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I ih Wu ll tM Ii Seon ller et Jean-Marie Lassus LES FRANCAIS AU MEXIQUE XVILEe-XXI° SIECLE Volume 2 SAVOIRS, RESEAUX ET REPRESENTATIONS a : i «. ne dow fe ya ‘akg our fi ; mr | pik Hee Feajews ated e Te toe \ : MA | ee di, sisi RECHERCHES umco-zmze> 4 ivy ue LATINES PREFACE Javier Pérez Siller et Jean-Marie Lassuss PREMIERE PARTIE : SAVOIRS, TECHNIQUES ET SENSIBILITES INFLUENCE DE L’EDUCATION FRANCAISE AU MEXIQUE ¢ Vq@uyre REGIONALE DES COLLEGES ET DES IMMIGRANTS- PROFESSEURS/ INSTITUTEURS AU XIX° SIECLE Estela Munguia ssoseseaues 1S. MECANISMES POUR LA REPRODUCTION DES SENSIBILITES + Lr Lycée Francais Et L’ECote COMMERCIALE FRANGAISE DE Mexico, 1893-1909 Javier Pérez Siller eat! « CONQUERIR A LA SCIENCE » ! LA COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE ET LES ANTIQUITES MEXICAINES, 1864-1867 Delphine Cano GuabaLaJARA ¢ SOCIALISTES UTOPIQUES FRANCAIS ET MEXICAINS DU MILIEU DU XIX® siECLE Federico de la Torre oe G£0GRAPHES FRANCAIS ET GEOGRAPHIE MEXICAINE, 1943-1989 Federico Ferndndez Christlieb aol, able des mati¢res “Wt 490 Table des Druxiime Parte t MARGINALITES ET RESEAUX Uw vovaGe Pura a-PARis-PUEBLA FT SES CONSEQUENCES Montserrat Gali Boadella ssesiniese 165 Lr CAPITAL CULTUREL ET SOCIAL DE LA COMMUNAUTE ARISTOCRATIQUE MEXICAINE A PARIS, 1850-1914 Victor Macias 189 LA SENSIBILITE FRANGAISE A TABLE ¢ BANQUETS, CAFES, RESTAURANTS ET PATISSERIES Raquel Barcel Quintal LE VOL AVEC HOMICIDE DE LA BIOUTERIE « LA PROFESA » : Mémoire puN CRIME COMMUN Steven B. Bunker QUAND LES FRANGAISES DEBARQUENT aU MEXIQUE Rosalina Estrada Urroz ane TroisiiMe PARTIE 3 FICTIONS ET REPRESENTATIONS be Manrcet ScHwo ET FRANCOIS VILLON RELUS PAR JuAN José ArREoLa Jean-Marie Lassus Paris ET Le RETOUR A LA TERRE NATALE 3 Du Mopernisme A FA « EL ATENEO DE LA Juventud Adela Pineda Franco ieee at? matiéres « TLACTOCATZINE, DEL JARDIN DE FLANDrS HISTOIRE ET FANTASTIQUE DANS LE PRE MIER C, ‘ARLOS Fi Nestor Ponce TENTER 341 IMAGES CORPORELLES : HisTomRE ET CHIMERE DANS LE MONOLOGUE DE CHARLOTTE DANS Drs ) Nouventes pe 1’ Empire Olivia Vdzquez-Medina een ino 355... } GEOGRAPHIE DU REGARD : LA MIGRATION DE L’IMAGE DANS LE VOYAGE PITTORESQUE AU MEXIQUE DU XIX° SIECLE | Adriana Méndez Rodenas saeeeees =e 371 UN PEINTRE FRANGAIS REINVENTE LE MEXIQUE ANCIEN. JeAN-FREDERIC MAXIMILIEN DE WALDECK : « LE SACRIFICE GLADIATORIAL » (CA. 1869) Marie Lecouvey - 393 LIMAGE DE LA FRANCE CHEZ LES APPRENANTS MEXICAINS Yves Robin . 423, ‘ua Dram top fa Vida del Anda: Guerrillero : oa ET LE RETOUR A LA TERRE NATALE ? qu A ODERNISME A « EL ATENEO DE LA JUVENTUD » AIR Der Adela Pineda Franco Université of Boston Traduction : Raffaela Dragone Résumé Frangais Espagnol $% Fr couverture : 318 Ww Adela Pineda Franco ortance du lien établi entre Paris etles ge. hispano-am ricains qui vont du modernisme suite le cas de Martin Luis Guzmdn -1936). Celui-ci se déroule pring. pagne avec Ur intermede parisien entre aotit 1926 Te figure de Guzman comme intellectuel de lg Revolution mexicaine dans les chroniqu®® de q époque et dans son roman Laigle et le serpent, se forge a partir a représentation spécifique de T'espace 4 énonciation (Paris), d’un processus nar ratif de remémoration, ses aventures dans le camp villiste de lg Révolution, et de sa place particuligre sur | échiquier politique du moment, celle d’opposant a Calles. Ce travail se propose de débar. rasser la littérature de Guzman "etiquette de « Roman de lz pour la situer dans le contexte de la lit e-deux guerres et dans son Je souligne limp iv ins border ¢ exil (1925 n Cet artic nérations d’écr au criollisme pour al lors de palement en Esp et octobre 1927 son second Revolution mexicaine », térature hispano-américaine de Vente dialogue avec l'Europe. Este ensayo resalta la relacién de Paris con las promociones de «= critores hispanoamericanos que van del modernismo al criollism, para después abordar el caso particular de Martin Luis Guamén du rante su segundo exilio (1925-1936), sobrellevado principalmente en Espafia pero con un interludio parisino entre agosto de 1926y octubre de 1927. La figuracién de Guzman como intelectual des Reyolucién Mexicana en las crénicas del periodo y en su novela dguila y la serpiente (1928) se arma a partir de una representacion especifica del espacio de enunciacién (Paris); de un proceso rativo de rememoracién, el de sus andanzas por los campos ¥ is de la revolucién, y el de su ubicacién particular en el tablero de politica de la hora, la del oposicionista frente a Calles. La leet” aqui presentada tiene como propdsito sacar la narrativa deG de la etiqueta reduccionista “Novela de la Revolucion Mexican?» de situarla en el contexto amplio de la literatura hispan del periodo de entre guerras, y en diélogo con Europa. > pwcotl Wostration de Francisco Géuez Lass pour Iépiad «tae ama publié le 30 janvier dans la section dominicale de Bl Unierth ‘ EI Universal ustrado, Source: Universal lastrado, 30 janvier 1927, p. 1, section 3: Le Paris moderniste de la Belle Epoque na beaucoup écrit sur Ll'importance de P bole de modernité pour T'Amérique latine du Hispano-Américains considéraient que le frangais la culture et Paris, le siege de toute activité intell Dans le domaine littéraire, il ny a pas d’é France que les fameux « modernistes », qui reno gnole 4 travers leur « gallicisme mental ». Dans les premieres li nas (1896), Rubén Dario résume de fagon humoristique ce projet Le grand-pére espagnol 4 la barbe blanche me montre une « Celui-ci, me dit-il, est le grand Miguel de Cervantes Saavedra [.. Vega, celui-ci Garcilaso, celui-la Quintana. » Moi je l’interro la Sainte Thérése, sur le brave Gongora et le plus fort de to y Villegas. Puis je m’exclame : « Shakespeare ! Dante : Verlaine...!) Puis en prenant congé : «-Grand-pére, il faut que de mon pays; ma maitresse, de Paris »'. Feris constitue une cartographie érotique sur laquelle les m leurs fantasmes, mais également ceux de la anal ee Une ville littéraire, effigie de la femme et aa ; ance, du voyage transatlantique, et également tae la “bin Danio, (1896), Pras profana,Parls/ México, Librairie de Paris et le + pans ses mémoires, l’écrivain guatémalteque Enrique Gom, Jans § As ated Sllaeine es Verlaine Teclectisme cette « soif infinie d'illusions » que les His, traduit par ers Paris : « Sans aucun repére topographiqu ssentaient enve rep se concentrait dans un seul quartier, les écoles se des boulevards au charme de la bohe: Carri Pano.a, ©, tout ce ait agréable mélant ‘ing aires et la splendeur : me »*_ F, Jes modernistes contre les nationalismes littéraires dy XIX Ju « pays natal », synonyme de retard cule cains re baly 7D réalitg Siecle esp ure] populair Ja rebellion 4 0 a € -ejet categoriqui Pint de faire de Paris la Mecque de leur pélerinage. Cependant, tay que ces écrivains portent § la capitale frangaise est en réalité platonique i chimére par laquelle ils transforment leurs manques en épanouissement. Au fong ils savent que le Paris de leurs voyages imaginaires est, comme dirait Baudelaire «anywhere out of the world »°. Alin de garder une identité contestataire basée Jeur éternelle insatisfaction, ils se déclarent « esprits frangais déportés en terre, ) aveg américaines »*, Au XIX® siécle, on associait Paris non seulement a la sensibilité modernists de fin de siecle mais aussi a l'urbanisme haussmannien, au rationalisme libéral de la generation patricienne