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Anesthesie de La Femme Enceinte Pour Chirurgie Non Obstericale Dalens
Anesthesie de La Femme Enceinte Pour Chirurgie Non Obstericale Dalens
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Anesthésie de la femme
enceinte pour une chirurgie
non obstétricale
Philippe Dailland
(juin 2003)
Abréviations
AG : anesthésie générale
CAM : concentration alvéolaire minimale (tra- Sommaire
duction française du terme anglo-saxon
« MAC », acronyme de « Minimum INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
Alveolar Concentration ») DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES MATERNELLES ET FŒTALES . . . . . 2
DUP : débit sanguin utéroplacentaire PRINCIPALES INDICATIONS CHIRURGICALES
PEP : pression expiratoire positive PENDANT LA GROSSESSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
RCF : rythme cardiaque fœtal RISQUES OBSTÉTRICAUX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
SA : semaine d’aménorrhée IMPLICATIONS CHIRURGICALES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
SFA : souffrance fœtale aiguë IMPLICATIONS ANESTHÉSIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
© Groupe Liaisons SA, juin 2003. La photocopie non autorisée est un délit.
Introduction
La fréquence des interventions chirurgicales réalisées pendant la grossesse est telle que tout médecin anesthésiste est régulièrement
confronté à cette situation. Cette perspective, pour un praticien dont l’activité quotidienne se déroule hors d’une maternité, soulève inévitable-
ment pour lui des interrogations sinon des inquiétudes.
L’anesthésie de la femme enceinte ne présente pas de spécificité majeure. Néanmoins, elle requiert une bonne connaissance de la physio-
logie de la grossesse et des modifications anatomiques qu'elle entraîne afin de permettre une interprétation correcte des phénomènes
per-anesthésiques et, surtout, d’avoir une conduite thérapeutique appropriée. Par ailleurs, les risques fœtaux associés à la chirurgie et à
l’anesthésie doivent être sérieusement pris en compte et faire récuser toute chirurgie non urgente chez la femme enceinte, quel que soit le
terme.
Données épidémiologiques sance in utero dans le groupe des femmes opérées (Figure 1). Le
nombre de décès au cours de la première semaine de vie est égale-
maternelles et fœtales ment augmenté dans ce groupe (Figure 1). Duncan et coll. retrouvent
une corrélation entre le type d’anesthésie (Figure 2) et de chirurgie
La fréquence de 0,2 à 2 % des grossesses retrouvée dans la littéra- (Figure 3) sur l’incidence des avortements. L’anesthésie générale et la
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ture chez les patientes anesthésiées est très certainement sous- chirurgie gynécologique augmentent de façon significative le risque
estimée en raison du grand nombre de grossesses précoces mécon- d’avortement.
nues (plus de 40 % des interventions surviennent au cours du pre-
mier trimestre de la grossesse) [1].
Les risques encourus par la mère et l’enfant sont difficiles à évaluer
véritablement, mais ils ne peuvent pas être négligés. Deux études épi- 400
démiologiques apportent des éléments de réponse. La première Femmes enceintes opérées
350 Groupe contrôle
compare un groupe de 2 565 patientes ayant subi une chirurgie au
cours de leur grossesse à un groupe identique de femmes ayant 300
p < 0,5
mené une grossesse sans intervention [2]. Elle ne trouve pas de diffé- 250
rence significative quant à l’incidence des anomalies congénitales. 200
Toutefois, les auteurs soulignent la rareté de telles anomalies et esti-
150
ment qu’il faudrait des cohortes de plus de 17 000 femmes pour
pouvoir conclure. Par ailleurs, ce travail retrouve une augmentation 100
du risque de fausses couches chez les femmes opérées sous anes- 50
thésie générale au cours du premier et du deuxième trimestre, princi- 0
palement lors d’une chirurgie gynécologique.
Mort-nés
Décès à J7
Malformations
Anesthésie
générale
Rachianesthésie
Anesthésie
locorégionale
des anomalies congénitales ;
– mais on observe une augmentation du risque de fausses cou-
ches chez les femmes opérées sous anesthésie générale au cours
du premier et du deuxième trimestre, principalement lors d’une
chirurgie gynécologique.
• Il est donc indispensable de minimiser l’exposition de la mère à
la fois aux agents diagnostiques et thérapeutiques, principalement
● Figure 2 Incidence des avortements en fonction du type d’anesthésie pendant la phase d’organogenèse.
d’après Duncan et coll. [2]
50
est variable selon le terme, dominé par les cœlioscopies au premier
40 trimestre et par la chirurgie abdominale au deuxième et troisième
trimestre (Tableau 1) [3].
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30
p < 0,5
20
URGENCES DIGESTIVES
10
0 ■ Appendicite aiguë
Anesthésie
abdominale
Anesthésie
gynécologique
Autres
anesthésies
● Tableau 1 Répartition en pourcentage des interventions chirurgicales en cours de grossesse (d’après [3])
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surtout chez des patientes ayant des antécédents d’intervention URGENCES GYNÉCOLOGIQUES
abdominale, favorise les occlusions sur bride ou les volvulus. La La torsion de kyste ovarien domine la pathologie gynécologique
symptomatologie classique de l’occlusion est présente mais est plus de la grossesse. Elle s’observe habituellement en début de grossesse
difficile à apprécier sur ce terrain [8, 9]. car la plupart des kystes se font aux dépens du corps jaune. Le dia-
gnostic différentiel se pose avec :
■ Autres urgences digestives
– une grossesse extra-utérine en cas de rupture hémorragique du
D’autres causes se rencontrent plus rarement mais doivent être
kyste ;
connues :
– le syndrome d’Ogilvie [9] ; – la nécrobiose d’un fibrome utérin ou sa torsion si le kyste est
– les ulcères gastro-intestinaux et les perforations ; pédiculé.
