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CHAPITRE

8
Prise en charge anesthésique
des urgences obstétricales
Philippe Dailland
(juin 2002)

Abréviations Sommaire
INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
AED : anesthésie épidurale
RAPPELS PHYSIOLOGIQUES ET PHARMACOLOGIQUES . . . . . . . . . . . 2
ALR : anesthésie locorégionale
DÉFINITION DE L’URGENCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
AMM : autorisation de mise sur le marché
CAM : concentration alvéolaire minimale PRISE EN CHARGE DE L’URGENCE
ET ÉVALUATION PRÉOPÉRATOIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
DUP : débit utéroplacentaire
HELLP syndrome : syndrome hémolytique
ANALYSE COMPARATIVE DES TECHNIQUES ANESTHÉSIQUES . . . . 8
pré-éclamptique, acronyme de CHOIX D’UNE STRATÉGIE ANESTHÉSIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
« Hemolysis Elevated Liver Enzyme Low CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Platelets »
SFA : souffrance fœtale aiguë
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Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 1


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

Introduction
Pendant la grossesse ou l’accouchement, et même au stade de la délivrance placentaire, le médecin anesthésiste peut être confronté à une
situation urgente qui peut soit menacer directement la survie de la parturiente soit concerner à la fois le pronostic de la mère et celui de
l’enfant. Dans un tel contexte, il risque d’être contraint d’intervenir dans des conditions inhabituelles et de devoir réaliser une induction anes-
thésique en salle de travail et non au bloc opératoire, le tout dans une ambiance de stress général du fait de l’urgence maternofœtale.
Une réponse adaptée et rapide ne peut que se fonder sur une bonne connaissance des mécanismes physiopathologiques générant ces
urgences et, surtout, sur une pratique régulière de l’anesthésie chez la femme enceinte. Tout médecin anesthésiste, quelle que soit son expé-
rience, peut être confronté à des situations d’extrême urgence ne souffrant aucune improvisation dès l’instant où il pénètre dans une
maternité.

Rappels physiologiques 6. La faible pression oncotique maternelle majore le risque


d’œdème pulmonaire en cas de pathologie affectant la protidémie
et pharmacologiques et/ou lors d’une expansion volémique soutenue.
7. L’hypervolémie induite constitue souvent une charge circulatoire
difficile à absorber par le système cardiovasculaire et qui ampute la
Les modifications physiologiques liées à la grossesse favorisent un
réserve adaptative maternelle à l’effort. Toute contrainte supplémen-
accouchement normal mais peuvent sérieusement compliquer la réa-
taire comme une vasodilatation ou une hémorragie, ne pourra pas
lisation d’une anesthésie dans un contexte d’urgence.
être compensée avec la même efficacité hémodynamique.
Nous ne reviendrons pas sur ces modifications qui ont été
8. La grossesse normale s’accompagne d’une hypercoagulabilité
détaillées dans le chapitre I-15 mais nous rappellerons seulement les
avec hypofibrinolyse, en particulier lors du troisième trimestre.
problèmes principaux dont il faut tenir compte lors de la réalisation
9. Il existe physiologiquement un certain degré de coagulation
en urgence d’une anesthésie chez la femme enceinte.

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intravasculaire dès la quinzième semaine de grossesse, bien toléré
pour autant qu’il ne soit pas exagéré.
FACTEURS DE RISQUE LIÉS AUX MODIFICATIONS 10. Toute femme enceinte devant bénéficier d’une anesthésie géné-
PHYSIOLOGIQUES DE LA GROSSESSE rale ou locorégionale doit être considérée, a priori, comme exposée à
un risque d’inhalation du contenu gastrique, quelle que soit l’heure
Les modifications physiologiques de la grossesse exposent à de son dernier repas.
10 facteurs de risque dont il faut avoir pleinement connaissance.
1. Majoration du risque d’hypoxémie lors de l’induction et de
l’intubation.
FACTEURS DE RISQUES LIÉS AUX MODIFICATIONS
2. Intubation trachéale pouvant s’avérer difficile, en particulier en
PHARMACOLOGIQUES DE LA GROSSESSE
cas de pré-éclampsie et chez l’obèse. Les modifications pharmacologiques induites par l’état de gros-
3. Risque hémorragique majoré en cas de traumatisme ou d’intu- sesse exposent à 5 risques particuliers.
bation nasotrachéale, du fait de l’hyperhémie muqueuse. Tous les 1. L’hémodilution et l’hypoprotidémie induites par la grossesse
gestes sur la filière respiratoire de la femme enceinte doivent être réa- augmentent la fraction libre des agents pharmacologiques, majorant
lisés avec la plus grande douceur. de ce fait leurs effets sur leurs récepteurs respectifs.
4. La compression aortocave doit être prévenue par le décubitus 2. Certains curares (succinylcholine, mivacurium) voient leur
latéral gauche à 30° environ avant toute anesthésie obstétricale car cinétique altérée par une diminution de l’activité des pseudocholines-
elle peut être majorée ou démasquée au cours d’une anesthésie, quel térases plasmatiques.
qu’en soit le type. 3. Pour les anesthésiques volatils, indépendamment de la diminu-
5. Au cours d’une anesthésie épidurale ou d’une rachianesthésie, il tion de 30 à 40 % de la concentration alvéolaire minimale (CAM) on
faut assurer une expansion volémique et être prêt à administrer un observe une augmentation de la vitesse d’induction par augmenta-
vasoconstricteur, dans le but de prévenir ou de minimiser l’hypo- tion de la ventilation minute et diminution de la capacité résiduelle
tension due au bloc sympathique. fonctionnelle.

2 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
● Tableau 1 Effets secondaires des traitements associés à la grossesse ● Tableau 2 Causes de mortalité liées à l’anesthésie générale

Complications liées à l’intubation


Médicaments Effets maternels
– Impossibilité d’intubation
Bêta-2-mimétiques Hypotension – Intubation œsophagienne méconnue
Tachycardie – Traumatisme
Œdème pulmonaire – Extubation accidentelle
– Obstruction de la sonde d’intubation
Insuffisance cardiaque congestive
Douleur thoracique Inhalation du contenu gastrique
Arythmie (auriculaire Complications liées à l’appareil d’anesthésie
et ventriculaire)
– Valve inversée
Anxiété, nervosité
– Défaut d’alimentation en oxygène
Nausées et vomissements – Anomalies de fonctionnement du respirateur
Céphalées
Hyperglycémie Retentissement physiologique de l’anesthésie générale
Acidose métabolique (lactique) – Réponse au stress
– Pathologie maternelle
Inhibiteurs calciques Hypotension
Retentissement pharmacologique
Diminution de la contractilité
cardiaque – Effets secondaires des produits anesthésiques
Diminution de la conduction – Surdosage
cardiaque
Inhibition de l’agrégabilité
plaquettaire Les bêta-2-mimétiques administrés pour contrôler une menace
Sulfate de magnésium Œdème pulmonaire d’accouchement prématuré, réduisent la réserve adaptative à l’effort
et exposent à un œdème pulmonaire [1]. Ils peuvent également faire
Douleur thoracique
le lit d’une inertie utérine.
Nausées et vomissements
Le sulfate de magnésium et les anticalciques, également employés
Rougeur (« flush »)
dans les menaces d’accouchement prématuré, limitent la contractilité
Somnolence musculaire et peuvent favoriser une inertie utérine au même titre que
Troubles visuels les bêta-2-mimétiques. Ils diminuent aussi de façon non négligeable
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Augmentation de la sensibilité la pression artérielle, notamment lors de l’induction anesthésique du


aux myorelaxants (curares) fait de leurs interactions sur le système cardiovasculaire. Les autres
Inhibiteurs de la synthèse des Inhibition de la fonction plaquet- antihypertenseurs utilisés dans le traitement de la pré-éclampsie
prostaglandines (Acide acétyl taire entraînent les mêmes conséquences. Notons enfin que les anti-
salycilique, anti-inflammatoires Réduction du facteur XII calciques ont des effets inotropes négatifs, même pour ceux dont la
non stéroïdiens) sélectivité vasculaire est la plus marquée, ce qui peut favoriser la
Irritation gastro-intestinale
décompensation d’une insuffisance ventriculaire gauche en cas de
Dépression du système immunitaire valvulopathie ou de pré-éclampsie chez une mère âgée [2, 3]. De plus,
en cas de surdosage, le sulfate de magnésium peut induire un arrêt
4. Lors de la réalisation d’une anesthésie épidurale ou sous-arach- cardiorespiratoire lors de l’induction anesthésique [4].
noïdienne, l’espace de diffusion de l’anesthésique local est diminué,
ce qui doit faire réduire la dose administrée d’environ un tiers par RISQUES LIÉS A L’URGENCE
rapport à celle habituellement nécessaire chez la femme non
enceinte. Les principales causes de mortalité maternelle sont résumées dans
5. Le risque de surdosage est permanent et doit donc être anticipé le tableau 2. Les enquêtes confidentielles triennales sur les morts
dans le calcul des doses nécessaires. maternelles réalisées depuis 1952 en Grande-Bretagne montrent
régulièrement que l’urgence demeure, au fil du temps, le facteur
déterminant et quasi-constant de ces accidents [5]. Il en est de même
RISQUES LIÉS AUX TRAITEMENTS ASSOCIÉS aux États-Unis où les complications anesthésiques représentent la
sixième cause de mortalité maternelle du péripartum et surviennent,
Les traitements utilisés dans certaines pathologies de fin de gros- dans 80 % des cas, lors des situations d’urgence [6]. De 1979 à 1990,
sesse peuvent aussi interférer avec la gestion en urgence d’une on constate que la mort maternelle a chuté de 4,3 à 1,7 pour
patiente (Tableau 1). 1 000 000 et que le nombre de morts lié à l’anesthésie générale est

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 3


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

Facteurs de risques anesthésiques accrus liés


Décès en valeur absolue (n)

50
à l’état de grossesse
40 • Modifications physiologiques de la grossesse : intubation diffi-
cile, risque hémorragique, hypotension par compression aorto-
30
cave, labilité neurovégétative accrue, baisse de la pression
20 oncotique, hypervolémie, tendance à la coagulation intra-
vasculaire, reflux gastro-œsophagien.
10 • Particularités pharmacologiques : hémodilution et hypoprotidé-
mie (fraction libre accrue des médicaments), baisse du taux des
0 cholinestérases plasmatiques (curarisation prolongée avec cer-
1967-1969

1970-1972

1973-1975

1976-1978

1979-1981

1982-1984

1985-1987

1988-1990 tains myorelaxants), diminution de 30 % de la CAM des halo-


génés, risque de surdosages médicamenteux (réduire de 1/3 les
doses d’anesthésiques locaux par voie rachidienne).
Périodes de temps • Risques liés à des traitements associés : bêta2-mimétiques, sul-
Nombre de morts maternelles associé à une anesthésie générale fate de magnésium, anticalciques.
Nombre de morts maternelles associé à une anesthésie en urgence • Risques liés à l’urgence et aux modalités anesthésiques : depuis
Nombre de morts maternelles associé à une anesthésie locorégionale 1984, le risque de mort maternelle est passé de 4,3 à 1,7 pour
● Figure 1 Données sur la mort maternelle et l’anesthésie au Royaume-Uni 1 000 000 ; le nombre de décès liés à l’anesthésie générale est
entre 1967 et 1990 resté stable alors que celui lié aux anesthésies locorégionales a
Avant 1985, seuls l’Angleterre et le Pays de Galles sont concernés par ces sta- diminué.
tistiques, après 1985, l’ensemble du Royaume-Uni est pris en compte