et au « rastacouérisme » des parvenus sud-américains qui arrivaient dans la ville lumiére a la recherche d’un succés facile ’. De méme, la récente industrie tour que exploitait le mythe de Paris pour les bourgesisies hispano-américaines avides de snobisme et de nouveauté. Malgré leurs objections de spécialistes de l'art pur face la bourgeoisie, les écrivains modernistes sont Whabiles tisseurs d’illusions bourgeoises. Dans les colonnes de leurs journav, Paris est leur référence favorite, Qu’ils le veuillent ou non, ces écrivains sont aus des porte-parole de l'industrie culturelle naissante et du mythe bourgeois de Paris. Bon nombre d’entre eux, comme le Cubain Julian del Casal ou le Mev! cain Manuel Gutiérrez, Najera, n'ont visite que le Paris de leur imaginaire Me : mine comme Amado Nervo, Dario et Carrillo, s'établissent dans I ee 3 Pour se consacrer a des activités diplomatiques ou journalistiques* cosmopolite » auprés des lecteurs francais. En Ee 'U, en termes historiques et pas seulement symbol ns, le mériter le titre de « aris est également cong Pe CARD + Modernistas en Paris el mito de Parson 2 iid, 200 . prs uel» dans : Cantos de vida y esperanza (1905), Made Prose avec ce titr Editorial José de Prvepa Isarna, 1974, p. 167. po Canal pr chats Babee, Ler Prods afi, cn tec isme daprés Dy dlans:« Julian del Casal », Revue Azul, 20 octobre 1895. 39%, crit? La evolucién del rastacuerismo, oeuvres complete“ comme l’argng 9 ed ' Pe icain dae UNE Possible Consécration intelle hispano-amériegig omte*te transnational, Cepend; 5 : 4 Paris a * sie éerivains atten 8 SN Cours du XIX sige) é a tiche finalement ils ne Peuvent cont ae ; on écrivains et podt ©S que Paris ne nous connait ctuelle pour I’écrivain hispano- lant, la valorisation des écrivains fe est balbutiante # Vélargir le spectre de » Sontredire la célébre citation J ai nommé: Bien que ces leurs lecteurs européens, de Dario: « (...) tous ces ", nous vivons Paris, mais uur vision cosmopolite est lige alors rien » face au public francais 1. Finalement, les ne représentaient que les marges exotiques du centre S, et moi le dernie: absolument pas »?, Le 4 la reconnaissance de « n’étre . lettres latino-améric, ines cosmopolite qu était Paris. A la fin du XIxe A Siécle, le symbolisme de socié 4 la modernité 1 francaise, critiques francais qui abordent du symbolisme comme qui, lors d’un débat ave vient un mouvement littéraire as- qui est considérée comme universelle, Les rares la littérature hispano-américaine le font 4 partir critére de valeur. C'est le cas de Rémy de Gourmont © Miguel de Unamuno, compare independance politique des jeunes Républiques américaines 4 Nentreprise d’émancipation que les moder- nistes ont menée a bien selon un procédé d’hybridation francaise sur la langue. De nombreux écrivains modernistes montrent des affinités avec Gourmont, mais ils cherchent également une indépendance culturelle en faisant de leur littérature Punique discours capable de résoudre les énigmes de l'identité latino-américaine. Cependant, ils n’obtiennent pas la consécration littéraire si désirée dans la Cos- mopolis du siécle ", Seul Rubén Dario passera a la postérité comme Je premier écrivain hispa- no-américain réellement transatlantique qui, aprés avoir abandonné sa province Pearaguayenne, synecdoque d'une Amérique latine pré-moderne, a émancipé les lettres du continent et également de |'Espagne retardataire, a partir de son empathie esthétique et linguistique avec Paris. Cependant, Dario clét le cycle du modernisme sur une note discordante, marquant sa déception envers la capi- tale francaise. Malgré une consécration liteéraire déja annoncée, vers 1913, Dario ’auto-représente aussi « fatigué par un travail déja important [...] dégotité par PR hispano-amé 4 cir : Scuwaniz, Writing Paris, Nueva York, State University * Sur les intellectuels }o-américains 4 Paris voir ; Marcy “ 2 beeen? of Nore 1999, p. 15-19 ot Sylvia Motzoy, La Diffusion dela Literature Hispano-Américaine en France au X ss “s Universitaires de France, 1972, p. 19-20. ae ee os ene y Clencla,VI/16 (1903), p. 248. « Laintele ° oe sae 1 eae ey de Remy de Gourmont et son dialogue avec les modernistes, dans le cas pte Su Feat aly Pama Fron, Seaplane on Bsns de Pry Mb Meares oe oisiae, Pittsburgh, Instituto Internacional de Literatura Iberoamericana, 2006, p. veritas hteraras, Paris et le retour ala terre natale “wt 321 foi des impresarios [...] des gran ve et la mauvaise foi des impresario: | <4 8 ns cored * fe paradis oit on respirat l'essence du bonheur sur Ia névrose » et «l’ombilic de la folie »™ Tayaric aris cessé d’étre i terre yn ot 3 Ba devenir « centre de = tr éditorial de Dario 8 Par' ne revue culturelle au intenon ses avoubes : le Mundial Magazine. C'est la fin de sa trajectoire et merciales 2 : Dans les pages du Mundial, le modernisme, comme is est publié dans une revue culturelle aug Celle toutes Je, modes, est & con i Amér a touche aussi 4 sa fin : la Belle Epoque se termine, particuli¢rement ay Mexiqn avec l’éruption violente d’une révolution paysanne. du modernisme. i plate Tae commer comme luxe décoratif '°, En Amérique latin, Le retour « au pays natal » Il suffit de relire les publications journalistiques de la fin du XIX® siecle et dy début du XX° pour s'apercevoir que le modernisme a été canonisé a Paris dans logique d’une histoire litteraire qui tentait ’internationaliser la literature hispa- no-américaine a partir de la figure emblématique de Dario. Les chroniques que Pécrivain Francisco Contreras rédige entre 1911 et 1933 dans la squelettique section hispano-américaine du Mercure de France en sont une preuve. Contreras, écrivant vingt ans aprés |’émergence du modernisme, achéve son exégese de la littérature hispano-américaine 4 partir d'un concept préfiguré : le « mondonovis- me». Avec ce concept, le Chilien propose un américanisme transcendentaliste basé sur la seconde rencontre de J'intellectuel hispano-américain européanist avec son pays natal "”, Le mondonovisme de Contreras est proche du mouvement litteraire connu en Amérique Latine sous le nom de criollisme que l'on identifiait a l’art romanesque de |’Argentin Ricardo Guiraldes et du Vénézuélien Romulo Gallegos, entre autres écrivains. Dans les histoires des écrivains criollistes, ce taines écrites partiellement ou totalement a Paris, le personnage intellectuel re- découvre et «textualise » le sens profond de son pays natal. De cette fagon il donne un nouveau sens a l’idée de « patrie » mais aussi de « Paris ». Il s’agit en CAD " Oro de Mattorca, dans Autobic iografias, Buenos Aires, Ediciones M. ' Auobiografia. Ibid., p. 94. eee Du potme « Epistola a la seiio 4 4 : re Fpistola a la seiora de Leopoldo Lugones » dans El canto errante, Madrid, Pénez Vi aviceNCIO, 1907, * Sur cette étape de Dario cons i oe a deD, ulter : Ana Maria HersAnpez be Lorez, El Mundial Magazine de Rubén Dario, Madrid, Voir & ce sujet : Alfredo Anum a ee et Al oe Ms ADA, a ronicas de Francisco Conraenas dans El Mercure de France : traduction et 53.80) eos City University of NewYork, 1995 ; ainsi que mon livre : Geopoliticas de Ja culeura finisecular (p. 53-80), cité dla note 11, 5 § ainsi que mon livre : Geopoliticas de la cultura fi « Lettres Hispano-Américaines », Mercure de France, CKXXIV/506 (1919), p42, 322 YF Adela Pineda Franco | i f | | it d’une inversion du voyage esthétique exactem 5 2 session annoncon par Dene eo cote ee aphiques