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Revue de Psychologie Appliquée 4* trim, 1987, vol. 37, n° 4, p. 359-377 IMAGE DE SOI EF PERCEPTION DES COMPETENCES PROPRES CHEZ L’ENFANT* (Présentation d'un questionnaire récent destime de soi pour enfants)** par B. PIERREHUMBERT, B. PLANCHEREL et C. JANKECH-CARETTA''* Mots clés: Key words: Estime de soi Self-esteem Image de soi Self-perception ‘Auto-évaluation Self-concept Questionnaire Self-worth Evaluation de la personnalité Personnality assessment SUMMARY Examination of a french version of S. Harter's Self-Perception Profile for Children is presented, Instead of viewing self-esteem as a unitary construct, the SPP consists of six subscales in which children’s sense of competence and self-esteem are assessed in different domains: scholastic competence, social acceptance, physical competence, physical appearance, self-control and self-worth, A question format is devised to reduce the tendency to give sociaily desirable responses. ‘Teachers have to fill in a * Travail réalisé dans le cadre d’un subside du Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique (subside N° 3.933.84), avec le soutien du Département de 1'Instruction publique du Canton de Vaud, et avec le concours de M"™* E. Meuwiy-Cuvarn, MM. P. Antonrerrr, F, Zanone et S, ARczyNski, @ qui nous tenons ici A exprimer nos remerciements, ** Perceived Competence Scale for Children, de S. Harter, Univer- sity of Denver, traduit en francais avec ’aimable autorisation de auteur. L’étude de validation compléte ainsi que le questionnaire peuvent étre obtenus & I'adresse des auteurs. “** Service Universitaire de Psychiatrie de I’Enfant et de V’Adoles- cent (Prof. W. Bertscuarr, chef de service), Lausanne, 360 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE rating scale including the same subscales. The factor structure indicates that children make clear differenciation among these domains. Reliability, age, gender and teacher-children differences are presented. A special emphasis is given to the discussion of the physical appearance subscale. 1, — Intropuction. L’importance de l'image que chacun se construit de lui-méme n'a évidemment pas a étre démontrée. Plusieurs instruments des- tinés A évaluer Pimage de soi, plus précisément Vestime de soi, ont été développés, aux Etats-Unis surtout, dés les années cin- quante. Il est en effet légitime de se demander si cette image constitue un élément stable ou au contraire fluctuant de la per- sonnalité, si elle posséde un caractére généralisé ou au contraire différencié, selon les circonstances ou les aspects de la personne qui sont concernés, si elle varie naturellement avec V’age, l’expé- rience ou encore certaines conditions particuliéres. Or, Vidée méme a’établir un indice de la satisfaction subjective de soi-méme, a l'aide de questionnaires mobilisant les images conscientes du sujet est propre, on s’en doute, A suggérer la mé- fiance. Quelle validité donner a cette image, établie 4 l'aide d’une méthode laissant une large prise au désir de paraitre, A la « dési- rabilité sociale ». Le fait que ces questionnaires satisfassent aux critéres de validation de tests n'est évidemment pas en soi une garantie quant a la pertinence psychologique de ce qu’ils mesurent. A cela, nous répondrions que Vestime de soi évaluée par un questionnaire consiste avant tout en une image, image que le sujet veut bien présenter aux autres, probablement en compromis avec des sen- timents plus intimes, et qui échappent au questionnaire. Mais elle est malgré tout une image et a ce titre, avee toutes les précau- tions qui s'imposent, elle mérite un examen critique. Lvouvrage de R.C. Wyte (1961) constitue dans les pays anglo- saxons une référence en matiére de questionnaires de self-concept. Malgré Pabondance de ce type d’instruments, Wy.Ie ne présente que deux questionnaires d’estime de soi destinés aux enfants, le Piers-Harris Children’s self-concept scale (PH, 1964, premiére version) et le Coopersmith