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Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens Re) Service d’information TABLE DES MATIERES Le PAPE JEAN-PAUL IT ET VOECUMENISME, a0dt-décembre 2008 soucwinnnsnenninnnininsennen 149 [RELATIONS AVEC LE PATRIARCAT CECUMENIQUE, 152 Remse des rliqus ds sins Jean Chrysostome et Grégoire de Nazianze, 27 novembre 2004 152 Delégation du Saint Sige au Phanar pour la féte de saint André, 30 novembre 2004... 154 (CELEBRATION DU 5¢ ANNIVERSAIRE DE LA DECLARATION CONIOINTE ‘SUR IA DOCTRINE DE LA JUSTIFICATION scien 159 [NOUVELLES GECUMENTOUES sos vw 168 CCocnastion miste pour le dialogue entre Fglse catholique ct. Mgise halaakare erie ‘orthodoxe, 11 octobre 2004 165 Comission minte pour le dialogue entre PEglse catholique et Bglise malankare ortho- doxe syrienne, 13-14 octobre 2004 165 Commission mixte pour le dialogue international méthodiste-catholique, 22-29 octobre 2004 : Commission mixte pour le dialogue entre IEglise catholique et I'Bglise assyrienne de Orient, 19-22 novembre 2004 167 Commission intemaionale de dialogue entre les Disciples du Christ t glise catho- 166 lique, 6-11 décembre 2004 .. 168 Consultation baptiste-atholique, 10-11 décembre 2004 169 (CoMMUSSION POUR LES RELATIONS RELIGIEUSES AVEC LE TUDAISME ons poe 17 DocuMeNtsTion SUPPLEMENTAIRE 12 Huitizme Rapport du Groupe Mixte de Travail entre IEglise catholique et le Conseil ‘zcuménique des Eglises (1999-2005) mm DocuMENTs D/ETUDE DU GROUPE MIXTE DE TRAVAIL: Implications ecelésiologiques et cecuméniques du Baptéme commun 193 Nature et objet (purpose) du dialogue cecuménique .... 2 «cInspirés par la méme vision », la participation catholique aux Conseils cecuméniques nationatx et régionaux 222 BUREAUX: Via dell’Erba, 1 - 00193 Rome (Italie). Téléphone: 06.698.84085 (Rédaction) - 06.698.83074 (Administration) JEAN-PAUL II ET L(ECUMENISME Aotit-décembre 2004 DISCOURS AU NOUVEL AMBASSADEUR D'IRLANDE PRES LE SaN-SIEGE 4 septembre 2004 Dans la matinée du samedi 4 septembre 2004, le Pape Jean-Paul Il a regu en audience S.E.M. Philip McDonagh, nouvel Ambassadeur d'Trlande prés le Saint-Sidge, gui a présenté les Lettres qui Vaccréditent dans ses hautes fonctions. Nous publions ci-dessous tun extrait du discours du Saint-Pore. (..) Vous avez souligné les espoirs de l'Irlande dans le processus de paix. Je prie pour que tous les efforts soient accomplis afin de bénéficier des oppor. tunités offertes par le « Good Friday Agreement », qui @ apporté un nouvel élan et un nouvel espoir att peuple d'lrlande du Nord. LEglise catholique qui est en Irlande, en collaboration avec d'autres commu nautés chrétiennes, sengage a consolider les attitudes positives de compréhension, de respect et d'estime Pour les autres, a travers des activités cecuméniques ‘et des efforts dans le domaine de éducation, Le mes- sage de lEvangile ne peut étre séparé de Vappel a un changement dattitude, lévangélisation ne peut pas non plus étre séparée de Veecuménisme et de la pro- motion de Tamitié, de la réconciliation et de Fouver- ture aux autres, en particulier aux autres chrétiens. Puissent les initiatives de tous ceux qui recherchent |i paix et la reconciliation recevoir la grace de Dieu et porter des fruits pour les enfants de demain. (...) ‘ORE, 14.09 2004 AUDIENCE AU PRESIDENT DE LA REPU! 30 septembre 2004 Dans la matinée du jeudi 30 septembre 2004, le Pape Jean-Paul Ia recu en audience S.E. M. lon Iliescu, Président de la République de Roumanie. Nous publions ci-dessous un extrait des paroles prononcées ar le Saint-Pere au cours de la rencontre: QUE DE ROUMANIE Monsicur le Président, Je vous souhaite une cordiale bienvenue et vous exprime ma vive gratitude pour votre visite, a Tocca- sion de laquelle est inaugurée, dans les Musées du Va- tican, exposition intitulée de fagon emblématique: «Etienne le Grand, un pont entre UOrient et l'Occident» La rencontre daujourd’hui m’offre Vopportunité de rappeler avec émotion et reconnaissance la mémorable visite que jai eu la joie d'accomplir en Roumanie en 1999. Pélerin de foi et d’espérance, vous m'aver. accueilli avee chaleur et enthousiasme, ainsi que les Autorités de l’Etat, Sa Béatitude le Patriarche Théoctiste ct tout le peuple de la vénérable Eglise orthodoxe de Roumanie. Je recus un accueil particuliérement fraternel de la part des Evéques et des bien-aimées communautés catholiques, de rite byzantin comme de rite latin. (...) ORF, 26.10.2008 AUDIENCE: A UN PELERINAGE DU DIOCESE DE ROCHESTER 25 octobre 2004 Dans la matinée du lundi 25 octobre 2004, le Pape Jean-Paul Ia recu en audience, dans la Salle du Consistoire, le pélerinage du diocese anglican de Rochester (Grande-Bretagne), @ occasion dit 1400 an- niversaire de ‘ordination de saint Juste. Nous publions ci-dessous les paroles prononeées en anglais ar le Saint-Pére @ cette occasion: Chers amis du diocése anglican de Rochester, Je suis heureux de vous saluer alors que vous en- treprenez un pélerinage de Rome en Angleterre, & Toccasion de la célébration du mille quatre centiéme anniversaire de Yordination de saint Juste, premier Evéque de Rochester. Vous marchez sur les pas de saint Augustin de Canterbury et de saint Juste, qui furent envoyés par mon illustre Prédécesseur, saint Grégoire, pour précher I'Evangile dans votre pays. Puisse votre pélerinage constituer une occasion denrichissement spirituel et un encouragement 2 persévérer sur le chemin de la pleine comunion. Je ‘yous aecompagne par ma priére et ma Bénédiction, ‘ORE, 02.11.2004 DIscoURS AU NOUVEL AMBASSADEUR DE LA REPUBLIQUE, ISLAMIOUE DTRAN PRES LE SAINT-SIEGE 29 octobre 2004 Dans la matinée du vendredi 29 octobre 2004, le Pape Jean-Paul Ida recu en audience solennelle S.E. M. Mohammad Javad Faridzade, nouvel Ambassadeur de la République islamique d'ran pres le Saim-Siége, qui a prisenté les Lettres qui Vaccréditem dans ses hautes fonctions. Au cours de la rencontre, le Saint-Pére et le nouvel Ambassadeur ont procédé au traditionnel échange de discours. Nous publions ci-dessous une partie du discours du Saint-Pere: 149 (...) Parmi ces droits fondamentaux figure au premier plan le droit & la liberté religieuse, qui est un Aspect essentiel de la liberté de conscience et qui manifeste précisément la dimension transcendante de Ia personne. Le Saint-Si¢ge compte sur l'appui des Autorités iraniennes pour garantir aux fideles de [Bglise catholique en Iran, ainsi qu’aux autres chrétiens, la liberté de professer leur religion et pour favoriser Ia reconnaissance de la personnalité juri- dique des institutions ecclésiastiques, leur assurant ainsi un travail plus facile au sein de la société ira hhienne. En effet, la liberté de culte rest quun aspect de la liberté religieuse, qui doit étre la méme pour {ous les citoyens d'un pays. (..) A travers votre personne, je suis heureux de pouvoir saluer les communautés catholiques de diffe Tents rites qui vivent en Tran, assurant avec leurs freres orthodoxes la continuité de la présence chré: tienne depuis des sigcles. Je souhaite que les chré- tiens, qui ont toujours cu le désir de vivre en bons termes avec les musulmans, approfondissent toujours davantage les exigences du dialogue de la vie quotidienne, & travers les différents aspects de la vie sociale commune (...) ‘ORE, 02.11.2004 Mes 18 novembre 2004 SAGE AUX CHEFS RELIGIEUX D'AZ Le 18 novembre, le Pape Jean-Paul I] a regu en audience les chefs religieux d’ Azerbaidjan. Une rencontre- Syinbole qui montre aut monde que la tolérance est pos- sible et constitue une valeur de la civilisation. Bien-aimés et véenérés fréres! 1. Je vous accueille avec affection et fadresse & tous mon salut de paix. ‘Je vous souhaite fa bienvenue Cheik-ul-Islam, chef de la Présidence des Musulmans du Caucase, ‘gui, avec une constante abnégation, vous prodiguez pour édifier la paix dans une région o, malheureuse- ment, de violents conflits se poursuiyent. ‘Je vous souhaite la bienvenue Evéque Aleksandr de Bakou et de la région de la Mer Caspienne, appar- tenant & lEglise orthodoxe russe, a laquelle me Tient des liens destime et affection. Je vous souhaite la bienvenue, chef de la Commu- nauté des juils de la Montagne, une communauté ancienne qui offre, dans un contexte a tes grande majorité islamique, un exemple de coexistence et de collaboration fratemelle 2. Votre visite m’a rappelé celle que Diew m’a dni accompli en Azerbaidjan en 2002 (C_.) Je souhaite de tout ceur quen Azerbaidjan revicnne pleinement la paix, avec la résolution de la Question du Nagorny-Karabakh, Celle-ci, ainsi que autres controverses, doivent étre affrontées avec bonne volonté, dans la recherche mutuelle douver- tures réeiproques et de compréhension, et dans un esprit de véritable réconeiliation 150 3. Chers amis, je vous remercie de votre visite, De relour chez vous, apportez 2 tous le baiser du Pape et de TEalise catholique, Que Dieu vous aide a const une coexistence toujours plus profitable entre vous ct la communauté catholique d’Azerbaidjan. A celle-ci et A son Ordinaire, le cher Pere Jan Capla, jenvoie ma pensée affectucuse, en priant le Seigneur pour qu'il l'aide & poursuivre la mission évangélique dans Je Caucase. 