– les ruptures spontanées du foie et de la rate ; Le traitement est chirurgical et consiste en une kystectomie, parfois
– les pancréatites surviennent le plus souvent en fin de grossesse et même une annexectomie.
sont associées à une très forte mortalité maternelle. On retrouve
généralement un facteur favorisant (hyperlipémie, intoxication URGENCES TRAUMATIQUES
alcoolique, traitement diurétique, lithiase biliaire). Les complications traumatiques au cours de la grossesse sont
Enfin, l’indication de césarienne peut être portée au cours d’une extrêmement variées car la femme est soumise aux mêmes risques,
laparotomie, notamment devant une complication septique (périto- qu’elle soit ou non enceinte. On considère que 6 à 7 % des femmes
nite), en cas de souffrance fœtale aiguë ou si l’utérus gêne le geste subissent un traumatisme au cours de la grossesse [13].
chirurgical.
■ Traumatismes
URGENCES UROLOGIQUES Les traumatismes sont principalement liés aux accidents de la cir-
La colique néphrétique est observée avec une fréquence de culation (42 %), suivis par les chutes (34 %), les chocs directs sur
l’ordre de 1/500 [10] pendant la grossesse. Elle est favorisée par la l’abdomen (18 %) et, plus rarement, les plaies pénétrantes [14, 15]. Ils
pendant la grossesse
■ Brûlures • Le type d’intervention est variable selon le terme avec deux
Les brûlures constituent un traumatisme tout à fait particulier dominantes :
pendant la grossesse. Elles sont rares et leur fréquence n’est pas aug- – la cœlioscopie au premier trimestre ;
mentée du fait de la grossesse. L’attitude thérapeutique et l’évolution – la chirurgie abdominale (appendicectomie, cholécystectomie)
dépendent de la surface brûlée et de l’âge gestationnel [17]. Le pro- en fin de grossesse.
nostic des brûlures étendues est sombre avec une mortalité mater- • Par ailleurs, le diagnostic des urgences abdominales est très
nelle globale de 25 % et une mortalité fœtale de 39 % [17, 18]. Au souvent difficile et retardé dans la deuxième partie de la grossesse.
premier trimestre, la survie et la poursuite de la grossesse ne sem-
blent pas compromises, même pour des surfaces brûlées supérieures
à 50 %. Aux deuxième et troisième trimestres, une surface brûlée
supérieure à 50 % impose l’accouchement ou la césarienne, faute de
Risques obstétricaux
quoi la mort maternelle est quasi-inéluctable [17]. Si la surface atteinte
La chirurgie non obstétricale chez la femme enceinte implique la
est inférieure à 40 %, la poursuite de la grossesse est envisageable, en
participation d’une équipe obstétricale et pédiatrique. L’âge de la
association avec une tocolyse.
grossesse est l’un des points les plus importants à prendre en compte
dans la prise en charge. Le chirurgien, l’anesthésiste, l’obstétricien, le
URGENCES CARDIAQUES réanimateur néonatologiste ou le pédiatre doivent planifier la chirur-
Les décompensations de cardiopathies rhumatismales ou, le plus gie et anticiper ses répercussions sur la mère et sur le fœtus.
souvent, congénitales ne sont pas rares au cours de la grossesse (1 à En dehors de l’urgence vitale maternelle, il ne semble pas raisonna-
3 %). Ce risque est majoré par l’hypervolémie et l’augmentation du ble d’entreprendre un acte chirurgical sur ce terrain si la structure
débit cardiaque qui accompagnent la grossesse. L’échec du traite- hospitalière ne possède pas sur place une maternité de niveau II au
ment médical peut conduire à poser l’indication d’une correction moins et, de préférence, de niveau III. Dans le cas contraire, il faut
envisager un transfert vers une structure capable de prendre en à l’aide d’injections fractionnées afin de faciliter la mise en œuvre des
charge la mère et le fœtus dans l’éventualité où une extraction fœtale mécanismes régulateurs du tonus vasomoteur et d’éviter toute chute
deviendrait nécessaire. brutale de la pression artérielle. Un certain degré d’autorégulation de
la perfusion existe mais cette capacité reste très limitée. Cette vasoplé-
SOUFFRANCE FŒTALE AIGUË gie impose le recours systématique à une perfusion prophylactique
de chlorhydrate d’éphédrine. En cas d’efficacité insuffisante de cette
Toute intervention chirurgicale chez la femme enceinte expose au
perfusion ou en présence d’une tachycardie importante, il est souhai-
risque de survenue d’une souffrance fœtale aiguë (SFA). Le dépistage
table d’utiliser la phényléphrine (en bolus de 50 μg). L’efficacité de ce
des signes de mauvaise tolérance du fœtus repose sur une sur-
traitement est souvent spectaculaire et son innocuité sur la circulation
veillance per-opératoire du rythme cardiaque fœtal (RCF) en sachant,
utéroplacentaire est bien établie, du moins pour des doses ne dépas-
néanmoins, que celui-ci n’est véritablement interprétable qu’à partir
sant pas 300 μg [25]. Lors d’une AG utilisant un anesthésique
de la 26e SA. Avant ce terme, on peut retrouver sur le RCF des ano-
halogéné, tel que l’halothane, il est intéressant d’observer que la chute
malies pouvant faire évoquer une SFA mais sans réalité clinique.
