans le vent
Le professeur-chercheur Gaëtan Lafrance
du centre Énergie, Matériaux et Télé-
communications a reçu le prix R.J. Templin
Inspirant !
2004 de l’Association canadienne de l’énergie éolienne, qui récompense «Aussi joli soit-il, on doit reconnaître que le nez humain est
notamment son travail de pionnier dans l’étude de l’intégration des grands somme toute bien peu performant. » C’est par ces mots que
parcs éoliens aux réseaux électriques existants. débute le texte qui a valu à Richard Dolbec, alors étudiant au
doctorat en sciences de l’énergie et des matériaux à l’INRS, sous
la direction du professeur-chercheur My Ali El Khakani, de

Questions de famille
décrocher un prix au concours de vulgarisation scientifique
de l’Acfas. Dans un style enlevé, le jeune chercheur explique
les défis du développement de nanomatériaux pour fabriquer
En février 2004, près de 200 personnes ont participé à un colloque passion- des senseurs à gaz ultrasensibles, «des super nez électroniques».
nant sur les nouveaux enjeux éthiques de la famille organisé par le partena-
riat Familles en mouvance et dynamiques intergénérationnelles. Les actes du
colloque intitulé Familles en transformation : quels enjeux éthiques ? seront
publiés prochainement. www.partenariat-familles.inrs-ucs.uquebec.ca L’INRS honore…
Tendances
Le Dicomode publié chez Fides par l’anthropologue Gérald Baril est le fruit
d’une recherche menée au centre Urbanisation, Culture et Société. C’est le
premier dictionnaire de la mode au Québec. Grands créateurs, magasins,
manufacturiers, mannequins, écoles, magazines et photographes défilent
au gré des 490 articles de l’ouvrage abondamment illustré, qui retrace
l’histoire d’une industrie fascinante, de 1900 à nos jours. Michelle
Comeau, agente de recherche au centre, y signe plusieurs articles. Pour le
plaisir des yeux et de la connaissance. En mars 2004, l’Université du Québec, sous l’égide de l’INRS,
remettait un doctorat honoris causa à Marcelline Picard-Kanapé,
BARIL, Gérald. DICOMODE, Dictionnaire de la mode au Québec de 1900 à nos jours, lors d’une vibrante cérémonie au Musée de la civilisation à
Montréal, Fides, 2004, 384 p.
Québec. Au-delà de son implication en politique et en éducation,
madame Picard-Kanapé n’a cessé de croire à la coexistence
harmonieuse des sociétés autochtones et non autochtones, dans
Planète INRS_avril 2005 le respect de leurs différences.

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