URGENCES ABSOLUES
resté stable, alors que celui lié aux anesthésies locorégionales a dimi-
nué depuis 1984. Le risque relatif à l’anesthésie générale a augmenté L’urgence fœtale peut être au premier plan. L’hypoxie fœtale est la
de 2,3 avant 1985 à 16,7 après 1985 [7] (Figure 1). voie finale commune de différents mécanismes pathologiques
La « stabilité » de la mortalité induite par l’anesthésie générale est (pathologie funiculaire, hypoperfusion fœtoplacentaire, hypertonie
liée en particulier aux échecs d’intubation associés ou non à l’inhala- utérine, hypoxie maternelle…). Elle est d’autant plus grave qu’elle sur-
tion du contenu gastrique. Elle est, à l’évidence, le reflet d’une situa- vient sur une souffrance préexistante (retard de croissance in utero,
tion maternelle à haut risque, chez une patiente plus fragile et délicate pathologie placentaire, postmaturité…) et qu’elle ne montre aucune

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à gérer. tendance à l’amélioration entre les contractions.
La situation la plus extrême est représentée par la prise en charge Moins fréquemment, l’urgence peut être maternelle. C’est le cas du
d’une césarienne en urgence avec ou sans hémorragie chez une par- décollement placentaire, de la crise éclamptique ou d’une hémorragie
turiente à l’estomac plein et présentant de forts risques d’intubation utérine (rupture utérine, placenta prævia…). Il est important de garder
difficile, avec un fœtus en état de souffrance aiguë. constamment présentes à l’esprit les situations où une césarienne
risque de devenir rapidement nécessaire au cours du travail. Il peut
s’agir d’une pathologie du travail (non-engagement, présentation
Définition de l’urgence postérieure, fièvre chez la mère, épreuve du travail), d’un problème
fœtal (présentation du siège, grossesse multiple, macrosomie, appari-
En pratique obstétricale, les critères de définition de « l’urgence » tion d’anomalies cardiotocographiques) ou d’une pathologie mater-
varient selon les intervenants et certains proposent d’établir une clas- nelle, préexistante ou acquise (obésité, diabète, pré-éclampsie et
sification en degrés d’urgence [8], face à la grande diversité des indi- éclampsie, âge maternel avancé).
cations dans certaines équipes [9, 10]. En effet, la notion d’urgence La détection de ces situations à risque, qui peuvent évoluer parfois
n’est pas équivalente pour un médecin anesthésiste-réanimateur, un très rapidement vers une urgence absolue, permet d’anticiper la
obstétricien et, de plus en plus souvent de nos jours, pour un juge [6]. demande anesthésique et de pré-équiper les patientes (réalisation
Le terme d’urgence doit être absolument discuté avec l’obstétricien plus systématique d’une analgésie épidurale en l’absence de
pour connaître son degré et adapter la technique anesthésique à la contre-indication absolue). Dans ces conditions, les situations
situation exacte. La réalisation d’une anesthésie par un(e) infirmier(e) d’extrême urgence anesthésique deviennent rares et le délai décision-
anesthésiste dans un contexte d’extrême urgence apprécié exclusive- nel permet le plus souvent de recourir à des techniques moins agres-
ment par un obstétricien en l’absence de tout médecin sives et moins hasardeuses.
anesthésiste n’est pas envisageable : l’évaluation du degré d’urgence Les bénéfices en termes de morbidité d’une telle planification et
est un acte médical impliquant deux parties dont les décisions d’une bonne communication entre obstétricien et anesthésiste sont
doivent nécessairement converger. bien établis [6]. Un travail anglais a testé l’importance d’une bonne

4 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
communication entre médecins en évaluant l’intérêt de trois « visites ● Tableau 3 Résumé des Recommandations du Collège Américain
de service » quotidiennes de l’obstétricien et du médecin anesthésiste des gynécologues et obstétriciens
de garde pour détecter les patientes à risque [11]. Sur 360 césariennes
consécutives analysées de façon prospective : Liste des recommandations
– 87 % avaient pu être prédites de manière fiable et bénéficier d’une – L’échec de l’intubation et l’inhalation pulmonaire du contenu gastri-
anesthésie épidurale « prophylactique » ; que restent les principales causes de morbi-mortalité liées à l’anesthésie.
– et 70 % avaient pu bénéficier d’une extension de l’analgésie pour – L’équipe obstétricale doit être avertie de la présence, chez la
permettre une césarienne échappant ainsi à une anesthésie géné- parturiente, de risques élevés de complications liées à l’anesthésie,
rale. qu’elle soit générale ou locorégionale.
Ces chiffres seraient sans doute plus élevés encore actuellement du – En présence de facteurs de risques identifiés, l’obstétricien doit
solliciter une consultation anesthésique prépartum.
fait de l’extension de la pratique de l’analgésie épidurale et de la dimi-
nution progressive de ses contre-indications traditionnelles (hyper- – L’obstétricien et l’anesthésiste doivent mettre en place des stratégies
de prise en charge visant à minimiser le recours à une anesthésie
tension, utérus cicatriciel, fébricule sans substratum infectieux…).
générale en urgence chez les femmes pour lesquelles elle pourrait être
Lorsque les situations à risque n’ont pas été, ou pu être, prises en particulièrement dangereuse. Ces stratégies incluent la mise en place
compte, l’absence de cathéter épidural oblige à recourir à une anes- d’un abord veineux de bon calibre et d’un cathéter épidural.
thésie générale avec séquence d’induction rapide lorsque l’urgence – Devant une patiente présentant un risque élevé de complications
ne permet pas de différer le geste de 10 minutes. À l’inverse, la pré- anesthésiques (comme un antécédent d’échec d’intubation, par
sence d’un cathéter épidural permet d’obtenir une anesthésie suffi- exemple), l’obstétricien doit considérer la possibilité de transférer cette
sante (niveau T4) après injection de lidocaïne adrénalinée à patiente dans un hôpital prodiguant des soins anesthésiques
1/200 000 : appropriés 24h/24.
– En cas d’urgence obstétricale, l’état maternel doit être considéré au
– dans un délai moyen de 4,5 minutes dans la majorité des cas ;
même titre que l’état fœtal. Bien qu’il existe certaines situations où
– et dans un délai de 12,5 minutes dans la totalité de la population l’anesthésie générale est préférable à l’anesthésie locorégionale, le
testée [12]. risque de l’anesthésie générale doit être comparé au bénéfice attendu
chez les patientes à risque élevé de complications.
URGENCES RELATIVES – Tout fœtus présentant un rythme cardiaque fœtal peu rassurant est
considéré comme étant en état de souffrance fœtale aiguë. Cependant,
Les urgences relatives laissent un délai de plus de 10 minutes pour ce terme de souffrance fœtale aiguë est imprécis, non spécifique et a
permettre soit l’extension d’une analgésie épidurale soit la pratique une faible valeur prédictive positive. La sévérité de l’anomalie du
d’une rachianesthésie. Ce délai est permis à la fois par l’état de la rythme cardiaque fœtal doit être prise en considération pour définir le
mère qui n’est pas sous la menace d’une complication vitale et par degré de l’urgence de l’accouchement et déterminer le type d’anes-
thésie à administrer.
celui du fœtus qui n’est pas en danger imminent ou qui récupère très
bien entre deux ralentissements cardiaques. Il faut souligner – Les accouchements par césarienne, réalisés dans un contexte de
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rythme cardiaque fœtal peu rassurant n’interdisent pas le recours à


cependant que, dans ce contexte où deux vies sont en jeu, le geste ne une anesthésie locorégionale.
doit pas être réalisé par un novice.

LOCAUX ET PROXIMITÉ DES LABORATOIRES


Prise en charge de l’urgence Le matériel minimum équipant les salles de naissance et le bloc
et évaluation préopératoire obstétrical a été défini sur le plan réglementaire en France [13, 14]. Le
bloc obstétrical doit impérativement se trouver à proximité immédiate
de la salle de naissance. Il est nécessaire de prévoir l’agencement des
L’organisation des urgences anesthésiques obstétricales repose salles de naissance de manière telle qu’une anesthésie générale soit
sur des caractéristiques communes à toutes les urgences anesthé- réalisable dans les meilleures conditions de sécurité. En pratique, il
siques, mais aussi sur des caractéristiques propres liées aux modifi- faudrait que chaque salle de naissance puisse être immédiatement
cations physiologiques maternelles au cours de la grossesse et à la transformable en salle d’opération. Quel que soit le lieu dans lequel
présence du fœtus. Elle implique une parfaite entente entre médecin se situe la parturiente, le médecin anesthésiste doit pouvoir disposer,
obstétricien, médecin pédiatre, médecin anesthésiste et sage-femme. outre de l’équipement habituel, d’un plateau d’intubation difficile, des
Peu de situations sont autant anxiogènes que la « césarienne en médicaments indispensables aux urgences obstétricales (salbutamol,
urgence » où le médecin anesthésiste, lui-même fatigué, peut être éphédrine, ocytocine, prostaglandines, nicardipine, trinitrine), d’un
confronté à une parturiente inquiète et instable, avec un fœtus en dispositif de transfusion rapide ainsi que d’un appareil de mesure de
situation de souffrance, et en présence d’une une équipe obstétricale l’hématocrite.
anxieuse. Par ailleurs, l’accès rapide aux laboratoires de biologie, et plus par-
La combinaison de l’organisation, de la communication et de déci- ticulièrement à celui d’hémostase, ainsi qu’à une banque du sang ou,
sions précautionneuses peut transformer une situation critique en au minimum, à une réserve de produits sanguins est absolument
une anesthésie sécurisée sans problème (Tableau 3). indispensable.

