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EDOUARD DUJARDIN LE MONOLOGUE INTERIEU SON APPARITION SES ontGINES SA PLAGE DANS L'@UVRE DR JAMES JOYCE BE DANS LR ROMAN GONTEMPORALN Avec an index des éctivains cites Panis ALBERT MESSRIN, EDITRUR « gear samersicuee, 19 a 2 2 . [-=7 2 eS Zz — Sow > S S$ = S Zz Ss = DU NiME AUTEUR Fomans, conte o pode Lin Hames, conte; Trois PoSinse en prouo ot on vers (Messin Lees Lavaiens soy coves, roman (Mex Wineuxnion a0 néew@ ur 4 sano, roman Mesci, Posies, 1885 agi (Merenra da France). Man wet, poles, 1917-1930 (Cabiars Méslse), Histove ot Gritgass La Sounce no vuauve canines baleve ertique da judas aucion (Mercare da Francs). Las Pudoicesonons om Danie, exigies (sehbaekor} De Seong Marssaad au sombre Rriewer, oss] une Unéorie ‘ta wfasme aymbotiqna (Merce do Francs), épuisd Les Panueus volves wu VRS one, ess bisiorique of eritique iereure de France) Daas, 1), ats, ua livouvrion (Delpoucl). Lr Booronen serinien (Mose ‘rhea 1. = La fifornoy p'Anromn, compranant © Antonia, = Gaevauien fu vase, ua Fon 8’Arann (Maree de rene) T= Liss Anoonsvves, comprenent : Manus ax Masse, us Loox b'Hevi-ue-roar, uu Tiioen mee exvanes tomicuns (Moroure de Franoo), Lu Muvriae ny onee sour ne nessciré (Mosin}. Le Reeous dea, on properation Histoire ancien ds dion Hens (Mowe 1, — Le mats Hace, proigomines bua emai sue Tos ovigias ot la formation de la Mgende Brangdlique. TE, = Grasonue er éenarsan ne £4 caurique, sx nbsovencs, UL, — La Lécnow ov view Ss, hisaire ertique da cbrisionime depuis Van 27 jusqu’d Pan 70, pour paaiiee incesemment, EDOUARD DUJARDIN Q LE MONOLOGUE INTERIEUR SOX APPARITION SES ORIGINES SA PLACE DANS L/QUVRE DE JAMES Jover ‘Avge un indox des Scrivains cités vans, ALBERT MESSEIN, EDITEUR 9, qua skeen, 19 ga5e4> ght Copyright by Duranrs, 1884, LE MONOLOGUE INTERIEUR Jusqu’a ia publication des promicrs fragments de P'Ulysse de James Joyce en 1919 et 1920, on no connaissait guére, en fait de monologue, quo celui qui releve plas on moins do la définition que donnent los dictionnaires : paroles prononcées, de thétire, par un personnage qui cst soul en seéne. dans uno Tel, le fameux monologue de Hamlet : « To be for not to he. » Hainlot est soul en sctne ; il oxprime ses pensées ; il pourrait se contentor de penser sans parlor, mais les nécossités théatrales exigent qu'il pense & haute voix. En principe, le personage qui parle doit done sire seul. Il y a pourtant monologue Jorsque, quoique n’étant pas seul, il parle comme s'il Pétait, dion qu’au thédtre cola s'appelle plutst ‘un a parte, Mais qu'il y ait ou non d'autres per- 6 LE MonoLoguE INréntEUR sonnages sur la sebne, la condition osscnticlle est «quo cola qui parle n’ait pas et ne vouille pas avoie awulitenes, Par contre, le fait do parlor a quel qu'un qui ne répond pas, comme Tarelare au der nioe acto de 'Otage, s’appolle encore dans V'usage west plus dau courant monologuor, mais en réalité monologue, Né au thétixe, on congoit que Io monologue se soit introduit aisément dans Ie lives, par exomple dans Ie roman, Liauteur, au lien de raconter que son personnage pense ceci ou cole, lui fait dire & Tui-méme co qu'il pense, do Ta mime fagon que ta chose so passe sur la sono. Dat Goriot sux Inuelle aous roviendrons, Balzac aucait tune page du Pére pu erire ; « Rastignae pensait que tout I monde 30 moquait de fui...» I] uso du anonologue et éerit : « Tout Ie monde so moque de msi, se dit Masti gnac.. ® Dans