Self-Esteem Inventory (SEI, 1959). Le second a fait Pobjet d’une traduction francophone par les Edi- tions du Centre de Psychologie Appliquée (1984). A notre connais- sance, i] est Punique questionnaire d’estime de soi destiné aux enfants disponible en langue frangaise. Depuis la publication de Ja révision de l'ouvrage de Wve (1974), de nouveaux questionnaires ont vu le jour. L'un d’entre IMAGE DE SOT CHEZ L’ENFANT 361 eux, le Harter Perceived Competence Scale for Children (1979, premiére version), actuellement désigné Self-Perception Profile for Children (SPP), a particuliérement retenu notre attention. On remarquera que sa dénomination ne comporte pas de réfé- rence explicite & l’estime de soi, Ceci refléte les présupposés de Vauteur, qui veut amener l'enfant & une réflexion sur ses compé- tences propres, En d'autres termes, les questions vont porter sur des domaines oi l’'action a normalement prise, et éviter de mobi- liser une image contemplative de soi. Ce choix, associé A un for- mat particulier des questions (nous en reparlerons), en fait un. instrument remarquablement accessible et attrayant pour l’en- fant. Nous avons ainsi voulu le rendre disponible en frangais. Nous présentons ici les résultats de Pétude de validation du questionnaire traduit. Nous exposerons ensuite quelques données particuliéres illustrant I'intérét de cet instrument. TI. — REVUE COMPARATIVE DE TROIS QUESTIONNAIRES FOUR ENFANTS : LE PH, LE SEI EF LE SPP. Ces trois questionnaires sont destinés aux enfants agés de 8 a 15 ans environ. Notons que la version francaise du SEI n’a été validée que sur des enfants Agés de plus de 12 ans. Les domaines abordés au travers des questions sont assez semblables pour les trois instruments : la scolarité, le comportement, lapparence phy- sique, les relations sociales et la satisfaction, générale. Le PH et Je SEI sont présentés sous forme d’une liste de questions A choix foreé. Les 80 questions du PH ont le format suivant: I am good looking ... (j'ai bonne apparence... oui/non. Les autres questions sont du type: je suis une personne heureuse; je suis timide, ete.). Bien que les auteurs du questionnaire relévent la présence de plusieurs facteurs, ils ne tiennent compte que d’une note totale, indice d'une estime de soi globale. Les 58 questions du SEI (version francophone) se présentent sous la forme : Je suis assez stir de moi ...... me ressemble / ne me ressemble pas Le SEI considére a ja fois une note globale et des notes par- tielles 4 différentes échelles, mises en évidence par V’analyse fac- torielle. A cela s'ajoute une échelle Mensonge, visant A évaluer le degré de « désirabilité sociale » ou le désir de paraitre de Yenfant : 362 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE Je ne suis jamais inquiet .... me ressemble / ne me ressemble pas (une réponse affirmative A cette question va dans le sens de la désirabilité sociale). Un des avantages du SPP réside dans la présentation originale des questions. Tout d’abord, en vue de réduire leur valence positive- négative, les questions sont A double choix, chacune des alter- natives étant formulée spécifiquement (format déja utilisé par un autre questionnaire, celui de Stager-Young, 1982, sur lequel nous ne nous attarderons pas en raison de sa validité limitée). Le choix est alors banalisé. En effet, la formulation de la question sous-entend que le monde serait partagé en deux sortes d’en- fants, correspondant chacune l’un des volets de V’alternative, et le sujet est appelé a s'identifier 4 Pune ou a4 Vautre. On lui per- mettra encore de pondérer son choix, en déterminant s'il se sent «vraiment comme ca» ou seulement «A peu prés». Chacune des 36 questions se présente sous la forme suivante, une fois traduite : vraiment 4 peu prés a peu prés vraiment ‘comme moi comme moi comme moi comme moi certains enfants autres font 0 0 travaillent len- mais leur travail 0 0 tement a Vécole vapidement L’analyse factorielle confirme Pexistence de domaines distincts. Il convient de