de la pression artérielle maternelle obtenue pour de faibles concen-
La SFA est la traduction clinique de l’hypoxie fœtale. Les paramè-
trations s’accompagne d’une chute des résistances vasculaires utéri-
tres maternels contrôlant l’oxygénation fœtale sont la PaO2, la capa-
nes, ce qui préserve le débit de perfusion utéroplacentaire [26]. Ce
cité de transport de l’oxygène (contenu en O2 ), l’affinité de
dernier va néanmoins être abaissé si l’on applique de fortes concen-
l’hémoglobine pour l’oxygène et, enfin, le débit de perfusion utéro-
trations d’halothane (entraînant une diminution de la pression arté-
placentaire. Le monitorage per-opératoire de la femme enceinte doit
rielle de l’ordre de 30 à 40 %).
donc permettre le dépistage chez la mère d’une hypoxémie (satura-
tion artérielle), d’une hypotension artérielle et de variations éven-
tuelles de la PaCO2, reflétées par la pression alvéolaire en CO2 de fin PRÉVENTION DE L’ACCOUCHEMENT PRÉMATURÉ
d’expiration (PETCO2) sur la capnographie. Ce sont ces événements De nombreuses études de la littérature mettent plus ou moins
maternels qui doivent être redoutés car ce sont eux, et non le type directement en cause l’anesthésie dans la survenue d’un accouche-
d’agent anesthésique utilisé, qui sont à l’origine des complications ment prématuré. Shnider et coll. évaluent à 8,8 % le taux d’accouche-
fœtales graves. ment prématuré après chirurgie pendant la grossesse [27]. Capeless
Les causes principales d’hypoxie maternelle rencontrées lors de et coll. signalent également une incidence élevée, principalement lors
l’anesthésie générale (AG) comprennent classiquement le laryngo- des interventions réalisées pendant le premier et le deuxième trimes-
spasme, l’obstruction des voies aériennes, la malposition de la sonde tre de grossesse [28].
d’intubation, une FIO2 insuffisante. L’hypoxie peut également résulter La fréquence des accouchements prématurés dépend essentielle-
d’une hypotension, voire d’une hypoventilation secondaire à une ment de la localisation de l’acte chirurgical. Le risque est d’autant plus
anesthésie locorégionale trop étendue, qu’elle soit épidurale ou important que l’acte porte sur la région sous-ombilicale ou qu’il s’agit
sous-arachnoïdienne. En outre, l’hyperoxie maternelle, relativement d’une intervention gynécologique (Figure 3) : la fréquence peut
fréquente lors de la ventilation assistée, n’induit pas chez le fœtus de atteindre 28 % des cas après un cerclage utérin.
© Groupe Liaisons SA, juin 2003. La photocopie non autorisée est un délit.
fibroplasie rétrolentale ou de fermeture prématurée du canal artériel. Il n’existe pas actuellement d’étude établissant la responsabilité
La PaCO2 fœtale est directement corrélée à la PaCO2 maternelle. directe d’un agent anesthésique particulier dans la baisse ou
Une alcalose maternelle respiratoire ou métabolique provoque une l’augmentation de la fréquence des accouchements prématurés. En
chute du débit sanguin utérin par un effet de vasoconstriction [22]. En pratique, quels que soient la technique et le choix des agents
outre, l’alcalose déplace vers la gauche la courbe de dissociation de anesthésiques, le plus important semble être de monitorer les
l’oxyhémoglobine, augmentant ainsi l’affinité de l’hémoglobine contractions utérines à l’aide d’un tocographe si le site opératoire le
maternelle pour l’oxygène, provoquant une diminution de la déli- permet.
vrance d’oxygène au niveau fœtoplacentaire. L’hypercapnie mater- La principale préoccupation de l’obstétricien est de préserver l’ave-
nelle peut entraîner, si elle est profonde, une acidose avec risque de nir du fœtus quel que soit le terme de la grossesse en empêchant la
dépression myocardique. survenue de contractions utérines et, a fortiori, un accouchement
L’hypotension maternelle liée à une AG trop profonde, à une vaso- prématuré. Sur le plan thérapeutique, le recours à un traitement toco-
plégie par blocage sympathique ou encore à une hypovolémie repré- lytique est nécessaire. Certains auteurs recommandent sa mise en
sente une cause majeure de SFA, en raison de la chute du débit route, en perfusion continue, dès la période opératoire. Cependant, il
utéroplacentaire qu’elle entraîne. Davantage que son intensité, c’est n’est pas établi scientifiquement que ce traitement ait un effet pro-
sa durée qui constitue le principal facteur de gravité [23, 24]. Il faut phylactique sur les contractions utérines alors qu’il complique indé-
donc assurer une surveillance rapprochée de la pression artérielle niablement l’anesthésie, en particulier sous l’angle de la stabilité
maternelle (toutes les 2 à 3 minutes au lieu des 5 minutes habituelles) hémodynamique. En l’état actuel des connaissances, il paraît plus rai-
et un traitement rapide et efficace (expansion volémique et chlor- sonnable et réaliste de n’instaurer le traitement tocolytique qu’en
hydrate d’éphédrine) dès que la pression systolique chute en dessous début de période postopératoire ou devant l’apparition de contrac-
de 95 à 100 mmHg ou dès qu’elle s’abaisse de plus de 20 % par rap- tions utérines.
port aux chiffres de base. Les médicaments à visée tocolytique actuellement disponibles sont
La vasoplégie induite par le bloc sympathique doit absolument être nombreux. Les β2-mimétiques, tels que le salbutamol, la terbutaline
prévenue en installant très progressivement une anesthésie épidurale et la ritodrine, sont efficaces pour inhiber le travail pendant une
• Le taux d’accouchement prématuré après chirurgie pendant la chez des femmes suspectes de grossesse extra-utérine, afin d’élimi-
grossesse est évalué en moyenne à plus de 8 % principalement ner ce diagnostic. La constatation de la poursuite ultérieure normale
lors des interventions réalisées pendant le premier et le deuxième de ces grossesses intra-utérines a amené certains auteurs à reconsi-
trimestre de grossesse. dérer le bien-fondé de cette contre-indication de principe [35].
