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Revue d’Épidémiologie et de Santé Publique xxx (2018) xxx–xxx

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Article original

Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins


infirmiers
Psychological characteristics of stress in nursing student
M. Dugué a,b, C. Garncarzyk a,b, F. Dosseville a,*,b
a
UFR STAPS, université Caen-Normandie, 2, boulevard du Maréchal-Juin, 14032 Caen cedex, France
b
EA4260, centre d’étude sport et actions motrices, 14032 Caen, France

I N F O A R T I C L E A B S T R A C T

Historique de l’article : Background. – Student nurses have perceived stress higher than students taking other training courses.
Reçu le 20 septembre 2017 The objective of this work was to investigate psychological characteristics of nursing students in an
Accepté le 13 septembre 2018 attempt to understand why they are more subject to stress than others.
Disponible sur Internet le xxx
Methods. – We carried out a self-administered questionnaire survey to compare students taking various
training courses (i.e., sport sciences, psychology, medicine, and nursing). Perceived stress and health,
Keywords: high-risk behaviors, different psychological determinants of stress (i.e. coping, emotional skills,
Stress
resilience, self-esteem, personality, chronotype) were assessed.
Psychological characteristics
Perceived health
Results. – Multiple linear regression analysis yielded a model showing that seven independent variables
Students were correlated with perceived stress among students: perceived health, neuroticism, stress tolerance,
active coping, understanding of one’s own emotions, chronotype amplitude, and use of one’s own
feelings. Moreover, medicine and nursing students were more stressed and perceived their health in a
more negative way than students taking other training courses. Nursing students were also less stress
Mots clés :
Stress tolerant.
Déterminants psychologiques Conclusion. – The regression model suggests that psychological characteristics influence stress level
Santé perçue among students. Moreover, the results show that medicine and nursing students differ from other
Étudiants students on resilience in stress tolerance dimension as well as on a set of behaviors. Practical
perspectives are discussed.
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R É S U M É

Position du problème. – Les étudiants en soins infirmiers présentent un niveau de stress perçu le plus
élevé par rapport à d’autres formations. L’objectif est de comprendre, à travers l’étude de différents
déterminants psychologiques, pourquoi ces étudiants en IFSI sont plus sujets au stress.
Méthodes. – Nous avons réalisé une enquête par questionnaire auto-administré pour comparer les
étudiants de différentes filières (Psychologie, santé et soins infirmiers, STAPS). Le stress et la santé
perçus, les conduites à risques ainsi que différents déterminants psychologiques du stress (c’est-à-dire,
stratégies de coping, compétences émotionnelles, résilience, estime de soi, traits de personnalité,
chronotype) ont ainsi été évalués.
Résultats. – Une régression linéaire multiple montre que plusieurs variables indépendantes sont
corrélées de manière significative (p < 0,001) avec la variable dépendante « stress perçu » et sept
variables indépendantes ont atteint un seuil de significativité : la santé perçue, le névrosisme, la
tolérance au stress, le coping actif, la compréhension de ses propres émotions, l’amplitude du chronotype,
et l’utilisation de ses propres émotions. De plus, les étudiants en santé et en IFSI sont plus stressés et
perçoivent leur santé de manière plus négative comparativement aux étudiants des autres formations.
Les étudiants en IFSI sont également moins tolérants au stress.

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : F.Dossevillea*bfabrice.dosseville@unicaen.fr (F. Dosseville).

https://doi.org/10.1016/j.respe.2018.09.004
0398-7620/ C 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
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Conclusion. – Le modèle issu de la régression suggère que des caractéristiques psychologiques


influencent le niveau de stress des étudiants. De plus, les résultats montrent que les étudiants en santé et
en IFSI diffèrent des autres étudiants sur la résilience dans sa dimension tolérance au stress ainsi que sur
un ensemble de conduites. Des perspectives pratiques sont discutées.
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1. Introduction Au vu de la littérature existante, on peut s’interroger sur les