lo roman moins oneore qu’an théatre, it n'est indisponsable quo Io personage soit seul 5 i suflit, pour qu'il y ait monofogue, quo oolui-ci exp tondre d’un auditeur, Et le monologue pout aussi bien so comprendre dun long moreoax ou de 12 ses pousées sane intention de les faire one Le MonoLocun mrémEUR 7 quelques phrases insérées au oours d'un un dialogee. ‘Tol ost, aussi views quo la littérature elle-méine et quelques rallinomonts qu'on ait pu y apporter, Io monologue traditionnel. Aver ce qu'on appelle aujourdhui le monologue siour, celui par exemple do Mrs Bloom au deruior chapitre a Ulysse, i n'est personne qui, das la premigre lecture et préalablomont & toute analyse, nait Je sontiment qu'une considérable nouveauté ost entrée dans Ja littérature. Lintértt sera do recherchor en quoi consiste cette nouveauté, comment elle pout so délinir et quelle en est Porigine ; mais il convient aupara- vant do rappeler comment elle est venue au jour. L’INSTAURATION Je nai pas A vaconter ici la vie ot & analysor Veuyre de James Joyes (4) et m'on tiendrai & ‘co qui concerne notre sujet. De tonte évidence, le grand Gorivain portait on Tui-méme la néeossité do Ia nouvelle formule dans laquelle son génie devait s'exprimer, ot nous vervons tout & Phoure que co fut, on effet, dis sa vingtiéme année, entre 41901 ot 1903, qu'il on prit conscience, Pendant plusicurs années, 'idée germa sans se manifester, ot Von n’en trouve aucune trace dans ses deux pr ier livres, Chamber music, paru en 1907, ot Dubliners, achevé In rmémo année ot para en 1914 senlomont (2). (a) Je renvoie & la pr ‘en t2te de la traduction frangotso de ciapets, (2) Traduit on feangeis par Y, Peraandes, H. du Pasquior ot JeP, Reyaaud sous le tte de Gene de Dublin, 1926, avec priface de Valery Laxbaud. Joe de Valery Larbaud publiSo jens de Dublin, cite LE MoNoLocuE INTénIBUR 9 ‘Ala méme époque, il terminait son promior ro- man, commencé on 1904, Portrait de Vartiste jeune par lui-méms (4), qui parat & New-York en 1916 ot fonda sa réputation, On a voulu trouver duu monologue intérieur dans lo Portrait de Vartiste jeune ; on r6alitéyil n'y en a que quelques lignes, cect de Paveu de lauteur li méme qui an’a dit les avoir éerites & peu pris in- consciomment, et qui n'en Wémoignont quo mioux du travail qui se produisait on lui. Une autre trace de ca travail se manifesto dans Vobauche qu'il avait eommencée de son Ulysse, en momo temps qu'il derivait Dubliners 5 loin @ovoir les dimensions énormes de P'Ulysse défi nitif, e© proto-Ulyese m’aurait &é qu’une courte nouvelle, mais était déj& eongu comme Io tableau a’ame journée du principal personage. Aprés y avoir rononcé pour Gerive le Portrait de Partiste jeune, James Joycey revint une fois celui-ei achevé ety travailla pondant sept ans, 1914-1921, Prieste- Burich-Paris. Tn 1919 ot 1920, dos fragments en parurent (1) Traduit on trangais par Ludmila Sevitzky sous le titre do Dedalus, 19%. 