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Particip’Action Vol.

5 – N°2 Juillet 2013

ISSN 2071 – 1964

Revue Interafricaine de littérature,


linguistique et philosophie

Revue semestrielle. Volume 5, N°2-Juillet 2013


Lomé – Togo

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Particip’Action Vol. 5 – N°2 Juillet 2013

ADMINISTRATION DE LA REVUE PARTICIP’ACTION

Directeur de publication : Pr Komla Messan NUBUKPO


Coordinateurs de : Ataféi PEWSSI,
Rédaction Maître de Conférences
: Martin Dossou GBENOUGA,
Maître de Conférences
Secrétariat : M. Ebony Kpalambo AGBOH
: Mme Ayaovi Dopé DJAMLA-AKITE

COMITE SCIENTIFIQUE ET DE LECTURE

Président : Serge GLITHO, Professeur titulaire (Togo)

Membres :

Pr Augustin AÏNAMON (Bénin), Pr Yaovi AKAKPO (Togo), Pr Kofi


ANYIDOHO (Ghana), Pr Lébéné Philippe BOLOUVI (Togo), Pr Zadi GREKOU
(Côte d’Ivoire), Pr Akanni Mamoud IGUE, (Bénin), Pr Mamadou KANDJI
(Sénégal), Pr Taofiki KOUMAKPAÏ (Bénin), Pr Kofi MENSAH (Ghana), Pr Guy
Ossito MIDIOHOUAN (Bénin), Pr Bernard NGANGA (Congo Brazzaville), Pr
Norbert NIKIEMA (Burkina Faso), Pr Adjaï Paulin OLOUKPONA-YINNON
(Togo), Pr Lazare POAME (Côte d’Ivoire), Pr Mahamadé SAVADOGO (Burkina
Faso), Pr Issa TAKASSI (Togo), Pr Simon Agbéko AMEGBLEAME, Pr Marie-
Laurence NGORAN-POAME, Pr Kazaro TASSOU (Togo), Pr Ambroise C.
MEDEGAN (Bénin), Pr Médard BADA, (Bénin)
René Daniel AKENDENGUE, Maître de Conférences (Gabon), Konan AMANI,
Maître de Conférence (Côte d’Ivoire), Octave Nicoué BROOHM, Maître de
Conférences (Togo)
Relecture/Révision
- Pr Lébéné Philippe BOLOUVI
- Pr Serge GLITHO
- Pr Komla Messan NUBUKPO
Contact : Revue Particip’Action, Faculté des Lettres et Sciences Humaines de
l’Université de Lomé – Togo.
01 BP 1515 ou 01 BP 4317 Lomé – Togo
Tél : 00228 90 25 70 00
E-mail : f_nubukpo@yahoo.com
f.nubukpo@gmail.com
© Juillet 2013
ISSN 2071 – 1964
Tous droits réservés

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Particip’Action Vol. 5 – N°2 Juillet 2013

