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Dissertation Texaco
Dissertation Texaco
Département de Langues
Mars 2022
José Guerrero R
Je suis une bête, un nègre. Mais je puis être sauvé. Vous êtes de faux nègres, vous
maniaques, féroces, avares. Marchand, tu es nègre ; magistrat, tu es nègre ; général, tu es
nègre ; empereur, vieille démangeaison, tu es nègre : tu as bu d'une liqueur non taxée, de la
fabrique de Satan.
Arthur Rimbaud
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nous demander : Comment est représentée la lutte pour la reconnaissance culturelle et
politique des communautés minoritaires au Texaco ?
Tout d’abord, Chamoiseau nous présente le panorama d’une communauté condamnée à l’exil
dans son propre pays. C’est l’histoire d’une lutte transmise de génération en génération
par des individus condamnés depuis leur naissance à la précarité d’une société qui les
marginalisait. Son protagoniste, Marie-Sophie Laborieux, affirme dans une tentative de
préserver le quartier qu’elle a fondé avec tant de souffrance : « Je commençai à Lui raconter
l’histoire du Quartier et de Notre conquête de l’En ville, à parler à Notre nom à Tous,
plaidant Notre cause, contant ma vie... » (Chamoiseau, 1993). Il souligne le mot conquête, et
il ne signifie rien d’autre que la lutte. Il se bat pour un petit espace de territoire illégitime
qu’il s’est approprié avec le temps et qui est menacé par les institutions qui ont autrefois forcé
ses individus à chercher refuge loin de la faim et de l’abandon de l’État. Donoso (2014)
affirme : « Lo periférico se opone a lo oficial, así como Texaco, un barrio de invasión a las
afueras de Fort-de-France, se opone a la idea de ciudad. Todos los habitantes de este barrio
añoran las bondades de la ciudad, pero ella no los acepta pues Texaco se encuentra en las
orillas, y las orillas son muchas veces una metáfora para lo marginal. ». On parle alors de la
lutte entre deux peuples, celui qui lutte pour survivre dans un environnement hostile et celui
qui l’ignore et le marginalise.
Texaco est un pays à part dans un autre pays, qui fait partie d’un pays plus vaste et plus
lointain. Ses habitants seuls reconnaissent ceux qu’ils considèrent comme Voisins ou
Compatriotes, Toute personne venant de l’extérieur est considérée comme une menace et
représente l’ennemi. Marie-Sophie affirme : « Mon intérêt pour le monde se résumait à
Texaco, mon travail, notre quartier, notre champ de bataille et de résistance. Et cette lutte
commençait une dernière confrontation où devait se jouer notre existence ou notre échec
définitif. » (Chamoiseau, 1993). Texaco ne fait pas partie de cet autre Pays représenté à Fort
de France, ses habitants sont considérés comme Citoyens et cette situation encadre la distance
entre les deux Peuples. À cet égard, Donoso (2014) affirme : « El nombre y la categoría de
ciudadano solo servían para ir a las votaciones, para ejercer su derecho civil que consistía
fundamentalmente en votar para que las leyes se siguieran haciendo en su contra y para
seguir protegiendo y defendiendo la propiedad de los békés. Así, los nuevos ciudadanos eran
buscados para engrosar las listas de votantes porque, le dice Esternome a Marie-Sophie, “lo
entenderás, las elecciones son importantes, hay que impedir que la hidra esclavista levante la
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cabeza” (Chamoiseau, 1992, p. 120). Por eso, a pesar de que la libertad había sido decretada
y todos eran virtualmente libres, la situación para ellos no era nada diferente. »
Donc, la lutte signifie appropriation et survie et c’est ce que le quartier de Texaco signifie
pour ses personnages, une lutte pour ne pas disparaître d’un espace pour l’incapacité ou le
refus d’appartenir à un autre. Chamoiseau (1993) dans la voix de Marie-Sophie affirme : «
Autour de cet espace abandonné, se bousculaient nos cases, Notre Texaco à nous, Compagnie
de Survie ». Donc nous comprenons que la survie est l’endurance, et l’endurance est la lutte.
