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Pixel Art
Ceci n'est pas du pixel art (mais une stricte conversion semi-
automatisée en 16 couleurs – la maîtrise des algorithmes manque
ici d'un travail stylisé des pixels).
1
2 1 HISTORIQUE
de côté, combien de pixels doit-on utiliser pour représen- de 512 couleurs pour l'Atari ST et la Mega Drive, 4 096
ter sa bouche, ou ses oreilles, ou son nez ? Doit-on même pour les Amiga ECS, 32 768 pour la Super Nintendo, et
représenter ces éléments ou les laisser à l'imagination du de 16 777 216 pour les Amiga AGA et le mode VGA
spectateur ?” des PC – soit plus de 16 millions dans ce cas, comme ac-
tuellement en 24 bits.) Cependant, les matériels encore li-
mités imposent aux infographistes de l'époque cette forte
contrainte rémanente : leur sélection de couleurs continue
à être restreinte dans leur quantité ; ils ne peuvent donc
retenir simultanément à l'écran qu'une petite partie de la
palette complète. (Cette sous-palette dite utilisateur, re-
définissable, était en effet de 16 à 256 couleurs générale-
ment suivant les supports – en rejetant les modes haute ré-
solution alors pauvres en couleurs des micro-ordinateurs,
où la console Game Boy ne dépareillait d'ailleurs pas trop
en miniature avec les seulement 4 niveaux de gris de sa
palette système.) Cette limitation du nombre de couleurs
uniques affichables force le pixel-artiste à des choix esthé-
tiques et techniques, que la palette effectivement appli-
cable soit imposée (années 1980), ou modérément libre
(années 1990). Citons le jeu Indiana Jones et le mystère
de l'Atlantide sorti sur PC en 1992, où les décors utilisent
plus de 200 couleurs, tandis que les personnages repré-
sentés dans la scène sont toujours dessinés avec moins de
Un portrait très stylisé en pixels éclairés. 10 couleurs – judicieusement choisies pour que cette re-
lative pauvreté ne saute pas aux yeux du joueur (cf. les
Le placement de chaque pixel devient crucial et peut sprites de ce personnage dans cette page, dessiné quant à
radicalement changer la perception du spectateur. Sa- lui avec des nuances en abondante quantité).
voir placer les pixels au bon endroit selon les contraintes, Des jeux comme Another World (sur Amiga en 1991, ba-
tout en s’approchant d'une représentation la plus ressem- sé sur du vectoriel) ou The Secret of Monkey Island (sur
blante possible, est alors une spécialité à part entière[2] . PC en 1990, aux fonds presque trop riches pour du pixel
D'ailleurs pixel-pusher (littéralement de l'anglais : pous- art), sont une succession de tableaux superbement com-
seur de pixel) était le terme jargonneux consacré (spé- posés avec un caractère très cinématographique. Cette
cialement dans la scène démo internationale de cette période est considérée pour certains, à ce niveau (voir le
faste période, pour désigner les graphics men, gfx men, paragraphe sur les cinématiques), comme l'âge d'or des
graphics artists ou gfx artists – avec l'idée d'une équipe jeux en pixels (chapitre 3.5).
de création). Chaque pixel se “poussait” ainsi indivi-
duellement, en un sens physiquement (au curseur et par Les palettes “historiques”. Plus anciennement parlant,
d'innombrables allers-retours à la souris vers la palette, c'est-à-dire au cours des années 1980, la palette utilisa-
à piocher chaque couleur séparément, faute de raccour- teur du pixel-artiste était typiquement de 2, 4, 8 et plus
cis clavier le plus souvent). La matérialité du pixel, outre souvent 16 couleurs au total, précisément et pour toute
sa visibilité bien sûr, était bien plus forte qu'à l'heure ac- l'image (complète, coupée, étendue avec les bords ou au-
tuelle, où ce sont plutôt des plages de pixels (ex. : blocs delà), en conservant la palette standard du système adopté
de Jpeg) ou des lignes de pixels (ex. : vecteurs de carac- (laquelle était souvent criarde par ses teintes très saturées,
tères) qui nous restituent une image dans son ensemble à l'instar du ZX Spectrum, mais à l'exception notable et
(ex. : photographie ou texte, respectivement), à distance inverse des Commodore VIC-20 puis Commodore 64).
et sans souci d'économie (car nous baignons dans la pro- Au-dessus (comme 32, et a fortiori 256 couleurs), un
fusion de pixels). glissement s’opère d'autant (par exemple la redéfinition
des critères d'appréciation, ici subjectifs, une définition
Les palettes “modernes”. Après la décennie 1980 “his- qui tente de cadrer objectivement l'aspect essentiel du
torique” (voir ci-dessous), où les systèmes d'affichage 8 pixel, puisqu'ajouter des couleurs permet d'en réduire le
bits reposaient le plus souvent sur une menue palette nombre, sur le plan de la séparation des surfaces ou au ni-
de couleurs imposées (16 teintes fixes du système, donc veau des mélanges). Pour illustrer ce qu'impliquait cette
souvent incompatibles d'un micro-ordinateur ou d'une grande économie de la palette, envisageons simplement,
console rustique à l'autre), la décennie 1990 améliore comme dans certaines créations déjà publiées, un bloc
grandement ses graphismes en les basant sur des palettes d'une seule couleur de quelques pixels de diagonale (voire
de couleurs indexées plus ou moins étendues, c'est-à-dire un rectangle plein) : il peut très bien devenir un person-
sur une sélection tout à fait libre en couleurs parmi un nage modérément détaillé (vu de loin, ou miniature), sous
grand nombre, ce qui varie les teintes d'une part, les affine le crayon qui y ajoute quelques couleurs (cheveux, vête-
d'autre part. (Une palette dite complète, sera par exemple
4 1 HISTORIQUE
ments… cf. l'exemple sur les sprites mais en bien plus souci du détail n'en demeure pas moins appréciable, de
petit et sans la pléthore de nuances). Plus le pixel-artiste tout temps.
utilise de couleurs différentes, plus il réussit à séparer ou à Le pixel art revêt donc très schématiquement deux ni-
mélanger les zones du dessin, tout en conservant le même veaux de limitations sur les couleurs (2 à 16, et 32 à 256 au
nombre de pixels, qui paraissent alors plus fins. Le person- total), suivant les exigences de fidélité que le pixel-artiste
nage a davantage d'éléments et de profondeur au final. À compte produire (où la tolérance aux incohérences his-
une plus grande échelle, avec une palette utilisateur élar- toriques et matérielles est plutôt relative à la méconnais-
gie, si l'agencement des pixels reste libre (pas de color sance de son public, question de génération éventuelle-
clash, par exemple), il peut y avoir tellement de possibi-
ment). Ainsi logiquement, l'artiste peut tout à fait s’af-
lités de séparations et de mélanges que ce sont les cou- franchir complètement du bridage créatif de sa palette,
leurs (la profondeur) qui priment sur les pixels (la défini-
mais il ne lui reste alors guère comme moyen de styli-
tion). Les minuscules vignettes en sont un parfait exemple sation pixel art que la visibilité accrue des pixels, qu'il
(avec des centaines de couleurs, jusqu'à une différente
agencera systématiquement de façon très crénelée et avec
par pixel, toute conversion y est lisible, sinon intelligible, beaucoup de contraste dans les teintes, ce qui manque
surtout en “vraies couleurs” ; avec une palette de 16 cou-
pour certains de diversité par le rendu fréquemment hy-
leurs communes, quelle que soit la richesse de la palette percoloré. La position inverse peut être tenue, plus ou
disponible, rien n'est moins sûr ; en 4, 3 ou 2 couleurs, moins esthétiquement en deux couleurs, blanc sur noir gé-
le filtre échoue très probablement à réduire autant, et le néralement, mais rarement en haute résolution en noir sur
pixel-artiste doit reprendre la main sur le travail des dé- blanc pour éviter l'aspect austère des logiciels de produc-
tails perdus, séparer et mélanger lui-même, styliser plutôt tique d'antan, voire la confusion avec ceux-ci. Il convient
que copier, c'est fondamental). 32 couleurs utilisateur, li- à l'artiste pixelleux de choisir avec discernement l'impact
brement positionnées parmi des milliers, est à la limite esthétique, la faisabilité technique et les références cultu-
du pixel art : les divisions de surfaces et les combinaisons relles que comportent ces deux grands types de profon-
de teintes y sont tellement faciles à produire que l'aspect deur de palette, regroupées en art numérique sous la dé-
limitatif et sélectif du positionnement en est particulière- signation « 8 bits » (en référence aux périodes couvrant
ment amoindri. Si la palette peut s’en trouver complexi- les premiers systèmes personnels qui avaient cette archi-
fiée (à organiser et à utiliser, au niveau des lissages avan- tecture, jusqu'à ceux bien postérieurs qui intégraient les
cés notamment, jusqu'à en devenir ingérable manuelle- palettes indexées de capacité maximale).