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 5


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

Enfin, comme après n’importe quelle anesthésie, une salle de – surélévation de la hanche droite par des champs, un coin mousse
surveillance post-interventionnelle doit être disponible et fonction- ou un dispositif gonflable.
nelle 24 heures sur 24.
■ Position de la table d’opération
CONSULTATION ANESTHÉSIQUE La fréquence de survenue d’embolies veineuses, probablement de
La charge considérable de travail que représente la réalisation nature gazeuse, a récemment été mise en évidence au cours de césa-
d’une consultation systématique pour toute parturiente a permis de riennes, quelles que soient les modalités d’anesthésie. Le tableau cli-
réaliser un gain appréciable en matière de sécurité obstétricale [13]. nique se résume à des épisodes de désaturation en oxygène et,
Compte tenu des changements physiologiques permanents lorsque la patiente est sous anesthésie locorégionale, de dyspnée
pendant la grossesse, le huitième mois de la gestation semble être accompagnée de douleurs rétrosternales. Pour limiter ce risque, il
une date raisonnable pour la consultation anesthésique. Cette paraît raisonnable de positionner la table opératoire en léger proclive
dernière permet de détecter les situations à risque (risque anaphylac- (5°) et de proscrire la position de Trendelenburg [15].
tique, risque d’intubation difficile en se souvenant que toute partu-
riente est en situation à risque dans ce domaine, risque ■ Position de la parturiente
hémorragique par diathèse congénitale, liée à la grossesse ou à une Même dans le cadre de l’urgence extrême, il est fondamental de
pathologie de novo…), de vérifier la faisabilité d’une anesthésie loco- prendre le temps nécessaire à l’installation correcte de la patiente,
régionale et l’absence de contre-indication. surtout si une anesthésie générale est décidée. Assurer un bon posi-
Elle sera l’occasion de prévoir une consultation auprès d’un neuro- tionnement des épaules, du cou et de la tête (« sniffing » position ou
logue ou d’un cardiologue chez certaines patientes (sclérose en position de « flair ») permet d’améliorer les conditions d’intubation et,
plaques, pathologies vertébrales complexes telles qu’angiomes ou si nécessaire, une ventilation au masque efficace. Il est donc impor-
hernies discales, cardiopathies congénitales ou acquises…). tant de disposer au bloc d’alèzes et de draps permettant une installa-
Les comptes rendus de ces consultations doivent être disponibles tion correcte des parturientes mêmes obèses.
en permanence et tenus à jour pour le médecin anesthésiste de
garde, afin de simplifier la prise en charge de ces parturientes, de jour
■ Voie d’abord et matériel d’expansion volémique
comme de nuit.
La mise en place d’une voie d’abord veineux de bon calibre (16G
ou davantage) est indispensable pour toute femme enceinte. Dans les
MESURES COMMUNES À TOUTES LES URGENCES conditions obstétricales à risques, en particulier hémorragiques, une
Les mesures communes à toutes les urgences sont résumées dans deuxième voie d’abord périphérique est recommandée afin de per-
le tableau 4. mettre une expansion volémique rapide. La salle de césarienne doit
comporter l’équipement nécessaire à une perfusion rapide ainsi que
■ Prémédication le matériel permettant la mise en place d’une voie veineuse centrale. Il

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En règle, la parturiente nécessitant une intervention en urgence ne peut être utile de disposer également de matériel de monitorage
peut pas être prémédiquée du fait du court délai accordé, du risque hémodynamique invasif.
d’effet à retardement des médications chez la mère, et, dans une
moindre mesure, d’un éventuel risque fœtal lié au passage placen- ■ Monitorage
taire. Chaque salle de césarienne doit bénéficier du matériel listé dans les
Recommandations de la Société Française d’Anesthésie et de Réani-
■ Prévention de la compression aortocave mation et dans le décret du 5 décembre 1994 pour l’équipement des
En fin de grossesse, la compression de la veine cave inférieure par salles d’opération et pour la surveillance des patients en cours
l’utérus gravide au niveau du détroit supérieur du bassin apparaît d’anesthésie [13].
classiquement quelques minutes après la mise en décubitus dorsal. Pour la parturiente, la surveillance électrocardiographique systé-
Cette compression est d’importance variable et est plus fréquemment matique et continue est effectuée à l’aide d’une dérivation de type
rencontrée et majorée en cas d’augmentation du volume utérin. De CM5 permettant de détecter une éventuelle modification du segment
plus, une compression aorto-iliaque peut s’associer à l’obstruction ST que l’on retrouve fréquemment chez les parturientes césarisées
cave inférieure, réduisant la perfusion utéroplacentaire et pouvant sous anesthésie locorégionale. Cette anomalie, cependant, ne semble
s’accompagner de signes de souffrance fœtale. Toutes les situations pas être en relation avec une ischémie myocardique ou une embolie
hémodynamiques instables pourront être aggravées par la compres- gazeuse dans la plupart des cas. La mesure régulière de la pression
sion aortocave. artérielle à l’aide d’un appareil automatisé et celle, en continu, de la
La mise en décubitus latéral gauche améliore souvent immédiate- saturation artérielle en oxygène par oxymétrie de pouls sont néces-
ment les symptômes aortocaves. Plusieurs techniques permettent de saires pendant toute la durée de la césarienne.
limiter la compression des gros vaisseaux lors de l’installation sur la Enfin, il faut disposer lors des césariennes sous anesthésie géné-
table d’accouchement ou d’opération : rale, comme pour toute anesthésie générale, d’un capnographe qui
– inclinaison latérale gauche de 20° minimum ; permet de contrôler la bonne position de la sonde d’intubation, de
– déplacement manuel vers la gauche de l’utérus ; régler la ventilation et de détecter une éventuelle embolie gazeuse.

6 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
● Tableau 4 Mesures communes à toute anesthésie en urgence

Préparation
– Check-list de la salle et du matériel
– Plateau pour anesthésie générale prêt dans la salle
– Sondes d’intubation de différents calibres (5.5-6-6.5-7) + mandrins
– Masques laryngés de différentes tailles (2-3-4)
– Matériel pour intubation difficile à disposition
– Voie veineuse de bon calibre (16 G) ± 2e voie périphérique
– Perfusion de Ringer-lactate
– Solutés d’expansion volémique
Prévention de la régurgitation
– Délai d’anesthésie autorisé inférieur à 5 minutes : citrate de sodium 0,3 molaire 30 mL per os
– Délai d’anesthésie autorisé supérieur à 5 minutes : Cimétidine citratée (200 mg) ou Ranitidine citratée (150 mg) dans 30 mL d’eau per os
– Dans tous les cas, si repas récent : Erythromycine 3 mg/kg dans 20 mL de sérum physiologique au pousse-seringue électrique en 15 minutes
Installation
– Table en léger proclive (5°) et manivelle en place pour tous changements d’orientation
– Décubitus dorsal avec un coussin sous la hanche droite
– « Sniffing » position
Monitorage
– Cardioscope (dérivation CM5)
– Pression artérielle non invasive
– Saturomètre
– Si anesthésie générale : capnographe, monitorage des gaz et halogénés, monitorage de la curarisation, sonde de température
A disposition dans la salle d’intervention
– Matelas chauffant à air pulsé
– Appareil de mesure de l’hémoglobine
– Dispositif de perfusion et de transfusion rapide avec réchauffeur
– Tubes de prélèvements sanguins
– Feuilles de demande de produits sanguins
– TÉLÉPHONE + numéros d’urgence
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■ Prophylaxie de la régurgitation acide orale. Cimétidine et ranitidine passent la barrière placentaire sans
entraîner d’effets indésirables chez le fœtus ni le nouveau-né. Leur
La prophylaxie de l’inhalation d’un contenu gastrique acide repose délai d’action par voie IV ne permet pas de les utiliser dans un
sur des mesures pharmacologiques destinées à augmenter le pH et à contexte d’urgence. Une nouvelle forme galénique effervescente est
diminuer le volume du contenu gastrique. commercialisée : elle associe de la cimétidine (200 mg) ou de la rani-
● Contrôle du pH du liquide gastrique tidine (150 mg) à du citrate de sodium, ce permet d’obtenir un effet
immédiat grâce au citrate et un effet prolongé par la présence des
 Citrate de sodium anti-H2.
Utilisé sous la forme d’une préparation magistrale, facilement réa-
lisable par le pharmacien de l’hôpital, le citrate de sodium se conserve ● Contrôle du volume gastrique
au réfrigérateur à + 4 °C pendant 3 semaines. Son effet anti-acide est  Métoclopramide
immédiat, ce qui rend son utilisation en urgence particulièrement Le métoclopramide (Primpéran) augmente la vidange gastrique et
adaptée. On estime la quantité de citrate à administrer à 30 mL d’une renforce le tonus du sphincter du bas œsophage. Il est utilisé habi-
solution 0,3 molaire. La durée d’action d’une telle dose est relative- tuellement à la posologie de 10 mg, soit une ampoule, par voie IM ou
ment limitée, de l’ordre de 45 minutes, ce qui limite l’effet protecteur si IV. Son délai d’action pour assurer la vidange gastrique est d’environ
l’acte opératoire se prolonge. 20 minutes. Cependant, administré 5 minutes avant l’induction d’une
anesthésie générale, il annule l’effet relaxant sur le tonus du sphincter
 Anti-H2
du bas œsophage induit par l’atropine et la péthidine. De plus, il
La cimétidine (Tagamet) ou la ranitidine (Raniplex) sont des inhibi-
agirait sur la vidange gastrique même en présence de morphiniques.
teurs puissants de la sécrétion acide gastrique. Ils augmentent le pH
du contenu gastrique au-dessus de 2,5 au moment de l’induction à  Érythromycine
condition de respecter un délai d’au moins une heure pour la voie IV, La lactobionate d’érythromycine (Érythrocine) est un sel soluble
90 minutes pour la voie intramusculaire et 2 à 6 heures pour la voie destiné à l’administration IV et qui induit des contractions du tractus

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 7


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

gastro-intestinal comparables à celles provoquées par la motiline. À


la dose de 3 mg/kg, l’effet maximum est atteint en 10 minutes et il
Analyse comparative
persiste 110 minutes [16]. L’Erythromycine pourrait ainsi trouver une des techniques anesthésiques
indication dans la prévention du syndrome de Mendelson.
TECHNIQUES D’ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE
■ Manœuvre de Sellick
Parmi les nombreuses techniques physiques de prévention de
■ Avantages de l’anesthésie locorégionale
l’inhalation, une seule doit être utilisée de façon systématique : la
pression cricoïdienne décrite en 1961 par Sellick [17]. Les techniques d’anesthésie locorégionale doivent leur succès à
Cette manœuvre doit être appliquée sur la parturiente en décubitus leurs avantages incontestables :
dorsal, tête légèrement abaissée et en hyperextension, dès la perte de – la future mère est éveillée et peut assister à la naissance de son
conscience. La pression cricoïdienne doit être maintenue jusqu’à la enfant. Plusieurs études psychométriques montrent le caractère
vérification de la bonne position de la sonde d’intubation et le gonfle- traumatisant d’une naissance instrumentale, par voie basse ou
ment du ballonnet. haute, et la culpabilisation de la parturiente qui en résulte [22-24].
Elle nécessite la présence d’un aide formé à la technique, quelle que Le fait de participer à la naissance peut, dans ces conditions, être
soit sa fonction dans l’équipe. La pression exercée sur le cartilage cri- considéré comme un point très positif ;
coïde doit être importante, équivalente à celle qui induit une douleur – l’hypothèse d’une diminution du saignement peropératoire sous
lors de la pression sur la base du nez [18]. Cette proposition, déjà anesthésie locorégionale est fortement évoquée. Les résultats sont
ancienne a été évaluée par la suite. Des pressions très souvent ina- encore trop discordants pour affirmer qu’il s’agit bien d’une réalité
daptées (en excès ou en défaut) ont pu être retrouvées, pour des [25]. La tocolyse induite par les halogénés représente un facteur
manœuvres de Sellick que des infirmières anesthésistes et des méde- favorisant le saignement, mais ce n’est pas le cas de l’utilisation de
cins considéraient pourtant comme efficaces [19, 20]. Ces études faibles concentrations inhalées [25] ;
recommandent un apprentissage sur mannequin possédant un – par analogie avec les résultats constatés en chirurgie orthopédique,
capteur de pression. Il peut être plus simple de s’exercer selon la tech- un certain degré de protection contre la maladie thromboembo-
nique de la seringue de 50 mL (ou 60 mL) [21]. Il faut obturer son lique peut être attendu de l’hémodilution favorisant la rhéologie
embout d’injection et en placer le piston au niveau du repère 50 mL. périphérique et la vasodilatation [26].
La pression alors exercée pour amener le piston au niveau de la
marque 38 mL est équivalente à celle recommandée pour une
patiente encore éveillée (20 Newtons, en se souvenant que ■ Inconvénients des techniques locorégionales
9,81 N = 1 Kg). La pression exercée pour atteindre la marque 33 mL Les techniques locorégionales ont quelques inconvénients qui ne
correspond à celle recommandée pour une patiente inconsciente doivent pas être ignorés :
(30 N). – un inconvénient indirect est représenté par une certaine déqualifi-