noter que les auteurs divergent quant l'utilisation de notes partielles, et ceci en regard de considérations théoriques. Alors que le PH néglige les notes partielles pour ne conserver que la note totale et que le SEI considére 4 la fois note totale _ et notes partielles, Pauteur du SPP conteste pour sa part le fait détablir un indice global d’estime de soi par Ie cumul de notes provenant ditems qui se référent A des domaines disparates. Selon S. Harter, il n’existerait pas d’image généralisée de soi. Autrement dit, les enfants ne se sentiraient pas également « com- pétents » dans chaque domaine (la plupart des questions étant centrées sur lappréciation des compétences propres). Les seules notes retenues par le SPP seront ainsi les notes partielles, dont on peut extraire un profil. Le questionnaire comporte six groupes items, ou échelles, procurant les notes partielles, Us se rap- portent aux domaines suivants : 1. La compétence dans le domaine de TECOLE (abrégée par la suite F) : items relatifs & des aspects scolaires (faire bien son travail & Pécole, etc.) aussi bien que cognitifs (se rappeler aisé- ment des choses, etc.). IMAGE DE SOI CHEZ L'ENFANT 363 2, La compétence SOCIALE (S) : relations avec les pairs et popularité (avoir beaucoup @amis, etc.), 3. La compétence PHYSIQUE (P) : items essentiellement rela- tifs aux activités sportives. 4, L'APPARENCE physique (A), items ajoutés dans la révi- sion de 1983 et qui s’écartent des compétences proprement dites. Ils concernent le degré de satisfaction de Venfant face 4 son apparence physique (taille, poids, présentation, etc.). 5, La CONDUITE (C), items également ajoutés dans la révi- sion de 1983. Ils concernent le degré de satisfaction de Venfant face A son propre comportement, dans le sens de ses capacités d’auto-contréle. 6. Le sentiment de VALEUR PROPRE (V) : il s'agit 1A d’une sous-échelle destinée 4 évaluer V'estime de soi dans son sens plus traditionnel, mais Yauteur précise bien que, a la différence des autres questionnaires, cette note d’estime de soi n'est pas établie sur une somme de réponses concernant des domaines disparates. Il s’agit au contraire d'items questionnant directement Venfant sur son sentiment de valeur propre (étre satisfait de soi, de sa vie, ete,). Le questionnaire anglais révisé comprend 6 items pour cha- cune de ces 6 échelles. Ces questionnaires ont été validés par des études spécifiques. Ainsi, les coefficients de fidélité et de stabilité rapportés sont géné- ralement satisfaisants et permettent d’affirmer que V’enfant, & 8 ans déja, posséde une image de soi douée d’une stabilité certaine. L’auteur du SPP mentionne par ailleurs une remarquable stabi- lité des profils aux différents Ages examinés, Aucun de ces instru- ments n’a mis A jour une tendance systématique d’évolution de Vimage de soi aux Ages concernés. De méme en ce qui concerne le sexe, ni le PH ni le SEI ne rapportent des différences systé- matiques entre garcons et filles. Par contre, les profils obtenus avec le SPP monirent que les garcons se pergoivent de facon plus valorisante que les filles sur le plan de leur compétence physique, de leur apparence ainsi que de leur valeur propre. Les filles se pergoivent par contre plus positivement que les gargons sur le plan de leur conduite. Les trois questionnaires montrent des liens entre Yimage de soi et le niveau intellectuel ou la réussite scolaire, dans Je sens d'une diminution de l’estime de soi chez les enfants moins favo- risés intellectuellement ou scolairement. Le SPP montre, comme 364 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE on peut s'y attendre, que les enfants souffrant de troubles de Vapprentissage tendent & se sous-estimer sur Péchelle scolaire. D’autres relations ont été mises en évidence entre l’estime de soi et certains aspects de la personnalité, comme entre le PH et un questionnaire d’anxiété, entre le SPP et le got de compé- tition, ’autonomie dans la motivation ou la curiosité. Ces données suggérent que I'estime