ment au-dessus de 32 couleurs vraiment bien exploitées),
la simplification du “tracé” y gagne, pour peu que le des- L'obnubilation aux gros pixels sera traitée ailleurs dans
sin ne demande pas trop de finesse dans les dégradés (où cet article (mais elle n'est pas maladive non plus).
même 256 niveaux peuvent ne pas suffire ; voir le para-
graphe sur les trames). En somme, quand on manque de
pixels, on peut y ajouter une couleur ; c'est ce qui faisait 1.2.1 Les principaux acteurs de l'âge d'or
principalement dire aux pixel-artistes d'alors, sur micro-
ordinateurs jusqu'au début des années 1990, que : « trop Ceux qui avaient un style visuel caractéristique : de
de couleurs, c'est tricher, ou gâcher ». “Trop” a long- nombreux développeurs s’attellent à exploiter les capa-
temps été “plus de 16” sur ces machines 8 ou 16/32 bits, cités graphiques des machines d'alors, notamment les
mais probablement au moins le double sur les meilleures ordinateurs et les consoles 16 bits. Certains, comme
consoles d'alors. Les besoins de productivité ont “rabais- Cinemaware, Thalion, Sensible Software ou les Bitmap
sé” cette exigence à 32 couleurs utilisateur au minimum, Brothers sur Amiga et Atari ST, marquent le graphisme
où la plupart des teintes fréquemment exigées dans les 2D par le style caractéristique de leurs productions. Il est
jeux vidéo de masse sont accessibles sans trame (couleurs remarquable de noter que ces développeurs étaient tel-
primaires, secondaires, gris, noir et blanc ; eau, ciel, vé- lement investis dans la 2D (aussi bien le style graphique
gétation, bois, peau…). D'ailleurs, les productions japo- que les techniques d'optimisation pour l'afficher à l'écran)
naises de cette époque évitaient soigneusement le recours qu'ils n'ont pas su négocier le passage à la 3D, et ont dis-
aux trames, mais aussi au lissage, tous deux trop chrono- paru à cette époque.
phages (elles sont difficiles à porter d'une palette tramée Ceux qui affectionnaient les grands “tableaux” fixes en
à l'autre, voire trop problématiques d'une palette lissée à pixels : l'éditeur Psygnosis, sur Amiga principalement, va
l'autre). 16 couleurs (à l'instar de celles du Commodore se faire une spécialité des jeux aux graphismes et illustra-
64, adaptées aux jeux vidéo mais sans les couleurs satu- tions intertitres en 2D d'une qualité jamais vue jusque
rées du ZX Spectrum), et a fortiori 8 ou moins, porte en là, parfois au détriment de la jouabilité. Shadow of the
effet à des compromis (et à une technicité ingrate) qui Beast, en 1989, puis Agony[4] , sorti en 1992 sur Ami-
s’éloignent du réalisme visuel, en tout cas des méthodes ga, proposent ainsi des graphismes atteignant une quali-
plus directes de reproduction (de photographies, de des- té artistique inégalée ces années-là. Les écrans intertitres
sins etc.). Pour résumer laconiquement et presque tauto- d'Agony sont ainsi « signés par leurs auteurs respectifs ».
logiquement : plus la palette utilisateur est grande, moins
L'Amiga côté scène démo (cf. ce paragraphe). En paral-
il y a besoin de pixels, donc de pixel art (historique). Le
lèle, les pixel-artistes amateurs ont également su tirer par-
1.3 Le déclin 5
ti des capacités d'affichage très avancées des Amiga (cf. Ceux qui utilisaient beaucoup la vue isométrique : cer-
l'image 3D plus haut, sortie dès 1987). Un beau-livre met tains développeurs comme Bullfrog proposeront des jeux
en avant ce caractère avantageux, voire dispendieux : The utilisant la technique du « pixel art isométrique », dont
Masters of Pixel Art (en 2016, de Klas Benjaminsson, lui- notamment dans Populous, Powermonger, Syndicate et
même pixel-artiste sur Amiga). Malheureusement pour Theme Park, dans un style très proche de ce que l'on peut
le titre, on y mélange le pixel art historique des autres voir produire de nos jours.
systèmes (pas nécessairement « préhistoriques »), avec Sur consoles : en 1994, Psygnosis sort Flink sur Mega
les productions aux moyens photoréalistes des Amiga. La Drive puis Amiga CD32, développé par l'équipe derrière
définition du pixel art (voir ce paragraphe) n'intègre pas
Lionheart sur Amiga et qui développera plus tard Lomax
cette défiance au minimalisme, comme on ne souhaiterait sur PlayStation. Malgré les limitations techniques de la
pas confondre photographie et mosaïque, comme critère
Mega Drive qui ne peut afficher que 64 couleurs sur une
de sélection de la qualité. Par exemple, parmi les pos- palette qui en compte 512, le jeu dispose d'un rendu qui
sibles incompatibilités que tolère ce livre dans son flori-
à l'époque fait sensation.
lège de pixel-artistes sur l'Amiga : la grande majorité des
dégradés y prend environ 8 couleurs de la palette (plus Au Japon, les équipes techniques développant les jeux,
du double du pixel art en moyenne, celui réel à l'époque), par leur taille et les moyens engagés sont sans commune
et ils y sont fréquemment trop plats (très délicats car mesure avec les développeurs occidentaux. Konami ou
sans contraste, grâce ou à cause de la vaste palette dis- Capcom notamment tiennent à cette période le haut du
ponible) ; le lissage y est tout aussi gourmand (une large pavé en matière de graphisme 2D, avec des jeux comme
surface de pixels déborde souvent, comme autant de ba- Castlevania, Street Fighter II, Ghouls’n Ghosts, d'autres
vures), si l'anticrénelage n'y est pas simplement logiciel comme Nintendo se proposent généralement des jeux à
(dans ce cas parfois étonnamment plus précis, façon vec- la jouabilité irréprochable mais graphiquement en retrait,
toriel, lequel est hors sujet) ; les images (retenues comme comme Super Mario World, Pilotwings ou F-Zero. Cepen-
marquantes) y sont moins originales qu'ailleurs en général dant, en 1995, Nintendo sort Yoshi’s Island sur Super Nin-
(peintures plagiées ou scannées d'heroic fantasy, “logos” tendo qui justifie son graphisme « dessin d'enfant » par
illisibles d'une même source de graffitis tortueux) ; les son scénario. Les couleurs pastel, la variété des décors et
plus grands noms de ces pixel-artistes ont une production le style infantile le hissent parmi les plus beaux jeux de
si abondante, luxuriante et pourtant riche de lissages om- plates-forme.