Deuxièmement, résultat de cette lutte contre les émissaires d’un État indifférent à Texaco,
surgit une position de méfiance et d’hostilité envers les institutions extérieures à la
communauté. Avec l’arrivée d’un promoteur provenant de la mairie de la ville et nommé
sous la figure du Christ, les habitants de Texaco se montrent hostiles, craintifs et méfiants. On
le compare à un requin, à la misère ; Marie-Sophie dit : « A le voir, il semblait un de ces
agents de la Mairie moderne, qui détruisaient les Quartiers populaires pour les civiliser dans
Clapiers d’achélèmes, ou même de ces huissiers des Vieux temps-la-misère qui nous
sommaient d’disparaître. » (Chamoiseau, 1993) et sous cette description, nous réalisons tout
ce que la personne venue de l’extérieur représente pour Texaco. L’histoire, non seulement
l’histoire officielle, mais celle de ceux qui ont traversé de multiples difficultés justifient en
quelque sorte cette position. Donoso (2014) complète cela en disant : «Esta era la verdadera
historia de su pueblo, aquella que callan los libros oficiales. Y eso que cuenta la heroína dejar
ver que no hay una sola historia, que esa que se nos presenta es solo una cara de la moneda, y
que en realidad son muchas las historias las que componen aquello que llamamos historia. ».
En conséquence, deux histoires coexistent à Texaco, celle officielle des institutions et celle
réelle de ceux qui ont souffert des événements difficiles de l’histoire.
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podían esperar a que los békés, ni mucho menos los mulatos, los ayudaran pues desconfiaba
por igual de los dos grupos; los békés eran los dueños de todo y los mulatos, en su pose de
intelectuales, se habían convertido en unos individualistas. ». De cette affirmation, nous
avons éclairci l’abîme de la distance entre un peuple avec ses institutions et ses prétentions et
un autre avec ses carences et sa fragilité.
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Il est normal qu’entre cette dualité nous rencontrions constamment des personnages qui se
questionnent sur eux-mêmes et sur la culture et la communauté dans laquelle ils vivent.
Marie-Sophie voit l’émissaire de la mairie comme quelqu’un d’étranger à son monde mais
qui, d’une certaine manière, connaît le fonctionnement des villes parce qu’il s’est préparé et a
étudié. De lui, elle affirme : « Le questionnant Encore, j’appris que cet Ange du Malheur dont
je ferai Notre Christ préparait une thèse d’urbanisme à l’Institut de Géographie de Paris IV,
sous la direction du Professeur Paul Claval, que par l’instant il travaille au service créé par la
Mairie moderniste afin de rationaliser son space. » (Chamoiseau, 1993). Et cette description
reflète l’intention de certains personnages de faire partie de la culture opposée, la culture
ennemie. Donoso (2014) complète : « En Texaco Marie-Sophie quiere hacer parte de los
letrados, por eso aprende a leer y a escribir. Busca la escritura para retener la palabra de sus
ancestros. Acoge la cultura letrada, la abraza, pero quiere mezclarla con su propia cultura y
así aprovechar la permanencia de la escritura para contar la historia de su pueblo en criollo. »
(Donoso, pp17, 2014).
Chez d’autres personnages, cette intention est plus manifeste. C’est le cas de Ti-Cirique, un
Haïtien qui vit entre les lettres de Victor Hugo et dédaigne de façon catégorique certains de
ses compagnons. Sur lui, Chamoiseau (1993) écrit : « La vie de Sonore ne Lui paraissant pas
très noble, Notre Scribe Lui avait sédimenté autour de chaque demande un récit de vie
misérable copie dans un Roman de Victor Hugo. ». Et de cette façon, nous nous rendons
compte du désir d’appartenir à une autre culture qui n’est pas essentiellement la sienne. Face
à cela, la langue joue un rôle crucial en étant le véhicule de la colonisation tout en devenant le
moyen de la protestation. Selon les mots de Donoso (2014) « El francés se relaciona entonces
directamente con la escritura. Es en ese idioma en el que se emiten todos los documentos
oficiales y en el que se legisla. El francés se impone como lengua vehicular mientras que el
criollo tiene un estatus vernacular, es decir, funciona solo para los intercambios cotidianos; es
una lengua de carácter oral. En la oralidad, hay “historias”, la verdad no existe. ». La langue
elle-même est alors un parfait exemple de cette dualité entre les cultures, qui se présente
constamment en conflit et s’interroge sur ce qui est le mieux.
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marginalisation à l’intérieur de leur propre pays a engendré une atmosphère de méfiance et
d’hostilité envers les institutions établies à l’origine par cette culture coloniale. Il est
inévitable que cette lutte engendre une dualité entre les communautés qui cherchent d’une
manière ou d’une autre à répondre à leur situation et à leurs actions par la réflexion de leur
propre histoire et expérience. La question qui reste derrière ce tableau est : à quel moment
peut-on parler d’identité culturelle alors que la culture d’un peuple a été façonnée et
transformée au cours des années et des années d’interaction avec d’autres cultures ?
Références :
Rimbaud, A., & Favre, L. (1955). Une saison en enfer. Mercure de France.