40 Le MonoLogun INrénisUR dans une rovuc de New-York, the Litile Review, qui fut poursuivie et saisie on raison des passages soi-disent immoraux de Peeuvro. Et immédiatement, avant méme In parution en ibraitie, le retentissement fut. énorme, Comme a dit Philippe Soupault (1), « Patmospheére littéaire qui baigne la Grande-Bretagne ot les Etats-Unis on, fat complitement modifiée »; mais ce ne fut pas soulemont Patmosphire littéraire des pays anglo-saxons, co fut colle du monde letiré tout, ontior. Pour co qui ost de la Franco, ee retentissement so ristalliea on une conférence que fit Valery Larbaud & Ia Maison dos Amis du Livro, le 7 dé- combro 1924, ensuite publige dans la Nouvelle Revue Feancaise d’aveil 1922, ot donnée plas tard comme préfaco a Gans de Dublin, Ulysse allait pou aprésparattre on volumo, févrior 1922, & Ja libraicie Shakespeare, & Paris, pares quiimterdit ou Angletorro ob aux Etats- Unis (2). (8) Europe, juin 192. {2) Ln traduction frangaiso par Auguste Moot et Stuart Gilbert, evee;revision de Volexy Larbaud, « para on 1929) Lx woNozocus invénreun a + Comment, écrit Joan Casson (1), racontor eotte journée dubliaoise plus vaste que tous les sidetes de Phistoire, d Geartent Stephen Dedalus ot Léopold Bloom et los iro los mouvements stellaires qui vapprochent Pun de Pautre ? Comment votsacer los routes par lesquellos an franchit les broussailles de tous les langages, angot, voor age, du journal Ginlogues, poésiv débridée et toute pure, pour ualaive du moyen ine, style parlé, académismes, aboutir enfin & Postraondinaire monologue ints riour de Mre Bloom ?... » Pour douner une idéo do Vimpeession qu’ Ulysse produisit parmi les jeunes Grivains, jo eitoral spore ees lignes do Pieore d’Exidoutl (2): « Tout 60 qu'il travorse dans Jn tito dan indi- vidu, prodigiousomont yuotidion, Widées, de sou- voutivs, de vantardises, et avee Ia minutio et le dlssordre W’Gvocation qui peut y xéyner, tout oe que la pons do vollsitis diols, tout ala est rendu avoe tos un homme voit surgix, & toute minuto, boursouflures de Vorgaeil ut de la betise collective: eb particu chacuu de rons a en parlage. re que (1) Newvelos Lindraires, 9 men 1 2) Rese Nowell, juills-aoit 1 2 Lb MONOLOGUE INTENIEUR Toute cette meute de penséos stagite en nous, sans ropos, comme un troupeau apocalyptique ; trou peau aux courses énerguménes, Ehucubrations in- cohérentes, déformations hilarantes, visions dé- monologiques, prouestes soatologiques, boutlées de poésie, tello est In bacchanale silencieuse et ra~ pide qui se profile au fond de nous, comme au fond de la caverne do Platon so profilaiont dos ‘ombres, mais moins inquiétantos, » La formalo du monologuo intér quolle était éerito une partie du livre, était arrivéo au grand jour de la renommée, et fut immédiate- wr, suivant Ia- ment omployée on Franco par Valory Larbaud dans Amants, heureus amanis ot on Amérique par William Corlos Williams. Bientot (1924), dans te délicioux roman Julietle au paye des hommes, Gorire (page 149) que «co qui intriguait Paris on co moment, co n’était certes pas la mort, e°était- lo monologue intérieur » Et la question no posa aussitét : quolles étaient les origines do cette sensationnelle nouveauté ? On ne diminue en rien la gloire de James Joyce A rechercher ce qu'en érudition on appellerait. sex « sources », comme Vietor Bérard a recherché les Lm moNoLoouE Iwriereun 43 sources de POdyssée elle-méme, comme los théo- Jogions rechorchent celles du Sermon sur la Mon tagne. Mais qui sait, quand Ja question aurait- 66 Aucidée, si James Foyco, aves uno yéndeasicé sans ‘oxomple dans Vhistoire des lettres, n'avait révélé Iui-méne que trente-cing ans av: tion d'lysse, Te monologue intérier av: employé et en réalité ori Lauriars sont coupes. la. publica até dans mon roman, los Cost, on effet, on 1887, quo’ los Lauriers sont coupés pararent dans la Recue Indépendante, puis Vannéo suivante on Librairie, Quel on était le théme ? Edmond Jaloux I's résumé dans