LIGNE EDITORIALE

Particip’Action est une revue scientifique. Les textes que nous acceptons en français,
anglais, ou allemand sont sélectionnés par le comité scientifique et de lecture en
raison de leur originalité, des intérêts qu’ils présentent aux plans africain et
international et de leur rigueur scientifique. Les articles que notre revue publie
doivent respecter les normes éditoriales suivantes :
La taille des articles
Volume : 18 à 20 pages ; interligne : 1,5 ; pas d’écriture : 12, Times New Roman.
Ordre logique du texte
- Un TITRE en caractère d’imprimerie et en gras. Le titre ne doit pas être trop long ;
- Un Résumé en français qui ne doit pas dépasser 6 lignes ;
- Les Mots clés ;
- Un résumé en anglais (Abstract) qui ne doit pas dépasser 6 lignes ;
- Key words ;
- Introduction ;
- Développement ;
Les articulations du développement du texte doivent être titrées et/ou sous titrées ainsi :
1. Pour le Titre de la première section
1.1. Pour le Titre de la première sous-section
2. Pour le Titre de la deuxième section
2.1. Pour le Titre de la première sous-section de la deuxième section
2.2. Etc.
Conclusion
Elle doit être brève et insister sur l’originalité des résultats de la recherche.
- Bibliographie
Les sources consultées et/ou citées doivent figurer dans une rubrique, en fin de texte
intitulée :
Bibliographie
Elle est classée par ordre alphabétique (en référence aux noms de famille des auteurs) et se
livre : Nom, Prénoms (ou initiaux), ‘’Titre de l’article’’ (entre griffes) suivi de in, Titre de la
revue (en italique), volume, numéro, Lieu d’édition, Année d’édition, Indication des pages
occupées par l’article dans la revue.
Les rapports et des documents inédits mais d’intérêt scientifique peuvent être cités.
La présentation des notes
La rédaction n’admet que des notes en bas de page. Les notes en fin de texte ne sont pas
tolérées.
Les citations et les termes étrangers sont en italique et entre guillemets
« ».
Les titres d’articles sont entre griffes ‘’ ‘’. Il faut éviter de les mettre en italique.
Les titres d’ouvrages et de revues sont en italique. Ils ne sont pas soulignés.
La revue Particip’Action s’interdit le soulignement.
Les références bibliographiques en bas de page se présentent de la manière suivant : Prénoms
(on peut les abréger par leurs initiaux) et nom de l’auteur, Titre de l’ouvrage, (s’il s’agit d’un

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livre) ou ‘’Titre de l’article’’, Nom de la revue, (vol. et n°), Lieu d’édition, Année, n° de
page.
Le système de référence par année à l’intérieur du texte est également toléré. Elle se présente
de la seule suivante : Prénoms et Nom de l’auteur (année d’édition : n° de page). NB : Le
choix de ce système de référence oblige l’auteur à faire figurer dans la bibliographie en fin de
texte toutes les sources citées à l’intérieur du texte.
Le comité scientifique de lecture est le seul juge de la scientificité des texte publiés.
L’administration et la rédaction de la revue sont les seuls habilités à publier les textes retenus
par les comités scientifiques et de relecture. Les avis et opinions scientifiques émis dans les
articles n’engagent que leurs propres auteurs. Les textes non publiés ne sont pas retournés.
La présentation des figures, cartes, graphiques… doit respecter le format (format : 17,5/26)
de la mise en page de la revue Particip’Action.
Tous les articles doivent être envoyés aux adresses suivantes :
f_nubukpo@yahoo.com
f.nubukpo@yahoo.com
NB : Chaque auteur dont l’article est retenu pour publication dans la revue Particip’Action
participe aux frais d’édition à raison de 35.000 francs CFA (soit 65 euros ou dollars US) par
article et par numéro. Il reçoit, à titre gratuit, un tiré-à-part.

La Rédaction

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PRIX DE VENTE DU NUMERO

Région/Pays Quantité Prix unité Total


Togo ------------- FCFA 6000
Afrique CEDEAO FCFA 7 000
CEMAC FCFA 8 000

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Littérature, culture et communication

1. Literature and Culture Blend : An Americanist View of Cultural Ambiguities through


Michael Denning’s The Cultural Front ........................................................................... 3
Larry AMINN
Université de Kara, Togo
2. Authorization, Authority and Authoritarianism : A Demise of Ruling and Leadership
in Ndikaru wa Teresia’s Cry of the Oppressed ............................................................15
Ataféï PEWISSI
Université de Lomé, Togo
3. Designation and Functions of Rituals, Festivals and Drama in the African Social
Context : A Contribution to the Nomenclature Debate in African Literature ..............35
Damlègue LARE
Université de Lomé, Togo

4. Identité de la femme africaine dans le romanesque féminin ........................................53


Ayaovi Xolali MOUMOUNI-AGBOKE
Université de Lomé, Togo

5. Le comique comme sublimation ou cure psychanalytique dans Larmes de crocodile et


sourires de croque-morts d’Hubert Madôhona Arouna ...............................................71
Kossi Souley GBETO
Université de Lomé, Togo

6. Language, Translation and Cultural Values in Translation : The Case of Kirkup’s The
African Child and Camara Laye’s L’enfant noir ..........................................................85
Lalbila Aristide YODA
Université de Ouagadougou, Burkina Faso
7. ‘’The Silence of the Womb’ : Language Multilation in Gayl Jones’s CoRregidora’
................................................................................................................................... 103
Ange Gaël PAMBO PAMBO N’DIAYE
Université Omar Bongo, Gabon

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8. The Process of Language Defamiliarisation in T. S. Eliot’s Journey of the Magi’’ .