de soi refléte bien des spécificités indivi- duelles, pour autant évidemment que l'enfant soit suffisamment mir pour posséder une image stable de lui-méme. Toutefois, Ja relation entre estime de soi et personnalité pourrait étre trés complexe. CoorersmrH (1959) suggére ainsi qu’une estime de soi peu élevée ne refléte pas forcément la pauvreté de Vidéal de soi. Au contraire, elle refiéterait un conflit entre le vécu de la réalité et un idéal trop élevé. Mais, dans la constitution de cette image «manifeste » de soi entre encore une autre composante de la personnalité, le désir de parattre. Les auteurs du PH ont ainsi trouvé une relation élevée entre leur questionnaire et l’échetle de «désirabilité sociale » de Crandall. Si ces auteurs admettent bien que Veffet de désirabilité déforme les résultats au question- naire, ils pensent néanmoins qu’un score faible au PH «refléte véritablement une estime de soi défavorable, et ainsi ne doit pas étre négligé » Le SEI, on I’a mentionné, comporte une série @items destinés a contréler l’effet de désirabilité sociale. Or, cette échelle mensonge n'est que modérément corrélée avec les autres échelles composant le SEI. Liimage de soi et le point de vue des autres. Les auteurs de chacun de ces questionnaires, et cest 1a une particularité intéressante, ont voulu évaluer le degré de concor- dance entre image que l'enfant donne de Iui-méme et celle que @autres personnes ont de lui, en occurrence celle de son ensei- gnant. Les indices de concordance sont trés variables, mais une utilisation intéressante de ces indices est faite par l’auteur du SEI, qui différencie les enfants selon que leur image d’eux-mémes est ou n’est pas congruente avée celle de l’enseignant. Ainsi, les enfants dont la perception n’est pas concordante — dans un sens positif ou négatif — se distinguent par une attitude défensive et un fort niveau d’anxiété, L’évaluation des décalages entre la per- ception de soi et impression d’autrui se révélerait alors aussi fructueuse que la simple évaluation de Vimage de soi. L’auteur du SPP propose A Venseignant un questionnaire composé d’échelles similaires & celles qui sont soumises 4 enfant. La concordance entre les deux points de vue augmente avec lage IMAGE DE SOI CHEZ L’ENFANT 365 de Venfant, L’auteur suggére que celui-ci se construirait une image de soi de plus en plus proche de ses compétences réclles. On trouve une littérature trés abondante traitant des rela- tions du PH et du SEI avec diverses autres variables. Le SPP est encore & cet égard trop récent. JIL, Le spp ET SA TRADUCTION FRANCAISE. Nous avons réalisé une étude de validation francophone du questionnaire SPP. Nous en restituons tout d’abord les grandes dignes. Nous nous intéresserons ensuite aux interactions entre les diverses échelles ainsi qu’aux relations entre celles-ci et image fournie par ladulte. A cet égard, le SPP comprend une échelle intéressante, qui ne figure pas en tant que telle dans Jes autres questionnaires : Véchelle A, ou apparence physique. Il s'agit de la satisfaction de Venfant face & Vimage physique qu’il offre aux autres. Les don- nées de Hanrer laissent supposer que ce sentiment occupe une place importante dans Vimage de soi. Nous attacherons un intérét particulier a la vérification de ce point ainsi qu’ la question de savoir si la satisfaction face 4 Vimage offerte aux autres est par- tagée ou non par ceux-ci. Nous envisagerons ensuite les variables Age et sexe dans le contexte de ces interactions entre estime de soi, satisfaction face Vimage que l’on offre aux autres et estime que les autres ont de soi, Dans le cadre de la problématique de la pré-adolescence, ces données pourraient étre particuliérement suggestives. La traduction a été réalisée par un groupe de psychologues; une premiére version traduite a été soumise & un groupe d’enfants présentant des difficultés scolaires afin de s’assurer de sa compré- hension dans les cas limites, puis la traduction a été améliorée et soumise A nouveau. Nous avons