4. Que votre visite au Pape de Rome soit comme un symbole pour le monde: c’est-a-dire qu'elle monire que la tolerance est possible et constitue une valeur de la civilisation, qui établit Jes bases pour un développement humain, civil et social plus vaste et solidaire. Personne n’a le droit de présenter ou d'utiliser les religions comme instrument d'intolérance, com- me moyen dagression, de violence et de mort. Au Contraire, leur amitié et leur estime réciproque, si elles sont également soutenues par l'engage- ment de tolérance des gouvernants, constituent une riche ressource pour un progrés et une paix authen- tiques. 5. Ensemble — musulmans, nous voulons lancer au nom de Dieu et de la civilisa~ tion, un appel a Thumanité afin que cesse la violence homicide et que l'on parcoure la voie de 'amour et de la justice pour tous. Telle est la voie des religions. ‘Que Dieu nous aide & parcourir cette voie avec persé- vérance et patience! ORE, 23.11.2004 Discoues AU NOUVEL AMBASSADEUR DE NORGEGE PRES Le SAINF-SIEGE 16 décembre 2004 Dans la matinée du jeudi 16 décembre 2004, le Pa- pe Jean-Paul II a regu en audience S.E. M, Lars Petter Forberg, nouvel Ambassadeur de Norvege pres le Saint-Sibge, quia présenté les Lettres qui Vaceréditent dans ses hautes fonctions. Au cours de la rencontre, te Saint Pore et le nouvel Ambassadeur ont procédé au traditionnel échange de discours. Nous publions ci-dessous un extrait du discours du Saint-Pore: ‘Au cours de ma visite pastorale dans votre pays, je suis vent en tant que pélerin soubaitant rendre hommage aux vies de saint Olav et des autres grands saints du Nord, dont exemple évoque aujourd'hui encore les vérités et les valeurs profondes qui ont fagonné la culture norvégienne depuis mille ans. Ces principes directeurs conservent toute leur importance pour Ia société contemporaine, car ils révelent «la Sphere la plus profonde de Yhomme » et Jui donnent fle sens de son existence dans le monde» (cl. Re- demptor hominis, 10). (...) Depuis le début de mon Pontificat, j'ai fait de Fe gagement leecuménisme une priorité de ma sollici- tude et de mon action pastorales. La conscience de Thistoire commune partagée par les chrétiens a en- couragé un sentiment de fraternité et de dialogue, et le témoignage chrétien en vue de la promotion. du Royaume de Dieu parmi nous (cf. Ur unum sint, 41). A cette fin, fencourage tous les responsables reli gieux de votre nation a persévérer sur la voie de T'uni- té chrétienne. De cette fagon, ils aideront tous les Norvegiens puiser a leur riche héritage millénaire de foi chrétienne: dans le Christ, toutes les personnes — les ressortissants nationaux, les immigrés et les Gtrangers — deviennent fréres et soeurs, et nos gestes de solidarité a leur égard deviennent des actes damour et de fidélité au Christ, qui est venu pour ‘que nous ayons tous la vie, et que nous l'ayons en abondance (cf. Jn I. 1). Avec ces paroles dencouragement, je vous assure que l'Eglise catholique continuera deuvrer pour Tenrichissement spirituel et le développement social du peuple norvégien. A travers son témoignage de charité, l'Eglise attcint tous les hommes et les femmes, quelles que soient leur origine ethnique ou leur religion, en promouvant la croissance d'une «culture de la solidarité» et en redonnant vie aux valeurs universelles de Ia coexistence humaine (cf. Ecclesia in Europa, 85). AUDIENCE AUX GENS DU CIRQUE 16 décembre 2004 Dans la matinée du jeudi 16 décembre 2004, le Pape Jean-Paul I! a recu en audience, dans la Salle Clementine, les participants au VIF Congrés internation nal de la Pastorale pour les gens du cirque et des parcs attraction itinérants, promu par le Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Per- sonnes en Déplacement. Nous publions ci-dessous tn bref extrait discours du Saint-Pére a cette occasion: (...) 3. Trés chers amis, votre monde — le monde du cirque et des pares d'attraction — peut devenir un laboratoire d/avant-garde également en ce qui concerne les grandes thématiques de la pastorale, de Feccuménisme et de la rencontre avec les membres autres religions, de engagement commun en vue de construire une fraternité universelle. Je prie le Seigneur afin qu’il vous assiste dans votre travail difficile, ORE, 28.12.2004 Discours aux CARDINAUX, A LA CURIE ET ALLA PRELATURE ROMAINE 21 décembre 2004 Dans la matinée due mardi 21 décembre 2004, le Pape Jean-Paul 11 a reeu en audience, dans la Salle Clémentine, les cardinaux, les archevéques, les évéques et les prelats de a Curie Romaine pour le traditionnel échange des veeux de Noil. A cette occasion, le Saint-Pére a prononcé un dis- cours dont nous vous proposons un extrait: (...)4, Du Fils de Dieu fait homme, Lumen gen- sium, VEglise a recu la haute mission détre «le signe et Tinstrument de la communion intime avec Diet et de Tunité de tout le genre humain » (Lumen gentium, n. 1). Chers fréres, nous prenons toujours plus conscience que la communion avee Dieu et Pnite entre tous les hommes, & partir des croyants, est notre engagement prioritaire. “, paragraphe 11), il soulignait également qu’a ceux qui désirent connaitre la vérité, nous ne devrions ja- mhais cesser de faire le bien « jusqu’a la fin des temps, cest-a-dire avec une patience et un amour ingpuisables, méme sils sont sans foi ou hérétiques. Mais il précise que notre comportement doit étre en tous cas a Ja mesure de noire force et de notre endu- rance spirituelles, Par conséquent, le commandement Ge Tapdire Paul dabandonner les hérétiques apres un premier et un deuxieme avertissement, est de nature pastorale plut6t que doctrinale et, en consequence, le pasteut efficace, celui qui vit dans la pleine vérité en Christ, a le droit et le devoir de chercher les brebis égarées et de discuter avec elles jusgu’a ce quill les reunisse dans unique bereail de unique Christ, comme le Christ I'a enseigné dans la parabole du Bon Pasteur qui a laissé les quatre-vingt-dix-neuf brebis pour aller chercher la brebis éga Naturellement, aucun chrétien n'accepterait au- jourdhui qu'on lui applique le terme d'herétique. Mais ten fait, il est clair pour tout le monde qu’a présent les hretiens sont divisés en groupes, dont certains recon- nraissent comme vérité des idées que d'autres rejettent, de telle manigre que Tun de ceux qui sont en désac: cord est évidemment dans Verreur en ce qui concerne Ja foi. Déterminer qui est dans la vérité et qui est dans Verreur au plan humain, est lobjet d'un dialogue sin- cere, minutieux et infatigable, conduit de bonne foi; Quant au stimaturel, cest une question de révélation divine a des cccurs purs qui cherchent sincérement et inlassablement la personne réelle du Christ. A lui seul, Thomme est certainement incapable d’atteindre la vérté vivante, le Christ, qui nous a assurément déclar {que «personne ne peut venir & moi, si cela ne lui est donné par le Pere» Un 6, 65). TToutefois, pour que cette possibilité vienne «d’en haut», certaines conditions doivent étre remplies, dont une des principales est que la recherche soit désintéressée et ne soit entachée d'aucun préjuge his- torique ou personnel. A priori, nous ne doutons pas de la sincérité de ceux avec qui nous dialoguons et nous espérons que les résultats prouveront que nous avions raison davoir confiance. Mais nous ne pou- Yons ignorer le contenticux qui sest accumulé dans le ppassé et qui représente un heritage onéreux et problé- matique, non seulement en soi mais également en raison du climat psychologique qui 'accompagne. Notre Seigneur Jésus Christ a promis que lorsque deux ou trois ici-bas s‘accordent sur tout ce quils dé- sirent demander & Dieu, leur requéte serait accueillie, car lorsque deux ou trois sont réunis en Son nom, est bien aut milieu deus et, par conséquent, il adresse la méme demande au Pere qui accueille les requétes duu Fils. Mais bien que cela semble aisé, il est wes difficile que deux ou trois s‘accordent sur une requéte et, en outre, il est trés difficile de se réunir en son Nom, cest- a-dire «en présence de la personne méme » du Christ, sils ne sont pas d’accord concernant Sa personne. Gui est 3ésus Crist, ct questi pour chacun des chrétiens engages dans 'un dialogue? Et de quoi est ie TEglise dont ilest le cheP Quelle est Sa ? Ce sont la les questions auxquelles une réponse identique et vécue doit étre donnée pour que Yon puisse réellement se réunir dans le nom du méme Christ. Mais avant que cette unit ne s‘accomplisse nous devrons parcourir de nom- breuses étapes, de manitre & ne pas étre accablés de pessimisme pour n/avoir pas encore réalisé cette uni 6 parfaite tant désirée. Nous sommes en chemin pour aller vers elle, et le Seigneur, dans sa grande bonté, suppléera a ce qui manque