trouve une Issue discursive dans ces Reare ees ‘également connus comme ceux de « la terre », sede A Paris curicusement, Contre: comme une rupture avec le moder; rite de ce mouvement. Il considére Darin comme hispano-américaine et il écrit Ja premiére (1930). La trajectoire de Dario littéraire latino-américaine tation systématique de ent comme | nouveau, as développe le concept de mondonovisme nisme, et comme une conséquence de le fondateur de biographie sommaire dy est, pour Contreras, une synthése de la généal ‘une fois dépassées les erreurs du me Vetranger et perte de conscience peuples hispano-américains) et une fois la modernisme serait 4] ‘origine d’un nouveau mouvement, déterminé a lutter Vintegrité de la « grande patrie » hispano-américaine Bolivar pour les lettres ', Le travail de du modernisme a lieu pendant le contrecarrer la vigueur de Ta matu- [a littérature Nicaraguayen logie odernisme (imi- du destin commun aux rénovation des formes accompli, le pour en réhabilitant V'idée de Promotion que Contreras réalise en faveur déclin de ce mouvement, C'est sa strategie pour la poésie naissante d’avant-garde dont il se méfie ”. Au Mercure de France, Contreras réalise un travail historiographique avec un choix d’écrivains en accord avec le modeéle mondonoviste, Au-dela de Dario, il rend hommage a des poétes comme Amado Nervo et Enrique Gonzalez Martinez, et i des essayistes comme José Vasconcelos et Alfonso Reyes. Signe funeste ou révélation lumineuse ? La Révolution et L’Ateneo de la Juventud Mn’y arien de surprenant a constater que dans sa genéalogie littéraire Contreras a privilégié les noms de Vasconcelos et surtout de Reyes. Au Mexique, ces intel- lectuels, membres d’« El Ateneo de la Juventud », ont été les premiers a traverser le Nouveau siécle aprés la Révolution mexicaine avec une vocation idealists qui, au fond, n’était pas si différente de la vocation mondonoviste. On a dit qu’avec cette vocation idéaliste, les membres de I’Athénée ont contribué sur le plan culturel, CAR "Voir : Rubén Dari. Su vida y su obna, Francisco Contnenas, Barcelone, Agencia Mundial de Libreria, Tipogratia is 390: ces de De Mercure de France, consul- » ants de Contreras a propos du modernisme et sur les idées de Dario au 5 cy a anc, ee a recente a: Paris et le retour a la terre natale. “wt 323 » Vaffront cture dy tue une idéaliste que repres airns Porfiriat, ce pragmatisme « positiviste » des s » 1. pas consti rupture radicale avec la continuité du régime *'. D’autre Pee dans la série litte. raire, |’athénéisme succéde au modernisme de fagon harmonieuse et Concertée. ce qui prouve la force constitutive de la citadelle des lettres ® et de ses adn” tations effectives au Mexique ”*. Plus qu’a une « tradition de la rupture >, aux dires d’ Octavio Paz concernant les cycles esthétiques et littéraires dans la moder. nite ¥, les mutations de la republique des lettres mexicaine sont dues en grand, Sous le déferlement de la révolution, | partie 4 l’éclatement reévolutionnaire. les jeunes intellectuels de I'Athénée d’alors éprouvent un désarroi idéologique face 4 la politique. Reyes lui-méme s'en fait I’écho au début de son journal de 19}; alors qu'il a peine vingt ans, Il qualifie alors la Revolution mexicaine de « signe funeste »”*. Fatidiquement attaché au « huertisme », Reyes doit s’exiler en France en aotit 1913, comme second secrétaire de la légation mexicaine, emportant ayec lui la blessure qui devait marquer sa vie publique future : la mort de son pére, Vinsurgé Bernardo Reyes, devant le Palais national °*, Ce fait autobiographique RR» * Dans une de ses conférences de 1910, « Don Gabino Barreda y las ideas contemporineas », José Vasconce los suggére ce parallélisme., Voir 4 ce propos : Fernando Cuniet, La Reruelea. Interpretacién del Ateneo de la Juretud (1906-1929), México, Universidad Nacional Autonoma de México, 1998, p. 286-289. ® Les manifestations publiques de I’ Athénée que la critique a interprétées comme des gestes politiques précursers du mouvement armé (par exemple, la marche non officielle du jour de I'indépendance de 1908) rentrent dans le cadre des libertés permises par le régime, Voir : Zacanias MARQUEZ, TERRAZAS, Martin Luis GuzMAN, Faagments auto biograficos, México, Gobierno del Estado de Chihuahua, 1988, p. 35-42 et Fernando Curse, La querella de Mort ae Gu2utx, México, Ediciones Coyoacin, 1993, p. 78-85. Sur V'autorisation donnée par Diaz & propos de la marche, Guzman fait le commentaire suivant : « Aprés nous avoir écoutés avec la plus grande attention, (...) Don Perio (..) parla en des termes (...) qui montrent (.,.) 4 quel point c’était un esprit prophétique et intelligent: ste dem nt accroché un fi leur chevet. Le mien se trouve il (OH 8 ion regard de tous ces importuns ». Alfonso Reves, Diario 1911-19 régalarité[ ee | Méme les ménagéres o1 _ |. Les livres détournent le r marta de Guanajuato, 1969, p, 23-24 oe ned ‘xt enblé de bales devant e Plas national le 9 feveier 1913: SH@ 177 pr . lo Reyes, voir : Frangois-Xavier Guan flexi Ps egime ; \Harmattan, Publications de la Sorbomses roel a 324 YW Adela Pineda Franco s'impose comme fracture historique de selon Reyes *”. La perte violente du fc role dintellectuel auto- la tradition lib over et de ilé qui, distant de | maison, celle des lettres, des deux catés de | jour d’importance en Europe (1913-1924) Reyes s'insére transnational * et consolide les bases du dialog es avaient tant appelé de leurs yeux Crest treras et surtout avec leur prédéce: satlantique d’internationaliser la li Paréne européenne. érale qu incarnait son pere Ses privileges conditionne son Fy politique, allait batir une ‘Atlantique. autre Lors de son premier dans un ¢ hamp cultu- gue avec I’ Europe que les moder- en ce sens que Reyes Partage avec sseur commun, Ruben Dario, la vocation ittérature et la culture latino-américaines Apparemment, le réle de Reyes était exclusivement un culturel, étranger au domaine politique. Son expérience avec la Révolution xicaine avait déterminé cette attitude méfiante, Cependant, depuis l’autorite r Jui offrait le champ culturel, Reyes a aussi fait de la politique, notamment Fs de son deuxieme séjour a Paris (1924-27), alors qu'il était déja ministre de la égation mexicaine sous le régime de Plutarco Elias Calles, Lactivité culturelle et politique de Reyes dans l'Europe de ce second séjour a fin a. un moment oi la réception de la littérature latino-américaine en Europe meilleure. Le circuit des revues frangaises manifestant un certain penchant PAmérique latine s’était accru ”’, tout autant que le nombre d’intellectuels ntéressés pas I’ Amérique latine. D'autre part, la géopolitique du moment, en ticulier le déclin de I’hégémonie frangaise sur I’ Amérique latine aprés la désas- e Premiére Guerre mondiale et face 4 l’imminence de l’impérialisme nord- cain, avait généré de nouvelles stratégies de récidive culturelle européenne nérique latine et en particulier frangaise comme le concept de latinité mis en dans les congrés de la Presse latine par Maurice Waleffe ". Dans ce contexte politique, le rle de Reyes pour redonner un sens a la culture hispano-amé- et notamment mexicaine en Europe, a sans aucun doute été important. D> Ja relation d’ Alfonso Reyes et de son pére, voir : Fernando Fadincie 1913-1959, México, Universidad Nacional Autonoma 4 @ Reyes et La France, Paris, Klincksieck, 1978, p. 32-36 5 égalen tdos, Mexico, Tezontle, 1958, p. 