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Magmatisme Et Roches Magmatiques Cours
Magmatisme Et Roches Magmatiques Cours
Jean-François Moyen
Magmatisme
et roches
magmatiques
3e édition
www.biblio-scientifique.net
© Dunod, Paris, 2004, 2011
© Dunod, 1995, pour la 1re édition
ISBN 978-2-10-056236-7
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TABLE DES MATIÈRES
Avant-propos 1
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Table des matières
Épilogue 297
Conclusion 300
Index 305
VI
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AVANT-PROPOS
La pétrologie est la science des roches, ainsi que l’indique sa racine étymologique
grecque de πετρος = pierre, λογος = parole, raison. Elle ne se réduit pas à la pétro-
graphie, la description des roches (de γραφειν = écrire, décrire), qui en constitue
seulement le prodrome. Originellement science de la terre, mais actuellement
science appliquée aux planètes, aux astéroïdes et aux comètes, la pétrologie se divise
classiquement en deux disciplines, suivant l’origine des roches étudiées :
• la pétrologie exogène étudie les roches formées dans des conditions proches de la
surface ;
• la pétrologie endogène étudie les roches formées dans des conditions différentes
de celles de la surface.
Cet ouvrage est consacré au magmatisme. Il concerne les roches qui, au cours de
leur histoire, sont passées au moins partiellement à l’état liquide. Les lois physico-
chimiques et les méthodes d’étude des roches magmatiques sont les mêmes que
celles utilisées pour le métamorphisme (autre discipline de la pétrologie endogène)
et la sédimentologie (pétrologie exogène) (voir dans la même série les ouvrages
consacrés à ces deux disciplines).
Comme l’ensemble des sciences de la terre, la pétrologie du magmatisme a beau-
coup évolué au cours des quarante dernières années. Au début des années 1960,
malgré les avancées obtenues depuis plus d’un siècle dans le domaine expérimental,
une image descriptive et statique des roches et de leurs associations minérales préva-
lait. La théorie dominante en France était alors fondée sur la dualité
basalte–granite et les deux équations qui en découlaient : basalte = magma issu
du manteau et granite = roche (magmatique ?) issue de la croûte (continentale).
Or, à la fin des années 1960, la révolution des idées provoquée par l’avènement de
la tectonique des plaques s’est accompagnée de nouvelles observations sur le terrain,
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Avant-propos
l’établissement sur des bases mathématiques des lois régissant la distribution des
éléments chimiques dans la Terre et la répartition des masses à l’intérieur du globe.
Des théories mieux étayées, qui avaient souvent été proposées dans le passé mais
sans preuves suffisamment fondées, ont pu être reformulées.
Le résultat des travaux aboutit à une image de la Terre encore en pleine évolution.
Cette image se fonde sur des modèles, conçus d’après des systèmes analogues aux
systèmes réels et établis sur un nombre limité de paramètres bien contrôlés. Dans les
trente dernières années, les modèles de plus en plus élaborés intègrent un nombre
toujours croissant de paramètres, afin de mieux coller à la réalité des phénomènes
naturels complexes. À l’heure actuelle, l’état d’équilibre n’est pas encore atteint et
l’émergence de nouveaux modèles se poursuit toujours à un rythme soutenu.
Dans cet ouvrage, les modèles les plus récents ont été retenus dans la mesure où
ils constituent un réel progrès par rapport aux idées antérieures. Les différents objets
magmatiques seront présentés à toutes les échelles : mégascopique (observations
globales et sur le terrain), mésoscopique (associations minérales et textures),
microscopique et nannoscopique (répartition et comportement des éléments
chimiques dans les roches et les minéraux). Dans ce parcours, les degrés de certitude
sont très variables et il faut en tenir compte dans l’appréciation des théories, car elles
sont construites à partir d’un corpus de données inégalement fiables et reproduc-
tibles. Un choix personnel inévitable a donc présidé au tri des idées, qui nécessaire-
ment évoluent, et des faits analytiques et expérimentaux, moins sujets à révision.
Pour paraphraser Jean Rostand :
« Le géologue passe, la roche reste. »
Cet ouvrage s’adresse aux étudiants des universités, des classes préparatoires aux
grandes écoles et des préparations aux concours de recrutement des enseignants,
ainsi qu’aux enseignants du secondaire. Provenant de la révision d’une grande partie
de l’ouvrage Pétrologie endogène, paru en 1995 dans la Série Géosciences, il a été
conçu pour ouvrir des perspectives sur la pétrologie du magmatisme et non pour
constituer un précis complet. Il forme un nouveau volume de la série et s’appuie
largement sur des notions définies et présentées dans d’autres volumes, parmi
lesquels : Géochimie, Géodynamique, Métamorphisme et roches métamorphiques,
Minéralogie, Tectonique, Volcanologie. En cas de besoin, le lecteur s’y référera.
Un livre destiné à l’enseignement ne se conçoit pas, ne s’élabore pas, ne s’écrit
pas dans la solitude, même à deux. Par leur aide matérielle, leurs conseils, leurs
encouragements, les discussions animées que nous avons pu avoir ensemble, beau-
coup d’amis nous ont soutenu dans cette entreprise.
Il faut insister également sur le rôle important joué par l’ensemble des personnes
que nous avons eu le privilège d’avoir comme auditoire dans les modules d’ensei-
gnement et de formation initiale ainsi que lors des séances de formation continue. La
recherche vivifie et nourrit l’enseignement à l’université. La proposition réciproque
est également vraie : le travail de préparation et d’élaboration que nécessite un
cours, les réactions à chaud qu’il provoque et les questions qu’il suscite a posteriori
constituent autant de stimulation et d’incitation à aborder les travaux de recherche de
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Avant-propos
façon différente et plus originale et à exercer une réflexion plus large et ouverte vers
le public.
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LES CONSTITUANTS
DE LA TERRE
1
1.1 Agencement et distribution des couches terrestres
PLAN
La Terre appartient au système solaire et s’est formée en même temps que les autres
planètes qui gravitent autour du Soleil. Le système solaire comprend un certain
nombre d’objets :
• les comètes et les objets vagabonds, comme les météorites ;
• les planètes intérieures ou telluriques : Mercure, Vénus, Terre (et son satellite, la
Lune), Mars (et ses deux satellites, Phobos et Deimos) ;
• la ceinture d’astéroïdes ;
• les planètes géantes : Jupiter, Saturne, Neptune et Uranus, et leurs nombreux
satellites, certains possédant une atmosphère (Titan et Triton) ;
• Pluton (et son satellite, Charon).
La « pétrologie comparée » des objets du système solaire (étude de leur nature,
leur composition et leur origine) permet de se faire une idée des premiers âges de
notre globe. L’agencement et la distribution des roches ne sont pas aléatoires et
témoignent de processus de différenciation à partir de la matière interstellaire,
processus encore actif aujourd’hui dans le cas de la Terre mais achevé à un stade
plus ou moins précoce dans les autres cas.
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
(masse 56). Au-delà, l’abondance des éléments plus lourds diminue moins rapide-
ment, marquée par quelques irrégularités. Dans le détail, on constate :
• une irrégularité au début de la courbe, les éléments légers, Li, Be et B, étant moins
abondants que leurs suivants immédiats, C, N, O ;
• l’abondance systématiquement supérieure des éléments de masse atomique paire
par rapport à ceux de masse atomique impaire voisine : par exemple, le fer (masse
56) est plus abondant que le manganèse (masse 55) et le cobalt (masse 59).
H
10
He
8
C O
Si
6
Fe
2
Li B
Be
0
-2
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
numéro atomique
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1.1 • Agencement et distribution des couches terrestres
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
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1.1 • Agencement et distribution des couches terrestres
température (K)
2100
)
aires (W
éta ux réfract O )
m l
,A 2 3
1800
ire s ( Ca TiO 3
cta
s réfra fer
oxyde upe du
ta u x du gro
t mé
1500 siens e
ate s magné spaths
)
silic e r s (feld
s lé g
silicate
1200
900
troïlite (FeS)
600
Hydratation des silicates
oxydation du fer
300 H2O
Glace
CH4-H2O
0
-7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1
log P (bar)
qui a dû être très intense à cette époque, a eu pour effet de chasser vers l’extérieur les
particules qui n’étaient pas agglomérées en corps pluricentimétriques.
Par mesures des isotopes radioactifs de longues périodes et radiogéniques du
système U-Pb dans les inclusions réfractaires de chondrites carbonées, dont la
météorite d’Allende, l’âge de formation du système solaire est évalué à 4568,22 ±
0,17 Ma. Les mesures des isotopes radiogéniques fils des isotopes 244Pu et 129I,
éléments radioactifs de courtes périodes maintenant disparus, montrent qu’il s’est
écoulé 100 Ma au plus entre la séparation des matériaux proto-solaires à partir du
milieu interstellaire et la formation des planètes. Les planètes seraient donc contem-
poraines du Soleil mais ne seraient pas directement issues de lui.
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
tiers de la masse de la Terre, Tab. 1.2). Sur Terre, les gaz rares ont à peu près tota-
lement disparu, sauf l’argon dont l’isotope majeur (40A) est produit par la désinté-
gration de 40K. Deux éléments volatils, l’hydrogène et le carbone, gardent une
présence significative car ils se combinent facilement avec l’oxygène. Les compo-
sés du système C-H-O, dont H2O et CO2, jouent un rôle important dans les
processus internes et externes du globe ;
• les éléments « minéraux », constitués par Si, Al, Fe, Mg, Ca, Na, Ni, (Ti, Mn, K, P),
se rencontrent en quantités presque égales dans l’Univers et sur Terre. Ces
éléments sont également appelés « majeurs » car, avec l’oxygène, ils prédominent
sur Terre. Les deux éléments les plus abondants, l’oxygène et le silicium, se
combinent avec les autres éléments minéraux pour former la grande famille des
minéraux silicatés, qui constituent avec les alliages métalliques de fer-nickel
l’essentiel de la matière terrestre.
Tableau 1.1 – Teneurs relatives des éléments dans l’Univers, le Soleil et la Terre
(par rapport à 106 atomes de Si) (d’après Mason, 1958 ; Goles, 1969 ; Brahic, 1982).
Fraction
Élément Univers Soleil Terre
de la masse totale
99,865 %
10
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1.1 • Agencement et distribution des couches terrestres
densité (Kg-m-3)
8000
planètes métalliques
7000
3000
Lune
astéroïdes é t o i l e s
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2000
planètes silicatées riches en volatils Soleil
1000
planètes de glace ou riches en H
0
15 20 25 30 35
log masse (Kg)
11
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
Les noyaux des comètes et les plus petits des astéroïdes pourraient représenter
l’état primitif du matériau planétaire. Le noyau des comètes correspond à une « boule
de glace sale », agrégat de glace et de grains produits par la condensation du matériau
initial jusqu’à très basses températures, inférieures à 300 K. Les micrométéorites, de
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1.1 • Agencement et distribution des couches terrestres
taille inférieure à 0,5 mm, tombent à la surface de la Terre sous forme d’étoiles
filantes et auraient une origine cométaire, ce que suggère le lien entre les périodes de
chutes d’étoiles filantes et la présence des comètes. Les comètes libèrent les grains
emprisonnés dans la glace par sublimation du noyau sous l’action du vent solaire. La
spectroscopie infrarouge des comètes a montré la présence systématique de silicates
et une composition proche des chondrites carbonées de type I.
D’autres corps du système solaire ont suivi une évolution voisine de celle de la
Terre, avec ses différentes couches. Les météorites représentent un échantillonnage
naturel de la ceinture d’astéroïdes et d’autres planètes telluriques, comme Mars et la
Lune. Les plus grands astéroïdes ont subi une différenciation rapide au moment de
leur formation, car l’énergie thermique fournie par la radioactivité d’éléments de
courte période (26Al par exemple) peut suffire à fondre des corps de plus de 10 km
de diamètre.
Le résultat le plus frappant issu des travaux de datation des matériaux primitifs et
différenciés des météorites et des échantillons lunaires est la similitude de leur âge
(Tab. 1.3). La météorite chondritique de Bjorböle sert de référence « année zéro ».
Pour dater les météorites et les planètes par rapport à la météorite de Bjorböle, on
utilise certains isotopes radiogéniques qui ne se forment dans l’Univers que par
désintégration de l’isotope radioactif père. Par exemple, 129Xe, gaz rare inerte, est
issu seulement de l’isotope 129I de courte période et ne subsiste que piégé dans la
matière minérale. L’isotope 129I aurait été fourni au moment de la formation du
système solaire par l’explosion d’une supernova peu éloignée, ainsi que l’isotope
26
Al, dont le fils 26Mg a également été trouvé en excès.
Tableau 1.3 – Chronologie des météorites
(d’après Hartmann, 1983, complété).
Isotopes Échantillons
Événement Résultats
utilisés analysés
87Rb/87Sr 4,55 à 4,65 Ga
Formation M. pierreuses
U-Pb 4,56 à 4,57 Ga
Durée de 129I/129Xe M. métalliques environ 20 Ma
formation Rb/Sr, U/Pb et 40Ar/ M. métalliques et 4,4 à 1,6 Ga
Solidification 39Ar pierreuses 4,4 à 4,6 Ga
Rétention des gaz 40K/40Ar M. pierreuses 0,1 à 100 Ma
Irradiation 3He M. pierreuses 1 à 1 000 Ma
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Les chondrites carbonées se seraient formées 5 Ma avant l’année zéro, les météo-
rites silicatées se formeraient pendant 5 Ma à partir de l’année zéro, les météorites
métalliques apparaîtraient 3 à 5 Ma après. Les météorites proviennent de corps qui
n’ont jamais eu la taille de notre planète, la durée de leur formation suivie de leur
différenciation a donc été très courte. La planète Terre, elle, n’aurait acquis une taille
et une consistance suffisantes pour retenir 129Xe que 96 ± 12 Ma plus tard (Fig. 1. 4).
Les périodes de formation et de différenciation y sont donc beaucoup plus longues.
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
chondrites carbonées
chondrules séparées
chondrites
achondrites
sidérites
TERRE
-20 0 20 40 60 80 100
Age relatif de formation (Ma) par rapport à la météorite de Bjorböle (4,6 Ga)
1.2.1 Météorites
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1.2 • Composition des différentes couches
-5
-10
-15
-20
-25
-30
-15 -10 -5 0 5 10 15
Log masse M de la météorite (kg)
Les corps de plus grosse taille n’apportent sur terre que 10 tonnes par an environ.
Les blocs de taille supérieure à 10 cm constituent les météorites proprement dites.
Elles proviennent de blocs rocheux éjectés lors de collisions entre astéroïdes ou à la
surface des planètes. Leur surface est érodée et enlevée en partie par échauffement et
fusion en traversant l’atmosphère, mais une part importante arrive au sol.
La probabilité qu’un corps de 1 km de diamètre, soit 15-50 tonnes, arrive sur
Terre n’est que de 1 tous les 100 Ma. Malgré leur rareté, de tels impacts ont joué et
jouent un rôle important, en particulier sur la région qui a subi le choc (métamor-
phisme et, parfois, magmatisme d’impact) et, plus globalement, le climat terrestre
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
-1
5 4 3 2 1 0
âge (Ga)
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1.2 • Composition des différentes couches
Élément
1 2 3 4 5 6 7 8 9
(poids %)
• Les chondrites carbonées (4,7 %) sont formées d’un matériau issu d’une
condensation à basse température. Le cœur des météorites, généralement de
grande taille, a subi un réchauffement assez faible pour que l’eau contenue dans
les minéraux soit conservée, ainsi que le carbone et d’autres éléments et compo-
sés volatils. Sans équivalent dans les roches terrestres et lunaires, ce sont les
météorites les moins transformées depuis leur formation. Elles sont les seules à
contenir des phyllosilicates (argiles), la teneur totale en eau pouvant dépasser
20 %. Leur densité est faible, de l’ordre de 2,2, alors que les autres chondrites
ont une densité de 3,6. La matrice fine est formée de magnétite (Fe3O4), de
graphite (C) mal cristallisé, ces deux minéraux lui donnant sa couleur noire,
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
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1.2 • Composition des différentes couches
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
4. Achondrites
Plus rares (8,9 %), elles sont dépourvues de chondres, d’où leur nom, et ressem-
blent le plus aux roches lunaires et terrestres. La taille des cristaux, générale-
ment plus grosse que dans les chondrites, serait due à un refroidissement lent à
partir d’un matériel fondu. Selon leur composition minéralogique et leur prove-
nance supposée, on distingue de nombreux groupes :
– les achondrites primitives pourraient être classées dans les météorites
indifférenciées ;
– les météorites lunaires sont identiques aux échantillons ramenés sur Terre
dans les années 1970 par les missions spatiales, habitées (Apollo) ou non (Luna) ;
– les météorites SNC sont variées. Les shergottites (S) ont des compositions
variant de celles de basaltes à celles de péridotite, les nakhlites (N) sont des
clinopyroxénites et les chassignites (C) sont des dunites, formées d'olivine. La
météorite ALH84001 est unique, car formée d'orthopyroxène, et doit sa célébrité
aux filaments carbonatés observés dans les fissures, qui pourraient représenter
des traces de vie extra-terrestre datant de 4,1 Ga. Les autres météorites SNC sont
plus « jeunes », avec des âges compris entre 1,3 Ga et 150 Ma. Comme elles
contiennent des gaz occlus de même composition que l’atmosphère de Mars, on
considère que les météorites SNC ont une origine martienne ;
– les achondrites proviennent de la ceinture des astéroïdes. Ils forment cinq
groupes : les brachinites (0,5 %), les aubrites à enstatite (1,1 %), les ureilites à
olivine et pigeonite (0,4 %), les angrites (0,5 %) et le groupe HED des achondrites
basaltiques, constitué par les howardites (H) et eucrites (E) à pyroxène et plagio-
clase (5,3 %) et les diogénites (D) à orthopyroxène (1,1 %) qui proviendraient de
l’astéroïde Vesta. Les eucrites sont très proches des basaltes terrestres, tandis
que les howardites et les diogénites sont des brèches résultant de la fragmenta-
tion et de la cimentation des roches préexistantes.
5. Histoire des météorites
Près de la moitié des météorites sont des brèches, composées de blocs anguleux
cimentés par une matrice, soit de même composition (monomictes), soit de
composition différente (polymictes). La nature des brèches et la présence occa-
sionnelle de diamant, forme de haute pression du carbone, montrent que les
corps parents ont subi une histoire complexe de collisions et de fragmentations.
Parmi les brèches, certaines riches en gaz contiennent des concentrations
notables de gaz rares implantés par le vent solaire, par exemple 3He. Les brèches
monomictes se formeraient par cimentation de fragments brisés localement
(dans un cratère d’impact ?), les brèches polymictes regrouperaient les éléments
de plusieurs corps parents.
Grâce aux mesures isotopiques (Tab. 1.3), l’histoire des météorites a pu être
reconstituée en trois étapes majeures :
– formation des corps parents et différenciation aux alentours de 4,6 Ga ;
– collisions, éclatement et expulsion des météorites vers l’orbite de la Terre au
cours des dernières centaines de millions d’années ;
– chute sur Terre des météorites entre 0 et 1,5 Ma (âge maximal mesuré sur des
météorites en Antarctique).
Quelques météorites ont une origine restée longtemps obscure. Les tektites ou
tectites, dont la plus grosse fait 200 à 300 g, sont riches en silice. Faiblement irra-
diées, elles ont séjourné peu de temps dans l'espace : moins de 300 ans et, pour
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1.2 • Composition des différentes couches
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
SiO2 Al2O3 Fe2O3 FeO MgO CaO Na2O K2O TiO2 P2O5 Total
60,18 15,61 3,14 3,88 3,56 5,17 3,91 3,19 1,06 0,30 100,0
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1.2 • Composition des différentes couches
Tableau 1.7 – Teneurs des éléments majeurs dans la croûte comparées à l’ensemble de
la planète (d’après Allègre et al., 1995 ; Wedepohl, 1991).
Rayon
Terre Croûte Masse Atome Charge Volume
Élément ionique
Masse % Masse % atomique % ionique %
(Å)
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
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1.2 • Composition des différentes couches
TEAU INFERIEU
R
MAN
) + nickel+ soufre
fer (90%
rs liquide
kb a
50
13
km
00
29
N O Y A U
ar
s solide
kb
51
90
00
32
GRAINE
km
km
329
5100
GPa
CE NTRE
6371 km 363GPa
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
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1.2 • Composition des différentes couches
Ga
4.57 Formation du Soleil et du disque d'accrétion
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
z (km)
impacts régolithe
0
0.1
"mers"
mégarégolithe
1
brèche
10
102
océan magmatique
roches cohérentes
103
4.5 4.4 4
t (Ga)
Figure 1.9 – Évolution précoce (de 4,5 à 3,5 Ga) des 1 000 km superficiels
des planètes telluriques, à partir des données lunaires.
Les échelles des temps t et des profondeurs z entre 0,1 et 1 000 km sont logarith-
miques. Les différents stades – océan magmatique, méga-régolithe pulvérisé par
des impacts météoritiques, « mers » recouvertes de régolithe et reposant sur un
méga-régolithe bréchique consolidé – se succèdent en 1 Ga environ (Hartmann,
1983).
Au cours des premières phases, les planètes ont grossi par apport de matière de
l’extérieur. Les sols lunaires, par exemple, contiennent 1,5 à 2,0 % de matériel
météoritique (surtout chondrites carbonées de type I). Mais depuis, le bombarde-
ment météoritique actuel est devenu négligeable : la masse des météorites arrivant
sur Terre, soit 15 000 à 50 000 t.a–1, ne représente que 2,5 à 8,3.10–18 fois la masse
totale du globe, estimée à 5,97.1024 kg ! Le processus actuel de différenciation entre
croûte et manteau se développe surtout par transfert interne de matière et d’énergie
dans un globe terrestre qui refroidit.
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1.3 • Croûte et manteau
Ma
0
Accrétion de la Terre, formation du noyau et dégazage
Atmosphère dense et chaude (cf. Vénus)
Océans magmatiques
Peu de possibilités de vie
100
Refroidissement de la surface
Perte de l’atmosphère dense
200
500
600
Continents stables et océans
Premiers fossiles de vie primitive
700
tillons différents.
Les résultats (Tab. 1.8) sont fondés sur des modèles dans lesquels des sous-unités
avec leurs caractéristiques physiques et chimiques propres sont définies avec leurs
volumes respectifs. Ainsi, la croûte est-elle subdivisée en couches d’épaisseur
variable : sédimentaire, « granitique » (sous les continents) et « basaltique » (sous les
océans). Les résultats dépendent des modèles choisis et se compliquent au fur et à
mesure que la connaissance progresse. Ainsi que Wyllie (1971) l’a remarqué mali-
cieusement, « il est plus facile d’extrapoler à partir d’un nombre limité de résultats
préliminaires pour les ajuster à une théorie qu’à partir d’un grand nombre de résul-
tats détaillés ».
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
Oxydes 1 2 3 4 5 6 7
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1.3 • Croûte et manteau
a) Croûte
Les volumes relatifs des roches ont été estimés à partir des affleurements représentés
sur les cartes géologiques et des épaisseurs mesurées sur le terrain. Pour les roches
situées en profondeur, les résultats géophysiques prennent le relais des observations
et indiquent les formes et les volumes. Pour interpréter la composition intermédiaire
de la croûte inférieure, il y a deux hypothèses extrêmes :
• la croûte inférieure est constituée des résidus de fusion restés sur place, alors que
les magmas granitiques sont montés et se sont installés dans la croûte supérieure
actuelle ;
• la croûte inférieure est formée par la coalescence de corps issus de magmas inter-
médiaires et basiques, venant du manteau et mis en place au niveau du Moho par
le processus appelé « underplating » par les auteurs anglo-saxons.
Les écailles de croûte inférieure, affleurant dans les zones orogéniques, sont
mixtes, avec des formations métamorphiques résiduelles (paragneiss granulitiques
ou kinzigites) formant des écrans entre des complexes magmatiques lités importants.
La zone d’Ivrea-Verbano (Alpes du Sud, Italie) en est un bon exemple.
Les types lithologiques essentiels de la croûte (Tab. 1.5) sont :
• le groupe acide et intermédiaire, constitué de granite, granodiorite, diorite et équi-
valents métamorphiques (gneiss), forme environ 45 % de la croûte et constitue
l’essentiel des continents ;
• le groupe basique, constitué de basalte, gabbro et équivalents métamorphiques
(amphibolite, éclogite), constitue 43 % de la croûte et forme le plancher océanique ;
• les roches sédimentaires et leurs équivalents métamorphiques (schiste, marbre)
constituent le reste, soit 12 %, et se répartissent aussi bien dans les océans que sur
les continents.
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b) Manteau
Sa composition est plus difficile à déterminer, car la composition minéralogique
observée dans les échantillons est rarement originelle (serpentinisation de l’olivine,
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
par exemple). De plus, les associations actuelles sont souvent métastables et ont
enregistré plus ou moins partiellement des transformations de phases depuis leur site
primitif, au cours de leur transport jusqu’au site d’échantillonnage. Les péridotites
naturelles ont un assemblage minéralogique constant à olivine prédominante (symé-
trie orthorhombique), deux pyroxènes (calcique à symétrie monoclinique et non
calcique à symétrie orthorhombique) et un minéral alumineux accessoire variable :
plagioclase, spinelle ou grenat.
Les travaux expérimentaux sur matériaux naturels et synthétiques ont apporté de
nombreuses informations sur la constitution du manteau en profondeur. Dès 1936,
des discontinuités sismiques secondaires avaient été décrites (Tab. 1.2). En considé-
rant le manteau comme essentiellement formé d’olivine, les discontinuités peuvent
traduire la transition polymorphique du système orthorhombique, moins dense, à un
système cubique, plus dense. Les progrès technologiques ont permis de simuler en
laboratoire des conditions de pressions correspondant aux conditions dans le
manteau inférieur et jusqu’à la limite avec le noyau. Si l’on suppose que le rapport
atomique Fe/(Fe + Mg) est à peu près constant et égal à 0,11 dans le manteau,
plusieurs transformations de phases ont été mises en évidence (Tab. 1.9) :
• aux pressions régnant à 400-420 km de profondeur, dans la partie supérieure de la
zone de transition du modèle de Dziewonski et Anderson (Tab. 1.2), la structure
des minéraux cardinaux devient cubique : l’olivine se transforme en wadsleyite, à
structure cristalline de spinelle, et les pyroxènes en majorite, à structure cristalline
de grenat ;
• aux pressions régnant à 450 km de profondeur, la wadsleyite formée à 420 km se
déstabilise au profit d’une phase minérale encore plus dense, où l’atome Si
devient hexa-coordonné, la ringwoodite ;
• à des pressions encore plus fortes, régnant à 670-700 km de profondeur (limite
avec le manteau inférieur), les densités calculées sont supérieures à celles mesu-
rées sur un mélange compact d’oxydes avec Si, Fe et Mg hexa-coordonnés.
Aucun minéral ayant la composition de l’olivine n’est alors stable. Les deux
phase stables sont : la magnésiowüstite, ou ferropériclase, oxyde mixte de fer et
de magnésium dont le pôle MgO est le périclase et le pôle FeO est la wüstite, et
un minéral encore sans nom, à composition de pyroxène et à structure cristalline
de « pérovskite » (la pérovskite naturelle a pour composition CaTiO3), suggérant
la réaction : ringwoodite Mg2SiO4 → « pérovskite » MgSiO3 + périclase MgO.
Les minéraux calciques prennent la structure cristalline de la « hollandite » (la
hollandite naturelle est un oxyde de Ba et Mn). La valeur élevée de la densité
pourrait être liée à celle du rapport atomique Fe/(Fe + Mg) qui augmenterait de
0,11 dans le manteau supérieur à 0,27 dans le manteau inférieur, ce qui suppose
que le manteau s’enrichirait en fer en s’approchant du noyau.
32
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1.3 • Croûte et manteau
Coordinance Densité
Profondeur Assemblages minéralogiques
Mode des à
km et transformations
éléments p=0
tion de microfractures.
Le rapport entre la déformation et la contrainte définit la viscosité. Si la viscosité
est constante, le matériau est dit newtonien. Si elle varie avec la contrainte, le maté-
riau est dit non-newtonien. Un corps de Bingham ne présente un comportement plas-
tique qu’à partir d’une valeur minimale de la contrainte, appelée seuil de résistance.
L’unité de viscosité dans le système international est le Pa.s mais la poise Po est
encore utilisée (1 Pa.s = 10 Po). La viscosité des matériaux solides est de l’ordre de
1020 à 1026 Pa.s (Fig. 1.11B), celle des liquides magmatiques dépasse rarement
1010 Pa.s.
33
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
Profondeur
comportement cassant
comportement élastique
rupture
comportement plastique
Asthénosphère
B contrainte de cisaillement
quartz + feldspaths
fluage du quartz
profondeur (et température)
Figure 1.11 –
mx colorés + feldspath Évolution de la
résistance et de la
viscosité des
matériaux solides
au sein de la
lithosphère et de
fluage de l’olivine
l’asthénosphère.
A. Les trois types de
comportement : cassant,
élastique et plastique, en
fonction de la profondeur
olivine
et des paramètres : durée,
intensité de la contrainte
et/ou flux de chaleur
(Kusznir et Park, 1984).
B. Évolution de la viscosité
(en Pa.s) en fonction de la
profondeur entre 0 et
contrainte initiale 400 km (Wever, 1989).
34
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1.3 • Croûte et manteau
C profondeur (km)
0
Moho croûte
50
lithosphère
100
Zone à Faible Vitesse (ZFV)
150
200
asthénosphère
250
300
350
400
20 21 22 23 24 25 26 27
log viscosité η (Pa-s)
fluer à environ 3 GPa et 1 300 °C, conditions réunies dans la zone à faible vitesse
(ZFV) qui définit la limite lithosphère-asthénosphère.
La résistance de la croûte supérieure dépend essentiellement du quartz en présence
d’eau ou à sec, celle de la croûte inférieure du plagioclase et celle du manteau supé-
rieur de l’olivine. Si, à des conditions de pression et de température données, le seuil
de résistance est inférieur à la contrainte nécessaire pour une déformation par fluage,
le matériau réagit par fracturation. Dans le cas contraire, il se déforme de façon ductile
(Fig. 1.11A). Chaque couche des zones supérieures du globe terrestre a un compor-
tement qui varie de fragile au sommet à plastique à sa base, ce qui fait apparaître
trois discontinuités majeures (Fig. 1.11B) :
35
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
1.4 CONCLUSION
L’agencement actuel des constituants de la Terre est le résultat d’une longue histoire
dont les derniers épisodes se déroulent encore aujourd’hui. L’histoire commence par
l’individualisation de la planète Terre au sein du système solaire en voie de formation il
y a 4,566 Ga (Tab. 1.10). Le premier stade se caractérise par l’accrétion de particules
solides, froides et condensées à partir d’une nébuleuse solaire, sans doute différente du
Soleil et dont la composition vraisemblable est celle des chondrites carbonées.
Dans un deuxième stade, deux épisodes majeurs contemporains se produisent,
l’un en surface, l’autre en profondeur. En profondeur, se produit l’événement majeur
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1.4 • Conclusion
Tableau 1.10 – Évolution des constituants terrestres (modifié d’après Hartmann, 1983).
des planètes intérieures et des astéroïdes : les « fers » donnent une image du noyau,
les lithosidérites celle de la zone transitoire entre noyau et manteau (discontinuité de
Gutenberg) et les chondrites avec leur variabilité celle du manteau. La croûte primi-
tive, inconnue, pourrait avoir eu une composition d’achondrite basaltique.
Une partie de l’énergie thermique concentrée à la surface par le bombardement
intense des météorites et les phénomènes électromagnétiques liés aux vents solaires
conduisent à la formation d’un océan magmatique superficiel sur une épaisseur
pouvant atteindre 1 000 km, la partie inférieure de la planète restant homogène et
froide. Au cours de la fusion, l’océan magmatique se dégaze à peu près totalement et
sa composition pourrait approcher celle des chondrites ordinaires. Ce stade serait
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Chapitre 1 • Les constituants de la Terre
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LES SOURCES DES MAGMAS 2
2.1 Hétérogénéités du manteau supérieur
2.2 Le rôle des fluides dans le manteau
PLAN
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
profondeur (km)
0 2.5 5.0 7.5
0
pression (Mbar)
1000
température (10 3 K)
P
2000
3000
4000
T
5000
g
6000
7000
0 10 20 30
gravité (m-s -2)
à la résistance des roches. Les fluides présents dans les pores des roches exercent
une pression. Ayant un coefficient de dilatation très différent de leurs roches-hôtes,
les fluides peuvent subir par élévation de température une très forte élévation de
pression, qui peut dépasser la résistance des cristaux et des roches. Par rupture et
fuite des fluides à travers les fractures ouvertes, des brèches hydrauliques se
forment, constituées de fragments anguleux des roches éclatées et d’une matrice
provenant de la précipitation des éléments dissous dans les fluides.
Le profil thermique général de la Terre montre une forte augmentation de la
température avec la profondeur. À la surface des continents, la température moyenne
de 288 K est due au rayonnement solaire provoquant le réchauffement des basses
couches de l’atmosphère et des premiers mètres du sol. Plus en profondeur, la
température augmente progressivement pour atteindre plus de 3 000 K à l’interface
manteau-noyau et sans doute plus de 5 000 K au centre de la Terre. La distribution
actuelle de la température avec la profondeur, ou géotherme, dépend de plusieurs
facteurs :
• l’énergie gravitationnelle initiale, acquise au moment de la formation de la Terre
il y a 4,6 Ga, a été emmagasinée dans le noyau de fer liquide. Elle est rendue au
milieu extérieur sous forme de chaleur latente de cristallisation accompagnant la
solidification de la graine ;
• l’énergie cinétique des planétésimaux s’écrasant à la surface de la Terre s’est
accumulée au cours du premier milliard d’années et a décru exponentiellement
avec le temps ;
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
profondeur (km)
0
4 L IT H O S P H E R E
100
1 5
Couche 1 (conductrice)
200
ASTHENOSPHERE
300 3
400
Couche 2 (convective)
500 1 ZONE DE
TRANSITION
600
700
Couche 3 (convective)
1 2 MANTEAU
INFERIEUR
800
0 500 1000 1500 2000 2500 3000
température (∞C)
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
Cpx
clinopyroxénite
clinopyroxénite
à olivine
wehrlite webstérite
webstérite
à olivine
lherzolite
dunite
orthopyroxénite
Ol Opx
harzburgite orthopyroxénite
à olivine
de diamètre, les nodules montrent fréquemment des figures de réaction avec la roche-
hôte. Leur texture est caractérisée par une granulométrie variable, depuis un grain fin
aplitique (0,2 mm) jusqu’à un grain centimétrique, avec un maximum autour de 0,8 mm.