entre nous, et comme Fa dit trés succinctement notre prédécesseur saint Jean Chrysostome dans son admirable homélie catéchétique, son sermon pascal, il nous rémunérera, bien que nous soyons venus a la onzime heure, comme i rémunére ceux qui ont travaillé depuis la premigre heure. Dans cette perspective et cette espérance opti miistes, avec la foi en amour du Christ pour tous les hommes et la plus bienveillante disposition fraternelle, et dans une sincere attente quien fin de compte les paroles de notre Seigneur Jésus Christ au sujet d'un seul troupeau et d'un seul pasteur se réaliseront, mé- me si ce sera au tout dernier moment, nous saluons tres cordialement la délégation de la Rome ainée — de méme que le Trés Saint-Pere, le Pape Jean-Paul II qui Ya envoyée — qui participe gracieusement a la féte pa- tronale de notre Eglise avec tous ceux qui partagent notre joie en cette fete du fondateur de notte Eglise, saint André, et également du retour des vénérables reliques de nos prédécesscurs, saint Grégoire le théo: logien et saint Jean Chrysostome, a leur lieu dorigine. Nous espérons que cette journée doublement memo- rable pour nous, marquera le début d'une nouvelle pé- riode de progrés plus concerté vers Tunité tant désirée par tous les fideles de toutes les Eglises chrétiennes et par tous les hommes en Christ. Ainsi soit Source: wwew:patriarchate.org Discours pu CARDINAL KasPER Votre Sainteté, Ces dernigres années, en mladressant & vous a tra- vers le salut de 'Apotre Paul, 'ai eu Vhonneur de vous remettre un message du Pape Jean-Paul II, Cette an- née, le message de VEvéque de Rome est surtout constitué par les reliques des saints Jean Chrysostome et Grégoire le Théologien, remises avec solennité & Votre Sainteté il ya trois jours & Rome. Ce sont les re- liques de vos prédécesseurs sur le vénérable Trone de Constantinople, les reliques de deux Peres de TEglise qui nous sont communs et font Tobjet d'un profond respect et vénération en Orient et en Occident ‘Ce message est le signe et expression de la com- munion croissante entre Iglise de Rome et 'Eglise de Constantinople au cours des derniéres décennies. Aprés la rencontre historique, il y a quarante ans, sur Je Mont des Oliviers, dans la Ville Sainte de Jérusa: Jem, entre le Patriarche Athénagoras et le Pape Paull VL, @ commencé une nouvelle phase dans les rela- tions entre TEglise de Rome et FEglise de Constant. nople, qui a succédé a la «nuit de la separation » — ‘comme V'affirma le Patriarche Athénagoras — au esi- lence» et 4 I'cattente», selon lexpression du Pape Paul VI (cf. Tomos Agapis, p. 110sq. p. 120sq.). Nous avons instauré un dialogue de charité et de vérité. A Voccasion de sa visite au Pape Jean-Paul Il pour la fete des saints Pierre et Paul, en juin dernier, Votre Sainteté elle-méme a reconnu que la rencontre de Jé- rusalem a constitué une pierre milliaire d’une impor- tance fondamentale. Ces quatre demniéres années, méme si elles n'ont pas été privées de tensions, ont toujours été caractéri- sées par notre volonté authentique et commune de progresser sur Ie chemin de la pleine communion. Avec Taide de Dieu, nous avons obtenu dimportants résultats dans le cadre de nombreux échanges per- sonnels et grace & divers dialogues. La célébration aujourd'hui exprime et scelle cette croissance de la communion dans IEsprit-Saint. Sainteté, ce que je viens toutefois daffirmer de- ‘meure insuffisant pour exprimer combien les événe- ments que nous avons célébrés dans la Basilique Saint-Pierre il y a quelques jours et que nous conti- nuons a célébrer aujourd'hui en cette cathédrale Saint-Georges, sont profonds et significatifs, Ces re- liques ne sont pas un simple don ou un signe damitié purement humain. Ce sont les reliques de deux (é- moins profondément vénérés et de deux Maitres de notre foi commune appartenant au premier millé- naire, une foi 2 laquelle TOrient et lOccident sont de- meurés fidéles au cours du deuxigme millénaire, et dont nous sommes appelés par notre Seigneur com- mun Jésus Christ a témoigner ensemble au troisieme millénaire Ce qui nous unit est done beaucoup plus qu'une communion humaine; il s‘agit d'une communion dans la foi, que Jean Chrysostome et Grégoire le Théologien ont confessée ct courageusement procla- meée, et pour laquelle tous deux ont combattu et soul fert; il Sagit d'une communion dans la foi en Jésus Christ, vrai Dieu et vrai homme, et dans la profession de la Tres Sainte Trinité. Ces reliques sont le signe et le témoignage d'un héritage et d'un devoir que nous partageons, de notre devoir de proclamer ensemble & {outes les nations le message de salut en Jésus Christ (cf. Mr 28, 19ss) Toutefois, la signification de ce message est encore plus profonde que ce que je me suis efforce jusqu'’a 157 présent dexprimer. Ces reliques ne sont pas des os privés de vie, mais les dépouilles mortelles de deux Saints qui, selon notre foi commune, vivent a présent dans la gloire du Seigneur. C'est pourquoi elles sont tune épiphanie, cest-a-dire la réalisation de la vie nouvelle en Jésus Christ laquelle nous sommes ap- pelés, et que nous partageons déja dans la célébration Ges saints sacrements. Au moyen de la vénération de tes reliques, nous sommes plongés dans la réalité di- Vine. Notre vénération commune est communicatio jn sacris; «communion avec le sacré et communion du sacrés, (KoWOVIE TOD GYLOD KL KOLVOVIE TOV jar). Les célébrations & Rome samedi dernier et ‘aujourd'hui ici, au Phanar, expriment la xowavuc 200 mveuarog; a laquelle, se réfere !Apotre Paul Tle Concile Vatican II a identifié cette Kowonia cov srveqpiartos en particulier dans la célébration de YEucha- Tistic. Le Coneile parle de 'Eucharistie comme source de la vie de lEglise et signe de la gloire future, au moyen de laquelle nous participerons a la nature divine (eevee xorvowi gvoeag; 2 P 1, 4), Le Concile cite saint Jean Chrysostome (In foannem Homilia XLVI): « Ainsi ‘done, par la célébration de !Eucharistie du Seigneur dans ces Eglises particuliéres, "Elise de Dieu sédifie et grandit» (Unitatis redintegratio, 15). Toutes les Bglises Orient et dOccident qui célébrent |Eucharistie de- \raient done se considérer entre elles comme des Eglises-seours (cf. Paul VI, Bref Armo Ineunte du 25 juillet 1967, in Tomos Agapis, pp. 386-393). La communion qui s‘exprime a travers ces re- liques est pour nous une source de joie et de gratitude a Dieu, Dispensateur de tout don parfait Ug 1, 17). Ce Tien de communion est 'Esprit-Saint de Dieu qui nous a soutenus en dépit de toutes les incompréhen- Sions, les divisions et disputes pour lesquelles nous devons demander pardon a Dieu et les uns aux autres. Avec TApétre Paul, nous pouvons dire: Euga- prota tor OCOD HOV RAVEOTE REPL YOY ERL TMLAPITL TOV Beou 1 Soderon ytd ev Xpiom Ingo (I Co 1, 4). ‘Nous sommes conscients que cette xowovia nest pas encore la pleine communion. En rendant grace & Bieu, nous devrons donc, dans le méme temps, ren- forcer notre volonté de progresser sur le chemin vers la pleine communion. Les chrétiens, catholiques et orthodoxes, devraient aller au-dela de Ia suspicion et des médisances et se reconnaitre réciproquement comme chrétiens qui, en vertu de unique baptéme, font partie de Tunique Corps du Christ (J Co 12, 13: Ga 3, 27); il devrait étre partout possible de dire ensemble xammp wiv, de réciter ensemble la priére du Seigneur. Enfin, nous devrions reprendre, sans délai, Je dialogue théologique intemmational que Votre Sainteté a soutenu depuis ses débuts. De nombreux chrétiens, — et de fagon particu- ligre le Pape Jean-Paul Il — nourrissent le désir si cere que cette célébration puisse nous encourager approfondir la compréhension réciproque pour de pombreuses questions conerétes, avec l'aide de Dieu et Tintercession de Marie, Mere de Dieu (Geot0x0s), tt des deux saints Peres de I'Eglise dont nous véné- rons les reliques, Nous devrions étre poussés & le faire en particulier en vertu du fait quis furent tous deux de grands promoteurs de la paix (erpnvono101) (att 5,9) ‘Saint Jean Chrysostome nous invite & éviter que notre expression liturgique commune, Que la paix Soit avee foi, ne demeure un simple salut formel (Commentaire & la Lettre aux Colossiens, Hométie VIL, 4; Commentaire a Matthieu, Homélie XXXL 6). En Tan 364, lorsque fut restaurée la paix dans I slise de Nazianze apres un conilit, saint Grégoire lara avec douleur que, & cause de la division, le Corps du Christ avait été déchiré (Oratio VI, 1). Tl décrit Pabsurdité de ces divisions: « Nous qui aimons tant le Christ, avons divisé le Christ. Par amour de la yérité, nous nous sommes mentis réciproquement. par amour de la paix, nous avons fait la guerre » (ibid, 3). Saint Grégoire ajoute que, en nous compor- tant de cette fagon, nous sommes devenus la risée de ceux qui ne croient pas, et lobjet de mepris de la part des nations, Puis il s‘adresse & Dieu avec gratitude, comme nous espérons nous aussi le faire au plus t0t; Tu