évidemment cherché & respecter au plus prés Vesprit des questions originales, tout en maintenant celles-ci compréhensibles par l'enfant. Nous sommes conscients qui s’agit d'un difficile compromis et que nous n’avons probable- ment pas pu restituer, dans le langage de Penfant francophone, toutes les nuances du questionnaire original. Population, 315 enfants (160 garcons et 155 filles), provenant de 16 classes, ont répondu au questionnaire en situation de passation collective, par classe. Tous ces enfants proviennent d’une méme ville suisse 366 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE francophone, sélectionnée en raison de caractéristiques intéres- santes du point de vue de la représentativité de Péchantillon ; urba- nisme mixte urbain, suburbain industriel, suburbain résidentiel et rural. Cet urbanisme particulier implique un brassage socio-écono- mique important et une mixité entre population autochtone et population étrangére, Ces enfants sont distribués de fagon uniforme entre le troisitme et septisme degré scolaire (Ages moyens de 9 & 13 ans), La passation a été effectuée au milieu de V’année scolaire, de maniére & ce que les enseignants connaissent suffisamment leurs éléves, tout en évitant les désagréments de fin d’année. Les ensei- gnants ont répondu «A téte reposée » A leurs questionnaires. 27 de ceux-ci ont été écartés pour données manquantes. Ils concer- naient des éléves que les enseignants estimaient ne pas encore connaitre suffisamment pour pouvoir répondre ou, dans un cas, un enseignant remplacant, pas assez familiarisé avec sa classe. Aprés trois & quatre mois, le questionnaire SPP a été soumis A nouveau A i’une des classes (21 enfants du quatriéme degré, dont 9 garcons et 12 filles), en vue d’évaluer sa stabilité temporelle. Par la méme occasion, ces 21 éléves ont ensuite rempli l'Tnventaire dEslime de Soi (SED. IV, — Résuntats. a) Validation du questionnaire : structure, consistance interne, stabilité. Cet instrument étant desting & fournir non pas une note globafe mais bien plusieurs notes s’articulant en un profil, nous avons voulu en verifier la structure. Nous avons procédé de la méme maniére que Vauteur américain: nous avons exclu de Yanalyse en facteurs les items relatifs au sentiment général de valeur-propre, destinés & recucillir un sentiment plutét général gue spécifique. Une premiére analyse factorielle par rotations obliques a été effectuée sur lensemble des 30 questions (rotation avec normalisation de Kaiser, delta = 0). Cette analyse nous a permis d'isoler et d’éliminer § items inconsistants, un par domaine (items dont la saturation est inférieure A un seuil fixé A .28, ou atteignant la saturation la plus élevée dans un domaine inconsis- tant avec leur contenu apparent). Une nouvelle analyse par rotations obliques nous a permis de confirmer que ce questionnaire, dans sa version francophone, est bien constitué de facteurs, et que ceux-ci se superposent & IMAGE DE SOI CHEZ L’ENFANT. 367 ceux de la version anglophone. La saturation moyenne des items dans leurs facteurs respectifs se situe a .56. Nous pouvons donc interpréter ces facteurs comme des échelles (E, S, P, A, C). Doré- navant, nous ne parlerons donc plus de facteurs, mais bien d’échel- les. En rajoutant 5 items du domaine « valeur-propre » (V), nous obtenons un questionnaire en 6 échelles de 5 items. Nous avons alors calculé le coefficient de consistance interne (alpha de Cronbach), séparément pour chacune de ces six échelles. Nous obtenons des coefficients acceptables, quoique inférieurs a ceux de l'étude américaine. Ils sont présentés dans le Tableau I. TapLeau I Coefficients de consistance interne (alpha, N = 315) et de stabilité temporelle (r, N = 21), pour les 6 échelles; concordance éléves- enseignants (r, N = 288), pour les 5 premiéres échelles, avec niveaux de signification correspondants; coefficients de corrélation des 6 échelles avec la note totale du SEI et avec Vindice Mensonge du SEI (NV = 21). consistance stabilité concor- note indice interne tempo- — dance_-—totale. | Mensonge relle éléves- SEI SEI enseign. n= 315 2oon= 28 n=A naa E (école) 15 65 .67** 32 S Gocial) 7 72 37 ae P (physique) “7 44 32 39° A (apparence) nee 64 24 61"" © (onduite) 64 AS 35 35 V (val.