• Le risque est d’autant plus important que l’acte porte sur la Lanzafame [36] a rapporté une série de 5 cœlioscopies pour cholé-
région sous-ombilicale ou qu’il s’agit d’une intervention gynéco- cystectomie durant la grossesse et a fait une revue de la littérature sur
logique. le sujet, totalisant 46 cas. La plupart des cœlioscopies étaient réalisées
• En pratique, quels que soient la technique et le choix des agents au second trimestre (4 d’entre elles l’ont été au premier trimestre et 6
anesthésiques, le plus important semble être de monitorer les au troisième trimestre). Aucun avortement ni accouchement préma-
contractions utérines à l’aide d’un tocographe si le site opératoire turé n’est survenu. Le recours aux tocolytiques n’a été nécessaire que
le permet. dans 5 cas, en raison de l’apparition de contractions utérines au
• Les β2-mimétiques, tels que le salbutamol, la terbutaline et la décours de la cœlioscopie.
ritodrine, sont efficaces pour inhiber le travail pendant une
Curet et coll. [37] ont publié une étude comparant cœlioscopie et
période courte, ne dépassant 24 à 48 heures mais présentent de
laparotomie pour la cure de cholécystectomies et d’appendicecto-
très nombreux effets secondaires maternels.
mies durant la grossesse. Ils n’ont pas trouvé de différence concer-
• Les bloqueurs calciques comme la nifédipine et la nicardipine
nant le terme d’accouchement, le score d’Apgar et le poids à la
ont une activité tocolytique au moins égale à celle des β2-miméti-
naissance. En revanche, il existait une différence significative en défa-
ques en perfusion intraveineuse, mais sans en présenter tous les
veur du groupe cœlioscopie concernant la durée de l’intervention (82
effets indésirables.
minutes contre 49) mais la reprise du transit était plus précoce (1 jour
• Enfin, très récemment a été commercialisé un inhibiteur compé-
contre 2,4) et la durée d’hospitalisation était raccourcie (1,5 jour con-
titif de l’ocytocine, l’atosiban, pour lequel il n’y a encore pas de
tre 2,8). Ces résultats confirment que les bénéfices classiques de la
données disponibles quant à ses interférences potentielles avec
cœlioscopie peuvent être également retrouvés chez la femme
l’anesthésie.
enceinte.
Amos et coll. [35] sont les seuls, à la date de parution de ce chapi- ultérieurement. Dans ces conditions, la PETCO2 maternelle a aug-
tre, à avoir rapporté des cas de mort fœtale survenus dans les suites menté de 50 % et la PaCO2 de 60 % au cours du pneumopéritoine,
de cœlioscopies réalisées au cours de la grossesse. Leur étude com- entraînant ainsi une diminution du pH fœtal parallèle en fait à la dimi-
parait 2 groupes de patientes opérées à la même période, un groupe nution du pH maternel. Néanmoins, toutes ces perturbations
laparoscopie (n = 7) et un groupe laparotomie (n = 5). Les indica- per-cœlioscopique avaient tendance à disparaître après l’exsufflation
tions de cœlioscopie étaient représentées par 3 cas d’appendicite et ne semblaient pas avoir de conséquences fœtales ou maternelles à
aiguë, 3 cas également de pancréatite biliaire et une cholécystite long terme.
aiguë. Les laparotomies ont concerné la résection de masses À l’inverse, le travail publié par Barnard et coll. [39] apporte des
annexielles (4 cas) et une laparotomie exploratrice pour un carcinome données plutôt rassurantes. Dans cette étude, un pneumopéritoine à
de l’ovaire. Quatre décès fœtaux ont été dénombrés dans le groupe 20 mmHg était appliqué pendant 1 heure chez des brebis gravides et
cœlioscopie (3 durant la première semaine et 1 à la quatrième la PaCO2 était maintenue constante à 37 mmHg tout au long de
semaine postopératoires). Les auteurs reconnaissent les limites de l’expérimentation, grâce à l’adaptation de la ventilation contrôlée. La
leur travail du fait de l’hétérogénéité des pathologies et des facteurs seule modification constatée par ces auteurs concernait une diminu-
de risques, notamment infectieux, entre les groupes cœlioscopie et tion du débit sanguin placentaire maternel de - 39 %. Les autres
laparotomie. paramètres, et notamment la pression de perfusion placentaire fœtale
L’anesthésie générale avec intubation orotrachéale et ventilation et l’équilibre acide-base fœtal, n’ont pas été affectés. Les auteurs con-
contrôlée est habituellement recommandée pour la réalisation de cluaient que le fœtus de brebis présente des réserves de débit placen-
cœlioscopie chirurgicale en dehors de la grossesse [38]. Cette attitude taire suffisantes pour maintenir des échanges gazeux normaux,
est encore plus impérative durant la grossesse. En effet, l’alternative malgré un pneumopéritoine à 20 mmHg pendant une heure.