nous a permis de hair la haine et tu nous a gu ddés vers la paix. Tu euvres & travers les contraires. Tu yous as divisés afin que nous puissions aspirer a aller Tes uns vers les autres » ibid., 8). Et il conclut: « Nous désirons tous demeurer ensemble dans, un seul esprit, en combattant pour la foi dans l'Evangile... en conservant la splendide tradition que nous avons re- gue en héritage de nos Peres. Nous nous prosternons, én adoration devant le Pére, le Fils et le Saint-Esprit en adorant le Fils dans I Esprit, Nous avons été bapti sés en eux (ibid., 22) Ces paroles des grands Témoins et de nos Peres communs dans la foi nous invitent a rechercher la paix; dans le méme temps, elles nous encouragent. Une telle paix est un don de Esprit de Dieu, que Jésus Christ nous a promis au-dela de tout doute Nous pouvons done prier en disant: EWpMVM KL N KOLVOVIE ZOU GYLOY RVEYLETOS Hee avo mie. ‘ORE, 07.12.2004 CELEBRATION DU CINQUIEME ANNIVERSAIRE DE LA DECLARATION CONJOINTE SUR LA DOCTRINE DE LA JUSTIFICATON Le cinguidme anniversaire de Ia signature de la Déclaration conjointe entre la Fédération luthérienne mondiale et VEglise catholique a été marqué en Tan 2004 par des célébrations cecuméniques dans divers pays comme par exemple U'Afrique du Sud, VAllemagne (Augsbourg), les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Finlande et la Slovaquie. Un récent nwnéro du bulletin Lutheran World Information (N° 10, 2004) a publié des rapports sur les célébrations organisées dans certains de ces pays. Le Cardinal Walter Kasper, Président du Conseil Pontifical pour la promotion de lunité des chrétiens, a pris part a pl- sieurs de ces événements. Le CPPUC et la FLM ont collaboré en particulier & une initiative en Afrique du Sud, qui compre nait des services de priéves et dactions de grices ainsi qu'un séminaire d'étude sur la Déclaration conjointe auguel ont participé le Cardinal Kasper et le Secrétaire Général de la FLM, le Rév, Dr Ishmael Noko. Le Cardinal Kasper a également et6 présent aux celebrations organisées d Chicago (Ilinois) par 'Exlise évangelique luthérienne d'Ameérique, a Vinwitation du Président de 'ELCA, lEvéque Mark Hanson, qui est aussi Président de la FLM, Nous publions ci-dessous le discours prononce par le Cardinal Kasper lors de la célébration de Chicago. La DECLARATION CONJOINTE SUR LA DOCTRINE. DE LA JUSTIFICATION Cardinal Walter Kasper 1. Limpurston e:cumexroue Avec Te Concile Vatican II et son Décret sur Feecu- ménisme, « Unitatis redintegratio », YEglise catholique a officiellement déclaré son engagement irréversible dans Tcecuménisme. Depuis, elle a entrepris des dia- logues avec presque toutes les Eglises et Communau- tés ecclésiales chrétiennes, tant orientales qu’occiden- tales, La Fédération luthérienne mondiale, avec la Communion anglicane, a été la premiére qui ait com mencé a dialoguer immédiatement apres le Concile. Das le début, la doctrine de la justification a occupé tune place marquante dans ce dialogue. Cest en effet cette doctrine qui était a la base de la controverse du XVE sigcle, Pour Martin Luther, il Sagissait du coeur de T'Evangile, de la doctrine qui est le fondement de TE glise et sur laquelle on ne peut céder. En fin de compte, pour Luther, il ne s‘agissait pas seulement d'un probleme théorique mais d'une ques- tion existentielle qui touchait au noyau, au centre, au. coeur de Texistence chrétienne. Sa question portait principalement sur la quéte de la miséricorde divine et sur le concept d'un Dieu miséricordieux. Aprés un dur combat intérieur, Luther concluait que nous ne pouvons mériter la miséricorde de Dieu par nos propres forces et que nous ne sommes pas justifiés devant Dieu en raison de nos bonnes actions. Au contraire, nous sommes justifiés parce que Dieu nous justifie par sa souveraine miséricorde et nous accepte ‘comme pécheurs. Ainsi, nous sommes « simul iustus et peccator, a la fois justes et pécheurs. La justifica- tion n'est pas une question de notre qualité de juste, qualité que nous ne possédons pas en propre mais qui est de Dieu, et que sans aucun mérite de notre part, Dieu nous accorde par les seuls mérites du Christ, uniquement comme une grace et seulement en vertu de la foi (sola gratia, sola fide). Le Concile de Trente a lui aussi condamné la doc- trine pélagienne selon laquelle une personne peut tre sauvée par les bonnes aeuvres. Toutefois, ce qui est en jeu n'est pas une question de justification par Ja grace ou par les bonnes euvres, mais plutst de sa- voir si ct dans quelle mesure Vaction de Dieu permet et stimule la coopération de la personne humaine. Le Coneile de Trente concluait que nous pouvons coopé- rer & notre justification, non pas par nos propres forces, mais animés et habilités par la grace. En outre, le Concile entendait préciser que Dieu ne se limite pas & nous déclarer justes mais qu'il nous justi- fie réellement, qu'il nous renouvelle intérieurement de sorte que nous sommes une nouvelle création et que nous pouvons vivre comme des étres humains nouveaux. La foi doit devenir efficace dans la charité et dans les bonnes actions. Ainsi, alors que la préoc- cupation de Luther était la souveraineté de la grace, Te Concile se souciait du pouvoir réel de la grace qui nous transforme et nous justifie. Ces doctrines nous ont divisés pendant plus de 400 ans et ont causé bien des souffrances & des per- sonnes et & de nombreuses populations en Europe. A travers notre travail missionnaire nous avons exporté nos différences dans d'autres continents. Ce n'est gu'au XX° siécle que les chrétiens de toutes les Eglises ont senti la honte de leurs divisions. Il est remarquable que le mouvement ecuménique ait commencé avec lexpérience vécue dans les pays de mission, o la crédibilité du christianisme est mise en question chaque fois que des chrétiens montrent guils sont en désaccord, Seule une Eglise réconcili [Peut poursuivre sa mission de réconciliation. Ce pro- bleme acquiert une importance encore majeure dans Ja situation religicuse en Europe, oit Yon a parlé d'un tarissement de la foi. Face a une telle crise, nous ne pouvons pas nous permettre de continuer & nous dé- battre avec les anciennes controverses. 159 Surtout dans leur résistance commune au systéme inhumain et contraire a Vesprit chrétien qutait le ré- gime nazi, dans les camps de concentration et dans les tranchées de la Seconde Guerre mondiale, de nombreux catholiques et chrétiens évangéliques ont découvert quils n’étaient pas aussi éloignés les uns des autres qu'il pouvait sembler. Unis pour sopposer fun systeme inhumain et contraire a esprit chré- tien, ils constatérent quiil y avait plus de choses qu les unissaient que de choses qui les divisaient, Apres 1945, la théologie aecuménique a mis ces expé- riences & profit. Nous pourrions citer une foule Ge théologiens des deux cOtés qui ouvrirent Ta voie & €e qui a été accompli par la suite: Karl Barth, Karl Rahner, Hans Urs von Balthasar, Nous sommes sem- lables a des nains sur les épaules de ces géants. Je pourrais encore citer Hans King, Harding Meyer, George Lindbeck, Wolfhart Pannenberg, Eberhard ‘angel, Carl Peter, Otto Hermann Pesch, et beaucoup autres Le dialogue officiel, lorsqu'l a commencé apres le Concile, pouvait déja puiser dans les résultats de 1a recherche théologique. Le tout premier document produit par le dialogue, le «Rapport de Malte» (1971), indiquait un large consensus sur la doctrine de la justification. La question a été reprise et appro- fondie par le dialogue aux Etats-Unis, gui a publié un document sous Ie titre de «Justification par la foi» (1985), encore une fois avec ies mémes résultats. Plus tard, apres la premiére visite du Pape en Allemagne, Ja méme question a également été traitée par une commission mixte chargée d’examiner toutes les Condamnations doctrinales du XVI sigcle. Les résul tats sont contenus dans louvrage «Lehrverurteilun- gen — Kirchentrennend? » (Les condamnations de Fépoque de la Réforme nous divisent-elles encore?) (1986). Il reste encore & mentionner le dernier docu- ment du dialogue catholique-luthérien évangélique, “eEglise et justification » (1994), qui concluait une fois de plus quil nfexistait désormais plus aucune diffé- renee pouvant diviser lEglise sur ce point. ‘Ainsi, la premigre chose a noter est que ce qui est dit dans la « Déclaration conjointe sur la doctrine de Ia justification », signée solennellement le 31 octobre 1999 a Augsbourg, nest pas tombé du ciel; cest le sultat de décennies de travail théologique internatio- nal spécialisé et de dialogues oscuméniques sous les auspices des Eglises. Des deux cotés, d'éminents et Compétents théologiens v ont participé; les résultats ont eté rendus publics, de sorte quiils ont été des le début ouverts a la discussion. Les surprenantes r tions critiques de certains théologiens apres la « Ds claration conjointe », furent d’autant plus pénibles et difficiles a comprendre; ces théologiens étaient mani festement absents pendant le débat cecuménique in- ternational des deux décennies précédentes. 