niprésents qu'il est tout à fait douteux que l'anticrénelage La démesure : enfin, en 1996, SNK sort Metal Slug
automatique ne soit pas d'un recours fréquent chez eux, sur Néo Géo. Il est tout de suite reconnu pour ses gra-
assumé ou pas (le moindre dessin lissé à la main prend phismes exceptionnels. Les spécificités techniques de
en effet au minimum quatre fois plus de temps à réaliser cette console, purement dédiée à la 2D, et alors dernière
en 16 couleurs, empiriquement et mécaniquement, et les de sa génération, incitent les développeurs à produire
images présentées en ont souvent des centaines… ; à ces massivement des sprites de grande qualité. En excluant le
tailles-ci, relativement grandes, chaque œuvre prendrait renouveau du pixel art qui suit l'avènement des appareils
au bas mot un mois de travail acharné, ce qui n'est pas mobiles, Metal Slug demeure l'un des derniers jeux vidéo
trop envisageable sur des années d'exercice ; il y a une de l'histoire faisant massivement appel aux graphismes
similitude technologique et plastique avec la peinture à 2D.
l'huile et l'aérographe)… Cependant ce type de créations
participait bien au confort sur Amiga, accompagnées de
leur propre style de musiques (historiquement à base de
1.3 Le déclin
modules souvent aussi léchés que filtrés, et alors parfois
un peu “mous” en comparaison des systèmes utilisant des
Mécaniquement, l'augmentation progressive de la
tables d'onde rustiques, à l'instar du traitement réservé
puissance des machines, et à l'écran notamment, de
aux pixels sur Amiga, très travaillés pour dépasser effec-
leur résolution et profondeur de couleurs, tend à rendre
tivement les dernières contraintes de minimalisme sur ces
la gestion des pixels moins complexe et cruciale pour
machines en cela un peu intemporelles).
un affichage lisible. La taille des pixels diminue (de
Ceux qui savaient donner vie à des sprites minuscules : deux à trois fois environ), et le nombre de couleurs
Psygnosis édite en 1991 Lemmings, du studio DMA De- explose (bien plus de mille fois). La baisse continue du
sign, connu aujourd'hui sous le nom de Rockstar North, prix des mémoires permet parallèlement de lever peu à
qui va parvenir à donner de l'expression à des personnages peu les dernières limitations des vieux systèmes, dans
de très petite taille (sans toutefois être extrêmement ré- l'organisation jusqu'alors drastiquement optimisée de
duits, comme les développeurs indépendants sauront le l'image (modes spécifiques aux machines, bridages divers
faire, mais avec des animations tellement variées et pour- des palettes, structures binaires non séquentielles etc.,
tant fluides à cette taille que c'en est mémorable de souci étaient un frein au réalisme visuel et à la productivité). Il
du détail). Plus tard, les jeux Sensible Soccer et Worms, devient alors possible de produire facilement des images,
par exemple, reprendront cette idée centrale de la peti- dites assistées par ordinateur, avec une intervention
tesse des sprites. substantielle de la machine. Par exemple, le lissage
6 1 HISTORIQUE
(2008), Wobly Ware (2010), Neutronized (2010)[5] , Luf- les effets sonores et mélodies assez bruts cible davantage
trauser (2010). les joueurs les plus avertis). Lorsqu'il s’agit de tout simu-
ler à la fois (graphisme, jouabilité, audio, limitation de
mémoire…), jusqu'à la perfection, les plus grands ama-
1.5 Le renouveau moderne teurs s’orientent vers les développeurs programmeurs qui
continuent à créer et à dessiner sur leurs machines de pré-
Le pixel art survit partout où les limitations techniques dilection, à la façon des pionniers du début des années
forcent à n'utiliser que des graphismes en 2D avec une 1980, non sans avoir souvent amélioré les techniques par
résolution faible. maintes astuces de codeurs documentées depuis, et at-
La réelle renaissance du pixel art a coïncidé avec teint ou dépassé les limites habituelles de stockage par
l'apparition des appareils mobiles, laquelle réintroduit compromission avec les outils de création modernes. (Les
d'une part les limitations techniques de l'affichage et tirages, limités sur cassette ou cartouche, sont alors nu-
d'autre part un besoin en contenu abondant et peu cher, mérotés, à l'attention des collectionneurs. Cela reste un
lequel entraîne une explosion du marché des développeurs hobby pour ces studios et leurs acheteurs, alors que cette
indépendants, qui à leur tour doivent revenir à des tech- niche du retrogaming rencontre un seuil de rentabilité sur
niques de production peu coûteuses et rapides telles que les supports actuels.)
le pixel art.
Dans un deuxième temps, grâce à la distribution dématé-
1.5.1 L'appropriation par les indépendants
rialisée, les jeux indépendants ont pu se distribuer beau-
coup plus largement, notamment sur les plates-formes de
téléchargement de consoles de jeux. Les jeux indépendants s’emparent du pixel art et vont
le hisser au rang d’œuvre d'art graphique[réf. nécessaire] . En
En 2012, Phil Fish sort FEZ sur le Xbox Live Arcade. 1999, Daisuke Amaya, développe seul un ambitieux jeu
Ce jeu est un hommage au retrogaming avec une esthé- d'aventure : Cave Story. Les internautes suivent l'avancée
tique des décors soignés. Il se rapproche du « jeu idéal » du travail créant ainsi une base de fans inconditionnels.
selon certaines critiques[6] , et devient un véritable succès Le jeu est finalisé en 2004 : les critiques sont élogieuses
mondial. et Cave Story devient l'ambassadeur du développement
Néanmoins l'aspect de la profondeur limitée de couleurs, indépendant en pixel. Il est décliné sur plusieurs plates-
pourtant essentielle quoique contrainte dans le pixel art formes de téléchargement en 2010.
conventionnel, passe quasi systématiquement à la trappe, Dans son sillage, de nombreux jeux très talentueux
dans cette volonté de renouvellement adapté aux affi- sortent. Le travail graphique est particulièrement impres-
chages et habitudes visuelles modernes. La démarche des sionnant. En 2010, Gunboy développé par Tennis est un
développeurs consiste plutôt dans cette recette, commer- Megaman like survitaminé à l'esthétique visuelle nippone.
ciale éventuellement : débrider les palettes (voir ce pa- En 2011, Treasure Adventure Game place l'exploration
ragraphe), tout en conservant une résolution raisonnable- d'un monde immense au centre de son gameplay, avec
ment basse pour nos écrans. (En parlant de résolution, un contenu immense et une richesse de jeu[7] . En 2013
le seuil de tolérance aux gros pixels redevient subjectif Evoland, développé par Nicolas Cannasse en 48 heures,
au passage, même segmentant parmi les joueurs, et l'on sort vainqueur de la 24e compétition Ludum Dare. Il re-
renonce aux deux piliers du pixel art, ainsi qu'à ne plus trace, avec pédagogie, l'évolution des graphismes des jeux
reconnaître ce qui le définit historiquement.) Sur le plan vidéo sur fond d'aventures à la Zelda.
technique, c'est donc du “demi-pixel art ancien” en géné-
ral. En forçant le trait : de jolies couleurs, du demi-laid Des petits studios vont aussi se mettre à produire des jeux
(en intégrant la grande rusticité des blocs), pour que ce- en pixel art. Arkedo sort l'éponyme Pixel !, son gameplay
la plaise au moins à la moitié des joueurs et des clients. classique dévoile des univers visuels qui semblent surgir
L'autre moitié préférera les nouveaux titres qui ont choisi d'un passé fantasmé. En 2011, Lost Pixel sort le superbe
de rester limités graphiquement sur les deux plans, ques- Frogatto and Friend. Développé depuis 2009, il affiche
tion de vécu, voire de génération. À noter que le gameplay des graphismes à faire pâlir les meilleures productions des
(toute la partie technique, inconfortable) est rarement re- années 1990. Toujours en 2011, D-Pad Studio sort Owl-
pris des machines d'origine (on bénéficie actuellement de boy à l'esthétique incroyable, notamment par un charac-
gyromètres, d'intelligence artificielle, de simulateurs phy- ter design singulier et l'utilisation d'ombres blanches astu-
siques réalistes…), tandis que c'est souvent le contraire cieusement placées. Encore en 2011, Konjak développe
pour les sons et musiques (même ceux archaïques à base Iconoclasts et devient incontestablement la nouvelle réfé-
d'ondes sont conservés ou imités, dans ce cas enregistrés rence graphique en pixel art[réf. nécessaire] .