................................................................................................................................... 111
Pamessou WALLA
Université de Lomé, Togo
9. Aspects of Texture in Wole Soyinka’s’’Death in the Dawn’’ and’’ In the Memory of
Segun Awolowo’’ ........................................................................................................121
Léonard KOUSSOUHON
&
Innocent KOUTCHADE
Université d’Abomey-Calavi, Bénin
10. Le discours d’André Gide, de Voyage au Congo à Retour du Tchad ?
Non ! .............................................................................................................................137
Okri Pascal TOSSOU
Université d’Abomey-Calavi, Bénin

11. Gedächtnis und Erinnerungspraktiken : Ein Vergleich zwischen oralem


Märchenerzählen inWestafrika und den schriftlich fixierten Märchen der Brüder Grimm
......................................................................................................................................147
Mensah Wekenon TOKPONTO
Université d’Abomey-Calavi, Bénin
12. La communication dans le contexte de la bonne administration .................................161
Oluchukwu ASADU, Ph.D.
Nnamdi Azikiwe University, Awka
Anambr State, Nigeria
&
Samuel MADUAGWUNA
Nwafor Orizu College of Education, Nsugbe
Anambra State, Nigeria
13. Lilyan Kesteloot et l’histoire de la literature négro-africaine ......................................169
Guy Ossito MIDIOHOUAN
Université d’Abomey-Calavi, Bénin
Linguistique et didactique des langues
14. La prédication dans les ‘’avis de décès’’ de la presse officielle togolaise ..................189

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Gbandi ADOUNA
Université de Kara, Togo
15. Casse-tête chinois pour l’hypothèse de l’intégrité lexicale ..........................................207
Méterwa Akayaou OURSO
Université de Lomé, Togo
16. Using Student Groupings to Foster Effective Classroom Management in the
Competency-Based Approach Context in the Republic of Benin ................................ 227
Estelle BANKOLE-MINAFLINOU
Université d’Abomey-Calavi, Bénin

17. A Review of the Interlanguage Processes ....................................................................245


Kossi Antoin AFELI
Université de Lomé, Togo
Philosophie et Sciences de l’Education
18. L’articulation entre le secondaire et le supérieur au Togo : au-delà d’une réforme du
baccalauréat, réflexion sur les paradigmes ...................................................................257
Maryse A. QUASHIE
Université de Lomé, Togo
19. La dignité humaine et son expansion dans le service du sublime (L’autre) ................
......................................................................................................................................273
Adjoavi ATOHOUN
Université de Lomé, Togo
20. La transcendance culturelle : une finalité éducationnelle pour l’émergence de l’Afrique
......................................................................................................................................291
Jean-Claude HOUNMENOU
Université d’Abomey-Calavi, Bénin
21. Religion et société : approche sociale et institutionnelle des protestantismes en Côte
d’Ivoire .........................................................................................................................301
Rubin POHOR
Université Alassane Ouattara de Bouaké, Côte d’Ivoire
22. L’Etat Hégélien et les défis politiques du monde contemporain, les droits humains ..321
Abou SANGARE
Université de Bouaké, Côte d’Ivoire

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23. La mystique démocratique comme sécularisation du Christianisme dans les deux


sources de la morale et de la religion de Bergson ........................................................333
Eustache Roger Koffi ADANHOUNME
Université d’Abomey-Calavi, Bénin

24. Hegel et le premier romantisme ...................................................................................269