2. QU'AVONS-NOUS REALISE? 11 faut dire en premier lieu que dans ce dialogue il na jamais été question de raccourcis faciles ni de faus irénisme, relativisme ou libéralisme. Au contraire, 160 le paragraphe 14 de la « Déclaration conjointe», qui exprime la compréhension commune de Ia justifica- tion, commence par ces mots: « Lécoute commune de la Bonne Nouvelle proclamée dans I'Eeriture Sainte ainsi que les dialogues théologiques de ces derniéres années entre les Eglises luthériennes et iglise catholique romaine ont conduit a une ap- proche commune de la conception de la justifica~ tion». Nous avons étudié ensemble les sources de notre fof et nous nous sommes plongés dans les Saintes Ecritures et dans nos traditions respectives. Gela nous a donné de nouvelles perspectives qui ont jeté une lumigre nouvelle sur les déclarations du XVF Sidcle. Aucune Eglise ne peut renoncer aux déclara- tions doctrinales de 'époque ni renier sa propre tra- dition, mais il nous a été possible de les comprendre d'une maniére nouvelle et plus approfondie. "Nous n’avons donc pas découvert un nouvel Evangile ni rejeté ce que nos peres et nos ancétres croyaient étre Vexpression de l'Evangile révélé. Ce gus nous avons nowslement découer Cest que cet angile révélé une fois pour toutes est si profond et siriche gu'aucune personne, aucun Concile ni aucun théologien ne pourront jamais en saisir tout le sens. Cest par le don de lEsprit-Saint que nous avons pu approfondir notre compréhension et re-connaitre et re-recevoir nos traditions respectives. Dans la richesse des autres nous avons découvert notre propre ichesse. Cette nouvelle perception et re-réception est tun don de lEsprit-Saint qui nous fait accéder & la vérité tout entiere Un 16, 13). Ce dont il s'agissait Giait un développement et une compréhension du dogme guidés par l'Esprit-Saint. Ainsi, 'événement d’Augsbourg n’était pas seulement ni principalement Ja signature formelle d'un document, c‘était avant tout la célébration dans la jofe d'une action de graces a Dieu en présence de son peuple. En second lieu, bien que les documents mention- nés ci-dessus aient été rédigés par des théologiens et des commissions nommés officiellement, leurs résul- tats n’avaient aucun statut officiel pour les deux Eglises. C’étaient des documents rédigés par des commissions théologiques. Apres ces préparations théologiques de base, le moment était donc venu pour les Eglises de s‘occuper elles-mémes de la ques- tion et des résultats du dialogue théologique. En conséquence, la Fédération luthérienne mondiale et Te Conseil Pontifical pour la promotion de Vunité des chrétiens déciderent dessayer d'élaborer une « Décla- ration conjointe sur Ta doctrine de la justific Ti s'agissait d'une initiative nouv. nfavions aucune expérience pour nous guider. Il était bien évident que ce ne serait pas facile, Non seule- ment les processus décisionnaires et les institutions respectives des deux Eglises étaient trés différents, mais le concept de magistere et de son autorité dans TEglise était également trés différent. Du cté luthe rien la Déclaration,devait passer devant les Synodes de toutes les 130 Eglises membres de la Fédération luthérienne mondiale. Le role de celle-ci, apres avoir obienu l'assentiment d'environ 80% des Eglises membres, était de formuler et de déclaver un «ima- nus consensts ». Du c6té catholique, apres quelques difficultés et discussions, la « Déclaration conjointe » était approuvée par la Congrégation pour la Doctrine de la foi et par le Conseil Pontifical pour la pro- motion de lunité des chrétiens. Aussit6t aprés la signature, le Pape a publiquement exprimé son ap- probation et sa joie, publiquement reitérées & plu- sieurs reprises par la suite. Il ne s‘agit évidemment pas d'une déclaration infaillible, par laquelle le Ps se prononce de sa pleine et supréme autorité, mais réduire cette signature a un acte personnel et plus ou moins privé du Président du Conseil Pontifical pour Ja promotion de l'unité des chrétiens, est une idée plus que fantasque. Ty a eu des problémes des deux cdtés. Mais c'est le résultat qui compte. Les problémes ont pu étre traités dans la « Déclaration officielle commune » et dans son annexe, qui ont développé et confirmé le résultat principal de la Déclaration conjointe. Pour finir, la « Déclaration officielle commune» a été si- gnée & Augsbourg et a travers elle la « Déclaration conjointe» a été reconnue par les deux Eglises. Ceux qui ont quelque familiarité avec histoire des dogmes et des textes confessionnels connaissent ce genre de problémes; ils n’ont rien de surprenant ni extraordinaire. II n'est évidemment pas possible que tous les théologiens retrouvent leurs préoccupations et leurs théories pleinement présentes dans une telle éclaration d'accord. Le fait que lon doive trouver des compromis pour aboutir 4 un consensus sur la for- mulation d'un tel texte est également chose connue dans toute Vhistoire des dogmes et des textes confes- sionnels. Mais tout compromis n'est pas nécessaire- ment mauvais; il y a aussi de sages compromis qui gardent Iessentiel et laissent d'autres aspects ouverts a dultgrieures discussions. On peut trouver des sages compromis — comme le savent tres bien tous ceux qui soccupent de histoire de lEglise — dans presque tous les dogmes et textes confessionnels, y compris dans les documents du Concile Vatican I Le point essentiel est qu‘a travers la « Déclaration conjointe » les Eglises elles-mémes, et non pas simple- ment des théologiens ni méme des groupes de théolo- sgiens, ont réalisé un consensus substantiel et fonda- mental. Cest ce qui fait de la « Déclaration conjointe » quelque chose de nouveau. Cest un document des zlises, et plus encore, un événement ecclésial West vrai que la « Déclaration conjointe » ne sest pas occupée expressément du probléme de Pecclésio- logie ni de nos diftérences & ce sujet. Néanmoins, il serait faux de penser qu’Augsbourg n'a rien dit sur la question de lecelésiologie. Liévénement lui-méme tait un événement ecclésiologique. La « Déclaration conjointe » n'est pas seulement une déclaration doctrinale théorique, car sa signature a été un événe- ment; a Augsbourg et depuis Augsbourg une expé- rience est vécue, et depuis lors les rapports entres catholiques et luthériens ont acquis une qualité et une intensité nouvelles. Nous avons tendu la main les uuns aux autres comme Eglises et nous ne voulons jamais plus la retirer, Ou encore, permettez-moi de le dire de la fagon suivante: la « Déclaration conjointe» ne comporte pas une déclaration sur 'Eglise, mais elle comporte et encourage une réalité ecclésiale qui peut a présent inspirer une réflexion sur lEglise. Comme dans tout contexte, la vie précéde la réflexion, et la réflexion présuppose la vie. Cet accord n’entend évidemment pas exclure dautres Eglises ou Communautés ecclésiales de la communion du mouvement cecuménique général. I est ouvert a tous et veut étre une invitation aux autres Bglises a s'unir & nous. Un consensus substantiel existe déja avec la Communion anglicane, présenté dans le document du dialogue anglican-catholique, «Le salut et IEglise » (1986). Apres Augsbourg, nous avons adressé une invitation en particulier aux Eglises réformées et a la Fédération méthodiste mon- diale. Nous sommes heureux de la réponse ouverte et positive de cette derniére, qui a entrepris un proces- sus de réception parmi ses Bglises membres. Il existe ainsi une «croissance d'entente » encourageante entre les Eglises, Troisiemement, pour bien connaitre le contenu de la «Déclaration conjointe », on doit distinguer les différents niveaux d'affirmations. Le contentt fonda- mental se trouve au paragraphe 15 de la « Déclara- tion conjointe »: « Notre foi commune proclame que Ja justification est Veeuvre du Dieu trinitaire. Le Pere a envoyé son Fils dans le monde en vue du salut du pecheur. Lincarnation, la mort et la résurrection de Christ sont le fondement et le préalable de la justifi- cation. De ce fait, la justification signifie que Ie Christ lui-méme est notre justice, car nous parti pons & cette justice par lEsprit-Saint et selon la volonté du Pére. Nous confessons ensemble: c'est seulement par la grdce au moyen de la foi en Faction te, salvifique du Christ, et non sur la base de notre m que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons lEsprit-Saint qui renouvelle nos coeurs, nous habilite et nous appelle a accomplir des ceuvres bonnes» Je pense quil s'agit d'un trés large consensus, qui implique non seulement la justification, mais une justification dans le cadre et'sur la base des confes- sions christologique et trinitaire de lEglise indivi des premiers siécles, un consensus qui porte sur le centre et le cceur de l'Evangile. Sans cette entente sur la base christologique et trinitaire, Taccord sur la justification s‘écroulerait, Sur