et sans que cela n'interroge trop les joueurs, dans une En gestation depuis 2009, le phénomène Minecraft dé-
part substantielle d'applications mobiles ludiques de ce boule sur les réseaux en 2011. Markus Persson utilise une
type, avec pour intention de mieux restituer l'ambiance esthétique totalement dépouillée avec comme volume de
des anciens titres, voire de faire un peu oublier la moder- base le cube et des textures en gros pixels. Cela permet
nité du relooking visuel, où le décalage technologique sur de générer rapidement des cartes de mondes aléatoires et
8 2 NATURE DU PIXEL ART
immenses. Le succès ne se fait pas attendre et plusieurs La définition du pixel art est très large ; cependant il existe
millions de copies sont écoulées. La reconnaissance ar- un consensus suggérant qu'un dessin composé de pixels
tistique arrive en 2013, lorsque Minecraft entre officiel- n'est pas nécessairement du pixel art. Il ne devient du pixel
lement au Museum of Modern Art de New York. Il est art que si la position précise de chaque pixel est impor-
intéressant de noter que Minecraft est entièrement en 3D, tante, et si son déplacement (ou son changement de cou-
et pourtant utilise les codes du pixel art, qui par définition leur) peut radicalement modifier la perception du specta-
ne peut être que 2D. teur.
À ce titre, les œuvres en pixel art dotées d'un grand
nombre de pixels conservent cette désignation, parce
2 Nature du pixel art qu'elles représentent le plus souvent un assemblage
d'éléments en pixel art, estimables individuellement en
2.1 Les inspirations artistiques tant que tels au plus petit niveau (qu'ils soient créés à la
main ou par un procédé automatique – lui-même créé par
Le pixel art est précédé par des disciplines très antérieures l'artiste). Ou bien il s’agit d'une grande superficie de pixels
aux années 1980, voire antiques. En effet, la mosaïque, la indivisible, digne d'intérêt créatif pour la richesse des dé-
tapisserie, le point de croix et le perlage sont des modes tails qu'elle recèle (ceux faits main, ou semblant l'être là
de représentation similaires, d'un point de vue technique aussi). Dans tous les cas, la recherche esthétique des dé-
(dans la disposition alignée des objets ou des points de tails est inscrite dans ces grands tableaux de pixels.
couleurs pris séparément). Le pointillisme en peinture, À la plus petite échelle, de façon quasiment anatomique,
et certaines trames en gravure rappellent aussi le pixel le rendu individuel des pixels demeure fondamental en
art, sans l'inspirer directement. En peinture comme en pixel art. Toute déformation uniforme ou localisée de
sculpture, d'autres courants artistiques révèlent d'autres l'aspect très pixelisé (à partir d'un rectangle bien net)
ressemblances : l'impressionisme, l'art abstrait, ou le cu- s’éloigne d'autant de la représentation classique ou his-
bisme. torique. Parmi ces entorses dont l'excès ne peut pas être
recommandé en pixel art : le flou (dont l'anticrénelage in-
contrôlé), l'étirement (ex. : lignes précises, diffuses, sinu-
2.2 L'intentionnalité des détails soïdales), et la dispersion (avec ou sans atténuation, par
exemple l'éclatement des pixels avec une translation quel-
conque des sous-éléments, ou la division en trois sous-
éléments matériels colorés distincts que constituent les
bandes RVB sur la plupart des écrans LCD). La phase
de design (puis son application en programmation etc.)
nécessite en cela de pouvoir distinguer conceptuellement
le pixel logique (en tant que donnée plus ou moins matri-
cielle) du pixel physique (celui qui est dit “rendu” sur le
support avec les matériaux de son choix, donc pas néces-
sairement en tant que carré, de profondeur limitée, très
aligné…). La recherche, sinon le goût des variations à ce
Cette image montre comment la modification d'un petit nombre niveau fait partie intégrante du pixel art (mais aussi de la
de pixels suffit à radicalement changer les caractéristiques d'un récupération esthétique actuelle, dérivée de la forme la
visage ou d'une silhouette (expression, forme, âge, corpulence,
plus basique ou antique, comme référence).
coiffure…).
L'amélioration du contraste des pixels entre eux (par le
choix des teintes, voire des formes) n'est qu'un moyen de
souligner les détails (même si cet effet visuel participe
déjà à la stylisation). Ainsi par exemple, le noir et blanc
(réputé pour sa précision), le rond et la croix (et autres
signes complémentaires), ou le plein et le vide (schéma-
tiquement en logique) ne sont que d'ordre applicatif et
relativement mineurs. En effet, ce n'est pas le placement
mécanique des éléments ayant ces aspects (valeurs dis-
tinctes) qui produit l'art du pixel art (il ne serait produit
que des pixels), mais la préexistence d'une volonté créa-
trice affirmée (la fameuse intention du pixel-artiste, le-
quel devra éviter la facilité de suivre la machine, ses co-
pies ou ses procédés). En quelque sorte, par tous les pro-
cédés imaginatifs possibles : le pixel art suggère et ma-
Une feuille de sprites détaillés d'un jeu vidéo. gnifie, là où le pixel limite et dégrade.
2.4 Les liens culturels 9
2.3 Le choix esthétique des gros pixels dehors des émulateurs spécialisés ci-dessus) dans des in-
terfaces telles que l'outil Image Resizer (alias 2dimagefil-
Du fait de la disparition des contraintes techniques, au- ter) sur Windows (Inkscape, éditeur vectoriel multipla-
jourd'hui s’exprimer en pixel art n'est plus une nécessi- teforme, recèle depuis peu un tel convertisseur de pixel
té, mais un choix esthétique, culturel, parfois commercial art). Si le résultat est parfois surprenant de poli (quand
aussi. La plus commune des méthodes artistiques repose l'anticrénelage disparaît totalement, à la mode des jeux
ainsi dans ce domaine en la réduction volontaire de la vidéo actuels, après celle des animations Flash en vec-
quantité de pixels pour un même sujet représenté (plu- toriel), l'intérêt de supprimer aveuglément les arêtes des
tôt qu'en la diminution de sa palette de couleurs, puisque gros pixels, ou de détériorer l'image à divers niveaux dont
les changements y sont moins perceptibles, en général). les trames, repose la question de la prévalence des pixels
Par ce type de filtre intentionnel, qui n'est dégradant que précisément disposés en pixel art. Par exemple, les points
superficiellement (voir le paragraphe sur l'intentionnalité (de pixels) abusivement connectés entre eux (afin de pro-
des détails), l'image suffisamment crénelée peut finale- duire le lissé) : tant que les algorithmes actuels ne dis-
ment porter la mention : à « gros pixels ». poseront pas de reconnaissance à base d'images (et en
étant optimiste sur la faisabilité à cette très petite échelle),
L'agrandissement devient généralement nécessaire, sur l'agrandissement sera tantôt déformé, tantôt lissé correc-
les affichages haute résolution modernes (2, 3, 4 fois, tement, sans possibilité de prédire le bénéfice (sur un
voire davantage comme dans l'illustration de l'alien plus échantillon quelconque d'images), ni d'affirmer que la
haut, et préférablement sans flou, pour mieux appré- méthode (chirurgicale ou seulement esthétique) ne cache
cier le travail pointilleux et sans altérer la palette no- simplement pas une curiosité passagère, voire une lassi-
tamment). Cet étirement sans perte accroît nécessaire- tude des gros pixels. Ce type d'agrandissement remplace
ment l'effet pixelisé initial, parfois exagérément jusqu'à une stylisation humaine par une artificielle, en y ajoutant
le rendre presque grossier par la visibilité excessive des souvent des erreurs d'interprétation. Un peu comme pour
carrés. Il s’agit alors d'un effet pervers, qui dégrade la le cas des filtres de flou d'agrandissement (upsampling),
qualité esthétique de l'œuvre originelle. Cette perte de son utilisation est donc sujette à caution : elle serait à
fidélité sans précaution, loin d'être moderne, est parfois éviter absolument pour toute restitution fidèle. Le public
oubliée collectivement par d'adoption, voire la revendi- néophyte en pixel art pourrait cependant apprécier cette
cation de blocs disgracieux quand ce n'est pas du tout né- transition en douceur.