que représente le recours à l’anesthésie locorégionale, dans cette Le travail de Cruz et coll. [40] va dans le même sens. Ces auteurs
indication précise, paraît très discutable, voire dangereuse, en raison n’ont pas constaté d’effets délétères fœtaux ni même d’altérations du
du cumul des contraintes hémodynamiques et surtout respiratoires débit utéroplacentaire en maintenant la PaCO2 constante, grâce à
de la cœlioscopie d’une part et de l’état gravidique de l’autre. En effet, l’adaptation de la ventilation contrôlée. En revanche, ils ont constaté
la création du pneumopéritoine, l’existence d’un bloc sympathique une augmentation considérable (de 6 à 16 mmHg en moyenne) du
étendu (T4-S5) et la compression cave par l’utérus gravide pourraient gradient PaCO2-PETCO2 lors de l’insufflation péritonéale. Cet effet
entraîner une baisse importante du retour veineux et donc du débit semble propre à la femme enceinte [42]. La raison de ce phénomène
cardiaque avec le risque, in fine, d’engendrer une souffrance fœtale demeure obscure mais il faut retenir qu’une sous-estimation très
aiguë. En fait, si la tolérance de cœlioscopie elle-même, semble bonne importante de la PaCO2 peut se produire si la PETCO2 est utilisée
sur le plan de 1’hémodynamique maternelle [39-41], il n’en va pas de seule pour adapter la ventilation chez la femme enceinte subissant
même sur le plan respiratoire et l’anesthésie locorégionale risquerait une cœlioscopie.
d’aggraver encore la situation du fait de la faible réserve ventilatoire Afin de supprimer complètement le retentissement du pneumopé-
liée à l’état gravidique. ritoine au CO2, Iafrati et coll. [43] ont proposé de réaliser des cœlios-
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L’abord chirurgical cœlioscopique pendant la grossesse contraint copies « sans gaz » grâce à un système de bras permettant de
donc à la réalisation d’une anesthésie générale dont on connaît suspendre la paroi abdominale. Un cas de cholécystectomie a ainsi
cependant les risques spécifiques chez la femme enceinte. Ces élé- été réalisé par ces auteurs durant la grossesse. Les deux principales
ments sont à prendre en considération lorsqu’une cœlioscopie est limites à la diffusion de la méthode sont représentées par l’encom-
envisagée durant la grossesse. Dans les cas extrêmes où le risque brement du champ opératoire et surtout par son coût. Cependant,
d’une anesthésie générale paraît démesuré par rapport au bénéfice cette variante technique paraît très attrayante, tout particulièrement
escompté de la cœlioscopie, on peut être amené à rediscuter l’indica- au cours de la grossesse.
tion si le geste chirurgical peut se réaliser par laparotomie sous anes- Enfin, une grande série épidémiologique est venue récemment
thésie locorégionale. confirmer l’absence de différence en termes de poids de naissance, de
Les effets du pneumopéritoine au CO2 sur la physiologie materno- durée gestationnelle, de retard de croissance intra-utérin, de malfor-
fœtale sont encore mal compris. Les études disponibles concernent mations congénitales, et de mortalité néonatale chez 2 181 patientes
des modèles animaux (brebis gravide). L’étude de Curet et coll. [41] enceintes, entre 4 et 20 semaines d’aménorrhée, opérées sous
montre des résultats inquiétants concernant les effets de l’insufflation cœlioscopie et comparées à 1 522 patientes ayant eu une laparoto-
péritonéale de CO2 sur l’équilibre acidobasique fœtal. Ainsi, la créa- mie [44]. En définitive, la réalisation d’une cœlioscopie durant la gros-
tion d’un pneumopéritoine au CO2, à 15 mmHg pendant 30 min, a sesse ne soulève plus d’opposition de principe. Néanmoins, un
entraîné non seulement une diminution du débit sanguin utérin de certain nombre de conditions doivent être réunies. La cœlioscopie
40 % par rapport aux valeurs de base mais également une acidose doit être effectuée par un opérateur expérimenté, de préférence au
fœtale. cours du deuxième trimestre de la grossesse. Le geste envisagé doit
Cependant, l’objectif de cette étude était d’observer les variations être simple et la survenue d’une difficulté opératoire doit conduire à
des différents paramètres hémodynamiques et ventilatoires, mater- une conversion rapide en laparotomie.
nels et fœtaux, en l’absence de toute intervention compensatrice. En Enfin, les problèmes particuliers liés à l’insufflation péritonéale de
particulier, la ventilation maternelle était réglée au départ de façon à CO2 au cours de la grossesse pourraient justifier un recours plus
obtenir une PETCO2 entre 33 et 38 mmHg et n’était plus modifiée large au contrôle gazométrique artériel et au monitorage
● Tableau 2 Âge de développement de chaque organe l’importance des concentrations utilisées et des durées d’administra-
et son maximum de sensibilité aux substances tératogènes tion, nettement supérieures à celles de la pratique courante. Les
études utilisant des doses modérées (0,75 CAM) d’halogénés, même
Organe Age de développement (en jours) lorsqu’elles sont été administrées pendant plusieurs heures, ne
Cerveau 18-40 retrouvent aucun effet tératogène [52]. Plusieurs auteurs se sont inté-
ressés à l’exposition professionnelle chronique des femmes tra-
Cœur 18-40
vaillant dans des blocs opératoires : aucune étude n’a montré
Œil 24-40 l’existence de corrélations entre une telle exposition professionnelle
Membres 24-36 aux agents halogénés et un risque accru de malformations fœtales
Organes génitaux masculins 45-70 [53]. Là encore, en pratique, la discordance des résultats des études
Organes génitaux féminins 40-150 animales entreprises, l’expérience clinique représentée par des
années d’utilisation en bloc opératoire et les résultats négatifs des
études épidémiologiques permettent de présumer l’absence de téra-
Benzodiazépines togénicité des anesthésiques halogénés pendant la grossesse, à con-
Le diazépam inhibe significativement la croissance des neurones dition qu’ils soient utilisés dans les conditions habituelles [52].