raisons d’un niveau de stress plus élevé chez les étudiants en
En 2010, l’Observatoire national de la vie étudiante (OVE) a institut de formation en soins infirmiers (IFSI) que chez les
mené une enquête sur les conditions de vie des étudiants issus de étudiants issus d’autres filières. Ont-ils des caractéristiques
différentes filières de formation en France. Les résultats ont révélé interindividuelles communes qui pourraient expliquer leur plus
que les étudiants en soins infirmiers présentaient des symptômes haut niveau de stress ? Quels déterminants psychologiques
de mal-être plus nombreux que la plupart des étudiants d’autres permettraient de comprendre le niveau de stress perçu chez les
formations [1]. En effet, 59 % et 85 % des étudiants en soins étudiants en IFSI ? L’originalité du présent travail est d’évaluer
infirmiers déclaraient être fatigués ou nerveux (contre 49 % et 75 %, l’ensemble de ces différentes caractéristiques psychologiques et
et, 53 et 80 %, respectivement pour les formations universitaires et d’établir des relations entre ces dernières. En effet, ces détermi-
les étudiants en santé). Ces symptômes provoquent chez ces nants psychologiques sont la plupart du temps évalués les uns
étudiants un stress quotidien élevé et les sources de stress indépendamment des autres (c’est-à-dire, stress perçu et résilience
semblent être multiples. L’une des principales serait la mise en [15], estime de soi [4], stratégies de coping [12], traits de
situation professionnelle [2]. Le manque d’assurance (en leurs personnalité [13], intelligence émotionnelle [17,18], chronotype
connaissances et capacités à faire face aux différentes tâches) lié au [9]). Au-delà de ces caractéristiques psychologiques, nous souhai-
décalage entre la réalité du terrain et la théorie ainsi que les tons également évaluer l’impact de la formation. Ainsi, une
conditions insatisfaisantes d’encadrement font craindre l’erreur comparaison des étudiants de différentes filières universitaires de
aux étudiants augmentant ainsi leur stress. Cette appréhension est l’université de Caen-Normandie ( santé, psychologie et science et
également la première source d’abandon au sein de la formation en technique des activités physique et sportives [STAPS]) et des
soins infirmiers [3] et détériore dans le même temps l’estime de soi étudiants en IFSI est effectuée concernant le stress perçu ainsi que
[4]. D’autres travaux montrent un lien entre le stress élevé des les déterminants psychologiques. La compréhension de ces
étudiants et la tendance à consommer des produits psychoactifs déterminants devrait permettre de proposer par la suite des outils
[2,5] ainsi qu’avec le manque de pratique d’activités physiques favorisant le développement de certains de ces déterminants afin
[2,6–8]. Cette présence continue d’un état de stress chez les d’apprendre à ces étudiants à mieux gérer leur stress.
étudiants en soins infirmiers semble ainsi entraı̂ner des conduites
à risque et une sédentarisation, influencer négativement leur santé 2. Méthodologie
et finalement augmenter l’abandon en cours de formation.
Lorsqu’il s’agit de la perception de situations stressantes, il 2.1. Conception d’étude et population
existe également des différences interindividuelles. Par exemple,
les adolescents ayant un chronotype du matin ressentent moins de Cette étude a été menée en avril 2017 en Normandie. Elle
stress [9]. Une autre étude montre qu’une population d’étudiants concerne les étudiants de plusieurs formations : UFR STAPS, UFR
en santé ayant un chronotype du matin a également une faible médecine, UFR psychologie et les IFSI de trois départements de
probabilité de tabagisme, de consommation d’alcool, un faible Normandie (Calvados, Manche et Orne). À travers un questionnaire
niveau d’inactivité physique contrairement aux étudiants du soir évaluant les conduites à risques et la perception de la santé des
[10]. Certains déterminants psychologiques tels que les stratégies étudiants, le stress perçu, les traits de personnalité, l’estime de soi, les
de coping, les compétences émotionnelles (CE) et le niveau de CE, le coping, la résilience ainsi que le chronotype, il s’agit d’étudier, de
résilience, voire certaines dimensions de la personnalité ont manière quantitative, ces divers déterminants psychologiques afin de
également une influence significative sur la gestion du stress des déterminer si les étudiants en soins infirmiers sont plus stressés que
étudiants en soins infirmiers [11–16]. Ainsi, les étudiants qui les étudiants d’autres filières universitaires. La passation du
utilisent des stratégies de coping actives sont plus performants, questionnaire s’effectue en ligne grâce au logiciel LimeSurvey sur
expriment un sentiment de bien-être et perçoivent les situations le serveur de l’université de Caen-Normandie. Ce questionnaire a fait
moins stressantes alors que les étudiants qui utilisent des l’objet d’une déclaration à la CNIL. Le lien du questionnaire a été
stratégies d’évitement ont plus de risque de développer des transmis par voie électronique, via les identifiants universitaires,
problèmes de santé et d’abandonner leur formation [12]. Seyedfa- pour les étudiants inscrits en psychologie, santé et STAPS et à chaque
temi et ses collaborateurs observent que les étudiants infirmiers directeur de formation pour les étudiants en IFSI. Il s’agit ainsi d’un
qui possèdent un haut niveau de résilience perçoivent les échantillonnage non probabiliste volontaire.
situations comme étant moins stressantes [15]. D’autres travaux
révèlent que les étudiants en santé et en soins infirmiers qui 2.2. Mesures
possèdent des CE importantes gèrent mieux leur stress en
comparaison aux autres étudiants ayant de faibles CE [17–19]. Il 2.2.1. Évaluation des conduites à risques et perception de la santé des
existerait également une relation entre le niveau de CE et la santé étudiants
physique et psychologique des individus [20–23]. Enfin, il semble La population d’étudiants en soins infirmiers semble subir un
que les étudiants infirmiers ayant un trait de névrosisme élevé niveau élevé de stress corrélé à une consommation de substances
perçoivent les situations comme étant plus stressantes que celles psychoactives [2,5]. Les participants devaient répondre à une
ayant un trait de névrosisme faible [16]. première partie sur les données démographiques (, âge, sexe,

Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
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formation) et juger de leur état général de santé sur une échelle de l’individu fait de ces émotions. C’est de cette idée que la notion
Likert de 1 à 5. De plus, des questions portaient sur les conduites d’intelligence émotionnelle s’est développée. L’intelligence émo-
adoptées par l’étudiant pendant sa formation (Exemple : « À quelle tionnelle est ainsi définie comme un ensemble de compétences
fréquence consommez-vous des boissons contenant de l’alcool ? » ; concernant l’identification, la compréhension, l’expression, la
« Quelle est votre situation vis-à-vis du tabac ? » ; « Pratiquez-vous régulation, et l’utilisation de ses émotions et de celles des autres
une ou plusieurs activités physiques ? »). Ces questions sont pour la [29]. Le Profile of Emotional Competence (PEC) [30] est un
plupart issues du questionnaire proposé par l’OVE lors de son questionnaire évaluant l’intelligence émotionnelle en s’appuyant
enquête sur les conditions de vie des étudiants [1] et l’ensemble de sur le modèle à cinq CE de base développé par Mikolajczak [29]
cette partie a été validé collectivement avec les auteurs et des (c’est-à-dire, identification, régulation, compréhension, expression
responsables de formations IFSI et santé. et utilisation des émotions) à travers 50 items évalués sur une
échelle de 1 (« pas du tout ») à 5 (« très souvent »). Il permet
2.2.2. Évaluation du stress perçu (PSS10) d’obtenir un score dans chacune de ces CE, un score global de
La validation française de l’échelle du stress perçu (Perceived celles-ci ainsi qu’un score de compétences intrapersonnelles et
Stress Scale, [PSS]) [24] a été utilisée. Cette échelle est composée de interpersonnelles. L’utilisation de ce questionnaire nous permet de
10 items qui permettent d’évaluer la perception de débordement et comprendre comment vit et réagit l’étudiant face à ses émotions.
l’efficacité personnelle perçue sur une échelle de 1 (jamais) à 5
(souvent). Le score obtenu permet d’obtenir trois catégories : 2.2.6. Évaluation de la résilience (CD-RISC)
21 la personne sait gérer son stress, entre 22 et 26 la personne sait La plupart des auteurs s’accordent sur le fait que la résilience se
gérer globalement le stress même si elle éprouve quelques rapporte à la capacité d’un individu à faire face, à surmonter une
difficultés dans certaines situations, 27 la personne subit les situation difficile et stressante, à rebondir. Le Connor-Davidson
situations sans savoir y faire face. Cet outil est adapté au monde Resilience Scale (CD-RISC) [31] est un questionnaire composé de
professionnel et permet de prendre connaissance des sensations 25 items évalués sur une échelle de 1 (« pas du tout ») à 5 (« presque
ressenties par les étudiants en formation. toujours ») et validé en français [32]. Il évalue cinq capacités de
résilience : l’exigence, la tolérance au stress, la capacité à rebondir,
2.2.3. Évaluation des traits de personnalité (BFI) le sentiment de contrôle et la spiritualité. Il permet d’observer les
Le modèle des cinq grands facteurs de la personnalité ou Big capacités de l’étudiant à s’adapter face à diverses situations.
Five fait relativement consensus dans l’évaluation de la
personnalité. Il s’agit d’un système taxinomique mesurant les 2.2.7. Évaluation de l’estime de soi (RSES)
traits de la personnalité. La validation française du modèle des L’estime de soi est un concept qui renvoie au jugement global
cinq grands facteurs de la personnalité a été utilisée [25]. Cet positif ou négatif qu’une personne à d’elle-même. L’échelle
inventaire comprend 45 items et présente de courtes phrases d’estime de soi de Rosenberg traduite et validée en français par
basées sur des adjectifs de traits de personnalités connus dans la Vallières et Vallerand [33] permet d’évaluer l’estime de soi globale.
littérature pour être des « marqueurs » des cinq facteurs. Chaque Ce questionnaire est composé de 10 items évalués sur une échelle
item est évalué sur une échelle de 1 (« désapprouve fortement ») à de 1 (« tout à fait en désaccord ») à 4 (« tout à fait d’accord »). Il nous
5 (« approuve fortement »). John, Donahue et Kentle [26] permet de comprendre comment l’étudiant se juge.
présentent le Big Five Inventory (BFI) par cinq lettres (par ordre
d’importance) accompagnées d’adjectifs qualificatifs : E (Extra- 2.2.8. Évaluation du chronotype (CCQ)
version, énergie, enthousiasme), A (Agréabilité, altruisme, affec- Le chronotype est un trait relativement stable de la personnalité
tion), C (Conscience, contrôle, contrainte), N (Emotions négatives, qui réfère à la tendance à préférer et être plus performant le matin
névrosisme, nervosité), O (Ouverture, originalité, ouverture ou le soir. Le Caen Chronotype Questionnaire [34] est une
d’esprit). Ce questionnaire permet d’observer s’il existe chez validation française revisitée du Chronotype Questionnaire
ces étudiants des traits de personnalité en lien avec un niveau de d’Oginska [35] composé de 16 items évalués sur une échelle de
stress élevé. 1 (« pas du tout d’accord ») à 5 (« tout à fait d’accord »). Il évalue le
type de chronotype de l’individu (matin ou soir) ainsi que son
2.2.4. Évaluation des stratégies de coping (Brief COPE) amplitude. Un score élevé sur le chronotype indique une
Le coping (c’est-à-dire, les stratégies pour faire face ou stratégies préférence pour le soir alors qu’une amplitude élevée signifie
d’adaptation) est défini comme les efforts comportementaux et des différences d’éveil importantes au cours de la journée. Il
cognitifs d’un individu pour gérer les exigences internes et semblerait que les étudiants avec un chronotype non matinaux
externes rencontrées lors d’une situation de stress spécifique ressentiraient un plus haut niveau de stress et présenteraient plus
[12,19,27]. Le Brief Coping Orientation to Problem Experienced (Brief de symptômes dépressifs que ceux avec un chronotype du matin
COPE) [27] validé en version française par Muller et Spitz [28] est [10].
un inventaire court et multidimensionnel de 28 items évaluant
14 dimensions distinctes du coping selon deux items chacun sur 2.3. Méthode d’analyse des données
une échelle de 1 (« pas du tout ») à 4 (« toujours »). Ces
14 dimensions évaluées sont le coping actif, la planification, le Les données sont traitées de manière anonyme et dans leur
soutien instrumental, le soutien émotionnel, l’expression des globalité. Dans un premier temps, une régression linéaire multiple
sentiments, la réinterprétation positive, l’acceptation, le déni, le est effectuée afin d’expliquer ou de prédire la variance de la
blâme, l’humour, la religion, la distraction, l’utilisation de variable dépendante (C’est-à-dire, le stress perçu) à l’aide d’une
substances et le désengagement corporel. Ce questionnaire permet combinaison de facteurs explicatifs (c’est-à-dire, variables indé-
d’évaluer les stratégies d’adaptation au stress utilisées par les pendantes correspondant aux différents déterminants psycholo-
étudiants. giques). La méthode étape par étape est choisie afin d’obtenir les
différentes possibilités de modélisation. Des analyses de variance
2.2.5. Évaluation des compétences émotionnelles (PEC) sont également réalisées afin d’examiner les éventuelles différen-
Les émotions, parfois dysfonctionnelles, peuvent également ces significatives entre les différentes formations à partir du
remplir des fonctions essentielles à l’adaptation de l’homme dans modèle de régression linéaire. Ceci permet d’observer les
de multiples domaines. Cette adaptation est déterminée par ce que caractéristiques psychologiques propres aux étudiants selon leur