cessaire. À moins que cela ne soit intégré à un argument
commercial tout à fait assumé. En cela, la mode des très
gros pixels se réfère davantage à la préhistoire des jeux vi- 2.4 Les liens culturels
déo, à la Pong (tout point composant le dessin est restitué
comme un large rectangle de plusieurs pixels sur les vieux
écrans), plutôt qu'aux systèmes postérieurs dont la réso-
lution écran était voisine de celle native matériellement
(1 pixel logiciel est rendu par exemple en 2×2 physique-
ment). Le flou automatique lors de l'agrandissement est
généralisé sur les navigateurs internet ; il l'est aussi sur la
plupart des visionneuses d'images bitmap (où IrfanView
permet a contrario de désactiver le filtre sur Windows.)
Les logiciels de retouche bitmap sont, dramatiquement
pour la diffusion des œuvres en pixel art de très faible ré-
solution, encore trop souvent substitués à ces visionneuses
“modernes”, tout à fait inadaptées en l'occurrence.
Cette apparence carrée, plate, froide ou austère est le sou-
ci majeur des connaisseurs des premiers jeux vidéo sur
les machines d'origine. Ils recourent de nos jours à des
filtres logiciels, sur les émulateurs récents principalement,
afin de voir simulés les luminophores de leurs écrans ca-
thodiques d'antan (télévision domestique ou poste d'une
borne d'arcade). Ces divers filtres adoucissent (brisent
etc.) les carrés de pixels, jusqu'à restituer le lissage natu- Une photographie très pixelisée de Vénus (aux couleurs vives abs-
rel du fameux balayage électronique, ce qui rend l'image traites)…
aussi “chaleureuse” qu'à l'époque, dans un contexte nos-
talgique surtout. À l'instar du Pop art, le pixel art possède des liens avec
Les algorithmes de lissage des agrandissements, hormis la culture populaire geek et s’exprime sous de multiples
ceux à base de vectorisation partielle dans certains logi- formes artistiques.
ciels dédiés en photographie, se retrouvent compilés (en Le pixel art original consiste en une production infogra-
10 2 NATURE DU PIXEL ART
phique traitant d'un sujet libre. Par exemple tous les gra-
phismes engendrés par les jeux vidéo des années 1980
jusqu'au milieu des années 1990.
Dans les années 2000 et 2010, des productions gra-
phiques qui pourraient s’affranchir de la faible résolution
d'image font le choix du pixel art pour obtenir un ef-
fet visuel porteur de signification. Notamment avec cer-
taines affiches publicitaires qui ont recours au pixel art
afin d'indiquer que la cible du produit fait partie de la
génération Y. Un code QR de wikipedia.fr.
Il existe des formes de pixel art utilisant un support tota-
lement libre mais faisant néanmoins référence à la culture Les codes QR sont des codes-barres carrés dont
populaire geek. Représenter un sprite du jeu vidéo Mario l'agencement des pixels définit l'information traduite par
à l'aide de Post-it en les collant sur une vitre, ou encore, un lecteur adéquat. Les X-Face sont de petites images
à l'instar de l'artiste Invader, reproduire les sprites du jeu noir et blanc de dimension 48×48 pixels, attachées en en-
vidéo Space Invaders avec des carreaux de carrelage en tête de mail ou d'article usenet. Ni les codes QR ni les
les collant sur des murs. X-Face ne sont du pixel art, cependant ils contribuent à
rendre les gros pixels familiers.
Certains artistes expérimentent des passerelles vers
d'autres formes d'art plus traditionnelles. Par exemple
Ced Vernay, un artiste français, qui réalise du pixel art 2.5 Les sous-familles du pixel art
à la peinture ou à l'aide de confettis.
2.5 Les sous-familles du pixel art 11
très optimisés (sobres en nombre de plans de couleurs) ; émoticônes sur les systèmes de tchat, où il est cru-
davantage de temps de création ; tous les autres subter- cial d'être capable de représenter une expression fa-
fuges visuels possibles (sources d'images et de styles va- ciale expressive dans un smiley de quelques pixels de
riées, dégradés et lissages très poussés…). Comme pour large.
toute création, les démos ont des modes, et une typolo-
gie. Néanmoins, l'isométrique, phare du pixel art pour • Les bandes-dessinées personnalisables : depuis
certains aujourd'hui, n'était guère envisagé dans ces pro- les débuts de l'informatique graphique, une certaine
ductions (citons toutefois le menu principal de l'Anomaly niche de logiciels continue de perdurer sous diffé-
Demo sur Atari ST en 1993). rentes formes successives : les éditeurs ont réalisé
Les démos furent popularisées via les disquettes de ma- que le public trouverait un attrait dans le fait de pou-
gazines spécialisés, ou par leur diffusion télévisée comme voir réaliser ses propres bandes dessinées en utili-
générique de fin pour l'émission Micro Kid’s sur FR3 jus- sant des logiciels qui lui permettraient de disposer
qu'en 1997. lui-même des éléments dessinés pré-existants (pro-
posés par le logiciel, parmi une bibliothèque la plus
Des groupes de demomakers développent encore sur des vaste possible) dans les cases d'une bande dessinée,
machines maintenant obsolètes[9] , comme sur les sys- et en changeant lui-même le texte des phylactères.
tèmes récents (dotés de 3D hardware), avec cependant On peut évoquer par exemple Garfield Comic Boom
un faible poids de programme (par exemple 64, 4 voire (en), qui permet de créer soi-même des petits strips
1 Kio) afin de conserver les contraintes techniques, vi- de la bande dessinée Garfield.
suelles en pixel art et auditives en chiptune.
nettement carrés.
Depuis les années 1990 (avec l'essor des calculatrices gra-
phiques), puis 2000 notamment (via une simple fonte
console de Microsoft Windows), on voit l'œil des dé-
veloppeurs et des joueurs “rétro” s’habituer à toujours
moins de pixels dans les caractères (d'écran au premier
chef). La taille minimale communément proposée actuel-
lement tourne autour de 3×5 pixels (souvent en renon-
çant à la compression sur certains caractères comme M et
W avec une largeur variable supérieure, telle que 4×5 ou
5×5), pour une lecture pour tous et sans trop d'ambiguïtés
(donc ni trop expérimentale comme les strictes 3×3, ni
trop personnelle). La présence de très nombreuses fontes
de type “pixel” sur les sites de téléchargement, même les
plus incomplètes, traduit d'une part l'aspect fort simple et
ludique à les créer comme à les copier, et d'autre part
la grande difficulté à les concevoir de façon efficace,
consensuelle, et productive in fine. Parmi cette démo-
cratisation du pixel art appliqué aux caractères de petite
taille (sous une matrice quelconque, le plus souvent en
grille), notons d'occasionnels grands affichages publics
(pour des événements plus ou moins techniques ou nu-
mériques, d'une modernité actuelle ou des 80s), certains
logos hi-tech (web ou mobiles) ou parties de génériques
de films à l'avenant, et une bonne vague de bricolages bon
marché sur nano-ordinateurs (écrans de GSM ou à base
de LED, bien en deçà des polices classiques en 5×7). Les
valeurs du pixel art, ainsi que ses vertus (les avantages au
moins), sont reprises ou rappelées sur ces divers supports
d'écriture, qui colonisent toujours plus le monde réel, et
les canaux de communication visuels en général (cultu-
rels en particulier). Lister ces qualificatifs serait autant
Écriture pixel art statique sur la Tour Montparnasse, fin 2015. sociologique que subjectif dans leur choix, mais on peut
(1 fenêtre = 1 pixel. Le gain d'espace se popularise.)