65-167. ee i pct le postions Soe pr Je terme de « champ » es Bourpicu fait référence 4 l’espace ot se se i enatan de biens cultures et Ia fagon dont se manifstent les instances de conssS™000. ON, 995." propos + Exays on Art and Literature, ec Randal Johnson, New York, Columbia 8, woir Patout, op. cit., p. 73-230. pre “exemple : Revue Hispanique, Nouvelle Revue Frangaise¢t Revi rien ee frangais 4 vocation hispaniste, comme Foulché- Delton Ty ye Monier, ou ceux qui étaient WS TT 30, , Jules Romains et Adrien He JJderon. Voir PArour, ep. : errenatale “Wh 325 Cuniet, ed., Guzmén Reyes. Medias palabras. Cor- de México, 1991, p. 15-19, et Paulette Patout, ment Alfonso REVES, Parentalia,primer libro de ansaup, Ernst MARTINENCHE, ispanique mais attachés & Paris et le retour ¢ dat Avec son érudition philologique face au legs littéraire de’ Occident, avec son diag. nostic prudent des nouveaux courants artistiques et littéraires, et sous | inflexion classique de sa propre ceuvre littéraire, Reyes a tenté de combattre la réception exotique, folklorique et primitiviste que les Européens avaient du Mexique, pour favoriser un rapprochement littéraire *'. Mais si en tant que promoteur de culture, Reyes affirmait cette concomitance intellectuelle du Mexique et de l'Europe, en tant que fonctionnaire public, il livrait a l’extérieur une interprétation dela Révo- lution mexicaine favorable au régime « calliste » dans le but de réaliser un tra- vail diplomatique d’une extréme importance : le re-tissage des liens culturels et financiers avec la France dans le contexte de la politique anticléricale de Calles, et des intéréts étrangers au Mexique *. Dans ses articles de presse, Reyes soutenait Mhypothése qu’une fois l'anarchisme « carranciste » dépassé, les gouvernements d’ Obregon et de Calles avaient déja fait les premiers pas vers un Etat démocra- tique désireux de rétablir |’ordre, de sauvegarder la souveraineté et de restaurer la stabilité financiére *, Ses confréres de I’ Athénée, Vasconcelos et Martin Luis Guzman, qui s’étaient vus politiquement affectés durant ces années, font objection 4 la position poli- tique de Reyes. Vasconcelos, non sans une pointe d’humour dans ses mémoires *, et Guzman, avec un sarcasme plus prononcé dans la dédicace de son roman La sombra del caudillo : « A mon cher Alfonso Reyes, dont le nom — 4 l’éclat certain ne mérite pas de figurer dans I’échelle du banditisme politique dirigé par le traitre et assassin Plutarco Elias Calles »'*. Reyes répond 4 l’affront de Guzmin en réfléchissant sur le réle tourmenté des athénéistes dans la politique mexicaine ct en justifiant la diplomatie comme une forme éthique de faire de la politique Je cite in extenso : '* Jaurais bien mieux préféré étre capable d’intervenir intimement dans la chose publique [..- ¢t mot aussi laisser mon nom dans I'Histoire répondant ainsi aux engagements de mon nom, 2° je ne le fais pas, et je n’essaie méme pas car je m’en sens totalement incapable pour les ‘alsons sentimentales que je viens d'expliquer [il se réfere la mort de son pére, CPR sais de ces années, consulter: Mare Crevmot, Miguel Angel Asturias dans {e Pats des Annes Fle, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble : 1987, p.47-74. ® Parour, op cit., p. 373-447. » Les déclarations de Reyes ont été publiges {onai 1925), Parour cite in extenso ces articles, op ci, p. 254-36 * Vasconcelos raconte que Revs décide d'inclure somo : lstent alles pour son attitude ices Washoe Na TE conser, dans une Hite intellect gu * Cute, ed., Guzman / Reyes, Medias pala clans Paris-Times (31 janvier 1925) et dans Rerue de I'Amérigque ltine 705, Op. elt, p. 134, 326 WE Adela Pineda Franco oyant que j'étais utile a quelque chose d 3 lans la diplomatie, j’ va siastion © relati be lip tie, jen suis arivé & concevoir a situation comme une relation ouverte et pure entre ma boane inevy i ; K tention et mes efforts, d'une part, et dautre part, Tdée mexicaine, platoniquement éman ipée de tout accident présidentiel ou politique » per riots de Reyer on déduit que la diplomatic devient rearaaccitc, - t représentative d’un processis plus proche de la vocation de I’écrivain: relier I'expérience personnelle june réalité nationale entendue comme une utopie platonique, une « idée » dans Jaquelle|'« accident » de la révolution deviendrait vérité nationale. A travers cette «idée », Vintellectuel pourrait finalement retrouver son « pays natal » La possibilité historique de cette « idée mexicaine » est le but vers lequel tend la pensée des athénéistes malgré leurs divergences politiques. Pour ewe, la rationalité libérale du XIX* sigcle n'est pas suffisante pour exprimer Videntité dune nation diverse et conflictuelle, d’ott leur réaction idéaliste et, en ce sens, Jeur empathie avec les modernistes. Au niveau philosophique, la convergence po- siiviome-idéalisme implique pour les membres de I’ Athénée une problématique qui a également été explorée par leurs prédécesseurs modernistes ; comment établir une relation cohérente entre le domaine du concret, royaume des sens, et celui du transcendantal, sens ultérieur et a l’origine des choses. Jorge Aguilar Mora situe cette problématique dans le domaine des pratiques du symbolisme de fin de siécle, et trouve dans le raisonnement du philosophe athénéiste Anto- nio Caso une solution simplement partielle ; « Nous savons en somme comment fonctionne la raison et pourquoi elle fonctionne ainsi, mais nous ne saurons jamais comment elle est. Docte ignorance %», La correspondance entre l’expression de larévélation intérieure de l’intellectuel athénéiste et une possible interprétation de la révolution (ce savoir étranger qui a une apparence de « signe funeste » et qui renvoie a la docte ignorance de |’intellectuel) a aussi 4 voir avec le besoin de tepenser a définition méme de |’ « intellectuel ». La vision idealiste et contempla- tive des athénéistes entre plusieurs fois en franche contradiction avec leurs incur- Sons en politique. Autrement dit, leur exploration platonique ne trouve ni dans la revolution ni dans la politique le sens ultime et transcendant du Mexique. Martin Luis Guzmén en laisse le meilleur testament dans son roman Laigle et le serpent. re “Dy, meat ume lettre datée du 17 mai 1930 adressée mais jamais envoyée & Guam, Ibid, p. 138, « Le pauve, Gun, Yeur soigner son poste & Paris. Je savais bien, quant & moi, que sa phiosophie était celle d’Enrique aged Paris vaut bien une messe, Par mon silence, j'allais aider ce cher Alphonse a préserver son petit coin py Dans La Tormenta. Obsas Complets. 1, México, Libreros Mexicanos Unidos, 1957, p. 1536. ‘de Martin Luis Guzman, Fractal 20. 