corticaux in vitro [45]. Les benzodiazépines doivent être évitées pen- Anesthésiques intraveineux
dant la grossesse car elles entraînent une fréquence accrue de fentes
Il n’existe pas d’étude réellement ciblée sur les effets tératogènes
labiales et palatines [46]. D’autres malformations, telles l’absence de
potentiels du thiopental lors de son administration pendant la gros-
pouce, les hernies inguinales, des anomalies de fermeture du tube
sesse. Les études concernant les barbituriques se sont essentielle-
neural avec spina bifida, et des malformations cardiaques sont égale-
ment intéressées à l’effet des traitements des patientes épileptiques.
ment rapportées [47, 48].
Elles ont montré un taux augmenté de malformations, notamment de
Le midazolam ne semble pas présenter d’effets embryotoxique ni fentes labiales et de cardiopathies lors de traitement au long cours
tératogénique. Néanmoins, parce qu’il appartient à la classe des ben- [54]. Les effets tératogènes d’une dose unique de thiopental lors de
zodiazépines, son utilisation pendant la grossesse ne peut pas être l’induction anesthésique sont certes inconnus mais les nombreuses
recommandée sauf en cas de nécessité absolue, après avoir effectué années d’utilisation sans problème de ce produit sont un gage de sa
une évaluation précise de ses avantages et de ses inconvénients, pour sûreté d’emploi.
la mère comme pour le fœtus. L’étomidate, le propofol et la kétamine ont fait l’objet d’études ani-
Protoxyde d'azote males qui n’ont pas mis en évidence d’effet tératogène. Cependant, en
l’absence d’études humaines, ces agents ne doivent être utilisés que
Le protoxyde d’azote (N 2 O), entraîne une inactivation de la lorsqu’il existe une contre-indication au thiopental.
méthionine synthétase et, de ce fait, diminue le taux de thymidine
disponible pour la synthèse de l’ADN des cellules reproductrices [49]. Analgésiques morphiniques
© Groupe Liaisons SA, juin 2003. La photocopie non autorisée est un délit.
Il augmente la fréquence des anomalies du squelette et des mal- L’utilisation prolongée de morphiniques, notamment chez les toxi-
formations viscérales chez le rat [50]. Le mécanisme de ces effets chez comanes, entraîne des retards de croissance in utero, une augmenta-
l’animal semble lié à une interférence avec le métabolisme de la vita- tion des taux d’accouchement prématuré et des syndromes de
mine B12, diminuant la synthèse de la méthionine, nécessaire au bon sevrage néonatal [55]. Cependant, leur utilisation ponctuelle lors des
développement et à la croissance du squelette et des viscères. Le interventions chirurgicales pendant la grossesse semble être dénuée
N2O interférerait également avec les processus de myélinisation [50]. d’effets tératogènes.
Enfin, son action sympathomimétique α1 semble, quant à elle, res- Un rôle favorisant de la morphine et de la péthidine (mépéridine) a
ponsable d’anomalies de latéralisation incluant le développement de été évoqué dans la survenue de hernies inguinales chez l’enfant [56]
situs inversus [51]. Cet effet tératogène et cytotoxique est cependant mais aucune étude n’a permis d’attribuer d’effet tératogène majeur à
très spécifique : il s’observe uniquement chez la ratte, pendant les 8e ces agents administrés aux doses habituelles. Seules des études chez
et 9 e jours de gestation, après une exposition prolongée la souris et chez le hamster ont montré que leur administration pen-
(> 12 heures) et à une fraction inspirée supérieure à 50 %. Cela fait dant la période d’organogenèse pouvait entraîner des malformations
des décennies que le N2O est utilisé pour des anesthésies au cours cérébrales et du squelette axial.
de la grossesse sans qu’aucun effet délétère pour le fœtus et le nou- Le fentanyl, le sufentanil et l’alfentanil ont fait l’objet d’études chez
veau-né humain n’ait été décrit. Les études épidémiologiques qui ont le rat dont aucune n’a permis de suspecter une possible tératogéni-
été conduites chez l’homme suggèrent très fortement qu’une exposi- cité [56, 57].
tion unique, dans le cadre d’une anesthésie pendant la grossesse, Il n’a pas été rapporté de toxicité fœtale associée à la nalbuphine
n’est pas tératogène [2, 3]. [58] alors que des anomalies congénitales sont retrouvées après utili-
sation de la codéine qui doit donc être évitée durant la grossesse [59].