Mounkaïla Abdo Laouali SERKI
Université Abdou Moumouni de Niamey, Niger

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LA TRANSCENDANCE CULTURELLE : UNE FINALITE EDUCATOIONNELLE


POUR L’EMERGENCE DE L’AFRIQUE

Jean Claude HOUNMENOU


Université d’Abomey-Calavi, Bénin

Introduction

L’objectif de la présente réflexion est de proposer un cadre philosophique pour des


orientations éducationnelles plus adéquates non seulement aux réalités, aux besoins, aux
nécessités de développement du continent, mais aussi aux défis qu’impose la mondialisation
à toutes les communautés humaines de la planète. Pour ce faire, nous allons démontrer en
quoi le contexte culturel et mental dans lequel se développent les systèmes éducatifs en
Afrique n’est pas de nature à favoriser l’émergence du continent dans le monde, mais ne fait
que perpétuer son asservissement à l’Occident : nous tirerons ensuite de cette analyse comme
conséquence, que la voie de l’avenir pour nos pays, passe par l’éducation des jeunes à ce que
nous proposons d’appeler, la transcendance culturelle.

I. Le contexte culturel et mental de développement des systèmes


éducatifs en Afrique aujourd’hui : un ferment d’asservissement

Le contexte culturel et mental dans lequel se développent les systèmes éducatifs africains,
aux plans interne comme externe n’ont et ne peuvent avoir pour effet, que de perpétuer
l’asservissement du continent à l’Occident, et le façonnement d’Africains et d’Africaines
persuadés de leur infériorité éternelle face aux autres êtres humains.

1.1 Des systèmes éducatifs exclusivement ouverts aux langues


européennes

Sur le plan interne, et en prenant l’exemple du Bénin, pays d’Afrique de l’Ouest, le système
éducatif national n’a fait quasiment aucune place aux langues nationales, ni comme véhicule,
ni comme matière d’enseignement.

Et l’on ne peut comprendre la place que le française occupe aujourd’hui au Bénin, et dans le
système éducatif du pays, sans la relier à l’entreprise coloniale. En effet, dans le souci de
consolider l’œuvre politique de domination et d’assujettissement de la colonie du Dahomey,
le gouvernement colonial va entreprendre de scolariser une fraction non négligeable de la
jeunesse indigène. II s’agissait également pour lui de justifier sa mission civilisatrice. La
finalité principale de l’enseignement alors, c’était de rapprocher de la France le plus grand
nombre d’indigènes. Cet enseignement visait à donner aux Dahoméens, le mépris de leur
culture nationale et l’admiration de la France, Ainsi P. ALEXANDRE peut-il écrire dans son
ouvrage paru en 1968, pp 11-12 "La politique coloniale française en matière d’éducation et
d’administration est facile à définir : c’est celle de François 1er , de Richelieu, de Robespierre

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et de Jules Ferry. Une seule langue est enseignée dans les écoles, admise dans les tribunaux,
utilisée dans l’administration : le français tel que défini par les avis de l’Académie."

Cette forte empreinte des structures éducatives françaises, des programmes français, de la
langue sur le système éducatif colonial est directement à la base de l’organisation éducative
qui sera en vigueur en Afrique Occidentale et au Dahomey après l’indépendance. En effet,
lorsqu’il s’est agi de doter la nouvelle République d’une langue officielle, c’est naturellement
vers le français que les nouvelles autorités vont se tourner. Ce statut de langue officielle va
faire du français :

 La seule expression de l’enseignement, du primaire à l’Université, en même temps


qu’une matière centrale du programme d’études ;
 La seule langue utilisée dans l’Administration, la presse, les relations internationales,
politiques ou commerciales ;
 La langue parlée dans une partie des émissions radiophoniques et télévisuelles ;
 La langue de la justice et de la littérature écrite ;
 Enfin ce statut de langue officielle se double très souvent d’une fonction véhiculaire,
ce qui fait du français la langue de communication entre les communautés du même pays,
ayan des langues maternelles différentes, ainsi que d’une fonction grégaire, le français servant
pour la communication dans la famille.