Les compositions modales (Tab. 2.1, Fig. 2.4) sont celles de lherzolite, avec des
quantités mineures de harzburgite, wehrlite et dunite. Il s’agit le plus souvent de
péridotite à spinelle, comme par exemple dans l’appareil volcanique de Beaunit
(Chaîne des Puys). Deux types de péridotite, à spinelle et à grenat, sont présents dans
quelques appareils volcaniques, comme le maar de la Vestide du Pal (Ardèche) et la
cheminée (pipe) d’Eglazines (Causses), exemples situés dans le Massif Central.
Tableau 2.1 – Compositions modales de péridotites du manteau
(estimations d’après Carter, 1970 ; Wyllie, 1971 ; Hamlyn et Bonatti, 1980 ;
Wass et Rogers, 1980 ; Berger, 1981).
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Ol
Gr
Ta Li
Tr Py
Gg
Du
Pb
B PM A
Opx Cpx
Les textures observées dans les roches sont classées selon l’agencement des
grains et la température d’équilibre (Tab. 2.2). La bimodalité des températures
d’équilibre est remarquable. Une première population à 950-1 050 °C caractérise les
péridotites lithosphériques arrachées par le magma en cours d’ascension, sans
rapport génétique avec le magma-hôte. La deuxième population à 1 200-1 260 °C
caractérise les péridotites réchauffées et rééquilibrées avec le magma-hôte : s’agit-il
de morceaux du manteau parental ou de cumulats précoces ? Il n’y a pas toujours
d’accord sur ce point (dans la figure 2.4, l’interprétation choisie est celle des cumu-
lats précoces).
Les minéraux cardinaux présentent des compositions assez constantes :
• olivine à 89-91 % de forstérite Mg2SiO4 ;
• orthopyroxène à 88-91 % d’enstatite MgSiO3 ;
• clinopyroxène chromifère à 90-91 % de diopside CaMgSi2O6.
Les minéraux accessoires sont plus variables :
• le spinelle, pauvre en titane, présente un rapport Cr/(Cr + Al) variant de 0,08 à
0,44 ;
• le grenat à 75 % de pyrope Mg3Al2Si3O12 est en association fréquente avec le
spinelle le moins chromifère ;
• le plagioclase n’a pas été décrit comme minéral primaire.
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
Températures Origine
Texture Granulométrie
d’équilibres de la texture
Les analyses chimiques des roches du manteau varient d’un pôle proche de la
pyrolite II à une composition pauvre en Ca et Al, traduisant le passage de la lherzo-
lite à la harzburgite, puis à la dunite. La disparition des minéraux alumineux
(spinelle, grenat) et calciques (clinopyroxène) s’explique par l’extraction répétée des
liquides basaltiques, pour lesquels les éléments incompatibles Ca et Al présentent
une grande affinité. La harzburgite et la dunite correspondent ainsi aux résidus de
fusion (manteau appauvri devenant de plus en plus réfractaire), alors que la lherzo-
lite est plus proche du manteau primitif.
roches ultramafiques. Leur position actuelle est due à l’action d’une tectonique
verticale. La majeure partie des échantillons récoltés a subi une transformation
plus ou moins poussée des minéraux primaires. Cependant, l’étude des phases
minérales reliques préservées permet de reconstituer la composition originelle. Les
péridotites à spinelle varient selon leur contexte : rifts continentaux pré-océaniques,
marges passives, bassins océaniques et marges actives (zones de subduction)
(Tab. 2.3).
Les compositions modales varient de façon continue (Fig. 2.5) de la lherzolite à la
harzburgite et à la dunite, par diminution du volume occupé par le clinopyroxène,
puis par l’orthopyroxène. En même temps, les minéraux enregistrent des variations
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Tableau 2.3 – Variations au sein des péridotites océaniques depuis les zones de
divergence jusqu’aux zones de convergence (d’après Bonatti et Michael, 1989).
Site Taux
géodynamique ortho- spinelle de fusion
100 Mg / olivine
Al2O3 pyroxène 100 Cr /
(Mg + Fe) Fo %
Al2O3 (Cr + Al)
50%Cpx
manteau fertile
subcontinental
rift pré-
océanique
marges passives
manteau sub-océanique
Ol marges actives 50%Opx
Les compositions chimiques originelles des péridotites (Tab. 2.3) ont été recalcu-
lées à partir des compositions modales et des analyses des minéraux reliques
(Fig. 2.6). La composition du manteau supérieur varie de primitive, ou chondritique,
à appauvri, à la suite d’extractions répétées de liquides basaltiques enrichis en
éléments incompatibles Al, Fe, Ti, Na et K alors que le résidu s’enrichit en éléments
compatibles Mg et Cr. À partir de la composition de la pyrolite II, représentant le
manteau primitif (Tab. 1.8, analyse 4), il est possible de calculer la proportion de
liquide extrait du manteau (Tab. 2.3) : les taux de fusion augmentent de zéro sous les
continents à près de 30 % dans les marges actives (zones de subduction).
46
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
manteau fertile
subcontinental
pyrolite
manteau sub-
océanique
Les températures d’équilibre mesurées sur les minéraux reliques (pyroxènes, spinelle)
des échantillons de péridotites indiquent des régimes thermiques différents :
• sous les rifts continentaux et les marges continentales passives, les températures
de 900 à 1 100 °C correspondent à des géothermes peu élevés ;
• sous les bassins océaniques, la remontée des isothermes sous les rides médio-
océaniques se traduit par des températures atteignant 1 300 °C ;
• dans les marges actives, même si le taux de fusion y est élevé (Tab. 2.3), les
températures varient de 800 à 1 000 °C seulement, ce qui implique que le proces-
sus de fusion s’effectue à basse température, à la différence de ce qui se produit
sous les rides médio-océaniques.
Les péridotites du manteau appauvri peuvent être recristallisées (texture porphy-
roclastique) avec apparition de plagioclase :
• les pyroxènes s’appauvrissent en Al, de 5-6 % Al2O3 dans le cœur des porphyro-
clastes à 1,5 % Al2O3 dans les bords des porphyroclastes et les néoblastes ;
• le spinelle devient chromifère, le rapport Cr/(Cr + Al) augmentant de 0,20 à 0,45 ;
• le plagioclase calcique (91-96 % d’anorthite CaAl2Si2O8) s’associe avec le
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
être génétiquement associé aux gabbros et aux basaltes de la croûte océanique sus-
jacente. Les péridotites foliées, également appelées « tectonites », ont des composi-
tions de lherzolite et de harzburgite. En général, la composition originelle a été obli-
térée par le métamorphisme des rides médio-océaniques, puis par les phénomènes
tectono-métamorphiques tardifs. Il est cependant possible de reconnaître une pérido-
tite à spinelle, parfois rééquilibrée en péridotite à plagioclase. Dans la chaîne alpine
(Alpes, Apennins, Corse), deux groupes se définissent d’après la géologie, la
composition chimique et la minéralogie :
• un premier groupe, affleurant essentiellement sous forme d’olistolites associés à
du matériel continental, est constitué de roches présentant une foliation intense et
un litage fruste avec des horizons riches en olivine (dunite-harzburgite) et des
horizons de pyroxénite. Les péridotites sont recoupées par des filons à composi-
tion de basalte transitionnel. La composition moyenne est celle d’une lherzolite et
la minéralogie est très comparable à celle des péridotites de rifts continentaux et
de marges continentales passives. Par rééquilibration à basse pression, le spinelle
devient chromifère, le rapport Cr/(Cr + Al) augmentant de 0,10 à 0,40, et le
plagioclase, tardif, relativement sodique (59-63 % d’anorthite), apparaît en exso-
lutions dans les pyroxènes ou en auréoles de réaction autour du spinelle, confor-
mément à la réaction (2). Les paramètres thermodynamiques indiquent une
ascension adiabatique à température assez faible, autour de 1 100 °C. La compo-
sition chimique correspond à un manteau peu ou pas appauvri qui aurait subi une
fusion partielle très limitée à grande profondeur ;
• un deuxième groupe, constitué des roches à la semelle des complexes ophioli-
tiques du Jurassique, est formé de lherzolite avec une texture évoluant de proto-
granulaire à porphyroclastique. Les pyroxènes sont enrichis en Mg et le spinelle
en Cr, avec un rapport Cr/(Cr + Al) de 0,50. Le plagioclase calcique An93 forme
des exsolutions dans le clinopyroxène. La composition est semblable aux pérido-
tites des bassins océaniques. Les paramètres thermodynamiques suggèrent une
remontée adiabatique à plus haute température (environ 1 200 °C), comme dans
les géothermes actuellement mesurés au niveau des rides médio-océaniques. Ceci
implique un taux de fusion élevé, de 10 à 20 %, donnant des liquides à composi-
tion de basalte tholéiitique à partir d’une source asthénosphérique déjà appauvrie.
Les deux groupes illustrent une partie de l’histoire alpine (Fig. 2.7) :
• au Trias, dans un rift continental, un magmatisme alcalin est produit par la fusion
limitée d’une asthénosphère encore peu appauvrie ;
• au début du Lias, la dérive continentale et la formation d’un nouveau bassin océa-
nique s’accompagnent de l’émission de basalte transitionnel. Le premier groupe
de péridotite, représentant un manteau peu appauvri, se met en place à faible
profondeur par mouvements tectoniques dans les marges continentales passives ;
• au cours du Jurassique, le bassin océanique est recouvert de basalte tholéiitique.
Le deuxième groupe de péridotite, correspondant à un manteau très appauvri, se
met en place à faible profondeur sous la ride médio-océanique.
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
50%Cpx
réaction (1)
réaction (2)
Ol 50%Opx
Figure 2.8 – Évolution des compositions modales d’une lherzolite à grenat,
au cours des réactions (1)(passage au faciès à spinelle) et (2) (passage au
faciès à plagioclase).
50
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
solidus
2.5
péridotite à grenat
1.5
péridotite à spinelle
liquide+cristaux
0.5
péridotite à plagioclase
51
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
• le mica brun rouge à orangé est un phlogopite titanifère, dont le rapport K/(K
+ Na) varie de 0,96 au cœur à 0,75 en bordure ;
• l’amphibole calcique est soit une pargasite vert-pâle, soit une kaersutite brune. La
kaersutite, minéral titanifère plus rare, forme des néoblastes, des lamelles d’exso-
lution dans les pyroxènes ou des cristaux en association avec le spinelle chromifère.
Dans les nodules du groupe I, les réactions sont souvent incomplètes. Le clinopy-
roxène brun-vert à violacé, l’amphibole verte et le mica brun rouge remplissent des
veines ou des poches, ce qui suppose la présence d’un fluide se propageant à travers
les fissures. La composition chimique des minéraux néoformés à l’intérieur des veines
varie fortement : le mica précoce potassique devient plus sodique, l’amphibole cris-
tallise lorsque les fluides sont suffisamment riches en Na. Des textures de remplace-
ment, avec des reliques de minéraux anhydres à l’intérieur du mica et de l’amphibole,
montrent que la métasomatose peut être diffuse. Les températures d’équilibre varient
de 1 150 ± 10 °C pour la péridotite à amphibole de texture protogranulaire à 950 ±
10 °C pour celle de texture porphyroclastique. Les minéraux hydroxylés cristallisent
en régime de déformation cisaillante du manteau en cours d’ascension adiabatique.
En cours d’ascension, un diapir mantélique se fracture en bordure et les fluides peuvent
alors migrer. Vers 70 km de profondeur, l’amphibole cristallise à la suite de réactions
entre la matrice solide péridotitique et les fluides inter-cristallins. À partir des teneurs
en éléments en traces, on a pu calculer qu’une faible quantité (0,2 %) de fluide mixte
[H2O + CO2] suffit pour former 3 % d’amphibole dans la péridotite à amphibole de
l’Eifel. Le fluide métasomatique, étranger au matériel du diapir mantélique, influe sur
la minéralogie de la péridotite et sa composition isotopique (Sr, Nd, Pb). Les trans-
formations minéralogiques de la péridotite peuvent se produire quelques Ma à près
de 3 Ga avant les éruptions volcaniques qui apportent les nodules en surface.
Dans le cas des nodules du groupe II à kaersutite + pargasite + mica + apatite, la
genèse des clinopyroxénites s’explique autrement. L’agent responsable de la méta-
somatose n’est pas un fluide [H2O + CO2], mais un liquide silicaté, ou silicaté-
carbonaté, contenant des fluides dissous et transportant Ti, V, K, P et les terres rares
légères. Bloqué dans la lithosphère, le liquide cristallise en association à amphiboles
+ mica + apatite, sous la forme de ségrégations et de veines. Le manteau métasoma-
tisé par un liquide silicaté contient 6,5 % d’amphibole, des traces de mica et 0,5 %
d’apatite (Tab. 2.1).
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
53
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
carbonates
3
péridotite à grenat +phlogopite
+ carbonates
1 péridotite à spinelle
+amphibole
0
800 900 1000 1100 1200 1300
température (˚C)
54
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
1. Occurrences et « crapauds »
Le diamant existe dans différents contextes naturels, le plus important sur le
plan économique étant les kimberlites. Il se rencontre dans d’autres roches
magmatiques (lamproïte) et métamorphiques (éclogite et lherzolite à grenat).
Plusieurs processus à haute pression et faible fugacité d’oxygène permettent la
stabilisation d’une phase carbone pur de structure diamant :
• transition polymorphique à partir du graphite par augmentation de pression ;
• précipitation par oxydoréduction à partir de fluides supercritiques du système
C-H-O ;
• voire cristallisation à partir d’un liquide.
Les cristaux gemmes sont très recherchés pour leur aspect et leur valeur
marchande. Mais de nombreux cristaux contiennent des inclusions, appelés
« crapauds » par les joailliers, ce qui les rend de faible valeur. Les inclusions dans
les cristaux de diamant sont semblables aux minéraux des roches métamorphiques
associées, éclogite et lherzolite à grenat. Leur âge est en général plus élevé que
celui de la kimberlite-hôte. La nature des inclusions permet donc de se faire une
idée de la constitution minéralogique du matériau dans lequel est né le cristal de
diamant. En effet, comme le diamant est chimiquement à peu près inerte, il consti-
tue un conteneur parfait qui protège les inclusions contre l’altération chimique.
Comme les inclusions sont en général mono-minérales, elles sont indemnes de tout
réajustement provoqué par les changements de pression et de température. Les
sources des diamants qui ont été identifiées jusqu’à présent sont :
(1) la partie inférieure du manteau supérieur lithosphérique (≥ 140-150 km), qui
peut s’étendre jusqu’à 250 km de profondeur sous les cratons ;
(2) l’asthénosphère et la zone de transition ;
(3) le manteau inférieur.
55
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
• Le manteau anhydre
Les phases solides constituant la zone de transition et le manteau inférieur ont
été synthétisées en laboratoire, bien avant d’être observées dans les échantillons
naturels. Deux discontinuités à 400-420 km et 670 km de profondeur définissent
la zone de transition entre manteau supérieur et manteau inférieur (Tab. 1.9).
L’olivine de composition Fo90 environ (90 % Mg2SiO4 – 10 % Fe2SiO4) est le
minéral le plus abondant du manteau supérieur. Elle subit à 1 000 °C deux transi-
tions polymorphiques (composition chimique inchangée), l’une à 11,8 et l’autre à
12,5 GPa, pouvant expliquer la première discontinuité à 400-420 km :
– α-olivine (orthorhombique) → wadsleyite = β-olivine (cubique, proche du type
spinelle) ;
– β-olivine → ringwoodite = γ-olivine (cubique de type spinelle).
Les pyroxènes subissent également une transition polymorphique à la même
profondeur :
– enstatite Mg2Si2O6 (orthorhombique) + diopside CaMgSi2O6 (monoclinique) →
majorite (cubique de type grenat). La structure est caractérisée par le fait qu’un
atome de Si sur 4, au lieu d’une coordinance 4, a une coordinance 6, comme Mg
et Ca. Les diamants qui contiennent la majorite en inclusions renferment la
coésite ou la stishovite, polymorphes de haute pression de SiO2, et le rutile TiO2.
La deuxième discontinuité à 670 km correspond à de nouvelles transitions de
phases (Tab. 1.9). La composition chimique correspondant à l’olivine devient
instable et donne deux nouvelles phases, un silicate de type « pérovskite » (la
pérovskite naturelle est un minéral orthorhombique de composition CaTiO3) et
un oxyde de fer-magnésium. La majorite se déstabilise pour donner des miné-
raux de structures cristallines variées : « pérovskite » et « hollandite » (la hollan-
dite naturelle est un minéral monoclinique de composition BaMn8O16), plus
rarement « walstromite » (la walstromite naturelle a pour composition
BaCa2Si3O9) et « titanite » (la titanite naturelle a pour composition CaTiSiO5). Le
sommet du manteau inférieur est donc caractérisé par les réactions suivantes :
– ringwoodite Mg2SiO4 → « pérovskite » MgSiO3 + périclase MgO (cubique).
Comme le périclase du manteau inférieur contient en général du fer (de 6 à 25 %
dans les inclusions des diamants de la mine de Kankan, en Guinée), on l’appelle
magnésiowüstite, ou ferropériclase ;
– molécule enstatite dans la majorite Mg4Si(SiO4)3 → 4 « pérovskite » MgSiO3 ;
– molécules alumineuses dans la majorite + stishovite → « hollandite » ;
– molécule « wollastonite » dans la majorite Ca4Si(SiO4)3 → 4 « walstromite »
CaSiO3 ;
– molécule « wollastonite » + 4 stishovite → 4 « titanite » CaSi2O5.
Bien que non encore observée dans les échantillons naturels, la phase
« pérovskite », évaluée à 65 % du manteau inférieur (Tab. 1.9), est certainement
le minéral le plus abondant à l’intérieur de la Terre.
• L’effet des fluides C-H-O
Les fluides du système C-H-O peuvent exister soit sous forme d’une phase fluide
séparée de composition mixte, soit dissous dans les magmas, soit dans les miné-
raux, carbonates, minéraux hydratés et silicates théoriquement anhydres. Dans
certaines zones, la fugacité d’oxygène peut induire la présence d’hydrogène non
oxydé sous la forme des molécules H2 ou CH4. En dehors du diamant, le carbone
présent dans la zone de transition et le manteau inférieur forme des carbonates,
56
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2.1 • Hétérogénéités du manteau supérieur
surtout la magnésite MgCO3 et, plus rarement, la sidérite (ou sidérose) FeCO3. La
magnésite est stable dans les conditions actuelles du manteau inférieur jusqu’à
la discontinuité de Gutenberg à 2 900 km de profondeur.
La molécule H2O est présente dans de nombreux minéraux. Dans les conditions
du manteau supérieur et de la zone de transition, des minéraux théoriquement
anhydres d’après leur stœchiométrie peuvent contenir des quantités non négli-
geables de H2O : 100-1 300 ppm dans le clinopyroxène, 60-650 ppm dans l’ortho-
pyroxène, 0-140 ppm dans l’olivine et 1-200 ppm dans le grenat. À part le
grenat, ces minéraux peuvent donc contenir des quantités dépassant 1 000 ppm
(0,1 % H2O). Si 100 ppm H2O sont répartis de façon homogène dans le manteau
supérieur, c’est-à-dire au-dessus de la première discontinuité à 410 km de
profondeur, ils sont équivalents à une couche d’eau liquide de 100 m d’épaisseur
en surface.
Les formes de haute pression de l’olivine peuvent dissoudre H2O en plus grandes
quantités que dans le manteau supérieur : 1,5-3,0 % dans la wadsleyite et 0,7 %
dans la ringwoodite, ce qui fait de la zone de transition une zone potentielle de
stockage d’eau en profondeur. D’autres phases silicatées contenant de l’eau
jusqu’à 30 % dans leur structure cristalline ont été synthétisées dans les condi-
tions de pression de la zone de transition et du manteau inférieur. Comme ces
phases n’ont pas encore été observées dans les échantillons naturels, elles n’ont
pas de nom, on les appelle avec des lettres. Dans le système MgO-SiO2-H2O, les
phases A, B, C, D, E, F et G, plus une superphase B, sont connues. Dans des
systèmes plus complexes, d’autres phases sont décrites. De plus, en présence
d’eau, le périclase MgO du manteau inférieur se transforme en brucite Mg(OH) 2.
Les études expérimentales ont établi les domaines de stabilité des phases appe-
lées « silicates magnésiens hydratés denses » (DHMS) :
– à la base du manteau supérieur, la réaction de déshydratation de l’antigorite
produit la phase A coexistant avec l’olivine ;
– au sommet de la zone de transition, la forte capacité de rétention d’eau de la
wadsleyite suggère que, pour des teneurs en eau de l’ordre de 3 %, les phases D
et E, théoriquement stables, ne sont pas présentes ;
– dans la zone de transition, la superphase B coexiste avec la ringwoodite ;
– au sommet du manteau inférieur, la phase D est stable à une température infé-
rieure à 1 300 °C ;
– les autres phases ne sont stables qu’à basse température (< 1 100-1 200 °C) et
ne participent pas aux réactions de fusion partielle ;
– la brucite est stable dans le manteau inférieur à moins de 1 100 °C et ne peut
exister que dans des zones particulièrement « froides ».
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
57
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
58
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2.2 • Le rôle des fluides dans le manteau
profondeur (km)
0
50
100 graphite
diamant
150
LITHOSPHERE
200
ASTHENOSPHERE
250
H2O
DHMS
300
brucite
350
400
500 700 900 1100 1300 1500
résiduelle (40 % SiO2). Par conséquent, les solutés ont des compositions chimiques
différentes des produits solides avant leur dissolution. La composition des fluides en
équilibre avec le manteau a été déterminée expérimentalement (Tab. 2.4) : les solutés
sont particulièrement riches en Si, Al, Na et K, avec des compositions proches des
granites alcalins, voire hyperalcalins. Le rapport (Na + K)/Al du soluté augmente
avec le rapport CO2/(CO2 + H2O) du solvant, mais les quantités d’éléments dissous
diminuent (Fig. 2.12).
59
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Tableau 2.4 – Composition chimique des solutés des fluides en équilibre avec les
péridotites (d’après Martin, 1974 ; Schneider et Eggler, 1986).
1 2 3 4 5 6 7 8
P (kbar) 5 17 17 17 15 20 22 22
T (°C) 700-415 800 850 900 1 080 1 100 600 600
durée (h) 336 48 24 24 24 24 42,5 42,5
H2O / (H2O + CO2) 1,0 1,0 1,0 0,79 1,0 0,91 1,0 0,95
(molaire) dans le fluide
SiO2 76,6 75,1 74,5 66,1 72,2 64,8 78,8 69,8
TiO2 0,9 1,1 0,6 0,9 0,0 0,0 0,0 0,0
Al2O3 9,1 10,1 12,8 5,9 14,1 17,0 12,0 6,7
FeO* 7,6 2,6 1,3 3,0 0,0 0,0 0,0 0,0
MgO 0,0 2,2 2,3 6,4 5,3 3,5 0,3 1,1
CaO 0,0 1,7 2,7 2,2 0,0 0,0 0,0 0,0
Na2O 2,2 6,0 3,6 8,2 0,0 0,0 9,0 22,5
K2O 0,9 1,3 2,2 7,2 8,4 14,7 0,0 0,0
% soluté 0,7 2,0 2,2 0,5 10,4 1,0 4,0 1,0
FeO* : tout le fer est analysé sous forme de FeO.
Matériaux utilisés dans les expériences : 1 (Martin, 1974), 2 à 8 (Schneider et Eggler, 1986)
1. péridotite appauvrie synthétique
2 à 4. péridotite métasomatique synthétique à 0,95 % Na2O, 0,4 % K2O et 0,12 % H2O = 23,5 kaersutite +
23,5 orthopyroxène + 23,4 diopside + 23,5 olivine + 6,2 spinelle
5 et 6. péridotite métasomatique synthétique à 4,7 % K2O = 46,2 phlogopite + 46,4 enstatite + 7,4 forstérite
7 et 8. péridotite métasomatique synthétique à 7,5 % Na2O = 47,0 jadéite + 48,0 enstatite + 5,0 forstérite
Les matériaux utilisés, à l’exception de 1, ne correspondent pas à des compositions de péridotite natu-
relle (comparer avec le tableau 2.1), mais à des péridotites enrichies en phases métasomatiques, de façon
à mieux apprécier la solubilité des alcalins dans les fluides du système H2O-CO2.
pression (GPa)
2.5
1.5
hyperalumineux
hyperalcalin
0.5
0 1 2 3 4 5 6
NA2O+ K2O / Al2O3 (moles)
péridotite métasomatique + H2O
péridotite métasomatique + H2O + CO2
péridotite + H2O
péridotite + H2O + CO2
Figure 2.12 – Indice d’agpaïcité (Na2O + K2O) / Al2O3 (en moles) des solutés
des fluides qui percolent dans le manteau (manteau normal : cercle,
métasomatique : triangle) en fonction de la pression (1 kbar = 0,1 GPa).
Les symboles vides correspondent à des fluides aqueux, les symboles pleins à des
fluides mixtes H2O + CO2. Les solutés aqueux sont hyperalumineux à un peu hype-
ralcalins, tandis que les solutés carboniques sont plus franchement hyperalcalins
(Schneider & Eggler, 1986).
60
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2.2 • Le rôle des fluides dans le manteau
70
dépôts
abondants
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
60
péridotite à amphibole
+carbonates
50
40
400 1400
fluide 600 800 1000 1200
température (˚C)
61
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Les quantités de fluides nécessaires pour que les réactions (4) et (5) soient complètes
sont telles que la métasomatose du manteau par les fluides est un processus d’exten-
sion limitée. Mais, si les épisodes métasomatiques se répètent plusieurs fois dans le
temps, la région du manteau affectée par la percolation de fluides peut s’enrichir en
alcalins et se transformer en bandes concentrant K en profondeur et Na dans les zones
plus superficielles.
La percolation de liquides magmatiques est le processus métasomatique le plus effi-
cace. Les liquides silicatés prendraient naissance vers 110-180 km de profondeur dans
l’asthénosphère (Fig. 2.14). Par cristallisation en cours d’ascension dans le manteau,
les éléments chimiques incompatibles qu’ils contiennent se déposent sur les parois
des fissures et des veines qui servent de conduits. Les péridotites et pyroxénites enri-
chies en Fe et Ti seraient hybridées par des liquides basaltiques. Les péridotites carbo-
natées enrichies en terres rares légères, U, Th, Pb, P, Na, K, Ca et Sr seraient hybridées
par des liquides carbonatitiques.
100 LITHOSPHERE
kimberlite métasomatose
avortée
solidus
en présence de fluides
200
traces de liquide
avec fluides C-H-O ASTHENOSPHERE
solidus
en présence de fluides
300
fluides C-H-O
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2.2 • Le rôle des fluides dans le manteau
pyroxène
ilménite
olivine
pyrope rutile
mica
pérovskite
apatite
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sulfures pyrite
calcite
serpentine
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Les kimberlites sont donc des roches hybrides, surtout magmatiques. Elles affleu-
rent dans des massifs complexes avec, de haut en bas (Fig. 2.16) :
• un cratère ouvert à la surface du sol, mal préservé et renfermant des laves très rares,
des formations pyroclastiques en anneau et des formations épiclastiques remplis-
sant le cratère ;
• un diatrème sub-cylindrique, rempli de brèches, et des racines en relations avec
des filons et des sills d’alimentation. La texture des cheminées et leur remplissage
par des brèches indiquent l’existence de magmas chauds, mobiles et riches en gaz.
épiclastites
anneau de tufs pyroclastites
pyroclastites cratère
diatrème
sill
dykes
précurseurs
dykes
racine
64
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
65
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
• Le cratère de Ries
Formé au Miocène il y a 15 Ma, le cratère de Ries, en Souabe-Franconie (Alle-
magne), traverse une série sédimentaire de 500 à 650 mètres d’épaisseur et de faible
pendage, reposant sur un socle hercynien. La profondeur actuelle du cratère est de
750 mètres et son diamètre approximatif de 25 km. Environ 185 km3 de roches ont
été arrachées, éjectées et transportées, 90 à 95 % des éjecta sont constitués de roches
sédimentaires bariolées formant des brèches par roulement et glissement : stries
visibles, figures d’écoulement plastique des argiles, plissement des roches transpor-
tées. La pression régnant au moment du transport est estimée à 3 GPa. Le faible
pourcentage restant d’éjecta est constitué par des roches cristallines hercyniennes et
par une roche particulière, la suévite (Fig. 2.17).
La suévite est une brèche contenant de grandes quantités de particules vitreuses et
de fragments de roches fondues recouvertes de verre noir. Elle contient des minéraux
de haute pression comme la coésite et la stishovite, polymorphes de la silice, la
jadéïte et l’armalcolite, minéral ferro-titané indiquant un milieu très réducteur. De
66
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
?? ?
? ? ? ?
? ?
?
1000m
1
0 5 10 15 20 25km
2
1000m
0 5 10 15 20 25km
67
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
très riche en verre et en fragments vésiculés (bulles de gaz), montrant des figures
de chocs (Fig. 2.17).
Le corps ayant produit l’impact s’est volatilisé et demeure inconnu. De forme
aplatie, de taille inférieure à 4 km, de densité élevée (3 à 7), il pourrait avoir eu la
composition d’une météorite de fer ou d’une lithosidérite et serait arrivé au sol à la
vitesse de 15 km.s– 1.
• La structure de Manicouagan
La fusion a été complète dans la structure circulaire de Manicouagan (Québec,
Canada) de 65 km de diamètre. Elle s’est formée au Lias il y a 200 Ma lors de la
chute d’un corps extra-terrestre, peut-être un fragment de comète. Le socle précam-
brien et paléozoïque a subi un métamorphisme d’impact avec la zonation suivante :
• couronne externe (stade 0), le quartz et les feldspaths sont fracturés, la biotite est
déformée avec des « kink-bands », attestant une pression de 0,9 à 10 GPa et une
température résiduelle de 100 °C après le choc ;
• couronne intermédiaire (stade 1), le quartz et les feldspaths sont déformés,
comme la biotite, l’amphibole et le grenat présentant des « kink-bands », attestant
une pression de 10 à 35 GPa et une température résiduelle de 300 °C ;
• zone centrale (stade 2), le quartz et les feldspaths sont transformés à l’état solide
en verre diaplectique (le plagioclase forme la maskélynite) ne montrant aucun
signe d’écoulement. La pression est comprise entre 35 et 45 GPa et la température
résiduelle atteint 900 °C.
Au cœur du lac annulaire de Manicouagan, la zone centrale montre la séquence
stratigraphique suivante du haut vers le bas :
1. monzonite épaisse de 20 à 150 m, passant graduellement à une latite épaisse de
100 à 170 m. Aucun contact n’a été observé avec l’unité 2 sous-jacente ;
2. basalte et brèche de 5 à 15 m d’épaisseur, reposant sur l’unité 3 ;
3. suévite de 14 m d’épaisseur, reposant sur l’unité 4 ;
4. socle métamorphique présentant l’ensemble des stades 0 à 2.
Les compositions des roches magmatiques des unités supérieures 1 à 3 sont iden-
tiques à la moyenne des roches du socle précambrien et ne correspondent à aucun
magma naturel connu (Tab. 2.5). Les différentes unités proviennent donc de la
fusion partielle à totale du socle. Au moment de l’impact, un nuage de fragments
pulvérisés et fondus s’est élevé et a déposé l’unité 3, composée de suévite, mélange
de verres et de morceaux anguleux de socle. Le basalte de l’unité 2 correspond à la
zone totalement vitreuse du nuage qui s’est déposé ensuite. Après le choc, la tempé-
rature a augmenté par décompression des roches du cratère et provoqua la fusion
locale et totale du socle. Les liquides magmatiques provoqués par l’impact ont
recoupé les unités 2 à 4 et se sont étalés pour constituer l’unité 1, provoquant à leur
base un métamorphisme de contact par recristallisation du plagioclase, décomposi-
tion des minéraux colorés, voire début de fusion. La zone inférieure de l’unité 1 a
refroidi plus rapidement pour donner une latite à texture finement grenue, alors que
le sommet a refroidi plus lentement pour donner une monzonite à texture ophitique
(Tab. 2.5).
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
1 2 3 4 5 6
• les minéraux hydroxylés se déstabilisent et/ou les minéraux blancs, quartz et felds-
paths, sont corrodés.
Il ne s’agit pas de l’infiltration des enclaves par le liquide magmatique hôte, car
on peut observer des ménisques entre le verre de la roche-hôte et celui de l’enclave.
La fusion se développe en fonction de l’agencement cristallin : le verre est pratique-
ment absent entre les grains du même minéral, mais abondant entre les grains de
minéraux différents, surtout entre le quartz et les feldspaths. Elle est incongruente :
des minéraux réfractaires apparaissent dans le liquide. Comme le refroidissement est
brutal, des minéraux cristallisent par effet de trempe (« quench »), de sorte que le
verre résiduel observé ne correspond pas exactement au liquide de fusion.
69
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
1 2
70
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
1 2 3 4
et Bell, 1982)
71
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Le massif ultrabasique des Beni Bouchera (Rif, Maroc) est constitué de péridotite
litée avec environ 3 % de lits de pyroxénites. La péridotite est de type harzburgite avec
olivine, orthopyroxène, très peu de clinopyroxène, spinelle, plus rarement amphi-
bole, phlogopite et minéraux opaques. Elle est rétromorphosée en trémolite, talc et
serpentine. Les pyroxénites forment des niveaux minces de 15 cm à 1 m d’épaisseur
pouvant dessiner des plis isoclinaux. Très variées, elles forment plusieurs types :
enstatitite, webstérite à spinelle et/ou grenat (ariégite), clinopyroxénite à grenat. Les
bancs sont tantôt simples (enstatitite, clinopyroxénite à grenat), tantôt composites
avec une disposition symétrique : enstatitite → webstérite → clinopyroxénite à grenat,
du bord au cœur (Fig. 2.18).