5 (2001), p. 48. Paris et le retour ala terre natale, “Wt 327 A partir du legs athénéiste, Guzmén prétend transformer son expérience révolutionnaire en récit de cet intellectuel europé nisé quia finalement la révéla. tion de « son pays natal » dans la revolution. Un passage du roman est tres repré. sentatif de cette révélation : Je percevais quant & moi un sens profond, quelque chose qui révélait je ne sais quoi de Pessence du Mexique, dans le va-et-vient des hommes qui s'agitaient la entre les ombres, irs de leur marche, insensibles leur sort, et avec la carabine long rifle a l’épaule ou la hanche faite au poids du revolver. Atmosphere mysterieuse, hommes 4 la mine et a ime mystérieuses **! De cette fagon Guzman compare I’expression de sa « docte ignorance » (le « non Savoir » de son intériorité) 4 une possible interpretation d’un fait historique (la revolution) dont le centre est, de fait, hors de sa vie atélique d’intellectuel athe- néiste, En ce sens, l’aigle et le serpent est le premier livre « révélateur » de Guzman et, comme Don Segundo Sombra de I’ Argentin Guiraldes, il a été écrit & Paris ®. Cependant, dans la trame romanesque, le denouement du trajet vers les retrou- vailles avec le Mexique transcendant ne se fait pas sans déception. En réalité, le roman ne se termine pas sur une image de retrouvailles avec le pays natal. Dans les derniers mots, Guzman renvoie le protagoniste intellectuel vers |’ exil. « Mainte- nant le train avangait rapidement parmi les ombres de la nuit. Que le Mexique est grand ! Pour arriver a la frontiére il manquait mille quatre cents kilométres... “’» Cette fin est significative de la fagon dont Guzman présente la vocation de I’intel- lectuel mexicain en exil dans le contexte du criollisme latino-américain émergent. Paris et l’exil intellectuel Au cours de son premier et bref exil en 1915, et aprés avoir abandonné les camps «villlistes » de la Révolution, Martin Luis Guzman n’ écrit pas ses memoires re¥0- Jutionnaires, mais il passe en revanche par Paris, s‘intéressant au cubisme de Die- go Rivera *!, Depuis NewYork, un autre ancien membre de [’Areneo de la Juventtds CRY El dguila la sexpiente, Obras complets 1, México, Fondo de Cult “taploart des Episodes de EI dguila is Serplente ont été signés & Paris mais publiés dans El Universal de México & deux journaux mexicains, taux Etats-UInis dans : La Opinidn de Les oie ian Ano de Cultura Econbmica, 1995, Le roman de Giiraldes est publié A Parle cn vag ee meee Mee ‘a Feondmica, 1995, p, 257. postérieur au triomphe datent ses premiers live 328 WE Adela Pineda Franco ‘le Carranza et se déroule notamment a Madrid ct 8 N°" es dessais qui n'ont eu que peu de succes : La quell? pedro Henriquez Urena, récrimine cet intérét dans une lettre. avec un cert, va ertain sno- Paris ait été through Dans son envie de luj faire commande un article écrit «The look of Paris », tte lettre met en évidence son inten- pisme qu'il considere mondain : « Je regrette que ta visite de Montmartre et Montparnasse. Ceci n'est Pas Paris 9? découvrir le « vrai » esprit frangais, le Dominicain lui re par! écrivaine nord-américaine Edith Wharton intitulé Lattitude de Henriquez Urena dans cet tion de se distancier de la francisation qui c Guzman a propos de l'article de Wharton : « Si jétais toi, je dirais qu’en le lisant jeme suis senti frangais. Mais heureusement, aractérise les modernistes, et il écrit a je suis moi, et j’ai pu trouver l'article parfait sans me sentir (quelle horreur) frangais >. Comme porte-parole de la nouvelle génération littéraire ’intellectuels hispano-américains qui évoluent deja dans une sphére transatlantique, le Dominicain cherche 4 se définir en des termes moins sectaires que les modernistes. La francisation a été suffisante pour rompre avec la dépendance littéraire de la peninsule, mais il faut maintenant envisager la démarche de I'intellectuel hispano-américain en des termes plus universels, avec la notion humaniste de « culture classique », méme si cette notion n’en était pas pour autant moins colonialiste, s'agissant d'un he: ‘itage exclusivement occidental. Comme Contreras, Henriquez Urefia se méfie de l'esprit anarchique et syncré- tique de avant-garde naissante, c’est pourquoi il fait de Paris le réceptacle d'un modeste héritage gréco-latin. Le « vrai » Paris de Henriquez Ureia est également changement dans les mentalités qui annonce le nouvel esprit de l’époque. La Grande Guerre allait en finir (ou presque) avec le mythe hédoniste du Paris rasta- coucre. La chronique de voyage de Wharton capte subjectivement ce changement de sensibilité en rendant hommage a Paris en guerre. Voici une citation de Wharton : ymptomatique d'un. C’était "heure du crépuscule lorsque nous arrivames a entrée de Paris, Depuis les hauteurs de St Cloud et Suresnes, les parages de la Seine se manifestaient par les tremblantes tonalites bleutées et rosées d’un Monet. Le Bois s'étendait devant nous dans le calme nocturne d'un jour de féte [..,]. En regardant vers le bas, Are de Triomphe, les Champs-Elysees a daient sous une brume lumineuse trés fine vers la rosée des fontaines, l'obélisque éthéré, et > Guzman visite Paris avant de Mésico (Madrid, 1915) eA oils del Husdhon (NuevaYork, 1920). Au cours de eet exil Gam ii es Publier ;« Diego Rivera y la filosofia del cubismo » dans El Figaro de La Harare le 2 jar peat ee “Voir Archives Martin Luis Guzman (non encore classées), & I'hémérotheque nationale, i Seeman México, La correspondance entre Pedro Henriques Uren et Guzmin consultée aux archives montis Gu a ‘©s objections envers le cubisme, c'est griice & la médiation du Dominicain que l'article dans Le Figaro, "Archives Martin Luis Guzathy: Paris et le retour ala terre natale “Wt 329 les courants vitaux de l'été circulaient avee un battement régulier sous les arbres des aye. nues radieuses. La grande ville, faite 4 la mesure de la paix, de l'art, et de toutes Jes graces profondément humaines, semblait reposer prés de la rive de son fleuve telle une princesse surveillée par un garde géant : Ia tour Eiffel (ma traduction)". Avec la vision rétrospective de l’aprés-guerre, Alfonso Reyes va fournir une in. terprétation semblable a cette image mélancolique de Wharton. Pour Reyes, France est la gardienne de la civilisation européenne. Sa mission n’ est pas religicuse, spagne, ni politique, comme celle de I’ Empire britannique, mais éminemment civilisatrice, Selon Reyes, la France jouit d'un équilibre interne, pos- comme celle de I’ stde l’esprit leger de la Gréce et la sévérité de Rome, la curiosité intellectuelle de Thumanisme et la foi catholique, la fidélité familiale et la vigueur individualiste *, Martin Luis Guzman n’évoque la capitale frangaise en des termes similaires A ceux de Henriquez Urena et de Reyes que lors de son second exil (1925-1936), qu'il passe principalement en Espagne, avec tout de méme un interlude parisien d'aotit 1926 a octobre 1927. A l’instar de ses confréres athénéistes, Guzman uti- lise dans ses textes des images dépourvues de l’iconoclastie avant-gardiste ou du glamour de la Belle Epoque moderniste, et fait de la capitale frangaise le para- digme du patrimoine universel de la civilisation occidentale. « Chaque fois que je traverse la place de la Concorde ou que je descends les arcs stupéfiants de la tour Eiffel, j’admire autant I'esprit frangais que quand je lis Racine ou Pascal »**, Dans ses chroniques journalistiques de cette période”, il n’ a pas de trace de Montmartre ni de Montparnasse, mais uniquement des musées, des librairies, des enceintes universitaires ou des paysages aux couleurs subtiles « ott se conjuguent les douceurs naturelles de la France »**, Le Paysage de Paris est comme |’ ceuvre dart il élargit « avec l'émotion, les horizons spirituels de celui qui contemple >” RR “Wharton fait figurer cet article dans : The War on All Fronts Fighting France, From Dunkerque 10 Belport. New York, Charles & Scribners, 1917, La citation originale est la suivante : «lt Was sunset when we reached the gates of Paris. Under the heights of St. Cloud and Suresnes the reaches of the Seine trembled with the blue-pink lustre of an early Monet. The Bois ly about us in the sillnes of a holiday evening [...]