los termes suivants (1) : « Dans les Lauriers sont coupés il ne se passe i ‘pou prés rion : un jeune homme est amoureux dane jolie Ale, Jui donne un peu d'argent, se promdne avec ello ot finit par no rien obtenir. I s’en va on 50 déclarant qu'il no la reverra plus, mais il n'est pas trés stir qu'il tienne parole. » (1) Nouvelle Litdraires, 17 jaview 4985. us Lz wonoLocve inrénisun Loriginalité do Peeuvre était précisémont: que Jo monologue intérieur y était omployé pour la Promidro fois, cola non pas accidestellement, mais une fagon continue ob systématique, depuis lo commencoment jusqu’a la fin, Solon los oxpees- sions de Joyce rapportéos par Valory Lavhaud (1) © To lootour 50 trouvait, dans los Lauriers sont coupés, installd, és los premiéres Tignes, dans a ponsée du porsonnage principal, ot c'est Io déroulement ininterrompa do cette pensée qui, so substituant compRtoment i la forme usuolle du an Toctour ¢@ que fait ee person récit, appronai nage ot ¢@ qui lui arrive ® Quant au succds du livre, il avait 6té mineo. Le volame, comme tous eoux publiés par la libraiie de la Revue Indépendante, avait sé ting 4420 oxom- plaires numérotés, dont 20 sur grand papier ; un certain nombre en furent dounés a titre de sorvieo de presse, ot un tris petit nombre trouvéront ache twurs ;Jestock, lorsque Ja revue eassa de parattre, fut vondu a vil prix aus libraizes Vanior ot De- ‘man, ® part quelques grands papiers quo je préfiérat déteuire de mes propres mains. (1) Prtfaco do 1 mn Afinitive, 1924, Lu mowonocus iNréamun 45 Lroooweil fait au livre par les personnes qui le regurent & titro gracioux no fut guére meilleur, sauf un petit nombre dexceptions... il ost vrai que In qualité de quolquos-unes compensait la quantité. Diabord, une lottee do Mallarmé, 8 avril 1888 + Vous savez que j'ai particuliéremont apprs- cié co roman @ ma promixe lecture dans la Revue Indépendante ; ot aujourd'hui en to fouilletant je rooonnais que vous avez Ia fixé un mods de nota- tion virovoltant ot eursif qui en dehors des grandes architectures littéraires, vors ou phrases deorati- vement contournées, a soul raison @étre, pour ex primer, saus inésapplication des moyens sublimes, 1o quotidion si pricioux & saisir. Hy a done fa plus qu'un bonheur de hasard, mais une de oes trou vailles yors quoi nous nous efforgons tous on sens divers (1). » ‘Jo rogrotterai étornellemont quo Mallarmé m'ait dit ot ne m'ait pas éerit ce qu'il avait ponsé du livre lors do.sa publication on revue ; tout on Voxcluant, dion entendu, de la définition vertiginouse qu'il 1) se possido do Mallarmé une eecoade lettre relative aux Lauriers sont eoupis, du 8 oetobeo 1807, dont lot wriaes fie me sont pas moins précious. 16 te Monorogus INTERIBUR donnait de Ia littérature, il avait: é6 Te seul (avoo pout-ttre Huysmans} & prossentir oo que Joyeo dovait découvrir plus tard ; les immensos possi pilités du monologue intérieur. Jo me rappelle son oxprossion : « Vinstant pris & la gorge...» i ‘Huysmans, disais-je, sembla on avoir lui aussi i « Crest curieux.. est cu quelque intuition ... ves roux... 1, repétait-il, sans rien préciser d’aillours, De lui, jo posséde un billet of i) rappelle seule- mont Jn sensation de nouveauté qu'il avait éprou- vec i ‘A. Mallarmé ct Huysmans ill faut joindre J. H. Rosny qui, dés Jo promier jour, manifesta uun intért quill no devait plus cessor pour.le de lui accorder. D'Emile Hennequin, qui avait alors Ia réputa- tion d’un critique