72
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
Les expériences ont été effectuées à sec pour tenir compte de la pauvreté du manteau
en fluides. Les résultats des expériences montrent un taux de fusion progressive sur
une large gamme de températures depuis le solidus, point où les premières gouttes
de liquide apparaissent, jusqu’au liquidus, point où les derniers cristaux disparais-
sent. Le degré de fusion augmente d’abord rapidement : 10 % de fusion à seulement
25-30 °C au-dessus du solidus, puis de façon linéaire avec la température. La fusion
montre quatre étapes successives :
1. liquide en équilibre avec un assemblage lherzolitique [olivine (ol) + orthopy-
roxène (opx) + clinopyroxène (cpx) + phase alumineuse (plagioclase, spinelle ou
grenat, suivant la pression)]. Cette étape se situe au solidus,
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
2. liquide en équilibre avec les assemblages [ol + opx + cpx + spinelle riche en Cr
(pression entre 0 et 2,5 GPa) ou grenat (pression supérieure)]. Cette étape se situe
à moins de 100 °C au-dessus du solidus,
3. liquide en équilibre avec un assemblage harzburgitique [ol + opx ± spinelle riche
en Cr]. Le clinopyroxène a totalement disparu. Cette étape se situe à environ
100 °C au-dessus du solidus,
4. liquide en équilibre avec un assemblage dunitique [ol ± spinelle riche en Cr],
après disparition de l’orthopyroxène. Cette étape se situe à environ 200 à 300 °C
au-dessus du solidus.
La composition des minéraux résiduels se modifie également :
• olivine : le rapport Mg/(Mg + Fe) passe de 0,88 à 0,95 ;
• spinelle : le rapport Cr/(Cr + Al) augmente de 0,40 environ à 0,80 où il se stabi-
lise. Le spinelle qui en résulte est extrêmement réfractaire et subsiste dans les
étapes 3 et 4 ;
• orthopyroxène : le rapport Mg/(Mg + Fe) passe de 0,89 à 0,94, les teneurs en Ca
et Al diminuent fortement ;
• clinopyroxène : à composition de diopside, il est pauvre en Na et Al (molécule
jadéïte).
Tableau 2.8 – Compositions chimiques des liquides produits à l’équilibre par la fusion
partielle du manteau à sec (d’après Jaques et Green, 1980 ; Falloon et al., 1988).
1 2 3 4 5 6 7
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
Ab + An Qz
2
10 5
15
20
30
Hy
Jd + CaTs
Hw
TQ
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
Ol
: liquides issus de TQ en équilibre avec olivine + orthopyroxène ± clinopyroxène ± spinelle
: liquides issus de HW en équilibre avec le même assemblage minéral
: liquides en équilibre avec olivine seulement.
75
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
76
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
40 trachy-
basalte hawaïte cpx
tholéïte
amph
60 basalte alcalin
basanite tholéïtique
80 sp picrites
alcaline
néphélinite
100
mélilitite
phl gt
120
0 5 10 15 20 25 30 35
% fusion
pression kbar
60
X v H2O = 1,0
50
X v H2O = 0,25
40
30
péridotite à
grenat
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
20
péridotite à
amphibole
10
0
800 900 1000 1100 1200 1300
température˚C
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
du solidus est modifiée, avec une pente négative de 0 à 2 GPa environ, correspondant
au domaine de stabilité de l’amphibole, et une pente positive au-dessus, correspondant
au domaine du grenat hydraté. La position du solidus varie également en fonction :
• de la composition des fluides : pour un mélange variant de 100 % H2O à 25 %
H2O + 75 % CO2, la température du solidus s’élève de 200 °C à 2,5 GPa ;
• de la composition du matériau originel : la température du solidus est plus basse
pour une composition à rapports Fe/(Fe + Mg) élevé et Ca/Al bas (manteau primi-
tif et/ou métasomatique). Une différence de 200 °C est également observée avec
le manteau appauvri plus réfractaire.
Les liquides produits ont une composition d’andésite lorsque les fluides contien-
nent plus de 60 % d’eau pour une pression atteignant 2,5 GPa et une température
située à moins de 200 °C au-dessus du solidus. Pour des fluides moins aqueux
(moins de 50 % d’eau), les liquides sont alcalins et sous-saturés en silice (Tab. 2.9).
Le liquide des kimberlites, sans amphibole mais avec phlogopite, se formerait en
présence de fluides contenant 50 à 75 % de CO2 vers 100 à 175 km de profondeur,
dans le domaine de stabilité du diamant (Fig. 2.23).
Tableau 2.9 – Compositions chimiques des liquides produits à l’équilibre
par la fusion partielle du manteau en présence de fluides (H2O + CO2)
(d’après Mysen et Boettcher, 1975, 1976).
1 2 3 4 5 6 7
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
Cpx
H2O
Pl
Ne Qz
CO2
Opx
Ol
Figure 2.23 – Effet de la nature des fluides sur la composition des liquides
primaires exprimée dans le tétraèdre normatif Ne – Ol – Opx – Cpx – Qz
(Mysen & Boettcher, 1975).
Cependant, si les teneurs en H2O et CO2 sont faibles, une phase vapeur ne peut se
maintenir en présence du liquide dans lequel elle se dissout. Le solidus de la pérido-
tite se situe alors à plus forte température, mais encore inférieure à celle obtenue à
sec, avec des discontinuités reflétant les réactions de déstabilisation de l’amphibole
et des carbonates (Fig. 2.10, 2.24). La teneur maximale de fluide dissous correspond
en masse à 0,3 % H2O (contenue dans l’amphibole) et 7 % CO2 (contenu dans les
carbonates). Au solidus, les liquides sont influencés par la déstabilisation de ces
minéraux : leur composition varie de néphélinite vers 50 à 60 km de profondeur à un
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
H2O saturation
pression kbar
40 1 2 3
35
30
25 amphibole –
20
CO2
15
10 4 5
dolomite +
5 H2O + CO2
sous-saturation
0
800 900 1000 1100 1200 1300
température ˚C
80
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
H2O
Opx+Cpx
Opx+Cpx +Ga+Ph Opx+L
+Ga+Ph +L+V
Ol+Opx +V B L
+Cpx+Ga A
+Ph+V
D C
E
Péridotite (P) Granite
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
35 Géotherme continental
30
Géotherme océanique
25
20
15
amph -
10
5
solidus
0
600 700 800 900 1000 1100 1200
température (˚C)
82
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
température ˚C
1600 solidus
Tp = 1280 ˚C
1200
LITHOSPHERE ASTHENOSPHERE
800
zone interne
adiabatique
couche limite
400 thermique (TBL)
couche limite
mécanique (MBL)
0
0 100 200 300
profondeur km
83
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
84
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
S u r f a c e
fracturation
hydraulique
Manteau appauvri
indiquant la zone de
Limite d’extraction (~50 km) passage des magmas
Fissuration
1 2 3
Figure 2.28 – Extraction en trois stades (1 à 3) d’un liquide dans
l’asthénosphère (Nicolas, 1986).
Dans une zone diapirique, le magma primaire apparaît vers 75 km de profondeur,
son volume augmente progressivement par ascension adiabatique (cf. Fig. 2.27), le
liquide emprunte des conduits ouverts suivant la trajectoire de la contrainte maxi-
male σ1.
1. Apparition vers 60 km de profondeur d’un réseau de fissures.
2. Ouverture vers 50 km de profondeur de conduits plus larges par fracturation
hydraulique.
3. Drainage plus ou moins total, laissant un « sillage » résiduel constitué de pérido-
tite appauvrie.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Sederholm a créé le terme d’anatexie pour définir la fusion d’une roche pré-existante.
On applique généralement le terme d’anatexie à la fusion des formations de la croûte,
bien que ce sens restrictif ne soit pas postulé par le terme lui-même. Les paramètres
thermodynamiques, la pression lithostatique, la température, la pression et l’activité
des fluides, la fugacité d’oxygène et les compositions des roches subissant la fusion,
etc. constituent des facteurs critiques qui fluctuent selon le contexte géodynamique.
Leurs intensités et leurs variations favorisent ou empêchent le déclenchement des pro-
cessus anatectiques.
86
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
La quantité d’eau emprisonnée dans les pores des roches et contenue dans les
minéraux peut être calculée. Dans le champ de stabilité du quartz, les teneurs en
eau des roches sont élevées dans le faciès des schistes bleus, mais diminue rapi-
dement dans celui des éclogites, à cause de la rareté des minéraux hydroxylés.
Dans le champ de stabilité de la coésite, les minéraux hydroxylés stables sont
rares et les roches sont très déficitaires en eau. La variation des teneurs en eau
en fonction de la température joue un rôle important dans la capacité des roches
à fondre.
Les formations de la croûte inférieure continentale montrent des paragenèses
anhydres de haute température. Le métamorphisme HTM se définit par une
température supérieure à celle du solidus granitique « humide », c’est-à-dire
dépassant 650 °C, et, par conséquent, des gradients thermiques élevés. L’espace
HTM est occupé par le faciès des granulites et, le long de l’axe des températures,
par le faciès des sanidinites. Le faciès des sanidinites se rencontre dans les
enclaves emballées dans les coulées de laves, alors que le faciès des granulites
est beaucoup plus répandu. Plusieurs sous-faciès ont été définis :
– granulite à deux pyroxènes, caractérisée par la cristallisation simultanée de
l’orthopyroxène et du clinopyroxène. Ce sous-faciès est stable sous les pressions
les plus faibles, moins de 1,2 GPa à 1 000 °C. Les gradients thermiques dépassent
typiquement la valeur de ~ 50 °C.km– 1. Les réactions de déshydratation favorisent
la formation des roches anhydres. Comme la pression est assez faible, la compres-
sion a un effet moins important que la dilatation thermique de sorte que la
densité des roches n’est pas significativement modifiée.
– granulite à grenat-plagioclase, caractérisée par le remplacement du clinopy-
roxène par le plagioclase. Les pressions sont comprises entre 1,2 et 1,8 GPa à
1 000 °C. Les gradients thermiques s’établissent de ~ 20 à ~ 50 °C.km– 1. Les
pressions plus fortes induisent une densité plus élevée, avec des roches passa-
blement anhydres.
– granulite à kyanite (disthène), caractérisée par le remplacement de la sillimanite
par la kyanite. Ce sous-faciès correspond aux pressions les plus élevées enregis-
trées dans les granulites, jusqu’à 2,2 GPa à 1 000 °C. Les gradients thermiques
sont les plus bas observés, quoique toujours supérieurs à ~ 15 °C.km– 1. La tran-
sition granulite-éclogite est marquée par le sous-faciès des granulites à grenat
sans plagioclase. À cause des modifications minéralogiques (paragenèses de plus
en plus anhydres) et de l’augmentation de la pression, la densité des roches
augmente le long de cette transition, de sorte que les roches de la croûte infé-
rieure sont toujours plus denses que la croûte supérieure.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
Paragneiss Migmatite
G més
mél
F leu1
mél re
leu3
mél re
G+F
leu2
mél
G més
mél
F
enclave sombre leu1
anatexie
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
S-SW N-NE
Tibetan series
slab
et an
MCT Tib
Midl
and
s
Ky
* H2O + CO2
90
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
(20 à 25 %) est atteint, le liquide et une partie du résidu solide peuvent s’agréger et
être transportés sur de grandes distances. Les liquides se déplacent à travers les
roches cataclastiques dont la porosité augmente et, vers le haut, se canalisent dans
des réseaux filoniens. Ainsi, le rapport actuellement observé entre leucosome et
mélanosome dans les migmatites ne peut donner d’indication fiable sur les quantités
de liquide réellement produits au cours des épisodes de fusion.
températures de solidus les plus basses connues dans les systèmes silicatés naturels.
Le volume de liquides produits à partir de compositions favorables est une fonc-
tion des fluides disponibles dans le système. Si les fluides, H2O, et CO2 dans une
moindre mesure, sont présents, ils constituent une phase séparée piégée dans les
cavités entre les cristaux. Dans le cas de fluides absents et de roches métamor-
phiques non anhydres, H2O, OH–, et peut-être H3O+ sont liés dans la structure cristal-
line des minéraux hydratés, les plus importants étant les micas et les amphiboles.
Quatre types d’assemblages peuvent exister dans les roches :
• Type I, absence d’eau. L’assemblage minéral est anhydre sans phase vapeur asso-
ciée. En général, les conditions de fusion à sec ne sont pas atteintes dans la nature.
91
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
92
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
Pélite Muscovite 6% 5% 11 % 12 %
Biotite 33 % 20 % 03 % 03,7 %
Total 50 % 30 %
Grauwacke Biotite 18 % 10 % 02,5 % 04,5 %
Amphibole 9% 5% 02 % 03 %
Total 46 % 38 %
Dacite Biotite 31 % 23 % 03,5 % 05 %
Amphibole 14 % 11 % 03 % 03,7 %
Total 46 % 38 %
Amphibolite Amphibole 42 % 38 % 04,5 % 06,5 %
Réactions de fusion incongruente possibles à l’isograde d’anatexie :
– muscovite + quartz + plagioclase → LIQUIDE + feldspath K + Al2SiO5 ± biotite, grenat ou cordiérite
– biotite + Al2SiO5 + quartz + plagioclase → LIQUIDE + feldspath K + grenat ou cordiérite
– biotite + quartz + plagioclase → LIQUIDE + orthopyroxène ou clinopyroxène + feldspath K ± grenat ou
cordiérite
– amphibole → LIQUIDE + plagioclase + quartz + orthopyroxène + clinopyroxène
pression
aH2O=1,0 aH2O=0,5
H+H2O L
H A+L
aH2O=0,5
H I
L
1,0 A+H2O
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
A+H2O
température
93
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
supérieure à 1,8 GPa montre un solidus de pente dP/dT positive et peut monter faci-
lement jusqu’à ce qu’il atteigne la partie du solidus à pente négative à basse pression.
À cause de la pente de leur solidus, les liquides anatectiques UHPM sont capables de
se mettre en place à assez faible profondeur dans la croûte. La mobilité verticale des
liquides anatectiques HPM and HTM varie surtout en fonction de la quantité de fluides
localement disponibles.
• Compositions des liquides en fonction des protolithes
Les réactions de fusion par déshydratation sont incongruentes, produisant des liquides
sous-saturés en H2O et des résidus solides anhydres ou moins hydratés que la paléo-
some. La composition des liquides est contrôlée par la nature des phases minérales
qui se dissolvent dans le liquide (Tab. 2.11). La fusion incongruente à température
modérée des phases alumineuses, la muscovite (~ 650 °C) et la biotite (~ 850 °C),
induit l’apparition de liquides hyperalumineux. L’indice de saturation en alumine
(ASI), défini par le rapport molaire Al2O3/(CaO + Na2O + K2O), est toujours supérieur
à 1 et dépasse typiquement la valeur de 1,1. La fusion incongruente à haute température
(~ 1 000 °C) de l’amphibole pauvre en alumine contrebalance l’effet induit par les
micas, de sorte que les liquides sont alors métalumineux, avec ASI inférieur à 1, mais
de telles conditions de température sont rarement atteintes dans la croûte.
Tableau 2.11 – Compositions chimiques des liquides produits par fusion à l’équilibre
à basse pression en présence de fluides (H2O + CO2)
(d’après Helz, 1976 ; Conrad et al., 1988).
1 2 3 4 5 6 7 8
94
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
saire à l’anatexie crustale peut être causée par la production d’énergie liée à la
radioactivité interne de la croûte épaissie, par l’intrusion de magmas issus du
manteau en base de croûte (« intraplating/underplating »), par l’augmentation du
flux de chaleur provenant du manteau ou par la combinaison de ces mécanismes.
• Les épisodes orogéniques : trajets pression-température de sens horaire
Le long des trajets métamorphiques pression-température dans le sens horaire, deux
types de réactions de fusion sont possibles si la température augmente (Fig. 2.32).
Le premier type est à l’origine de liquides de fusion partielle saturés en H2O appa-
raissant au solidus saturé en H2O (« humide »), mais ne se produit que si le fluide
supercritique H2O, piégé entre les cristaux, est présent en excès. La porosité des
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
P
Solidus avec H 2O
Mus Mus
Ksp L Qtz Or
Alb Sil
Qtz L
V
Mus Ksp
Alb Sil
Qtz L Mus L
OrSil V
L I1
(a) Mus
je t Qtz
V Qtz Or
Tra Mus
Sil
KspSil
V
I2
c)
et (
Mus Traj
Alb Alb
Qtz Ksp Ksp L )
Sil (b
Sil je t
V Qtz
V Tra
T
Figure 2.32 – Trois trajets métamorphiques-anatectiques de sens horaire
(simplifié d’après Thompson, 2001).
Abréviations : Alb, albite ; Ksp, feldspath potassique (microcline) ; L, liquide ; Mus,
muscovite ; Or, orthose ; Qtz, quartz ; Sil, sillimanite ; V, vapeur.
Le trajet (a) comprend un segment prograde, qui croise le solidus saturé en eau
(« wet ») en présence de la muscovite, correspondant à la réaction de fusion par
déshydratation (DMR, « dehydration melting reaction ») de la muscovite, puis un
segment rétrograde, qui recoupe le solidus à une pression supérieure à celle du
point invariant I2. Le point I2 correspond à l’intersection du solidus « humide »
(« wet ») avec les réactions de déstabilisation de la muscovite.
Le trajet (b) atteint une température plus élevée que celle du point invariant I1, puis
recoupe sans DMR rétrograde le solidus saturé en eau en présence de la sillimanite
à une pression inférieure à celle du point invariant I2.
Le trajet (c), intermédiaire entre les trajets (a) et (b), traverse la courbe de réaction
supra-solidus de décompression-déshydratation (SDDR) : Mus + Qtz + L = Ksp + Sil
+ V, et recoupe le solidus saturé en eau en présence de la sillimanite sous le point
invariant I2.
96
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2.3 • Anatexie et fusion partielle
tibétaines (Fig. 2.33). Les massifs forment la plupart des sommets de plus de
8 000 m du Haut Himalaya et sont surtout constitués de leucogranite à deux micas,
précédant un leucogranite à tourmaline, montrant que deux événements distincts de
fusion ont eu lieu à température décroissante.
• Contexte intra-plaque : rareté du processus anatectique
Une décompression importante, accompagnant l’exhumation et l’érosion de la
chaîne de montagnes toute entière, se produit durant les épisodes post-collision d’un
événement orogénique. Dans ce cas, les liquides doivent rester suffisamment
chauds, l’ascension ou l’exhumation être suffisamment rapides pour que les magmas
soient mobiles. La fusion partielle est à l’origine de granites hyperalumineux à
97
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98
t
5 rus
u th
mb
A Khu
Figure 2.33 – Coupes du massif d’Everest-Lhotse, Haut Himalaya, montrant le rôle joué par les plans de chevauchement
(T, « thrusting ») à la base des formations du Haut Himalaya et de détachement (D) dans la zone sommitale pour la mise en
place et l’exhumation des massifs de leucogranite à deux micas (en blanc) d’âge miocène (d’après Searle, 1999).
2.3 • Anatexie et fusion partielle
99
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
100
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© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
A GR CFB
MORB
B CFB
GMB GR MORB
appauvri GMB
IAB OIB OIB
IAB
primitif
Noyau
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appauvri
102
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2.4 • Sources, ou réservoirs des magmas
profondeur / pression
gradient géothermique
réchauffement
enfouissement
surrection
érosion
température
A
profondeur / pression
gradient géothermique
normal
extension
relaxation
extension-enfouissement
température
B
103
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Cette évolution est bien marquée et souvent complète dans les unités métamor-
phiques de la croûte continentale. Des surrections depuis 150 km de profondeur
jusqu’à la surface ont été reconnues dans certaines chaînes de montagne récentes.
Par contre, elle est souvent plus réduite dans les unités océaniques, car, à partir d’une
certaine profondeur, vers 80 km environ, les composants basaltiques de la plaque
océanique deviennent trop denses pour pouvoir remonter vers la surface et descen-
dent au contraire vers la zone de transition et, peut-être, la couche D”.
2. L’évolution contraire dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (« counter-
clockwise ») implique la succession (Fig. 2.35B) :
augmentation de la température par réchauffement lié à la mise en place au
Moho, ou limite croûte-manteau, de magmas de température élevée (« under-
plating » des auteurs anglo-saxons), le géotherme devient élevé ;
augmentation de la pression par subsidence et enfouissement, la lithosphère
restant mince, le géotherme diminue ;
diminution de la température par refroidissement, le géotherme devient normal ;
diminution finale de la pression et de la température, selon le gradient géother-
mique normal, surrection et mise à l’affleurement. Ce trajet se rencontre de
préférence dans des zones subissant des mouvements distensifs et/ou soumises
à l’intrusion massive de magmas.
La croûte inférieure déshydratée et le remplissage sédimentaire trop froid ne
constituent pas des sources favorables pour produire un liquide anatectique. L’apport
thermique dû à l’intrusion de magmas issus du manteau peut déclencher l’anatexie
en l’absence de fluides (Fig. 2.31 et 2.32). La croûte inférieure enregistre les deux
types d’évolution lors des phénomènes orogéniques puis au cours du processus de
cratonisation conduisant à la formation de continents stables. Dans les grands profils
géophysiques (France, Allemagne, Manche, Mer d’Irlande), la croûte inférieure de
l’Europe de l’Ouest a montré une lamination remarquable. Postérieures aux événe-
ments tectoniques varisques, les lamelles observées recoupent les surfaces de
chevauchement paléozoïque et se mettent en place entre le Permo-Trias et le Crétacé
inférieur, vraisemblablement au Jurassique. Leur nature est hypothétique : cisaille-
ment extensif, chambres magmatiques étirées ou différenciation métamorphique ?
La lamination se produit sous la profondeur critique de 15 km, en dessous de
laquelle les réseaux de fractures ne sont plus interconnectés, c’est-à-dire à 400-
600 °C pour une viscosité de 1020 à 1023 Pa.s.
Les fluides présents dans les pores et les fractures de la croûte varient d’une
composition purement aqueuse (H2O) à 0,1 MPa à une composition carbonique
(CO2) à 1,5 GPa, le rapport CO2 / (CO2 + H2O) croissant avec la profondeur de
façon presque linéaire entre les valeurs 0 et 1. Dans le manteau, les fluides changent
également de composition, avec CO2 prédominant à moins de 75 km de profondeur
et H2O dans le reste du manteau supérieur (Fig. 2.36). La fusion partielle (anatexie)
est étroitement contrôlée par l’abondance et la composition des fluides. Comme les
roches contiennent pour la plupart les fluides dans les pores et dans les minéraux
hydroxylés et carbonatés, il est possible de tracer le solidus des matériaux terrestres.
Dans ce schéma, la croûte fournit des liquides granitiques et intermédiaires, le
104
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2.4 • Sources, ou réservoirs des magmas
X
CO2
profondeur (km) 1
0
1 3 CROÛTE
2
50
CO2 PYROLITE gradient
2 océanique
100 gradient
cratonique
H2O
150
FLUIDES
1 3
200
600 1000 1400 1800
température (°C)
Figure 2.36 – Composition des fluides du système C-H-O présents dans les
200 km superficiels du globe terrestre (Montel et al., 1986 ; Schneider &
Eggler, 1986, Fig. 2.13), solidus naturel de la croûte continentale et du
manteau supérieur : à saturation d’eau (1), en présence de fluides dissous (2)
et à sec (3) (Falloon & Green, 1989 ; Montel et al., 1986 ; Mysen & Boettcher,
1975 ; Olafsson & Eggler, 1983 ; Takahashi, 1986 ; Wyllie, 1988),
et gradients géothermiques sous les cratons et sous les océans (cf. Fig. 2.2).
• sous les cratons, le manteau en présence de CO2 et H2O commence à fondre vers
120 km de profondeur et constitue la zone à faible vitesse (ZFV). Le degré de
fusion est faible (seulement 0,2 %), les liquides, mal connus, peuvent être carbo-
natitiques ou kimberlitiques et transportent K, U et Th, éléments radioactifs
essentiels pour la production de chaleur. Très fluides, ces liquides se déplacent
facilement mais, à cause de leur faible volume, refroidissent et se solidifient avant
d’atteindre la surface. Ils apportent des éléments incompatibles au milieu dans
lequel ils cristallisent et participent à la métasomatose du manteau.
• sous les océans, même à sec, le manteau peut fondre entre 75 et 120 km de
profondeur et constitue le « manteau anormal » sous les rides médio-océaniques.
105
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Chapitre 2 • Les sources des magmas
Les liquides obtenus sont picritiques et peuvent constituer les parents des basaltes
des rides médio-océaniques (MORB).
Il n’est pas possible de fondre la croûte en conditions statiques. Pour déclencher le
processus de fusion, les mouvements tectoniques jouent un rôle important, en indui-
sant une augmentation de température (surchauffe), une chute de pression (décom-
pression) ou au contraire une augmentation de pression (chevauchement), l’apport
ou le départ de fluides, etc.
2.5 CONCLUSIONS
Les couches superficielles du globe présentent ainsi une stratification, les para-
mètres physiques variant en fonction des compositions chimiques et minéralogiques.
Un exemple naturel est fourni par les enclaves récoltées dans les basaltes carboni-
fères de la Midland Valley d’Écosse, entre le Firth of Clyde et Fife (Fig. 2.37). La
coupe des zones profondes a été reconstituée sur plus de 50 km d’épaisseur :
• la croûte supérieure est constituée par :
de 0 à 10 km de profondeur, la couverture sédimentaire paléozoïque ;
de 10 à 18 km, un ensemble métamorphique à grenat-sillimanite et des roches
plutoniques non déformées. L’ensemble, de composition acide quartzo-feldspa-
Km
O
Couverture
Paléozoïque
granites intrusifs
1O
2O
M O H O
106
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2.5 • Conclusions
thique, montre une forte résistivité électrique et la vitesse des ondes sismiques
P est d’environ 6,4 km.s– 1 ;
• la croûte inférieure de 18 à 35 km, est constituée par des roches basiques méta-
morphisées dans le faciès des granulites à 0,8 GPa et 850 °C. Les roches anhydres
forment des corps stratiformes cumulatifs, ayant une résistivité électrique
modérée et une vitesse d’ondes P de 7 km.s– 1. La croûte inférieure y est donc
formée par des massifs magmatiques et non par des résidus de fusion anatectique
(restites) ;
• le manteau supérieur sous 35 km de profondeur, a une très forte résistivité élec-
trique et une vitesse d’ondes P de 8 km.s– 1. Très hétérogène, il est composé de :
lherzolite à spinelle, parfois métasomatisée à amphibole et carbonates ;
association clinopyroxénite-wehrlite-webstérite à kaersutite + biotite + apatite,
issue de la cristallisation dans le manteau de liquides basaltiques et de la méta-
somatose du manteau par les fluides.
C’est à partir de cet ensemble varié que se produisent les différents liquides
primaires. La mise en place et la cristallisation des liquides silicatés constituent la
matière des études magmatologiques.
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107
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LES PHÉNOMÈNES
MAGMATIQUES
3
3.1 Un magma primaire : le basalte
3.2 Un magma différencié : le granite
3.3 Volcanisme et produits associés
PLAN
109
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
110
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
Son origine profonde ne fait pas de doute, car il arrive en surface à 1 100-1 200 °C,
température impossible à atteindre à des niveaux superficiels. Même à l’époque où
l’ensemble des roches était supposé provenir de phénomènes de sédimentation dans
un océan primitif (théorie « neptuniste »), les liquides observés lors des éruptions
volcaniques étaient interprétés comme issus de la fusion des sédiments au contact
d’un feu localisé, comme par exemple la combustion du charbon. En prenant un
gradient géothermique constant de type continental de 30 °C.km– 1, la source des
basaltes doit se situer à au moins 40 km de profondeur pour que le liquide produit
arrive en surface à 1 200 °C. Si l’on tient compte de la variation en profondeur du
gradient géothermique et de la perte de chaleur en cours d’ascension, il faut une
profondeur encore supérieure. La source est donc située dans le manteau.
lement une roche et pour porter le liquide qui en résulte à 200-300 °C au-dessus de
son liquidus.
111
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Tableau 3.1 – Ordres de grandeur des paramètres physiques des magmas et des
roches (d’après Maaløe, 1985 ; McBirney, 1984 ; McBirney & Noyes, 1979).
112
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
c) Viscosité
La viscosité η mesure la résistance d’une substance au fluage selon la relation
(Fig. 3.2A) :
σ = ψ + η (dv/dz)n
σ, contrainte de cisaillement ;
ψ, contrainte minimale de fluage ;
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
A contrainte σ
déformation dx
sens de l'écoulement
épaisseur z
v=dx / dt
B COMPORTEMENTS RHEOLOGIQUES
contrainte cisaillante
Bingham
pseudo-plastique newtonien
dilatant
taux de cisaillement
114
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
volatils qui agissent dans le même sens, diminuer la viscosité, parce qu’elles tendent
à briser la continuité du réseau tridimensionnel. Par conséquent, au cours d’une
éruption volcanique, la viscosité d’un liquide basaltique augmente par chute de pres-
sion (ascension), refroidissement et dégazage. Dans les magmas naturels, la
présence de cristaux influe sur la viscosité effective selon les relations :
ηeff = ηL (1 + 2,5 X), pour X ≤ 0,1 (équation d’Einstein) ;
ηeff = ηL (1 – RX)–2,5 pour X > 0,1 (équation de Roscoe) ;
ηeff, viscosité effective ;
ηL, viscosité du liquide sans cristaux ;
X, fraction volumique de cristaux.
R varie selon la forme des cristaux : R = 1,35 pour la sphère ; R = 1,50 pour le
cube, le parallélépipède et le cylindre ; R = 1,67-1,85 pour un assemblage de cris-
taux de formes et de tailles différentes.
La viscosité effective d’un magma tend vers l’infini pour une porosité résiduelle
(espace laissé libre entre les cristaux = 1 – X) de 0,46 (R = 1,85) à 0,26 (R = 1,35).
En effet, quand X = 1/R, la porosité résiduelle est 1 – (1/R) et le facteur (1 – RX) est
nul. Le magma se comporte alors comme un solide, le liquide résiduel reste bloqué
entre les grains qui forment une armature tri-dimensionnelle. Dans un magma basal-
tique, pouvant charrier des cristaux d’olivine, de pyroxènes, de plagioclase et de
magnétite, la valeur R est estimée à 1,67.
Selon la valeur de X, les magmas présentent trois comportements :
• un comportement newtonien pour X ≤ 0,3, le magma relativement pauvre en cris-
taux peut s’écouler librement quelle que soit la contrainte ;
• un comportement de corps de Bingham pour 0,3 < X ≤ 0,7, le magma forme une
suspension de solides dans un liquide, qui peut s’écouler dès lors que la contrainte
est suffisante ;
• un comportement « magmato-rigide » ou « submagmatique » pour X > 0,7, le
magma réagit comme un solide et présente une forte viscosité qui varie selon la
contrainte.
d) Densité
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
La densité ρ de la plupart des magmas varie entre 2,2 et 3,1 en fonction de la tempé-
rature, de la pression et de la composition chimique. L’effet de la température est
mesuré par le coefficient de dilatation thermique, α, exprimant le changement de
volume à pression constante, et l’effet de la pression se traduit par la compressibilité
isotherme, β. Les valeurs de α et de β varient selon la nature du magma et sont plus
élevées pour les liquides que pour les roches cristallisées, mais restent du même
ordre de grandeur (Tab. 22). Dans un liquide avec α = 3 10– 5 K– 1 et β = 7 10– 6 bar– 1,
une augmentation de température de 100 °C a pour effet de diminuer la densité de
0,3 %. Cet effet est identique à celui provoqué par une diminution de pression de
43 MPa, traduisant une ascension de 1,5 km environ.
115
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
densité g-cm-3
2.9
liquide
2.8 picrite intermédiaire
densité de la
croûte
basalte
2.7
"fenêtre d'éruption"
liquide
acide
2.6
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
Fe / (Fe + Mg) atomes
116
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
Le même type de calcul peut s’appliquer aux basaltes des rides médio-océa-
niques. Les valeurs utilisées pour les densités et les épaisseurs sont les mêmes
(Tab. 3.2), à l’exception du fait que les basaltes sont émis à 2 km sous l’eau, soit à
1 500 m au-dessus du plancher océanique. La surpression à la base de la croûte
océanique est de 0,216 GPa et la colonne magmatique dans le manteau a 36 km. La
source est située à au moins 46 km de profondeur, correspondant à environ 1,2 GPa
de pression lithostatique. De même, la colonne magmatique se déconnecte de sa
source au cours de son transit : une colonne enracinée à 46 km de profondeur devrait
produire un volcan culminant à 6 200 m au-dessus du niveau de la mer, ce qui n’est
jamais le cas.
117
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Tableau 3.2 – Épaisseur et densité des différentes couches terrestres sous Hawaï
(d’après Maaløe, 1985).
La pression P exercée par le magma est donnée par : P = z.ρ.g, où z est la hauteur de la colonne magma-
tique, ρ, sa densité et g, la gravité. En pratique : P (kbar) = z (km).ρ (g.cm– 3) / 10.
Dans les ceintures volcaniques liées aux phénomènes de subduction, les volcans
andésitiques ne dépassent pas 5 000 m au-dessus du sol (par exemple : Shasta,
Cascades, Californie, 4 317 m ; Popocatépetl, Mexique, 5 452 m, mais situé sur un
plateau à 2 200 m d’altitude). Les valeurs utilisées pour le calcul sont : 2,5 g.cm– 3
pour la densité du magma andésitique et 35 km pour l’épaisseur de la croûte conti-
nentale. L’émission de magma andésitique est possible pour une surpression à la base
du Moho de 1 GPa et une source mantélique située à 125 km sous le Moho, soit une
profondeur de 160 km, correspondant à environ 5 GPa de pression lithostatique. Les
données géophysiques suggèrent également des profondeurs allant de 100 à 160 km.
Notons qu’au moment de l’éruption volcanique, l’ensemble de la colonne magmatique
est alors situé dans la croûte continentale et dans les 8 km supérieurs du manteau.
Dans tous les cas présentés, la colonne magmatique est plus longue lorsqu’elle est
entièrement située à l’intérieur du manteau que lorsqu’elle arrive au niveau de la
zone d’émission :
• Mauna Loa : 74 km de longueur dans le manteau et 41 km au niveau du volcan ;
• rides médio-océaniques : respectivement 36 km et 10,33 km ;
• volcans andésitiques : respectivement 125 km et 48 km.
Il y a donc contraction de la colonne magmatique dans le sens vertical. Comme
les calculs ne tiennent pas compte d’une éventuelle perte de masse par cristallisation
dans le conduit, ceci suggère que le conduit dans lequel circule le magma s’élargit
vers le haut. L’observation des affleurements confirme l’hypothèse, puisque l’épais-
seur des filons basaltiques est de quelques centimètres à quelques décimètres dans
les roches du manteau supérieur et atteint quelques mètres dans la croûte supérieure.
118
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
nt turbule
uleme nt
éco
ent lamina
lem ir e
ou
éc
vitesse
d'écoulement
119
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
N
120
110 a b
a
100 b
90
80
70 ellipse
60 rectangle
50
40
30
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
b/a
120
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
dimension qui mesure l’effet relatif des forces d’inertie et des forces liées à la visco-
sité et à la friction :
Re = (ρ/η) vm D = vm D / ν (Tab. 3.1)
• si Re < 2 000 à 2 300, les effets de viscosité sont dominants, l’écoulement est
laminaire ;
• si Re > 2 000 à 2 300, les forces d’inertie dominent, l’écoulement est turbulent.