. Below the Arc de Triomphe, the Champs Elysées sloped downward in a sun pondered haze tothe mis. of fountains and the ethereal obelisk ; and the currencs of summer life ebbed and flowed with a norm bea under Bs trees ofthe radiating aremues.The great city, so made for peace and art and all humenest graces, seemed to lie by econ ite lke a princes guarded bythe watchful giant ofthe Eifel Tower» (p. 6) Ponsulter « Francia antes y despues de la dans Patout, op. cit, p. 428-429 2 f,Orden y Armonia», La Prensa, 30 janvier 1927, p. 11 an nombre de ces chroniques sont réunies sous le bras completas 11, México, Fondo de Cul pas dans les acuvres complétes ; par ailleurs decide de citer les versions «Un triptico de Z: Buerra » en Crénica de Francia, t, 1, México, 1947, p, 6-7. Une synthése Uitre Crdnicas de mi destierro (Chroniques de mon exil) dans ura Econémica, 1995, p, 1035-1165. Cependant, toutes n'apparaisset 's, afin de donner au lecte journalistiques de La Prensa. Arraga La Prensa, § mars 1927, p. 3, 330 WW Adela Pineda Franco ur un cadre temporel pour ces chroniquess Cependant, la sobriété de ses Images parisiennes pn’ choix esthétiques — en fin de compte ceux du cl, hommage au Paris laborieux de Vaprés- de la capitale hédoniste °°, La mélancoli lige a sa condition d’exilé. Surveny apré: etait pas uniquement due a ses Ssicisme sur 'avant-garde, nid son guerre qui rompait avec le mythe rebattu e de ses Images parisiennes était également gt are iS samalheureuse expérience politique dans criode électorale « 2 res la periode electorale « de la uertiste >”. Les ceuvres romanesques les plus connues de Guzman : L’aigle et le serpent — El dguila y la serpiente (1928) — et L'ombre du Caudillo ~ La sombra del Caudillo (1929) sont publiges dans des journaux du Mexique et des Etats-Unis, pendant son second exil — et C'est durant cette période quil acquiert une conception particuliére du sens de Pexil pour le travail intellectuel, Le penseur palestinien Edward Said a approfondi la relation entre travail intel- lectuel et exil a partir d’un néologisme ; « exilique ». Pour Said, I’intellectuel « exi- lique » est celui qui exerce une critique negative, sans rétribution ni concertation, toujours depuis la non-appartenance, méme s'il n'abandonne jamais son pays d’ori- gine, c’est-a-dire, indépendamment du hit que l’exil soit littéral ou figuratif * seul cet intellectuel qui est exclu du pouvoir, excentré et dépourvu de pri- vileges politiques, sociaux et culturels, peut exercer une critique légitime de la société. Comme témoignage d'un intellectuel qui fait incursion dans la révolution et finalement s'exile, le récit « mémoristique » de L'aigle et le serpent constitue en lui-méme une métaphore de ce travail critique en rétrospective. Cependant, ala différence de l’opinion de Said, Guzman insiste sur la condition littérale de son exil comme base de son travail critique en Europe. Sa propre figuration dans Laigle et le serpent est liée & ce déplacement qui le met en dehors du Mexique et lui impose la volonté de redécouvrir le sens du pays natal, précisément face a Vabsence de celle-ci CAR» eI prensa, 21 mars 1927, p. 3 ‘ Be ees goer eis tc esta Paris» présen- paid ates tn phase avec les déilusions économiques de "Epoque, tout en conservant idee dune Fran ioe ode le illusion. Dans ces colonnes, Paris alt 'embléme du god pour le ravall. Cete image ple a tcion tendant ase méfier de 'art avant-garde, ee. wa 1028 0c atts An bantle ecenede cate Calles en 2 i oes Geena prttdencs) On ie que Guzmén, en publiant ce manidre gee be at des Finan du gouvernement di Olaepon dem son journal cee Onegin Vole: Cina, Oyentlap oh. 18118718 vetton de a hare ged Atala fe Fr taj Obes ixplea Sapte, 1008-103 1 Guests, dans Chee? I igs dans El Univeral (México) 1a Prensa (San Antonio, Texas) et La Opin (Los Angeles) entre os on Ed cencremmbxo 1929 respectivemen Pour cote ‘tude nous avons consulté La Pren- Plas 122 ere deel dana lord de Guzen comme inilleseneda Themaddela Rewalutne ‘2, journal ene iE pe ic th Espanol once, as Wiasie Baronet ansehen anton ® fmellectual Ble: Espa . 375-37. York, Vintage Books, 2000, P: Paris ct le retour a la terre natale “wt 331 Il faut préciser que mon argument ne prétend aucunement établir une Corres. pondance entre la réalité historique de Guonite ke sa figuration romanesque, En premier lieu, la propre trajectoire politique de l’auteur ne peut étre Considérée comme « exiique » dans le sens que Said donne au terme. Son retour au Mexiqus en 1936 inaugure une étape trés positive d’intellectuel hégémonique dans |’ Etat postrévolutionnaire. De méme, les années de son exil européen n’ont as été dépourvues de pragmatisme politique *. Je veux done dire que Vimportance donnée a la figure de l’intellectuel exilé dans L’aigle et le serpent est une stratégie narrative, car elle garantit |'éthique du narrateur-protagoniste et définit le critére de valeur de I’écriture. De cette méme fagon, Guzman projette cette stratégie de légitimité intellectuelle (celle de l’exil politique) dans ses chroniques euro- péennes de I’ époque. A partir de divers exemples, comme celui de Carlos Pereyra, historien mexi- cain exilé en Espagne, Guzman insiste sur la nécessité dencourager au Mexique Vaction concréte de l’intellectuel en tant qu’administrateur des biens culturels d'un futur Etat éthique, tout en soulignant la marginalité de l’exil qui transforme Vintellectuel en un critique nécessaire de la société et un élément dynamique d'une patrie en puissance. A ce propos, Guzman écrit : « [...] de jour en jour le ays rejette de son sein — parce qu'elle le géne, parce qu’elle lui répugne — une part de lui-méme, et cette Part, ainsi séparée de la patrie, fait alors généralement plus pour cette patric, malgré la distance, que ceux qui la gardent intégralement pour eux et & cdté d’eux » ®, Pour Guzmén, cette part extraite du sein de la Patrie est constituée par ces intellectuels qui ont mis en cause les régimes en place et se sont exilés, C'est en ce sens que le commentaire politique de Guzman comme opposant polémique a Calles et Obregén contraste avec celui de son ami diplomate : Alfonso Reyes Dans ses chroniques, Guzman critique le gouvernement mexicain 4 partir d'une analyse de la géopolitique mondiale. Son Projet, dans ces écrits, est d’invalider la complaisance de la presse européenne face au « callisme » avec des arguments qu’on associerait aujourd'hui a la pensée Postcoloniale **, Cependant, la critique Historia del periodismo es rail la dict 3 8 a eee Pe ‘Patol. De la dictadura a la Guerra Civil, tome IV, Madrid, Editor so4_Linexperto dela historia », La Prensa, 30 septembre 1926, p, 3 mo Poe aE a Mexique tls Etats-Unis luce des dei du gouvernement mexicain en matiéres pétrolitre sein Ney Pat la prese européenne bale eonanee ‘une menace & Vintégrité nationale mexicaine ‘el impérialsme nord-ameéricain mais suite uss a réflexion 5" ‘angaise, précurseur de l'entreprise napoleo” Noir: «El conde de Rousset-Boulhon 1 Prensa, 24 septembre 1926, p. 7 332 WE Adela Pineda Franco, zman de la politique mexicaine s'insere bie \s inbrale autour du ne Croissant du libéralisme, base de la dém monde, selon Guzman *. La Praxis politique du « callisme » ne donnée pour ses objectifs « revolutionnaires », mais elle doit étre répudiée ses strategies politiques critiquables *. Cette querelle politique avec la eae libérale, que lui-méme