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Cette manœuvre comporte quelques effets délétères qu’il importe cation des praticiens quant à la pratique de l’anesthésie générale
de connaître : du fait de la généralisation des techniques locorégionales. Cette
– déviation trachéale si la pression n’est pas exercée dans un plan déqualification est perceptible sur les résultats épidémiologiques. Il
strictement médian ; est rapporté que les échecs d’intubation (c’est-à-dire une impossi-
– aplatissement de la lumière trachéale si la pression est trop forte ; bilité de pratiquer l’intubation sous l’effet d’une dose unique de
– efforts de toux, augmentant de ce fait la pression intragastrique en succinylcholine) augmentent de façon inversement proportionnelle
cas d’application d’une pression trop forte avant la perte de à la pratique de l’anesthésie générale : 1/300 échec d’intubation en
conscience de la parturiente. 1984 contre 1/250 en 1994, le taux d’anesthésies générales pour
césarienne ayant baissé de 83 à 23 % dans le même intervalle de
temps [27]. Ce phénomène est tout à fait perceptible dans les
Prise en charge de l’urgence maternités universitaires : le taux d’anesthésies locorégionales est
généralement important (90 % de rachianesthésies pour certaines
• Équipement complet des salles de naissances permettant la réa-
études [28]) ; les césariennes programmées bénéficient quasi systé-
lisation d’une anesthésie locorégionale ou générale.
matiquement d’une anesthésie locorégionale ; les césariennes en
• Bloc obstétrical à proximité immédiate de la salle de naissance.
urgence surviennent dans 60 % des cas en dehors des heures
• Consultation de pré-anesthésie systématique.
ouvrées. Cela réduit considérablement les occasions pour les inter-
• Prévention du syndrome aortocave.
nes en anesthésie-réanimation de pratiquer des anesthésies géné-
• Voie d’abord de bon calibre (16 G).
rales sous la conduite d’un senior. Cette situation ne peut aller
• Monitorage complet.
qu’en s’aggravant : le recours aux techniques locorégionales ne
• Patiente installée en « sniffing position ».
peut qu’évoluer dans le sens d’une augmentation pour des raisons
• Prévention de la régurgitation.
d’amélioration de la sécurité des patientes, ce qui réduira encore
• Pas d’induction d’une anesthésie générale sans aide.
les possibilités de formation des jeunes collègues aux techniques
• Intubation orotrachéale sous couvert de la manœuvre de Sellick.
d’anesthésie générale pour les rares indications qui subsisteront ;

8 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
– l’insuffisance de l’analgésie viscérale, la plupart du temps partielle, l’échec doit aussi être compté au nombre des complications (rare) de
laisse un très mauvais souvenir à la patiente. Ces « échecs » sont le cette technique.
reflet de la grande variabilité interindividuelle de sensibilité. Géné- Le tableau 5 résume les principales étapes de la réalisation d’une
ralement une dose plus réduite d’anesthésique local est nécessaire rachianesthésie et de la prise en charge de la parturiente pour sa réa-
par voie sous-arachnoïdienne chez la femme enceinte (1,5 mL au lisation et son suivi.
lieu de 2 mL pour la bupivacaïne à 0,5 %), une dose plus impor-
tante expose à un bloc moteur plus étendu. L’adjonction d’un mor- ■ Extension de l’anesthésie épidurale
phinique (morphine, fentanyl ou sufentanil) tend à se généraliser et Lorsqu’un cathéter épidural est fonctionnel, il est intéressant de
permet de limiter le bloc moteur tout en réduisant considérable- l’utiliser pour injecter des anesthésiques locaux plutôt que de recourir
ment le risque d’échec [29-32] ; à une anesthésie générale en cas d’urgence obstétricale. En effet,
– la toxicité générale des anesthésiques locaux et notamment de la l’hypotension engendrée par l’anesthésie épidurale (AED) est moins
bupivacaïne a été à l’origine de quelques cas d’arrêt cardiaque sévère et plus facile à traiter que lors d’une rachianesthésie ou d’une
mortels aux États-Unis dans le milieu des années 1980. Cette toxi- anesthésie générale. Ainsi, l’AED a peu, voire pas d’effets sur le nou-
cité, dépendante de la concentration, a toujours été limitée en veau-né, à condition de traiter rapidement l’hypotension maternelle.
France par l’utilisation de concentrations plus faibles et pourtant Néanmoins, elle possède certaines limites.
suffisantes de cet anesthésique local. L’utilisation de ropivacaïne Comme pour la rachianesthésie, les troubles de la coagulation
permet encore de diminuer ce risque ; contre-indiquent la technique. De plus, la plus grande quantité
– l’hypotension est directement corrélée au bloc sympathique. Elle d’anesthésique injectée expose, en cas de passage intravasculaire
est facilement prévenue par un remplissage préalable et l’emploi de accidentel, à une toxicité systémique et le bon positionnement du
vasoconstricteurs de type éphédrine [28, 29, 33-35]. Cette hypo- cathéter de réinjection doit être vérifié avec la plus grande rigueur.
tension a des effets néfastes chez le fœtus, ce qui limite les bénéfi- Enfin, en cas d’échec de l’AED, certaines équipes contre-indiquent
ces de la technique [36]. Le risque de sa survenue fait également la rachianesthésie et préfèrent recourir à l’anesthésie générale, car
contre-indiquer la rachianesthésie chez les patientes porteuses de plusieurs cas de rachianesthésies totales ont été rapportés ; d’autres
valvulopathies sténosantes ou de placenta prævia [37] ; réduisent la quantité d’anesthésique local intrathécal et réservent
– la fréquence et l’intensité des céphalées ont nettement diminué l’anesthésie générale aux patientes obèses ou atteintes de maladie
depuis la généralisation de l’usage des aiguilles « pointe de chronique de l’appareil respiratoire. En règle générale, 20 mL de lido-
crayon » pour les rachianesthésies, facilitant l’emploi de cette tech- caïne à 2 % adrénalinée (1/200 000) suffisent à obtenir une anesthé-
nique en urgence obstétricale [38, 39]. sie satisfaisante en moins de 15 minutes, sans hypotension artérielle
majeure ni retentissement fœtal [42]. Aucune étude ne montre l’avan-
■ Rachianesthésie (anesthésie spinale) tage de l’addition de morphiniques lors d’extension d’AED en cas
d’urgence.
La rachianesthésie offre plusieurs avantages : simplicité, rapidité Le tableau 6 résume les principales étapes de la réalisation d’une
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d’action et bloc neurosensoriel total. La qualité de l’anesthésie qu’elle anesthésie épidurale et de la prise en charge de la parturiente pour sa
procure semble meilleure que l’anesthésie épidurale [40]. De plus, elle réalisation et son suivi.
présente peu de risques de toxicité systémique, chez la mère comme
chez l’enfant, avec un risque négligeable de dépression respiratoire Choix d’une technique d’anesthésie locorégionale
néonatale [41]. Elle présente toutefois des limites qu’il faut bien en urgence obstétricale
connaître.
• En l’absence de troubles de l’hémostase et ou d’hémorragie
L’hypotension artérielle est le principal risque de l’anesthésie spi- importante, le recours aux techniques d’ALR est possible.
nale. Elle est définie par une pression artérielle systolique inférieure • Si une AED est déjà en place, l’extension de l’anesthésie est rapi-
à 100 mmHg ou une diminution de plus de 20 % par rapport aux dement réalisée par l’injection fractionnée de 10 à 20 mL de lido-
chiffres de base. L’augmentation de la capacitance qui en résulte est à caïne 2 % adrénalinée au 1/200 000.
l’origine d’une diminution du retour veineux et du débit cardiaque. En • Sinon, réalisation d’une rachianesthésie qui a l’avantage d’être
revanche, l’impact de l’hypotension maternelle sur le fœtus reste simple, rapide d’action et procurant un bloc sensitivomoteur
controversé. On déconseille cette technique en cas d’hypovolémie, complet.
d’hémorragie massive non contrôlée, de toxémie gravidique et en • Dans tous les cas, la prévention de l’hypotension artérielle
présence de signes de choc. Il faut cependant se souvenir que le maternelle s’impose et associe expansion volémique et vaso-
déplacement utérin vers la gauche, l’expansion volémique et l’utilisa- constricteurs (éphédrine).
tion d’éphédrine ou de phényléphrine peuvent limiter l’hypotension
induite par la rachianesthésie.
La présence d’une coagulation intravasculaire disséminée, fré- ■ Place de la rachi-épidurale combinée
quente dans les urgences obstétricales, limite également le recours à La rachi-épidurale combinée est utilisée dans le cas de la césa-
la rachianesthésie. La réalisation de la technique après vérification de rienne programmée où elle donne entière satisfaction. Sa place dans
la normalité d’un bilan de coagulation complet et systématique rédui- le contexte de l’urgence semble cependant marginale en raison du
rait les risques d’apparition d’un hématome intrarachidien. Enfin, délai nécessaire à sa mise en œuvre.