Dans le cas étudié, Re = 12 879, l’écoulement est donc turbulent. La transition
entre régime laminaire et régime turbulent (Re = 2 300) se produit pour une vitesse :
vm = 2 103 cm.s– 1 = 72 km.h– 1.
La vitesse d’ascension peut également être estimée par la hauteur, h, atteintes par
les fontaines de laves. Le mouvement est décrit par l’équation :
h = 1/2 g t2 et vm = g t, soit vm = √2 g h.
Pour g = 9,81 m.s– 2 et h = 200 m, vm = 225 km.h– 1. Pour h = 600 m, vm =
390 km.h– 1. Au cours de l’éruption de l’Etna en décembre 2002, des fontaines de
laves de 1 000 m de haut ont été observées, accompagnées d’un épais nuage de
vapeur d’eau et de cendres, leur vitesse d’éjection a dû atteindre au moins
500 km.h– 1.
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
a) Diffusion et convection
La diffusion de la chaleur est donnée par la loi de Fourier :
q = – K (dT/dz)
q, transfert de chaleur à travers une couche de surface unitaire ;
z, épaisseur de la couche ;
K, coefficient de conductivité thermique ;
dT/dz, gradient de température.
Le signe – indique que le transfert de chaleur se fait dans le sens des températures
décroissantes.
En définissant la diffusivité thermique par κ = K/(ρ.Cp), on obtient : ∂T/∂t =
κ.(∂2T/∂z2), qui mesure le taux de refroidissement dans un milieu à gradient de
température variable. De même, la diffusivité chimique D est définie par ∂C/∂t =
D.(∂2C/∂z2), qui mesure le taux d’échange chimique et la viscosité cinématique
ν par ∂v/∂t = ν.(∂2v/∂t2), qui mesure la variation de la vitesse au cours du temps.
Les trois types de diffusion jouent un rôle important. Des couches-limites
(« boundary layers »), respectivement thermique, chimique et cinématique, consti-
tuent la zone de bordure d’un corps magmatique, située entre le contact et l’intérieur
de la masse liquide qui évolue comme un fluide homogène. Comme les trois para-
mètres κ (10– 7 m2.s– 1), D (10– 10 à 10– 13 m2.s– 1) et ν (10– 2 à 1 m2.s– 1) ont des
ordres de grandeur très différents (Tab. 3.1), les trois types de couche-limite qu’ils
définissent ont des épaisseurs très différentes (Fig. 3.6).
À cause des forces qui s’appliquent à la couche-limite, tout magma est conduit à
subir une convection. L’importance de la force convective est donnée par le nombre
sans dimension de Grashof, exprimant le rapport entre la mobilité induite par la
chaleur et le frein dû à la viscosité :
Gr = g α ∆T l3 / ν2
où l est l’épaisseur du corps magmatique et ν la viscosité cinématique.
Un corps magmatique subira la convection si la force d’entraînement, exprimé par
Gr, est suffisamment grande pour dépasser la résistance liée à la viscosité et la diffu-
sivité thermique. Ces deux propriétés sont exprimées par le nombre sans dimension
de Prandtl :
Pr = ν / κ
122
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
∆c
concentration
∆T
température
∆v
vitesse d’écoulement
Les gaz, milieux très peu visqueux et transmettant bien la chaleur, sont caractéri-
sés par Pr ≤ 1. Les liquides et les fluides comme l’eau (Pr = 7) ont des nombres plus
élevés. Les magmas silicatés, milieux très visqueux et conduisant mal la chaleur,
sont définis par Pr > 104.
Le critère de convection est alors donné par le nombre sans dimension de
Rayleigh :
Ra = Gr.Pr = g α ∆T l3 / ν κ
Il y a convection au-dessus d’une valeur critique estimée à 1 700-2 500 et simple
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
124
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
−∆ T (°C)
20 pas de cristaux
40
60 cristaux d’olivine
présents
80
100
120
140
160
0 4 8 12 16 20 24
temps après avoir atteint l’isotherme (h)
La croissance des cristaux est également fonction de la surfusion (Fig. 3.8). Trois
types de croissance cristalline conduisant à des morphologies différentes ont été
distingués, selon un taux de surfusion croissant (cf. Minéralogie) :
1. croissance contrôlée par les réactions à l’interface liquide-solide. Les cristaux
présentent toutes leurs faces et sont automorphes, impliquant plusieurs réactions
à l’interface : nucléation de surface conduisant à une surface plane, dislocations
liées aux impuretés incluses et croissance continue ;
2. croissance contrôlée par la diffusion. Les cristaux ont une composition différente
de celle du liquide, ce qui suppose un transfert de matière par diffusion. Les cris-
taux présentent leurs sommets et leurs arêtes, mais les faces sont souvent
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
cristaux squelettiques,
en général plus aciculaires
que la forme d’équilibre degré de surfusion
∆T
croissant
dendrites
sphérolites
Les trois types de croissance s’observent pour des surfusions différentes selon la
nature du minéral et sa place dans la séquence de cristallisation. Par exemple, dans
un magma basaltique, l’olivine cristallise au liquidus et le plagioclase près du soli-
dus. Pour une forte surfusion, l’olivine donne des cristaux squelettiques alors que le
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
127
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
T liquidus
croissance
T magma
B
solide liquide
T liquidus
dissolution
T magma
128
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
conséquent, la lave qui apparaît en début d’éruption est moins riche en cristaux, alors
que celle qui émerge ensuite peut en contenir plus. Dans la réalité, ce principe
souffre des exceptions, car deux facteurs peuvent l’annuler. Si l’ascension du
magma est suffisamment rapide, c’est-à-dire de 10 à 100 fois supérieure à la vitesse
de sédimentation des cristaux, les cristaux sont emportés avec le liquide. De
même, les bulles de gaz peuvent soulever les cristaux, de sorte que les laves vésicu-
lées, souvent précoces, sont fréquemment porphyriques, c’est-à-dire chargées de
cristaux visibles à l’œil nu. Par contre, les laves dégazées sont fréquemment aphy-
riques, dépourvues de cristaux visibles. À l’intérieur d’une même coulée, la lave est
généralement enrichie en cristaux alors que les bordures et le toit en sont appauvris
(Fig. 3.10).
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
v
v
g g
g
c
c c c Ve
A B C
Les phases solides dans le magma sont constituées par des matériaux de même
origine que le magma, ils sont homéogènes, ainsi que par des matériaux étrangers au
magma, ils sont exogènes. Les matériaux exogènes se présentent sous forme de frag-
ments de roches – les enclaves – ou de cristaux isolés, souvent entourés d’une
auréole de réaction – les xénocristaux. Ils apportent une information précieuse sur le
trajet suivi par le magma depuis sa source jusqu’à la surface, car ils ont été ramonés
à divers niveaux : nodules de péridotite du manteau et enclaves crustales, et sur les
conditions thermodynamiques : fusion ou non des enclaves.
Les matériaux homéogènes témoignent de processus précoces d’évolution du
magma. Sous forme de fragments de roches ou de cristaux, ce sont des cumulats
produits par l’accumulation de cristaux dans la chambre magmatique ou en cours
d’ascension dans les conduits. Il existe des cas plus complexes où des enclaves
cumulatives ne correspondent pas à l’accumulation de cristaux dans le magma qui
les a remontées mais se sont formées à partir d’un autre magma cogénétique, c’est-
à-dire de même filiation, mais produites à un autre moment.
• Phases solides des roches
Parmi les cristaux d’une roche magmatique, on distingue :
• les phénocristaux, ou cristaux visibles à l’œil nu, voire à la loupe ;
130
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
ils se situent au sein de cratères, Erebus (Antarctique), Erta Ale (Éthiopie) et Nyira-
gongo (Congo). Les températures des magmas sont très élevées, 1 200 °C environ, et
les liquides très pauvres en cristaux. Dans l’île d’Hawaï, le magma très fluide peut,
après éruption, former des lacs de lave éphémères remplissant des cratères ou des
dépressions. Les lacs de lave de Kilauea Iki (1959) et d’Alae (1963) ont été particu-
lièrement étudiés.
• Lac de lave d’Alae
Apparu le 21 août 1963, un lac de lave a rempli le fond d’un cratère de 160 m de
profondeur. Long de 305 m, large de 245 m de large et profond de 15 m, il a formé
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
1 2 3
Dès la fin août 1963, des forages ont pu être effectués à travers la croûte superfi-
cielle vers le cœur encore liquide. Au moment de l’éruption, la température du
magma a été mesurée à 1 160 °C, puis, en fin d’éruption, à 1 140 °C. La limite entre
la croûte supérieure solidifiée et le cœur encore fondu correspond à l’isotherme
1 065 °C, où la viscosité décroît brutalement de 1011 à 103 Pa.s, ce qui correspond à
environ 50 % de cristaux et 50 % de liquide. Le magma est complètement cristallisé
à 980 °C, à l’exception d’un liquide résiduel très siliceux. L’ensemble du lac de lave
est complètement solidifié en septembre 1964.
Le taux de cristallisation ne varie pas de façon linéaire avec la température et
atteint un maximum vers 1 060-1 065 °C (Fig. 3.11). La concentration volumique
des vacuoles atteint 40 % entre 30 cm et 1,20 m de profondeur (horizon caverneux),
puis diminue pour rester constante à 11 % au-dessous de 4,5 m de profondeur. Les
cavernes peuvent avoir quelques décimètres de hauteur et 1 à 2 m de diamètre.
La séquence de début de cristallisation suivante a été observée : olivine Fo80 à
1 190 °C / augite à 1 185-1 180 °C / plagioclase à 1 170-1 165 °C / ilménite à
1 070 °C / pigeonite à 1 050 °C / magnétite à 1 030 °C / apatite à 1 010 °C. L’olivine
varie de composition de Fo80 au liquidus à Fo65 à 1 100 °C où elle cesse de cristalli-
ser. Le plagioclase évolue de An70 à 1 170 °C à An59 au solidus.
132
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
% volumique de cristaux
100 Lac de lave d’Alae,
Hawaï
80
60
A
40
20
0
960 1000 1040 1080 1120 1160
température °C
profondeur (m)
0
août 63
novembre 63
5
mars 64
B
juillet 64
10
septembre 65
septembre 67
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
croûte température
fond du lac de lave croûte solide visqueuse de l’éruption
15
0 200 400 600 800 1000 1200
température °C
133
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
134
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
composition moyenne
profondeur (m) du lac de lave
0
10
20
horizon appauvri
30 en olivine
40
50
60
horizon enrichi
70
en olivine
80
90
croûte superficielle
effondrée
100
0 5 10 15 20 25 30
MgO (% pondéral)
profondeur (m)
10
base de la croûte
30
50
KILAUEA IKI
70
octobre 1967 T max ~ 1180°C
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
90
110
135
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
6. zone la plus chaude à plus de 1 175 °C, contenant liquide + olivine + chromite,
les liquides diapiriques issus de l’horizon 4 et passant à travers cette zone sont
réchauffés et transportent la chaleur vers le haut.
Au cours de leur déplacement, les diapirs de diamètre de l’ordre du décimètre se
détachent de l’horizon 4. D’après les résultats des sondages, le transport diapirique a
commencé en 1960 et s’est achevé en 1971, la formation des veines ophitiques a
commencé en 1964 et les corps riches en olivine se sont mis en place entre 1966
et 1979. Ainsi, pour un lac de lave relativement peu important en volume (moins de
125.106 m3), quatre processus de différenciation ont pu être mis en évidence :
• sédimentation limitée d’olivine au-dessous de 1 190 °C ;
• transport diapirique de liquides légers pauvres en Fe et Ca au-dessous de
1 160 °C ;
• formation de veines ophitiques par ségrégations de liquide résiduel ferrobasal-
tique ;
• formation de corps riches en olivine au-dessous de 1 140 °C.
Il n’est donc pas facile de récupérer par sondage des échantillons représentatifs du
magma originel. Si les différents liquides produits de 1 190 à 1 140 °C avaient pu
être expulsés, ils auraient constitué une série de différenciation, comme en comporte
tout volcan. Les lacs de lave constituent donc d’excellents laboratoires naturels pour
étudier la différenciation magmatique à basse pression.
• Coulées de lave
Elles témoignent à leur échelle (moins de 40 m d’épaisseur) des mêmes phéno-
mènes, mais en régime dynamique, car la lave s’écoule sous l’action de la gravité.
Les bordures, en contact avec le sol et avec l’air, refroidissent rapidement et consti-
tuent des croûtes figées d’allures différentes selon la viscosité : lave pahoehoe lisse
et cordée, lave aa chaotique et hérissée (noms provenant d’Hawaï). Cette croûte,
plus ou moins élastique, se comporte de façon rigide et s’enroule autour du cœur
fondu à la manière d’une chenillette. Des contraintes de cisaillement apparaissent à
l’interface croûte-magma et se traduisent par l’apparition de plans de débit analo-
gues aux plans C et S obtenus en tectonique ductile (cf. Tectonique). La partie supé-
rieure d’une coulée montre alors un débit caractéristique en lamelles de 5 à 10 cm
d’épaisseur (Fig. 3.10).
Après arrêt de l’écoulement, le cœur resté fondu refroidit. Les phénomènes qui
s’y produisent sont analogues à ceux décrits dans les lacs de lave, conduisant à une
partie basale plutôt cumulative et une zone supérieure décantée en cristaux. En fin de
refroidissement, une prismation perpendiculaire à la surface apparaît. La prismation
est tardive, car elle n’est pas déformée par l’écoulement mais elle découpe les
lamelles d’écoulement pour former des lauzes comme, par exemple, dans la phono-
lite de la Roche Tuilière, dans l’appareil volcanique du Mont-Dore, Auvergne. Au
front de la coulée, la prismation forme des gerbes ; dans le filon d’alimentation, elle
est horizontale ; partout ailleurs, elle est verticale (Fig. 3.10).
Suivant les creux topographiques (vallées), les coulées peuvent emprisonner des
masses d’eau qu’elles vaporisent. Sous l’action de la pression de la vapeur, elles sont
136
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
alors traversées par des brèches caverneuses, constituées de blocs de lave et de gaz,
qui peuvent arriver à la surface de la coulée et former des cônes pseudo-volca-
niques.
a) Minéraux constitutifs
L’ensemble des minéraux d’une roche constitue une paragenèse et se traduit par le
MODE, exprimé en pourcentages volumiques. Dans les roches volcaniques, le mode
est souvent connu de façon approximative à cause de la taille submicroscopique des
cristaux et du verre qui peut être présent. Ainsi, dans le lac de lave d’Alae, le mode
déterminé au microscope montre une surestimation de 25 % des pyroxènes, de 50 %
des oxydes et, corrélativement, une sous-estimation du plagioclase, à cause de la
petite taille des cristaux (moins de 0,01 mm).
On distingue plusieurs groupes de minéraux :
• les minéraux blancs, en fait transparents au microscope et légers (les « coupholites »
de Lacroix), comprennent le quartz et les polymorphes de la silice, les feldspaths
alcalins, les plagioclases et les feldspathoïdes. Ce sont les minéraux felsiques F ;
• les minéraux colorés, plus denses (les « barylites » de Lacroix), comprennent les
minéraux mafiques M (olivine, pyroxènes, amphiboles, biotite ;
• les minéraux accessoires, moins abondants, peuvent manquer : oxydes, sulfures.
L’indice de coloration C est donné par le rapport entre F et M, C = 100 x M / (M + F)
pour C > 90, les roches sont holomélanocrates ;
pour 65 < C < 90, les roches sont mélanocrates ;
pour 35 < C < 65, les roches sont mésocrates ;
pour 5 < C < 35, les roches sont leucocrates ;
pour C < 5, les roches sont hololeucocrates.
Les basaltes sont mésocrates avec à peu près autant de plagioclase que de minéraux
colorés. Plusieurs types de basaltes se distinguent par leur minéralogie (Tab. 3.4) :
présence de polymorphes de la silice dans les tholéiites, de feldspathoïdes dans
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
les basanites ;
présence de minéraux hydroxylés dans les basaltes riches en alumine ;
variété des pyroxènes.
b) Compositions chimiques
Dans les roches, les éléments majeurs et un certain nombre d’éléments en traces
(voir dans la même collection Géochimie) sont couramment analysés. L’oxygène est
l’anion majeur compensé par les autres éléments, cationiques. On a donc pris l’habi-
tude de présenter les analyses chimiques sous forme de pourcentages pondéraux
d’oxydes (Tab. 3.4).
137
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
1 2 3 4 5
La présentation standard suit l’ordre décroissant des valences des cations, soit
SiO2 – TiO2 – Al2O3 – Fe2O3 – FeO – MnO – MgO – CaO – Na2O – K2O – P2O5 –
H2O+ – H2O– – Total. Actuellement, les méthodes analytiques ne discriminent plus
les deux valences du fer et tout le fer est analysé sous forme de FeO* ou de Fe2O3*.
Les huit premiers oxydes entrent dans la composition des minéraux colorés tandis
que SiO2 – Al2O3 – CaO – Na2O – K2O entrent aussi dans celle des minéraux blancs.
Il est malaisé de comparer des roches incomplètement cristallisées. Pour mieux
illustrer les différences en termes de minéralogie, quatre géochimistes américains,
Cross, Iddings, Pirsson et Washington, ont proposé de recalculer l’analyse d’une
roche présentée en oxydes en une suite de minéraux fictifs appelés normatifs, par
opposition aux minéraux réels modaux. L’assemblage de ces minéraux constitue la
NORME. La norme peut être présentée en pourcentages pondéraux de minéraux,
c’est la norme CIPW, ou en pourcentages molaires de minéraux, c’est la norme de
Barth-Niggli. L’intérêt de la norme réside en ce que l’on peut directement la compa-
rer au mode réel d’une roche. Son désavantage tient à son mode de calcul lié à une
séquence théorique de cristallisation jamais observée dans la nature :
138
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3.1 • Un magma primaire : le basalte
1. minéraux accessoires : calcite (Cc), apatite (Ap), pyrite (Py), ilménite (Ilm) FeTiO3 ;
2. feldspaths alcalins : orthose (Or) KAlSi3O8, puis albite (Ab) NaAlSi3O8 ;
3. anorthite (An) CaAl2Si2O8 ;
4. magnétite (Mt) Fe3O4, parfois hématite Fe2O3 ;
5. diopside (Di ou Cpx) Ca(Mg,Fe)Si2O6, puis orthopyroxène (Opx) (Mg,Fe)SiO3 ;
6. à ce stade, on compte les molécules de silice SiO2 nécessaires pour former la
séquence 1 à 5 et on les compare au stock réellement présent dans la roche. Trois
cas se présentent :
a. il reste de la silice que l’on convertit en quartz (Qz) SiO2. La roche est sursatu-
rée en silice et contient l’assemblage normatif Qz + Hy (cf. Tab. 3.4) ;
b. il ne reste plus de silice, mais il n’en manque pas non plus. La roche est saturée
en silice et continent Hy, sans Qz, ni Ol ;
c. il manque de la silice. La roche est sous-saturée en silice. Pour compenser le
déficit de silice, on transforme des minéraux riches en silice, préalablement
calculés, en d’autres, moins riches :
orthopyroxène → olivine (Ol) (Mg,Fe)2SiO4 ;
albite → néphéline (Né) NaAlSiO4 ;
orthose → leucite (Lc) KAlSi2O6, etc.
Les basaltes peuvent être classés d’après leur assemblage normatif dans le
tétraèdre normatif Di-Né-Qz-Ol, proposé par Yoder et Tilley en 1961 (Fig. 3.14) :
• les basaltes situés dans l’espace Di-Ab-Hy-Qz sont les tholéiites à quartz ;
• les basaltes situés dans l’espace Di-Ab-Hy-Ol sont les tholéiites à olivine ;
• les basaltes situés dans l’espace Di-Ab-Ol-Né sont les basaltes alcalins, s’ils sont
pauvres en Né normative, et les basanites, s’ils sont riches en Né normative.
Cette classification ne tient pas compte des basaltes riches en alumine, souches
des séries calco-alcalines et se situant près du pôle Ab. À basse pression et en milieu
anhydre, il a été démontré expérimentalement que les minéraux qui cristallisent sont
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
ceux de la norme CIPW. Les plans Di-Ab-Hy, plan de saturation en silice, et Di-Ab-
Ol, plan critique de sous-saturation en silice, représentent des barrières thermiques.
Cependant, ce tétraèdre perd sa valeur de discrimination à haute pression et en
présence d’eau, car d’autres minéraux que ceux de la norme CIPW peuvent cristalliser.
139
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Di
Plancritique de
sous-saturation Plan de saturation
en silice en silice
Basalte alcalin
- basanite Tholéiite
à quartz
Ab
Ne Q
En
Tholéiite à olivine
Fo
Figure 3.14 – Diagramme normatif Di-Né-Qz-Fo (diopside-néphéline-quartz-
olivine), ou tétraèdre de Yoder & Tilley (1962).
Deux plans critiques, de saturation et de sous-saturation en silice, délimitent trois
ensembles distincts dans le tétraèdre. Ab. albite, Di. diopside, En. enstatite, Fo.
forstérite, Né. néphéline, Qz. quartz.
140
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3.2 • Un magma différencié : le granite
1 2 3 4 5
141
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
142
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3.2 • Un magma différencié : le granite
60
1 2 3 4
20
5 7 8 9 10
A 10 35 65 90 P
10
50
10
60
F
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
143
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
a) Résultats expérimentaux
Les travaux de Tuttle et Bowen (1958) ont clarifié le débat. Ayant observé que la
majorité des granites dans le monde contient plus de 80 % de quartz et de feldspaths
alcalins, ils ont limité leurs expériences au système résiduel synthétique, appelé
haplogranitique, NaAlSi3O8-KAlSi3O8-SiO2-H2O (Fig. 3.16). Ce système présente
un point remarquable, le minimum thermique M, où cristallisent à l’équilibre miné-
raux polymorphes de la silice et feldspaths alcalins. En cristallisant, tout magma sili-
caté expulse un liquide résiduel convergeant vers le point M, qui correspond selon la
nomenclature à une composition de granite à feldspaths alcalins (groupe 1 du
diagramme Q A P, Fig. 3.15).
Or, l’ensemble des compositions de granites et de rhyolites dans le monde coïncide
avec l’ensemble des points M déterminés entre 0,1 et 500 MPa. Tuttle et Bowen, après
avoir vérifié que les granites naturels se comportaient de la même façon que leur
système simplifié haplogranitique, ont conclu que les granites constituent les produits
Q Q
1130˚C
1110˚C 80 80
1000˚C
60 rhyolites et 60
900˚C granites
800˚C
770˚C 500 0b
700˚C 40 b 100 0b 40
745˚C 200 300
0b 0b
400
M 0˚C
80 20 20
0 ˚C
90 syénites alcalines
˚C
845˚C
990
Ab 20 40 60 80 Or Ab Or
20 40 60 80
A B
Figure 3.16 – Évolution des liquides résiduels dans le système SiO2-
KAlSi3O8-NaAlSi3O8-H2O (Qz-Or-Ab-H2O) (Tuttle & Bowen, 1958).
A. Tous les liquides convergent vers le minimum thermique M, qui correspond à
une composition de granite à feldspath alcalin (champ 1 de la Fig. 3.15).
B. L’ensemble des points M, déterminés pour des pressions comprises entre 50 et
400 MPa, coïncide avec celui de la majorité des rhyolites et granites naturels. Noter
le sous-ensemble des syénites alcalines, placé sur la ligne Ab-Or au niveau d’un
« col » thermique.
144
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3.2 • Un magma différencié : le granite
les plus évolués et les plus tardifs de la différenciation des magmas silicatés. L’obser-
vation postérieure, en 1963-1969, de liquide résiduel rhyolitique au sein du lac de
lave d’Alae (Tab. 3.3) confirme que le magma granitique doit être considéré comme
un magma différencié, alors que le magma basaltique est relativement primaire.
Remarquant que les basaltes sont riches en minéraux colorés normatifs (caractère
mésocrate) et les granites en minéraux blancs (caractère leucocrate), Thornton et
Tuttle ont défini l’indice de différenciation D.I. (« Differentiation Index »), tel que :
D.I. = Qz + Or + Ab + Né + Lc (minéraux de la norme CIPW).
Un basalte a un D.I. inférieur à 30 et un granite un D.I. supérieur à 70 (Tab. 3.4
et 3.5).
Cependant, des expériences de fusion partielle de roches crustales ont permis de
fabriquer des magmas granitiques primaires par anatexie (Tab. 2.11), illustrant
parfaitement le caractère ambigu des magmas granitiques, qui peuvent donc être soit
différenciés à partir de magmas basaltiques et d’origine mantélique, soit primaires
par anatexie de formations crustales.
145
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
ab albite NaAlSi3O8
an anorthite CaAl2Si2O8
ap apatite Ca3,08P1,846O8
be béryl Be1,23Al0,89Si2,67O8
co corindon Al5,33O8
cr cryolite Na4Al1,33O8
dpy pyrophyllite déshydroxylée Al1,455Si2,91O8
eu eucryptite Li2Al2Si2O8
gr grossulaire Ca2Al1,33Si2O8
hy orthopyroxène (Mg,Fe)1,33Si2,67O8
il ilménite Fe2,67Ti2,67O8
jd jadéite Na1,33Al1,33Si2,67O8
kts tétrasilicate de potassium K1,78Si3,56O8
lc leucite K1,33Al1,33Si2,67O8
mt magnétite Fe6O8
nds disilicate de sodium Na3,2Si3,2O8
ns silicate de sodium Na2,53Si3,37O8
ntb tétraborate de sodium Na2,286B4,571O8
or sanidine KAlSi3O8
pe pétalite Li0,8Al0,8Si3,2O8
py pyrophyllite Al1,455Si2,94O8, 0,727 H2O
qz quartz Si4O8
sil sillimanite Al3,2Si1,6O8
sp spodumène Li1,33Al1,33Si2,67O8
w eau H2O
zo zoïsite Ca1,28Al1,92Si1,92O8
2. Réactions de spéciations
Certaines espèces correspondent aux phases solides qui cristallisent. Elles ont la même stœchiométrie et
probablement la même structure. D’autres proviennent de la dissociation ou de la recombinaison d’autres
espèces à la suite de réactions, dites de spéciation :
– fusion incongruente d’une phase solide : par exemple, l’albite à 3,33 GPa et 1 370 °C :
1,03 Ab → 0,78 ab + 0,158 jd + 0,062 qz + 0,03 Jd
– interaction entre espèces liquides : ainsi, dans le système KAlSi3O8 – SiO2 – H2O à 1,5 GPa et 1 170 °C :
or + 0,249 qz → 0,687 dpy + 0,562 kts
146
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3.2 • Un magma différencié : le granite
pression kb
40
solidus “humide” liquidus à 5% H2O
= liquidus
30 liquidus à sec
2
20
4
10
3
1
0
500 600 700 800 900 1000 1100 1200
température °C
147
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
pression kb
40
0
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
température °C
Xmole H2O
Figure 3.18 – Solubilité (en fraction molaire) de H2O dans les magmas
silicatés à 1 000 °C, en fonction de la pression (Burnham, 1979).
148
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3.2 • Un magma différencié : le granite
149
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
1 mètre par an) à 10– 10 cm.s– 1 (environ 0,03 mm.a– 1), le taux de nucléation varie de
0 au liquidus à 108 sites.cm– 3 au solidus. La vitesse de croissance est plus faible dans
les systèmes contenant une phase vapeur séparée que dans les systèmes sous-saturés
en eau. Lorsque la surfusion est faible (< 100 °C), la vitesse de croissance atteint sa
valeur maximale alors que le taux de nucléation reste assez bas. Le magma peut cris-
talliser des minéraux de grande taille : même en admettant que les valeurs obtenues
sur système synthétique sont surestimées par rapport aux systèmes naturels, la texture
pegmatitique serait acquise en moins d’un an, la texture grossière en moins d’un mois
et la texture aplitique en moins d’une heure. Pour une surfusion plus forte, dépassant
200 °C, la densité de nucléation devient très forte et prédomine sur la croissance : dans
les conditions proches du solidus, la texture aplitique est toujours présente.
densité de vitesse de
nucléation croissance
(sites par cm3) (cm.s–1)
109
densité
107 10-6
10-7
105
vitess
en fonction de la
103 surfusion (différence
10-9 entre la température du
magma et son liquidus).
Les expériences ont été menées
10 sur des granites à 0,8 GPa et
10-10 3,5 % H2O, les courbes
représentent le comportement
0 200 400
liquidus solidus ∆ T°C des cristaux de feldspath alcalin
(Swanson, 1977).
150
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3.2 • Un magma différencié : le granite
(10– 8 cm.s– 1, soit 3 mm.a– 1). Contrairement à ce que l’on pourrait penser a priori,
les granodiorites porphyroïdes à « dents de cheval », avec des mégacristaux de
feldspath potassique pouvant dépasser 5 cm de long, se forment en conditions de
forte surfusion dans un milieu pauvre en eau.
Il faut retenir de ces travaux essentiels que :
• pour acquérir la texture grenue, les roches plutoniques restent en partie liquides
pendant une durée ne dépassant pas l’ordre de grandeur de l’année ;
• les cristaux les plus grands ne correspondent pas nécessairement à des minéraux
précoces, la taille est seulement inversement proportionnelle à la nucléation ;
• l’eau, en phase vapeur séparée, ralentit la croissance des minéraux.
a) Processus physiques
L’eau est soluble dans les magmas. La solubilité varie en fonction de la pression, de
la température et de la composition du magma. Le système NaAlSi3O8-H2O a été
étudié comme exemple (Fig. 3.18 et 3.21) et tous les autres liquides silicatés peuvent
être assimilés à ce système. La valeur XmH2O mesure la proportion molaire d’eau
contenue dans le liquide, sachant que la masse d’une mole d’eau est de 18,02 g et
celle d’albite de 262,2 g. Pour une teneur en eau donnée, le diagramme (pression,
température) délimite quatre zones distinctes (Fig. 3.21) :
1. une zone où coexistent solide + vapeur : c’est le domaine de l’altération hydro-
thermale et du métamorphisme ;
2. une zone où coexistent solide + liquide : toute l’eau est dissoute dans le liquide ;
3. une zone où la phase liquide renferme toute l’eau ;
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151
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
solidus
pression kb liquidus
20
18
2
liquide silicaté Xmole H2O = 0,6
16
+ solide
14
12
3
10
liquide silicaté
scénario A
8
6
B
solubilité
1
scénario
4
de H2O
solide 4
+ vapeur liquide silicaté
2
+ vapeur
0
600 700 800 900 1000 1100 1200 1300
température °C
Si elle est supérieure, la roche se fracture et forme des brèches hydrauliques, consti-
tuées de fragments anguleux de roches dans une matrice produite par la précipitation
du fluide. Altération hydrothermale et bréchification hydraulique sont deux aspects
des réactions subsolidus subies par un granite au cours de son refroidissement.
B. Le liquide, au cours de son ascension, est d’abord sous-saturé en eau, puis
traverse son seuil de solubilité. Apparaissent alors des bulles de vapeur qui se
rassemblent au sommet de la poche magmatique. Si la pression exercée par les
bulles de vapeur dépasse la résistance du toit, il y a explosion et expulsion jusque
dans l’atmosphère du mélange constitué par les débris du toit pulvérisé, le liquide et
la vapeur : ce sont les nuées ardentes, le liquide brutalement détendu se fige en verre
pour donner les ponces.
Si la pression de fluides est plus faible, le liquide chargé de bulles de vapeur peut
atteindre son solidus et cristalliser. Les bulles de vapeur contiennent de nombreux
éléments en solution qui, lors du refroidissement, précipitent pour donner les miné-
raux caractéristiques des poches pegmatitiques et des filons hydrothermaux associés.
Le dégazage du magma granitique est fréquemment explosif à cause de la grande
viscosité du liquide. Comme ηL est fonction inverse de la teneur en eau dissoute,
plus le dégazage se développe, plus la viscosité du liquide augmente. Des pressions
152
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3.2 • Un magma différencié : le granite
de fluides de 50 à 500 MPa peuvent être induites par l’emprisonnement des bulles de
vapeur dans une armature liquide très visqueuse et provoquer des éruptions explo-
sives catastrophiques. Les brèches pegmatitiques en sont l’équivalent en profondeur
et induisent des séismes. Une partie de cette eau peut ensuite apparaître à la surface,
sous forme thermale comme, par exemple, les geysers.
b) Processus chimiques
À cause de la dissociation thermique de l’eau, il existe des relations étroites entre la
teneur en eau et le caractère redox du milieu. La réaction la plus simple est la
déshydrogénation :
2 H2O → O2 + 2 H2 ↑
À cause de sa petite taille, la molécule H2 se déplace plus facilement que la molé-
cule O2 ou même que l’ion O2–. De ce fait, l’apparition d’une phase vapeur séparée
rend le milieu oxydant. Le caractère oxydant se traduit minéralogiquement par :
• la cristallisation dans le liquide d’oxydes de fer (magnétite Fe3O4, puis hématite
Fe2O3) en présence de silicates magnésiens ;
• l’oxydation de la magnétite précoce en hématite et la coloration en rouge des
roches en conditions subsolidus.
Inversement, si le milieu reste réducteur, les oxydes de fer sont peu abondants et
les silicates s’enrichissent en fer ferreux. Les roches sont sombres ou claires, mais
jamais rouges. Les processus s’expliquent par les réactions suivantes :
• dans un magma sous-saturé en eau :
[2 Fe2+ + 2 OH–] (magma) + 0,5 O2 (fluide)
→ [2 Fe3+ + 2 O2–] (magma)+ H2O (fluide).
L’incorporation d’eau dans le magma favorise la cristallisation de minéraux
ferreux hydroxylés. La perte d’eau se traduit par celle de minéraux ferriques
anhydres.
• dans un milieu sursaturé en eau :
2 Fe2+ (magma)+ [H2O + 0,5 O2] (fluide) → 2 Fe3+ + 2 OH– (magma).
Les minéraux ferriques anhydres coexistent avec les minéraux hydroxylés enri-
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
chis en Mg et Mn.