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Tableau 1 santé : 51 % ; psycho : 41 %) alors que les étudiants en STAPS sont


Description des groupes de formation.
100 % à pratiquer régulièrement.
F H Mâge (EC)

IFSI 3.2. Régression linéaire multiple


A1 89 9 22,91 (5,94)
A2 74 6 23,99 (5,59) La régression linéaire multiple montre que plusieurs variables
A3 114 9 25,49 (6,20) indépendantes sont corrélées de manière significative (p < 0,001)
277 24 24,25 (6,04)
avec la variable dépendante « stress perçu » : le névrosisme
Psycho
A1 18 0 21,17 (5,16) (r = 0,415), l’ouverture (r = 0,146), la santé perçue (r = 0,432), le
A2 12 2 21,38 (2,13) coping soutien émotionnel (r = 0,251), le coping blâme (r = 0,195),
A3 7 3 23,60 (4,14) le coping actif (r = 0,134), le coping planification (r = 0,152), l’estime
37 5 21,81 (4,16)
de soi (r = 0,231), la compréhension de ses propres émotions
Santé
A1 56 14 19,21 (0,83) (r = 0,282), l’expression émotionnelle (r = 0,151), la régulation
A2 3 3 20,17 (0,75) de ses propres émotions (r = 0,205), l’utilisation de ses propres
A3 8 3 21,82 (1,08) émotions (r = 0,176), l’intelligence émotionnelle intrapersonnelle
67 20 19,61 (1,22) (r = 0,183), la tolérance au stress (r = 0,033), et, l’amplitude du
STAPS
chronotype (r = 0,224). Les corrélations entre ces variables
A1 28 14 19,28 (0,63)
A2 8 7 20,47 (1,06) indépendantes sont inférieures à r = 0,750 limitant ainsi le risque
A3 13 19 23,25 (2,79) de multicolinéarité.
49 40 20,91 (2,53) L’analyse ne retient que sept variables indépendantes qui ont
A1 : première année ; A2 : deuxième année ; A3 : troisième année et plus ; F : atteint un seuil de significativité F à p < 0,05 : la santé perçue, le
femme ; H : homme ; M : moyenne ; EC : écart-type. Caractères en gras : nombre névrosisme, la tolérance au stress, le coping actif, la compréhension de
total de participants et moyenne d’âge. ses propres émotions, l’amplitude du chronotype, et l’utilisation de
ses propres émotions. Le modèle proposé avec sept variables
indépendantes est significatif et le tableau suivant (Tableau 2)
formation d’appartenance qui pourraient expliquer leur niveau de
permet de déterminer la contribution de chaque bloc de variables. La
stress. Les analyses descriptives des données, la régression linéaire
valeur de la corrélation multiple (R) représente la force de la relation
multiple ainsi que les analyses de variance (c’est-à-dire, variables
entre le stress perçu et les combinaisons des variables indépendantes
dépendantes : stress perçu) sont effectuées à l’aide du logicielle
de chaque modèle. Ces valeurs sont supérieures à 0,4 suggérant que
SPSS (version 22).
ces données sont ajustées de manière satisfaisante au modèle. On
observe que chaque étape contribue significativement à l’améliora-
3. Résultats tion de l’explication de la variabilité du stress perçu. La valeur du test
de Durbin-Watson est de 2,072, indiquant qu’il y a peu de risque de
3.1. Données descriptives problème au niveau de l’indépendance des erreurs. Finalement en
multipliant par 100 la valeur de chaque R2, on obtient le pourcentage
Cinq cent dix-neuf étudiants ont participé à cette étude. Ils sont de variabilité du stress perçu expliqué par les différents prédicteurs.
issus de quatre UFR et structures de formation : IFSI (n = 301), Ainsi, 18,6 % du stress perçu est expliqué par la santé perçue (4,6 % par
psychologie (n = 42), santé (n = 87) et STAPS (n = 89). Ainsi les le névrosisme. . .).
réponses complètes analysées représentent 430 femmes et
89 hommes. La moyenne d’âge est de 22,70 ans (SD = 5,24) 3.3. Analyse de variance
(Tableau 1).
Concernant les conduites des étudiants interrogés (alcool et On observe un effet significatif de la formation suivie sur :
tabac), les participants les plus consommateurs de ces substances
sont les étudiants en IFSI (35 %) et en santé (23 %) contre 18 % pour  le stress perçu, F (3,515) = 3,371, p < 0,05, h2 = 0,035 ; les
les étudiants en STAPS et 15 % en psycho. Ces étudiants dans le étudiants en santé (M = 32,358, SD = 5,265) et en IFSI
domaine de la santé sont également plus de la moitié à pratiquer (M = 32,403, SD = 4,442) montrent des scores plus élevés que
rarement ou jamais une activité physique ou sportive (IFSI : 54 % ; les étudiants en psychologie (M = 30,269, SD = 6,296) et en

Tableau 2
Récapitulatif des modèles.

Modifier les statistiques


h 2 2
Modèle R R R ajusté Erreur standard de l’estimation Variation de R2 Variation de F ddl1 ddl2 Sig. Variation de F Durbin-Watson
a
1 0,432 0,186 0,184 4,27300 0,186 89,794 1 392 0,000 2,072
2 0,482b 0,233 0,229 4,15502 0,046 23,576 1 391 0,000
3 0,540c 0,292 0,286 3,99731 0,059 32,462 1 390 0,000
4 0,556d 0,310 0,302 3,95152 0,018 10,093 1 389 0,002
5 0,574e 0,329 0,320 3,90048 0,019 11,247 1 388 0,001
6 0,584f 0,341 0,330 3,87180 0,012 6,769 1 387 0,010
7 0,590g 0,348 0,336 3,85467 0,008 4,447 1 386 0,036
a
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue.
b
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N.
c
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N, RESIL_Tolerance.
d
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N, RESIL_Tolerance, COP_Actif.
e
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N, RESIL_Tolerance, COP_Actif, IE_ComprehensionPerso.
f
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N, RESIL_Tolerance, COP_Actif, IE_ComprehensionPerso, DI_Scale.
g
Prédicteurs : (Constante), Santé_percue, N, RESIL_Tolerance, COP_Actif, IE_ComprehensionPerso, DI_Scale, IE_UtilisationPerso.
h
Variable dépendante : StressPercuScore.

Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
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STAPS (M = 30,081, SD = 4,417). On observe également que le mateurs de ces substances sont d’ailleurs les étudiants en IFSI et en
niveau de stress perçu augmente de manière significative lors de santé, mais également que ces derniers restent les moins
la troisième année pour les étudiants en IFSI pratiquants d’activités physiques ou sportives. Les personnes qui
(MA1 = 31,857, MA2 = 31,636, MA = 33,298) ; pratiquent une activité physique régulière seraient moins stressées
 la santé perçue, F (3,515) = 0,820, p < 0,001, h2 = 0,049 ; les que celles ne pratiquant pas d’activité physique [6–8,38]. Nos
étudiants en santé (M = 1,379, SD = 1,374) montrent un score résultats confirment ceux obtenus par Sundbald et collaborateurs
significativement plus faible que celui des étudiants en IFSI [39] selon lesquels les étudiants physiquement inactifs présentent
(M = 1,790, SD = 1,420) et les étudiants de STAPS (M = 2,461, une faible perception de leur état de santé et un niveau de stress
SD = 1,415) et psychologie (M = 2,095, SD = 1,574) montrent des plus élevé que les étudiants actifs, la pratique d’activité physique
scores significativement les plus élevés ; étant un moyen efficace pour améliorer la santé psychologique,
 sur la dimension tolérance de la résilience, F (3,515) = 3,072, physique et émotionnelle des étudiants [40]. Finalement, la
p < 0,05, h2 = 0,025, les étudiants en IFSI (M = 21,477, question de la relation entre le stress et la santé perçus reste
SD = 4,960) montrent des scores significativement moins élevés posée. En effet, si ces deux variables sont indéniablement liées dans
que les autres étudiants (psychologie : M = 24,700, SD = 6,183 ; cette étude, les données ne permettent pas de déterminer quel est le
STAPS : M = 23,932, SD = 4,558 ; santé : M = 23,418, SD = 3,947) ; sens de cette relation essentielle (c’est-à-dire, le stress déterminant
 sur l’amplitude du chronotype, F (3,515) = 4,579, p < 0,005, de l’état de santé ou l’inverse).
h2 = 0,029, les étudiants en santé (M = 3,267, SD = 0,876) Le stress perçu peut également être expliqué à 4,6 % par le trait
montrent un score significativement plus élevé que les étudiants de personnalité N du Big Five ( névrosisme). Ce résultat confirme
en STAPS (M = 2915, SD = 0,928), en IFSI (M = 2,704, SD = 1,449), ceux de précédents travaux [16,41] selon lesquels les personnes
et en psychologie (M = 2,432, SD = 1,539). ayant un trait de névrosisme élevé perçoivent les situations plus
stressantes que celles ayant un trait de névrosisme faible. Le
névrosisme ou névrotisme est un trait de personnalité caractérisé
par une tendance à percevoir son environnement comme
4. Discussion menaçant et difficile à gérer. De plus, ce trait de personnalité est
lié à l’anxiété, à la dépression et à l’épuisement professionnel
Les résultats de cette étude révèlent que les étudiants en IFSI et [13,17] et peut également être mis en relation avec la capacité de
en Santé présentent le niveau de stress le plus élevé par rapport aux résilience de l’étudiant puisqu’une corrélation négative entre
étudiants des deux autres formations étudiées, confirmant ainsi les résilience et névrosisme est observée [42,43]. Toutefois, il n’existe
observations menées par l’OVE [1] et les travaux de Neveu et ses aucune différence significative entre les diverses formations
collaborateurs sur les filières universitaires [36]. La littérature a étudiées.
d’ailleurs émis plusieurs hypothèses pour expliquer ce constat Le modèle montre également que la capacité de résilience de
notamment en se focalisant sur les spécificités des différentes tolérance au stress est corrélée négativement au stress et la
formations. Par exemple, les études dans le domaine de la santé tolérance des étudiants en IFSI semble être moins élevée. Ce
(exemple : en UFR santé et en IFSI) exigent un volume horaire résultat confirme les travaux de Seyedfatemi et collaborateurs [15]