cette base, il a été pos- sible d'intégrer les deux intéréts, celui des luthériens concemant la souveraineté de la griice, et celui des catholiques concernant le pouvoir effectif de la grace, qui nous habilite a faire fructifier les bonnes euvres. Ce consensus fondamental sur le noyau central de VEvangile n'est pas seulement théorique: il nous per- met de rendre un témoignage commun a TEvangile dans un monde qui a besoin de ce message de grice et de miséricorde, En méme temps, ce consensus est la base de la solution de toutes les autres questions ui divisent nos deux communautés. Au-dela de ce consensus fondamental, plusieurs problémes subsistent au sujet desquels nous ne sommes pas patvenus 2 réaliser le méme genre d'ac- cord complet. On doit mentionner la question du « simul iustus et peccators, la question de la coopéra- tion, la question de la maniére de parler des mérites, et en particulier la question du réle normatif central 161 de la doctrine de la justification. Sur ces questions, et sur d'autres, il a ét8 possible d'exclure les contradic- ions formelles, de comprendre les préoccupations du partenaire et de noter quelques convergences, Mais il Teste des langages différents, une difference daccents el daccentuations, des intéréts différents, si bien Guun plein consensus n’a pas été atteint. Nous avons AG renvoyer ces problémes a un dialogue théologique ultérieur entre les Eglises. ‘Ala lumiére dur consensus fondamental et des questions resiées ouvertes, indiquées aux paragraphes 40 et 41 de la « Déclaration conjointe », nous pouvons tirer deux conclusions: 1) Il existe un consensus sur des vérites fondamentales (non pas sur les vérités fon- Gamentales) de la doctrine de la justification entre lu theriens et catholiques. A la lumiére de ce consensus les différences qui subsistent dans le langage, les formes théologiques et les accentuations dans la com. préhension de la justification sont acceptables. Cest Pourquoi les présentations luthérienne et catholique Ge la justification sont, dans leur différence, ouvertes Tune a Tautre et ninfirment pas le consensus réalisé concernant les vérités fondamentales. 2) Les condam- ations du XVF siécle, dans la mesure ob elles se ré ferent 2 la doctrine de la justification, appargissent dans une lumitre nouvelle. Lenseignement des Eglises futhériennes présenté dans cette déclaration ne tombe pas sous les condamnations du Concile de Trente. Les Pondamnations des confessions luthériennes ne Concernent pas lenseignement de 'Eglise catholique romaine présenté dans cette déclaration. Les condam- nations réciproques ne Sappliquent plus aujourd hui Si chaque partenaire sen tient & ce qui a été convent Gans la « Déclaration conjointe ». Mais cela n’enleve rien aur sérieux des condamnations relatives & la doc: {rine de la justification. Certaines n’étaient pas du tout Sans objet, Elles conservent pour nous leur valeur edavertissements salutaires» dont nous avons & tenir compte dans lenseignement et la pratique. Nous avons done affaire a un consensus differen: cig plutor qu’a un accord total. Le consensus est com- plet concernant des questions clé, dans Texposé des- Quelles divers points de départ, différentes formes de pensée et dexpression et différentes accentuations et Erfirmations sont possibles. Ainsi, la « Déclaration Conjointe» ne rejette pas le Concile de Trente. Pour fes catholiques, celui-ci reste valide comme par le passé. Mais il peut étre interprété selon notre com- prehension actuelle de la foi, de sorte que la doctrine He Luther, tlle qurelle est exposée dans la « Déclara- tion conjointe », nest plus exclue comme étant oppo- sée A ce Concile et, par conséquent, cause de division dans lglise. Les différences qui subsistent ne sont pas des déclarations qui se contredisent, mais qui Sont complémentaires et qui se complétent. ‘Dans Tévaluation de la « Déclaration conjointe », tout depend de notre position concernant ce consen- sus difiérencié. Ce concept remonte & Johann Adam. plus éminent représentant de Ecole catho- ique de Tubingen au XIX* siécle, et l'un des pres et des précurseurs de la théologie cecuménique Contemporaine. Dans un de ses premiers ouvrages, {Die Einheit der Kirche » (Liunité dans VEglise] (1825), 162 Mohler faisait la distinction entre des oppositions (Gegensatze) internes acceptables et méme nécessaires parce que mutuellement complémentaies, et des Contradictions (Widerspriiche) hérétiques parce qu‘in- Compatibles avec la foi de IEalise, Alors que les oppo ‘Sitions complémentaires font partie de la vie et sont par consequent le signe d'une Eglise vivante qui est en Inarche, les contradictions siisolent elles-mémes de Tensemble de la doctrine de Iglise; elles nient toute opposition complémentaire et deviennent unilatérales et steriles. Pour retrouver leur valeur comme opposi- tion vivante et féconde, elles doivent étre réintégt dans toute la vie et Ia doctrine de IFglise Ces idées ont été reprises par la théologie du XX" sidcle; elles sont devenues fondamentales pour Comprendre ce quest exactement un consensus diffé- Fencié. Un tel consensus exclut absolument les contra dictions mais il inclut les oppositions complémen- taires, Exiger un consensus total signifierait faire de Tunité une affaire eschatologique. Dans notre monde, seul un consensus différencié est possible, et cela veut dire que Eglise une, sainte, catholique et apostolique fest un tout organique fait d'opposés complémentaires, Ou encore, je dirais que lEglise est modelée sur Vimage du Dieu Trinité qui est unité dans la diversité ‘En arriére-plan on trouve une certaine image de Vunite de TEglise que nous nous efforcons de réaliser “une unité qui ne signifie pas T'uniformité, mais unit dans la diversité, ou (comme disent aujourd'hui sur- tout les luthériens) lunité dans une diversité réconci- lige. La « Déclaration officielle commune » reprend expressément ce modele et lui donne ainsi la confir- mation officielle de Eglise. Ce fait est également un ésultat remarquable et trop peu noté de la « Déclara- tion conjointe >. A Torigine de la déclaration, il y a un modele cecuménique de l'unité que nous recher- chons, non seulement entre catholiques et lut ais entre tous les disciples du Christ. Ai Glaration conjointe» indique le chemin vers Favant et fouvre une perspective plus vaste. 3, Ck OUI Dorr ENCORE ETRE FAIT ~ NOUVELLES TACHES ET NOUVEAUX DEFIS Le Pape a qualifié la « Déclaration conjointe» de «pierre milliaire », Limage correspond exactement a ja situation: nous avons alteint une étape importante mais nous ne sommes pas encore au but. La « Décla- tation conjointe » est importante, malgré ses limites. Sa grande valeur est le fait de pouvoir & présent rendre un témoignage commun a ce qui est au coeur de notre foi, ct avec ce témoignage commun nous en trons ensemble dans un nouveau siecle et dans un nouveau millénaire, Notre monde de plus en plus: sécularisé a besoin d'un tel témoignage commun. Sa grande valeur est aussi le fait de ne pas dissimuler ses fimites, mais de désigner ouvertement les problémes. qui subsistent entre nous. Ainsi, il est clair que la Signature ne signifie pas que tout a été fait. Aw Coniraire, & présent que la signature a eu liew nous devons nous demander ce que doit faire le mouve- ment cecuménique pour aller de avant. Leecuménisme est un processus 2 couches mul. tiples, dans lequel lEglise tout entigre doit étre impli- quée. Nous devons distinguer entre les taches a la base, au niveau de la paroisse ou du diocese, et celles qui relevent de 'Eglise universelle. Par conséquent, du c6té catholique, on aurait tort dattendre tout de Rome. La premiere tache est la réception de ce qui a déja été accompli, et qui se fait surtout au niveau de église locale, La « Déclaration conjointe» ne doit pas étre un simple document ni rester lettre morte; elle doit étre connue et yécue; elle doit devenir une réalité dans le corps de lEglise. Beaucoup a deja éte fait, mais il reste encore énormement a faire en ce qui concerne la catéchése, la formation permanente des adultes et du clergé, et la formation théologique au niveau académique. Néanmoins, je me limiterai ici au niveau de lEglise universelle et en particulier a ce que peut faire le Conseil Pontifical pour la promotion de Tunité des chrétiens. Avant tout, nous devrons revoir les questions concernant la doctrine de la justification, laissées en suspens aprés la « Déclaration conjointe ». Je pense, par exemple, au contenu particulier de certains points doctrinaux, tels qu'une ulterieure clarification de la question de’« sini iustus et peccartor», ou du sens critériologique de la doctrine de la justification Plusicurs questions, liges a celle de la justification, restent a éclaircir, comme par exemple la question des indulgences, les problémes dont lorigine remonte aux debuts de la Réforme et qui continuent encore aujourd'hui de modeler la mémoire collective des deux cdtés, Bien