Dans un magma naturel, la saturation en eau n’est acquise que tardivement. De ce
fait, le milieu magmatique sous-saturé en eau est relativement réducteur, proche du
tampon FMQ (fayalite-magnétite-quartz : 3 Fe2SiO4 + O2 = 3 SiO2 + 2 Fe3O4), avec
un rapport Fe3+ / (Fe2+ + Fe3+) variant entre 0,15 et 0,30, ce qui se traduit au cours de
la cristallisation par un enrichissement en Fe2+ des cristaux silicatés. Lors de l’expul-
sion de la phase vapeur, il devient oxydant, ce qui se traduit par un enrichissement
tardif en Mg et Mn des bords des cristaux (zonation « inverse »), le dépôt massif
d’oxydes de fer et la rubéfaction des roches causée par l’hématite en micro-inclu-
sions dans les cristaux de feldspath.
153
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
154
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3.3 • Volcanisme et produits associés
a) Types d’éruptions
Au cours d’une éruption, sont émises des retombées liées aux explosions, associées ou
non à des écoulements pyroclastiques, des coulées et des extrusions, enfin des gaz et
fumerolles. Les éruptions ont été longtemps classées en quatre types par ordre d’explo-
sivité croissante : hawaïen caractérisé par des laves très fluides, strombolien à bombes
volcaniques, vulcanien à cendres et péléen à nuées ardentes. Ces types ont été définis
d’après quatre volcans références : Hawaï (Pacifique Central), Stromboli et Vulcano
(Iles Éoliennes) et Montagne Pelée (Martinique). La classification a été ensuite amendée
par l’introduction des paramètres caractéristiques des retombées, l’épaisseur, la
dispersion et la fragmentation, qui mesurent l’intensité des éruptions (Fig. 3.22).
100
F surtseyen
ultra-
plinien
vulcanien
50
plinien
strombolien
hawaïen sub-plinien
D
0
0,05 5 500 50000 km2
Figure 3.22 – Types d’éruption volcanique selon la fragmentation (F)
et la dispersion (D) des dépôts (Walker, 1973).
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
L’épaisseur des dépôts varie avec la distance par rapport au cratère, ou bouche
d’émission qui a fonctionné au cours de l’éruption. Les zones d’égale épaisseur
déterminent les isopaques. Le paramètre E mesure l’épaisseur maximale au niveau
de la bouche d’émission, il est en général difficile à mesurer directement et souvent
calculé par extrapolation. La dispersion D est mesurée par la surface délimitée par
l’isopaque 0,01 E. La fragmentation F est déterminée par le pourcentage de maté-
riaux de taille inférieure à 1 mm à l’isopaque 0,1 E. Les valeurs des paramètres D et
F caractérisent le type de l’éruption. Aux types hawaïen, strombolien et vulcanien
déjà définis, s’ajoutent de nouveaux types : surtseyen, d’après l’île de Surtsey,
apparue en 1963 au large de l’Islande, et plinien, d’après Pline qui a décrit en détail
155
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Pyroclaste
non consolidé : consolidé :
mm Ø
téphra roche pyroclastique
< 1/16 >+4 cendre fine cendre fine (poussière) tuf de cendre fine
(grain de poussière) (tuf de poussière)
156
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3.3 • Volcanisme et produits associés
c) Coulées et extrusions
Manifestation classique de l’activité volcanique, la coulée de lave est constituée de
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
157
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
2 η dé
croi
ssan
t
3
4
0 1km
n km
d) Gaz et fumerolles
Des gaz jaillissent constamment d’un volcan, aussi bien au cours des éruptions que
pendant les périodes de repos relatif. La vapeur d’eau y prédomine et, en se détendant
158
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3.3 • Volcanisme et produits associés
dont la température peut atteindre 350 °C. Les métaux dissous, Fe, Cu, Zn, Hg, Ag,
Au, précipitent au contact de l’eau sous forme de sulfures et/ou d’hydroxydes et
forment des édifices poreux de plusieurs mètres de hauteur.
Les gaz continuent de s’échapper longtemps après les éruptions importantes et
forment les fumerolles : mofettes à H2O + CO2, solfatares à H2O + CO2 + H2S.
Ces gaz réagissent avec l’air et déposent des produits solides : soufre natif des
soufrières, sulfates et carbonates des fontaines pétrifiantes. De nombreuses sources
thermominérales sont situées à proximité des zones volcaniques.
La rencontre en profondeur de magma et d’eau plus superficielle provoque les
éruptions explosives hydromagmatiques, y compris dans des volcans à dynamisme
159
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
effusif. De nombreuses éruptions de l’Etna ont projeté des cendres humides sur la
région de Catane, en Sicile orientale, en même temps qu’est apparu un panache
blanc visible à plus de 200 km à la ronde. Après l’éruption, il reste une dépression
circulaire, un maar, dont le diamètre est égal à la profondeur du site d’explosion : les
maars ont été définis dans l’Eifel, en Allemagne, en particulier au Laacher See qui a
9 km de diamètre. Les éruptions hydromagmatiques constituent un risque volca-
nique certain dans les zones à climat humide.
Les magmas arrivent en surface après un trajet important en profondeur et
forment les roches volcaniques. Chaque éruption est caractérisée par son type de
formation et chaque volcan est constitué par une association qui lui est propre.
160
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3.3 • Volcanisme et produits associés
La série de la Chaîne des Puys est caractérisée par la rareté des laves porphy-
riques, à l’exception des termes extrêmes (basalte et trachyte). Les types pétrogra-
phiques sont les suivants, par ordre de différenciation croissante (Tab. 3.8) :
• basalte alcalin, à phénocristaux d’olivine (ol) + clinopyroxène (cpx) et à micro-
lites d’ol + cpx + oxydes de Fe-Ti (ox) + plagioclase (pl) + apatite (ap) ;
• hawaïte, à phénocristaux d’ol (rare) + cpx (pouvant inclure l’amphibole) + ox + pl
et à microlites d’ol + cpx + pl + ox + feldspath alcalin (F alc) + feldspathoïde (foid) ;
• mugéarite, à phénocristaux d’amphibole (amph) + pl + ox + cpx (à inclusions
d’amphibole) + ap et à microlites d’ol (se déstabilisant en pigeonite) + cpx + pl
+ ox + F alc ;
• benmoréïte, de même minéralogie, contenant en plus des phénocristaux de zircon
et des microlites de minéraux polymorphes de la silice (tridymite, cristobalite) ;
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Qz
18
16
14 7
12
10
4
6
2
30 40 50 60 5 70 80 90 100
0
3 D.I.
2 4
4 2
6 1
10
Ne
Figure 3.24 – Teneurs normatives en néphéline (Ne) ou quartz (Qz) des laves
de la Chaîne des Puys en fonction de l’indice de différenciation (D.I.)
(Maury et al., 1980).
Les numéros 1 à 7 correspondent aux roches des tableaux 3.8 et 3.9.
Les calculs font apparaître que 38,3 % de laves intermédiaires peuvent être produites
à partir d’un magma basaltique par séparation de 4,8 % d’olivine, 4,6 % de magnétite,
26 % de clinopyroxène, 19,2 % de plagioclase et 7,1 % d’amphibole. La cristallisation
fractionnée est confirmée par la présence d’enclaves cumulatives ayant cette minéra-
logie dans les benmoréïtes et les trachytes. Si 38,3 % de laves intermédiaires sont issues
de la différenciation de 100 % de magma basaltique et comme leur répartition actuelle
dans la Chaîne des Puys est respectivement de 10 % et 90 %, cela implique que 22,5 %
du magma basaltique se sont différenciés en profondeur et que 77,5 % sont arrivés
directement en surface au cours d’éruptions fissurales.
162
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3.3 • Volcanisme et produits associés
F1 = proportion de liquide fils issu du liquide parent (par exemple, 79,73 % de liquide CP4 sont issus de
100 % de liquide CP3)
F2 = proportion de liquide fils issu du liquide primitif CP1 (par exemple, 38,29 % de liquide CP4 sont issus
de 100 % de liquide CP1). F2 diminue de façon continue au cours de la différenciation.
Σr2 = somme des carrés des résidus pour tous les éléments majeures. Le résidu est défini par r = teneur
calculée – teneur réelle.
CP1 à CP7. Laves de la Chaîne des Puys, cf. Tab. 3.8
• dans les champs S (saturés en silice), une roche est sodique si Na2O – 2 ≥ K2O (en
poids) ; elle est potassique si K2O ≥ Na2O – 2 (en poids) ;
• une roche est hyperalcaline si [Na2O + K2O] > Al2O3 (en moles) (présence d’ægyrine
Ac et de disilicate de sodium Ns, absence d’anorthite An dans la norme CIPW) ;
• une roche est métalumineuse si [Na2O + K2O] ≤ Al2O3 ≤ [Na2O + K2O + CaO]
(en moles) (présence d’anorthite An et de clinopyroxène Di dans la norme CIPW) ;
• une roche est hyperalumineuse si Al2O3 > [Na2O + K2O + CaO] (en moles) (présence
d’anorthite An et de corindon Co, absence de clinopyroxène Di dans la norme CIPW).
163
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Na2O+K2O (poids%)
16
A
14
Ph
12 F
U3 A. Nomenclature des roches volcaniques
T
10 et définition des termes : ultrabasique,
U2
S3 basique, intermédiaire et acide (Le Bas
8 R
et al., 1986). F : roches à feldspathoïdes
U1 S2 (foïdites ou feldspathoïdites), Pc :
6
S1 picrobasalte, U1 à U3 : roches alcalines
O3 sous-saturées en silice, Ph : phonolite, S1
4 O2
O1 à S3 : roches saturées en silice, T :
B
2
Pc trachyte et trachydacite, B : basalte, O1 à
0
O3 : roches sursaturées en silice, R :
35 39 43 47 51 55 59 63 67 71 75 79 rhyolite. Il n’y a pas de réelle limite entre F
SiO2 (poids%)
et U1 (téphrite et basanite).
ultrabasique basique intermédiaire acide
45 52 63
Na2O+K2O (poids%)
16
B
phonolite
14
12 feldspathoïdite téphri-
phonolite
trachyte
10 phono-
téphrite trachy-
8 ansésite rhyolite
basanite ta b
téphrite
6 tb
B. Nomenclature des roches volcaniques
basaltique
4
dacite
basalte andésite Abréviations : tb. trachybasalte, ta b.
basalte
picro
2
trachy-andésite basaltique.
0
35 39 43 47 51 55 59 63 67 71 75 79
SiO2 (poids%)
Na2O+K2O (poids%)
16
C
phonolite
14 0.5
0.4
12 feldspathoïdite 0.4
trachyte
10
0.35 0.5
0.3
8
0.4 rhyolite
0.3 0.35 0.5
6
0.2 0.3
0.2
4 0.35 0.4
0.2 0.3 andésite dacite C. État d’oxydation (rapport Fe2O3 / FeO)
2 0.15 0.15 basalte des roches volcaniques (Middlemost,
0
1989).
35 39 43 47 51 55 59 63 67 71 75 79
SiO2 (poids%)
164
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3.3 • Volcanisme et produits associés
Parce qu’elles sont émises à l’air libre ou au contact de l’eau, les roches volcaniques
sont fréquemment oxydées et/ou hydratées. De ce fait, leurs compositions actuelles ne
correspondent pas exactement à celles des magmas qui leur ont donné naissance. On consi-
dère un échantillon comme « frais » s’il contient moins de 2 % H2O+ et de 0,5 % CO2.
Le rapport Fe2O3/FeO est variable selon la nature de la roche (Fig. 3.25C). Les
valences du fer dans un magma sont déterminées par le potentiel redox des tampons
qui varient selon les magmas. Les magmas ultrabasiques (< 45 % SiO2) sont les plus
réduits (Fe2O3/FeO de l’ordre de 0,15), alors que les magmas acides (> 63 % SiO2) sont
les plus oxydés (Fe2O3/FeO de 0,4 à 0,5). Le rapport Fe2O3/FeO joue un rôle important
dans la nature et l’abondance des minéraux colorés de la norme CIPW : les oxydes (ilmé-
nite FeTiO3 et magnétite Fe3O4, parfois hématite Fe2O3) sont calculés avant les sili-
cates contenant Fe2+ (pyroxènes, olivine). Si Fe2O3 est élevé dans l’analyse chimique, la
quantité de silicates ferreux calculés est réduite, ce qui consomme peu de SiO2 dans
le calcul. Par conséquent, une roche oxydée contient plus de quartz normatif que la
même roche à l’état réduit. Dans certains cas, un magma sous-saturé en silice peut
donner par oxydation une roche artificiellement sursaturée. Afin de comparer entre
elles les séries magmatiques, il convient donc de calculer des normes standardisées
après recalcul des rapports Fe2O3/FeO selon les indications de la figure 3.25C et élimi-
nation des échantillons montrant de trop fortes valeurs de H2O+.
12
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
10
8
roches alcalines
6
roches subalcalines
4
2
Figure 3.26 – Roches
alcalines et subalcalines dans
le diagramme TAS, d’après
0
35 45 55 65 75
SiO2 Miyashiro (1978).
165
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
que les roches appartenant à cette association sont génétiquement liées. Il en est de
même pour les différentes séries subalcalines.
Une deuxième distinction repose sur l’environnement géodynamique. Les magmas
mis en place lors d’une phase de construction d’une chaîne de montagne sont dits
orogéniques ; dans le cas contraire, ils sont dits anorogéniques. Des types transition-
nels peuvent exister. Comme les deux types de classification sont indépendants, il
est possible de distinguer plusieurs séries magmatiques :
• les séries anorogéniques regroupent les séries alcalines s.l. et tholéiitiques ;
• les séries orogéniques sont calco-alcalines, shoshonitiques et ultrapotassiques.
166
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3.3 • Volcanisme et produits associés
série
tholéïtique
série
alcaline
alcaline
série calco-
A M
Figure 3.27 – Évolutions des séries anorogéniques (cf. Tab. 3.11).
A. Diagramme TAS. La limite de Miyashiro (cf. Fig. 3.26) est indiquée en tiretés.
Noter le caractère alcalin de la plupart des séries anorogéniques.
B. Diagramme AFM (Na + K) – (Fe + Mn) – Mg. Les séries anorogéniques suivent un
trajet différent de celui des séries orogéniques.
1 2 3 4 5 6 7 8
167
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
9 10 11 12 13 14 15 16
Série alcaline sous-saturée en silice (tendance Kennedy) de Tahiti, Pacifique Sud (McBirney, 1984)
9. ankaramite porphyrique à pyroxène ± olivine (picrobasalte, diagramme TAS)
10. basanite
11. phonolite
Série fortement alcaline et carbonatitique d’Oldoinyo Lengaï, Tanzanie (Dawson, 1962)
12. néphélinite (foïdite, diagramme TAS)
13. phonolite
14. natrocarbonatite, éruption de 1960
Série ultrapotassique (foïdites) de la branche centre-ouest du Rift Africain (McBirney, 1984)
15. katungite = mélilitite à kalsilite-leucite-olivine, Ouganda
16. mafurite à biotite = kalsilitite à olivine-pyroxène, Ouganda
168
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3.3 • Volcanisme et produits associés
Des séries encore plus fortement alcalines sont caractérisées par de fortes
teneurs en K2O telles que K2O ≥ Na2O. Elles sont ultrapotassiques, permettant la
cristallisation de leucite, de pseudo-leucite (mélange [néphéline + sanidine
+ analcime] formé par déstabilisation de la leucite au cours du refroidissement)
et/ou de kalsilite, équivalent potassique de la néphéline. Le déficit en silice est tel
que des minéraux comme la mélilite et la pérovskite peuvent cristalliser. Comme
elles sont très rares, ces types de roches ont des noms locaux (Tab. 3.10) et
occupent surtout le champ F des foïdites du diagramme TAS (Fig. 3.25A) : leuci-
tite – mélilitite – néphélinite.
Parmi les laves les plus singulières du Rift Est-Africain, les natrocarbonatites
formées de carbonates calco-sodiques sont actuellement produites par l’Oldoinyo
Lengaï (Tanzanie). Depuis 1960, toutes les éruptions, après un début hydromag-
matique, se poursuivent par l’émission de coulées de laves de type pahoehoe à des
températures relativement basses de l’ordre de 500-600 °C. Les laves porphy-
riques sont constituées de phénocristaux de grégoryite Na2CO3 et de nyéréréite
Na2Ca(CO3) 2 et d’une pâte formée d’agrégats microcristallins de fluorite CaF2, de
grégoryite, de BaCO3 et de chlorures de Na et K. À côté des natrocarbonatites,
l’association volcanique d’Oldoinyo Lengaï comprend une série fortement alca-
line allant des néphélinites aux phonolites (Tab. 3.10). L’absence de lave intermé-
diaire entre les compositions silicatées et carbonatées suggère que les deux
types de magmas sont immiscibles.
2. Séries orogéniques
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
Les séries orogéniques se distinguent des précédentes par le fait que les roches
intermédiaires sont abondantes et peuvent prédominer sur les roches basiques
et acides. Appelées généralement calco-alcalines à cause des nombreux
phénocristaux de plagioclase, les roches ont comme minéral caractéristique
l’orthopyroxène. Il n’y a pas d’enrichissement en fer (Fig. 3.27B), les teneurs
en TiO2 sont faibles (≤ 1,5 %) et les teneurs en Al2O3 sont toujours fortes
(Tab. 3.11).
169
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Na2O+K2O (poids %)
12
téphrite à leucite du
10 Vésuve
limite alcalin/subalcalin
suite shoshonitique de Miyashiro
8 du Montana
suite shoshonitique
A 6 du Pacifique ouest suite calco-alcaline
des cascades
0
45 50 55 60 65 70 75
SiO2 (poids %)
K2O (poids %)
6
5
suites shoshonitiques
B 3
suites calco- alcalines
potassiques
170
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3.3 • Volcanisme et produits associés
1 2 3 4 5 6 7 8 9
SiO2 51,04 54,00 66,27 51,70 60,40 65,60 73,00 49,86 53,99
TiO2 0,87 1,31 0,69 1,20 0,90 0,70 0,30 0,76 1,06
Al2O3 17,12 14,84 13,23 17,50 17,50 16,40 14,20 11,07 17,82
FeO* 10,48 12,82 8,65 9,50 6,40 4,70 2,40 8,80 7,58
MnO 0,19 0,22 0,17 0,20 0,10 0,10 0,10 0,17 0,12
MgO 5,91 4,17 0,85 6,20 2,80 1,70 0,50 14,60 4,25
CaO 11,76 8,86 4,06 9,00 6,20 4,40 1,70 8,38 6,15
Na2O 1,96 2,82 4,16 3,70 4,30 4,60 4,60 1,96 3,30
K2O 0,37 0,60 1,57 0,80 1,20 1,60 3,10 3,53 4,53
P2O5 0,07 0,14 0,20 0,30 0,20 0,20 0,10 0,50 0,68
D.I. 23,90 35,10 66,80 37,35 58,40 70,67 87,76 36,76 57,43
Série tholéiitique d’arc de l’archipel des Sandwich du Sud, Océan Atlantique Sud (Baker, 1978)
1. basalte tholéiitique, île Visokoi
2. andésite basaltique, île Visokoi
3. dacite pauvre en K, île Cook
Série calco-alcaline quaternaire « normale » des Hautes Cascades, Oregon (USA) (McBirney, 1984)
4. basalte riche en Al
5. andésite
6. dacite
7. rhyolite
Série shoshonitique du Montana et du Wyoming (USA) (McBirney, 1984)
8. absarokite (trachybasalte potassique, diagramme TAS), Monts Absaroka
9. shoshonite, Monts Absaroka
10 11 12 13
171
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
Les différentes séries, subalcalines à alcalines (Fig. 3.28A), ont des teneurs
comparables en Na2O, mais diffèrent par K2O. Aussi a-t-on pris l’habitude d’utili-
ser pour les séries orogéniques le diagramme K2O – SiO2 (Fig. 3.28B).
Les séries subalcalines contiennent toujours l’association :
basalte riche en Al → andésite basaltique → andésite → dacite → rhyolite
et sont subdivisées en :
– série calco-alcaline riche en K (K2O ≥ 1,5 %) ;
– série calco-alcaline « normale » ;
– série tholéiitique pauvre en K (K2O ≤ 2 %) ou encore série tholéiitique d’arc insu-
laire, qui ne contient pas ou peu de rhyolite (SiO2 ≤ 70 %) :
La série shoshonitique est alcaline (Fig. 3.28A) et potassique (Fig. 3.28B). Son
caractère sous-saturé en silice est lié à l’abondance en K2O (souvent ≥ 3 %). La
série shoshonitique est formée par l’association :
absarokite → shoshonite → banakite → latite
Des associations encore plus alcalines, ultrapotassiques, peuvent exister dans
certains volcans, comme le Vésuve, qui émet des laves allant des téphrites aux
phonotéphrites à leucite.
D’après les observations nombreuses recueillies depuis des siècles sur l’activité
des volcans, il est clair que les processus de différenciation qui aboutissent à l’indi-
vidualisation des liquides émis en surface à l’état de laves sont achevés au moment
même de l’éruption. Il en résulte que l’essentiel des mécanismes pétrologiques à
l’origine des différentes séries volcaniques prend place en profondeur, c’est-à-dire
dans les étages plutoniques. Pour compléter la connaissance des processus à
l’origine des éruptions volcaniques, l’étude des roches plutoniques est nécessaire car
elle apporte des éléments supplémentaires d’information.
172
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3.4 • Mise en place des plutons
a) Contexte tectonique
• En milieu cassant
Dans un champ de contraintes anisotrope, le magma s’oriente perpendiculairement à
l’axe de la contrainte compressive minimale σ3. Dans le cas d’un filon vertical, σ3
est associé dans le plan horizontal soit à σ2 (régime extensif), soit à σ1 (régime
décrochant). Dans le cas d’un sill horizontal, σ3 est vertical (régime compressif). Le
critère d’orientation des filons dans le champ de contrainte est déterminé par le
nombre sans dimension :
λ = (ηL/ ∆σ)n (v / d)
ηL, viscosité du magma ;
∆σ, différence entre les deux contraintes horizontales ;
n, constante variable selon l’état du fluide ;
(magma pauvre en cristaux newtonien : n = 1 ;
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
173
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
La probabilité qu’un magma arrive en surface pour donner des laves est limitée
par la viscosité critique de 104,6 Pa.s : dans ces conditions, λ = 10– 6,4, ce qui signifie
que tout magma à l’origine des coulées de laves monte vers la surface sous la forme
de filon. Les formations hypabyssales ou subvolcaniques correspondent aux filons
d’alimentation des volcans sus-jacents.
Dans le cas de liquides granitiques, λ pour η = 106 Pa.s est de 10– 5. Les granites
forment donc également des filons (corps intrusifs bidimensionnels) dans la croûte
supérieure cassante. Un magma chargé en cristaux, donc plus visqueux, a un nombre
λ qui est à peine plus élevé, car la vitesse diminue considérablement.
• En milieu ductile
Les paramètres physiques de l’encaissant plastique sont prépondérants, soit :
λ = ηc v / d ∆σ, avec ηc, viscosité de l’encaissant.
Pour : ηc = 1021 Pa.s (milieu ductile), d ≥ 10 km, g = 10 m.s– 2 et ∆σ = 10 MPa, la
condition λ << 1 est remplie pour une vitesse v << 10– 8 cm.s– 1 (soit << 3 mm.a– 1).
La vitesse d’ascension v est donnée par la loi de Stokes : v = 1/3 g (ρc – ρL) R2/ηc
(R, rayon horizontal du corps magmatique ; ρc et ρL, densités respectives de l’encais-
sant et du magma). Dans le cas d’un liquide basique, avec ρc – ρL ≈ 100 kg.m– 3, la
condition λ << 1 est remplie si R << 17 km. Pour un magma acide, avec ρc – ρL
≈ 500 kg.m– 3, la condition λ << 1 est remplie si R << 7,75 km. Un corps magma-
tique de taille kilométrique peut donc prendre une forme de feuillet en milieu ductile.
b) Paramètres caractéristiques
• Épaisseur
Du fait des capacités thermiques de l’encaissant et du magma, plusieurs cas se
présentent :
1. La fissure est trop mince, toute la chaleur du liquide (énergie thermique interne et
chaleur latente de cristallisation) se transmet à l’encaissant et le liquide fige
brutalement (surfusion élevée et forte nucléation cristalline), scellant ainsi la
fissure.
2. La fissure est suffisamment large pour que le liquide puisse circuler librement. Si
les échanges thermiques sont tels que la température du liquide diminue très
lentement (faible surfusion, donc faible nucléation), l’écoulement est stable
pendant la durée de l’intrusion.
3. La largeur du conduit est telle que les apports de chaleur par le liquide surchauffé
sont plus importants que les pertes aux épontes. La température du magma
augmente et provoque le phénomène d’emballement thermique. Les cristaux
présents peuvent se dissoudre dans le liquide.
On peut définir pour un filon deux valeurs critiques d’épaisseur :
• l’épaisseur critique de trempe au-dessous de laquelle le liquide se solidifie rapide-
ment. Elle est évaluée à 88-100 cm. Les filons d’épaisseur infra-métrique seraient
174
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3.4 • Mise en place des plutons
donc limités vers le haut et le magma qui les remplit ne pourrait pas atteindre la
surface.
• l’épaisseur critique d’emballement thermique au-dessus de laquelle le magma
augmente de température. Elle est de 1,16 m pour un magma basaltique avec une
viscosité de 70 Pa.s à 1 100 °C : l’emballement thermique est alors de + 80 °C.
Dans le cas d’un magma granitique avec une viscosité de 5.104 Pa.s à 750 °C, elle
est évaluée à 9 m, l’emballement thermique est moins fort : + 37 °C. La valeur
calculée de l’emballement thermique correspond à peu près au demi-intervalle de
température séparant liquidus et solidus des magmas.
Par conséquent, les filons très épais (plus de 1,5 m pour les filons basiques, plus
de 10 m pour les filons acides) ont atteint certainement la surface. Les cristaux
précoces refondent, sauf si la vitesse d’ascension est supérieure à la vitesse de
dissolution : dans ce cas, ils présentent un habitus arrondi lié à la dissolution. Dans
un champ filonien, les premiers filons sont fréquemment porphyriques (temps insuf-
fisant pour dissoudre complètement les phénocristaux), les derniers sont presque
toujours aphyriques.
• Propriétés thermiques
Les épaisseurs critiques dépendent surtout des propriétés thermiques du magma et
de la température de l’encaissant. Par diffusion, les différentes propriétés des deux
corps en présence varient, en particulier la température (diffusion thermique) et la
composition chimique (diffusion chimique). Les équations régissant les deux types
de diffusion sont de forme identique. Dans le cas de la diffusion thermique, elles
obéissent aux lois de Fourier.
La première loi s’applique à un état constant : q = – K (dT/dz), la deuxième loi
s’applique à une diffusion variant avec le temps : ∂T/∂t = κ (∂2T/∂z2). Les solutions
de l’équation différentielle du second degré peuvent être trouvées dans quelques cas
spécifiques. Les solutions les plus simples ignorent le phénomène de cristallisation
avec libération de la chaleur latente de fusion L et les effets de convection qui appa-
raissent dès que le nombre de Rayleigh est suffisamment grand.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
175
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
La fonction erf, encadrée par les valeurs : erf 0 = 0 et erf ∞ = 1, est monotone,
telle que erf (– u) = – erf u. Pour un magma caractérisé par Tm = 1 000 °C et κ =
4 10– 3 cm2.s– 1 et un encaissant à Te = 100 °C (environ 3 km de profondeur), un
point situé à 1 cm du contact sera porté à la température 900 °C en 1 h 46 min A
1 m du contact, il faudra un peu plus de 2 ans pour arriver au même résultat.
La température diminue aussi bien dans le filon que dans l’encaissant et, pour
t # 0, la température au contact (x = 0) reste constante et égale à 0,5 (Tm + Te).
Comme on suppose que κ est identique des deux côtés de l’éponte, le refroidis-
sement du magma dans le filon s’effectue à la même vitesse que le réchauffe-
ment de l’encaissant. Ceci est en toute rigueur valide seulement pour T dans le
filon < Tsolidus. Pour T > Tsolidus, le problème se complique par la libération de la
chaleur latente de fusion L qui permet à la température de baisser moins rapide-
ment que par la seule diffusion.
Si l’on tient compte de la chaleur latente de cristallisation L et de la durée d’intru-
sion τ, deux durées de solidification peuvent être calculées : la durée maximale
tmax pour un refroidissement sans convection, la cristallisation s’étendant des
épontes au cœur du filon, et la durée minimale tmin pour un refroidissement
avec convection et température uniforme dans la caisse filonienne. En
pratique, tmax = 3 tmin. La durée maximale tmax dépend de la durée d’intrusion τ et
de l’épaisseur du filon (Fig. 3.29). Pour des filons d’épaisseur supérieure au
mètre, la durée de solidification est à peu près égale à celle de la durée
d’intrusion.
Dans la nature, il est rare que les filons soient solitaires. Dans un champ filonien où
chaque filon a une épaisseur a et est séparé des filons voisins par une distance b,
on définit l’espacement d’injection I = b/a > 2 (non recouvrement). Considérons
des filons de 10 m d’épaisseur avec Tm = 1 100 °C, espacés de 100 m (I = 10) ou
de 500 m (I = 50) dans un encaissant à Te = 0 °C. Si la mise en place des filons est
simultanée, deux périodes successives peuvent être mises en évidence :
• 1re période : chaque filon refroidit comme s’il était seul, respectivement en 16
ans et en 480 ans. C’est au cours de cette période que le magma se solidifie
complètement puisqu’à la fin de la période, la température est abaissée à
respectivement 440 °C et 81 °C.
• 2e période : la température dans la zone occupée par le champ filonien devient
uniforme, en 240 ans ou en 520 ans, puis reste à peu près constante (respec-
tivement 360 °C et 72 °C), tandis qu’à l’extérieur, le refroidissement se pour-
suit. Après respectivement 1 250 ans et 36 700 ans, le champ filonien
refroidit comme s’il consistait en une masse homogène.
176
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3.4 • Mise en place des plutons
t max ans
105
=105 ans
104
=104 ans
103
=103 ans
100
=100 ans
10
=10 ans
=1 an
=0
0,1
t critique l/2m
0,01
0,1 1 10 100
177
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
andésite basaltique, selon le diagramme TAS. Cependant, le sill est loin d’être
homogène (Fig. 30, Tab. 36). Les minéraux constants (plus de 90 % en volume de la
minéralogie primaire) sont le plagioclase, l’augite + l’orthopyroxène ou la pigeo-
nite, les oxydes de Fe-Ti. Le plagioclase varie en quantité de 40 % de la roche dans
la couche à olivine à environ 65 % sous l’horizon-sandwich, alors que les pyroxènes
forment 30 à 50 % des roches. De la base (0 m) au sommet (342 m), on observe la
stratigraphie suivante :
• bordure figée inférieure (0-9 m) à augite, orthopyroxène ± olivine et plagioclase.
• formations de plancher (9-290 m) :
couche riche en olivine (jusqu’à 25 %) (9-19 m) ;
178
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3.4 • Mise en place des plutons
1 2 3 4 5 6 7 8
1. moyenne de toutes les analyses des roches du sill (andésite basaltique, diagramme TAS)
2. bordure figée inférieure (1er venue) (andésite basaltique, diagramme TAS)
3. couche à olivine (2e venue)
4, 5 et 6. autres formations du plancher (3e et 4e venues)
7. horizon-sandwich (accumulation de liquide résiduel) (limite andésite-benmoréite, diagramme TAS)
8. bordure figée supérieure (1e venue) (andésite basaltique, diagramme TAS)
La série magmatique constituée par les roches du Sill de Palisades est tholéiitique et différenciée : la
composition des liquides évolue d’andésite basaltique tholéiitique (analyses n° 1, 2 et 8) à l’islandite
(analyse n° 7). Les autres analyses correspondent à des mélanges [liquide + cumulat]. Comparer la compo-
sition la plus différenciée (analyse n° 7) avec l’islandite de Thingmuli, en Islande (Tab. 3.10, analyse n° 2).
Le sill a été le siège d’une importante convection (v ≈ 5 mm.s– 1), les cristaux
précipitant dans une couche-limite thermique au toit, mais pour la plus grande partie
se rassemblant au plancher sous forme de suspension avec 50 à 60 % de liquide
interstitiel. La zone convective entièrement liquide, située entre les formations du
plancher et du toit, a diminué de volume pour disparaître au bout de 700 ans. Le
liquide interstitiel dans les zones cristallines a été réduit par compaction à 40-50 %.
Le liquide expulsé a alors migré vers l’horizon-sandwich, caractérisé par une
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
phase fluide abondante (H2O et anions dissous Cl– ± F–) et de fortes teneurs en
éléments incompatibles. L’ensemble du processus de cristallisation a duré au maximum
1 000 ans (Fig. 3.31).
179
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
300
250
A 200
150
100
50
0
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8
Mg /Mg + Fe
300
250
200
B
150
100
50
0
1 10 100 1000
Cr (ppm)
180
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3.4 • Mise en place des plutons
181
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
a) Le complexe du Bushveld
Le complexe précambrien (2,06 Ga) du Bushveld, situé en Afrique du Sud, constitue
l’intrusion basique litée la plus vaste connue dans le monde. Long de 450 km d’est
en ouest et large de 270 km du nord au sud, il est épais de 7 200 à 8 100 m, soit un
volume de 370 000 à 600 000 km3. Il recoupe une épaisse série volcanique (également
8 000 m d’épaisseur) de même âge, allant des basaltes à des rhyolites, et il est traversé
au centre par des granites alcalins, toujours de même âge.
Sur le terrain, la formation de Rustenberg ressemble à une série sédimentaire avec
stratification bien développée. Le log stratigraphique présente des horizons remar-
quables qui se suivent sur des centaines de kilomètres : la Couche Principale de
Chromite (« Main Chromite Seam »), le Banc de Merensky (« Merensky Reef ») et
le Niveau Principal de Magnétite (« Main Magnetite Layer »). La série est incom-
plète, car il manque les formations du toit. Elle est subdivisée en zones, selon la
présence ou l’absence de phases minérales caractéristiques, et comprend, de la base
au sommet (Fig. 3.32) :
• la zone de bordure (= « Marginal Zone » MgZ), épaisse de 0 à 800 m, contient l’asso-
ciation olivine Fo88 + orthopyroxène + clinopyroxène + chromite ± plagioclase An80.
182
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3.4 • Mise en place des plutons
• la zone inférieure (= « Lower Zone » LZ), épaisse de 820 à 1 300 m, est subdivi-
sée en :
pyroxénite (520 à 800 m) à orthopyroxène dominant ;
harzburgite (300 à 500 m) à olivine magnésienne + orthopyroxène + chromite.