important, jo rogus une lettre of il roconnaissait dans lo livre « le roman d’ans- lyso réduit 4 étre seulement I’énumération dune suite de mouvements dame », Do Loti, un hillot assez ombarrassé. En 4890, quolques pages hostilos de Charles Le Gofic, sur lesquelles je reviendrai. i Un pou plus tard, un mot ’Ajalbert, dans Von- iE Moxonocus INTERIOR aw quote de Jules Huret, ot il place le livre parmi les intéressantes manifestations du symbolisme. Une lettre de Courtelino, qui se déclare « grand admirateur des Lauriors sont coupes 2, Quelques mots, par oi par Ia, dans quelques re- vues, Ajoutons do chalourouses paroles de Paul Adam ; des félicitations do Goncourt qui fit aw livre 'honneur dune reliure de choix, Une lottre ultériouro (9 aodt 1897) do Remy de Gourmont me disant quill avait « suivi ea potit roman avec dé- Jioos dans la Revue Indépendante on 1887 » ; ot, plus tard, quelquos pages dans le 11° Livro des Masques, George Moore, avec qui je suis en corrospon- danco depuis 1886, m’avait écrit do Londros, 47 mai 1887, pendant quo le roman paraissait en «(Cost Henri Monnier rendu lisiblo ; le potite vio de Lame dévoilée pour la premiro fois, Une musique étonnante de points-ot-virgules ; seulo- ment je erains la manotonie, Nous verrons ; an ‘out eas, c'est nou. » Jo regus encore de lui quolques mots au mois de décombre suivant, puis dix ans plus tard, 22 juillet 48 be mononogus inritnmeun 4807, une lottes of il me disait quo j'evais trouvé Ia forme la plus originale do notre tomps, mais que a psychologic était ua pow naturaliste.. ¢ Ga comble un contre-sens, ajoutait-il ; mais non ; cost la critique exacte. » ‘Jono me rappollo pas autre chose, Hin 1897, lo Mercure de France qui roprenait ‘alors los principales cuvros du symbolisme, avait publig uno wiédition du livre, Bnfin, te Gil Blas ihustré lo veproduisit, mais il convient de noter quo | «ce fut pour dos raisons personnelles. Résdition et publication n’empéchérent. pas To livre de sombrer dans Poubli, et un de mes bio- graphes, dans uno brochure qu'il me consaora on 1923, no le montionne méme pas parmi anes couvres | Autre symptome, L’exemplaire par moi offert 8 vee mention de sa main, ayant été offort. quelques années aprés la vente do sa bibliothtque au libraive Camille Bloch, pourtant si éradit et si avisé, fut rofusé par lui avec un éclat do sive, Pédition définitive, Larbaud Dans sa préface de ‘a trop bien expliqué les causes do cet oubli pour quo je veuille y rovenir. Pris de plus en plus par ncourt, grand papior, relié par x08 soins | Lm MonozocuE irénreuR, 49 ‘mes étudos d'histoire dos roligions et mon théatso, favais Ani par presque oublier moi-méme oo livre de ma jounesso, lorsque James Joyce pro- nonga Ie Lazaro seni foras, Les cireonstancos do cotto résurrection inté- resseront peut-étre par lours A-cbtés les personnes ‘euriouses do histoire du monologue intériour ; ellos, se présentent sous aspect d'un film & multiples épisodos. Le prem ide romonte «aux années 1901- stintituler « ’Guf de Christophe Colomb », ou « la Marmite de Denis Papin ». Vi Ia scdno + 1903 ; il pourra tun jeune éerivain, vingt ans (James Joyce on personne), lit au cours d'un voyage & Pais Tes Lauriers sont coupés. Ex i faut quo nous nous arr8tions un instant ici, Pourquoi Joyee a-t-il adoptéla formule du mo- nologue intériour ? évidemment, nous le disions plus haut, pavoe qu'il la portait en ui; la eircons: tance qui la lui révéla ‘lui fit