Anesthésiques halogénés
Les études animales concernant les effets tératogènes de Myorelaxants (curares)
l’halothane, de l’enflurane et de l’isoflurane montrent des résultats Les curares, molécules fortement ionisées, passent peu la barrière
assez divergents. Un point commun à la plupart d’entre elles est placentaire et ne présentent pas d’effets tératogènes propres. En cas
que la mère est parfaitement oxygénée et que son équilibre acidoba- effet s’explique vraisemblablement par l’existence de propriétés vaso-
sique est maintenu. dilatatrices des halogénés sur la circulation utérine et l’action indi-
La bupivacaïne ne semble avoir aucun effet sur le comportement recte représentée par la diminution du taux des catécholamines
du fœtus et du nouveau-né [62] alors que la lidocaïne a un retentisse- circulantes.
ment transitoire sur les scores neurocomportementaux du nou-
veau-né à la naissance. Toutefois, cet effet est sans conséquence Effets de l’anesthésie sur l’utérus gravide
clinique majeure tant que la perfusion utéroplacentaire est parfaite-
• L’état du fœtus est directement dépendant de son oxygénation
ment contrôlée [63].
assurée par la circulation utéroplacentaire.
• Tous les facteurs susceptibles de diminuer le débit utéroplacen-
Effets de l'anesthésie sur le fœtus taire peuvent entraîner une souffrance fœtale.
• Au premier trimestre de la grossesse, aucune étude n’a, à ce • En fin de grossesse normale, la vascularisation utérine se trouve
jour, démontré un risque accru de tératogénicité liée à l’utilisation en état de vasodilatation maximale avec peu, ou pas, de possibili-
des produits anesthésiques. tés de dilatation supplémentaire.
• Néanmoins, l’anesthésie générale est associée à une augmenta- • Le débit sanguin utérin ne peut donc plus s’autoréguler et il est
tion du risque d’avortement, que celui-ci soit induit par l’acte chi- directement proportionnel à la pression de perfusion moyenne.
rurgical ou par l’anesthésie elle-même. • La plupart des agents d’induction diminuent la pression arté-
• À partir du deuxième trimestre de grossesse, le retentissement rielle sans modifier les contractions utérines, ce qui entraîne une
de l’anesthésie sur les échanges fœtomaternels est au premier diminution de la pression de perfusion utéroplacentaire mais sans
plan et les risques sont principalement ceux : retentissement chez un fœtus normal.
– d’un avortement tardif ; • Cette diminution est plus sensible en cas de libération de caté-
– d’un accouchement prématuré ; cholamines qui augmentent les résistances vasculaires utérines
– ainsi que d’une hypoxie fœtale. comme on peut l’observer lors d’une analgésie insuffisante.
© Groupe Liaisons SA, juin 2003. La photocopie non autorisée est un délit.
l’hypercapnie n’ont pas fait la preuve d’un possible effet tératogène.
L’hypoxémie chronique des populations vivant à haute altitude ne se Chirurgie Chirurgie
Chirurgie
solde pas non plus par une augmentation de la fréquence des ano- non urgente et
indispensable
pour urgence
malies congénitales. non indispensable vitale
res successives en FIO2 100 % soit par 3 minutes de respiration tion dans l’équipe. Il est utile de rappeler que la pression exercée sur le
normale en FIO2 100 %. cartilage cricoïde doit être importante, équivalente à celle susceptible
Il est généralement considéré qu’il faut maintenir une FIO2 supé- d’induire une douleur lors de la pression forte sur la base du nez. Cette
rieur à 50 % au cours de la chirurgie puisqu’il ne semble pas y avoir proposition, déjà ancienne, a été évaluée par la suite. Des pressions
de conséquences fœtales délétères de l’hyperoxie maternelle. très souvent inadaptées (en excès ou en défaut) ont pu être retrouvées,
pour des manœuvres de Sellick que des infirmières anesthésistes et
■ Prévention de la pneumopathie d’inhalation des médecins considéraient pourtant comme efficaces [69, 70]. Ces
études recommandent un apprentissage sur mannequin possédant
La prévention de la pneumopathie d’inhalation repose sur des
un capteur de pression. Il peut être plus simple de s’exercer selon la
mesures pharmacologiques destinées à augmenter le pH et à dimi-
technique de la seringue de 50 mL (ou 60 mL) [71]. Il faut obturer son
nuer le volume du contenu gastrique.
embout d’injection et en placer le piston au niveau du repère 50 mL.
● Contrôle du pH du liquide gastrique La pression alors exercée pour amener le piston au niveau de la mar-
que 38 mL est équivalente à celle recommandée pour une patiente
Citrate de sodium encore éveillée (20 Newtons, en se souvenant que 9,81 N = 1 kg). La
L’effet anti-acide du citrate de sodium est immédiat et rend son uti- pression exercée pour atteindre la marque 33 mL correspond à celle
lisation en urgence particulièrement adaptée. La quantité de citrate à recommandée pour une patiente inconsciente (30 N).
administrer est évaluée à 30 mL d’une solution 0,3 molaire. La durée Cette manœuvre comporte quelques effets délétères qu’il importe
d’action est relativement courte puisqu’elle est en moyenne de de connaître :
45 minutes après l’absorption de 30 mL, ce qui limite l’effet protec- – déviation trachéale si la pression n’est pas exercée dans un plan
teur si l’acte opératoire se prolonge. strictement médian ;
Antihistaminiques anti-H2 – aplatissement de la lumière trachéale si la pression est trop forte ;
La cimétidine (Tagamet) ou la ranitidine (Raniplex) sont des inhibi- – une application trop forte avant la perte de conscience de la partu-
teurs puissants de la sécrétion acide gastrique. Leur délai d’action par riente peut entraîner des efforts de toux, augmentant de ce fait la
voie IV ne permet pas leur utilisation dans un contexte d’urgence. La pression intragastrique.