important et une forte implication des étudiants pour réussir qui ont observé une corrélation négative entre le stress perçu et la
[1,12]. De plus, le niveau de stress perçu augmente de manière résilience chez des étudiants en soins infirmiers. Ces derniers qui
significative lors de la 3e année en IFSI comme ont pu le démontrer possèdent un bas niveau de résilience, sont plus vulnérables et
Lamaurt et ses collaborateurs [2]. Le projet professionnel pourrait développent davantage de problèmes psychologiques comme la
alors être l’un des déterminants de ce stress [37]. En fait, certains dépression ou l’anxiété [44]. La résilience reste un concept
étudiants pourraient ne pas se sentir suffisamment prêts à exercer complexe qui implique la capacité à s’adapter dans un contexte
leur métier et exprimeraient alors un manque de compétences menaçant pour le fonctionnement ou le développement l’individu.
pratiques. La mise en situation professionnelle devient une source Les personnes résilientes sont ainsi plus aptes à faire face aux
majeure de stress en raison de ce manque d’expérience facteurs de stress rencontrés au quotidien. De plus, les personnes
[1,12]. L’influence de l’expérience et de la compétence perçue résilientes qui possèdent des stratégies de coping efficaces sont
semble ainsi déterminante. D’ailleurs, plus l’expérience profession- moins affectées par des situations de vie défavorables [45] et
nelle augmente, moins le stress est présent chez les infirmiers [17]. déclarent avoir une santé mentale et physique ainsi qu’une qualité
L’objectif principal de la présente étude est d’examiner un de vie meilleure [46].
ensemble de caractéristiques psychologiques et d’établir les Une corrélation négative est d’ailleurs observée entre le coping
relations entre elles. Le modèle issu de la régression linéaire actif et le stress perçu. En effet, les étudiants qui perçoivent le
multiple met en évidence sept variables qui sont corrélées de moins de stress semblent utiliser des stratégies de coping actives
manière significative avec le stress perçu chez les étudiants de visant à faire face aux problèmes rencontrés [12,36,47]. De
quatre formations différentes. Tout d’abord, une corrélation positive précédents travaux montrent que les étudiants en soins infirmiers
a été observée entre le niveau de stress et la santé perçue. Les utilisent pour la plupart des stratégies de coping inefficaces face au
étudiants qui ont une perception négative de leur état de santé ont stress [48,49] ce qui pourrait expliquer le niveau de stress élevé. De
un niveau de stress plus élevé que les autres. On peut s’interroger plus, les étudiants qui utilisent des stratégies de coping actif ont de
sur le sens de ce lien. En effet, l’état de santé peut être un meilleures performances cliniques (c’est-à-dire, diagnostic),
déterminant du stress, mais la réciproque peut également être apprennent mieux et expriment un bien-être plus élevé que ceux
évoquée. Le stress est à l’origine de diverses problématiques de qui utilisent des stratégies passives [12]. L’évitement du problème
santé tant sur le plan physique que psychologique pouvant par l’étudiant a, par contre, des effets plus néfastes sur la santé
expliquer ce faible niveau de santé perçue (exemples : problème [12]. En complément, le faible pourcentage de consommation de
de sommeil, troubles somatiques, dépression, anxiété, burn out) substances psychoactives par les étudiants en STAPS et en
[16]. Cette santé perçue peut également être mise en lien avec les psychologie peut être mis en lien avec une utilisation de stratégies
comportements à risque des étudiants. En effet, l’usage de de coping actif. Des travaux de McConnel, Memetovic et Richardson
substances psychoactives ainsi que le manque d’activité physique [50] ont montré qu’un niveau de coping actif élevé était associé à
peuvent être responsables, sur le long terme, de problèmes de santé. une utilisation plus faible de tabac et marijuana tandis qu’un
On observe dans cette étude que les étudiants les plus consom- niveau de coping d’évitement élevé était associé à une plus grande

Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
Publique (2018), https://doi.org/10.1016/j.respe.2018.09.004
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probabilité de consommation de ces substances. Ces relations et de substances telles que l’alcool ou le tabac. Or, la présente étude
hypothèses semblent pouvoir concerner l’ensemble des étudiants montre que les étudiants en soins infirmiers et en santé sont les
puisque les formations ne diffèrent pas sur cette caractéristique. plus inactifs physiquement et ont une consommation de sub-
Les stratégies de coping utilisées peuvent également être liées stances psychoactives plus importantes que les étudiants d’autres
au niveau de CE. L’augmentation générale du niveau de CE a pour formations. Ainsi, il pourrait être envisagé d’intégrer à la formation
conséquence l’adoption de stratégies de coping actives et efficaces en soins infirmiers des unités d’enseignement allouées au
face au stress [19,21,51]. Dans le modèle obtenu, le stress perçu est développement des compétences émotionnelles. D’ailleurs quel-
corrélé négativement avec la capacité de l’étudiant à comprendre ques travaux ont déjà montré l’efficacité de tels programmes [59–
et à utiliser ses émotions. Les étudiants qui utilisent et 61]. L’idée d’examiner ces liens et de développer ces CE de manière
comprennent leurs émotions pourraient mieux gérer leur stress plus précoce et préventive, au cours du cursus de formation, paraı̂t
[17–19]. Le niveau de santé perçue par ces étudiants peut pertinente.
également être mis en relation avec leur niveau de CE. En effet, Au-delà des résultats obtenus, il convient de noter que cette
de précédentes études ont mis en évidence l’existence d’une étude présente quelques limites. En effet, elle a été réalisée
relation entre le niveau de CE et la santé physique et psychologique exclusivement à l’aide de questionnaires d’autoévaluation impli-
des individus [20–23]. Ainsi, l’amélioration de ces CE permettrait quant par conséquent de potentiels biais. Le biais de désirabilité
aux étudiants de mieux gérer leur stress et ainsi d’être en meilleure sociale et les artefacts du questionnement sont les plus réguliè-
santé [17]. Certains travaux relatent même une diminution du rement évoqués dans la littérature [62]. Pour le premier, le
risque de développer un burn out pour les personnes ayant un haut répondant veut tenter de se montrer sous un jour favorable. Pour le
niveau de CE [51–53]. L’amélioration de ces CE pourrait permettre second, il peut s’agir de plusieurs biais tels qu’une sensibilité aux
de réduire le burn out alors que la profession infirmière est la plus signes du questionnement pour laquelle le répondant est vigilant
touchée par ce syndrome. De plus, il semble que les étudiants qui sur les liens existant entre les questions et ainsi tente de deviner
pratiquent régulièrement de l’activité physique ont un niveau de l’objectif de l’étude, et, enfin, la motivation à répondre de façon
CE plus élevé et ainsi gèrent mieux leur stress et s’adapteraient positive ou négative [62,63]. De plus, cette étude concerne
mieux que les étudiants inactifs [40]. Toutefois, cette hypothèse ne uniquement les étudiants volontaires de l’université de Caen-
semble pas se vérifier dans cette étude puisque les étudiants Normandie et des IFSI des départements du Calvados, de l’Orne et
pratiquant ( STAPS) ne diffèrent pas des autres étudiants sur ces de la Manche avec un échantillonnage non probabiliste. Il est ainsi
deux dimensions des CE. possible que ce groupe d’étudiants ne soit pas représentatif de la
Enfin, le modèle montre une corrélation entre le stress perçu et population estudiantine. Par exemple, il se peut que seuls les
l’amplitude du chronotype. La diminution de l’amplitude d’un étudiants soucieux de la question du stress en formation aient eu
rythme peut indiquer des problèmes de santé comme la dépression tendance à participer à l’étude, et ainsi, engendrer un biais
[54]. Ainsi, plus les rythmes sont organisés, plus ils sont amples et méthodologique. Il aurait été également intéressant de comparer
plus l’organisme fonctionne de manière optimale. La santé perçue ces étudiants à ceux d’autres régions pour observer si le stress
des étudiants étant corrélée également avec le stress perçu, on peut perçu était expliqué par ce même modèle. En effet, les régions
donc penser que les étudiants qui perçoivent leur santé de manière peuvent avoir mis en place des modalités de formations, de suivi et