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 9


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

● Tableau 5 Rachianesthésie pour césarienne en urgence

Mesures communes à toute anesthésie en urgence (cf. tableau 4)

Préparation spécifique
– Éphédrine : 60 mg dans 500 mL de Ringer-lactate
– Morphine sans conservateur : 1 mg dans une seringue de 1 mL
– Sufentanil : 1 ampoule de 50 μg dans une seringue de 10 mL
– O2 au masque (4 L/min) si souffrance fœtale aiguë ou si SaO2 < 95 %
Réalisation de la rachianesthésie
– Plateau à usage unique avec aiguille 25 G pointe crayon
– Bupivacaïne à 0,5 % hyperbare 10 mg (= 2 mL) + Morphine 0,10 mg (0,10 mL) + Sufentantil 2,5 à 5 μg (0,5 à 1 mL)
Dès l’injection
– Remise de la patiente en décubitus dorsal avec un coussin sous la hanche droite
– Mise en route de la perfusion d’éphédrine en débit libre qui sera ensuite adapté en fonction des chiffres tensionnels
– Mise en position de Trendelenburg pour faciliter l’obtention rapide d’un niveau sensitif supérieur à T4 (ligne mamelonnaire)
Après l’extraction
– Ocytocine 5 à 10 UI par voie intraveineuse directe lente + 15 UI dans la perfusion
– Antibioprophylaxie après le clampage du cordon ombilical (Céfazoline 2 g ou Clindamycine 600 mg si allergie)
– Remise de la table d’opération en position horizontale
À la fermeture de la paroi
– Propacétamol 2 g dilués dans 50 mL de sérum physiologique, en Y sur la perfusion
– Transfert en salle de surveillance post-interventionnelle
– Surveillance habituelle et évaluation régulière de la récupération motrice
– La sonde urinaire est laissée en place jusqu’au lendemain

● Tableau 6 Anesthésie épidurale pour césarienne en urgence

Mesures communes à toute anesthésie en urgence (cf. Tableau 4)

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Préparation spécifique
– Éphédrine : 60 mg dans 500 mL de Ringer-lactate
– Morphine sans conservateur : 3 mg dilués dans 6 mL de sérum physiologique
– Sufentanil : 1 ampoule de 50 μg dans une seringue de 10 mL
– O2 au masque (4 L/min) si souffrance fœtale aiguë ou si SaO2 < 95 %
Injection dans le cathéter épidural
– Ré-injection fractionnée de 15 à 20 mL de Lidocaïne 2 % pour obtenir un niveau sensitif supérieur à T4 (ligne mamelonnaire) + Sufentanil 5 μg
– Le plus souvent, 10 mL de lidocaïne ont déjà été injectés en salle de naissance avant le transfert au bloc opératoire
Dès l’injection
– Remise de la patiente en décubitus dorsal avec un coussin sous la hanche droite
– Mise en route de la perfusion d’Ephédrine si nécessaire
– Le débit sera ensuite adapté en fonction des chiffres tensionnels
Après l’extraction
– Ocytocine 5 à 10 UI IV lent + 15 UI dans la perfusion
– Antibioprophylaxie après le clampage du cordon ombilical (Céfazoline 2 g ou Clindamycine 600 mg si allergie)
– Remise de la table d’opération en position horizontale
– Morphine : injecter 3 mg de morphine sans conservateur diluée, dans le cathéter épidural
À la fermeture de la paroi
– Propacétamol : 2 g dilués dans 50 mL de sérum physiologique en Y sur la perfusion
– Transfert en salle de surveillance post interventionnelle
– Surveillance habituelle et évaluation régulière de la récupération motrice
– Maintenir la sonde urinaire en place jusqu’au lendemain

10 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
ANESTHÉSIE GÉNÉRALE :
SÉQUENCE D’INDUCTION RAPIDE
La situation commande parfois de recourir à une anesthésie géné-
rale dont il est important de rappeler les grands principes (Tableau 7).

■ Technique d’induction
Une dénitrogénation systématique est nécessaire avant l’induction.
Elle se réalise au masque facial, en oxygène pur. Elle peut être le
moment privilégié pour le praticien ou son aide qui tient le masque
d’aider la patiente à dominer son stress : l’agitation intense qui règne
souvent dans le bloc opératoire au cours d’une urgence obstétricale
n’est guère rassurante pour la patiente ; le ton calme et apaisant du
médecin anesthésiste peut être le seul rempart contre la peur, voire la
panique, de cette dernière.
L’induction se réalise en séquence rapide classique : lorsque
l’ensemble des champs opératoires est installé, l’agent d’induction
puis de la succinylcholine [43] sont injectés tandis qu’un aide assure
une compression cricoïde par manœuvre de Sellick. L’intubation, non
traumatique, est faite lorsque les fasciculations ont cessé et que le
menton est facilement mobilisable (ce qui demande moins d’une
minute en général). La sonde d’intubation est « étanchéifiée » par
gonflage du ballonnet. La constatation d’un tracé expiratoire de CO2
sur le capnographe et l’auscultation systématique des deux champs
pulmonaires confirment la bonne position de la sonde. Alors seule-
ment, l’obstétricien peut débuter le geste chirurgical.

■ Prévention des difficultés d’intubation


La prévention des difficultés d’intubation repose sur une installa-
tion parfaite de la parturiente (« sniffing » position) (Figure 2) et, chez
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l’obèse, sur l’utilisation éventuelle d’un laryngoscope à manche court.


L’anesthésie doit être profonde avant de tenter une intubation qui ris-
que d’être difficile. Cette attitude va à l’encontre de la pratique obsté-
tricale habituelle où l’on cherche à n’utiliser que de faibles doses
d’anesthésique intraveineux afin de réduire la dépression néonatale.
Toutefois, le risque vital conduit logiquement à privilégier les condi-
tions d’exposition de la glotte et d’intubation, fut-ce en exposant le
nouveau-né à un risque de dépression plus grand. Cette attitude peut
permettre d’éviter l’hypoxie maternelle qui est beaucoup plus préjudi-
ciable à un fœtus dont l’oxygénation est déjà compromise que la ● Figure 2 Installation de la parturiente en « sniffing » position
sédation transitoire, curable par une ventilation et une oxygénation (position de « reniflement » ou de « flair »)
néonatale de quelques minutes [44].
Induction rapide ne signifie pas précipitation et il faut laisser aux
agents anesthésiques le temps d’agir. En particulier, il ne faut pas ten- Il faut savoir accepter un échec d’intubation, toujours possible
ter d’intubation avant la fin des fasciculations de la succinylcholine. même avec une grande expérience de l’anesthésie obstétricale,
Le nombre de tentatives d’intubation doit être limité à 3 au maxi- d’autant que ce n’est jamais cet échec qui peut être la cause directe
mum, avec pré-oxygénation de la parturiente entre chaque tentative d’un décès maternel [46]. Une option supplémentaire est offerte par
et en s’interdisant le recours à une injection supplémentaire de succi- l’utilisation du masque laryngé mais il ne faut pas oublier que ce der-
nylcholine [45]. En effet, une telle ré-injection pourrait contribuer à nier ne protège pas contre la survenue d’un syndrome de
aggraver les difficultés d’intubation par l’association d’une curarisa- Mendelson.
tion prolongée à l’impossibilité de ventiler la patiente du fait d’un En conclusion, il faut définir le plus clairement possible la stratégie
oedème des structures pharyngées lié aux tentatives répétées d’intu- à mettre en œuvre devant l’impossibilité, prévue ou non, d’intuber
bation. une parturiente [47] (Figure 3).

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 11


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

● Tableau 7 Anesthésie générale pour césarienne en urgence

Mesures communes à toute anesthésie en urgence (Cf. tableau 4)


Préparation spécifique
– Pré-oxygénation à FIO2 = 1, pendant 3 minutes ou 4 inspirations profondes
Induction – Intubation
– Thiopental : 4-5 mg/kg ou Etomidate 0,3 mg/kg
– Manœuvre de Sellick dès la perte de conscience
– Succinylcholine : 1 mg/kg
– intubation orotrachéale avec sonde de calibre 7 au maximum, utilisation éventuelle d’un mandrin et tête placée en « sniffing » position
– Arrêt de la manœuvre de Sellick dès la sonde en place et le ballonnet gonflé
Entretien
– Ventilation contrôlée en circuit ouvert avec un mélange O2/N2O (50 %/50 %) en situation normale
– Si souffrance fœtale aiguë, administrer de l’O2 pur jusqu’à l’extraction
– Éviter toute hyperventilation maternelle en maintenant une PETCO2 aux alentours de 30 mmHg
– Administrer du Vécuronium ou de l’Atracurium pour l’entretien de la curarisation
– Entretenir l’anesthésie avec de l’Isoflurane (maxi 0,75 % dans le mélange expiré)
Après l’extraction
– Ocytocine 5 à 10 UI par voie intraveineuse directe lente + 15 UI dans la perfusion
– Sufentanil ou Alfentanil
– Antibioprophylaxie après le clampage du cordon ombilical
– Remise de la table d’opération en position horizontale
À la fermeture de la paroi
– Propacétamol : 2 g dilués dans 50 mL de sérum physiologique en Y sur la perfusion
– Arrêt des halogénés
– Arrêt du N2O
– Ventilation en O2 pur
– Décurarisation systématique à l’aide de Prostigmine 2,5 mg et Atropine 1 mg
– Extubation sur table
– Transfert en salle de surveillance post interventionnelle
– Surveillance habituelle

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– Maintenir la sonde urinaire en place jusqu’au lendemain

■ Agents anesthésiques recommandée en urgence, d’autant que l’état hémodynamique de la


parturiente est précaire. Dans le contexte d’une pathologie cardio-
● Induction vasculaire sévère et dans le cas où la césarienne de principe est pré-
conisée, le midazolam est préféré au thiopental ou au propofol du
 Anesthésiques intraveineux
fait de ses effets hémodynamiques moindres, malgré une certaine
Le thiopental et la kétamine sont les deux anesthésiques de réfé-
latence de ses effets. L’association midazolam-étomidate représente
rence pour une anesthésie en urgence [40]. Utilisé à la dose de 4 à
un choix envisageable dans ce contexte, en sachant que les effets
5 mg/kg, le thiopental offre des conditions d’intubation de bonne
inhibiteurs de l’étomidate sur la surrénale du nouveau-né sont limités
qualité. Sa pharmacocinétique est modifiée chez la femme enceinte
par la faible quantité reçue lorsque la dose est unique.
avec une demi-vie d’élimination doublée. Il est rapidement détecté
dans la circulation fœtale en raison de sa grande liposolubilité. Dans tous les cas, la réalisation d’une césarienne en urgence sur
Cependant, probablement du fait de l’immaturité fœtale, les doses une cardiopathie évoluée est une situation inconfortable qu’il
retrouvées dans le sang fœtal n’ont aucune répercussion sur le score convient d’éviter par le suivi multidisciplinaire (obstétricien, cardio-
d’Apgar. Toutefois, le thiopental s’accompagne d’une tachycardie logue, anesthésiste) de ces patientes en cours de grossesse. Il est
maternelle, d’une diminution de la pression artérielle et du débit san- possible alors de recourir, lorsque c’est nécessaire, à une césarienne
guin utérin. Pour éviter ces inconvénients et selon des données expé- programmée, éventuellement sous anesthésie générale si une anes-
rimentales, certaines équipes préfèrent utiliser la kétamine à la dose thésie locorégionale est contre-indiquée. L’induction est similaire à
de 1 mg/kg, notamment lorsque l’état hémodynamique maternel est celle de toute anesthésie chez une patiente cardiaque décompensée.
instable ou en cas de détresse fœtale [40]. Elle associe midazolam, étomidate, morphinique et curare, avec une
Le propofol n’a pas d’AMM chez la femme enceinte. Ainsi, malgré surveillance respiratoire attentive du nouveau-né et son assistance
ses faibles effets néonatals [48], son utilisation ne peut être ventilatoire si nécessaire [3]. Un cas clinique très démonstratif pro-

12 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
nable d’utiliser des curares non dépolarisants à demi-vie intermé-
diaire ou courte pour entretenir la curarisation, en se souvenant que
Découverte après l'induction
la durée d’action du vécuronium est probablement prolongée. Dans
tous les cas, le monitorage de la curarisation permet d’évaluer la
paralysie neuromusculaire et de guider les réinjections de myo-
relaxant.
Maintien de la manúuvre de Sellick
+  Morphinomimétiques
ventilation au masque avec FIO2 100
Peu d’études scientifiques ont pu montrer un quelconque avantage
d’un morphinomimétique sur un autre. Dans la majorité des cas, les
opiacés ne sont injectés qu’après le clampage du cordon. Ce n’est
Ventilation facile Ventilation inefficace qu’en cas d’hypertension artérielle que leur utilisation est conseillée à
l’induction. L’alfentanil à la dose de 8 μg/kg ou le fentanyl à la dose
de 2 μg/kg ont peu d’effets sédatifs chez l’enfant. Aucune donnée
n’est actuellement disponible pour le sufentanil. Seuls quelques cas
cliniques ont été publiés avec le rémifentanil au cours d’une césa-
Urgence obstétricale
rienne en urgence à la dose de 2 μg/kg ; aucune dépression respira-
toire n’a été notée chez le nouveau-né [50].