souloment. prendre conscience de I . Cette cireonstance fut la lecture du petit roman franeais of précisément Ia 20 us MONOLOGUE iNTéniZUR formule avait ét6 exéée, Mais voict le coup dail do Thomme de génie ; alors ‘que porsonne (sant Mallarmé et pout-étre Huysmans et Rosny) n’avait aporgu les immenses possibilités de la formule abauchée dans eo livre, Joyoo, Tui, los apergut, sans doute pas immédiatement, mais avec toute our portéo, avec une portée qui dépass Vinfini la réalisation quo j'en avais shauehée, Revenons & notre film. Lo second spisode s¢ place on 4917, Jamos Joyce ost & Zurich ; il oston train d’éerire Ulysse (1914-1924) ; il voit dans un journal suisse que je fais roprésenter un dramo & Gentve ; il m’s pour me demander si je suis bien Pautour des Zau- riers sont coupés ; il ignore mon domicile ; mais il se dit que le consulat de France doit posséder adresse d'un Frangais qui on 1917 fait jouer uno pidoo & Genéve ; il adresse sa lettre aux soins du consulat de France & Gentve. Inutilo dajoutor quelle ne ‘Troisidme épisode. Fin de année 1924. Ulyese est jamais parvenue. est achevé ; des fragments en ont parn ; le livre Jui-méme est & Vimprimerie. James Joyoe cause avec quelques éerivains parmi lesquels est Va- it jusqu’a | | Le MoNoLocuR IwriniEUR 24 ery Larbaud. Coux-ci exprimont au grand éo ‘vain leur admiration pour co quiils croient étre son inveation, Joyce les intorrompt et leur déclare quo Jo monologue intérieur a été oréé, non pas par Jui, mais, pros do tronto-cing ans auparavant, par un éorivain frangais, ot il leur cite mon nom et Je tito do mon livre. La déclaration cependant passe & pou pros ina- peroue, Valory Larbaud m'a méme raconté qu'il y attacha oo jourta si peu importance qu'il oublia Jo titre do mon livre ot se rappela seuleinent quo Joyor lui avait parlé de moi. Effectivement, dans sa conférence du 7 a sombre 924, non seulement il » d! Ulysee, mais il somble attribuer & Joyos lui-méme invention du anono- ne parle pas des « sou logue intérieur, sans pourtant alirmer catégori- quoment. Pari os éeri ains qui, de plus en plus, se préoe- cupent de la nouvelle formule instaurée par Joyce, personne ne connait ou ne so rappolle les Lauriers sont coupés. Andes Gide donno, février-mars 42: six conférences sur Dostorowsky (1), au cours des- (0) Reproduites,dans le volume : Dosiotavaty, 1923, 22 Ly MoNoLoct® irinrun quolles, traitant, du monologue intériour, il en rofuse Pinvention & Samos Joyce ot le fait remontor & Edgar Poo, Robert Browning et Dostoiewsky lui- ‘me, sans aucune allusion aux Lauriers sont coupé (1). Au moment ot André Gide donnait ses confé- renees sur Dostotewsky, René Lalou achevait son Histoire de la littérature contemporaine, qui devait parattre & Pautomne 1922 suivant. René Lalow ae avait fu Tes Lauriers sont coupé 5 mais il av surtout frappé de défeats que je conteste si peu quo j'y reviendrai tout A Pheure 5 ot, aujourd” hui que justice a ét6 rendue par ailleurs aux qualités do Peouvee, je mexplique quil ait pu 20 laissor aveétor par Pagacement quiils lui causdrent (2), [f) -Audsé Gi, & qui je domandais séoemment sil avait tu mon livre & Pépoque oi calu-ct avait pars (hien qu’alors 1 fat encore au colldge), mma tépondu par une lettre, & juillet VJont-on mo snura geé de citer Varnusant commence ‘Pay contre (ainsi commence Ta let Ge le roprizentation d’Antonia. Ee quand aumonclogus intivieur:

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