négative et qui présentent un niveau de stress élevé vont avoir des d’encadrement différentes. Enfin, l’évaluation de ces différents
rythmes de faible amplitude. Les étudiants en santé ont des scores déterminants psychologiques s’est effectuée sur un temps court et
plus élevés et ainsi une amplitude réduite. Ces derniers présentent sur une période proche de la période des examens, ce qui peut avoir
une forte charge de travail pouvant causer un stress et influencer la influencé le niveau de stress perçu des étudiants. Il serait
qualité et/ou la durée de leur sommeil. D’ailleurs, Almojali et également intéressant de réaliser un travail qualitatif complé-
collaborateurs [55] ont mis en évidence que les étudiants qui ne mentaire à travers des entretiens avec des étudiants en soins
souffraient pas du stress étaient moins susceptibles d’avoir une infirmiers et éventuellement en santé pour savoir comment ces
mauvaise qualité du sommeil. De plus, il semble qu’une faible derniers, avec des niveaux de CE différents, font face à des
dépense énergétique et un mode de vie sédentaire participe à une situations stressantes notamment durant leur stage. Cette
diminution de l’amplitude des rythmes biologiques [56]. Ainsi, le méthode qualitative permettrait de réduire les biais obtenus par
manque d’activité physique exprimé par les étudiants en santé les questionnaires auto-administrés en couplant avec un échan-
peut être mis en lien avec le stress perçu et pourrait expliquer le tillonnage probabiliste. En effet, l’entretien permettrait d’analyser
faible niveau d’amplitude du chronotype. le sens que les étudiants donnent à leur formation et aux
L’ensemble de ces résultats confirme le niveau élevé de stress évènements (exemple : stressants) auxquels ils peuvent être
perçu chez les étudiants en soins infirmiers tout en soulignant confrontés. De plus, un entretien permet de garantir la liberté de la
plusieurs facteurs déterminants de cette perception. Si certains de réponse orale et une certaine souplesse pour l’interviewer.
ces facteurs sont relativement stables et trans-situationnels En conclusion, le modèle issu de la régression linéaire multiple
(exemples : personnalité, chronotype), d’autres peuvent faire permet d’observer que des caractéristiques psychologiques sem-
l’objet d’une attention particulière afin de les améliorer ou de blent influencer le niveau de stress des étudiants. Si cela confirme
limiter leur impact négatif (exemples : CE, coping). S’il est possible certains travaux, les analyses de variance montrent également que
de distinguer et de différencier chaque facteur et ainsi de proposer les étudiants en santé et en IFSI diffèrent des autres étudiants sur
des interventions ou des programmes pour les développer, une une différence individuelle qui est la résilience dans sa dimension
autre approche permettrait de travailler ces différents facteurs en tolérance au stress. De plus, les formations en STAPS et en
un seul programme. Des études ont démontré qu’un haut niveau de psychologie présentent un niveau de santé perçue ainsi qu’une
CE était corrélé positivement avec une bonne santé physique et pratique physique régulière supérieure aux formations en santé et
psychologique, ainsi les performances académiques et cliniques en IFSI. Elles présentent également un niveau de stress et une
[17–19,57]. De plus, Li, Lu et Wang [40] ont démontré que les consommation de substances psychoactives moindre contraire-
étudiants qui pratiquaient régulièrement de l’activité physique ment à ces deux dernières formations. Les formations de santé
avaient un niveau de CE plus élevé. Ces derniers géraient mieux étant plus sujettes au stress que les autres, il serait alors judicieux
leur stress et s’adaptaient davantage que les étudiants inactifs. de mettre en place des outils au sein de ces formations afin de
Enfin, Trinidad et Johnson [58] ont, quant à eux, mis en évidence permettre à ces étudiants une meilleure gestion du stress. Les
que les CE étaient corrélées négativement avec la consommation programmes d’intervention de développement des CE pourraient

Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
Publique (2018), https://doi.org/10.1016/j.respe.2018.09.004
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Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
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Pour citer cet article : Dugué M, et al. Déterminants psychologiques du stress chez les étudiants en soins infirmiers. Rev Epidemiol Sante
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