● Entretien de l’anesthésie
Masque laryngé Une fois l’induction faite et la césarienne débutée, l’anesthésie est
+ Détresse maternelle
maintien de la manœuvre et fœtale
entretenue par un mélange d’oxygène et de protoxyde d’azote à
de Sellick 50 %, associé ou non, suivant les écoles, à un anesthésique halogéné
(0,8 à 1 % d’isoflurane, 1 % de sévoflurane) jusqu’à l’ouverture du
péritoine. La curarisation par un curare non-dépolarisant facilite
l’extraction. Le mélange seul d’oxygène et de protoxyde d’azote est
Position déclive continué jusqu’à l’hystérotomie. Après l’extraction de l’enfant et le
Ventilation assistée clampage du cordon, l’analgésie est assurée par l’administration d’un
Abord trachéal
ou contrôlée
+
direct morphinique et l’anesthésie peut être approfondie si nécessaire (par
anesthésie inhalatoire la poursuite des halogénés ou l’administration d’agents intraveineux).
L’antibioprophylaxie peut alors être faite. Ces événements doivent
● Figure 3 Algorithme décisionnel en cas de difficultés d’intubation
figurer sur la feuille d’anesthésie avec leur exacte chronologie.
© Groupe Liaisons SA, juin 2002. La photocopie non autorisée est un délit.

Après le décollement du placenta, il convient de mettre en route


une perfusion continue de 20 unités d’ocytocine pendant les
pose, dans les cas exceptionnels où l’urgence absolue commande un 24 heures suivantes. Il faut rappeler que cet agent possède un effet
geste sous anesthésie alors même que la patiente n’est pas pourvue vasodilatateur et tachycardisant et qu’il peut induire, exceptionnelle-
d’un accès veineux, de faire une induction par 8 % de sévoflurane en ment, une rétention hydrique par effet antidiurétique lorsque de
ventilation spontanée, permettant de compléter la préparation de la fortes doses sont administrées.
patiente et son intubation après curarisation [49]. Dans le cas rap- L’extubation est réalisée en fin d’intervention, chez une patiente
porté, la perte de conscience a pris 30 secondes et, en 3 minutes, totalement réveillée et ayant retrouvé ses réflexes pharyngés, après
l’extraction de l’enfant a pu être réalisée. Ces quelques minutes vérification de l’absence de curarisation résiduelle.
peuvent constituer un temps particulièrement précieux pour un obs-
tétricien dans un contexte de procidence du cordon, d’hématome
rétroplacentaire ou de souffrance fœtale suraiguë.
Place actuelle de l’anesthésie générale
 Curares en urgence obstétricale
Malgré les risques d’anaphylaxie, moindres avec la nouvelle for-
• Contre-indications à l’anesthésie locorégionale :
mulation dépourvue d’iode, la succinylcholine à la dose de 1 mg/kg
– hémorragie massive ;
reste l’agent de référence [43]. Le déficit de 30 % en pseudocholines-
– troubles de la coagulation ;
térases que l’on observe pendant la grossesse n’a que peu d’influence
– instabilité hémodynamique maternelle ;
sur sa durée d’élimination. En cas de contre-indication, la succinyl-
– sepsis ;
choline peut être remplacée par 0,6 à 1,2 mg/kg de rocuronium mais
– le refus de la parturiente est à mettre en balance avec les ris-
la durée d’action est longue. Tous les curares passent faiblement la
ques éventuels d’une anesthésie générale.
barrière placentaire en raison de leur faible liposolubilité et malgré
• Nécessité d’extraction fœtale rapide (< 10 minutes).
leur forte ionisation. En pratique, les quantités transférées ont peu
• Analgésie locorégionale insuffisante ou inefficace.
d’influence clinique sur le fœtus ou le nouveau-né. Il semble raison-

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 13


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

Choix d’une stratégie anesthésique une extraction en urgence dans un délai compris entre 5 et 15 minu-
tes selon la cause. Environ 5 à 10 % des césariennes sont réalisées du
fait de l’apparition brutale d’une SFA au cours du travail, pour présen-
CÉSARIENNE tation dystocique le plus souvent (Tableau 9). Le dépistage d’une SFA
Le degré de l’urgence obstétricale conditionne le choix de la repose sur la surveillance continue du rythme cardiaque fœtal.
technique anesthésique. Il peut être classé selon le délai Celle-ci n’est valide qu’à partir de la 26e semaine. Cependant, la tech-
« décision-extraction fœtale » que l’on peut s’autoriser, mais les corré- nique présente un nombre non négligeable de faux négatifs mais
lations avec le devenir néonatal ne sont pas établies. aussi de faux positifs qui sont attestés par l’absence de souffrance du
En pratique, il est préférable de répartir les indications de la césa- nouveau-né à la naissance.
rienne selon trois niveaux d’urgence et de définir ensuite en fonction D’autres techniques, comme la mesure du pH au niveau du scalp,
de ces catégories, la technique anesthésique la plus appropriée la mesure de la saturation en oxygène par électrode cutanée et enfin
(Tableau 8). l’évaluation de la circulation ombilicale ou cérébrale par effet Doppler,
sont aussi proposées pour l’évaluation d’une SFA. Cependant, ces
SITUATIONS PARTICULIÈRES ADAPTÉES techniques ne sont pas utilisées à grande échelle pour affirmer le dia-
À L’ÉTIOLOGIE gnostic en salle d’accouchement. En pratique, l’apparition de décélé-
rations profondes, d’une contracture utérine, d’une bradycardie < à
■ Souffrance fœtale aiguë 100 battements par minute, d’une perte de la variabilité normale du
La survenue d’une souffrance fœtale aiguë (SFA) est la consé- rythme cardiaque fœtal et un pH < 7,10 sont les marqueurs habituels
quence d’une hypoxie fœtale, quels qu’en soient les mécanismes. En d’une SFA, qui vont justifier une extraction en urgence du fœtus.
dehors des causes d’hypoxie maternelle, la SFA est en relation avec L’existence d’un liquide amniotique teinté constitue aussi un signe
une diminution du débit utéroplacentaire (DUP) due soit à une hypo- d’alarme de SFA.
tension artérielle maternelle, soit à une vasoconstriction des artères La SFA doit être, en fait, anticipée et toutes les situations obstétri-
utérines. Elle survient dans 10 à 20 % des accouchements et nécessite cales pouvant y conduire devraient bénéficier d’une prise en charge

● Tableau 8 Critères d’urgence de la césarienne

Degré d’urgence de la césarienne Choix de la technique d’anesthésie


Urgence différable :
état physiologique fœtomaternel stable Anesthésie épidurale
ou

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délai autorisé > 30 min rachianesthésie
antécédent de césarienne (pas en travail)
Urgence non différable :
état physiologique fœtal et/ou maternel instable mais sans menace
vitale immédiate pour le fœtus et la mère
délai autorisé < 10-15 min
disproportion fœtopelvienne Extension satisfaisante d’une AED préexistante
antécédent de césarienne (en travail) ou
dystocie cervicale rachianesthésie
échec d’extraction instrumentale
herpès génital actif avec rupture membranaire, prolapsus du cordon sans souffrance fœtale
souffrance fœtale aiguë : ralentissements répétés du rythme cardiaque
fœtal avec épisodes de récupération entre les contractions
Urgence extrême :
menace vitale immédiate pour la mère et/ou le fœtus
délai < 5 min Anesthésie générale de principe
procidence du cordon avec souffrance fœtale aiguë (Extension d’une anesthésie épidurale
hémorragie maternelle massive préexistante à discuter)
rupture utérine
souffrance fœtale aiguë anoxique

14 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
● Tableau 9 Une anesthésie épidurale prophylactique se justifie Le choix de l’agent d’induction et, surtout, de sa posologie est cri-
lorsqu’une souffrance fœtale aiguë est prévisible tique. La tolérance médicamenteuse du fœtus est diminuée en cas de
durant la surveillance de la grossesse SFA. Les données scientifiques sont encore fragmentaires et expéri-
mentales. Ainsi, pour le propofol, on ne dispose que d’une seule
États de souffrance fœtale aiguë États de souffrance fœtale aiguë étude chez la brebis gravide et, dans l’espèce humaine, cet agent n’a
prévisibles inopinés été étudié que lors de césariennes programmées.
Utérus cicatriciel Procidence cordon L’entretien de l’anesthésie est généralement assuré par des agents
Grossesses multiples Hypertonie utérine halogénés à une concentration inférieure à 1 CAM. La plupart des
Anomalies de présentation (siège) Hémorragies utérines études sont, là aussi, expérimentales et l’on manque de données en
Insuffisance placentaire (toxémie, Dystocies cas de SFA [54]. Si pour un fœtus indemne de SFA, le protoxyde
diabète) Embolie amniotique d’azote peut être utilisé, cet agent doit être évité et des fractions inspi-
Dépassement du terme Hypotension maternelle rées élevées en oxygène doivent être utilisées en cas de SFA [55].
Retard de croissance intra-utérin La réalisation d’une ALR expose le fœtus aux effets directs de
Anomalies d’insertion du placenta l’anesthésique local réabsorbé. En cas d’acidose, les anesthésiques
locaux dont le pKa est élevé comme la bupivacaïne, s’accumulent
anesthésique précoce, principalement représentée par « l’anesthésie chez le fœtus. L’administration d’une dose-test adrénalinée ne provo-
épidurale prophylactique » (Tableau 9). En effet, la présence d’un que pas d’altération du DUP en cas de SFA chez la brebis gravide [56].
cathéter en place permet, si l’on injecte 20 mL de lidocaïne à 2 %, la L’utilisation de lidocaïne, un temps controversée, est maintenant
réalisation d’une anesthésie permettant une césarienne dans un délai admise dans les situations de SFA. De même, on a pu montrer que les
de moins de 12 minutes. Cette attitude préventive sur des patientes à transferts placentaires de lévobupivacaïne et de ropivacaïne sont
risque a permis, dans certaines études, de pratiquer 90 % des césa- compatibles avec leur utilisation clinique au cours des SFA [57].
riennes pour SFA sous AED [42]. Néanmoins, lorsque la SFA est ino- Les effets indésirables de l’ALR sont principalement hémodyna-
pinée, la réalisation d’une anesthésie générale reste encore miques chez la mère. La plupart des études réalisées en l’absence de
nécessaire, surtout dans certaines circonstances particulièrement SFA montrent qu’aux doses usuelles l’anesthésie locorégionale ne
urgentes comme la procidence du cordon. modifie pas le DUP [58, 59]. L’adjonction d’adrénaline ne modifie pas
Le choix de l’anesthésie sera dicté par le degré d’urgence, celui-ci ces observations [60] sauf s’il existe au préalable une diminution du
étant fonction des critères retenus par l’obstétricien. Chaque fois que DUP, comme au cours de la toxémie gravidique [61]. Les anesthé-
cela est possible, l’ALR doit être proposée en première intention. Cer- siques locaux non adrénalinés sont seuls capables d’augmenter le
taines thérapeutiques (bêtamimétiques, trinitrine) peuvent permettre DUP dans cette circonstance. Les morphiniques, comme le sufentanil
à présent d’augmenter les délais de l’intervention obstétricale, de faire et le fentanyl, affectent peu le DUP [62] lorsqu’ils sont administrés
passer une indication d’extrême urgence dans la catégorie des seuls, mais l’acidose entraîne une accumulation du sufentanil du côté
urgences non différables et de diminuer encore la part des anesthé- fœtal [63].
© Groupe Liaisons SA, juin 2002. La photocopie non autorisée est un délit.