évoquer ceux relatifs : au gaming (8-bit, cf. l'engouement
chez les petits développeurs indépendants) ; aux bases de
tèmes PostScript et TrueType doivent leur succès en par- l'informatique (personnelle) ou au caractère geek (le di-
tie à l'intelligence de leurs algorithmes de rendu. gital, partagé ou cloisonné) ; à la nostalgie (des quadras
entre autres) ou au retour aux (valeurs) sources.
Cependant, de tels algorithmes sont beaucoup trop com-
plexes à implémenter pour des petits studios de dévelop- Les écrits à base de petits caractères s’affichent de moins
pement. En outre, à une échelle aussi petite que celle en moins rarement sur les fenêtres (entières ou parfois sur
utilisée par le pixel art, le gain en temps engendré par leurs carreaux ; surtout celles nombreuses d'immeubles,
l'utilisation de tels algorithmes est négligeable par rapport comme dans l'exemple ci-contre), sur les sièges en quan-
au temps nécessaire à dessiner manuellement la police au tité suffisante et bien alignés (ceux des stades, de grandes
pixel près, en particulier si cette police aura une taille fixe. salles parfois… en jouant sur la couleur du matériel inoc-
cupé, ou le plus souvent celle des personnes préparées), et
On peut donner beaucoup de personnalité à une police de plus facilement comme fréquemment sur toutes les sur-
caractères même si chacun a une taille à peine supérieure faces à base de carreaux, dit généralement (au sol, aux
à 5×5 pixels. Les nombreuses polices rencontrées dans les murs, au plafond, sur le mobilier…). Quand ces textes
jeux vidéo des années 1980 et 1990 en sont un exemple sont modifiés (avec d'éventuels dessins à la façon des GIF
(on parle de fontes isolément) : en changeant seulement animés, voir ce paragraphe), en les déroulant ou en les ef-
quelques pixels, un aspect futuriste ou classique peut-être façant, le contrôle dynamique est souvent électronique ou
appliqué[11] . L'aspect extrêmement contrasté de ces pe- par ordinateur (même si les pixel-artistes peuvent recou-
tites fontes les fait être préférées dans certains cas (quand rir à du personnel, par exemple), où le monde réel devient
l'espace d'affichage manque beaucoup) à celles lissées une sorte de périphérique de communication, néanmoins
des écrans actuels, car ces polices d'écran sont par na- le plus souvent éphémère en tant que performance artis-
ture floues à cette taille. Le pixel-art est d'ailleurs sou- tique. Voir le paragraphe consacré aux liens culturels, et
vent rattaché esthétiquement à ces tout petits caractères celui sur les jouets et matrices parmi les affichages exo-
d'écriture, souvent fort agrandis, et dès lors gros en pixels
14 2 NATURE DU PIXEL ART
utilisés principalement pour renforcer l'interaction pixel art par les indépendants), et maints objets dé-
avec le produit. On en retrouvait sur certains tournés faisant office de pixels “réels” (où un futur
jeux électroniques (comme les Tamagotchis) ou sur néologisme serait à prévoir, tel que « mixels », pour
téléphones portables (Snake, etc.). On a donc pu as- material/misc./mixed elements), une motivation sou-
sister à une brève période de développement du pixel vent d'ordre ludique pour les nouveaux pixel-artistes
art en noir et blanc. Les animations du personnage (voir la partie sur les liens culturels). On pourra faire
des Tamagotchis, qui doit sembler vivant sans occu- remarquer que les matrices utilisables peuvent être
per plus de quelques pixels, en sont une illustration rendues volontairement moins évidentes (sans aller
notable. jusqu'à de la stéganographie efficace). Des variantes
peuvent ainsi être simplement utilisées au niveau
des caractères (ex. : déformations à base de rota-
tion, d'inversion…). Ou bien la composition de la
ou des matrices diffère dans l'espace comme dans le
temps : elles ne sont alors pas nécessairement per-
pendiculaires (disposées plus ou moins diagonale-
ment, comme les mailles d'un grillage ou les reliefs
de certains papiers absorbants ou autres motifs en
quinconce de surfaces très diverses, voire sur un fi-
let en 3D comme dans les démos techniques), pas
toujours simultanées (les pixels peuvent s’afficher
individuellement de façon aléatoire ou cyclique, en
exploitant la persistance rétinienne, la stéréoscopie
etc.), ni sur un même plan (l'angle de vue précise et
une éventuelle installation préalable sont alors par-
tie intégrante de ce dispositif aux effets d'apparition
Un jeu d'assemblage créatif par pixels (perles fondables). ou de transition basés sur la profondeur de champ),
ni toujours intègres (par la présence de lacunes ou
de parasites qui réduisent grandement la lisibilité
des plus petits caractères, très fragiles pour leur très
faible nombre de points sans redondance contre les
dégradations).
KDE.
Pour des travaux plus complexes, l'utilisation de calques
(qui sont un apport moderne), devient néanmoins
très pratique. Les logiciels comme Gimp, Photofiltre,
Paint.NET ou Photoshop proposent les calques, mais cer-
tains puristes revendiquent un pixel art sans cette fonc-
tionnalité, toujours dans une volonté de travailler avec des
moyens très limités. Il peut être très difficile de faire du
pixel art sous Photoshop puisque le logiciel est entière-
ment pensé pour le traitement et l'amélioration d'images
en haute résolution. Ce type d'outil favorise donc en per-
manence l'utilisation de filtres automatisés, comme le
lissage, qui vont à l'encontre du pixel art.
On peut noter le logiciel Pixen (sous Mac OS), qui pose
comme principe d'utiliser les techniques modernes dans
le but unique de réaliser du pixel art.
Animation GIF en boucle.
Quel que soit le logiciel de dessin, le “crayon” est l'outil
de base, car il est le seul à pouvoir atteindre 1 pixel L'animation n'est pas le cœur du pixel art, puisqu'en ani-
d'épaisseur et à faire des lignes droite avec un effet mation le positionnement précis des pixels n'est pas la
d'aliasing. Il est possible aussi d'éditer une palette de cou- problématique centrale. Cependant, le pixel art a vu se
leurs afin de rester dans une gamme de tons restreinte. développer certaines techniques liées à l'animation et qui
Concernant la palette, pour en réduire le nombre de cou- lui étaient propres.
leurs sous Windows, IrfanView dispose d'une option très
simple et automatique d'une étonnante efficacité (au dé- • Les images GIF : avec une palette limitée à 256 cou-
but comme à la fin d'un projet, face aux outils concur- leurs, le format GIF rend très facile la production
rents), alors que ce programme devra absolument laisser d'animations de médiocre qualité, en particulier si
la place à d'autres spécialisés dans le halftoning (cf. le on se repose entièrement sur des outils automatisés ;
paragraphe sur les dégradés par tramage), où ImageMa- il faut donc avoir recours au pixel art pour produire
gick est peut-être le moins facile d'accès de tous (les outils des animations de qualité. Dans des logiciels comme
18 3 TECHNIQUES ET OUTILS
taches, écailles, croix, spirales, ondes, caractères, lignes formats de compression dits sans perte ; autrement dit :
pointillées savantes ou points éparpillés etc. Il s’agit alors les images finales dégradées par un format destructif ne
chez le pixel-artiste, qui met en avant son expérience dans doivent pas être réintroduites dans le processus de pro-
ce domaine, d'une volonté de texturer et d'enrichir le tra- duction).