• la zone critique (= « Critical Zone » CZ), de 1 300 à 1 800 m d’épaisseur, présente
un litage modal marqué par la répétition de niveaux de pyroxénite, norite et anor-
thosite. À l’intérieur de cet ensemble, trois groupes, inférieur, moyen et supérieur,
de bancs de chromitite FeCr2O4 à peu près pure ont été exploités pour le chrome
et les métaux du groupe du platine. La zone est subdivisée en deux par l’appari-
tion du plagioclase, avec :
une pyroxénite inférieure (780-800 m) sans plagioclase et avec un peu d’olivine ;
une norite supérieure (520-1 000 m) à plagioclase calcique + orthopyroxène +
chromite, l’olivine est intermittente et le clinopyroxène apparaît vers le sommet.
• le Banc de Merensky, épais de seulement 1 à 5 m mais observé en surface ou par
sondage sur plus de 300 km de distance, est constitué de l’assemblage orthopy-
roxène + olivine Fo68 + chromite + sulfures. Il est exploité en mine de façon
intense pour les métaux du groupe du platine. Plus de 80 % des réserves mondiales
reconnues en platine s’y trouvent concentrées.
• la zone principale (= « Main Zone » MaZ), épaisse de 3 000 à 3 400 m, est carac-
térisée par l’absence des oxydes, chromite et magnétite, et subdivisée en sous-
zones de norite et gabbro-norite.
• la zone supérieure (= « Upper Zone » UZ), épaisse de 1 700 à 2 000 m, se carac-
térise par la présence de la magnétite. Elle est subdivisée en 3 sous-zones a, b et c
par l’apparition de l’olivine riche en fer Fo43 dans la sous-zone b (niveau 6 000 m)
et celle de l’apatite dans la sous-zone c (niveau 6 400 m). La magnétite forme
22 couches (« Magnetite Layers »), tantôt mono-minérales, tantôt biphasées à magné-
tite + plagioclase, d’épaisseur décimétrique à métrique. Elle est toujours exploitée
pour le vanadium. Les roches les plus différenciées sont situées au sommet de la
pile. Ce sont des granophyres de composition monzogranitique qui contiennent
l’assemblage plagioclase An30 + fayalite Fo0 + hedenbergite + magnétite +
apatite + micropegmatite graphique [quartz + feldspath potassique].
Les trois types de litages sont visibles : litage modal centimétrique à métrique, les
lits pouvant être mono-minéraux, litage de phase hecto- à kilométrique et litage
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
183
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
b) Le complexe de Skaergaard
Situé dans un fjord de la côte est du Groenland, le complexe de Skaergaard est
certainement l’un des mieux étudiés dans le monde depuis sa découverte et les
premiers travaux en 1939. Mis en place à l’Éocène, il recoupe des trapps basaltiques
de même âge et de même chimisme. L’érosion permet d’observer sur 11,5 km de
longueur nord-sud et 8,5 km de largeur est-ouest plus de 3 200 m d’épaisseur
d’affleurements rafraîchis par les glaciers. Il est recoupé par le sill de Basistoppen,
qui présente une évolution identique depuis des gabbros magnésiens à la base
jusqu’à des ferrogabbros au sommet, et par des sills granophyriques, dont le plus
important et le plus siliceux est le sill de Tinden.
Le complexe est limité aux murs par une bordure figée épaisse, constituant le groupe
marginal de bordure (= « Marginal Border Group » MBG), cristallisant depuis le contact
vers le cœur du complexe. À l’intérieur, plusieurs séquences stratigraphiques ont été
définies avec, de la base (altitude relative 0 m) au sommet (Fig. 3.33) :
Altitude à partir
de la base
ultra α
An 69
Groupe supérieur α
3000 de bordure UBG
An 54
β
horizon An 44
γ wollastonite+
sandwich An 69 Fo 0
SH c
wollastonite–
2000
Zone supérieure b
UZ apatite–
a
olivine– An 44 Fo 36
Zone moyenne
MZ
1000
olivine+ An 53 Fo 52
c magnétite–
Zone inférieure b
LZ augite–
a An 66 Fo 67
0
Zone cachée HZ
184
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3.4 • Mise en place des plutons
185
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
186
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3.4 • Mise en place des plutons
Altitude au-dessus
de la base
1000 monzonite
ZC faciès basiques
métasomatisés
en bordure de la
monzonite
Série litée
supérieure
ZB
800 olivine+
orthopyroxène–
ZA3
600
ZA2 apatite–
orthopyroxène+
Série litée
400 inférieure
ZA
ZA1
200
stratigraphique du complexe du ?
Peloso, Corse (Platevoet, 1991).
d) Origines du litage
La ressemblance des litages magmatiques avec les structures sédimentaires a fait
penser que la ségrégation par gravité de particules solides dans le magma fluide
jouait un rôle essentiel. Les progrès des études expérimentales en dynamique des
fluides avec des paramètres rhéologiques comparables à ceux des magmas ont
montré que d’autres origines sont également possibles.
187
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
188
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3.4 • Mise en place des plutons
unité n+1
liquides résiduels
densité du densité du densité du densité du densité du
liquide liquide liquide liquide liquide
unité n
accumulation de cristaux en base de banc extraction de liquide résiduel du
cumulat en voie de compaction
cristaux intercumulus
instabilité gravitaire et arrivée
sommet de banc du liquide Ln+1
Figure 3.35 – Formation d’un banc dans une intrusion basique litée (Platevoet, 1991).
Figure 3.36 – Mode de formation des caldeiras et des complexes annulaires par
subsidence souterraine, selon l’exemple de Glen Coe (Écosse) (Maufe et al., 1909).
189
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
En Corse, la période allant du Permien moyen au Trias a été marquée par une acti-
vité magmatique très importante avec volcanisme et plutonisme synchrones. Le
relief et l’érosion permettent d’observer les complexes annulaires sur plus de
3 000 m de dénivellation. En surface, les roches volcaniques (basalte-hawaïte-rhyo-
lite) remplissent de vastes caldeiras (8 à 20 km de diamètre).
190
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3.4 • Mise en place des plutons
qui s’effondre dans la chambre magmatique profonde, à la manière d’un piston dans
un cylindre de moteur à explosion.
• les intrusions radiaires verticales, plus rares, occupent les fractures de tension
hydraulique qui se forment périodiquement sous l’action de la poussée vers le haut
du magma.
FC
FR C
0 5 km DR
Bloc subsident
Chambre magmatique
1 2 3 4 5
Figure 3.37 – Reconstitution au Permien supérieur de l’architecture du
massif de Cauro-Bastelica, Corse (Bonin, 1980).
Au sommet, une caldeira C, accidentée par un dôme résurgent DR, remplie par des
formations rhyolitiques ignimbritiques (1) et alimentée par des filons (2) radiaires
(FR) ou en feuillets coniques (FC). En dessous, complexe annulaire constituée de
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
191
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
192
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3.4 • Mise en place des plutons
193
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
rien n’indique qu’un corps magmatique sphérique ayant cette taille puisse exister
dans la croûte inférieure.
• Structures et déformations
Les durées calculées sont suffisantes pour que le magma, originellement liquide, ait
pu refroidir et se charger peu à peu en cristaux, le corps terminant son ascension à
l’état solide. Les contraintes appliquées peuvent alors être enregistrées dans le corps
magmatique et les formations encaissantes. L’orientation planaire et linéaire des
cristaux qui en résulte est appelée fluidalité magmatique. Les structures de fluidalité
magmatique (Fig. 3.38) consistent en :
un plan (PFM), matérialisé par la disposition des cristaux plats ou tabulaires
(feldspaths, micas), qui définit la foliation magmatique ;
une direction (DFM), marquée dans le plan de fluidalité par l’allongement des
cristaux de feldspath, la disposition linéaire des cristaux aciculaires (amphi-
bole) et la disposition en zone autour d’un axe des cristaux plats (micas), qui
définit la linéation magmatique.
2km
0
194
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3.4 • Mise en place des plutons
et montre une structure interne complexe, marquée par la variation progressive des
textures depuis le cœur relativement isotrope jusqu’aux bordures (ultra) myloni-
tiques (Fig. 3.39B). Un certain nombre de marqueurs structuraux : enclaves magma-
tiques arrondies aplaties et/ou étirées, filons tardifs plissés et/ou boudinés,
permettent de déterminer les directions préférentielles de déformation. Il faut noter
que les structures actuellement observées résultent de la succession des déforma-
tions subies à des stades différents :
1. Près du liquidus, le magma newtonien se déforme rapidement sous l’effet de
faibles contraintes, mais aucune structure stable ne peut se conserver ;
2. À partir d’une certaine charge en cristaux (≈ 30 %), le magma a le comportement
d’un corps de Bingham, la déformation requiert l’action de contraintes plus
fortes. Les marqueurs commencent à s’orienter par rotation rigide et définissent
des structures magmatiques ;
Trajectoires d’écoulement
Foliation
2
B
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
3
4
195
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
3. Au-delà d’un seuil marqué par un pourcentage critique de liquide situé entre 26
et 40 % du magma, le comportement devient magmato-rigide ou submagma-
tique. La viscosité augmente considérablement (de 104 Pa.s à 1014 Pa.s), le
liquide interstitiel ne peut plus s’écouler librement et le mélange se déforme de
façon cataclastique ;
4. Lorsque tout est cristallisé, la déformation, d’abord ductile, se poursuit dans le
milieu solide. À basse température, elle est cataclastique et donne des mylonites,
voire des ultramylonites.
196
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3.4 • Mise en place des plutons
1 Caldéra
Complexe annulaire
2
cassante
plastique
Chambre magmatique
3
Lithosphère
4
Asthénosphère
10 km
0 10 km
197
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
198
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3.5 • Différenciation des magmas
exemple, un basalte issu de la fusion d’une lherzolite à grenat à 2,5 GPa est en équi-
libre à cette pression avec l’olivine, le diopside, l’enstatite et le grenat ; un leucogra-
nite provenant de l’anatexie de métapélite kinzigitique contient la cordiérite et la
sillimanite précoces.
Lors de la fusion partielle, le magma renferme les constituants les plus fusibles
puis s’enrichit, lorsque la température s’élève, en constituants plus réfractaires. Dans
un système à plusieurs phases solides, l’évolution du liquide évolue à partir d’une
composition eutectique ou de minimum thermique par étapes successives de dissolu-
tion des phases solides à partir de la moins réfractaire (Fig. 3.41). La fusion partielle
est un processus qui se situe entre deux extrêmes : la fusion fractionnée, par laquelle
le liquide produit est extrait au fur et à mesure qu’il se forme, et la fusion à l’équi-
libre (« batch melting »), où le liquide produit reste en contact avec les matériaux
réfractaires avant soutirage. La fusion critique est un type intermédiaire, où le
liquide reste interstitiel jusqu’à ce qu’un seuil critique soit atteint.
• Fusion fractionnée
La fusion fractionnée produit une évolution discontinue des liquides. Dans le cas de
la figure 3.41, le premier liquide produit a la composition eutectique ternaire e. Au
1400˚
e
1500˚
f
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
1800˚
M
A b C
Figure 3.41 – Variation de composition d’un liquide formé par fusion
partielle d’un système ternaire simple avec eutectique.
M. composition du solide soumis à fusion partielle, b. eutectique binaire du
système A + C, e. eutectique ternaire. En cas de fusion fractionnée, la variation est
discontinue : e, puis b, puis C. En cas de fusion à l’équilibre, la variation est
continue : e → f → M et les compositions différentes (Maaløe, 1985).
199
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
b) Cristallisation fractionnée
À bien des égards, il s’agit du processus inverse de la fusion partielle. Les minéraux
ont des compositions en général différentes du magma dans lequel ils cristallisent. À
cause de la différence des compositions, le liquide résiduel s’enrichit en éléments
n’entrant pas dans la structure des cristaux, les éléments incompatibles, et s’appau-
vrit en éléments inclus préférentiellement dans le solide, les éléments compatibles.
Si les cristaux et le liquide sont séparés avant solidification complète, le liquide
200
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3.5 • Différenciation des magmas
Cj
ppm
1200
cf cf cf cf
fp
1%
800
3%
5%
10%
400
30%
100%
0
0 2000 4000 6000 8000 10000 ppm
Ci
résiduel peut par cristallisation donner une roche différente de celle du magma origi-
nel, selon les relations :
Magma originel → Solide cristallisé 1 + Liquide résiduel 1
Liquide 1 → Solide cristallisé 2 + Liquide résiduel 2
.........................................
Liquide (n – 1) → Solide cristallisé n + Liquide résiduel n
La somme des liquides résiduels L1 à Ln constitue une série magmatique, avec un
liquide final d’autant plus évolué que n est grand. La somme des solides cristallisés
S1 à Sn constituent les cumulats. Les variations de composition des liquides et des
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
201
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
%
60
50 SiO2
40
20
Al2O3
10
14
10
FeOt
6
2
12
8
CaO
8
0
8
4 Na2O
0
3
2 K2O
1
0
4
3
2 TiO2
1
0
2
1 P2O5
0
0,2
0,1 MnO
0
0 5 10 15 20
% MgO
Figure 3.43 – Diagramme de Bowen (oxydes-MgO)
pour la série alcaline d’Hawaï.
L’indice de différenciation augmente de la droite vers la gauche, selon MgO
décroissant. L’incertitude analytique est indiquée à droite. Les courbes sont obte-
nues par régression des données (d’après Macdonald & Katsura, 1964 ;
Macdonald, 1968).
202
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3.5 • Différenciation des magmas
203
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
A C4 silicates riches en Fe
+ oxydes de Fe-Ti
en
r ic
his
C3
se
me
tdn
es
L2
L3
mi
L1
C2
né
rau
magma primaire
xe
P
nF
L4
e
C1
silicates magnésiens
A M
F
oxydes de Fe-Ti
B
magma primaire
L1 à n
P
silicates magnésiens
A M
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3.5 • Différenciation des magmas
C cumulats
M magma
% cumulats = 100 (LM/CL)
% liquide = 100 (CM/CL) L liquide
résiduel
Figure 3.45 – Schéma d’une cristallisation fractionnée, conduisant d’un
magma primaire M à des cumulats C et un liquide résiduel L et règle des
leviers permettant de calculer les proportions relatives de C et de L.
cpx
A
A
A
A
Qz
A A
A
A A A
A A
A
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
A
Sph Op
0 2mm
205
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
206
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3.5 • Différenciation des magmas
et les liquides intermédiaires et acides, plus légers mais moins chauds, au toit. La
stratification chimique et thermique peut varier dans le temps (Fig. 3.47) :
1. Les liquides basaltiques, moins chauds et plus légers que le magma originel picri-
tique, s’installent au sommet de la chambre. La chambre présente une stratifica-
tion normale avec une base picritique dense et chaude et un sommet basaltique
léger et moins chaud. Il est vraisemblable que le passage du magma picritique au
liquide basaltique est graduel dans une couche-limite de diffusion chimique.
2. La densité du liquide résiduel augmente. Le liquide dense, produit au toit de la
chambre, a tendance à couler et se mélange avec le reste du magma, moins dense
et plus chaud. La stratification normale originelle est détruite, puis elle est
207
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
x P
x
P
a
x y
x
y
b
A
y
A
c
x x
y x
y
x
e
Mg/Mg+Fe
Figure 3.47 – Évolution d’une chambre magmatique en système fermé et
profils de densité (ρ) et de température T (Sparks & Huppert, 1984).
La différenciation marquée par le rapport Mg / (Mg + Fe) diminue de la gauche vers
la droite. P. magma basaltique primaire, y. magma un peu plus évolué, x. magma
plus évolué. Noter que dans les chambres magmatiques très évoluées (branche
droite de la courbe des densités), le comportement est identique à celui des stades
a, b et c.
208
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3.5 • Différenciation des magmas
b) Immiscibilité
Certains systèmes magmatiques présentent au lieu d’une seule phase liquide deux
phases liquides immiscibles :
• les systèmes silicates + sulfures évoluent en exsolvant un liquide sulfuré et un
liquide silicaté mafique, même pour de très faibles teneurs en S. Les liquides
sulfurés sont denses parce que riches en métaux lourds et cristallisent sous forme
d’amas sulfurés massifs, fréquemment situés à la base de corps magmatiques
basiques. Riches en fer, cuivre, nickel, cobalt et éléments du groupe du platine, ils
peuvent constituer des concentrations d’intérêt économique ;
• les systèmes très alcalins riches en CO2 expulsent à basse pression un liquide
carbonaté à partir d’un liquide silicaté fortement alcalin (Fig. 3.48). Le champ
NA2O+K2O
11
12
13
14
15
16
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
2
4
1 3
5 6
10
7 9
8
Cafem
SiO2Al2O3 17,18
209
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
210
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3.5 • Différenciation des magmas
c) Effet Soret
L’effet Soret peut se produire dans un liquide soumis à un très fort gradient de
température. À cause de l’effet exercé par la température sur le potentiel chimique
des composants d’un magma, une faible différence d’énergie libre peut provoquer la
migration des éléments, certains se concentrant vers la source chaude, d’autres vers
la source froide. La réaction générale est :
Xf – Xch = σ X (1 – X) ∆T,
où Xf et Xch sont les fractions d’un composé aux pôles froid et chaud du système ;
X est la fraction du composé dans le système entier ;
∆T la différence de température ;
et σ le coefficient de Soret.
Des expériences ont été effectuées sur une longueur de seulement un centimètre
dans un liquide basaltique soumis à une pression de 1 GPa sous un gradient de
165 °C entre 1 480 °C et 1 215 °C, c’est-à-dire des températures au-dessus du liqui-
dus. Les éléments Si, Al, Na, K, Rb migrent vers la source chaude (σ < 0), alors que
les éléments Fe, Ti, Mg, Ca, Ba, Sr, Y, les terres rares et P migrent vers la source
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
froide (σ > 0). Le partage des éléments chimiques se fait donc en sens inverse de
celui produit par la cristallisation fractionnée. Cependant, l’effet Soret n’a pas
encore été reconnu de façon indubitable dans la nature car, dans un magma, il pour-
rait être assez facilement détruit au début de la cristallisation.
211
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
produire entre magma et roches solides, comme le montrent les enclaves anguleuses
(xénolites) et les xénocristaux fréquents dans les roches magmatiques. Certaines
enclaves montrent des phénomènes d’assimilation par transformation minéralogique
et chimique, les liquides qui les contiennent sont alors contaminés. Plus fréquem-
ment encore, les formations magmatiques sont hétérogènes avec de vastes zones
différenciées leucocrates englobant des enclaves magmatiques sombres arrondies,
résultant du mélange de liquides de compositions différentes.
a) Assimilation et contamination
L’assimilation et la contamination correspondent à la réponse au gradient chimique
parfois important qui existe entre le magma plus chaud et son encaissant cristallisé
plus froid. Elles tendent à homogénéiser les compositions. La contamination peut
s’opérer par :
• incorporation mécanique de cristaux de l’encaissant dans le magma ;
• diffusion chimique à l’interface entre l’encaissant solide et la phase liquide du
magma ;
• fusion de l’encaissant et mélange du liquide produit avec le magma ;
• transport par les phases fluides depuis l’encaissant froid vers le magma chaud.
Les transferts d’éléments par diffusion se déroulent de la même façon que les
transferts d’énergie chimique, selon la loi de Fourier :
∂C/∂t = D (∂2C/∂t2), où D est la diffusivité chimique.
Un magma ascendant est en déséquilibre chimique et thermique avec son encais-
sant. Il présente au contact une différence de potentiel chimique, moteur de la diffu-
sion. La diffusion est contrôlée par la capacité de l’encaissant de fournir ou de
soustraire des éléments au magma. Si le volume de l’encaissant par rapport à celui
du magma est très important (milieu semi-infini), le transfert d’éléments ∆C et le
3
taux de contamination ∆C/∆W sont fonctions de 1/ v et de 1/ R (Fig. 3.50), où
∆C est l’apport d’éléments dans le magma, ∆W la différence de teneurs entre l’encais-
sant et le magma, v la vitesse d’ascension du magma, et R le rayon du corps magma-
tique ascendant. La contamination atteint des valeurs importantes si les magmas
montent lentement dans un milieu plastique et atteint 20 % dans le cas de corps de
10 km de diamètre et de vitesse 10– 7 cm.s– 1. La rapidité de l’ascension des magmas
dans la zone cassante (1 m.s– 1 à 10– 4 cm.s– 1) interdit pratiquement toute contamination.
La contamination est d’autant plus forte que les compositions chimiques du
magma et de l’encaissant diffèrent. Dans le cas de liquides granitiques circulant dans
un encaissant crustal felsique, la contamination en éléments majeurs est souvent peu
observable. Par contre, l’effet se marque mieux dans les éléments en trace et les
systèmes isotopiques. Par exemple, on associe classiquement faible valeur du
rapport isotopique 87Sr/86Sr et source mantélique du magma, forte valeur de ce
rapport et source crustale. Cette conclusion n’est pas nécessairement valide dans le
cas de granites pauvres en Sr mis en place dans une croûte continentale contenant
beaucoup de Sr radiogénique. Ainsi, dans un liquide granitique d’origine mantélique,
212
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3.5 • Différenciation des magmas
∆C
%
∆W
V=1
0 -8
cm
V=1 /s
0 -7
cm
/s
10
V=1
0 -6
cm
/s
V=1
0 -5
cm
/s
1
V=1
0 -4
cm
/s
V=1
0 -3
cm
/s
D=10-3 cm2/s
0,1
1 2 10 a km
213
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
b) Mélanges de magmas
De même qu’un magma peut assimiler des roches solides, il peut assimiler d’autres
liquides en se mélangeant avec eux. Dans le mélange de magmas, des liquides
initialement différents se combinent pour donner un magma de composition inter-
médiaire. Le processus de mélange peut se produire à tout moment de l’existence
d’un magma : dans la zone de fusion partielle où il prend naissance, dans la chambre
magmatique au cours d’épisodes successifs de remplissage et dans les conduits
d’alimentation. Le vocabulaire français est ici moins précis que le vocabulaire
anglo-saxon pour définir les modalités du mélange :
• le mélange mécanique (« mingling ») produit une émulsion biphasée par mise en
contact de deux phases liquides ;
• le mélange chimique (« mixing ») conduit à l’individualisation d’une seule phase
liquide hybride, de composition intermédiaire.
Un mélange parfait se traduit par une composition finale homogène mais, plus
fréquemment, les mélanges sont imparfaits. Le processus de mélange se met en
évidence dans les diagrammes par le fait que les différentes roches issues de la cris-
tallisation des liquides hybrides se placent sur des segments de droite, dont les deux
extrémités constituent les deux pôles du mélange (Fig. 3.51). Le mélange est facilité
lorsque les paramètres physiques (température, densité et viscosité) des magmas en
présence sont voisins. En cas de différences trop fortes, le système reste stratifié
avec le liquide le plus dense au fond et le liquide le plus léger au toit.
214
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3.5 • Différenciation des magmas
concentration en
élément A
pôle riche en A
pôle riche en B
concentration en
élément B
Comme la diffusivité chimique est très lente (10– 10 à 10– 13 m2.s– 1), le mélange
parfait n’est possible que dans un milieu turbulent, ayant un nombre de Rayleigh
élevé supérieur à 1 700-2 500 et soumis à une convection vigoureuse, de façon que
les liquides soient intimement associés à très petite échelle. Le caractère fractal et
chaotique des figures de mélange a été souvent souligné, pour expliquer la forme
complexe des contacts entre les enclaves sombres et leur encaissant felsique, tous
deux largement hybrides. Deux mécanismes favorisent les mélanges parfaits.
Aux murs d’une chambre magmatique, les couches-limites cinématique et chimique
n’ont pas la même largeur. Le liquide différencié plus léger qui monte le long de la
paroi peut entraîner des portions du magma central et, au cours de son ascension
turbulente (nombre de Reynolds supérieur à 2 000-2 300), se mélanger avec des
liquides moins différenciés pour donner des compositions intermédiaires. Ce méca-
nisme s’applique dans un système fermé à grande échelle à des liquides différents
mais issus du même magma originel, ils sont donc cogénétiques.
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215
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
P P
ρ ρ x
x
Mg/Mg+Fe Mg/Mg+Fe
ρ, T ρ, T
x x
P P
P x
ρ
Mg/Mg+Fe
ρ, T
216
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3.5 • Différenciation des magmas
Quelle que soit leur taille, les enclaves basiques dans un magma granitique sont
complètement contaminées en K2O en moins de 1 000 ans et leurs rapports isoto-
piques 87Sr/86Sr sont notablement modifiés en quelques milliers d’années. Une
enclave de 5 cm de diamètre a besoin de 10 000 ans pour que les teneurs en SiO2
soient homogénéisées avec la matrice acide mais ce sera impossible avant sa cristal-
lisation pour une enclave de 50 cm de diamètre. Le liquide granitique au contact est
hybridé par des enclaves de 5 cm de diamètre en moins de 10 ans pour K2O, en
moins de 400 ans pour le rapport isotopique 87Sr/86Sr et après 100 à 5 000 ans pour
SiO2. Avec des enclaves de 50 cm de diamètre, il faut 100 fois plus de temps pour
obtenir le même résultat.
217
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
218
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SSW pluie
NNE
Mome
km dômes Macouba
vers Macouba
1,4 19291902
sources chaudes ruissellement superficiel
bicarbonatées sodiques, sources chaudes
1 contaminées par l’eau de mer bicarbonatées sodiques
sources froides minéralisées
(bicarbonatées calciques)
0,6 anomalie géophysique
lourde et conductrice
dépôt de minéraux
hydrothermaux?
0,5
10
0˚
C
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1
dépôt de minéraux
hydrothermaux 100˚C
(silice, carbonates,
tée
sulfates et hydroxydes
de fer) 200˚C
colma
200˚C
4
faille
˚C
200
a d a
˚C
c a 200
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Figure 3.53 – Schéma géothermique de la Montagne Pelée (Martinique) (Westercamp & Traineau, 1987).
Symboles : 1. formations volcaniques (a à c. de plus en plus anciennes), 2. substratum perméable (2a) et
imperméable, 3. socle profond, métamorphisé autour de la chambre magmatique (3a), 4. minéralisations
hydrothermales, 5. faille, 6. infiltrations d’eaux météoriques, 7. remontée de fluides réchauffés, 8. fluides
magmatiques, 9. source thermominérale, 10. isotherme, 11. biseau d’eau salé.
219
Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
NaF), les sulfures (pyrite FeS2, chalcopyrite CuFeS2), les sulfates (anhydrite
CaSO4). Les chlorures, trop solubles, n’apparaissent cristallisés (halite NaCl, sylvite
KCl) que dans certains cas, en particulier dans les inclusions fluides des minéraux.
Après solidification complète du magma, l’eau initialement dissoute peut demeurer
dans les phases solides hydroxylées. Les minéraux majeurs porteurs d’eau sont les
amphiboles (environ 2 % H2O) et les micas (environ 4 % H2O) où l’eau est associée
à F et Cl. D’autres minéraux, moins fréquents, contiennent également de l’eau,
comme certains feldspathoïdes (sodalite, noséane, haüyne, cancrinite, analcime).
Même les minéraux réputés anhydres peuvent renfermer de l’eau. Pour estimer les
teneurs en eau des phases solides, on utilise la méthode Penfield, qui mesure les
quantités d’eau expulsées entre 105 et 900 °C (H2O+), et l’absorption infrarouge. La
plupart des minéraux anhydres contiennent en moyenne 0,30 % H2O+ (de 0,02 à
0,55 %), qui est présente soit dans le réseau cristallin sous forme d’ions OH–, H+ et
H3O+, soit en inclusions submicroscopiques. Les anions OH– occupent les sites
oxygène liés à des sites vacants ou à des sites cationiques déséquilibrés en charges.
Il est probable que l’eau actuellement présente en inclusions submicroscopiques
était située à haute température dans le réseau cristallin et en a été chassée au cours
du refroidissement. Les phénocristaux de plagioclase de la lave de l’éruption en
1973 d’Heimaey, en Islande, étaient transparents lorsqu’ils ont été prélevés au
moment de l’éruption. Depuis, ils sont devenus troubles par apparition des micro-
inclusions qui absorbent la lumière.
Toutes les roches, spécialement celles renfermant des minéraux hydroxylés,
contiennent des teneurs appréciables de H2O+. Les laves peuvent également adsor-
ber de l’eau en refroidissant : les coulées actuelles d’Hawaï contiennent au moment
de leur éruption environ 0,05 % H2O, alors que les laves préhistoriques peuvent
avoir jusqu’à 0,5 % H2O. Les roches plutoniques contiennent de 0,4 % à 0,8 % H2O+
en moyenne, selon l’abondance des minéraux hydroxylés (amphibole, mica).
c) Effets de H2O
L’addition d’un composant gazeux à un liquide silicaté se traduit toujours par
l’abaissement de son point de fusion et la modification des domaines de stabilité des
phases. L’abaissement du solidus est plus prononcé en présence de H2O qu’en
présence de CO2. Dans un système donné, le liquide formé en présence de phase
vapeur séparée a une composition différente de celui formé en condition anhydre.
Lorsque la vapeur est dissoute, l’effet est moins important. Le solidus est confondu
pour des conditions de saturation et de sous-saturation en vapeur lorsque la teneur en
vapeur dépasse celle de la vapeur qui peut être contenue dans les minéraux.
Le comportement des minéraux anhydres en présence d’eau est synthétisé dans le
diagramme isobare (pression constante) du système albite-eau de la figure 3.54.
Comme l’albite peut contenir un peu d’eau dans sa structure, sa température de
fusion varie de Ta à TS, température du solidus, pour une teneur en eau variant de 0 à
environ 10 % H2O où le liquide est saturé en eau. S’il y a plus de 10 % H2O (champ
liquide + gaz), le liquide albitique saturé à 10 % H2O contient des bulles de vapeur
qui renferme en solution environ 5 % de molécule NaAlSi3O8.
220
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3.5 • Différenciation des magmas
Tg
liquide vapeur
liquide + vapeur
Ta
liquide
+ silicate
Ts
silicate + vapeur
Tv
eau + vapeur
eau
silicate + eau
eau + glace
Ti
silicate + glace
Albite Eau
Au-dessus de TS, le champ liquide + gaz est limité par Tg, température où le
liquide se volatilise entièrement et se mélange en toutes proportions avec la phase
vapeur. Sous le solidus TS, au cours du refroidissement, le système est d’abord formé
par albite solide + gaz. Ensuite, la phase vapeur, qui s’appauvrit en constituant albite
dissous, se condense en eau liquide à Tv, puis en glace à Ti. Entre Tv et Ti, le système
est constitué de solide + liquide. Au-dessous de Ti, le système est composé de deux
phases solides : l’albite et la glace pures.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
Le comportement des minéraux hydroxylés en présence d’eau est tout à fait diffé-
rent, comme le montre le diagramme isobare à 1 GPa du système phlogopite-eau
(Fig. 3.55). Le système est plus complexe car le phlogopite a une fusion incon-
gruente et commence à se déstabiliser sous le solidus. Pour des teneurs en H2O infé-
rieures à 2,5 %, le phlogopite n’est pas stable en présence du liquide qui apparaît à la
température (b) en présence de forstérite et de feldspathoïdes (leucite et kalsilite).
Au-dessus de 2,5 % H2O, le phlogopite devient stable en présence du liquide et son
champ de stabilité augmente jusqu’à la température (c) pour 4,5 % H2O. Au-dessus
de 4,5 % H2O, le milieu contient plus d’eau que le phlogopite, la température du
solidus est abaissée de (b) à (a). Le champ de stabilité du phlogopite en présence du
221
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
1600
P=10 kb
1500 L
L+G
Fo + Ks + L
1400
Fo + L
d
Fo + Ks + Lc + L
1300
c Fo + L + G
Ph + Fo + L
1200 b
Ph + Fo a
Lc + Ks
Ph + Fo + G
1100 0 5 10 15 20 25 30 35 40
Phlogopite H 2O
K2O 6MgO Al2 O3 6SiO2
Figure 3.55 – Diagramme composition-température du système phlogopite-
H2O à 1 GPa.
Abréviations : G. vapeur, L. liquide silicaté, Fo. forstérite, Ks. kalsilite, Lc. leucite,
Ph. phlogopite. Températures critiques : (a) solidus en présence d’un excès d’eau,
(b) solidus sans phase vapeur séparée, (c) stabilité thermique maximale du phlogo-
pite seul, (d) minimum thermique du liquidus (Yoder & Kushiro, 1969).
222
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3.5 • Différenciation des magmas
• type III pauvre en eau, avec phase vapeur : assemblage de minéraux silicatés,
hydroxylés ou non, et avec phase vapeur associée. Il n’y a pas assez d’eau pour
saturer le liquide provenant de la fusion complète de l’assemblage minéral ;
• type IV avec excès d’eau : assemblage de minéraux silicatés, hydroxylés ou non,
et avec phase vapeur associée. Il y a assez d’eau pour saturer le liquide provenant
de la fusion complète de l’assemblage minéral.
Le système albite-eau appartient aux types I (pour 0 % H2O), III (de 0 à 10 %
H2O) et IV (pour plus de 10 % H2O), tandis que le système phlogopite-eau montre
les types II (de 0 à 4,5 % H2O), III (de 4,5 à 15 % H2O) et IV (pour plus de 15 %
H2O).
d) Effets de CO2
Pour une pression inférieure à 1,0-1,7 GPa, c’est-à-dire dans le manteau lithosphérique,
CO2 agit comme un gaz qui se dissout dans les liquides. À pression supérieure, les
minéraux silicatés réagissent avec CO2 pour donner des carbonates : dolomite dans
la lithosphère et magnésite dans l’asthénosphère. L’apport de CO2, ou carbonata-
tion, dans les systèmes silicatés abaisse la température du solidus et celle du liquidus
et modifie la composition des liquides. Les magmas formés dans le manteau en
présence de CO2 sont très sous-saturés en silice et ont des compositions de kimber-
lite et de néphélinite. À plus basse pression, ils peuvent exsolver un liquide carbona-
titique.
e) Fugacité d’oxygène
Les gaz magmatiques ne se comportent pas tout à fait comme des gaz parfaits, dont
l’équation d’état de Boyle-Mariotte : P V = n R T, n’est valable qu’à 0,1 MPa. Leur
équation d’état peut alors se définir par un polynôme : P V = n R T + aP + bP2 + cP3 + ...,
où a, b, c, sont des constantes.
Tenant compte du volume occupé par les molécules de gaz et de leur forme qui
n’est pas nécessairement sphérique, Van der Waals a établi l’équation : (P + a/V2)
(V – b) = n R T, où a et b sont des constantes. L’équation de Van der Waals est un
polynôme du troisième degré en V. Les trois racines de l’équation définissent le
point critique de coordonnées (Pc, Tc) et déterminent la valeur des constantes a et b :
a = 27 R2 Tc2 / 64 Pc et b = R Tc / 8 Pc.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
223
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
γ peut être calculé avec les paramètres réduits de l’équation de Van der Waals et
varie avec la pression et la température. Expérimentalement, γ peut être déterminé
avec précision pour P < 100 Pc et T < 35 Tc.