que la question des indulgences ne soit pas un concept primordial, ni un concept priori- taire dans la hiérarchie des vérités, elle est intime- ment lige au theme de la pénitence, qui est crucial pour existence chrétienne, encore que, malheureu- sement, il soit souvent oublié aujourd'hui. Aussi, depuis Augsbourg, un souci commun a été daborder ces questions dans des symposiums et dans divers groupes de discussion, dans le but d'amplifier Tac. cord déja réalise, Cette premigre considération sur les taches futures m/amene a une seconde réflexion. Nous de- vons renforcer une compréhension fondamentale de la doctrine de la justification. A ce sujet, je pense dabord & une recherche biblique ultérieure. La Bible, pour nos deux Communautés ecclésiales, est le docu ment fondamental de notre foi, et jai fe sentiment gue nous pourrons progresser davantage et de ma- nigre décisive en incluant plus pleinement l'étude de VEeriture dans les questions dogmatiques. Pour les théologiens luthériens cela va de soi, mais ce fut éga- Jement la réponse officielle de Rome qui, des le début, préconisait une comprehension biblique plus approfondie. Il est important de réfléchir ultérieure- ‘ment, par exemple, sur le fait qu’outre la justification, la Bible se sert d'une variété dimages et de termes pour décrire les réalités qu’indique la justification: Royaume de Dieu, vie, réconciliation, paix, rédemp- tion, grace et beaucoup dautres. Ces images et ces termes sexpliquent réciproquement et ce nest quien semble quills offrent un tableau complet du message biblique. En particulier dans une perspective biblique, le message et la doctrine de la justification sont enraci- nés dans le message christologique de la Bible et de notre tradition commune, telle quielle est exprimée dans les Credo. La « Déclaration conjointe» patle clairement de ce fondement dans son accord de base Mais il scrait illusoire de penser quaujourd'hui ce fondement christologique et trinitaire est accepté comme il Tétait, plus ou moins, au XVI siécle. En attendant, le probleme sest aggravé et est deventt un nouveau défi commun pour nos deux communautés ecclésiales, Mais la justification nous dit ce qu’est Jésus Christ pour moi et pour nous, de sorte qu'elle est pour ainsi dire Faspect subject de la christologie. Sans le fondement christologique, elle est pour ainsi dire suspendue dans le vide et devient une affirma- tion idéologique. Ce nest que dans cette lumiére que nous pouvons comprendre pourquoi, du cété catho- Tique, on a répété avec tant dinsistance que la justifi- cation ne peut étre le critere de toute doctrine et pratique ecclésiale qu'avee ce qui est au centre du Nouveau Testament: le message de Jésus Christ. Troisiémement, je voudrais mentionner briéve- ‘ment les importantes questions encore ouvertes entre nous, au-dela de la doctrine de la justification. Du point de vue catholique, iy a avant tout la question ccclésiologique, cest-a-dire «La nature et le but de TEglise », comme Ta formulée la Commission «Foi et Constitution » du Conseil cecuménique des Eglises. A cette question est intimement associée la dimension sacramentelle de !Eglise. Car la justification par la fo est lige au baptéme comme sacrement de foi, et & 'Bucharistie, centre et cceur de la vie chrétienne et ecelésiale. Ces questions aboutissent a un point critique avec le probleme du ministére ecclésial, ¢ Acdire le sacerdoce de tous les croyants et des per- sonnes ordonnées, le ministére des évéques dans la succession apostolique et Ie ministéve petrinien. La «Commission mixte de dialogue entre la Fédération luthérienne mondiale et 'Eglise catholique» a déja abordé quelques-unes de ces questions et en a de nouveau repris Fexamen, La solution de toutes ces questions ne peut certes tre déduite directement de la doctrine de la justifica- tion, mais celle-ci indique le point de Thorizon ott la solution est possible et nous montre le but dans lequel les sacrements et les ministéres sont constitués et devraient étre administrés dans Eglise. Ce ne sont pas des fins en eux-mémes, mais des instruments et des témoins de la justification gratuite et miséricor dieuse de Dieu. Un quatriéme et dernier point, mais qui est tres important et trés urgent. Aujourd'hui, beaucoup de chrétiens ne comprennent plus les formulations du XVF sidcle. Cest vrai pour nous catholiques en parti- euler, Parler de la justification ne fait pas partie de notre langage catéchétique normal. Nous préférons rde salut, de grace, de vie nouvelle, de pardon et ‘conciliation. Toutefois, la vraie raison pour laquelle beaucoup de catholiques, et de protestants également, ne comprennent plus le terme justification, se situe & un niveau plus profond. Nous ne ressentons plus le poids de la culpabilité et duu péché comme le 163, ressentait Luther, nous ne vivons plus dans la crainte du jugement de Dieu, nous sommes tous devenus trop deistes, cest-a-dire que nous avons le sentiment que Dieu sest complétement retiré de notre monde et de noire existence quotidienne, De sorte que la question Gun Dieu miséricordieux, qui avait si profondément affecté Luther, nous laisse plutot indifférents. La ques tion de ia justification semble en contraste avec notre érience moderne; nous sommes heureux que les Eglises alent enfin pu résoudre le probleme, mais pour nous ce nest plus un probleme existentel. ‘Nous devons donc traduire les questions ainsi que les reponses dt passé dans un langage et une dialec- tique de notre temps, pour que notre langage puisse toucher nos expériences les plus profondes, nos lanaiétés et nos espoits, y laisser une empreinte et ous stimuler aujourd'hui autant que dans le passé. I he Sagit pas seulement de langage ni méme de tra- Guire quelques déclarations dogmatiques, et moins encore dadopter un jargon a la mode. En demnigre ‘analyse, Cest une question de nouvelle ouverture et dinterprétation de notre désespérance vécue, de notre desir de signification et de miséricorde, Ainsi, Te probleme de la justification pose de profondes {questions anthropologiques et théologiques, et il est Tea la question générale de Vévangélisation. En conséquence, pour redécouvrir le sens pro- fond de la justification, nous devons approfondir davantage et nous demander: Que signifie Dieu? Que Signifie croire en un Dicu miscricordicux? Que sien fie Jésus Christ pour nous aujourd'hui? Que signifie croire que nous sommes sauvés et rachetés par sa Croix et sa résurrection? Quelles en sont les implica: tions pour notre vie personnelle et pour notre vie en commun? La question de la justification nous ra- mene au centre de Ievangile et aux questions fonda- mentales de notre existence humaine. Depuis Augsbourg un certain travail a été fait pour couvrir nos yeux sur le sens réel et plus profond de la jus- tification et pour diffuser sa proclamation dans le contexte modeme. On a clairement montré que la doc- tine de la justification veut nous dire que nous ne pou- ons ni ne devons « faire» notre propre vie ni la réaliser: ‘Cest une chose que nous ne pouvons pas accompli par hnous-memes. Notre valeur en tant que personnes ne dé pend pas de nos actions, bonnes ou mauvaises. Avant fout, nous devons nous accepter et nous alfirmer nous- mémes, Notre vie est placée dans la perspective de la mniséricorde et elle est gouvernée par un Dieu miséricor- icux qui, travers tout et en dépit de tout, nous porte dans ses mains aimantes. Nous vivons par la miséri- corde de Diet. Cest ce qui nous libére de la crainte, nnous donne de Tespoir et du courage et nous remplit de Ia joie des enfants de Dieu. ‘Ainsi comprise, la justification n'est pas seule- ment une bonne nouvelle pour notre vie individuelle Tandis quelle nous permet de vivre en tant que per sonnes distinctes, elle nous ouvre en méme temps Sux autres tres humains. De méme que nous vivons par la miséricorde de Dieu, nous pouvons et devrions, Eire bienveillants et charitables envers nos sem- blables, hommes et femmes. De sorte que la justifica- tion nous habilite et nous oblige méme & travailler 164 pour la justice et pour la paix, pour que la dignité humaine et les droits de Yhomme soient reconnus, Parce que nous vivons tous par la miséricorde et Tamour de Dieu, la justification nous rend capables dinteragir avec notre communauté et de nous consa- rer aux problémes sociaux. Pour cette raison nous pouvons apporter de V'espérance & un monde qui Soutire & cause des injustices, de Tabsence de miséri- corde et du cynisme, un monde désorienté, qui est Surtout sans espérance et est en fait devenu nihiliste, 4, CONCLUSION: IMG:CUMENISME SOURCE DE COURAGE Beaucoup pensent que le processus de rapproche- ‘ment axcumenique est trop lent. ls estiment méme que nous ne faisons aucun progrés en cecuménisme. Cest Sans nul doute un processus laborieux, qui demande de Ia patience et une bonne dose dendurance. La « Décla- ration conjointe » a montré que le progres est possible. Ceite constatation