-propre) 70 03 sBTt* 56** "P< =O PCH 01; P< = OL En ce qui concerne la stabilité temporelle, les données xepor- tées dans le Tableau I sont purement indicatives, ce coefficient n’ayant été évalué, nous Vavons mentionné, que sur un échantillon trés restreint de 21 enfants. Alors que les échelles E, S, A et P montrent une stabilité acceptable, les échelles C et surtout V donnent des coefficients curieusement quasi nuls. Nous revien- drons avec des données supplémentaires sur la question de cette dernigre échelle. Conclusion de étude de validation. Le questionnaire, dans sa traduction francophone, permet de déerire avec une certaine fiabilité la perception par l'enfant de 368 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE divers aspects de ses compétences et de sa valeur propre. Ces aspects sont distincts les uns des autres et forment un profil de Ja perception de soi, Chaque échelle peut ainsi recevoir un score, qui correspond 4 la moyenne des notes aux items constituant Véchelle (les notes aux items vont de 1 a 4, 4 représentant le choix le plus favorable du point de yue de lestime de soi). b) Résultats particuliers. Nous allons tout d’abord envisager les relations des échelles entre elles, puis entre celles-ci ct d'autres variables. Relations entre les échelles. Si les échelles permettent de cerner des images différenciées de soi, elles sont néanmoins loin d’étre indépendantes les unes des autres. Le tableau II présente les inter-corrélations des six échelles pour les questionnaires remplis par les enfants ainsi que pour ceux remplis par les enseignants (I’échelle V n’est pas repré- sentée dans ce cas). Tanteau IT Inter-corrélations entre échelles, pour les questionnaires remplis par les enfants et pour les questionnaires remplis par les enseignants s P A c v (valeur- (Gocial} (physique) (apparence) (conduite) propre) QUESTIONNAIRES ENFANTS (N = 315) : E (école) 25°" att Botte 30°" S Gocial) 27 arte att P (physique) watt* -12* A (apparence) wartt C (conduite) QUESTIONNAIRES ENSEIGNANTS (N = 288) : E (école) -20°7* wage 46" wsgttt S (Social) ar .60"** 22" P (physique) aan -16** A {apparence) sat "Pea “PCS OL P< = OL De ce tableau ressortent certains réseaux de relations. Tout d’abord dans les questionnaires des enfants, ot les inter-corréla- tions sent plutét modestes et révélent une relative indépendance IMAGE DE SOI CHEZ L'ENFANT 369 des échelles, deux groupes se dessinent néanmoins: d’une part entre PEcole et la Conduite et d’autre part entre le Social, PAppa- rence et le Physique. Ces réseaux sont en soi intéressants, mais le fait le plus marquant est sans doute que, exception faite du sentiment général de Valeur-propre, l’Apparence soit Péchelle la plus fortement lige 4 chaque autre domaine. Du reste, c’est elle qui posséde la liaison la plus forte avec la Valeur-propre, confir- mant ainsi la position centrale, dans la satisfaction de soi, du sentiment face & sa propre apparence. Comme on ne peut dores et déja exclure Vexistence d’un lien entre ces échelles et V’age, lien qui pourrait expliquer une partie de ces coefficients, nous avons analysé les corrélations partielles en contrélant la variable degré scolaire. Les résultats montrent que les corrélations sont trés peu influencées par cette variable et que la structure des relations mise en évidence n'est en rien modifiée, Nous avons en outre examiné ces coefficients calculés pour chaque degré scolaire s¢parément. Nous retroavons de facon constante les associations Ecole-Conduite; Social-Apparence-Phy- sique. Nous n’observons ni augmentation ni réduction particuliére de ces coefficients avec Page. Dans les questionnaires remplis par les enseignants, les échelles sont bien plus dépendantes les unes des autres et, encore plus