mage en le forçant (lorsqu'il est visionné de près), tout Sur les systèmes modernes, les extensions (de format de
en maintenant autant que possible les valeurs du dégradé fichiers) les plus populaires pour le pixel art sont :
initial (lorsqu'il est visualisé avec davantage de recul). Ce-
pendant, comme pour toute recette stylistique, le recours
trop fréquent à ce procédé devient une facilité d'artiste • le PNG (qui gère les transparences). Celui-ci a
(puis de courant d'artistes). Par exemple : en dissimulant l'avantage de permettre une compression (de type
le banding ou les artefacts d'une médiocre digitalisation RLE), sur des images statiques ;
sous des spires travaillées (motifs singuliers qui néces- • le GIF (qui permet des animations). Ce format a
sitent de les multiplier pour moins les remarquer, et qui fi- connu un âge d'or au début d'internet, mais il est
nissent par conférer un aspect de filtre automatique défor- vieillissant, en particulier parce qu'il se limite à
mant sur l'ensemble de l'image) ; ou en ne pouvant s’em- 256 couleurs (bien qu'en théorie ce ne soit pas un
pêcher de couvrir les surfaces les plus lisses, toutes même, problème dans le cas du pixel art historique), et
d'une texture inadaptée de gros sable stéréotypé (par des qu'il n'intègre qu'une seule couleur de transparence
trames qui dépassent leur zone ou leur niveau, voire qui (contre 256 en PNG). Il est très souvent moins per-
pourraient être modifiées ou évitées en stylisant davan- formant à réduire le poids des fichiers de pixel art
tage le modelé ou la composition en amont, ce que la co- que le PNG, là est aussi son désavantage, alors que
pie des sujets ne permet pas). La scène démo foisonne de pour de l'animation, c'est encore le plus utilisé à
trames palliatives, maniaques, comme fantaisistes. (Les l'heure actuelle, et de très loin, malheureusement.
pixels sont bien entendu nettement moins neutres sur ZX Car l'APNG (extension .apng, rarement .png) est
Spectrum que sur Amiga, par exemple, comme l'illustrent l'une des deux solutions les moins incompatibles, no-
bien les conversions au début de l'article.) tamment parmi les navigateurs (Mozilla Firefox en
tête), vidéos destructives comme solution de repli
mises à part. Le WebP, sur Google Chrome, est plus
3.4 Les formats de compression complet et avancé techniquement que l'APNG, mais
son option de compression à pertes pose un sérieux
souci en pixel art, à ne pas permettre de détermi-
ner a priori si la création est bien intacte, puisque
l'extension reste inchangée dans les deux cas : .webp.
verse même la balance sur les grandes tailles de pixel art. camembert ou l’ancêtre de Mario, Jumpman (1981) est
Le PNG est alors l'un des moins mauvais formats de com- composé de 129 pixels de 3 couleurs. Un sprite plus dé-
pression (où PNGGauntlet améliore souvent les taux des taillé (taille, couleurs, animations) demande plus de mé-
autres outils), précédé de près, pour l'archivage plus parti- moire et de temps de calculs. Les capacités informatiques
culièrement, du BMP (ou d'un autre format sans pertes et de l'époque ne permettent pas toutes les fantaisies.
non compressé), nécessairement dans une archive (solide Les designers sont obligés de faire des concessions. Si
autant que possible si les fichiers sont multiples et ressem- Mario a une moustache c'est parce qu’il était impossible
blants), de type 7-Zip (extension .7z), préféré également de représenter une bouche. S'il porte une casquette c'est
pour sa gratuité et sa compatibilité multisystèmes récents.
pour éviter l'animation des cheveux. « Il est intéressant de
(Les anciennes machines disposent d'ailleurs, pour cer- voir comment les limitations techniques peuvent, contre
taines, de visionneuses très avancées pour des formats ou
toute attente, produire un personnage très humain et atta-
itérations de compression qui leur sont de très loin posté- chant »[14] . Les cheveux verts des personnages de Lem-
rieurs, tels que le JPEG et le PNG, où la scène démo joue
mings sont également choisis pour les détacher du fond
sur les images anachroniques par exemple, mais les res- de l'écran.
sources demandées, a fortiori pour un compresseur très
exigeant, limitent grandement leur utilisation, la relègue
même à des champs d'expérimentation, où la lenteur est 4.2 La relation avec l'animation
reine. Les formats compressés standard et plus ou moins
propriétaires des systèmes originaux étaient en effet op- Le contrôle d'un sprite par un joueur induit obligatoire-
timisés, sinon adaptés à une utilisation courante sur du ment le mouvement. Dans les années 1980, il est réduit à
matériel non glonflé.) Un mélange JPEG-PNG est par- son strict minimum. Par exemple, Alex Kidd (1986) court
fois envisagé et codé (dans les jeux vidéo), lorsqu'il s’agit avec un cycle de 3 images (standard à l'époque). À la fin
de gagner en poids (effectivement et au cumul des deux des années 1980, Shadow of the Beast et Turrican propose
fichiers) dans les surfaces grâce au JPEG, et de conser- une animation en 50 images par seconde sur Amiga.
ver en même temps un masque et son canal alpha intacts
grâce au PNG. Pourtant dès 1984, Brøderbund sort Karateka sur Apple
II. Le jeu est remarquable par la haute qualité de ses ani-
De par ces dégradations de compression inadaptée, toute mations. Pour arriver à un tel résultat, Jordan Mechner
création à base de pixel art se révèle donc très sensible filme son frère afin d'analyser la décomposition de ses
au vieillissement provoqué par les modifications et publi- mouvements, à l'instar de Muybridge précurseur du ciné-
cations numériques successives, particulièrement en web ma. Retranscrit pixel par pixel, ce réalisme des déplace-
2.0. Il s’agit d'un souci de conservation culturelle d'ordre ments se retrouvera dans son œuvre culte Prince of Persia
général, comme nouvelle bonne pratique, à défaut d'une (1989).
préservation de l'œuvre qui le mérite. Les formats qui né-
gligent la fidélité des pixel art originaux, surtout les plus Les jeux Another World (1991) et Flashback (1993) du
ténus et délicats, semblent heureusement exclus de la plu- développeur français Delphine Software, reprennent la
part des sites spécialisés, de nos jours. (Mais il convien- technique de rotoscoping initiée par Jordan Mechner en la
drait au public le plus sensibilisé de vérifier chaque fois sublimant. Another World fait d'ailleurs partie de la col-
l'extension de ces fichiers, et si possible l'absence de lection permanente du MOMA de New York.
traces de compression à la loupe sous un logiciel de re-
touche, via l'outil de remplissage global sans tolérance,
pour être précis, afin que la copie ne remplace pas chez 4.3 La relation avec le level design
eux l'original par inadvertance. Par exemple, la vision-
neuse IrfanView, gratuite sous Windows, permet entre Pendant longtemps, par souci pratique, les environne-
autres d'indiquer les erreurs d'extension, le nombre de ments et les décors des niveaux des jeux ont été consti-
couleurs, d'en remplacer, d'agrandir sans filtre aucun.) tués d'un assemblage d'images plus petites qui pouvaient
être ré-assemblées selon les besoins, ce qui permettait de
réduire l'espace mémoire nécessaire pour les stocker. La
plupart du temps il s’agissait de petites images carrées (les
4 Relations entre pixel art et jeux tiles, ou « carreaux ») disposées sur une grille. On appelle
vidéo « tile sets » les planches contenant l'ensemble des tiles :
êtres vivants, nature, architecture…
4.1 La relation avec le character design Cela a maintenu le graphisme informatique dans un cadre
technique très strict, puisqu'une fois encore il était interdit
On considère parfois les graphismes des anciens jeux vi- au graphiste de réaliser des dessins de la taille de l'écran
déo comme du “pixel art”, mais c'est bien par la force − au lieu de cela il était forcé de tout concevoir d'après
des choses. Avant tout, le problème était de créer des des petits dessins de quelques dizaines de pixels de cô-
héros identifiables en quelques pixels : Pac-Man (1978) té, typiquement par carrés de 8 pixels sur les machines
est composé de 110 pixels de couleur jaune en forme de 8 bits (les créations partaient le plus souvent du papier
21
quadrillé). Indirectement, à la même période, l'esthétique (ce qui sera repris dans les fatalities, ces scènes d'actions
du pixel art n’a pas pu atteindre son autonomie visuelle littéralement fatales dans le jeu Mortal Kombat sur arcade
puisque toujours comparée aux autres arts (cinéma, pho- et consoles en 1992).