professait, trouve son origine dans son expérience person- nelle”. Comme on le verra, l’auteur de Laigle et le serpenc fait aussi de la vitalité de son expérience un principe cardinal de son écriture. D’autre part, Guzman fait aussi allusion 4 la nécessité que ressent I intellectuel dereconstruire l'image de la patrie dans!l'exil. La Prensa, journal texan 4 qui Guzman envoyait ses collaborations depuis I’ Europe, se transforme en métaphore de ce pro- oédé platonique. Guzman le décrit comme une « caisse de résonance ott convergent les ondes éparses » expulsées du Mexique, avant d’étre bientdt réintégrées dans la Peut étre par- vision intérieure éthérée de l'idée platonique nationale, et que le journal répercute avec de l’encre et du papier @. L’éternelle mélancolie de Vintellectuel est done due au fait que le fondement de cette patrie éthérée reconstruite dans I'exil repose sur la certitude de son impossibilité historique. Peut-étre est-ce pour cela que Guzman préffre au paysage majestueux de Paris l'ceuvre artistique d’un Mexicain, Angel Zarraga, dont les peintures étaient alors exposées a la légation mexicaine de Paris et a Notre Dame de la Salette “!. Sa vision de l'art de Zarraga est mélancolique Parce qu'elle évoque la correspondance simultanée entre la grandeur de Paris et Vespace absent du Mexique. Cette relation est également évidente dans ha lecture que Guzman fait du roman de I’écrivain argentin Enrique Larreta, Zogoibi : CR * Dans le contexte espagnol, Guzmén analyse le probléme du libéralisme avec se série Sreculie Pas pole Tubrique « Espafa bajo el dctador » (L'Espagne sous I'emprise du ditateur)(publiées entre le 17 novembre tle?) jan ier 1928) S Reacts Gaines espagnols une question fondamentale, savoir sile coup d’Etatavait juste par la violence syndicale et la guerre du Maroc. ‘ ee * Apris la Late violente du général saa, Serrano et de ses gecpapptcis alates reste ses {2 ‘tu S octobre 1927, Guzaan écrit « Violencia y liberalismo » (Violence et lib pee aa ites ‘ue: [.. Ie libéral |. . .] ala faiblesse de pratiquer la tyrannie au nom aed le a bea ree ee — tactiques [. ..] de manquer & ses plus intimes convictions pour ne pas voir l'appareil ostens diminué », dans La Prensa, 4 bre 1927, p. 3. x sai 4 finite, oo decredbilté 3 a. nordaméricaine « anticalie » partr seson pronre Nmoignage d'exilé politique. Voir « No se nos calumia », La Prensa, 3fevrier 1927, p. 3, La Piszas, 30 septernbrei926, p.3. 334 WE Adela Pineda Franco [.-] aurdela des simples extriovtés, quelle > grandeur set fine enceinte mexicaine, dite la mere entails jour la ans la perspective, dans le vaste espace dt noe se passe de proclamations " is ons et de de mots, grandeur qui nait du rythme ténu de quelque conn te 2 peine marquee anime en ce levard Hausman ! C'est une grandeur qui discours, presque Dans cette chronique, l’utopie de la Patrie, transcendantale, uni lib i - : » Unique et libérée de tout accident politique, est pensee dans la Perspective de Tiare futur ot | t ur ou les ifférences des Mexicains conflueront vers une meme docs: d nee ; ont vers une méme destinée, Mais cette «Idée mexicaine » se révcle seulement « dans le cadre du doute et du drame natio. 6 enc eé emer , naux»”, La rencontre éphémére qui voit | Opposants politiques se serrer la main penser au méme Guzman face au ministre de la Légation, son ami Alfonso Reyes) est un événement transcendantal mais aussi un pur instant de bonheur dans la vie of I’ « ¢crasant plafond en platre » de la légation devient « le ciel le plus transparent et plas haut que la Terre connaisse »", le ciel du Mexique. L’expérience de le le 16 septembre (ct la nous pourrions xil est donc nécessaire pour que l’intel- lectuel développe cette rhétorique de l’intériorité sur le « vrai » Mexique, rhé- torique révélatrice qui l'améne a se situer, en Europe, hors des ostentations du discours « obrégoniste » et « calliste », Dans I’attente du moment ou il pourra exercer son talent dans la vie natio- nale dans un avenir incertain, ’intellectuel représenté dans les chroniques pari- siennes de Guzman exerce, de loin, une critique légitime de la société mexicaine ; Pautorité de son discours trouve un fondement dans la culture clas que de la civilisation occidentale qui, pour les Athéndistes, était au-dela de la politique. Le retour a la terre natale ? Les inconséquences politiques de l’Athénéisme , a fale Eonlenent Cependant, dans la pensée de Guzman, la révélation de la patrie est également : ane s le « La vie de associée a I’ élément vital de I’expérience. Dans son compte rendu de « Dostoievski », Guzman fait la réflexion suivante é es de prison en Sibé- cation et les premiéres années de prison ski, mais méme cela est compen- loire du romancier. «Il est indéniable que le simulacre d’exé lee Tie constituent une étape terrible dans la vie de fuse Voxoroe s¢ par les conséquences fécondes de cette étape dans g Ae i 16 de septiembre », La Prensa, 6 octobre 1926, p. > © thug * hid Alaterrenatle “we 335 Paris et le retour Si Dostojevski n'était pas passé par l'antichambre de la mort, son ceuvre aurait-elle été , 0 celle que l'on connait © Pour Guzman I'« antichambre de la mort » a été sa propre expérience avec la Ré. volution mexicaine. En 1914, année de ses aventures révolutionnaires, Guzman envoie a Reyes une lettre depuis Nogales dans laquelle il teste Pengagement mal. heurews de I'intellectuel contemplatif, prototypique de I’Athéntisme, et qui avait en Reyes son représentant idéal, dans la Révolution ; le feu révolutionnaire trang. formait ce type d’intellectuel, maintenant incarné en la personne de Guzmén, en un Parménide « incongru et fainéant », Sila dialectique de ma vie était aussi puissante que la vétre, je jouirais peut-étre aussi de cette existence éléatique qui est la votre : ineréée et éternelle, une et indivisible, statique, Parfaite et limitée, selon ce que Parménide attribuait I'tre. Mais, pour mon malheur, je suis le préconisateur de la vie “ atélique , désintéressée et spectaculaire *, et je crois avec Heraclite dans le......... dans la fuite effrénge de l'existence, dans le symbolisme du feu, oil tout se transforme pour devenir néant : mon horreur de la finalité me rend incongru et imprévoyant, mon amour du spectaculaire m’a rendu fainéant ° J'insiste sur le fait que le probleme que souléve Guzman dans cette lettre ne porte pas nécessairement sur la contradiction entre Parménide et Héraclite comme deux possibles modeles intellectuels représentés par Reyes et Guzman respecti- vement, mais sur la praxis politique problématique de I’intellectuel contempla- tif c'est-a-dire sur le danger du feu révolutionnaire pour un intellectuel qui se croit conducteur spirituel de la société. Dés lors, il faudrait relire les derniéres phrases de L’aigle et le serpent. Le dénouement ouvert de l’intellectuel arrété dans sa route vers l’exil est aussi la preuve de I’échec de cet intellectuel dans la Révo- lution, II s'agit d'une image de désertion du projet révolutionnaire qui proposait un nouveau Mexique. Tout au long du roman, le narrateur insiste sur le fait que cet échec réside dans la Révolution méme, c’est-a-dire dans les moyens politiques qui avaient corrompu les principes sains de la lutte que lui-méme pensait suivre (rap- Pelons que ¢'était I Vargument central de sa critique du libéralisme en Europe): Cependant, la fuite précipitée du protagoniste vers le Nord, aprés avoir trahi