peut nous donner une confiance renouvelée et un nouveau dynamisme azcuménique. ‘Nous devrions étre plus reconnaissants pour ce qui fa déja ete réalisé. Personne, au début du XX° sidcle, ne se serait attendu de nous trouver la oli nous sommes & présent. Le chemin pour passer de Tisolement, de Thos: lite et de la rivalite ala tolerance, au respect rmutuel, & la coopération et méme a lamitié, a été mené a bien Nous avons découvert la communion en Jésus Christ, réelle et profonde, bien qu‘imparfaite, qui existe déja. La «Déclaration conjointe » a développé et approfondi cette communion déja existante. Létape successive pour réaliser la pleine commu nnion ne sera pas facile. A vrai dire, il n'y a pas seule- ment des oppositions complémentaires, il reste encore des contradictions a surmonter. Et malheureusement, Je danger est qu’avec les changements sociologiques ‘auxquels nous sommes confrontés, de nouvelles contra- dictions vont surgir au sujet de questions éthiques. Ou peutétre ne devrions-nous pas parler en termes de nou- elles contradictions, mais plut6t de nouveaux défis, En tout cas, la pleine communion ne peut pas se réaliser par la seule convergence, mais bien plus par la conver- Bon qui implique le repentir, le pardon et le renouvelle- ment du coeur. Une telle conversion est aussi un don de Ta grace ~sola gratia, sola fide. ‘Un jour, le don de Tunité nous prendra par st prise, tout comme lévénement dont nous avons été moins, voici plus de dix ans. Si vous aviez, demandé des passants, & Berlin-Ouest, le matin du 9 novembre 989. « Combien de temps pensez-vous que le mur restera encore debout? », la plupart auraient sans nul Goute répondu: « Nous serions heureux si un jour nos pelits-enfants pouvaient passer sous Arc de Brande- Bourg». Le soir de cette journée mémorable, le monde assista A quelque chose de totalement inattendu a Ber- jin. Jai la ferme conviction que nous aussi, un jour, nous nous froiterons les yeux d’étonnement, parce que TEsprit de Dieu aura percé les murs apparemment in- surmontables qui nous séparent et nous aura donné de nouveaux moyens de nous rencontrer les uns Jes autres, et une nouvelle communion. Espérons pour cela de ne pas devoir attendre 400 autres anné NOUVELLES (ECUMENIQUES Mocre POUR Le DIALOGUE ENTRE UEGLISE CATHOLIQUE ET UEGLISE MALANKARE. ‘SYRIENNE ORTHODOXE, Kottayam (Inde), 11 octobre 2004 _ La Commission mixte pour le dialogue entre VEglise catholique et I'Eglise malankare syrienne orthodoxe a tenu sa neuvieme renconire au Centre de spiritualité de Kottayam, le 11 octobre 2004. Le principal théme théologique figurant A Yordre du jour concernait lEglise comme communion, Deux documents ont été discutés: le premier « Perspe biblico-théologiques sur la communion ecclésiale » préparé par le Métropolite Kuriakose Theophilose, et le deuxieme « Progresser vers la pleine communion selon le Concile Vatican Il» présenté par Mer Johan Bonny. Les membres de la Commission mixte ont conclu que les discussions qui se sont déroulées jus: quia présent sur le theme de Fecclésiologie, permetient détablir un projet de synthese sur fe theme de «TEglise comme communion ». Une premiere ver- sion de cette synthése sera rédigée puis de nouveau soumise a la discussion pour étre completée durant les prochaines réunions annuelles. En ce qui concerne le theme du Témoignage com- mun, les membres de la Commission mixte ont encore discuté de certaines questions pastorales relatives 2 Vapplication pratique de Yaccord de 1993 sur les mariages mixtes. Ils ont confirmé la décision prise Yannée précédente, de préparer une nouvelle publi tion de cet accord, en Taccompagnant si possible d'un commentaire, afin d'informer le clergé sur son but et son application, Quant a la sous-commission sur le Témoignage commun, de nouvelles dispositions ont 1é prises pour accroitre son activité et garantir son fonctionnement effectif La Commission a pris connaissance du rapport de la premiére néunion de la Commission mixte inter- nationale pour le dialogue théologique entre 1 catholique et les Eglises orthodoxes orientales, qui s'est déroulée au Caire, en Egypte du 27 au 30 janvier 2004. La Commission a discuté des possibles réper- cussions que ce dialogue international pourrait avoir sur le dialogue local au Kérala, Enfin, les membres de la délégation se sont coneentrés sur certains événements influant sur les relations entre 'Eglise malankare syrienne orthodoxe et IEglise malankare orthodoxe syrienne, parmi les. guels Ia demigre visite du Patriarche Zakka | Iwas aut Kérala. La Commission a également pris note duu nouveau nom que I'Eglise Malankare syrienne ortho- doxe a décidé d adopter dorénavant au Kerala: lEglise Jacobite syrienne orthodoxe. La délegation de lEglise Jacobite syrienne ortho- doxe était composée des personnes suivantes: Métro- polite Kuriakose Theophilose (coprésident), Rév. Cor- Episcopa Adai Jacob (cosecrétaire), Rév. P. Daniel Thattarayil, Rév. P. Shibu Cherian, Rev. P. Thomas Abraham. Les membres de la délégation catholique Glaient quant & eux: S.Exe. Mer Brian Farrell (copré= sident), S.Exc. Mar Joseph Powathil, S.Exc. Mar Kuriakose Kunnacherry, S.Exc. Joshua Mar Igna- thios (représentant lArchevéque Cyril Mar Baselios), Réx. P. Xavier Koodapuzha, Rev. P. Mathew Vellanic- kal, Rév. P. Geevarghese Chediath, Rev. P. Francis Pereparambil, Mgr Johan Bonny (cosecrétaire). LLEE. Cyril Mar Baselios et Patrick D'Souza n/ont pas pu prendre part a la réunion. La prochaine rencontre aura lieu au Séminaire Théologique Jacobite syrien orthodoxe de Mulanthu- ruthy (Ernakulam), les 5 et 6 décembre 2005, A Tordre du jour figurent deux questions: une étude complémeniaire sur les modéles de communion au premier millénaire et un projet de synthése des discussions qui se sont tenues jusqu’a présent sur le théme de IEglise comme communion. COMMISSION MIXTE POUR LE DIALOGUE ENTRE UEGLISE ‘ATHOLIOUE ET EGLISE MALANKARE ORTHODOXE SYRIENNE Kottayam (Inde), 13-14 octobre 2004 La 16° réunion de la Commission mixte pour le dialogue entre Eglise catholique et !Eglise malanka- re orthodoxe syrienne sest tenue au Centre de Spiri- tualité de Kottayam, du 13 au 14 octobre 2004 La discussion a porté principalement sur deux do- cuments: (1) «La Tradition liturgique des chrétiens de Saint Thomas jusqu’au XIX: sigcle», préparé par le P. John Panicker et (2) «Le Primat pétrinien au cours des quatre premiers sigcles: quelques themes de discussion », proposé par le Rev. P. K.M. George. Bien que l’Eglise catholique et 'Eglise malankare orthodoxe syrienne slaccordent sur divers éléments re- latifs & TEglise comme communion, elles conservent des avis divergents sur certaines questions essentielles, en particulier celle du Ministére pétrinien. Les membres de la Commission mis ixte ont convenu quiune étude plus approfondie était nécessaire & ce sujet. En ce qui concerne le témoignage commun, une grande attention a été accordée a la question des ma- riages mixtes et a la possibilité d’aboutir & un accord Pastoral sur ce point. La Commission a décidé qu'un nouveau projet devrait etre préparé sur la base du rapport redigé en I'an 2000, puis soumis aux autori- {és ecclésiales compétentes, Les membres de la Commission mixte ont pris connaissance du rapport de la premiére réunion de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre I'Eglise catholique et les Ealises or- 165 thodoxes orientales, qui sest déroulée au Caire, en Egypte, du 27 au 30 janvier 2004. Ils ont discuté des repercussions possibies que ce dialogue international pourrait avoir sur le dialogue local au Kérala. ‘La Commission a approuvé de nouvelles initia- tives dans le domaine du témoignage commun: (1) une conférence cecuménique, le 18 décembre 2004, au centre Nilakal avec la participation de repré- Sentants des deux communautés; (2) une conférence eecuménique sur assistance aux familles; (3) une conférence excuménique d'une journée s'adressant faux membres des communautés religieuses. ‘Des décisions ont été prises concernant le fonc- tionnement des sous-comités. Le sous-comité sur le témoignage commun sera chargé d'étudier si et de quelle maniére cette Commission de dialogue peut Sengager dans une réflexion aecuménique sur cer- taines questions sociales ou éthiques d'intérét com- mun, Le sous-comité sur histoire de lEglise entre pprendra un travail préparatoire en vue de la publica tion de certains documents fondamentaux relatifs & la période pré-Diamper. Dans un premier temps, des listes de tous les documents disponibles seront prépa- rées et un critere de sélection sera défini. Enfin, les participants se sont penchés sur cer- tains éyénements récents concernant les relations centre PEglise malankare syrienne orthodoxe et 'Eelise malankare orthodoxe syrienne. Les membres de la délégation ont pris note de la position de I'Eglise ma- Tankare syrienne orthodoxe concernant I'unité de «

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