sies générales dans la prise en charge des SFA. En cas d’anesthésie générale, le pronostic fœtal est corrélé au
Certaines mesures simples peuvent tempérer la décision de césa- temps induction-extraction. Plus ce temps s’allonge, plus les scores
rienne et permettre une récupération fœtale. L’oxygénation mater- d’Apgar diminuent. D’autres mesures de temps, comme le temps inci-
nelle au masque facial à un débit de 4 à 6 litres par minute augmente sion utérine-extraction fœtale, ont été proposées comme éléments
la PO2 fœtale, même dans les situations où le DUP est diminué [51]. pronostiques, mais les travaux les plus récents ne sont pas en faveur
La compression aortocave par l’utérus gravide pouvant diminuer le de leur utilisation [64, 65]. Une manipulation douce de l’utérus et du
DUP, la mise en décubitus latéral gauche ou droit doit être tentée en fœtus au moment de l’intervention est, sans doute, un élément de
premier lieu. En cas de compression du cordon, la mise en position pronostic plus important [66].
de Trendelenburg peut être utile pour restaurer le DUP. Enfin la cor-
rection d’une hypotension maternelle par remplissage et/ou utilisa- Stratégie anesthésique en cas de souffrance
tion de vasopresseurs reste un objectif primordial, le DUP étant fœtale aiguë
totalement dépendant de la pression artérielle maternelle. • Souffrance fœtale prévisible : anesthésie épidurale prophylac-
Lorsque le recours à l’anesthésie est inéluctable, qu’elle soit géné- tique de principe.
rale ou locorégionale, la présence d’une SFA impose des contraintes • Nécessité d’extraction < 10 minutes :
supplémentaires par rapport à une anesthésie programmée. Le fœtus – si AED en place, l’anesthésie sera étendue par l’injection de
étant déjà en situation de détresse, toute altération supplémentaire de lidocaïne 2 % adrénalinée au 1/200 000 ;
l’état hémodynamique maternel et du DUP aggrave la SFA. – sinon anesthésie générale ;
– Nécessité d’extraction > 10 minutes :
Si une anesthésie générale est pratiquée, quelques règles sont à
– si AED en place, l’anesthésie sera étendue par l’injection de
respecter. L’apport d’oxygène au fœtus par l’intermédiaire du DUP
lidocaïne 2 % adrénalinée au 1/200 000 ;
doit être préservé au maximum. Il faut ainsi éviter tous les facteurs
– sinon rachianesthésie (en l’absence d’une contre-indication)
susceptibles de réduire le DUP : hypocapnie maternelle par hyper-
avec 2 mL (10 mg) de bupivacaïne à 0,5 % hyperbare associée à
ventilation [52], hypoxie maternelle et sécrétion exagérée de catécho-
2,5 μg de sufentanil.
lamines maternelles par défaut d’analgésie [53].

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 15


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

■ Révision utérine pour délivrance artificielle été proposée par voie transvaginale ou transpérinéale. Habituelle-
Une rétention placentaire survient dans 1 % des accouchements et ment, 10 mL de lidocaïne à 1 % de chaque côté suffisent.
nécessite habituellement une exploration manuelle de l’utérus. Là En pratique, trois possibilités s’offrent à la prise en charge
encore, la technique anesthésique dépend de la présence ou non anesthésique :
d’une AED. En pratique, trois possibilités s’offrent à la prise en charge – extension d’une AED en place à l’aide de 10 mL de lidocaïne 2 %
anesthésique : associée à 5 μg de sufentanil ;
– extension d’une AED en place à l’aide de 10 mL de lidocaïne 2 % – en l’absence d’AED et en l’absence d’une contre-indication, une
associée à 5 μg de sufentanil ; rachianesthésie est rapidement réalisable à l’aide de 2 mL (10 mg)
de bupivacaïne à 0,5 % hyperbare associée à 2,5 μg de sufentanil ;
– en l’absence d’AED et en l’absence d’hémorragie massive, une
rachianesthésie est rapidement réalisable à l’aide de 2 mL (10 mg) – dans les autres cas, il convient de réaliser une AG avec intubation
de bupivacaïne à 0,5 % hyperbare associée à 2,5 μg de sufentanil ; orotrachéale en respectant les précautions préalablement citées.
– dans les autres cas, il convient de réaliser une anesthésie générale
avec les précautions préalablement citées. La question de la néces- ■ Accouchement par le siège
sité d’une intubation orotrachéale ne se pose qu’en cas d’hémor- La présentation du siège représente 2 à 3 % des accouchements et
ragie importante et/ou si une révision avec réparation du col et du varie avec l’âge gestationnel. La morbidité maternelle est augmentée.
vagin est nécessaire. L’agent d’induction peut être alors le propofol Si l’indication d’un accouchement par voie basse est posée et que le
en raison de sa rapidité de récupération ou l’étomidate en cas travail est bien conduit, l’état de l’enfant à la naissance est comparable
d’instabilité hémodynamique. à celui observé après un accouchement en présentation céphalique.
Toutefois, certains facteurs intercurrents peuvent modifier l’attitude
■ Procidence du cordon obstétricale de départ, notamment la survenue d’une procidence du
cordon ou l’altération du rythme cardiaque fœtal avec ou sans réten-
La procidence du cordon représente 0,15 à 0,40 % des accouche- tion de la tête. Certaines équipes proposent l’administration sublin-
ments et aboutit à une césarienne lorsqu’il s’agit d’une procidence guale ou intraveineuse directe de nitroglycérine (les posologies
vraie avec une dilatation incomplète. La technique d’anesthésie habituelles sont comprises entre 150 et 300 μg, sans dépasser
dépend essentiellement de la présence ou non d’une AED. Dans le 600 μg) en cas de rétention de la tête dernière. Sur le plan pratique, la
premier cas, l’extension de l’anesthésie peut être obtenue très rapide- réalisation d’une anesthésie épidurale prophylactique est une excel-
ment. Dans le cas contraire, seule l’AG permettra d’assurer l’extraction lente précaution en raison des manœuvres obstétricales souvent
du fœtus dans les plus brefs délais. nécessaires et du risque de césarienne en cours de travail. En cas de
complications chez une parturiente ne bénéficiant pas d’une AED et
■ Hypertonie utérine en l’absence de contre-indication, une rachianesthésie est rapidement
réalisable à l’aide de 2 mL (10 mg) de bupivacaïne à 0,5 % hyperbare
L’hypertonie utérine est due, la plupart du temps, à une administra-

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associée à 2,5 μg de sufentanil. Dans les autres cas, il faudra réaliser
tion excessive d’ocytociques. Parmi les autres étiologies possibles,
une AG avec intubation orotrachéale en respectant les précautions
figure l’existence d’une disproportion fœtopelvienne, d’une cho-
préalablement citées.
rioamniotite ou d’un hématome rétroplacentaire. En pratique, l’arrêt
des ocytociques, la recherche et le traitement d’une hypotension
maternelle, et enfin, l’administration intraveineuse de bêta-mimé- ■ Grossesse multiple
tiques ou de trinitrine permettent d’obtenir rapidement la fin de La naissance de jumeaux représente 1 % des accouchements, celle
l’hypertonie utérine dans de nombreux cas : de triplés, 0,1 %. Ces chiffres varient selon le type ethnique, la parité et
– Ephédrine : 6 à 30 mg par incréments successifs ; l’âge maternel. Les gestations multiples amplifient les modifications
– Salbutamol : 100 μg intraveineux, éventuellement renouvelable physiologiques et anatomiques, notamment cardiovasculaires et res-
après 2 à 3 minutes ; piratoires, de la grossesse. Les complications fœtales et maternelles
– Trinitrine : 100 μg intraveineux, ou, plus couramment, en spray sont plus importantes lors des grossesses multiples, en particulier
sublingual (une bouffée délivrant environ 150 μg) ; la même dose pour ce qui concerne les anomalies congénitales, l’hydramnios, le
peut être renouvelée une fois après 2 à 3 minutes si nécessaire. retard de croissance intra-utérin, la fréquence des ruptures préma-
L’échec de ces mesures conduit à la réalisation d’une césarienne, turées de membranes, le taux d’accouchement prématuré, le travail
qu’il est judicieux de préparer tout en appliquant ces mesures prolongé, l’étranglement ou le prolapsus du cordon ombilical, la
curatives. transfusion de jumeau à jumeau, les dystocies de présentation,
l’éclampsie et les hémorragies pré- ou post-partum. La mortalité
périnatale est quatre à six fois plus importante que lors d’une gros-
■ Extraction par manœuvres instrumentales
sesse normale.
Dix à 14 % des enfants naissent par forceps du fait d’une absence L’incidence des césariennes ou des extractions instrumentales est
de progression du travail, avec ou sans SFA. La bonne réalisation du plus élevée et la plupart des accouchements de triplés s’accompa-
geste suppose que l’analgésie épidurale soit parfaite. Dans certains gnent de complications pré- ou postnatales. Ainsi chez ces patientes,
cas, l’infiltration du nerf pudendal (anciennement honteux interne) a il faut placer un abord veineux périphérique de bon calibre, réaliser