La réalité langagière de l’école béninoise se caractérise, au pire par une substitution de la


langue française, langue étrangère, à la langue maternelle de l’apprenant ; au mieux, un
greffage de cette langue officielle, sur la langue nationale parlée par l’élève dans sa
communauté.

Or, la plupart du temps, excepté le cas de quelques villages et hameaux homogènes sur le
plan culturel, cette langue maternelle à laquelle le française se superpose, est multiple. Ainsi,
dans une même classe, on peut trouver des apprenants appartenant à deux, trois, quatre, voire
dix groupes linguistiques différents. Par exemple, dans une école primaire de Porto-Novo, la
capitale du Bénin, le maître d’une classe peut avoir affaire à des élèves ayant comme langue
maternelle, qui le gungbé, qui le fongbé, qui le yoruba, qui le toligbé, qui le guingbé, etc… A
Cotonou, dans une même classe, on peut rencontrer comme langues maternelles des élèves,
le fongbé, le gungbé, le xwlagbé, le bariba, le guingbé, l’adjagbé, l’idatcha, le haoussa,etc…
Malheureusement, aucune de ces langues du terroir, n’a droit de cité dans la classe, quelle
que soit l’étendue de sa diffusion dans le pays. Et comble de misère et d’ostracisme pour ces
langues. nationales, lorsqu’en 6ème, première année du collège, le système éducatif doit
accueillir une autre langue aux côtés du français, c’est encore une langue occidentale :
l’anglais. Ensuite, à partir de la troisième année du secondaire, d’autres langues européennes
encore, vont entrer dans les écoles du Bénin : l’allemand et l’espagnol, qui s’ajoutent à
l’anglais, et à l’inamovible français. Ce qui achève de convaincre définitivement le jeune

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Africain que décidément, la langue de ses ancêtres n’a pas sa place au soleil, mais doit être
soigneusement enfouie dans les tréfonds de l’espace social. Comment s’étonner alors qu’il
ne puisse se déterminer que par rapport aux « maîtres blancs » ? Comment s’étonner alors de
l’extraversion des jeunes Africains en direction de l’Occident, au point que beaucoup d’entre
eux n’ont plus d’autre ambition que de voir l’Europe et mourir ? Surtout que cette éducation
aliénante est fortement appuyée par la persistance de l’image péjorative et dépréciative du
continent africain dans les mentalités européennes.

1.2 L’image péjorative de l’Afrique dans les mentalités occidentales

En effet, même au XXIème siècle, l’image que les médias occidentaux donnent de l’Afrique
et des Africains, reste dévalorisante. Et cette constance dans la négation de l’humanité du
continent, ne trouve sa justification que dans le souci des sociétés du Nord, de légitimer et de
perpétuer leur domination politique et économique sur les pays du Sud. C’est déjà la même
stratégie qui avait servi à légitimer l’asservissement d’une bonne partie des populations
africaines par la traite esclavagiste à partir du 16ème siècle, puis de la colonisation de tout le
continent africain à partir du 19ème siècle. Pour justifier ces crimes contre l’humanité, il avait
suffi alors de répandre l’idéologie que les Noirs africains sont des sous-hommes, ou des
descendants de Cham, le fils maudit de Noé, ou encore des peuples primitifs, qu’il fallait
civiliser. La propagande actuelle sur la thématique de l’Afrique en proie au désordre
généralisé, à la misère, à la corruption, à la barbarie guerrière, n’est qu’une autre forme de la
stratégie du noircissement du continent pour mieux blanchir le Nord, et le faire apparaitre aux
yeux des Africains comme la terre promise incontournable, le recours indispensable, et
finalement, la mesure unique et absolue de toute humanité, de toute civilisation. C’est la
force corrosive de cette propagande servie par un puissant appareil médiatique, qui explique
l’extraversion généralisée des conduites des nations africaines aux plans éducationnel,
culturel, politique, économique, et même sportif.

Dans un tel contexte caractérisé par l’image dévalorisante de l’Afrique dans les mentalités
occidentales et un système éducatif africain qui déprécie l’Afrique au profit de l’Occident, il
ne peut y avoir d’émergence de l’Afrique et de l’Africain dans le monde. Pour changer ce
destin funeste, il faut une nouvelle philosophie de l’éducation, non seulement en Afrique,
mais aussi en Occident ; une philosophie de l’éducation adaptée au contexte actuel de
mondialisation.