Francisco Villa, ne peut que suggérer son absence de gloire. L’exclamation du aoa ff La vide de Dostoievski », La Pensa, 2 aotit 1926, p. 3. ILs'agit d'une biographie éerite par la fille de Ver’ mise ot qu, d'aprés Guzmén, mettait fin & bon nombre d’idées recues sur léerivain, a {Diss rerue Nous (septembre (913), Grziks publie um article gous ln ee ea vid aéicn » Voir CH 336 WF Adela Pineda Franco narrateur « Que le Mexique est grand ! » n'est ey sité du territoire mexicain, mais traduit |’ et qui s’empresse de parcourir les « mill séparent de la frontiére et de la sécurité. Lordre dans lequel furent publiés les épisodes de Paigle et Ie serpent dans La Prensa et dans El Universal suggére que, peut-étre, Guzman avait congu ces épisodes comme des unités indé- : En téte du « Retour d'un rebelle » épisode central de pendantes, car ils sont écrits dans une Laije ek wpene Correspondant au livre I de la deuxiéme chronologic trés différente de celle des Pit tans la version romaesgue publé dane fone 11 décembre 1927 sous la rubrique : « La vie mexicaine » romans et sous des genres littéraires source 4a Prem, San AntonioTexas, 1 décembre 1977, p, 3 divers”. C’est ce que suggére l’auteur lui-méme lorsqu’il déclare au critique Emmanuel Carballo ; « Ce serait facile, étant donnée sa technique, d’écrire cing ou six tomes avec ce ton et ce style »”', La présentation de ces épisodes dans les journaux men- tionnés est aussi symptomatique de leur Propre autonomic. Certains exposent Ven-téte « De mes journées révolutionnaires », et d’autres celui plus générique de «Vie mexicaine ». Dans El Universal, les épisodes sont illusteés par Francisco Gomez Linares, un des portraitistes les plus cotés des années vingt ”, Le style des illustrations criardes de Gomez Linares a contribué 4 accroitre la curiosité des lecteurs mexicains pour un recueil d’anecdotes associé a la culture populaire et ala transmission orale, La figure de Pancho Villa, par exemple, acquiert dans le graphisme de Gomez Linares les ingrédients visuels du stéréotype du guérillero audacieux mais drdle a la fois, ce que le cinéma devait exploiter avec plus d’inten- site”, A travers des illustrations moins voyantes que celles d’ El Universal, La Prensa fait la promotion des épisodes de Guzman partir de a légende naissante de al Le premier épisode publié dans ce journal, « Le réve du pére Urbina », en est la AR **Sur la publication de ce roman dans Je journal La Prensa, voir mon prochain article & paraitre dans le numéro 67 io : La narrativa de Martin, Luis dela Revista de Critica Literaria Latinoamericana ; « Ente el exo y'elfuege icine: i pe tince Naa Guzstas de 1925-29 » * Entre I’exil et le feu révolutionnaire ; la littérature de Martin Lui J'y joins un tableau comparatif de la publication Pe IS ga Siae Meren) ratpcony ecterals, 7 Emmanuel Carsauio, Diecinueve protagonistas de la literatura mexicana del siglo XX, § 1965, p.77 rraient la premiere page @?E! Uni- ™ C'était le pére de Roberto Gonez BoLasos, « Chespirito », et ses dessins ilustratent la p Paps Yersal Ilustrado et aussi dE] Continencal Le réle principal i> est le premier d’une longue série. Le film Viva Villa (1933) de Jack Conway et Howard Hawks est le pt édiatique du bouffon, « a poorly edu y Gat mapa acer comsgeeWillce Beery, ul vat cree personnage iti a Ninsees se per BU it mann i of wnith ¢ wink and ashy smile » dans Mona Sizer, Te: foolish romantic who could pull off werious moments to Reel, Lanham, Republic of Texas Press, 2004, p. 24. Paris et le retour a la terre natale “wt 337 — démonstration. Par conséquent, dans ces journaux mexicains, les épisodes qui, peu aprés, entreront dans la composition de L’aigle et le serpent invitent plus ala lecture de contes, qu’a celle d’un roman. L’auteur donne cependant & ces épisodes une structure particuligre dans LPédition de 1928, qui révéle le mes- sage le plus intéressant de l’ceuvre en tant que roman et qui n’est pas lié 4 Villa et sa légende, mais 4 Vimage de l'intellectuel. L'aigle et le serpent contient deux parties fondamentales : la premiére narre l'arrivée de |’intel- lectuel au nord du pays a la recherche de la Révolution, étape au cours de laquelle il observe et confronte ses chefs ; la seconde concerne I’engage- ment politique de l’intellectuel dans la Révolution comme chef de police «carranciste » et comme représentant de Villa, qui sont autant de masques politiques 4 l’honnéteté douteuse. Prmale icons issisreeGeomeeens Entre la premiere et la deuxiéme 4 Paris, partie, Guzman insérera le chapitre Source :La Prensa, San Antonio Texas, 13 février 1926,p.3. « Le retour d’un rebelle »’*, épisode central qui recrée le retour de Guzman dans la ville de Mexico aprés |’avoir quittée pour le Nord, En termes spatiaux, c'est une allégorie : il s’agit de la redécouverte par l’intellectuel d’un modéle idéal de ville (il n'y a pas de vestiges de l’insurrection révolutionnaire), image de la lumiére qui, platoniquement, découvre les formes réelles dans |’architecture coloniale et dans le paysage de la vallée mexicaine, Sans doute constitue-t-il le cadre paradigmatique dune révélation intérieure olt se conjuguent l’espoir de la rédemption éthique, la satisfaction du plaisir esthétique et la conviction de la mis- sion de l’intellectuel athénéiste comme futur conducteur spirituel. En d'autres termes, cet épisode aurait pu étre I’épiphanic d’un roman « criolliste » : le des- cendant européanisé de la saga des intellectuels latino-américains redécouvre son pays natal et son sens profond. CR " Eldguilay la serpente, Obras completa I, op ct, p. 349-353, 338 WF Adela Pineda Franco Cependant, cet épisode lumineux constitue, Pengagement politique de Guzman dans la Révolut ne honnéteté crue dans la deuxiéme Partie du livre et dont Je lement las paration entre Iintellectuel et le Mexique, i Par consequent, survivre au naufrage t s’attendre 4 un futur travail critique Paradoxalement, le début de 10) et or é n, engagement raconté avec dénouement est Politique et s'embarquer vers lexil te “a (et contemplatif), Propre a I’intellec- al « exilique », mais c’est aussi rendre compte du réle politique discutable de tel lectuel dans la Revolution. En délaissant le simple exercice contemplatif, en it la distance critique et en faisant entendre sa voix comme un personage [sur Véchiquier de la turbulente société qui assistait a la naissance du siecle veau, le narrateur de Laigle et le serpent découyre les pieges de son plato- le et constate que les athénéistes sont fondamentalement « politiques ». Selon le point de vue sans concession de l’intellectuel incarné dans ce roman le narrateur, le pays natal est, finalement comme le Paris des modernistes, where out of the world ». En conclusion, il est important de relire |’ euvre romanesque de Martin Luis n et de la situer hors du cadre étroit du Roman de la Révolution mexicaine qui a réduire le message de ces ouvrages a un simple recueil d’anecdotes sur le é. I] faut resituer le travail d’écriture de Guzman et de sa génération e aux cétés de celui des écrivains latino-américains qui ont lutté pour un d'énonciation face aux politiques nationales de leurs pays respectifs, mais ¢ga- ent face aux impératifs de la géopolitique mondiale. Les référents polyvalents is » et du « pays natal » contribuent a la relecture proposce ici. c 2 Paris et Je retour a la terre natale Wt 33

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