16 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
une anesthésie épidurale sûre, mettre la patiente en position latérale La kétamine et l’étomidate sont les agents choisis préférentielle-
gauche exagérée. L’administration intraveineuse ou sublinguale de ment dans ces situations à l’état hémodynamique instable.
nitroglycérine (les posologies habituelles sont comprises entre 150 et Pendant l’accouchement, l’extraction du fœtus peut devenir rapide-
300 μg, sans dépasser 600 μg) permet d’obtenir une relaxation uté- ment nécessaire, devant l’apparition d’une SFA le plus souvent. Elle
rine satisfaisante en cas de version interne. En cas d’échec, l’anesthé- sera réalisée sous anesthésie générale si l’état hémodynamique est
sie générale avec dénitrogénation soigneuse et séquence d’induction instable. Même lorsque la césarienne est effectuée sous ALR, une
rapide peut être nécessaire ; elle peut nécessiter parfois de fortes anesthésie générale complémentaire peut être nécessaire dans une
concentrations d’agents halogénés. proportion allant jusqu’à 20 % des cas pour diverses raisons : durée
En pratique, les grossesses multiples représentent une excellente de l’intervention (excédant souvent 3 h), hémorragie abondante (sou-
indication de l’anesthésie épidurale prophylactique en raison du ris- vent supérieure à 3,5 L), manipulation des viscères abdominaux.
que de manœuvres obstétricales et de césarienne en cours de travail. Dans la série clinique la plus récente, le taux de conversion à l’anes-
Lorsque l’indication d’une extraction urgente est posée et que la thésie générale est plus faible mais ce changement de stratégie reste
patiente ne bénéficie pas d’une AED, la réalisation d’une rachianes- une éventualité fréquente en pratique clinique.
thésie (en l’absence d’une contre-indication) avec 2 mL (10 mg) de En post-partum, l’utilisation de médications utérotoniques est sou-
bupivacaïne à 0,5 % hyperbare associée à 2,5 μg de sufentanil repré- vent nécessaire en raison de la fréquence des atonies utérines :
sente la meilleure option. Dans tous les autres cas, il convient de réa- – Ocytocine 5 à 10 UI, en intraveineux, renouvelable, jusqu’à 30 UI,
liser une AG avec intubation orotrachéale en respectant les relayée par administration continue, 10 à 15 UI sur 30 minutes.
précautions préalablement citées. – Prostaglandine : dinoprostone (Prostine E2®), 100 μg intraveineux
en dose de charge, relayée par un débit continu de 1 μg/kg/h au
début, débit pouvant être augmenté progressivement (jusqu’à
Anesthésie pour extraction instrumentale, 3 μg/kg/h habituellement). Ce traitement déclenche régulièrement
accouchement par le siège, grossesse multiple une gêne ventilatoire intense avec toux, par spasme et irritation
bronchique. Il est contre-indiqué si une hyper-réactivité bron-
ou révision utérine chique est présente. Il est de même contre-indiqué, en cas de glau-
• Anesthésie épidurale prophylactique de principe qui sera éten- come ainsi que de cardiopathie ou d’hypertension artérielle mal
due par l’injection de lidocaïne 2 % au moment de l’intervention contrôlée.
obstétricale. La reconnaissance du mécanisme hémorragique est essentielle. La
• En cas d’urgence et en l’absence de cathéter épidural, rachianes- plupart du temps, un geste simple, comme une révision utérine, peut
thésie (en l’absence d’une contre-indication) avec 2 mL (10 mg) de être effectué alors qu’une ALR est déjà en place. Une anesthésie
bupivacaïne à 0,5 % hyperbare associée à 2,5 μg de sufentanil. générale peut cependant s’avérer nécessaire si l’état hémodynamique
• Si les options précédentes ne sont pas disponibles ou utilisables, de la patiente est instable. En pratique, deux possibilités se ren-
réalisation d’une anesthésie générale avec intubation orotra- contrent en clinique :
© Groupe Liaisons SA, juin 2002. La photocopie non autorisée est un délit.

chéale. – le saignement est modéré et l’état hémodynamique est stable ;


l’extension d’une AED ou le recours à une rachianesthésie est
possible ;
– le saignement est d’emblée massif et/ou l’état hémodynamique est
HÉMORRAGIE OBSTÉTRICALE instable ; l’anesthésie générale s’impose sans discussion, au bloc
Pendant l’accouchement ou, plus souvent, au moment de la déli- opératoire et selon les modalités précédemment définies.
vrance, il peut être nécessaire de réaliser une anesthésie en urgence.
En France, les hémorragies obstétricales représentent la première
cause de mortalité et morbidité de la grossesse ; elles sont responsa-
PRÉ-ÉCLAMPSIE
bles de 20 % des admissions en réanimation obstétricale et d’une La pré-éclampsie n’est pas, par elle-même, une urgence anesthési-
mortalité globale de l’ordre de 6 à 10 %. La survenue d’une hémor- que obstétricale. Ce n’est qu’au stade de ses complications que l’inter-
ragie pendant l’accouchement peut menacer le pronostic de la mère vention de l’anesthésiste peut être requise. Une césarienne rapide
comme celui du fœtus. Les causes les plus fréquentes sont représen- peut être décidée devant l’apparition de signes de SFA, d’une hyper-
tées par la rupture utérine, le placenta prævia ou le placenta accreta. tension sévère avec retentissement rénal, d’une complication hémor-
En post-partum, les hémorragies peuvent être la conséquence d’une ragique ou encore d’un HELLP syndrome (Hemolysis Elevated Liver
atonie utérine, d’une rétention placentaire, d’une plaie vaginale, d’une Enzyme Low Platelets). La toxémie gravidique laisse habituellement le
coagulopathie et plus rarement d’une inversion ou rupture utérine. temps de réaliser une ALR à condition de disposer d’un bilan de coa-
La prise en charge des hémorragies obstétricales repose dans tous gulation datant de moins de trois heures. L’objectif, dans tous les cas,
les cas sur une stratégie rigoureusement standardisée : est de maintenir une pression artérielle moyenne supérieure à
– mise en place de deux accès veineux de gros calibre ; 100 mmHg pendant l’intervention. À cet égard, la rachianesthésie
– commande de sang immédiate ; n’est pas plus délétère sur le plan hémodynamique que l’anesthésie
– vérification du bilan de coagulation ; épidurale. En cas d’anesthésie générale, un pic d’hypertension arté-
– préparation à une anesthésie générale. rielle risque de survenir au moment de l’intubation, ce qui peut pro-

Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales 17


8 V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications

voquer un accident vasculaire cérébral, des convulsions ou un ● Tableau 10 Traitements destinés à prévenir un pic hypertensif
œdème pulmonaire aigu. Ces risques graves justifient l’administration lors de l’intubation d’une parturiente pré-éclamptique
préalable d’un morphinique malgré le risque de dépression respira- nécessitant une anesthésie générale
toire auquel serait exposé l’enfant (Tableau 10). En pratique, deux
éventualités sont rencontrées en pratique clinique : Morphiniques
– la parturiente ne présente ni trouble de coagulation ni contre-indi- Alfentanil 10 μg/kg 2 minutes avant l’induction
cation à la réalisation d’une ALR, une rachianesthésie ou une anes- ou Fentanyl : 200 μg + Dropéridol 5 mg
+
thésie épidurale peuvent être envisagées ;
Lidocaïne intraveineuse 1,5 mg/kg
– Les conditions précédentes ne sont pas remplies, il convient alors
+
de réaliser une AG avec intubation orotrachéale en respectant les Sulfate de magnésium 40 mg/kg à l’induction
précautions préalablement citées et en prévenant le risque de pic +
hypertensif lors de la laryngoscopie et de l’intubation (Tableau 10). Antihypertenseurs

ÉCLAMPSIE Esmolol (Brévibloc 0,5 mg/kg)


ou
Si l’épilepsie gestationnelle est relativement rare, la survenue d’une Nicardipine (Loxen bolus 1 mg)
crise d’épilepsie est fréquente au cours de l’évolution d’une toxémie
gravidique et d’un HELLP syndrome. La crise survient fréquemment
au cours du travail et impose d’une part une délivrance fœtale rapide
● Tableau 11 Utilisation du sulfate de magnésium au cours de l’éclampsie
et d’autre part une prise en charge neurologique maternelle en Dose de charge : 4 g intraveineux en 15 min
urgence. Le sulfate de magnésium est supérieur à la phénytoïne ou Entretien : 1 g par heure
au diazépam pour prévenir une récidive de convulsions en cas Surveillance
d’éclampsie déclarée (Tableau 11). En revanche, l’opportunité de sa – La fréquence respiratoire doit rester > 16 cycles/min
prescription pour prévenir les crises d’épilepsie au cours de la – Le débit urinaire doit rester > 25 mL/h
pré-éclampsie est encore discutée. Le rôle préventif de la nimodipine – Les réflexes rotuliens doivent toujours être présents
est en cours d’évaluation. – Les dosages sanguins ne sont pas nécessaires, sauf en cas de
La survenue d’une crise comitiale au cours de l’accouchement récidive épileptique
nécessite d’une part la réalisation d’une anesthésie, générale dans la
plupart des cas, pour extraire rapidement l’enfant et, d’autre part, le si possible, refoulement gauche de l’utérus. Les manœuvres habituel-
traitement de la crise par des médicaments dépresseurs centraux les de réanimation de l’arrêt cardiaque (défibrillation, adrénaline) sont
induisant des scores de Glasgow < 9. Le contexte dans lequel sur- applicables en leur associant une étroite surveillance du rythme car-
viennent les crises fait qu’il existe très souvent des anomalies de coa- diaque fœtal. Elles ne doivent pas être poursuivies au-delà de cinq

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gulation qui interdisent toute ALR. Le thiopental est alors l’agent minutes si elles sont inefficaces et une césarienne en extrême urgence
d’induction le plus fréquemment utilisé. Le reste de la conduite de doit être pratiquée, éventuellement même en post mortem immédiat.
l’anesthésie est similaire à celle recommandée lors d’une anesthésie
pour pré-éclampsie, la seule différence étant représentée par la
nécessité de poursuivre un traitement anti-épileptique après la déli- Conclusion
vrance (diazépam ou clonazépam). Le bilan postopératoire devra L’intervention de l’anesthésiste au cours d’un accouchement peut
comporter dans tous les cas une tomodensitométrie cérébrale pour être nécessaire pour des raisons de pronostic maternel (hémorragie,
affirmer ou infirmer l’existence d’un vasospasme dans la genèse de la éclampsie, arrêt cardiaque) ou pour une souffrance fœtale isolée
crise. (procidence du cordon, dystocie). En fonction du degré de l’urgence
En pratique, devant l’apparition d’une crise épileptique, il faut réali- et des conditions maternelles, la meilleure stratégie anesthésique sera
ser une AG avec intubation orotrachéale en respectant les précau- choisie. Une technique locorégionale, anesthésie épidurale ou rachi-
tions habituelles et en prévenant le risque de pic hypertensif lors de la anesthésie, sera envisagée en priorité chaque fois que l’indication
laryngoscopie et de l’intubation (Tableau 10). Dans tous les cas, il faut d’une anesthésie sera retenue. La sécurisation de la plupart des
assurer un traitement anticomitial préventif des récidives. urgences fœtomaternelles repose sur la combinaison d’une organi-
sation structurée, d’une bonne communication entre les acteurs
ARRÊT CARDIAQUE impliqués et de l’établissement (et du respect) de protocoles écrits au
sein des services. La qualité de la prise en charge des urgences anes-
L’anesthésiste peut être confronté, au pire, à un arrêt cardiocircula- thésiques obstétricales repose en définitive sur trois axes fondamen-
toire au cours de l’accouchement. Les principales modifications phy- taux : 1) l’existence d’un véritable dialogue entre obstétricien et
siologiques au cours du 3e trimestre de la grossesse consistent, en anesthésiste-réanimateur afin de d’adapter au mieux les thérapeu-
grande partie, en une gêne au retour veineux par compression de tiques envisagées, 2) la compétence et la disponibilité immédiate de
l’axe cave par l’utérus dilaté. Le massage cardiaque, pour être le plus chacun des membres de l’équipe, ce qui va souvent de pair avec
efficace possible, sera alors effectué en décubitus latéral gauche avec, l’expérience, et 3) l’organisation d’une structure parfaitement adaptée

18 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales


V – 8 – Gestion des situations critiques et des complications 8
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20 Chapitre 8 – Prise en charge anesthésique des urgences obstétricales

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