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II. Pour une éducation à la transcendance culturelle

En effet, pour créer les conditions d’une véritable émergence de l’Africain, et de l’élévation
mentale de l’Européen par l’éducation, il faut que l’Ecole, au Sud comme au Nord, se donne
une nouvelle finalité : développer chez les jeunes, l’aptitude à la transcendance culturelle.

En effet, l’état d’asservissement de l’Africain et de l’Afrique, c’est avant tout un problème de


mentalité, de représentation, de perception, bref, de culture, due à l’éducation donnée aux
jeunes ; de même, le problème de la volonté des Occidentaux d’imposer leur modèle de
pensée, leur modèle de développement, leurs habitudes de consommation, leur rapport aux
biens matériels, leur vision du monde, n’est d’abord qu’un problème de culture et de négation
de la diversité de l’humanité, due, encore une fois, à l’éducation. Dans les deux cas, la
réponse adéquate se trouve dans l’éducation de l’aptitude à la transcendance culturelle.
Qu’est-ce que la transcendance culturelle ?

2.1. Ce qu’est la transcendance culturelle

Selon le philosophe allemand Martin Heidegger, la transcendance, c’est le fait de se sentir au


milieu de l’étant dans son ensemble ; la transcendance, c’est un caractère propre à l’homme,
qui consiste dans ce que, l’être humain ne peut se comprendre lui-même, que comme étant
dans l’ensemble de ce qui est et de ce qui pourra être. En conséquence, l’homme ne peut
choisir ce qu’il sera lui-même, qu’à condition de s’ouvrir à ce qui lui sera possible, et cette
ouverture ne peut s’accomplir qu’en fonction de l’anticipation des êtres parmi lesquels il doit
vivre.

Ensuite, au sens courant, la transcendance, c’est le fait de dépasser, de se dépasser, de se


situer au-delà d’un ordre de réalités déterminées ; bref, c’est le fait pour l’individu d’aller au-
delà des possibilités apparentes de sa propre nature.

Nous entendons donc la transcendance culturelle, comme la condition des hommes qui,
appartenant originellement à une culture, se sont montrés aptes à dépasser les limites de cette
culture, pour s’ouvrir à une autre culture, pour comprendre une autre culture. C’est la
situation des êtres humains qui sont au-dessus, ou bien au-delà de leur culture d’origine,
parce qu’ils sont devenus conscients de l’existence, de la légitimité, et de la nécessité d’autres
cultures. Parce qu’elle rend compte de la capacité de vivre une expérience culturelle multiple
et multiforme, la transcendance culturelle apparaît comme la condition par excellence, non
seulement du sens de la diversité des cultures humaines, mais aussi de la paix, de
l’acceptation mutuelle, de l’intercompréhension entre les êtres humains, à quelque espace
qu’ils appartiennent sur notre planète. Il faut donc éduquer à la transcendance culturelle.

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Cette éducation à la transcendance culturelle devrait avoir comme cibles principales, les enfants
et les adolescents, et se préoccuper d’en faire, non seulement des citoyens, membres d’une
communauté particulière, mais aussi des hommes et des femmes, des êtres humains tout
simplement. Cette éducation préparerait les jeunes à être, par exemple des Africains, mais aussi
des Européens ou des Asiatiques ; des Européens, mais aussi des Africains ou des Américains.
Eduquer à la transcendance culturelle, c’est développer, former des citoyens ouverts et larges
d’esprit, des hommes et des femmes mentalement et comportementalement souples, flexibles ;
des êtres humains riches des valeurs culturelles de leur pays, mais aussi des valeurs culturelles
étrangères. Pour favoriser l’émergences d’un modèle de développement propre à l’Afrique, les
systèmes éducatifs de nos différents pays, dont le Bénin, doivent se donner comme première
finalité, de former les jeunes Africains, d’abord pour l’Afrique, pour l’environnement africain.
De cette finalité principale vont découler les objectifs généraux de l’éducation, les méthodes et
surtout les programmes de formation, qui seront davantage et principalement centrés sur les
problèmes philosophiques, sociaux, culturels, économiques, politiques, techniques,
technologiques, scientifiques, sociaux, environnementaux, agricoles, nutritionnels, sanitaires
des pays. Les médias seraient mis à contribution dans cette nouvelle éducation, surtout dans le
but de développer de nouvelles habitudes de consommation, et de nouveaux rapports aux biens
de consommation chez les jeunes.