tographie, dessin animé…) tout en ayant ses limitations À partir de la fin des années 1980, les capacités des sup-
propres. ports de jeu (disquettes, cartouches ou cédéroms) per-
Une exception notable à ces pratiques est la famille des mettent le stockage de véritables mini films. Infogrames
jeux d'aventure, où les scènes ont été constituées de des- présente ainsi par exemple une introduction animée dans
sins faisant la taille de l'écran, quasiment dès le début Bob Morane : Ocean, sur Atari ST en 1988. Core Design
(exemples : Mystery House puis King’s Quest, de Sierra). en fera de même au début des années 1990 dans la plupart
Certains jeux font le choix de privilégier l'aspect vi- de ses jeux (Chuck Rock, Premiere, Heimdall…). Aupa-
suel sur la jouabilité. En 1982, Les Schtroumpfs sort sur ravant en 1986, mais pendant le jeu cette fois, Defender
Colecovision. Certains le qualifient alors de « dessin ani- of the Crown sur Amiga gratifiait déjà le joueur vain-
mé interactif ». Le magazine Tilt met en pleine page une queur (très majoritairement masculin à l'époque) d'une
capture d'écran du jeu en couverture du numéro 6. Par la cinématique passablement érotique (un déshabillé en lin-
suite, d'autres jeux recevront ce qualificatif, comme pour gerie, inédit jusque là et même durablement pour un jeu
la série des Dragon’s Lair de Readysoft, qui s’éloigne du vidéo de grande audience, « AAA » comme on dirait au-
pixel art en se rapprochant du dessin animé réel de type jourd'hui). L'apparition du CD-ROM pour PC-Engine en
Walt Disney. 1989 généralisera les introductions animées sur ce sup-
port, en attendant l'arrivée de machines CD-ROM plus
puissantes. En 1993, Delphine Software sort Flashback,
4.4 La relation avec les cinématiques avec une cinématique d'introduction étonnante : cadrage,
lumière, animation, tout rappelle le cinéma de science-
Le paragraphe précédent explique comment le recours fiction. Ce jeu s’affirme comme le successeur spirituel
aux tile sets interdisait aux pixel-artistes de réaliser de d'Another World, du même développeur qui présentait
grands dessins originaux. déjà, en 1991, des scènes cinématiques entrecoupant
l'action. En 1993, LucasArts sort Day of the tentacle sur
Cependant, une exception réside dans le recours ponc- PC et Mac. En plus d'avoir des graphismes très cartoons,
tuel aux images de mise en scène : relativement rares du le jeu propose une des introductions les plus marquantes
fait de l'espace nécessaire à leur stockage, proposées en de l'histoire vidéoludique. Elle annonce le ton décalé et
introduction, en conclusion ou pour l'articulation des cha- la loufoquerie pratchettienne qui va sévir tout au long de
pitres, les images et leurs « cinématiques » améliorent l'aventure. La même année, le jeu Beneath a Steel Sky de
l'immersion du joueur. Ainsi dans un premier temps, elles Revolution Software, sur PC et Amiga, présente des gra-
sont animées et issues du jeu lui-même (permettant de phismes basés sur des illustrations de Dave Gibbons, le
présenter le gameplay par une démonstration automatique dessinateur de Watchmen.
et commerciale d'un joueur virtuel, notamment sur les
premiers jeux vidéo d'arcade). Ensuite elles vont s’orien-
ter vers l'image fixe (par un ajout non nécessaire directe-
ment au jeu), semblables à des illustrations dessinées et
5 Notes et références
retravaillées en pixels.
[1] « Pixel Art ² »
C'est en 1984, dans Karateka de Jordan Mechner que le
joueur voit des cinématiques dignes de ce nom. Lors de [2] Concevoir un jeu vidéo, Marc Albinet, p. 22
toute cette décennie, la plupart des titres proposaient en [3] Nos jeux vidéo 70-90, Marcus, quatrième de couverture
effet seulement une introduction (menu plus ou moins
animé, présentation et tutoriels éventuels, démonstration [4] User, « Agony »
à l'ancienne, sans oublier les images plus ou moins sta- [5] « Pixel Art ² : Pixel Games »
tiques de chargement sur micro-ordinateurs), et souvent
une conclusion (victorieuse, et parfois pas), de façon suc- [6] « Test FEZ sur 360 »
cincte mais appréciée (sauf à la longue, dans le cas des [7] « Test Treasure Adventure Game sur PC »
pages de game over, qui forçaient à attendre). Dans cet
ordre d'idée, les transitions animées, gourmandes en mé- [8] (ja) « Works », sur masutoshi117.jimdo.com (consulté le
moire, étaient encore plus rares en cours de jeu. C'est ain- 4 février 2017)
si que dans les shoot 'em up et autres beat them all (jeux [9] « Demoscene.fr - le portail francophone de la scène dé-
d'action), les bosses (ennemis de grande taille en fin de mo »
tableaux) venaient renforcer le scénario (sans autre pré-
paration qu'une éventuelle petite pause de suspense). Le [10] « Pixel Car Art - Pixel Cars, Manga Cars and Other Pixel
Art »
jeu de combat Barbarian de Palace Software, sur Com-
modore 64 en 1987, inaugurait quant à lui de façon très [11] « Adventure Game Studio | AGS | Sci_fonts », sur www.
remarquée un début de cinématique gore en fin d'action adventuregamestudio.co.uk (consulté le 27 mars 2015)
22 5 NOTES ET RÉFÉRENCES
6.2 Images
• Fichier:23c3_by_taw_pixelart_1.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/63/23c3_by_taw_pixelart_1.jpg Li-
cence : CC-BY-SA-3.0 Contributeurs : Aucune source lisible par la machine fournie. « Travail personnel » supposé (étant donné la revendi-
cation de droit d’auteur). Artiste d’origine : Pas d’auteur lisible par la machine identifié. Taw supposé (étant donné la revendication de droit
d’auteur).
• Fichier:4DPixel.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/5/5f/4DPixel.jpg Licence : CC BY 2.0 Contributeurs :
http://www.flickr.com/photos/studioroosegaarde/2934707102/in/set-72157607954888386 Artiste d’origine : Studio Roosegaarde
• Fichier:Alien_pixel.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/45/Alien_pixel.png Licence : CC BY-SA 3.0
Contributeurs : Space Invaders (le jeu vidéo) Artiste d’origine : Axel Pixel
• Fichier:Amiga_500_DBW-Render_into_1-bit_ZX_Spectrum_by_dpla.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/
commons/3/3b/Amiga_500_DBW-Render_into_1-bit_ZX_Spectrum_by_dpla.png Licence : CC BY-SA 4.0 Contributeurs : Travail
personnel Artiste d’origine : Dpla-fr
• Fichier:Babosa.PNG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/5/5e/Babosa.PNG Licence : CC BY 2.5 Contributeurs :
la creé en paint Artiste d’origine : Tutiman
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