nettement que chez Venfant, Papparence tient une position cen- trale. Il n’est pas sans intérét de voir que non seulement V’hypo- these de l'importance fondamentale de l’apparence physique dans le sentiment d’estime de soi est confirmée, mais que ce phéno- méne se reproduit dans le point de vue d@’une personne extérieure. Or, le fait étrange est que le sentiment de l'enfant face a sa propre apparence n’a aucun rapport avec V'appréciation de V’adulte. Le Tableau I montre que les jugements des enfants et des ensei- gnants sont relativement concordants, sauf en ce qui concerne T’Apparence ( = .00). A cela, deux explications nous paraissent plausibles: ou bien le sentiment d’apparaitre physiquement de facon favorable n’exprime qu’un désir de paraitre; ce sentiment ne peut done étre partagé. Ou bien la fagon dont autre nous voit n’est que l’expression d'un effet de contagion perceptive avec l’ap- préciation concernant d’autres domaines, dont celui de l’Ecole; il n’y a alors pas plus de raisons que ce sentiment soit partagé. Nos données ne nous autorisent évidemment pas 4 trancher, tou- tefois rien n’exclut que les deux phénoménes jouent simultanément. Concordance avec le SEI. Nous avons done proposé lInventaire d’Estime de Soi (SEI) 4 21 élaves du quatriéme degré, ayant par ailleurs répondu au SPP. 370 REVUE DE PSYCHOLOGIE APPLIQUEE Le SEI produit 6 indices. Is sont relatifs aux domaines Social, Famille, Scolaire et Général; cela s’ajoute un indice Total, résultant de l'addition des précédents, ainsi qu’un indice Men- songe. Comme il est hors de propos de produire toutes les inter- corrélations possible, nous présentons dans le Tableau I les coef- ficients de corrélation entre chaque échelle du SPP et Vindice ‘Total du SEI. Ceux-ci se révélent généralement élevés. Soulignons toutefois que Véchelle Apparence obtient un coefficient faible (ignificativement plus faible que les coefficients concernant les échelles E et S, selon la formule de Olkin et Siotani). Ce qui n'est pas sans intérét, car si l’on examine maintenant les relations entre les échelles et Pindice Mensonge du SEI (Tableau I égale- ment), l’Apparence regoit cette fois un coefficient élevé (sans étre significativement plus élevé). Ceci nous confirme dans Vidée que le sentiment face A l'apparence propre concernerait plus le désir @offrir une image favorable que la satisfaction générale de soi. On comprend de ce fait son manque de lien avec Vappréciation de l’adulte. Ce qui n’exclut pas que l’évaluation de l'adulte subisse elle-méme des distorsions. Notons que, pour V’échantillon consi- déré, les corrélations de l'indice Mensonge avee Jes autres échelles du SEI sont du méme ordre de grandeur que les corrélations Mensonge —- échelles du SPP. L’effet de désirabilité sociale sur ces deux questionnaires serait ainsi comparable. Age (degré scolaire) et sexe. Le Tableau III présente les scores aux 6 échelles, par degré scolaire et par sexe. Nous avons évalué ces deux variables au moyen d’analyses de variance (MANOVA), dont les résultats sont rapportés dans le tableau en termes de significations. La figure 1, qui illustre l’évolution des échelles relativement au degré scolaire, montre que Vestime de soi ne tend pas 4 aug- menter avec l’age, bien au contraire. En fait, les échelles Ecole et Physique marquent un affaiblissement assez progressif du troi-. siéme au septiéme degré scolaire alors que les autres montrent une nette augmentation des scorés du troisiéme au quatriéme ou au cinguiéme degré, puis une diminution abrupte du cinquiéme au septiéme degré. L’analyse de variance confirme V’existence de différences signi- ficatives liges au degré scolaire pour les échelles Ecole, Apparence et Conduite. L’analyse des tendances (Trend Analysis) confirme par ailleurs Vallure quadratique des courbes d’évolution obtenues pour les échelles Conduite et Social, auxquelles on peut encore ajouter Apparence et Valeur-propre si Yon admet un p < .10.

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