Une telle éducation comporterait par exemple, l’apprentissage de la langue, de l’histoire, des
coutumes nationales, mais aussi ensuite, une solide initiation à des langues d’ailleurs, à
l’histoire, à la philosophie, aux coutumes de peuples étrangers.

Dans cette logique d’une éducation ayant comme finalité le développement de l’aptitude à la
transcendance culturelle, la question de l’introduction des langues nationales dans le système
éducatif en Afrique ne se pose plus, puisque cette logique implique de facto, que la
scolarisation se fasse d’abord dans une langue nationale. Le seul problème qu’il faut résoudre,
est celui du choix de la langue, ou des langues nationales de scolarisation, lorsqu’il en existe
plusieurs, comme dans le cas du Bénin, de la Côte d’Ivoire ou du Cameroun. Parce qu’il ne
s’agira pas non plus d’introduire toutes les langues d’un pays à l’école. Là encore, le principe
de la transcendance culturelle peut aider à choisir, en privilégiant les langues nationales ayant
la diffusion la plus large dans le pays, parce que transcendant les frontières des départements,
des régions, et les frontières nationales, comme le fongbé, le yoruba, le guingbé, le dendi au
Bénin ; le haoussa au Niger, le dioula en Côte d’Ivoire.

Les avantages de cette éducation guidée par la transcendance culturelle, et qui redonne la
première place à la langue et donc à la culture de l’élève africain dans son cursus scolaire, sont
énormes, et d’abord aux plans sociolinguistique et psychopédagogique.

Sur le plan sociolinguistique, l’adaptation de l’enseignement a la société et à l’enfant, permet


une continuité entre d’une part, les milieux familial, social et culturel, et d’autre part, le
milieu scolaire. Cette adaptation facilite la communication et la compréhension entre
l’environnement.

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Particip’Action Vol. 5 – N°2 Juillet 2013

Car, l’éducation est un processus de communication des idées, des connaissances.


Enseigner ou apprendre quelque chose, c’est aussi communiquer. Il faut donner envie de
communiquer. Dans ces conditions, il est évident que la première réalité à prendre en compte
par l’école, c’est la langue du milieu de vie de l’élève, celle qu’il utilise couramment dans sa
famille, dans la rue et même dans la cour de l’école. C’est cette langue qui, mieux que toute
autre, lui permet d’interroger le milieu et de le comprendre, d’acquérir rapidement les
connaissances indispensables à son développement harmonieux et a sa participation effective
à la vie de la société.

En respectant le substrat linguistique de l’enfant, l’héritage culturel qu’il porte en lui,


l’utilisation pédagogique de la langue du milieu permet d’éviter le déracinement social de
nombreux citoyens. Elle permet d’éviter également que la langue nationale ait pour l’enfant
une valeur et un statut social inférieur à celui de la langue d’importation que sont le français,
l’anglais, l’allemand, ou l’espagnol.

Sur le plan psychopédagogique, l’utilisation pédagogique des langues nationales dans


l’enseignement primaire permet de créer un environnement affectif et culturel plus favorable
au développement cognitif et sensori-moteur de la plupart des enfants africains.

En effet, dès le premier jour de scolarité, l’enfant est placé dans un état de déséquilibre
affectif qui ne peut que s’aggraver si on lui refuse la possibilité d’utiliser la langue de son
milieu.