forme galénique effervescente associant 200 mg de cimétidine ou
150 mg de ranitidine à du citrate de sodium permet d’obtenir l’effet ■ Induction de l’anesthésie générale en séquence rapide
anti-acide immédiat du citrate à l’effet prolongé des anti-H2. L’induction de l’anesthésie générale en séquence rapide permet de
réaliser l’intubation orotrachéale et d’assurer rapidement la protec-
● Contrôle du volume gastrique
tion des voies aériennes. Elle ne présente pas de particularités chez la
Métoclopramide femme enceinte : injection de l’hypnotique puis de la succinylcholine
Le métoclopramide (Primpéran) augmente la vidange gastrique et sous compression cricoïdienne par manœuvre de Sellick, puis intuba-
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renforce le tonus du sphincter du bas œsophage. Il est habituelle- tion non traumatique lorsque les fasciculations ont cessé et que le
ment utilisé à la posologie de 10 mg. Son délai d’action pour la menton peut être facilement mobilisé (en moins d’une minute en
vidange gastrique est d’environ 20 minutes. Cependant, administré général). La ventilation au masque est prohibée après la perte de
5 minutes avant l’induction de l’AG, il annule l’effet relaxant de l’atro- conscience pour éviter d’insuffler l’estomac et de favoriser les régur-
pine et de la péthidine sur le tonus du sphincter du bas œsophage. gitations gastriques. Cependant, en cas de difficulté d’intubation, on
De plus, il agirait sur la vidange gastrique elle-même en présence de peut y avoir recours à condition de maintenir la manœuvre de Sellick.
morphiniques. La sonde d’intubation est « étanchéifiée » par gonflage du ballonnet.
La constatation d’un tracé expiratoire de CO2 sur le capnographe et
Érythromycine
l’auscultation systématique des deux champs pulmonaires confir-
Le lactobionate d’érythromycine (Érythrocine) est un sel soluble ment la bonne position de la sonde.
destiné à l’administration IV. Il induit des contractions du tractus
Le concept de « séquence rapide » ou de « crash induction » repose
gastro-intestinal comparables à celles provoquées par la motiline.
sur la rapidité d’exécution, mais non sur la précipitation et les gestes
À la dose de 3 mg/kg, l’effet est maximal en 10 minutes et persiste
désordonnés qui peuvent encore trop souvent être observés dans
110 minutes. L’érythromycine pourrait ainsi trouver une indication
certains blocs opératoires. Un pourcentage important de difficultés
dans la prévention du syndrome de Mendelson.
d’intubation est en réalité le résultat d’une tentative d’intubation trop
● Manœuvre de Sellick précoce sur une parturiente à peine inconsciente et très incomplète-
ment curarisée.
La manœuvre de Sellick (pression cricoïdienne destinée à occlure
l’œsophage pendant la réalisation d’une intubation trachéale) doit être
réalisée sur une parturiente en décubitus dorsal, tête légèrement ■ Surveillance peropératoire du rythme cardiaque fœtal
abaissée et en hyperextension, dès la perte de conscience. La pression Chaque fois que c’est possible, il faut assurer le monitorage du RCF
doit être maintenue jusqu’à la vérification de la bonne position de la par voie externe (en pratique dès la 16e semaine d’aménorrhée). Sa
sonde d’intubation et n’être relâchée qu’une fois le ballonnet gonflé. réalisation doit répondre à quelques règles formelles :
Elle nécessite la présence d’un aide entraîné, quelle que soit sa fonc- – le matériel doit être disponible ;
d’initier rapidement et d’adapter un traitement tocolytique. Souvent, [5] Gomez A, Wood MD. Acute appendicitis during pregnancy. Am J Surg
en accord avec l’obstétricien, on instituera une telle tocolyse de façon 1979;137:180-3.
[6] Leroy JL. L’appendicite aiguë au cours de la gravido-puerpéralité. Med Chir
systématique après toute intervention chirurgicale réalisée au cours
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La perspective d’avoir à réaliser une anesthésie chez une femme [12] Rodriguez PN, Klein AS. Management of urolithiasis during pregnancy. Surg
enceinte est souvent vécue avec une certaine anxiété par le médecin Gynecol Obstet 1998;166:103-6.
anesthésiste, surtout si ce dernier n’a pas une pratique habituelle de [13] Rothenberger D, Quattelbaum FW, Perry JF, Zabel J, Fischer RP. Blunt mater-
nal trauma: a review of 103 cases. J trauma 1978;18:173-8.
l’anesthésie obstétricale. Au moins deux vies sont en jeu et, si
[14] Pearlman MD, Tintinalli JE. Evaluation and treatment of the gravida and
l’évolution est parfois défavorable, c’est plus souvent le fait d’un fœtus following trauma during pregnancy. Crit Care Obstet 1991;18:371-81.
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puisqu’aucun des agents anesthésiques couramment utilisés n’a pu [18] Rayburn W, Smith B, Feller I, Varner M, Cruikshank D. Major burns during
être sérieusement suspecté de telles conséquences chez la femme pregnancy: effects on fetal well-being. Obstet Gynecol 1984;63:392-5.
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administration chronique et le protoxyde d’azote, parfois tératogène [20] Rosen MA. Anesthesia for neurosurgery during pregnancy. In: Shnider SM,
chez l’animal à des doses très élevées. Le vrai risque fœtal est celui Levinson G, Anesthesia for obstetrics, third edition. Baltimore, Williams and
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l’hémodynamique utéroplacentaire ou d’hypoxie maternelle, et celui [21] Donchin Y, Amirav B, Sahar A, Yarkoni S. Sodium nitroprusside for aneu-
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possible ; [23] Corke BC, Datta S, Ostheimer GW, Weiss JB, Alper MH. Spinal anesthesia for
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