Parmi les composants des gaz magmatiques, O2 est peu abondant en volume mais
joue un rôle important. En effet, le rapport FeO/Fe2O3 des magmas et la stabilité des
minéraux ferrifères, présentant les valences 2 (fer ferreux) et/ou 3 (fer ferrique),
dépendent de la fugacité d’oxygène, fO2, elle-même fonction de la composition du
magma et de sa teneur en fluides. La fugacité d’oxygène exerce donc un contrôle
important sur la course de cristallisation des magmas mafiques, comme le montre le
diagramme AFM (Fig. 3.27B et 3.44). La fugacité d’oxygène est déterminée par des
tampons qui correspondent à des équilibres chimiques impliquant l’oxygène, selon
la relation générale :
log (fO2) = – A / T + B + C (P – 1) / T, avec T exprimé en Kelvin, P et fO2 en bar
(1 bar = 0,1 MPa).
Parmi les tampons pouvant gouverner la cristallisation des magmas silicatés,
citons par ordre décroissant de fugacité d’oxygène :
• hématite-magnétite HM : 2 Fe3O4 + 0,5 O2 = 3 Fe2O3 ;
• fayalite-magnétite-quartz FMQ : 3 Fe2SiO4 + O2 = 2 Fe3O4 + 3 SiO2 ;
• magnétite-wüstite MW : 3 FeO + 0,5 O2 = Fe3O4 ;
• wüstite-fer WI (I pour « iron ») : Fe + 0,5 O2 = FeO.
224
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3.6 • Durées des phénomènes magmatiques
les résultats isotopiques dans certains massifs zonés montrent une forte assimilation
de roches encaissantes, mais d’autres ne montrent aucun signe d’assimilation.
Il faut donc rechercher parmi les processus in situ ceux qui responsables de la
zonation de la majeure partie des massifs magmatiques. Le transport par les fluides
(« volatile transfer ») d’éléments légers comme Si et les alcalins est efficace dans un
magma sursaturé en eau. Comme la solubilité des éléments dans les fluides n’est pas
très élevée, il faut un volume important de phase vapeur. Cependant, ce processus est
important pour les éléments en trace et les terres rares les plus solubles.
L’immiscibilité est un processus actif en profondeur dans le cas des suites alca-
lines à la fois carbonatées et silicatées qui sont rares. Son rôle a été discuté dans le
cas des séries tholéiitiques riches en Fe car le processus a été observé dans certaines
formations volcaniques (lac de lave d’Alae, Hawaï, et basaltes lunaires) et pluto-
niques (complexe de Skaergaard). Expérimentalement, elle a été mise en évidence à
pression inférieure ou égale à la pression atmosphérique mais elle disparaît vers 0,1
GPa (≈ 3 à 4 km de profondeur). Elle ne peut donc agir qu’au moment de l’éruption
et dans les niveaux très supérieurs du système magmatique.
Les mécanismes de couches-limites par effets de bordure sont beaucoup plus effi-
caces. Pour chaque élément chimique, on peut définir une couche-limite déterminée
par sa diffusivité. Mais, dans un système à plusieurs composants comme un magma,
la diffusivité des éléments liés par une réaction est différente de chaque diffusivité
partielle. Les éléments diffusant faiblement comme Si se déplacent plus rapidement
sous l’action d’éléments rapides comme les alcalins et H2O.
225
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
tions, datées à 225 000 ± 10 000 ans, sont trachytiques et suivies par des éruptions
acides et quelques basaltes. Une éruption paroxysmale à 49 000 ± 2 000 ans a recou-
vert l’île d’une épaisse formation ignimbritique verte. Ensuite, entre 35 000 et
9 000 ans, 5 épisodes acides se sont produits et, entre 29 000 ans et le siècle dernier,
trois épisodes basaltiques. Chaque épisode acide, caractérisé par la succession :
pantellérite → trachyte, provient de la vidange périodique d’une chambre magma-
tique zonée dont la différenciation a duré à chaque fois moins de 10 000 ans.
La caldeira de Long Valley (Californie) renferme des formations rhyolitiques mises
en place en plusieurs cycles durant chacun environ 0,7 Ma. L’apport de magma
basaltique dans le fond de la chambre magmatique a apporté suffisamment de cha-
leur pour que le magma rhyolitique différencié reste liquide. De ces deux exemples,
on peut conclure que la formation d’un liquide différencié à partir d’un magma
basique dure au grand maximum 1 million d’années.
226
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3.6 • Durées des phénomènes magmatiques
2 km
A
˚6 T=50
T=100
˚5
T=200
k=10-17 ˚4 T=400
˚3
To=20˚C/km
T=800
2 km
˚2
Tp=870˚C
˚1
k=10-17
0 an 20 000 ans
2 km
T=50
T=100
T=200
T=400
2 km
T=100
T=200
T=200
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
T=400
2 km
227
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
2 km
B ˚6
T=50
T=100
˚5 T=200
k=10-11
˚4 T=400
To=20˚C/km ˚3
T=800
˚2
2 km
Tp=920˚C ˚1
k=10-14
0 an 20 000 ans
2 km T=50
S=50 T=100
S=100 T=200
T=400
2 km
T=800
20 000 ans
2 km S=200 T=200
S=400 T=100
S=100 T=300
T=400
T=500
T=600
2 km
T=700
2 km
T=200
S=200 T=300
T=400
S=100
2 km
T=800
228
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3.6 • Durées des phénomènes magmatiques
proche, est un exemple célèbre de batholite de longue durée (Fig. 3.58A). Long de
2 400 km de l’Équateur au Chili et large de 60 km, il est subdivisé en segments (Piura,
Trujillo, Lima, Arequipa, Toquepala), eux-mêmes subdivisés en superunités (9 dans le
segment de Lima, 4 dans celui d’Arequipa, 2 dans celui de Toquepala), chacune compre-
nant une séquence basique (diorite) → intermédiaire (tonalite) → acide (granite) plus
ou moins complète. Dans chaque segment, ont été délimités des complexes plutoniques
reliés vers le haut à d’anciens volcans andésitiques à dacitiques et à des complexes annu-
laires (Fig. 3.58B). L’âge des séquences intrusives diminue de la côte vers l’est pendant
une durée de 64 Ma (Fig. 3.58A). L’activité magmatique, synchrone sur toute la
longueur du batholite, est épisodique avec des périodes courtes d’activité (≈ 5 Ma) alter-
nant avec des périodes de repos pouvant dépasser 15 Ma.
229
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Chapitre 3 • Les phénomènes magmatiques
N Fanad
granite Fanad
Rosguill
Horn head
Main
2-2 Donegal
DUNLEWY
Rosses
2-2
DUNGLOW e
id
sl
Thoories n
granite 3-5 DOOCHARY ee
k at lt
c u
no fa
K an
n
e an
L
Ardara
Barnesmore
2-4 Carbonifère
0 10km
DONEGAL
KILLYBEGS
Granite Failles
230
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3.7 • Conclusions
3.7 CONCLUSIONS
Traditionnellement, on a distingué le volcanisme et le plutonisme. Le phénomène
volcanique est facilement observable par l’Homme, depuis le stade liquide de la coulée
jusqu’à la complète consolidation des roches. Au contraire, les roches plutoniques ne
sont visibles que grâce à l’érosion, longtemps après leur refroidissement. Cependant,
volcanisme et plutonisme constituent les deux faces d’un phénomène unique majeur :
le magmatisme.
Les roches volcaniques sont émises à pression atmosphérique (≈ 0,1 MPa) et au
contact de milieux oxydants et de basse température (Tl ≤ 50 °C) qui sont le sol, l’air
et l’eau. Le refroidissement est rapide et, à cause de la forte surfusion, la nucléation
importante donne des roches finement cristallisées et/ou vitreuses.
Les roches plutoniques, mises en place en profondeur, subissent à l’état magma-
tique une forte pression (de l’ordre de la centaine de MPa) et sont en contact avec un
milieu solide plus ou moins riche en eau et de température plus élevée. La forte capa-
cité thermique des formations encaissantes et le gradient de température plus faible
phase Quechua 2
TERTIAIRE
20 plateaux volcaniques
Cerro de Pasco
Pativilca
40 phase Quechua 1
plateaux volcaniques
complexes
60 annulaires
phase Incaïque
dépôts érodés
dépôts sédimentaires
Humaya
80
CRETACE
Santa
Rosa
100
phase Mochita
Formations volcaniques sous-marines
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
120
0 50 100 150
Distance par rapport à la côte (km)
gabbro
tonalite-granodiorite
monzogranite
discordance / phase de plissement
231
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232
km
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2
0 2 1
1 3
? 1
4
2
-5
2 1
2
-10
monzogranite San Jeronimo Gabbro-diorite
1-4 Puscao Groupe de Calipuy 0 10 km
Huampi Piruroc Groupe de Casma
granodiorite
Santa Rosa Formations anté-Crétacé
niques sont en majorité construits avec les projections et les coulées basiques, alors
que les roches acides sont émises sous forme de nuées ardentes et de dômes. Les
massifs plutoniques sont fréquemment acides avec des enclaves et des filons basiques.
Les chambres magmatiques fossiles renferment des séquences litées de cumulats, le
plus souvent basiques à ultrabasiques, parfois intermédiaires ou acides, emprisonnés
dans une carapace figée épaisse.
Le magmatisme est un processus efficace de transfert de matière et de chaleur du
manteau vers la surface du globe. Selon l’environnement géodynamique dans lequel
ils se mettent en place, les magmas émis se caractérisent par des différences d’origine,
de nature, de mode de différenciation et de relations avec l’encaissant.
233
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LES
INTERACTIONS
ENTRE MAGMATISME ET
4
ENVIRONNEMENT
235
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
-450 -650
-300 -500
236
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4.1 • Effets de la mise en place des corps magmatiques
1
2 5
A B C
Les effets thermiques dus au transfert de chaleur du pluton dans l’encaissant, qui
subit alors un métamorphisme de contact, sont beaucoup plus durables. Au sein du
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
237
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
b) Convection géothermique
La mise en place de magmas dans la croûte provoque inévitablement la circulation
des fluides. L’importance de la circulation est en général telle que la convection
l’emporte sur la simple conduction pour une perméabilité, k, supérieure à 10– 14 cm2.
La configuration du circuit convectif géothermique est directement fonction de la
taille, du niveau de mise en place et de la perméabilité du pluton, ainsi que de la
répartition des zones perméables dans l’encaissant.
Dans les systèmes naturels, les fluides aqueux peuvent se déplacer sur plusieurs
kilomètres en quelques centaines de milliers d’années. La redistribution affecte les
fluides d’origine magmatique qui quittent le pluton et pénètrent dans l’encaissant et
ceux de l’encaissant qui effectuent le trajet inverse (Fig. 4.3). En circulant sur des
distances aussi importantes, la température et la pression varient, de sorte que les
propriétés dissolvantes du fluide aqueux changent de façon importante. En équilibre
avec les phases solides à leur point de départ, le fluide devient progressivement en
déséquilibre avec les roches qu’il traverse. Par conséquent, un circuit convectif
géothermique fossile se reconnaît par les différents assemblages minéralogiques
produits par les interactions entre roches et fluides. De vastes portions de la croûte
au-dessus des massifs plutoniques peuvent garder pendant longtemps une tempéra-
ture constante de 200 à 400 °C. La constance de la température et la circulation des
fluides sur de grandes distances induisent un fort gradient thermique, c’est-à-dire un
2 km 2 4
7
8 6
3
3
2
2 km
4 5
1
238
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4.1 • Effets de la mise en place des corps magmatiques
a) Skarns et greisens
Dans les formations métamorphiques au contact des massifs granitiques, existent
fréquemment des roches dont les compositions chimiques et minéralogiques
actuelles ne correspondent pas à celles des roches préexistantes. Elles mettent en
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évidence la migration de composants autres que H2O et CO2. Ce sont les skarns,
riches en Ca, Fe et Mg, et les greisens, riches en Al.
239
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
240
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4.1 • Effets de la mise en place des corps magmatiques
b) Transferts de matière
Deux processus de métasomatose sont envisageables : la diffusion ionique dans un
fluide stationnaire, la convection du fluide par rapport au milieu solide stable (perco-
lation). Le premier processus explique les phénomènes de réaction à l’échelle du
contact entre les cristaux et le fluide. Le deuxième processus est le seul efficace dans
les transports de matière à une échelle supérieure à celle du mètre. La métasomatose
à grande échelle est provoquée par l’écoulement de fluides hydrothermaux chemi-
nant le long d’un réseau de fractures actif, c’est-à-dire ouvert. Elle se développe en
fonction de la perméabilité des roches, propriété fondamentale des systèmes hydro-
thermaux. La perméabilité constitue un facteur à la fois actif, elle contrôle la réparti-
tion et l’intensité des altérations chimiques et minérales, et passif, elle est à son tour
modifiée par les processus.
Le transport par advection de matière et d’énergie thermique place les minéraux
des roches et les fluides inclus dans les pores dans des conditions de déséquilibre
local. Des réactions irréversibles de dissolution-précipitation se produisent jusqu’à
ce que l’équilibre local soit rétabli. Le volume de minéraux néoformés dépend de la
durée des conditions de déséquilibre. La précipitation de ces minéraux conduit à
l’auto-colmatage (« self-sealing ») des fissures, qui freine l’écoulement des fluides
advectifs et, finalement, interdit tout échange.
La composition chimique et la densité des roches varient. En comparant les roches
altérées et celles qui ne le sont pas, on peut définir par leur comportement les éléments
immobiles, dont les variations reflètent les variations pétrographiques originelles, et les
éléments mobiles. Entre une roche non affectée I et une roche fortement altérée II, il
est possible d’établir le bilan chimique pour chaque élément N ou chaque oxyde
NxOy (méthode de Gresens) :
XN = [fv.(dII/dI).CNII] – CNI ;
∆XN = [fv.(dII/dI).(CNII/CNI)] – 1 ;
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241
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
242
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4.1 • Effets de la mise en place des corps magmatiques
243
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
D
MeCl2 + H2S MeS + 2 HCl
Bi + 2 HCl Ms + Q + 2 KCl
Cc + 2 HCl CaCl2 + H2CO3
C
f 2 HCl + silicates MeCl2 + H2O
B
NaCl
m
A
m
NaCl
244
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4.1 • Effets de la mise en place des corps magmatiques
245
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
246
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
Elément (ppm)
Manteau
Oxyde Chrondrites MORB ORG
primitif
(poids %)
247
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
248
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
éléments moins incompatibles Sm à Yb est remarquable. Elle est originelle, car leur
source est un manteau appauvri de type harzburgite, tandis que les P-MORB
proviennent d’un manteau lherzolitique peu ou pas appauvri (Tab. 1.8 et 2.1).
D’après les résultats expérimentaux (Tab. 2.8), les MORB dérivent de la différencia-
tion à basse pression d’un magma primaire formé par 25 % environ de fusion du
manteau à plus de 30 km de profondeur (pression de 1,0 à 1,5 GPa).
Dans les portions émergées de rides médio-océaniques (Islande, par exemple),
des volcans centraux à caldeira montrent une différenciation par les islandites vers
les rhyolites (Tab. 3.11, analyses 1 à 3). Dans la chambre magmatique, située sous le
complexe filonien d’alimentation des basaltes et délimitée au sommet par des dolé-
rites massives, les cumulats (olivine + plagioclase + pyroxène) occupent les étages
inférieurs et les liquides différenciés se placent au sommet ou forment des filons qui
recoupent tout l’ensemble plutonique et volcanique (Fig. 4.5). Les liquides les plus
différenciés, de composition granitique, forment des filons bréchiques, témoins de
fortes pressions de fluides. Ils sont associés aux circulations hydrothermales maté-
rialisées en surface par les « fumeurs noirs » et aux dépôts métalliques associés
(sulfures et hydroxydes massifs).
Un métamorphisme de basse pression et haute température affecte plus de 15 %
de la croûte océanique avec précipitation abondante de carbonates à plus de 500 m
de profondeur. La zone altérée montre, du haut vers le bas, la séquence des faciès :
zéolite (palagonite, smectite, illite), schiste vert (chlorite, serpentine) et amphibolite
(actinote, hornblende, épidote). Le métamorphisme est provoqué par la circulation
de l’eau océanique, d’abord froide et oxydante dans le circuit descendant, puis
chaude et réductrice dans le circuit ascendant. Il dure environ 10 Ma à partir de la
formation de la croûte au niveau de la ride.
b) Iles océaniques
La surface du plancher océanique est hérissée de structures volcaniques : monts
sous-marins qui peuvent émerger de façon épisodique, îles océaniques plus longue-
ment émergées. Les îles océaniques constituent des unités hautes de plus de 4 000 m
au-dessus du plancher océanique, qu’elles déforment par l’effet de leur propre poids.
Elles témoignent de la vigueur du phénomène magmatique qui a construit des
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249
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
A couche 1 sédiments
coulées de laves à
2A débit en coussins
couche 2 2Km 2B complexe filonien
séquence crustale
gabbros isotropes
3A
5Km
couche 3
gabbros lités
3B
MOHO SISMIQUE
péridotites litées
supérieur
manteau
MOHO PETROLOGIQUE
couche 4
péridotites foliées
= tectonites
250
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
7
6
5
9
4
3
2
1
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
300m
251
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
A
MORB de l’Océan Atlantique A. Arachnogrammes des
Açores (P)
basaltes de la ride médio-
Islande (P) atlantique (MORB = « Mid-
100
61°- 63°N (T) Oceanic Ridge Basalts »)
28°- 34°N (N) normalisés par rapport aux
chondrites (d’après Wilson,
1989).
La normalisation est définie par
le rapport : concentration dans
10 la roche/concentration dans un
matériau normatif, ici les
chondrites représentant le
manteau supérieur primitif
(droite de valeur 1) (Thompson
et al., 1984). L’ordre
d’incompatibilité des éléments
1 décroît de Ba vers Yb. Une valeur
de normalisation de 1
correspond à 100 % de fusion,
de 10 à 10 %, de 100 à 1 %, etc.
La variation des valeurs de
normalisation d’un élément à
l’autre indique que le manteau
0.1
Ba Rb Th K Nb Ta La Ce Sr Nd P Sm Zr Hf Ti Tb Y Tm Yb source des MORB n’a pas la
composition des chondrites. Le
« manteau appauvri » présente une baisse marquée en éléments légers (LILE) comme Ba, Rb, K,
ce qui s’explique par des épisodes antérieurs de fusion. Le caractère résiduel est de plus en plus
marqué depuis le manteau sous les Açores et l’Islande (P = primitif) à celui sous la ride aux
latitudes 61-63 °N (T = transitionnel) et 28-34 °N (N = normal).
B
Granites océaniques B. Arachnogrammes des
100
granites océaniques
Océan Indien (N) normalisés par rapport
Océan Indien (P) aux ORG (= « Oceanic
Islande (P) Ridge Granites »)
Islande (P) (d’après Hedge et al.,
1979 ; Jauzein, 1981 ;
MAR 45°N (N°)
Pearce et al., 1984). Les
10 ORG ont été définis par
Pearce et al. (1984)
comme le produit de la
différenciation des
MORB par 80 % de
cristallisation
fractionnée. L’ordre de
1
présentation des
éléments suit la même
logique. Deux types de
granites sont observés :
les plagiogranites, très
pauvres en K et Rb, et
0.1 les monzogranites,
K20 Rb Ba Th Ta Nd Ce Hf Zr Sm Y Yb relativement riches en K,
Rb, Ba.
Figure 4.6 – Compositions normalisées des matériaux océaniques.
252
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
100
Basaltes de Fangataufa (Polynésie)
tholéïtique
alcalin
10 MORB
0.1
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
l’altitude de 1 300 m. Les deux séries magmatiques ont évolué par cristallisation frac-
tionnée d’olivine, puis de plagioclase + pyroxène + ilménite. Les magmas basaltiques
les moins évolués ont des compositions différentes mais des arachnogrammes paral-
lèles (Fig. 4.7). Les basaltes tholéiitiques proviennent d’un taux de fusion partielle
plus élevé que les basaltes alcalins, mais la source mantélique enrichie en éléments
légers incompatibles est identique. Les éléments Sr, Rb et K, un peu moins abondants
que les éléments suivants Ta à Ce, suggèrent que la source peut contenir un mica réfrac-
taire (phlogopite). Les éléments Y et Yb, moins abondants que dans les N-MORB,
indiquent que la source mantélique peut contenir aussi du grenat et se situer à une
profondeur supérieure à 80 km.
253
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
L’archipel d’Hawaï montre une évolution identique avec une variation d’âges
remarquable d’île en île, qui se poursuit de façon continue pendant plus de 60 Ma.
Les données géochimiques indiquent que plusieurs sources mantéliques sont mises à
contribution. La relation linéaire existant entre la position d’une île et son âge a
conduit au concept du point chaud (« hot spot »), qui constituerait la trace en surface
d’un panache mantélique (« mantle plume ») pouvant provenir de la base du
manteau inférieur ou de la zone de transition. Dans chaque île, la séquence générale
est : série fortement alcaline (néphélinite, basanite) → série moyennement alcaline
(picrite, basalte) → série tholéiitique → séries de plus en plus alcalines, mais les
deux premiers épisodes sont généralement peu représentés, car enfouis dans les
produits des épisodes suivants. L’évolution peut s’expliquer (Fig. 4.8) par l’intrusion
sous la lithosphère de portions du manteau profond, provenant de plus de 300 km de
profondeur et contenant des éléments volatils du système C-H-O. Une zone de
fusion s’établirait entre 75 et 100 km de profondeur pour produire des magmas picri-
tiques qui vont remplir des chambres magmatiques à la base de la croûte où ils se
différencieraient en liquides basaltiques.
200 100 0 100 200
0
Moho
tholéïte
Lithosphère
50
trace de liquide
profondeur, km
150
C-H-O Solidus
vapeur
200 100 0 100 200
distance, km
254
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
255
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
1 2 3 4 5 6
57,23 % SiO2
Boninites
69,56 % SiO2
10
0.1
0.01
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
256
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
a) Trapps volcaniques
De vastes secteurs continentaux ont été recouverts par des épanchements volca-
niques alimentés par des fissures et constituant les trapps ou CFB (« continental
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flood basalts »). On en connaît à toutes les périodes, par exemple dans le Protéro-
zoïque moyen (Keeweenaw, Lac Supérieur), autour de la limite Permien-Trias (Sibé-
rie), au cours du Mésozoïque (Karoo-Farrar en Afrique du Sud et Antarctique,
Paraná-Étendeka au Brésil et en Namibie), à la limite Crétacé-Tertiaire (Atlantique
Nord, Deccan en Inde) et dans le Néogène (Columbia River et Snake River dans
l’ouest des États-Unis). Associées aux épisodes d’extension intra-continentale et de
formation de bassins océaniques, les provinces de CFB ou « grandes provinces
magmatiques » (« Large Igneous Provinces » ou LIP) recouvrent des surfaces de
50 000 à 1 500 000 km2 sur des épaisseurs pouvant atteindre plusieurs milliers de
mètres. L’association tholéiitique à transitionnelle, plus rarement alcaline, évolue
des basaltes aux rhyolites.
257
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
HPT
Trapps du Paraná (Brésil)
100 LPT
10
0.1
0.01
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
258
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
Les teneurs assez faibles en MgO (< 10 %) des CFB montrent qu’ils ne sont pas
des magmas primaires. L’ensemble des roches des deux suites provient de magmas
primaires picritiques, issus de la fusion d’un manteau analogue à celui responsable
du magmatisme des îles océaniques (OIB), qui se sont installés à cause de leur
densité à l’interface croûte-manteau sous forme de sills et s’y sont différenciés par
fractionnement de l’assemblage [olivine + clinopyroxène + plagioclase] et contami-
nation par la croûte profonde. L’ascension des liquides différenciées s’effectue le
long de filons utilisant les fractures préexistantes.
b) Magmatisme anorogénique
Dans les zones qui ne subissent aucun événement orogénique compressif, se mettent
en place des volcans en surface et des complexes annulaires en profondeur, apparte-
nant généralement aux séries alcalines. On appelle ce magmatisme anorogénique,
bien qu’il puisse être synchrone de phénomènes orogéniques se déroulant ailleurs
dans le monde. L’essentiel du magmatisme anorogénique se concentre dans les rifts
intra-continentaux, mais il existe aussi des provinces sans rift associé. Le magma-
tisme anorogénique alcalin est caractérisé par l’abondance remarquable des termes
évolués (granite/rhyolite, syénite/trachyte, syénite néphélinique/phonolite) relative-
ment aux termes basiques (basanite, basalte, hawaïte). Plusieurs associations ont été
définies (Fig. 4.11) :
1
2
G
3
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5 4
A P
1 Série tholéïtique
2,3,4 Séries intermédiaires
5 Série alcaline
259
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
c) Rifts intra-continentaux
Les rifts intra-continentaux ne constituent qu’un cas particulier du magmatisme
anorogénique continental déjà décrit et les mêmes associations magmatiques alca-
lines s’y observent. Expressions en surface de fractures lithosphériques profondes,
les rifts favorisent la mise en place de grands volcans et de leurs racines plutoniques.
Deux types principaux ont été distingués :
• les rifts peu volcanogènes sont caractérisés par de faibles taux d’extension,
comme par exemple le Fossé du Rhin, le Rift de Baïkal et la branche occidentale
du Rift Est-Africain. L’activité volcanique est discontinue et les volumes émis de
magmas sont faibles, avec un rapport volumique basaltes/roches différenciées très
élevé. Les associations alcalines sont fortement sous-saturées en silice (néphélinites,
basanites et leucitites) et faiblement différenciées (roches acides rares) (Tab. 3.10,
analyses 15 à 16).
260
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
A. Arachnogrammes des
roches basiques alcalines Roches basiques alcalines de Corse
de Corse normalisées par 100
rapport aux MORB dolérite Corse
(Platevoet, 1990). Pour
gabbro Corse
comparaison, ont été
reportées les courbes du 10 HPT Paraná
basalte HPT du Paraná
Fangataufa
(Fig. 4.10) et du basalte
alcalin de Fangataufa
(Fig. 4.7). Les courbes sont 1
voisines, à l’exception des
éléments Th, Ta, Nb et Ce
qui sont moins abondants
en Corse. Ceci suggère que
0.1
les manteaux sources et les
processus de fusion sous
les îles océaniques et les
domaines intra-plaque
continentaux sont très 0.01
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
semblables.
génétique par
cristallisation
fractionnée.
0.01
L’appauvrissement K20 Rb Ba Th Ta Nb Ce Hf Zr Sm Y Yb
marqué en Ba dans
les granites les plus
évolués est dû au
fractionnement
important de
feldspath alcalin.
261
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
• les rifts très volcanogènes présentent un taux d’extension élevé, comme le Rift
Éthiopien et la branche orientale du Rift Est-Africain. L’activité volcanique plus
continue produit de grands volumes de magmas. Le volcanisme est typiquement
bimodal avec association de basaltes et de roches acides. Toutes les séries alcalines
sont présentes et évoluent par cristallisation fractionnée ± contamination crustale.
L’alcalinité des associations magmatiques tend à décroître au cours du temps,
ainsi que vers l’axe du rift, traduisant une augmentation du taux de fusion partielle
du manteau asthénosphérique sous-jacent qui, de plus, s’appauvrit. Dans le rift
Éthiopien, les basaltes deviennent subalcalins avec une composition proche de celle
de MORB et marquent le passage vers l’océanisation. L’évolution spatio-temporelle
des séries alcaline → tholéiitique dans les rifts continentaux est donc l’inverse de
l’évolution tholéiitique → alcaline observée dans les îles océaniques.
Faille transformante de
fin de zone de suture
K Kimberlites
Roches alcalines,
filons annulaires
Tremblements de terre
Nouvel océan B Mont sous marin
K K Bassin sédimentaire
Séismes dispersés
K K nombreuses failles
réactivées N Anomalie magnétique
ne
Vieux craton zo
(âge 1000 ma) n ne ture
cie su
An de
FAILL
E TRAN
SFOR
MANT
E
A M O U EE
Nouvel océan A
E C E SS
N
IE
R I QU P LI
BR
ZO E
O TUR
IN
C E LE I - P FAILL
P FIN
A E TRAN N
SFOR
MANT
E
Chaîn N
Ancienne zone de faiblesse e sou
s-mari
réactivée lors de l'ouverture ne
mésozoïque ou cénozoïque N+1
N N+1
262
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
À partir de l’étude des systèmes isotopiques (Sr-Nd-Pb-O), les sources des magmas
peuvent être regroupées en plusieurs réservoirs distincts :
• un réservoir enrichi, caractérisé par les rapports 87Sr/87Sr = RiSr ≈ 0,703-0,707 et
143
Nd/144Nd = RiNd ≈ 0,5130-0,5121, et souvent considéré sous la forme d’un
panache profond ;
• l’asthénosphère, résiduelle ou non, homogénéisée par les courants de convection,
avec RiSr ≈ 0,703 et RiNd ≈ 0,5132-0,530 ;
• le manteau lithosphérique très hétérogène, en général résiduel mais souvent
mésomatique, avec RiSr ≈ 0,7035-0,7100 et RiNd ≈ 0,5132-0,5122 ;
• la croûte continentale de composition très hétérogène.
Les phénomènes tectoniques extensifs favorisent la fusion par décompression de
l’asthénosphère et de la lithosphère. S’y ajoute l’intrusion possible d’un panache
chaud qui peut induire la fusion partielle des mêmes réservoirs. Les liquides prove-
nant des différentes zones de fusion se mélangent (Fig. 4.14), selon un schéma
semblable à celui proposé pour les îles océaniques (Fig. 4.8).
0
Néphélinite RIFT
Kimberlite CROÛTE
Carbonatite
MOHO
4 Métasomatose
100
Kimberlite 3
idus
Métasomatose Kimberlite Sol 1
avortée
200
L i q u i d e
Solidus
Profondeur km
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300 2
Magma
Vapeur
263
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
264
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
G G'
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A P
265
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
266
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
• En revanche, si la croûte océanique est jeune et chaude, elle peut fondre avant
d’atteindre la réaction de déstabilisation de l’amphibole et former alors des
magmas dits « adakitiques » (voir encart ci-dessous).
• Ainsi s’expliquent certains caractères paradoxaux du magmatisme syn-
subduction :
• Au début de la subduction d’une croûte océanique jeune, la série tonalitique (adaki-
tique) se met en place à peu de distance de la fosse, car les réactions de fusion sont
assez superficielles. Elle est assez vite remplacée dans le cas d’une subduction
ancienne affectant une croûte océanique froide. La série calco-alcaline granodio-
ritique provient alors de la fusion d’un manteau hydraté où l’amphibole se désta-
bilise, tandis que le phlogopite reste stable. La série shoshonitique ou
monzonitique provient de la fusion d’un manteau où le phlogopite se déstabilise et
libère les éléments volatils K, Rb, Ba, Th…
• Il n’y a pas synchronisme, mais un retard pouvant aller jusqu’à 50 Ma entre la
subduction océan-continent qui est la cause et le magmatisme orogénique qui en
est la conséquence. Un magmatisme présentant des caractères syn-subduction peut
subsister alors que la subduction a cessé et durer tant que le processus d’expulsion
de fluides aqueux et/ou de liquides silicatés de la croûte océanique se poursuit.
L’arrêt de la subduction empêchant tout apport de fluides nouveaux, l’ensemble
formé par la croûte océanique et le manteau supérieur se déshydrate progressive-
ment car, à ces profondeurs, les fluides sont très solubles dans les magmas (jusqu’à
35 % H2O). Au bout de 30 à 50 Ma, l’hydratation devient insuffisante et le magma-
tisme syn-subduction cesse.
267
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
TTG archéennes
Adakites Figure 4.16. Caractéristiques
chimiques des adakites, comparées
aux TTG archéennes, dans un
Calco-alcalin
«ordinaire» diagramme moléculaire K—Na—Ca.
Ce diagramme permet de mettre en
évidence la nature sodique ou potassique
des roches, ainsi que (indirectement) leur
degré de différentiation, les roches plus
différenciées étant normalement plus
riches en Ca. Le champ gris correspond à la
gamme de composition des laves calco-
Na Ca alcalines d’arc « ordinaires ».
Au point de vue des éléments en traces, les adakites ressemblent aux laves d’arc
ordinaires, en différant principalement par leurs teneurs en terres rares lourdes
(et en Y) faibles (par exemple 10 ppm d’Y pour 50 ppm dans les laves d’arc non-
adakitiques, 1 ppm d’Yb à comparer à 5 ppm normalement) ; ceci se traduit par
des spectres de terres rares à la forme caractéristique, très pentée ; et à des
rapports La/Yb élevés pour les adakites (Fig. 4.17).
LaN
Adakites
TTG
YbN TTG archéennes
Adakites
«Low silica» adakites 150
Laves d’arc ordinaires Adakites «low silica»
100
50
Calco-alcalin
«ordinaire»
0
La Ce Nd SmEu Gd Tb Dy Er Yb Lu 0 4 8 12 16 20 (YbN)
268
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
269
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
270
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
• Interaction adakites-manteau
Dans le modèle de fusion de la plaque plongeante, les adakites se forment en
profondeur, le long de la plaque subductée, et par conséquent sous un épais coin
de manteau que ces magmas ont à traverser lors de leur remontée vers la surface.
On peut donc s’attendre à des interactions importantes entre magmas adakitiques,
et coin de manteau.
On observe de fait des roches qui possèdent les caractères que l’on attend de
telles interactions : ce sont des basaltes ou des andésites, qui peuvent se forment
en équilibre avec le manteau ; mais leurs teneurs en éléments en traces « trahis-
sent » le lien avec des adakites, par exemple elles ont des rapports La/Yb élevés,
comme les adakites (mais pas les andésites ordinaires). Parmi les roches de ce
groupe, on parle souvent de « NEB » (Niobium-enriched basalts), de « bajaites »,
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
271
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
272
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
A
Roches calco - alcalines et shoshonitiques
1000
basalte, Chili
andésite, Chili
100
leucitite, Vulsini
basanite, Vulsini
10
0.1
0.01
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
B
Roches basiques calco-alcalines de la Marche
1000
gabbro
100 gabbro K
diorite
diorite K
10
0.1
0.01
Sr K Rb Ba Th Ta Nb Ce P Zr Hf Sm Ti Y Yb Sc Cr Ni
(Toscane, Italie) normalisées par rapport aux MORB (d’après Wilson, 1989). Les
éléments immobiles, avec des valeurs de normalisation proches de 1, indiquent un
manteau source identique à celui des MORB. Les valeurs de normalisation des
éléments mobiles varient de 10 à plus de 100 et illustrent l’effet des fluides issus
de la zone de subduction.