Ce déséquilibre affectif a pour corollaire une situation d’incertitude intellectuelle. En effet,


dans ces conditions, l’acquisition des connaissances est rendue plus difficile, la durée des
études se prolonge, puisque les échecs sont dûs généralement aux difficultés linguistiques.
D’autres sourcse d’échec, ce sont les difficultés conceptuelles, puisque, chaque langue ayant
un esprit et une structure propre, apprendre et parler une autre langue, c’est penser autrement,
et donc penser autre chose.

En n’étant confronté qu’au français dès son entrée à l’école, le jeune Béninois ou Africain
doit oublier la langue de chez lui.

Il se crée donc dès le départ, un dialogue de sourds, de nature à défavoriser la mise en œuvre
d’une pédagogie active et le libre épanouissement des facultés de l’enfant. Celui –ci finit par
quitter mentalement la classe, en attendant d’être définitivement exclu de l’école, soit pour
insuffisance de travail, soit pour inintelligence.

En revanche, si l’on favorise l’utilisation des langues nationales à l’école africaine, on offre à
l’enfant la possibilité équilibrante de verbaliser spontanément ses expériences , ses intérêts et
sa pensée. L’enfant s’éveille à la curiosité des êtrse et des choses qui l’entourent, il se
construit et se structure.

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Particip’Action Vol. 5 – N°2 Juillet 2013

En résumé, la langue est une chose essentielle, et le meilleur véhicule de l’enseignement est
la langue du milieu de l’enfant. Cette langue lui permet d’apprendre plus rapidement qu’il ne
le fait dans une langue mal connue de lui. La seule difficulté qu’il a alors à affronter, réside
dans le processus de reconnaissance graphique et dans l’écriture. La langue nationale
représente un système de signes qui fonctionne automatiquement dans l’esprit de l’élève
lorsqu’il veut s’exprimer ou comprendre.

En dehors de ses avantages pédagogiques immédiats, une éducation fondée sur la logique de
la transcendance culturelle, rendra capables à moyen terme, les pays africains, de se donner
un modèle de développement qui ne soit plus une pâle copie du modèle occidental en faillite.
Non seulement, elle favorisera d’abord une prise de conscience des élites locales, de ce que,
après plus de 50 ans d’implémentation des schémas occidentaux de développement, nos pays
sont toujours pauvres et sous-développés, et se retrouvent même dans l’impasse. Mais
encore, les élites issues des nouveaux systèmes éducatifs, mentalement libérés, pourront
définir ou redéfinir les besoins de leurs populations ; une fois ces besoins définis, la question
à se poser, sera celle de connaître les meilleures façons, dans notre génie propre, ainsi que les
ressources endogènes les plus susceptibles de les satisfaire ; c’est seulement quand nous
connaitrons ces réponses, que nous aurons évalué leurs limites, que nous pourrons enfin nous
poser la question de ce dont nous aurons besoin comme apports complémentaires, surtout
matériels et financiers de l’Occident. En résumé, les élites locales formées à l’école de la
transcendance culturelle, seront à même de construire les fondations et l’architecture du
développement de leurs pays, quitte à ce que les Occidentaux viennent aider à élever les
murs , ou mettre la toiture, parce qu’il n’est pas question non plus de choisir un modèle de
développement autarcique, dans un monde mondialise, interconnecté.

Conclusion

Aussi longtemps que les systèmes éducatifs africains se feront les complices d’une pensée
occidentale qui nie l’humanité du continent africain et de ses habitants, les Africains ne
pourront pas sortir de leur état d’avertissement pour connaitre un quelconque épanouissement
dans le concert des nations. D’où la nécessité que l’Afrique assigne une autre finalité à son
école, celle de former sa jeunesse en vue de la transcendance culturelle, gage de la
reconquête de notre destin. Cette transcendance culturelle est une exigence de la vie, car
dans un monde qui devient de plus en plus complexe, l’individu, a quelque société qu’il
appartienne, a besoin de maitriser d’abord son environnement sociologique immédiat, mais
aussi de s’adapter rapidement à un nouvel environnement sociologique ; l’individu a besoin
de connaitre plusieurs langues, en commençant par celle de l’environnement immédiat.

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