B. Arachnogrammes des roches basiques de la Marche (Massif Central) normalisées
par rapport aux MORB (d’après Bouvier, 1985). Les symboles vides correspondent
à des roches calco-alcalines, les symboles pleins à des roches potassiques, prove-
nant des mêmes massifs plutoniques. Les roches potassiques se distinguent par un
enrichissement en éléments mobiles et immobiles de Sr jusqu’à Ti (3 à 100 fois les
roches calco-alcalines). Minéralogiquement, elles se caractérisent par le développe-
ment de carbonates, soulignant le rôle important joué par CO2 dans les fluides.
273
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
B Croûte continentale
H 2O
Croûte Solidus
océanique C H Moho
50 D Hb
Manteau
Schiste vert
Solidus
Amphibolite N
Amphibole
100
Lit
ho H 2O
sp
hè Eclogite
re
Ph
oc
éa
log
G
ni
op
H 2O qu
e Solidus
ite
150
Fluides aqueux
200
274
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
• Depuis 25 Ma, stade himalayen sensu stricto associant surrection (8-10 mm.a– 1),
écaillage de la croûte continentale de la plaque indienne avec chevauchement
dans les zones profondes et détachement dans les zones plus superficielles le long
de failles ductiles à faible pendage nord. Le métamorphisme se développe en deux
épisodes : M2, inverse, lié au fonctionnement des plans de chevauchement (Main
Central Thrust = MCT, Main Boundary Thrust = MBT) et M3, rétrograde, limité
aux zones de cisaillement. Au cours de ce dernier stade, se mettent en place les
massifs du Haut Himalaya, épais de 8 km en moyenne et constitués de deux types de
leucogranite : l’un à (muscovite)-biotite et l’autre à tourmaline-muscovite. Enraci-
nés dans les migmatites de la Dalle du Tibet et alimentés par des filons d’aplite et
de pegmatite, les massifs granitiques intrusifs s’installent par « ballooning » et
« stoping » au-dessus de la zone de décollement entre les gneiss précambriens et
leur couverture phanérozoïque.
0
Croûte continentale
H 2O B
Croûte Solidus
océanique
C H' Moho
50 D
H 2O
Hb H''
Manteau
Schiste vert
Solidus
Amphibolite
N
Amphibole
E
100 Phlogopite
Lit H
ho
sp
hè M A
re
oc G
éa
ni
H 2O qu
150 e
Fluides aqueux Eclogite R
Solidus avec H2O
200
Amphibole Magma Pyroxénite
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
métasomatique à phlogopite
275
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
obsidienne
tufs
100
10
0.1
0.01
K20 Rb Ba Th Ta Nb Ce Hf Zr Sm Y Yb
276
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
d) Granitoïdes hyperalumineux
Un dernier groupe de granitoïdes orogéniques se distingue des granitoïdes calco-
alcalins par son caractère hyperalumineux marqué et des leucogranites à deux micas
par son indice de coloration plus élevé. Contenant fréquemment la cordiérite ou le
grenat almandin en cristaux automorphes et/ou tardifs en cocarde, ces granitoïdes
renferment, à côté des enclaves de l’encaissant et des restites, de nombreuses
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
S-SW N-NE
Tibetan series
b
an sla
MCT
Tibet
Midlands
ky+
H2O+CO2
CT
M
LIMOUSIN TYPE T
MM
D.W
OS L
M MBT
sur des gneiss à cordiérite par un contact anormal cataclastique tardif, le massif de la
Margeride recoupe le grand chevauchement de type himalayen de Marvejols. Ils
sont fréquemment associés aux suites potassiques d’affinités shoshonitique à ultra-
potassique, qui regroupent des roches ultrabasiques (cortlandtite) à intermédiaires
(appinites dans les Calédonides d’Écosse, vaugnérite et durbachite dans les Hercy-
nides d’Europe occidentale) proches des lamprophyres. De gisement filonien, les
278
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
fixée dans les minéraux et ne peuvent fondre qu’avec un apport de l’extérieur. Les
autres roches crustales, comme les métapélites, peuvent contenir beaucoup de miné-
raux hydroxylés (micas ± amphibole) mais, à cause de leur composition chimique éloi-
gnée de celle du minimum thermique, sont généralement assez peu fertiles. Les
migmatites qui en dérivent sont sombres (abondance des oxydes et de la biotite rési-
duelle) et pauvres en leucosomes.
279
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
COLLISION
CONTINENT-CONTINENT
Fluides Magma
Roches ortho-
ANATEXIE ANATEXIE
et/ou para-
« HUMIDE » « SECHE »
dérivées
Leucogranites à Granitoïdes à
deux micas biotite ± cordiérite
a) Magmatisme archéen
L’Archéen couvre le tiers de l’histoire de la Terre, depuis 4,0 Ga environ jusqu’à
2,5 Ga. C’est une période à la géologie exotique, les principales différences avec la
Terre actuelle étant (1) une production de chaleur plus élevée, résultant en un
manteau globalement plus chaud ; (2) une croûte continentale plus rare, pas encore
formée. Ces changements entraînent quelques différences géologiques majeures :
(1) un mode de convection mantellique (et donc de tectonique des plaques) poten-
tiellement différent de ce que l’on connaît à l’heure actuelle, sans que l’on puisse
être sûr qu’il existait une tectonique des plaques archéenne ; (2) une déformation de
la lithosphère dominée par les forces de volume, avec pas ou peu d’épaississement
crustal, et donc de topographie ; (3) la rareté des grandes accumulations sédimen-
taires (en particulier détritique), et donc des roches magmatiques qui en dérivent.
En dépit de quelques rares unités sédimentaires, la large majorité des roches
Archéennes connues sont des roches magmatiques (ou des roches métamorphiques
qui en dérivent). On les trouve dans trois ensembles géologiques principaux
(Fig. 4.26) :
1. des associations de laves et de sédiments, souvent de faible degré métamor-
phique, assez fréquemment bien préservées : les « ceintures de roches vertes » ;
2. des plutons de granitoïdes de différentes natures ;
280
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
3. des « complexes de gneiss gris », qui sont dominés par des orthogneiss mais
contiennent aussi les équivalents déformés des roches des ceintures de roches
vertes.
Nelspruit
.
Gp
lS
aa
sv
Mp
an
Barberton um
Sw alan
Tr
az ga
ila
nd (R.S
. A.
)
Badplaas Pigg's Peak
Lochiel
Jessievale N
Mbabane
JFM Oct 2010
Grp d’Onverwacht
Grp d’Onverwacht
(faciès amphibolite)
TTG
{ ca. 3,45 Ga
3,55 - 3,50 Ga
Rép. Sud-Africaine
Swaziland
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
On trouve aussi quelques intrusions plus basiques, comme des anorthosites ou des
complexes basiques lités, bien plus rarement cependant qu’au Protérozoïque (2.5 –
0.6 Ga) ; et des massifs de syénite.
Les deux types de roches « emblématiques » de l’Archéen sont les komatiites et
les TTG ; ce sont des roches uniques à cette partie de l’histoire de la Terre, qui dispa-
raissent (sauf exception) à partir de la fin de cette période.
• Les laves des ceintures de roches vertes
Les CRV sont dominées très largement par des laves basiques et ultrabasiques,
formant des coulées souvent sous-aquatiques avec des pillow-lavas, parfois des niveaux
de tuffs surtseyens, etc. Ces laves forment des piles d’une épaisseur impressionnante,
atteignant facilement 10 km (Fig. 4.27), souvent entrecoupées de rares niveaux de laves
plus acides (cf. plus bas), et de niveaux de cherts (dans les CRV Archéennes, ce sont
le plus souvent des cherts de remplacement, qui se forment par silicification de roches
existantes, autour de systèmes hydrothermaux au fond des océans).
Vers le haut de leur stratigraphie, la plupart des CRV présentent une plus grande
diversité ; aux laves basiques, toujours dominantes viennent se superposer des laves
à affinité d’arc, associé à des sédiments chimiques (« BIF ») ou détritiques. Les
dernières unités stratigraphiques des CRV sont souvent des grès et conglomérats.
Laves basiques et ultrabasiques
– Tholéites
Le type le plus commun est un basalte tholéitique, comparable à des MORB
modernes au point de vue pétrologique et des éléments majeurs, mais plus riche en
la plupart des éléments traces incompatibles (voir photo 1 et photo 2 en ligne)1.
Certains basaltes sont franchement siliceux, et enrichis (« SHMB », siliceous high-
magnesium basalts) ; ils pourraient traduire soit une contamination de basaltes ordi-
naires par la croûte continentale qu’ils traversent lors de leur mise en place ; soit une
source mantellique déjà assez enrichie, peut-être en lien avec une subduction. En
revanche, les basaltes alcalins (de type OIB ou rift) sont absents dans l’Archéen.
Le contexte géodynamique de formation de ces tholéites est mal connu. Malgré
une recherche acharnée dans les 30 dernières années, on ne connaît pas à ce jour de
fragment « démontrable » de croûte océanique Archéenne. Si différentes unités dans
le monde ont été décrites comme des ophiolites, cette interprétation a été remise en
cause ou infirmée pour toutes. La nature sub-aquatique des laves, les fortes épais-
seurs enregistrées, la chimie tholéitique, semblent compatibles avec des scénarios de
type « plateau océanique » (Kerguelen, Ontong-Java).
– Komatiites
Le type le plus spectaculaire (mais pas le plus commun, il est rare par rapport aux
tholéites ordinaires) de laves Archéennes ultra-basiques est représenté par les koma-
tiites. Ce sont des laves ultrabasiques (environ 45 % SiO2) et magnésiennes (20 à
282
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
GROUPE DE
(Epaisseur > 1000 m)
Ages (Ma)
MOODIES
< 3210
Discordance angulaire
(m)
200 ≈ 3230
GROUPE DE
FIG TREE
S3, S4
100
0
(m) Fm. de Msauli Chert
Mendon
9000 Footbridge Chert
3334 Conglomérats
Kromberg
Fm. de
8000 Grès
Buck Reef Chert
3416 Formations ferrifères (jaspilite, BIF)
GROUPE D’ONVERWACHT
7000 H6
3445 Grès, argiles, dépôts volcanoclastiques
(cendres acides/intermédiaires)
Fm. d’Hooggenoeg
S1
6000
3470
5000 Chert
3000 Basaltes
Fm. de la Komati
Komatiites
2000 3481
1000
Cette séquence est idéalisée, elle ne correspond à aucune coupe réellement obser-
vée. Notez les changements d’échelle verticale pour chacun des trois groupes ; la
nomenclature utilisée est lithostratigraphique : un « groupe » a la même valeur
qu’une série chronostratigraphique ; un « supergroupe » correspond à un système
et une formation à un étage. La « stratigraphie » est dominée par des roches
volcaniques, surtout des basaltes et des komatiites, et de rares unités de laves
intermédiaires à acides, soit sous forme de dômes dacitiques (niveau H6 de la
formation d’Hooggenoeg), soit de dépôts volcano-sédimentaires (cendres rema-
niées) comme dans le groupe de Fig Tree. Les niveaux de chert sont le plus
souvent des cherts secondaires, formés par la silicification hydrothermale de
roches pouvant aller de komatiites (Footbridge) à des sédiments détritiques ou
même évaporitiques (Buck Reef) ; on y trouve des niveaux carbonés contenant des
traces de vie (Buck Reef).
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
Komatiites
Basaltes tholéitiques
Tholéites différenciées
Calco-alcalin (shoshonites, adakites, etc.)
Ultrabasique Basique Intermédiaire Acide
15
Iles océaniques
10
(A)
Subductions
5
MORB
0
40 50 60 70 80
30 % de MgO), par rapport à des basaltes ordinaires qui ont respectivement environ
50 % et 10 à 12 %. Les komatiites ont donc presque la composition d’une olivine, et
sont de fait formées presque uniquement de ce minéral.
À l’affleurement, elles forment des coulées minces (rarement plus de 1 à 2 m
d’épaisseur), parfois des pillow-lavas ou des tuffs surtseyens. Les affleurements les
plus intéressants sont ceux qui correspondent à des coulées massives. Dans ce cas en
effet, on observe une superposition de différents types pétrographiques, de bas en
haut (voir Fig. 4.29, et photos 3 à 6 en ligne) :
• brèche basale, correspondant à la progression de la coulée ;
• horizon microgrenu, à phénocristaux d’olivine automorphe ;
• zone à texture « spinifex »
• bordure figée supérieure.
Les textures spinifex (voir photo 7 et photo 8 en ligne) correspondent à un enche-
vêtrement de grands cristaux aciculaires d’olivine (en général transformée mainte-
nant en amphibole), pouvant atteindre quelques dizaines de centimètres. Ces
textures se forment dans des conditions permettant aux cristaux de grandir très vite,
mais avec peu de nucléation de nouveaux grains ; ces conditions sont atteintes pour
284
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
des forts degrés de surfusion, c'est-à-dire des refroidissements très rapides, par
exemple par la « trempe » d’une coulée très chaude dans l’eau (voir Fig. 3.8 p. 126).
La composition chimique des komatiites, très voisine de celle d’une olivine,
implique que ces roches se sont formées à partir du manteau, par fusion à très fort
degré (50 %, pour 5 à 20 % pour des basaltes). De tels taux de fusion ne peuvent
pas être atteints dans le manteau actuel ; il faut un manteau de 200 à 300 °C plus
chaud, dans lequel existaient des températures de 1 600 à 1 800 °C à 100 km, pour
atteindre ces conditions. Même comme cela, il est peu probable que ces tempéra-
tures aient été les températures du manteau « ambiant » à l’Archéen, et on pense
plutôt que les komatiites étaient des laves formées dans des points chauds, des
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
285
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
subductions actuelles. Ces roches sont intercalées dans les laves basiques « ordi-
naires », dont elles se distinguent mal sur le terrain ; mais sont souvent plus commune
vers le haut de la stratigraphie où elles peuvent localement devenir dominantes. On a
ainsi décrit :
1. des boninites (basaltes magnésiens, issus de la fusion d’un manteau très appauvri
et ensuite refertilisé par des fluides ; les boninites actuelles sont strictement liées
aux zones de subductions) ;
2. des shoshonites (laves potassiques, formées par fusion d’un manteau enrichi par
l’incorporation de sédiments, ou de liquides magmatiques issus de la fusion à
haute profondeur de sédiments)
3. des basaltes enrichis en Niobium (NEB ; basaltes enrichis, formés par la fusion
d’un manteau enrichi par des liquides magmatiques de nature TTG ou adakitique
– cf. plus bas et encart pages 267 et suivantes)
Toutes ces roches ont en commun un mécanisme pétrogénétique, la fusion
partielle d’un manteau préalablement enrichi par un composant d’origine crustale
(sédiments, basaltes enfouis, fluides…). Ce mécanisme est responsable, pour toutes
ces roches, de la création d’une signature géochimique « d’arc », c'est-à-dire simi-
laire à celle que l’on observe dans les laves d’arc actuelles avec notamment un
découplage entre les éléments solubles (LILE) et les HFSE, résultant en des anoma-
lies reconnaissables dans des diagrammes multi-éléments.
La signification géodynamique de ces types de roches est débattue ; il est tenant
d’en faire des marqueurs de zones de subductions archéennes. Mais il convient de
souligner le danger de lier un site géodynamique à une signature géochimique : la
composition d’une lave dépend de sa source et de ses conditions de fusion, et même
si certaines combinaisons sont plus faciles à réaliser dans tel ou tel site, il n’existe
pas de lien aussi direct. En l’occurrence, certains géologues proposent des hypo-
thèses alternatives, par exemple la délamination de la base d’un plateau océanique
(qui causerait, comme dans une subduction, l’enfouissement de matériel crustal dans
le manteau ; et expliquerait l’intercalation des unités « à affinité d’arc » au sein des
assemblages de type « plateau océanique »).
– Laves, tuffs etc. acides
Dans les CRV, on trouve aussi de rares intercalations de laves acides, le plus
souvent sous forme de produits d’éruptions explosives (tuffs) ou de leur remanie-
ment (grès volcano-détritiques) ; plus rarement sous forme de dômes ou de coulées.
Ces roches sont souvent altérées et délicates à interpréter ; on y retrouve :
1. des produits de différentiation des tholéites ordinaires (comme en Islande) ;
2. des « adakites » (cf. encart page 267 et suivantes) ; quoique la plupart des
adakites Archéennes ne ressemblent pas vraiment à leurs équivalents modernes,
et sont des rhyolites, qui dérivent probablement de la fusion de la croûte infé-
rieure, basaltique.
286
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
• Les granitoïdes
Les roches plutoniques acides représentent une grande partie de la croûte
Archéenne, soit sous forme de plutons circonscrits, soit sous forme de composants
déformés dans les complexes de gneiss gris. Les plus typiques des granitoïdes
Archéens sont connus sous le nom de « TTG » : tonalites, trondhjémites et grano-
diorites.
Granitoïdes d’origine purement crustale
La majorité des granitoïdes se forment par fusion partielle de roches de la croûte,
sans que le manteau ne joue un rôle visible. Les croûtes archéennes sont dominées
par des roches basiques et plutoniques, avec très peu de sédiments ; les granites
formés reflètent donc cette différence avec la Terre actuelle. Selon que la source est
plutôt basique (méta-basaltes, par exemple dans une croûte océanique) ou plutôt
acide (méta-granitoïdes), on obtient des liquides tous globalement granitiques mais
de compositions différentes en détail :
– Les granitoïdes sodiques : la série TTG
Les granitoïdes formés par fusion de roches basiques ont des compositions
sodiques, et forment une série dite « TTG » pour tonalites, Trondhjémites et Grano-
diorites (voir encart p. 267). Ce sont des granitoïdes à plagioclase-quartz, feldspath
potassique rare ; les minéraux mafiques sont surtout la biotite, plus rarement
l’amphibole (voir photos 9 à 11 en ligne). L’épidote est une phase accessoire
fréquente. Les TTG forment des plutons pré- à syn-tectoniques autour des ceintures
de roches vertes ; ou bien alors ils sont déformés et forment un composant des
complexes de gneiss gris qui dominent les terrains de l’Archéen.
Si la géochimie des TTG impose une origine par fusion partielle de roches
basiques, en présence de grenat, le site géodynamique de cette fusion reste très
discuté. En effet, on stabilise le grenat dans les méta-basaltes à partir de 10-12 kbar,
si bien que la base d’une croûte épaissie, comme une plaque plongeante dans une
subduction chaude, peuvent atteindre les conditions nécessaires à la fusion de roches
basiques. Dans le premier modèle, les TTG peuvent se former, par exemple dans des
plateaux océaniques épais, ou encore des zones de collision entre de tels plateaux ;
dans le second modèle, il s’agit de roches associées aux zones de subductions. En
fait, il semble maintenant probable que les différents scénarios ont tous existé à
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
l’Archéen, à des moments ou des endroits différents, et que la série TTG regroupe en
fait une famille de roches formées dans différents contextes.
Les TTG sont des roches extrêmement communes à l’Archéen ; certaines des plus
anciennes roches terrestres connues (les gneiss d’Acasta, dans le Nord du Canada –
4.1 Ga) sont des roches de ce type. On peut se demander si les TTG existaient avant
cette période (à l’Hadéen) ; les données, très fragmentaires, dont nous disposons (sur
des zircons détritiques de Jack Hill, en Australie, dont l’âge atteint 4.4 Ga) ne
permettent pas de conclure avec certitude ; il est possible, sans être certain, que la
première croûte terrestre ait été composée en partie de telles roches. À partir de la fin
de l’Archéen, à 2.5 Ga, les TTG deviennent plus rares ; elles restent présentes dans
le Protérozoïque inférieur (jusque vers 2.0 Ga) ; puis elles deviennent anecdotiques,
287
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
288
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4.2 • Magmatisme et géodynamique
océanique commence de disparaître par subduction sous une plaque océanique (type
Mariannes) ou continentale (type Andes). Certaines zones océaniques peuvent être
préservées par obduction. Au niveau de la frontière convergente de plaques, un
système complexe s’installe avec, de l’océan à la plaque chevauchante : fosse océa-
nique, prisme d’accrétion, arc insulaire magmatique et bassin arrière-arc.
Le magmatisme océanique s’installe dans les bassins d’arrière-arc et dans les
arcs insulaires, tandis que le magmatisme continental constitue une « Ceinture de
Feu » avec des chaînes de volcans et des batholites importants, évoluant de
compositions calco-alcalines pauvres en K à des compositions shoshonitiques
très potassiques (Fig. 4.30).
289
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
C
Figure 4.30 – Évolution du magmatisme en fin d’orogenèse
(Bonin, 1987, 1988, 1990).
A. Étape de fermeture par fin de la subduction océanique : magmatisme de marge
active d’affinités calco-alcalines (durée minimale : 100 Ma).
B. Étape de collision continent-continent : magmatisme calco-alcalin potassique,
avec ou sans anatexie crustale associée (durée moyenne : 30-50 Ma).
C. Étape de surrection, distension et tectonique décrochante : magmatisme post-
orogénique d’affinités alcalines évoluant en 10 Ma vers un magmatisme alcalin
anorogénique (durée moyenne : 70-90 Ma).
290
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4.3 • Conclusion : croissance et recyclage de la croûte
4.3 CONCLUSION :
CROISSANCE ET RECYCLAGE DE LA CROÛTE
Le magmatisme est à l’origine de la formation de la croûte, comme le montrent les
compositions moyennes des croûtes océaniques et continentales (Tab. 1.2, 1.6, 1.7 et
1.8). Dans la croûte continentale (Tab. 1.7), à peu près 86 % des roches sont magma-
tiques (64,7 %) ou orthodérivées (gneiss, 21,4 %), les 14 % restants proviennent en
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
291
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
des événements volcaniques enregistrés dans le monde (volumes émis et durée des
cycles éruptifs). Les régions les plus actives produisent jusqu’à 0,1 km3.a– 1, comme
les volcans d’Hawaï, d’Islande et du Kamchatka pour le volcanisme basaltique, et
jusqu’à 0,01 km3.a– 1, comme les volcans du Kenya, du Kamchatka et d’Éthiopie
pour le volcanisme acide.
Cependant, la relation entre le volume de magma émis au cours d’une éruption
volcanique et le volume total de magma produit dans le manteau ou la croûte n’est
pas simple. La difficulté majeure tient à ce qu’il est en général impossible d’observer
en même temps les formations volcaniques superficielles et les massifs plutoniques
profonds associés. Le rapport volumique entre roches plutoniques et volcaniques est
plus important en milieu continental qu’en milieu océanique, à cause de deux
facteurs indépendants : (1) dans les zones océaniques, les magmas à prédominance
basaltique ont une faible viscosité, (2) la lithosphère océanique, plus mince et plus
chaude, permet une ascension plus facile des magmas vers la surface. Le rapport
volumique entre roches plutoniques et volcaniques est estimé entre 3:1 et 6:1
(moyenne 5:1) en milieu océanique, entre 4:1 et 16:1 (moyenne 10:1) en milieu
continental.
Le taux global de production magmatique sur terre est évalué à 26-34 km3.a– 1
avec de fortes variations selon les sites géodynamiques (Tab. 4.3). À partir de la
dissipation de l’énergie des marées sur terre, une estimation comparable de
30 km3.a– 1 a également été calculée. Le magmatisme océanique est beaucoup plus
développé que le magmatisme continental, respectivement 87 et 13 % du total émis.
Près de 70 % sont fournis par les rides médio-océaniques et 7 % par les îles océa-
niques. Les zones de subduction, à moitié océanique et continentale, concourent
pour environ 20 %. Le magmatisme intra- continental constitue moins de 3 % du
total.
Tableau 4.3 – Production des magmas et importance des granites
(modifié d’après Crisp, 1984).
Rides
Intra- Intra-
médio- Conver-
Site géodynamique plaque plaque Total
océanique gence
continental océanique
s
Production (km3.a– 1)
Total 21,54 2,9-8,6 0,13-1,6 1,8-2,4 25,8-33,6
Roches volcaniques (RV) 31 0,4-0,6 0,03-0,1 0,3-0,4 3,7-4,1
Roches plutoniques (RP) 18,54 2,5-8,0 0,10-1,5 1,5-2,0 22,1-29,5
Granitoïdes 10,54 2,1-6,8 0,03-0,3 0,15-0,2 2,81-7,84
Volume % des granitoïdes
Par rapport au total RV + RP 12,6 72-79 15-19 8,3 11-23
Par rapport au total RP 31 85 20-19 10 13-27
Par rapport aux granitoïdes 7-19 75-87 0,7-3,8 2,5-5,3 100
Pour 100 km3 de magmas émis dans le monde, le volume des granitoïdes des rides médio-océaniques est
de 1,6 à 2,0 km3, les granitoïdes intra-plaque océaniques de 0,6 km3, les granitoïdes intra-plaque conti-
nentaux de 0,1 à 0,9 km3 et les granitoïdes des zones de convergence de 8 à 20 km3.
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4.3 • Conclusion : croissance et recyclage de la croûte
subsistent les massifs ophiolitiques et les paléo-îles océaniques accolés aux conti-
nents par obduction. Dans les aires continentales, le paléovolcanisme intra-plaque
est pratiquement aussi bien représenté que celui de subduction-collision.
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Chapitre 4 • Les interactions entre magmatisme et environnement
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4.3 • Conclusion : croissance et recyclage de la croûte
Les calculs supposent que le taux de production magmatique est resté à peu près
constant dans le temps. Cette approximation se justifie par l’importance relative du
magmatisme océanique (87 %), dont la variation de productivité a été probablement
assez faible, sur le magmatisme continental (13 %), dont la productivité est beau-
coup plus importante durant les épisodes orogéniques qu’en contexte anorogénique.
Cependant, il est possible de concevoir d’autres modèles plus compatibles avec la
suite des événements géologiques. Dans ce type de modèles, les périodes de crise,
caractérisées par une accrétion continentale forte, alternent avec des périodes plus
calmes, pendant lesquelles elle est plus faible.
Dans les cratons et les boucliers, les événements orogéniques sont toujours
diachroniques, c’est-à-dire se sont produits parallèlement, mais à des époques sensi-
blement décalées dans le temps. Les courbes de croissance de la croûte continentale
ne sont donc jamais identiques d’un bouclier à l’autre. Les débuts de l’histoire de la
Terre commencent il y a 4,566 Ga. L’Hadéen a vu l’apparition de la croûte primitive
au cours du bombardement intensif qui se poursuivit jusque vers 3,9 Ga mais il n’en
reste que des lambeaux, sous forme de cristaux de zircon âgés de 4,4 Ga et d’un
morceau de croûte continentale datée à 4,04 Ga. L’Archéen dure de 4,0 Ga à 2,5 Ga
et constitue la période majeure de croissance continentale, avec la formation d’un
volume crustal correspondant à environ 75 % de la croûte actuelle, ce qui permet
d’expliquer la précocité du magnétisme terrestre, le fonctionnement de la dynamo
supposant le refroidissement lent du noyau. Le Protérozoïque dure deux milliards
d’années, de 2,5 Ga à 545 Ma, début du Cambrien, et constitue également une période
importante d’accrétion continentale. Plus court, le Phanérozoïque ne dure que 545 Ma.
Il comprend les périodes allant de l’ère primaire, avec les épisodes orogéniques
successifs calédonien, varisque et alléghanien qui aboutissent à la dernière Pangée
connue, jusqu’à l’ère quaternaire, avec la dernière orogenèse en cours dans la ceinture
de collision alpine et himalayenne et les chaînes de subduction autour du Pacifique.
Son rôle dans la croissance des continents est encore mal évalué.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
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ÉPILOGUE
La pétrologie n’est pas seulement la description des roches. Elle se situe à la fron-
tière de nombreuses disciplines des sciences de la terre, dont elle emprunte les tech-
niques et les méthodes et dont elle suscite également les thèmes de recherche.
terrain.
3. Au laboratoire, le pétrologue a à sa disposition l’ensemble des techniques
d’analyse physico-chimique des matériaux. Généralement, il étudiera ses échan-
tillons de façon séquentielle, sélectionnant à chaque étape ceux qui lui paraissent
le plus propres à obtenir les résultats scientifiques qu’il désire.
a. Examen optique. L’outil premier du pétrologue est le microscope optique et
ses variantes (loupes). Pour cela, il a recours aux lames minces confectionnées
par sciage d’échantillons, polissage et amincissement des faces. Selon le type
d’observations à faire, l’épaisseur des lames varie : lames « épaisses » pour
l’examen des inclusions à l’intérieur des cristaux, lames plus minces pour la
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Épilogue
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Épilogue
visible à l’affleurement ou accessible par sondage, mais aussi les couches plus
profondes. La géophysique et la géochimie fournissent l’essentiel des contraintes
qualitatives et quantitatives, à partir desquels s’élaborent les modèles. La pétro-
logie, en étudiant les roches de la croûte et du manteau supérieur, fournit l’un des
maillons de la chaîne, tandis que les matériaux plus profonds ne peuvent être
connus que de façon indirecte par l’expérimentation sur des matériaux analogues.
Les phénomènes magmatiques actuels et anciens fournissent des données
précieuses sur l’évolution thermique et chimique de la croûte et du manteau.
2. Avec les applications des sciences de la Terre. L’homme a longtemps fait de la
pétrologie sans le savoir, en extrayant des lits des rivières ou des carrières le silex
ou l’obsidienne nécessaires à son outillage, plus tard l’argile pour la céramique,
enfin les pierres pour la construction et les minerais pour la métallurgie. La pétro-
logie endogène est importante pour déterminer les cibles de la métallogénie, qui
recherche les lois présidant à la concentration des métaux et des métalloïdes en
amas d’intérêt économique. Elle est aussi utile pour la recherche de pétrole, car
les hydrocarbures économiquement intéressants se forment en conditions de
métamorphisme léger souvent associé à des manifestations magmatiques (rela-
tions entre la mise en place des trapps du Paraná et les réservoirs de pétrole au
Brésil, par exemple). Elle est enfin essentielle en génie géologique, lors d’études
de risques géologiques ou de faisabilité de carrières. Les roches, exploitées pour
elles-mêmes et non en tant que porteuses d’éléments, sont de plus en plus utili-
sées soit sous la forme de granulats, soit en plaques (revêtement des gratte-ciels,
voire de montres, par exemple).
3. Avec la vie. Il existe nécessairement des interactions entre la lithosphère, l’hydros-
phère, l’atmosphère et la biosphère. Les manifestations volcaniques ont joué et
jouent toujours un rôle important dans les problèmes de risques majeurs. Une
éruption volcanique non ou mal prévue peut avoir des conséquences désastreuses
sur les populations. Que l’on songe aux deux catastrophes du XXe siècle : Saint-
Pierre, en Martinique, et Armero, en Colombie. Plus généralement, le volcanisme
joue un rôle dans la pollution des eaux et de l’atmosphère (catastrophe de Nyos,
au Cameroun, par exemple) et plus généralement sur les climats. Une période
d’intense activité volcanique correspond à une chute des températures et une
augmentation des précipitations dans l’hémisphère où elle se produit, à cause des
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.
aérosols acides (HCl + H2SO4) et des nuages de poussière expulsés jusque dans
la stratosphère. Les effets sur la santé sont également détectables, même dans le
cas des roches anciennes : il a ainsi été montré que la silicose des mineurs ne
provenait pas du charbon qu’ils extrayaient, mais des niveaux de verre volca-
nique intercalés dans les couches porteuses. Par ailleurs, les phénomènes volca-
niques peuvent être bénéfiques, en fournissant des sols très fertiles. L’énergie
thermique apportée par les magmas peut être domestiquée sous forme d’énergie
géothermique ou de sources thermominérales. Les sources thermominérales ont
souvent un intérêt économique, sous forme de cures thermales ou de bouteilles
mises à la vente. Enfin, le tourisme y trouve son compte (Islande, Parc du
Yellowstone, Etna, Vésuve, Stromboli, Santorin, etc.).
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Épilogue
CONCLUSION
La pétrologie a fait de grands progrès au cours de ces dernières années. L’applica-
tion à différentes échelles d’observation des lois établies par la physique et de la
chimie du solide et des fluides a permis de mieux comprendre d’où une roche tire
son origine, comment elle se forme, puis évolue dans le temps et l’espace. Cepen-
dant, cette science n’est pas arrivée à maturité. Les faits d’observation et d’analyse
sont reliés entre eux par des hypothèses et des scénarios, certes plausibles mais qui
demandent à être mieux établis. Il est vraisemblable que les lois les plus générales
sont connues actuellement avec suffisamment de précision mais il n’est pas impos-
sible qu’avec le progrès des connaissances, beaucoup d’idées actuelles devront être
revues et modifiées.
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Références bibliographiques
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
OUVRAGES GÉNÉRAUX OU SPÉCIALISÉS
Les ouvrages de la Série Géosciences, Sciences Sup, Dunod, Paris, sont indispen-
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INDEX
A assimilation 212
aa 136 association magmatique 154
absarokite 172 astéroïde 13
accident 297 asthénosphère 36
accrétion 8, 10, 293 atmosphère 242
achondrite aubrite 20
primitive 20 augmentation 236
acide 110, 159, 243, 245 auto-colmatage 241
adakites 267, 268, 286 automorphe 125
adakitique 264
addition de croûte juvénile 294 B
agmatite 88 banakite 172
albite 139 barrière thermique 139
alcalin 165, 166, 168, 172, 249, 259, 260, basalte 22, 100, 110
262 à olivine 168, 169
alcalinité 262 alcalin 139, 161
altération hydrothermale 151 riche en Al 172
aluminosilicate 31 riche en alumine 139
amas sulfuré massif 209 basaltes enrichis en Niobium 286
amphibole 54, 61 basaltique 30
analyse modale 298 basanite 139, 165, 169
physico-chimique 297 basique 110
anatexie 65, 86, 145, 272 basse pression 249
andésite 172, 264 basse température 266, 274
basaltique 172 bassin arrière-arc 289
andin 264 bassins d’avant-arc et d’arrière-arc 255
angrite 20 batholite 172, 229
anhydre tardif 266 benmoréïte 161, 168, 169
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Index
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Index
fayalite 142
E feldspath alcalin 139
échantillon 297 felsique 91, 110, 137
éclogite 86 fermé (système) 215
écoulement laminaire 119 ferreux hydroxylé 153
écran (screen) 191 ferrique anhydre 153
effet amphibole 260 ferrocarbonatite à ankérite et/ou sidérite 210
Bagnold 206 ferropériclase 32, 56
biotite 266 feuillet conique 190, 198
effusif 154 fiamme 157
éjecta 156 figure de Widmanstatten 19
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